Québec Pharmacie Décembre

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Dégénérescence maculaire liée à l’âge et produits en vente libre Films de buprénorphine/naloxone par voie sublinguale ou buccale

ANÉMIE DE GROSSESSE

3 h 30 DE FC

N° d’accréditation de l’OPQ

10114

La référence en formation continue

NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2021 VOL. 68 N˚ 6

Substitution de médicaments biologiques, cas de l’infliximab


LE PREMIER ET LE SEUL AR DU GLP-1 ORAL*

AMÉLIORATION DÉMONTRÉE DE LA

MAÎTRISE GLYCÉMIQUE

SOUS RYBELSUS

®

RYBELSUS BELSUS® 14 mg a entraîné1 : RÉDUCTION DU TAUX D’A1C P/R AU DÉPART • 1,3 % p/r à 0,8 % avec Januvia® 100 mg (p < 0,0001)2 • Les deux + MET ± SU à 26 semaines; taux initial moyen d’A1C 8,3 % (RYBELSUS® 14 mg; n = 465) et 8,3 % (Januvia® 100 mg; n = 467)

RÉDUCTION DU POIDS P/R AU DÉPART • 3,1 kg p/r à 0,6 kg avec Januvia® 100 mg (p < 0,001; 2e critère d’évaluation)2 • Les deux + MET ± SU à 26 semaines;; poids p corporel p initial moyen 91,2 kg (RYBELSUS® 14 mg; n = 465) et 90,9 kg (Januvia® 10 100 mg; n = 467) RYBELSUS® n’est pas indiqué pour la perte de poids.

RYBELSUS® (comprimés de sémaglutide) est indiqué comme traitement d’appoint à un régime alimentaire et à un programme d’exercice afin d’améliorer la maîtrise de la glycémie chez les adultes atteints de diabète sucré de type 2, en association avec d’autres produits médicinaux pour le traitement du diabète (voir la section sur les essais cliniques dans la monographie de produit pour connaître les populations de patients et les associations médicamenteuses testées)1.

Usage clinique : RYBELSUS® 1 ni pour le traitement de l’acidocétose diabétique. L’utilisation de RYBELSUS® n’est pas indiquée chez les enfants. Une plus grande sensibilité de certaines personnes âgées ne peut être écartée. L’expérience thérapeutique chez les patients âgés de ≥ 75 ans est limitée.

Mises en garde et précautions pertinentes : • sécrétagogues de l’insuline ou d’insuline • Conduite de véhicules et utilisation de machines • Effets CV : augmentation de la fréquence cardiaque, allongement de l’intervalle PR • Pancréatite

Contre-indications : • Antécédents personnels ou familiaux de carcinome médullair oïde ou adénomatose

• Grossesse ou allaitement Mises en garde et précautions les plus importantes : Risque de tumeurs des cellules C de la thyroïde : Le sémaglutide provoque des tumeurs des cellules C oportionnelle au traitement, à des expositions cliniquement pertinentes, chez des rats et des souris des deux sexes. On ignore si le sémaglutide peut causer des tumeurs des cellules C de oïde chez l’humain. On doit informer les patients oïde et les renseigner

des antécédents de la maladie afin de détecter toute aggravation • Insuffisance rénale : la présence d’effets indésirables GI graves justifie une surveillance de la fonction rénale; des cas d’insuffisance rénale aiguë et d’aggravation d’une insuffisance rénale chronique ont été signalés • Fertilité • Insuffisance hépatique Pour de plus amples renseignements : Veuillez consulter la monographie de produit au RYBELSUSPM-F.ca pour obtenir plus de renseignements sur les réactions indésirables, les interactions médicamenteuses et les renseignements posologiques, qui n’ont pas été mentionnés dans cette publicité. Vous pouvez aussi obtenir la monographie de produit en composant le 1-800-465-4334.

Toutes les marques de commerce et les marques déposées sont la propriété de leurs propriétaires respectifs. RYBELSUS® est une marque déposée de Novo Nordisk A/S, utilisée sous licence par Novo Nordisk Canada Inc. Novo Nordisk Canada Inc., tél. : 905-629-4222 ou 1-800-465-4334. www.novonordisk.ca CA21RYB00013F © Novo Nordisk Canada Inc.

MEMBRE DE

Scannez ce code QR ou visitez le Rybelsus.ca pour voir une vidéo sur RYBELSUS® et découvrir des ressources utiles pour vous et vos patients!

* La signification clinique comparative n’a pas été établie. Adapté de la monographie de RYBELSUS®1; Rosenstock J, et al., 20192, voir la méthodologie de l’étude ci-dessous (PIONEER 3). AR du GLP-1 : agoniste du récepteur du glucagon-like peptide-1; CV : cardiovasculaire; GI : gastr Références : 1. Monographie de RYBELSUS® (comprimés de sémaglutide). Novo Nordisk Canada Inc., 2020. 2. Rosenstock J, et al. Ef olled with metformin ea: The PIONEER 3 randomized clinical trial. JAMA. 2019. Un essai à double insu de 78 semaines visant à comparer l’efficacité et l’innocuité de RYBELSUS® et de Januvia®. Au total, 1864 patients atteints de diabète de type 2 ont été répartis aléatoirement de manière à recevoir soit RYBELSUS® 3 mg (n = 466), RYBELSUS® 7 mg (n = 465), RYBELSUS® 14 mg (n = 465) ou de la sitagliptine 100 mg (n = 467) une fois par jour, tous en association avec la metformine seule ou la metformine et une sulfonylurée. Le critère d’évaluation principal était la variation du taux d’A1C constatée à la semaine 26 p/r aux valeurs initiales.


sommaire

novembre – décembre 2021

Éditorial Pharmacies de spécialité ?

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vol. 68

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n° 6

À vos soins Substitution de médicaments biologiques, cas de l’infliximab

Les pages bleues L’anémie durant la grossesse : « fer » le point sur les nouveautés

À votre service sans ordonnance Dégénérescence maculaire liée à l’âge et produits en vente libre

Avez-vous entendu parler de… Films de buprénorphine/ naloxone par voie sublinguale ou buccale

Accréditation valide du 1er décembre 2021 au 31 décembre 2022 Donne : 3 h 30 N° d’accréditation : 10114

répondez sur

Formation continue avec crédits universitaires : Cours et microprogrammes Formation continue sans crédit universitaire : Webconférences en direct et autoapprentissage en ligne

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Il y a un code unique pour la couverture de CONCERTA® par la RAMQ* CODE : SN280 Le remboursement de CONCERTA® est offert par la RAMQ* (avec le code « SN280 ») pour le traitement des patients avec un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité1.

Inscrit à l’annexe V, CONCERTA® n’est pas visé par la « méthode du prix le plus bas » de la RAMQ*. Autrement dit, la RAMQ* n’appliquera pas le prix le plus bas même si, pour une même dénomination commune, de même forme et de même teneur, deux fabricants ou plus ont des médicaments inscrits à la Liste des médicaments2.

CONCERTA® est le seul traitement anti-TDAH qui utilise la technologie OROS®, un système de libération contrôlée du médicament3†

CONCERTA® (chlorhydrate de méthylphénidate) est indiqué pour le traitement du TDAH chez les enfants (6 à 12 ans), les adolescents (13 à 18 ans) et les adultes (> 18 ans). Consultez la monographie de produit à l’adresse www.janssen.com/canada/fr/products pour obtenir des renseignements importants sur : • les contre-indications dans les cas de thyrotoxicose, d’artériosclérose en phase avancée, de maladie cardiovasculaire (CV) symptomatique, d’hypertension modérée à sévère ou de glaucome; chez les patients hypersensibles au méthylphénidate; et pendant un traitement avec des inhibiteurs de la monoamine-oxydase, ainsi que pendant un minimum de 14 jours suivant l’arrêt d’un traitement par un inhibiteur de la monoamine-oxydase; • les mises en garde et précautions les plus importantes concernant le risque de mort subite chez les patients présentant des anomalies cardiaques structurelles préexistantes ou d’autres troubles cardiaques graves, et le risque de pharmacodépendance; • les autres mises en garde et précautions pertinentes concernant la prise par voie orale; les patients qui présentent des sténoses digestives préexistantes; les patients qui participent à des exercices ou des activités vigoureux, qui prennent d’autres agents sympathomimétiques contre le TDAH ou qui ont des antécédents familiaux de mort subite ou mort cardiaque; les maladies CV et vasculaires cérébrales préexistantes; l’utilisation du médicament pour la prévention ou le traitement de la fatigue; l’hypertension et les autres affections CV; le risque d’inhibition de la croissance à long terme; les troubles vasculaires cérébraux; les tics et le syndrome de Gilles de la Tourette; les effets sur la capacité

Dr Luc Bo

123, rue Principa rdeau le, bureau 100 Sherbrooke (Qu ébec) H1R 4G6 Nom............... ......................... ......................... Adresse.......... ......................... . ......................... Âge.............. SO POUR VÉR ....................... IFICATION Date......../...... ../.............

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à conduire un véhicule ou à utiliser des machines; la pression intraoculaire et le glaucome; les cas de psychose et de trouble bipolaire préexistants, l’émergence de nouveaux symptômes psychotiques ou maniaques, l’agressivité, l’anxiété marquée et l’agitation, et les comportements et idéations suicidaires; le syndrome sérotoninergique lors d’une administration concomitante de médicaments sérotoninergiques; les symptômes extrapyramidaux lors d’une administration concomitante de certains antipsychotiques; la vasculopathie périphérique; les épreuves de laboratoire périodiques en cas de thérapie prolongée; le priapisme; l’utilisation chez les femmes enceintes ou qui allaitent; et la consommation d’alcool pendant le traitement; • les conditions d’usage clinique, les effets indésirables, les interactions médicamenteuses, la posologie et l’administration. Vous pouvez également vous procurer la monographie de produit en composant le 1-800-567-3331 ou le 1-800-387-8781. * Le mot RAMQ est une marque officielle de la Régie de l’assurance maladie du Québec. Pour de plus amples renseignements sur la RAMQ, visitez le site http://www.ramq.gouv.qc.ca/fr/regie/Pages/mission.aspx.

† La portée clinique comparative n’a pas été établie. Références : 1. Régie de l’assurance maladie du Québec. Codes des médicaments d’exception. En ligne à l’adresse : http://www.ramq.gouv.qc.ca/ SiteCollectionDocuments/professionnels/medicaments/codes-medicamentsexception/codes_medicaments_exception.pdf. Consulté le 15 juillet 2019. 2. Liste des médicaments. Régie de l’assurance maladie du Québec. En ligne à l’adresse : https://www.ramq.gouv.qc.ca/sites/default/files/documents/listemed-2020-12-16-fr.pdf. Consulté le 16 décembre 2020. 3. Monographie de CONCERTA® (chlorhydrate de méthylphénidate), Janssen Inc., 17 avril 2019.

L’image présente des modèles et sert à des fins d’illustration seulement. 19 Green Belt Drive | Toronto (Ontario) | M3C 1L9 | www.janssen.com/canada/fr © 2021 Janssen Inc. | Marques de commerce utilisées sous licence. | CP-201818F


éditorial

Christophe Augé, pharmacien, M. Sc., Ph. D., FOPQ Rédacteur en chef adjoint

Pharmacies de spécialité ? Depuis le temps que les pharmaciens d’établissement se battent pour faire reconnaître le titre, ô combien mérité, de « spécialiste », il est particulier que le terme « spécialité » soit utilisé pour désigner certaines pharmacies… On parle de pharmacies qui servent des « médicaments de spécialité ». OK, mais c’est quoi ? Personne n’en a la définition. Est-ce que le terme de « spécialité » est en lien avec la complexité du produit, des considérations logistiques, le suivi plus intense qu’il nécessite auprès des patients, la pathologie, son prix ? Ou peut-être avec la présence d’un programme de soutien aux patients (PSP) ? Aucune de ces réponses. Alors voilà, j’ose le dire : les médicaments de spécialité, ça n’existe pas. Dans les faits, j’y vois plus l’adaptation québécoise de ce qui se fait ailleurs, où des gestionnaires de PSP possèdent des pharmacies qui délivrent les molécules que les programmes gèrent. Ce sont donc les compagnies pharmaceutiques qui se trouvent à déterminer quelles sont les pharmacies de spécialité… et à choisir pour les patients les établissements où ils obtiendront leurs médicaments. Certains PSP diront que le patient a la liberté de choisir son pharmacien. Tout est relatif… Pas de choix pour les services compassionnels (sauf exception, que je salue) et, par la suite, si le patient veut changer, il lui faudra entreprendre une démarche active, et on lui fera, parfois, craindre la perte d’avantages pécuniaires. Donc, une décision pas tout à fait libre et certainement pas éclairée. Ces pratiques sont-elles « anormales », voire « illégales » ? Peut-être bien, mais il est clair que les PSP font maintenant partie intégrante du système et qu’ils sont là pour rester. Est-ce un mal ? Je ne le pense pas, il y a de bons côtés, ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain. Reste au législateur québécois à ajuster les lois pour définir ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas, et surtout aux organismes responsables à s’assurer de les respecter. J’ai commencé par taper fort, alors je vais m’adoucir… Certaines de ces pharmacies ont acquis une expertise qui répond à un besoin réel des patients. La gestion logistique, les conseils et les suivis sont généralement d’excellente qualité. Mais n’y a-t-il qu’une poignée de pharmacies au Québec capables d’en faire autant ? Ces pharmaciens sont-ils des pharmaciens « spéciaux » ? À cela, je réponds non. Ils sont davantage formés, voilà tout. Les pharmaciens québécois sont en moyenne très bons et beaucoup d’entre eux sont en mesure de se former et d’offrir des soins pharmaceutiques de qualité dans de nombreux domaines, aussi complexes soient-ils… Si on leur en laisse la chance. En démocratisant l’accès à ces médicaments dits « de spécialité », les pharmaciens deviendront meilleurs. J’ai rarement vu un patient faire une surdose d’anti-TNFα. Mais une surdose d’insuline peut être fatale, et on en sert tous. En revanche, il faudrait que nous soyons conséquents… Propriétaire ou salarié, si vous recevez une ordonnance pour laquelle vous n’avez pas les connaissances et/ou les compétences, prendrez-vous le temps de vous former, ou encore, aurez-vous la rigueur d’adresser votre patient à un collègue ? Si je reprends les termes du code de déontologie, serez-vous capable de subordonner votre intérêt personnel à celui de votre patient ? C’est peut-être parce qu’ils n’ont pas confiance qu’ils répondront unanimement oui et que certains prescripteurs et pharmaciens hospitaliers font appel à ces pharmacies, pour s’assurer que le travail sera fait (même si c’est au prix du libre choix du patient). Il y a quelques semaines, je suivais une formation en sclérose en plaques et je me disais « coudonc, je suis donc bien perdu ! ». J’ai réalisé que les patients ont quasiment tous disparu depuis plusieurs années; n’utilisant plus ces connaissances, je les ai perdus. Un exemple sur combien ? Comme tout devient de plus en plus pointu, si on continue dans cette voie, les pharmacies communautaires seront bientôt cantonnées aux antibiotiques et à l’aspirine. n

« En démocratisant l’accès à ces médicaments dits “de spécialité”, les pharmaciens deviendront meilleurs. »

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CreonMD 35 est inscrit à la Liste des médicaments du Québec en date du 7 juillet 2021

Aide puissante à la digestion CreonMD 35, élaboré pour réduire le nombre de capsules à prendre chez les patients ayant besoin d’une dose élevée1 (>70 000 unités de lipase) Exemple de schéma posologique* NEUR

NOUVELLE TE

2= Repas principal

MD

MD

1= Collations

MD

Creon MinimicrosphèresMD (pancréatine) est indiqué chez l’adulte et l’enfant pour : le traitement de l’insuffisance pancréatique exocrine attribuable à la fibrose kystique, à la pancréatite chronique ou à toute autre atteinte pancréatique définie médicalement qui peut requérir une thérapie à base d’enzymes pancréatiques. Consultez la monographie de produit au https://produits-sante.canada.ca/dpd-bdpp/index-fra.jsp afin d’en savoir plus sur les conditions de l’utilisation clinique, les contre-indications, les mises en garde, les précautions, les effets indésirables, les interactions médicamenteuses ainsi que la posologie. La monographie de produit peut également être obtenue en téléphonant à BGP Pharma ULC au 1 844 596-9526. *Ceci est un exemple de schéma posologique pour des patients qui ont besoin d’une dose élevée de TSEP, y compris, mais sans s’y limiter, les patients souffrant d’un cancer du pancréas, d’une fibrose kystique, d’une pancréatite chronique ou ceux ayant subi une intervention chirurgicale pancréatique. La posologie de Creon Minimicrosphères doit être ajustée en fonction de la gravité de l’IPE, de manière à minimiser la stéatorrhée et en tenant compte de l’état nutritionnel1. Référence(s) 1. CREON MINIMICROSPHÈRESMD [monographie de produit]. BGP Pharma ULC, Etobicoke (Ontario); le 5 décembre 2019. Creon est une marque déposée de BGP Products Operations GmbH, utilisée sous licence par BGP Pharma ULC, une société de Viatris. VIATRIS et VIATRIS & Design sont des marques de commerce de Mylan Inc., utilisées avec permission par BGP Pharma ULC, une société de Viatris. ©2021 Viatris Inc. Tous droits réservés. 85 Advance Road, Etobicoke (Ontario) M8Z 2S6 | 1 844 596-9526 CRE-2021-0888B – OC2021


à vos soins

Rédaction

Révision

Christophe Augé, Pharmacien, M. Sc., Ph. D., FOPQ, Pharmacie Christophe Augé et Patricia Tremblay, Ascot Corner.

Patrick Nguyen, M. D., rhumatologue, CIUSSS-MCQ.

Substitution de médicaments biologiques, cas de l’infliximab Objectifs d’apprentissage

Responsable de cette chronique Christophe Augé, pharmacien, M. Sc., Ph. D. Texte original : 27 octobre 2021 Texte final : 5 novembre 2021

1. Comprendre l’environnement des biologiques de référence et des biosimilaires. 2. Connaître la réglementation québécoise concernant les biologiques et les biosimilaires. 3. Mettre en œuvre les soins pharmaceutiques liés à la prise en charge d’un patient devant faire une transition vers un biosimilaire.

L’auteur et le réviseur scientifique ne déclarent aucun conflit d’intérêts lié à la rédaction de cet article.

Discussion

En juillet 2021, la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) a jeté les bases d’une transition progressive des médicaments biologiques de référence vers les biosimilaires d’ici le 12 avril 20221 pour les assurés de la partie publique du Régime général d’assurance médicaments (RGAM). Selon le principe du Régime, les contrats d’assurance privés pourront eux aussi, à partir de cette date, continuer à couvrir, ou non, les médicaments biologiques de référence. Pour les patients assurés par le régime public et pour lesquels un médicament biologique de référence a été prescrit, les biosimilaires portant la même dénomination commune sont automatiquement acceptés. Cela n’est pas nécessairement le cas pour les patients qui ont une assurance privée; un nouveau formulaire de médicament > Québec Pharmacie

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> d’exception pourrait ici s’avérer nécessaire pour passer d’un médicament biologique de référence à un biosimilaire. Contrairement aux idées reçues, au Québec, la législation a toujours permis aux pharmaciens de substituer un biosimilaire à un biologique de référence. En effet, tel que rappelé par l’Ordre des pharmaciens du Québec dans le guide d’exercice sur la substitution d’un médicament2, la substitution est encadrée par l’article 21 de la loi sur la pharmacie3. Celui-ci stipule que le pharmacien du Québec peut « substituer au médicament prescrit un médicament dont la dénomination commune est la même » . Au Canada, les médicaments biologiques de référence et les biosimilaires portent la même dénomination commune. Cela dit, les choses ne sont pas si simples. Premièrement, les médicaments biologiques ne forment pas un groupe homogène et le pharmacien devra utiliser son jugement professionnel. Par exemple, les effets d’une insuline peuvent aisément être suivis et ajustés au jour le jour, mais c’est moins facile pour, par exemple, les antiCAS CLINIQUE 1/1 TNF alpha. De même, la substitution du filgrastim en début de chimiothérapie n’a M. WAM est un avocat d’affaires de 38 ans. Il mesure 1,83 m et pèse 80 kg. Il a reçu son diagnostic de polyarthrite rhumatoïde à 30 ans. Après quelques années plus difficiles, il a pas les mêmes implications que la commencé un traitement d’infliximab intraveineux (IV), qu’il reçoit toujours, à la dose de 3 mg/ modification d’un traitement chronique kg toutes les huit semaines; sa situation clinique est stable depuis. Dans les faits, il a beaucoup en cours. de difficultés à respecter ses rendez-vous, si bien qu’il reçoit ses perfusions toutes les 10 ou On peut également remarquer que, même 12 semaines. Le sujet a été abordé par tous les intervenants à plusieurs reprises, mais le même si les données concernant les fait que ce patient soit en rémission et en bonne forme physique fait que, très souvent, son substitutions s’accumulent et sont somme travail passe avant sa santé. toute rassurantes, il demeure que la Au dossier de sa pharmacie communautaire, on trouve : majorité d’entre elles concerne le n Ramipril 5 mg die domaine de la rhumatologie, même si on n Hydrochlorothiazide 25 mg die en trouve de plus en plus en gastrologie. n Atorvastatine 40 mg Les données en neurologie et en n Pantoprazole 40 mg die oncologie restent quant à elles rares et la n Hydroxychloroquine 400 mg die plupart des indications à petits volumes de patients sont absentes de ces données, n Méthotrexate SC 25 mg 1x/semaine, le dimanche ce qui participe au sentiment de méfiance n Acide folique 5 mg, 1 comprimé par jour les deux jours suivant l’injection du méthotrexate de certains prescripteurs4. Les renouvellements ont lieu régulièrement. On trouve aussi : Un autre facteur important à prendre n Acétaminophène 500 mg 2 co QID PRN (non servi) en compte est la complexité de n Célécoxib 100 mg 1 caps die-bid PRN (non servi) « l’environnement » d’un médicament Aujourd’hui, il vient vous voir, car il a reçu une lettre de son assureur privé qui l’informe qu’il ne biologique. En effet, il engage plus couvrira plus l’infliximab de référence à compter du 12 avril 2022 et qu’il doit passer à un d’intervenants que dans la situation biosimilaire. Une de ses amies assistantes techniques en pharmacie lui a dit que cela pouvait être classique réunissant médecin, fait par un pharmacien. Il vous demande s’il est possible que vous vous en occupiez et voudrait pharmacien et patient. Ainsi, on va bien savoir ce que ça va changer pour lui, notamment en matière de prix. souvent trouver un programme de soutien patient (PSP), lequel comporte généralement plusieurs volets. Le premier est « administratif » : il s’occupe des demandes de remboursement auprès de l’assureur. Vient ensuite l’aspect « financier », avec les doses compassionnelles qui permettent d’entreprendre rapidement un traitement avant la réponse de la compagnie d’assurances et, bien sûr, les aides de copaiement. Cette aide financière permet souvent au patient d’obtenir une prise en charge complète du produit, ce qui élimine pour lui tout intérêt pour une substitution, à la différence de ce que l’on peut voir avec les génériques. Il y a également un aspect « humain » grâce à la présence d’un coordonnateur et/ou un service infirmier, qui peut aussi apporter un soutien psychologique. Dans le cas des médicaments intraveineux, un lien de confiance pourra également être établi avec l’équipe de la clinique de perfusion. Enfin, il peut y avoir une pharmacie dite « de spécialité » ou « spécialisée », autre que la pharmacie du patient, qui fera la distribution, au cabinet, à la clinique ou au domicile de ce dernier (l’aspect légal ou non ne sera pas abordé ici).

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Cet « environnement » rend bien plus complexe une transition, même en excluant totalement l’aspect clinique. En effet, même si les compagnies de biosimilaires ont, elles aussi, des services de PSP, la crainte de perdre ces avantages peut susciter une réticence chez le patient. Comme les travaux de l’INESSS l’ont bien démontré4, les médecins prescripteurs ne sont, à l’heure actuelle, pas ouverts à une substitution « non médicale », (notamment de façon autonome par le pharmacien). En effet, selon leur code de déontologie, les médecins ont la responsabilité du traitement de leurs patients et du suivi, et ils estiment être les seuls à pouvoir évaluer Patient doit faire une transition vers un biosimilaire à cause des limites de son tous les tenants et aboutissants d’une telle assurance privée. Professionnel très occupé, il décale souvent ses rendez-vous substitution. Les pathologies traitées étant de perfusion en raison de son travail. complexes et souvent hautement morbides, et les options, parfois limitées, on comprend ce principe de précaution. Une autre crainte est que l’on finisse par être confronté à des situations, comme avec M. WAM, 38 ans, 1,83 m, 80 kg. PAR en rémission (DAS 28 = 2,4); détection les médicaments génériques, de des anticorps anti-IFX effectuée il y a six mois (négatif). substitutions multiples, au gré des - Ramipril 5 mg die/hydrochlorothiazide 25 mg die/atorvastatine 40 mg die/ approvisionnements des pharmacies pantoprazole 40 mg die/hydroxychloroquine 200 mg die/méthotrexate SC communautaires et d’établissements, ce 25 mg 1x/sem le dimanche/acide folique 5 mg 1 comprimé par jour les pour quoi il n’existe à peu près aucune deux jours suivant l’injection de méthotrexate. Observance semble OK. donnée dans la littérature scientifique. Infliximab IV 3 mg/kg toutes les huit semaines. Mais le principe de précaution, fort compréhensible et louable, qui pousse à conserver le traitement qui fonctionne, L’infliximab de référence n’étant plus couvert par l’assurance du patient à partir sans égard pour les coûts engendrés, aussi du 12 avril 2022, la substitution est nécessaire, malgré une bonne maîtrise de infimes les risques soient-ils, ne passe pas le la maladie et des anticorps anti-IFX absents. Compte tenu de la problématique test de la pharmacoéconomie. La RAMQ, de l’adhésion aux perfusions, comparativement à celle du méthotrexate et des en tant que tiers-payeur, a donc décidé de thérapies po, l’infliximab SC semble être une option intéressante. Les données forcer la transition, seule façon pour elle de actuellement accessibles appuient cette transition en ce qui concerne le bénéficier de la différence de prix entre les maintien de la maîtrise de la maladie. biologiques de référence et les biosimilaires. Mais pour toutes les raisons mentionnées, il semble plus que souhaitable que cette Expliquer la situation au patient, et ce qu’est un biosimilaire afin de le rassurer. transition se fasse dans une dynamique Avec son accord, contacter le prescripteur et proposer la modification de la collaborative de tous les intervenants, thérapie pour infliximab 120 mg SC toutes les deux semaines; confirmer au lorsque c’est possible, et non de façon patient que vous êtes en mesure de faire la distribution et le suivi à votre autonome par le pharmacien seul (même si pharmacie. Faire le suivi, le cas échéant, de l’inscription au PSP et de la loi nous le permet), ou bien seulement en l’acceptation de la demande d’exception auprès de l’assureur. Les doses dernier recours. L’envoi massif de télécopies compassionnelles ne seront pas nécessaires étant donné le délai avant la fin aux prescripteurs par la pharmacie afin de la couverture de l’infliximab IV. Organiser la transition huit semaines après d’aviser de la nécessité de la transition n’est la dernière perfusion d’infliximab IV et donner un rendez-vous au patient pour pas non plus nécessaire. La Régie ayant lui administrer la première dose d’infliximab SC afin de lui en démontrer envoyé la liste des patients aux l’usage approprié. Prévoir un suivi tous les 28 jours (idéalement, noter le prescripteurs, la transition se fera numéro de lot et les sites d’injection à chaque renouvellement) concernant généralement au gré des rendez-vous de l’adhésion, d’éventuels effets secondaires ainsi que tout signe de perte de suivi d’ici la date limite. contrôle de la maladie. Une des inquiétudes entourant les substitutions des biologiques est l’immunogénicité. Il est connu que les médicaments biologiques peuvent induire la formation d’anticorps contre le médicament ou une réaction d’hypersensibilité lorsque le système immunitaire reconnaît le produit biologique comme une molécule allogène. La crainte est qu’un changement augmente le risque de présenter une immunogénicité et d’assister alors à une perte de contrôle de la maladie. Dans le cas de l’infliximab en traitement de la PAR, les différentes études retenues par l’INESSS4, comme celles de > Québec Pharmacie

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> Alten5 et Smollen6, ne montrent pas de différences significatives ni sur la perte d’efficacité, ni sur l’immunogénicité, ni sur l’apparition d’effets indésirables. Une des particularités des biosimilaires de l’infliximab est qu’un des produits n’est pas administré en perfusion, mais par voie sous-cutanée (SC)7. Cela peut constituer une option intéressante pour les patients ne pouvant ou ne voulant pas se rendre en clinique de perfusion. Il est toutefois important de noter que cette forme pharmaceutique permet moins de latitude dans l’ajustement de la dose, notamment par rapport au poids du patient. Actuellement, la seule indication de ce produit au Canada est la PAR, à la différence d’autres pays8. Au moment OPINION PHARMACEUTIQUE d’écrire cette chronique, le produit était en attente de la décision d’inscription du ministre; il ne figure donc toujours pas Bonjour Docteur, sur la liste des médicaments de la RAMQ. Tel que discuté ce jour, à la suite de la décision de l’assureur de M. WAM, la transition de L’infliximab SC est destiné à être l’infliximab de référence vers un biosimilaire est nécessaire. Étant donné la situation professionnelle de M. WAM, nous avons opté pour l’infliximab SC à raison de 120 mg toutes les utilisé comme traitement d’entretien au deux semaines. Comme convenu et avec l’accord de ce dernier, vous prendrez en charge terme d’un traitement d’induction par l’inscription au programme. Par la suite, j’organiserai la transition huit semaines après la dernière voie IV ou comme relai d’un traitement perfusion. Je lui donnerai tous les renseignements nécessaires et vous ferai parvenir un bref d’entretien par voie IV. Selon les données rapport sur le déroulement de la première injection. Par la suite, j’effectuerai un suivi toutes les disponibles, la forme SC est non quatre semaines et vous contacterai au besoin. inférieure, voire supérieure à la forme IV Cordialement, quant à l’amélioration du DAS 28 Le pharmacien (Disease Activity Score Calculator for Rheumatoid arthritis), à l’activité de la maladie et à l’amélioration fonctionnelle. Acte pharmaceutique facturable

Administration d’un médicament aux fins d’enseignement. FE n Références Les références en gras indiquent au lecteur les références principales de l’article, telles que choisies par l’auteur.

1. RAMQ [en ligne]. Québec (QC) : Gouvernement du Québec; 2021. Transition aux médicaments biosimilaires pour les patients utilisant des médicaments biologiques de référence [cité le 15 octobre 2021]; [2 pages]. Disponible : https://www.ramq.gouv.qc.ca/SiteCollectionDocuments/professionnels/infolettres/2021/info109-21.pdf 2. OPQ [en ligne]. Montréal (QC) : Ordre des pharmaciens du Québec; 2021. La substitution d’un médicament. Guide d’exercice [cité le 15 octobre 2021]; [14 pages]. Disponible : https://www.opq.org/wp-content/uploads/2021/08/Guide_substitution_OPQ_VF_modifs_oct_2021.pdf 3. Legisquebec [en ligne]. Québec (QC) : Gouvernement du Québec; 2020. Loi sur la pharmacie [cité le 15 octobre 2021]; [environ 15 pages]. Disponible : http://legisquebec.gouv.qc.ca/fr/showdoc/cs/p-10 4. INESSS [en ligne]. Québec (QC) : Gouvernement du Québec; 2020. Innocuité de la substitution et de l’interchangeabilité des médicaments biologiques. [cité le 15 octobre 2021]; [environ 15 pages]. Disponible : https://www.inesss.qc.ca/publications/repertoire-des-publications/publication/innocuite-de-la-substitutionet-de-linterchangeabilite-des-medicaments-biologiques.html 5. Alten R, Batko B, Hala T, Kameda H, Radominski SC, Tseluyko V, et coll. Randomised, double-blind, phase III study comparing the infliximab biosimilar, PF-06438179/GP1111, with reference infliximab: Efficacy, safety and immunogenicity from week 30 to week 54. RMD Open 2019;5(1):e000876. 6. Smolen JS, Choe JY, Prodanovic N, Niebrzydowski J, Staykov I, Dokoupilova E, et coll. Safety, immunogenicity and efficacy after switching from reference infliximab to biosimilar SB2 compared with continuing reference infliximab and SB2 in patients with rheumatoid arthritis: Results of a randomised, double-blind, phase III transition study. Ann Rheum Dis 2018;77(2):234-40. 7. Santé Canada [en ligne]. Ottawa (ON) : Gouvernement du Canada; 2021. Monographie avec renseignements destinés aux patients REMSIMA SC [cité le 15 octobre 2021]; [environ 73 pages]. Disponible : https://pdf.hres.ca/dpd_pm/00060090.PDF 8. VIDAL [en ligne]. Issy-les-Moulineaux (FR) : Vidal Group; 2021. Remsima 120 mg sol inj en seringue préremplie [cité le 15 oct 2021]; [environ 73 pages]. Disponible : https://www.vidal.fr/medicaments/remsima-120-mg-sol-injen-seringue-preremplie-208077.html 9. Combe B, Allanore Y, Alten R, Caporali R, Durez P, Iannone F, et coll. Comparative efficacy of subcutaneous (CP-P13) and intravenous infliximab in adult patient with rheumatoid arthritis: a network meta-regression of individual patient data from two randomised trials. Arthritis Res Ther 2021; 23:119. Disponible: https://arthritis-research.biomedcentral.com/articles/10.1186/s13075-021-02487-x

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Répondez à ces questions en vous rendant sur ·ca 1.

2.

3.

Concernant les affirmations suivantes, laquelle est vraie ? n

La réglementation fédérale interdit l’interchangeabilité des biologiques.

n

La réglementation provinciale empêche la substitution « non médicale ».

n

L’INESSS a émis un avis au ministre pour refuser la substitution des biologiques.

n

Un pharmacien peut légalement substituer un biosimilaire à un biologique de référence.

n

Seul un pharmacien ayant une entente écrite avec un prescripteur peut substituer un biosimilaire à un biologique de façon autonome.

Accréditation valide du 1er décembre 2021 au 31 décembre 2022 Donne : 3 h 30 N° d’accréditation : 10114

Concernant les données actuelles sur les transitions biologiques de référence vers les biosimilaires, quelle affirmation est fausse ? n

Les données dans le domaine de la rhumatologie sont les plus étendues.

n

Dans certaines indications, les données sont faibles, voire inexistantes.

n

Les médecins spécialistes sont globalement très à l’aise avec cette transition.

n

Les données, dans leur ensemble, sont rassurantes et cohérentes.

Toutes ces affirmations sont exactes sauf une, laquelle ? n

Selon les données accessibles, l’infliximab IV est supérieur à la forme SC en ce qui concerne le maintien de la maîtrise de la maladie en PAR.

n

Selon les données accessibles, l’infliximab SC est non inférieur à la forme IV en termes d’amélioration clinique.

n

En octobre 2021, la seule indication de l’infliximab SC au Canada est la PAR.

n

L’un des inconvénients de l’infliximab SC par rapport à la forme IV est l’impossibilité d’ajuster la dose.

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Rédaction

Révision

Hugo d’Amours, Pharm. D., Pharmacie Gilles Lalonde, Gatineau

Dominique Meyer, M. D., FRCSC, MBA, chirurgienne ophtalmologiste, Québec.

Dégénérescence maculaire liée à l’âge et produits en vente libre Objectifs d’apprentissage 1. Se familiariser avec les produits délivrés sans ordonnance. 2. Renforcer l’autosurveillance de la maladie. 3. Améliorer la prise en charge des facteurs de risque modifiables.

Responsable de cette chronique Alice Collin, B. Pharm., DESS, M. Sc. Texte original : 15 juillet 2021 Texte final : 15 août 2021 L’auteur et la réviseure scientifique ne déclarent ne déclare aucun conflit d’intérêts lié à la rédaction de cet article.

Introduction

La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est une cause importante de cécité dans le monde. Selon certaines sources, cette maladie toucherait près du tiers des personnes de plus de 75 ans1. En raison du vieillissement de la population, la prévalence est appelée à augmenter. Évidemment, les conséquences sont importantes et affectent grandement la qualité de vie des personnes atteintes. En effet, la progression de la maladie peut conduire à des limitations significatives, notamment en ce qui concerne la conduite automobile ainsi que la capacité à lire et à écrire. Il est important de souligner que les troubles de la vision découlant de la DMLA peuvent augmenter considérablement les risques de chute et leurs conséquences, comme les fractures. Il est donc important de fournir tous les outils disponibles à nos patients dans le but de limiter la progression de la maladie et son impact sur leur qualité de vie. > Québec Pharmacie

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> Physiopathologie La DMLA se présente sous deux formes : sèche et humide. n Sèche : Il s’agit de la forme la plus fréquente. Elle est caractérisée par l’accumulation de drusen (dépôts blanchâtres ou jaunâtres composés de lipides et de protéines) localisés principalement sous la rétine. Il peut également y avoir de l’atrophie au niveau de l’épithélium pigmentaire rétinien. Cette forme entraîne généralement une perte de la vision centrale graduelle2. n Humide : Il s’agit d’une forme plus invalidante de la maladie qui survient exclusivement en présence d’une forme sèche préexistante1. Le qualificatif « humide » vient de l’accumulation de liquide derrière la rétine causée par de l’angiogenèse au niveau de l’espace sous-rétinien. Il en résulte une perte de vision plus rapide et plus importante2. Pour établir le stade de la maladie, il existe la classification AREDS (Tableau I )8. Plusieurs facteurs de risque de DMLA ont été définis, dont l’âge, le tabagisme, l’exposition au soleil, la consommation d’alcool, les maladies cardiovasculaires ainsi que les antécédents familiaux1,2. Également, certaines personnes qui consomment peu de vitamines A, C et E, de zinc, de lutéine et d’oméga-3 pourraient être plus à risque. Bien qu’on ne dispose que de peu de données à ce sujet, certains médicaments pourraient être pris en considération en tant que facteurs de risque. Parmi les molécules potentielles, notons l’acide acétylsalicylique, certains bêtabloquants et la nitroglycérine. Toutefois, on ne détient pas assez de données à l’heure actuelle pour recommander d’éviter ces molécules lorsqu’elles sont indiquées chez un patient pour traiter une autre comorbidité. Le CAS CLINIQUE 1/2 remplacement du cristallin par une lentille intraoculaire en chirurgie de la cataracte a Mme DM est une habituée de votre pharmacie. Elle vient vous voir pour vous demander conseil, car son ophtalmologue lui a annoncé qu’elle souffrait de dégénérescence maculaire de stade III. également été évoqué comme un facteur Elle hésite parmi les nombreux produits en vente libre en pharmacie. Elle pense arrêter son choix de risque potentiel 2. sur le supplément OcuviteMD régulier parce qu’il est à prix réduit cette semaine. Cette patiente de En règle générale, les symptômes de 70 ans fume 20 cigarettes par jour depuis l’âge de 20 ans. Elle est connue pour une dyslipidémie, la maladie sont une vision floue, une une hypothyroïdie, un trouble anxieux et des troubles du sommeil. Elle prend de la rosuvastatine difficulté d’adaptation de la vision en 10 mg po die, de la lévothyroxine 50 μg po die 30 minutes avant le petit-déjeuner, du citalopram passant d’un environnement éclairé à un 20 mg po die et de la trazodone 50 mg po HS. Sa fonction rénale est stable et son DFGe ajusté à environnement sombre et/ou la présence sa surface corporelle se situe autour de 80 mL/min. d’une région floue ou manquante du champ visuel2. Plusieurs maladies oculaires peuvent présenter des symptômes identiques ou très similaires, le diagnostic différentiel est important. Comme cette activité dépasse largement le champ d’expertise des pharmaciens, il est primordial d’adresser tout patient présentant des symptômes similaires à un professionnel habilité. Une fois le diagnostic posé et le stade de la maladie établi, il est possible de contribuer de manière significative à la prise en charge des personnes souffrant de DMLA. Mesures non pharmacologiques

La nicotine ayant le potentiel d’agir comme agent vasoprolifératif, la mesure non pharmacologique la plus pertinente en DMLA reste sans équivoque la cessation tabagique1,2. En plus de ses bénéfices majeurs dans la maladie, il s’agit probablement, pour le pharmacien, de l’intervention qui a le plus d’impact quant à la santé globale de ses patients. Depuis l’entrée en vigueur du Projet de loi 31, le pharmacien est maintenant très bien outillé pour intervenir dans ce domaine. Ainsi, il est recommandé d’offrir une cessation tabagique à tous les patients souffrant de DMLA. Les trois traitements de première intention peuvent être utilisés : la thérapie de remplacement nicotinique, le bupropion (ZybanMD) ou la varénicline (Champix MD). Il est important de choisir en fonction des antécédents du patient ainsi que de ses préférences personnelles. Bien évidemment, la cessation tabagique demeure tout aussi pertinente dans un contexte de prévention14.

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De manière complémentaire, dans une optique de prévention, certaines autres mesures non pharmacologiques peuvent être appliquées. En ce qui concerne l’alimentation, il est pertinent de souligner que le régime méditerranéen semble être associé à une réduction de la progression de la maladie chez certaines personnes. Étant donné que ce régime a d’autres bénéfices, notamment sur le plan cardiovasculaire, il peut être suggéré à un patient souffrant de DMLA. Certaines données indiquent aussi que la consommation de poisson et de suppléments d’oméga-3 et 6 serait associée à une diminution du risque de DMLA. Toutefois, compte tenu des données actuelles, il n’est pas possible de faire des recommandations de suppléments d’oméga-3 en prévention de la maladie en raison du manque de données probantes I CLASSIFICATION AREDS DES STADES DE LA DMLA8 portant sur leur efficacité16. Quant à Classification AREDS Caractéristiques l’activité physique, cela pourrait également être bénéfique en prévention I Absence ou présence de quelques petits drusen (diamètre inférieur de la DMLA3. à 63 μm) La littérature médicale actuelle II Drusen multiples, drusen de taille intermédiaire (diamètre : 63 à 124 μm), montre qu’il semble exister une anomalies au niveau de l’épithélium pigmentaire association entre l’hypertension artérielle (HTA) et l’apparition de la forme humide III Plusieurs drusen de taille intermédiaire, minimalement 1 drusen large de la DMLA. Cependant, les études ne (diamètre > 125 μm), atrophie géographique qui n’affecte pas la fovéa permettent pas de conclure à une IV Atrophie géographique au niveau de la fovéa, présence de association de type cause à effet. néovascularisation, changements visuels secondaires à la maladie Certaines hypothèses ont été émises sur le lien qui pourrait exister entre les deux maladies. Principalement en raison des bénéfices quant à la diminution du risque II GRILLE D’AMSLER cardiovasculaire, il est d’autant plus important de s’assurer que l’HTA est bien traitée selon les cibles usuelles chez une personne souffrant de DMLA7. Dans une optique de prévention et de surveillance active, le pharmacien peut également encourager l’utilisation d’une grille d’Amsler (Figure II ) pour l’autosurveillance de la DMLA. Pour effectuer le test correctement, il est nécessaire de se trouver dans un endroit bien éclairé et de porter ses lunettes au besoin. La grille doit se situer à 33 centimètres des yeux. Le test doit être effectué un œil à la fois en cachant l’autre. En fixant le point noir au centre du tableau, il faut vérifier les éléments suivants : n les lignes paraissent droites; n il n’y a pas de région manquante ou noire dans le tableau; n il n’y a pas de carreau de taille différente ou déformé; n les quatre coins sont visibles. Ce test peut être effectué régulièrement. Toute altération de la vision centrale devrait être notée, et un professionnel qualifié doit être consulté rapidement pour obtenir le suivi approprié6. > Québec Pharmacie

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CAS CLINIQUE 2/2

> Pharmacothérapie Bien qu’il existe des traitements pharmacologiques délivrés sur ordonnance pour traiter la DMLA humide, comme les injections intravitréennes d’un inhibiteur du facteur de croissance de l’endothélium vasculaire (VEGF), cet article se concentrera sur les produits en vente en pharmacie dans la section « médicaments sans ordonnance », destinée au traitement des formes sèches de la maladie. Les multivitamines antioxydantes délivrées sans ordonnance (Tableau III ) visent principalement à limiter la progression de la dégénérescence maculaire aux stades plus avancés de la maladie. En effet, les données actuelles ne démontrent des bénéfices que lorsque l’individu est minimalement atteint de la forme intermédiaire de DMLA (stades III et IV dans la classification AREDS). Il s’agit d’une recommandation élevée de l’Académie américaine d’ophtalmologie basée sur des données de haute qualité (métaanalyses, revues systématiques, essais randomisés contrôlés avec de faibles risques de biais). Malheureusement, les données probantes n’indiquent aucun bénéfice pour les formes plus légères. Une des principales hypothèses avancées est le manque d’événements chez ce type de patients dans les études. Il aurait pu en résulter un manque de puissance statistique et l’impossibilité de démontrer un effet protecteur chez ces groupes (stades I et II dans la classification AREDS). De plus, une méta-analyse Cochrane avance qu’il ne semble pas y avoir de bénéfice associé à la prise de suppléments antioxydants en prévention de la DMLA1,3,4,5. Actuellement, les données probantes regroupent deux grandes formulations de vitamines antioxydantes présentes sur le marché : les suppléments de l’étude AREDS et de l’étude AREDS II.

Rapidement, vous expliquez à Mme DM que le supplément sélectionné n’est pas approprié dans son cas, car il contient un supplément de bêta-carotène qui pourrait augmenter son risque de cancer du poumon. À la place, vous lui suggérez le Vitalux advanced (AREDS 2)MD, car il s’agit d’un supplément identique à celui étudié dans l’étude AREDS. Elle le prendra au souper pour éviter toute interaction avec son SynthroidMD. Comme la patiente se dit inquiète quant au risque de cancer pulmonaire, vous en profitez pour renforcer les bienfaits de la cessation tabagique. Elle vous mentionne que les timbres de nicotine ne fonctionnent pas chez elle malgré quatre tentatives par le passé. Malgré tout, elle se dit intéressée à faire un nouvel essai. Après discussion et encouragements, vous lui prescrivez un traitement par varénicline à dose usuelle durant 12 semaines. Vous prévoyez un suivi dans 28 jours.

Étude AREDS

L’étude AREDS est une grande étude américaine, randomisée et contrôlée, multicentrique contre placébo, de plus de 3600 patients, avec un suivi moyen de 6,3 ans4. Son devis était d’évaluer si la prise de hautes doses de vitamines C et E, de zinc et de bêta-carotène pouvait avoir un impact positif sur le ralentissement de la progression de la DMLA vers les formes plus avancées. En effet, certaines données indiquent que le stress oxydatif pourrait jouer un rôle dans le développement et la progression de la DMLA. De plus, des études de faible envergure laissent envisager un rôle protecteur de la supplémentation en zinc en prévention de la DMLA. Ainsi, plusieurs formulations de suppléments ont été commercialisées pour cette raison sans que l’on dispose de preuves d’efficacité suffisantes. Dans cette large étude, quatre groupes ont été étudiés : supplément d’antioxydants (vitamine C 500 mg, vitamine A 400 unités, 15 mg de bêta-carotène), supplément de zinc (80 mg de zinc élémentaire avec de l’oxyde de cuivre), combinaison des antioxydants et du zinc ou placébo. Il est à noter que le cuivre a été ajouté dans l’optique de diminuer le risque d’une forme rare d’anémie pouvant être causée par la supplémentation en zinc, l’anémie sidéroblastique. Le but était également de déterminer des doses efficaces et sécuritaires pour uniformiser l’offre commerciale. Les objectifs primaires étaient d’évaluer la progression vers la forme avancée de la DMLA et la perte de 15 lettres au score d’acuité visuelle. Il est intéressant de noter que 30 % des participants prenaient une multivitamine contenant l’un des ingrédients depuis plus de cinq ans avant le début de l’étude. De plus, l’apport alimentaire des participants en vitamine A, C, E et en zinc était supérieur ou égal à celui de la population générale avant le début de l’étude. En somme, l’étude a démontré que seule la combinaison zinc + vitamines antioxydantes avait diminué de manière statistiquement significative la perte

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d’acuité visuelle chez les patients des catégories 3 et 4. La combinaison du zinc et des vitamines antioxydantes donnait toujours de meilleurs résultats que les groupes dans lesquels un seul des produits était donné séparément. Des bénéfices ont aussi été notés en ce qui a trait à la perte d’acuité visuelle chez les patients souffrant d’une forme grave (catégorie 4) de DMLA. De même que des bénéfices en prévention de la forme néovasculaire (DMLA humide) pour les personnes des catégories 3 et 4. Sans atteindre le seuil de signification statistique, on note aussi une tendance protectrice face à la manifestation de l’atrophie géographique dans les catégories 3 et 4. De manière complémentaire, un objectif composite a été créé, regroupant une progression de la

III

PRINCIPAUX PRODUITS EN VENTE LIBRE (LISTE NON EXHAUSTIVE)

Nom commercial

Posologie

Ingrédients les plus pertinents

Respect des doses étudiées dans AREDS I et II

OcuviteMD régulier

1 comprimé die

300 μg de bêta-carotène, 200 mg de vitamine C, 60 unités de vitamine E, 40 mg de zinc, 2 mg de lutéine, sélénium

Non

OcuviteMD adulte 50+

1 capsule die

150 mg de vitamine C, 30 unités de vitamine E, 9 mg de zinc, 1 mg de cuivre, 6 mg de lutéine, 1 mg de zéaxanthine

Non

OcuviteMD

2 comprimés die

50 mg de vitamine C, 10 unités de vitamine E, 4,5 mg de zinc, 3 mg de lutéine, 0,5 mg de zéaxanthine

Non

PreservisionMD lutéine

2 capsules bid

226 mg de vitamine C, 200 unités de vitamine E, 34,8 mg de zinc, 0,8 mg de cuivre, 5 mg de lutéine

Non

PreservisionMD formule oméga 3

2 capsules bid

113 mg de vitamine C, 100 unités de vitamine E, 17,4 mg de cuivre, 0,4 mg de cuivre, 2,5 mg de lutéine, 0,5 mg de zéanxanthine, 87,5 mg d’ADH, 162,5 mg d’EPA

Non

PreservisionMD formule AREDS 2

2 capsules die

250 mg de vitamine C, 200 unités de vitamine E, 40 mg de zinc, 5 mg de lutéine, 1 mg de zéaxanthine

Non, car la formulation ne contient pas de cuivre

Vitalux-SMD

2 comprimés die

250 mg de vitamine C, 200 unités de vitamine E, 40 mg de zinc, 1 mg de cuivre, 5 mg de lutéine, 0,25 mg de zéaxanthine

Non, car la formulation ne contient pas assez de zéaxanthine

VitaluxMD Santé oculaire

2 comprimés die

150 mg de vitamine C, 50 unités de vitamine E, 20 mg de zinc, 1 mg de cuivre, 5 mg de lutéine, 1 mg de zéaxanthine

Non

VitaluxMD advanced (AREDS 2)

2 comprimés die

250 mg de vitamine C, 200 unités de vitamine E, 40 mg de zinc, 1 mg de cuivre, 5 mg de lutéine, 1 mg de zéaxanthine

Oui

VitaluxMD Advanced chewable

2 comprimés die

250 mg de vitamine C, 200 unités de vitamine E, 12,5 mg de zinc, 0,5 mg de cuivre, 5 mg de lutéine, 1 mg de zéaxanthine

Non

Lutéine-ZMD

1 capsule die

10 mg de lutéine, 0,5 mg de zéaxanthine

Non

LutéineMD Extra fort avec zéaxanthine

1 gélule die

20 mg de lutéine, 1 mg de zéaxanthine

Non

Complexe de LutéineMD

1 gélule BID

10 mg de lutéine, quantité indéterminée de zéaxanthine

Non

DMLA et une perte d’acuité visuelle. Avec la supplémentation des multivitamines antioxydantes et du zinc, on obtient un rapport de cote de 0,67 pour les patients des catégories 3 et 4. De manière complémentaire, il est pertinent d’ajouter que le traitement par suppléments dans l’étude AREDS n’a pas eu d’impact positif ou négatif quant à l’opacification du cristallin (cataracte). En somme, cette étude montre une réduction de 25 % du risque d’être atteint de DMLA de stade avancé après cinq ans de prise de multivitamines antioxydantes et de zinc. Pour mieux visualiser les bénéfices, on arrive à un NNT de 11 à 5 ans. En > Québec Pharmacie

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> matière de tolérance, il est important de souligner que les groupes prenant un supplément de zinc ont eu plus de problèmes de santé/hospitalisations pour des motifs génito-urinaires ainsi que plus d’effets gastro-intestinaux. Sinon, les suppléments semblaient bien tolérés4. Controverse autour du tabagisme et des suppléments de bêta-carotène

Au cours de l’étude AREDS, au moins deux publications ont avancé que la prise de bêtacarotène chez un patient fumeur pouvait augmenter ses risques de néoplasie pulmonaire. En réaction à cette nouvelle information, les participants fumeurs de l’étude ont été avisés à deux reprises (1994 et 1996) du risque encouru. En 1996, ces participants ont eu la possibilité de cesser l’étude. Malgré tout, dans l’étude AREDS, on note une tendance non statistiquement significative à l’augmentation de la mortalité dans les groupes prenant un supplément antioxydant. De son côté, la mortalité dans le groupe zinc + antioxydant était inférieure à celle dans le groupe placébo. Il n’est toutefois pas vraiment possible de tirer de conclusions de ce résultat3,4,12. Étude AREDS II

n n n n

n

Cette étude de vaste envergure avait pour but de déterminer si l’ajout de lutéine et de zéaxanthine et/ou d’acide eicosapentaénoïque (EPA) et d’acide docosahexaénoïque (ADH) avantageait le supplément AREDS et de voir s’il y avait un effet bénéfique à retirer le supplément de bêta-carotène et à réduire la dose de zinc5. Cette étude de CONSEILS AUX PATIENTS plus de 4000 patients s’était déroulée d’octobre 2006 à septembre 2008. Les Évitez le tabagisme patients admis avaient entre 50 et 85 ans Ayez une alimentation équilibrée en suivant le régime méditerranéen et étaient tous à haut risque de Faites de l’activité physique selon les recommandations canadiennes (150 minutes par progression vers la forme avancée de la semaine d’exercice modéré à intense) ou selon les recommandations de votre médecin maladie. Le suivi était de cinq ans. L’étude Si vous souffrez de DMLA de stade III ou IV, envisagez la prise d’un supplément vitaminique : comportait deux randomisations. Dans la n Maintenez une bonne hydratation; première, on randomisait selon quatre n Consultez votre pharmacien avant de prendre d’autres suppléments vitaminiques ou groupes : placébo (AREDS), lutéine + d’autres médicaments afin d’éviter les interactions médicamenteuses. zéaxanthine + AREDS, EPA + ADH + Pratiquez l’autosurveillance de votre vision à l’aide de la grille d’Amsler et avisez votre AREDS ou lutéine + zéaxanthine + EPA + professionnel en santé oculaire de tout changement dans votre vision centrale. ADH + AREDS. Dans la seconde, on randomisait à nouveau les patients de chaque groupe : suppléments AREDS ou formulation exempte de bêta-carotène avec teneur réduite en zinc. L’objectif principal de l’étude était d’observer la manifestation de la forme avancée de la maladie définie comme l’apparition d’une atrophie géographique (forme grave de la DMLA sèche) ou d’une néovascularisation (DMLA humide) au niveau rétinien. En conclusion, il n’y a pas eu de changement significatif entre les groupes concernant la manifestation de la forme avancée de la maladie. Également, la diminution de la dose de zinc ainsi que le retrait du supplément de bêta-carotène n’ont pas causé d’issues moins favorables dans ces groupes. Encore une fois, les produits étudiés ont été très bien tolérés par les participants5. Choix d’un produit

Lorsque le diagnostic est établi, une bonne pratique consiste à vérifier avec le patient si un supplément lui convient. Après avoir vérifié le stade de la maladie, le critère le plus important est l’antécédent de tabagisme. En effet, compte tenu des données actuelles, il est préférable d’éviter de recommander un supplément contenant du bêta-carotène à un patient fumeur ou ayant des antécédents de tabagisme. À cet égard, il existe plusieurs produits (Tableau III ) sur le marché. Certains d’entre eux ne contiennent pas l’association exacte contenue dans les études AREDS et AREDS II. En règle générale, ces produits devraient être évités à moins de données probantes de qualité assurant leur efficacité, car les deux études AREDS ont démontré des bénéfices pour une combinaison

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spécifique de produits naturels. On ne sait donc pas si les produits pris séparément conservent une efficacité ou si l’ajout d’autres substances peut nuire aux bénéfices. L’insuffisance rénale chronique (IRC) est également un critère à prendre en considération. Bien qu’il existe peu de données sur la prise de produits de santé naturels en insuffisance rénale chronique, il est préférable d’être prudent quant à la recommandation de suppléments vitaminiques en insuffisance rénale importante. Malgré tout, on dispose des données suivantes : n Bêta-carotène : Cette molécule fait partie de la famille de la vitamine A. En insuffisance rénale, les taux de vitamine A sont généralement élevés. En raison de la perte du métabolisme rénal de la vitamine A en IRC, il est préférable d’éviter les suppléments11. n Vitamine C : En IRC, il existe des craintes quant à l’accumulation de cette vitamine hydrosoluble et à l’apparition de toxicités liées à une oxalose, la vitamine C étant un précurseur de l’oxalate. Ultimement, cette toxicité pourrait se manifester par des calculs rénaux11,13. n Vitamine E : On dispose de peu de données sur les apports de vitamine E en insuffisance rénale. Toutefois, certaines sources avancent que les suppléments sont contre-indiqués en IRC importante1. n Zinc : La supplémentation en zinc apparaît sécuritaire en IRC. Il existerait même certains bienfaits associés. Toutefois, certaines craintes persistent sur le risque potentiellement accru (non démontré dans l’étude AREDS) d’augmentation du risque d’anémie sidéroblastique1. n Cuivre : On dispose de peu de données quant à la supplémentation en cuivre chez un patient IRC. n Lutéine et zéaxanthine : Ces molécules appartenant également à la famille des caroténoïdes, il serait prudent d’user des mêmes précautions que pour les suppléments de bêta-carotène. Dans le but d’assurer un meilleur suivi du dossier pharmacologique, il est maintenant possible de documenter la prise de supplément pour la DMLA au moyen de la prescription de médicaments en vente libre. Cette pratique assure une documentation optimale du dossier-patient et permet une meilleure analyse pharmacologique dans le but d’éviter une interaction médicamenteuse ou une duplication de traitement. Notons que les suppléments AREDS peuvent interagir notamment avec les quinolones et les tétracyclines. Cette interaction s’explique par la chélation de l’antibiotique avec les cations bivalents contenus dans le supplément. Pour l’éviter, il suffit de prendre l’antibiotique deux heures avant ou six heures après la prise du supplément vitaminique. De plus, il serait avisé d’espacer la prise de celle de la lévothyroxine, par précaution. Il faut garder à l’esprit que la prise combinée de plus d’un supplément vitaminique pourrait se traduire par une dose trop élevée pour certaines vitamines ou minéraux. Par mesure de précaution, il convient de demander au patient s’il souffre d’autres problèmes oculaires. Cette question peut avoir des répercussions. Par exemple, une personne souffrant de rétinite pigmentaire pourrait voir son état exacerbé par la prise d’un supplément contenant de la vitamine E1. Suivi de la thérapie

En général, les suppléments vitaminiques AREDS et AREDS II sont très bien tolérés. Dans l’étude AREDS, les patients ont été suivis durant plus de six ans. Certaines précautions devraient tout de même être communiquées aux patients avant de recommander ces produits. Pour la vitamine C, il existe un risque augmenté de lithiases rénales (les patients avec un antécédent de lithiases rénales étaient exclus d’AREDS II). Pour la vitamine E, il est important de noter qu’elle peut augmenter le risque de fatigue, de faiblesses musculaires, de troubles thyroïdiens et d’AVC hémorragique. Quant au zinc, il peut causer des symptômes de dyspepsie, d’anémie, et une diminution du cholestérol HDL. Toutefois, dans l’étude AREDS, il est important de préciser que les taux d’hématocrite n’étaient pas inférieurs dans les groupes supplémentés en zinc. Enfin, le bêta-carotène peut avoir pour effet de donner une teinte orangée à la peau1,3. > Québec Pharmacie

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> Conclusion Le pharmacien demeure un professionnel clé dans la prise en charge de la DMLA. Les éléments importants de son intervention auprès de ses patients sont résumés dans le Conseils aux patients . En collaboration avec les autres professionnels de la santé, il peut contribuer au choix d’un supplément vitaminique adéquat chez les personnes souffrant de la maladie à un stade où l’efficacité a été démontrée dans la littérature scientifique. Également, il peut renforcer les mesures non pharmacologiques pertinentes et, surtout, prendre en charge de manière autonome la cessation tabagique. Bien que ces interventions n’aient pas une visée curative, elles permettent néanmoins de ralentir la progression de la DMLA et contribuent au maintien de la qualité de vie des patients atteints. n Références Les références en gras indiquent au lecteur les références principales de l’article, telles que choisies par l’auteur.

1. Potter M, CPS – Choix thérapeutiques [En ligne]. Ottawa, Canada : Association des pharmaciens du Canada. Dégénérescence maculaire liée à l’âge [mise à jour le 8 juin 2018; cité le 9 juin 2021]. Disponible avec accès : https://www.pharmacists.ca/?lang=fr 2. Arroyo J., Uptodate [En ligne]: Wolters Kluwer. Age-related macular degeneration: Clinicla presentation, etiology, and diagnosis [mise à jour le 18 juin 2020; cité le 20 mai 2021]. Disponible avec accès : https://www.uptodate.com/ contents/age-related-macular-degeneration-clinical-presentation-etiology-and-diagnosis?source=history_widget 3. Arroyo J., Uptodate [En ligne]: Wolters Kluwer. Age-related macular degeneration: Treatment and prevention [mise à jour le 22 avril 2021; cité le 20 mai 2021]. Disponible avec accès : https://www.uptodate. com/contents/age-related-macular-degeneration-treatment-and-prevention?source=history_widget 4. Age-Related Eye Disease Study Research Group. A randomized, placebo-controlled, clinical trial of high-dose supplementation with vitamins C and E, beta carotene, and zinc for age-related macular degeneration and vision loss: AREDS report no. 8. Arch Ophthalmol. 2001 Oct; 119(10):1417-36. doi: 10.1001/ archopht.119.10.1417. Erratum in: Arch Ophthalmol. 2008 Sep;126(9):1251. PMID: 11594942; PMCID: PMC1462955. Disponible : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/11594942/ 5. Age-Related Eye Disease Study 2 Research Group. Lutein + zeaxanthin and omega-3 fatty acids for agerelated macular degeneration: the Age-Related Eye Disease Study 2 (AREDS2) randomized clinical trial. JAMA. 2013 May 15;309(19):2005-15. doi: 10.1001/jama.2013.4997. Erratum in: JAMA. 2013 Jul 10;310(2):208. PMID: 23644932. Disponible : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23644932/ 6. Segre L. All About Vision [En ligne]. AAV Media LLC.. Macular Degeneration Test: How to Use the Amsler Grid [mise à jour en mai 2021; cité le 25 mai 2021]. Disponible : https://www.allaboutvision.com/conditions/amsler-grid.htm 7. Hyman L, Schachat AP, He Q, Leske MC. Hypertension, cardiovascular disease, and age-related macular degeneration. Age-Related Macular Degeneration Risk Factors Study Group. Arch Ophthalmol. 2000 Mar; 118(3):351-8. doi: 10.1001/archopht.118.3.351. PMID: 10721957. Disponible : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/10721957/ 8. DynaMed [Internet]. Ipswich (MA): EBSCO Information Services. 1995 - . Record No. T114486, Age-related Macular Degeneration (AMD); [mise à jour le 20 novembre 2018, cité le 11 juin 2021]. Disponible : https://www-dynamed-com.acces.bibl.ulaval.ca/topics/dmp~AN~T114486. Accès requis 9. Porter D. What Are Drusen? [En ligne]. American Academy of Ophtalmology. What Are Drusen? [mise à jour le 4 mars 2021, cité le 15 mai 2021]. Disponible : https://www.aao.org/eye-health/diseases/what-are-drusen 10. Evans JR, Lawrenson JG. Antioxidant vitamin and mineral supplements for preventing age-related macular degeneration. Cochrane Database Syst Rev. 2017;7(7):CD000253. Published 2017 Jul 30. doi:10.1002/14651858. CD000253.pub4 11. Handelman GJ, Levin NW. Guidelines for vitamin supplements in chronic kidney disease patients: what is the evidence? J Ren Nutr. 2011 Jan;21(1):117-9. doi: 10.1053/j.jrn.2010.11.004. PMID: 21195933. 12. Rx-Vigilance [En ligne]. Médicaments utilisés pour la prévention et le traitement de la dégénérescence maculaire liée à l’âge [consulté le 28 mai 2021]. Disponible avec accès : https://www.vigilance.ca/logiciel-medicaments-rxvigilance 13. TRC – Natural Medicines [En ligne]. Vitamin C [mise à jour le 2 juin 2021, cité le 11 juin 2021]. Disponible avec accès : https://naturalmedicines.therapeuticresearch.com 14. Lessard S. Association des bannières et des chaînes de pharmaciens du Québec, loi 31 [En ligne]; Cessation tabagique [mise à jour en janvier 2021, cité le 13 mai 2021]. Disponible avec accès : https://abcpq.ca/algorithmes/cessation-tabagique/ 15. TRC – Natural Medicines [En ligne]; Beta-carotene [mise à jour le 15 mars 2021, cité le 11 juin 2021]. Disponible avec accès : https://naturalmedicines.therapeuticresearch.com 16. TRC – Pharmacist Letter’s [En ligne]. Omega-3s: Fish Oil and More [mise à jour en janvier 2021 [cité le 14 juin 2021]. Disponible avec accès : https://ca-pharmacist-therapeuticresearch-com.acces.bibl.ulaval.ca/ Content/Segments/PRL/2012/Aug/Omega-3s-Fish-Oil-and-More-4633

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Répondez à ces questions en vous rendant sur ·ca 4.

5.

6.

Quel est le facteur de risque modifiable le plus important dans la DMLA ? n

Le tabagisme

n

L’exposition au soleil (rayonnement UV)

n

L’exposition aux écrans numériques

Accréditation valide du 1er décembre 2021 au 31 décembre 2022 Donne : 3 h 30 N° d’accréditation : 10114

M. NT, 53 ans, vient vous voir à la pharmacie. Il vous demande conseil, car il a récemment reçu un diagnostic de DMLA de stade I. Il est inquiet quant aux répercussions possibles et aimerait prévenir la progression de la maladie. Il a entendu parler des suppléments de vitamines. Il est connu pour de l’HTA et une dyslipidémie. Il ne fume pas. Il prend régulièrement du périndopril 2 mg die et de l’atorvastatine 20 mg die. Sa pression moyenne à la maison est de 145/92 mmHg. Que lui suggérez-vous ? n

Un supplément AREDS en l’informant des risques associés.

n

supplément AREDS en lui suggérant de prendre rendez-vous avec son médecin pour un ajustement de son antihypertenseur.

n

Grâce à la loi 31, vous ajustez la dose de périndopril à 4 mg die et prescrivez une prise de sang (ions, créatinine) dans 14 jours et en avisant son médecin. Un suivi de la pression est prévu. De manière complémentaire, vous lui présentez la grille d’Amsler aux fins d’autosurveillance.

L’association EPA/ADH étudiée dans l’étude AREDS II a permis de démontrer un bénéfice supplémentaire en prévention de la progression de la DMLA. Vrai ou faux ? n Vrai n Faux

7.

Lorsqu’une personne prend un supplément vitaminique pour la prévention de la DMLA, il est nécessaire de prévoir un suivi en raison du risque d’anémie sidéroblastique. Vrai ou faux ? n Vrai n Faux

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LES BLOGUES DE PROFESSIONSANTÉ.CA

Mathieu Pelletier Le Dr Mathieu Pelletier est médecin de famille depuis 2005. Il exerce au GMF-U du Nord de Lanaudière.

Je suis un anti-fax « À l’ère où chaque pharmacie est dotée d’un SIPC et chaque clinique, d’un DMÉ, comment se fait-il que nous devions échanger des messages sur des papiers téléphoniques ? Tant qu’à ça, je préfèrerais des pigeons voyageurs. » De là où la nouvelle plateforme PrescribeIT prend tout son sens. En fonction dans quelques provinces au Canada depuis quelques années, elle nous permet de recevoir des prescriptions électroniques et d’échanger avec les prescripteurs pour clarifier des ordonnances, tout ça, sans fax !

J’adore votre article ! Mais nous sommes encore loin de l’eldorado promis…

À la base, c’est le patient qu’il faut sensibiliser à prendre sa santé en main. S’assurer de prévoir son suivi médical, avoir une liste de médicaments à jour et s’informer quelles prescriptions doivent être renouvelées à la veille d’une rencontre avec le médecin. Les médecins perdent du temps, les pharmaciens perdent du temps. Et une réponse à une communication entre professionnels est à la base d’une bonne collaboration. Quoi de pire que les fax en suspens sur une longue période ? Si je peux ajouter un irritant pour le pharmacien : le médecin qui nous indique « patient doit prendre rv », sous-entendant que le pharmacien doit contacter le patient pour l’en informer. Tout le monde est débordé, alors pourquoi le personnel de la clinique déjà mobilisé à envoyer le fax ne pourrait pas appeler directement le patient pour fixer le r-v ?

Prenez part à la discussion vous aussi !


les pages bleues

Rédaction

Révision

Melissa Fu, Pharm. D., Pharmacie Maria Savin affiliée à Pharmaprix, Gia Hung Pham, Pharm. D., Pharmacie Maria Torani et Yasmina Zakaria affiliée à Familiprix, Liny Kim Trachy, Pharm. D., Pharmacie Naceur Naïmi affiliée à Proxim, et Anna-Maria Yannakis, Pharm. D., Pharmacie Dimitrios-Jimmy Retalis affiliée à Familiprix.

Marie-Sophie Brochet, B. Pharm., M. Sc., CHU Sainte-Justine.

L’anémie durant la grossesse : « fer » le point sur les nouveautés

Responsables de cette chronique Thi Thanh Yen Nguyen, B. Pharm., D. E. S. S. Alice Collin, B. Pharm., D. E. S. S., M. Sc. Texte original : 31 mai 2021 Texte final : 21 novembre 2021

Objectifs d’apprentissage 1. Discuter du traitement de l’anémie pendant la grossesse. 2. Renseigner les patientes sur l’innocuité du traitement pendant la grossesse.

Les auteures et la réviseure scientifique ne déclarent aucun conflit d’intérêts lié à la rédaction de cet article.

3. Effectuer le suivi du traitement de l’anémie pendant la grossesse et le post-partum. Résumé

Les nouvelles lignes directrices du Royaume-Uni sur le traitement de l’anémie durant la grossesse, publiées en octobre 2019, le rapport du Canadian Agency for Drugs & Technologies in Health (CADTH) sur le dépistage et le traitement de l’anémie en grossesse, publié en décembre 2019, en plus des stratégies pour favoriser la tolérance au fer et des données actuelles concernant le nouveau fer IV MonoferricMD seront présentés dans cet article pour permettre au pharmacien d’assurer un meilleur suivi de l’anémie en grossesse. Nous discuterons des méthodes pour dépister l’anémie, des indications de traitement, des données sur les meilleurs types de fer par voie orale et IV, et du suivi approprié en grossesse.

La première version de cet article a été remise dans un cours. L’article a ensuite été bonifié et a été révisé une deuxième fois.

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> Généralités Définition

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’American College of Obstetricians and Gynecologists (ACOG) et le CADTH, l’anémie en grossesse se définit par un taux d’hémoglobine < 110 g/L au premier trimestre, < 105 g/L aux deuxième et troisième trimestres, et < 100 g/L en post-partum1,3. La ferritine étant une protéine de stockage du fer en circulation, une déficience en fer se caractérise par un taux d’hémoglobine normale, mais par un taux de ferritine sérique < 30 mcg/L3. Le CADTH définit plutôt le seuil à 15 mcg/L, mais un traitement devrait être instauré s’il est inférieur à 30 mcg/L2. L’anémie de grossesse demeure un problème de santé fréquent qui s’explique principalement par une déficience en fer. Selon l’OMS, plus de 75 % des cas d’anémie en grossesse sont de nature ferriprive. Chez les femmes, le manque en fer est souvent causé par la malnutrition, les pertes sanguines, telles que les pertes CAS CLINIQUE 1/6 menstruelles, et des besoins en fer augmentés durant la grossesse. Les autres Mme FS, 37 ans, en est à sa 13e semaine de grossesse. Il s’agit de sa troisième grossesse. Elle n’a causes possibles d’anémie sont une pas d’allergie ou d’intolérance aux médicaments. Ses habitudes de vie sont sans particularité : déficience en vitamine B12 ou en acide pas de tabac, pas de drogue, pas d’alcool. Elle prend sous prescription de l’Adalat XL 60 mg die folique, les hémoglobinopathies, comme pour traiter son hypertension artérielle (HTA), du Synthroïd 100 mcg die pour une hypothyroïdie la thalassémie ou l’anémie falciforme, et du Materna comme supplément vitaminique. Elle vient de se faire prescrire du sulfate ferreux les désordres inflammatoires chroniques 300 mg die, mais ne comprend pas pourquoi elle doit en prendre. Selon elle, le Materna lui suffit. ou aigus, les infections parasitaires, Quels conseils lui donnez-vous ? l’insuffisance rénale chronique, etc3. Épidémiologie

I

CONSÉQUENCES DE L’ANÉMIE

2,3

Mère

Nouveau-né

Dépression post-partum

Retard de croissance utérine*

Transfusions sanguines

Prématurité*

Hémorragie post-partum Mortalité * en anémie modérée à sévère (Hb < 99 g/L)

Présentation clinique

Les signes et symptômes cliniques de l’anémie ferriprive en grossesse sont non Faible poids à la naissance* spécifiques et ne peuvent pas être utilisés comme critères diagnostiques. De plus, Mortalité néonatale et périnatale* ils varient selon la gravité et la vitesse d’installation. Le symptôme le plus commun est la fatigue, mais d’autres symptômes peuvent aussi apparaître, tels que la pâleur, la faiblesse, l’essoufflement, la diminution de la tolérance à l’effort, les maux de tête, les palpitations, les vertiges, la tachycardie, l’irritabilité et la difficulté à se concentrer selon le stade de gravité de l’anémie1,3.

Infections intra et post-partum (p. ex., chorioamniotite) Pré-éclampsie

Environ 30 % des femmes en âge de procréer sont atteintes d’anémie ferriprive, et, selon l’OMS, plus de 40 % des femmes enceintes sont anémiques1.

Sepsis bactérien

Physiopathologie Synthèse des globules rouges

Les processus de différenciation et de maturation des cellules souches en érythrocytes (globules rouges) ont lieu dans la moelle osseuse. L’érythropoïétine (EPO), une hormone de croissance glycoprotéique fabriquée par les reins, et le fer sont deux éléments essentiels à l’érythropoïèse. Lors d’une diminution de l’apport d’oxygène dans le sang, l’EPO stimule la production des globules rouges à partir des cellules souches hématopoïétiques qui nécessitent un apport suffisant en fer, en acide folique et en vitamine B12 pour se différencier. Au fur et à mesure de leur cycle de différenciation, l’hémoglobine s’incorpore aux cellules. À la fin de leur cycle, elles sont relâchées dans la circulation sanguine sous forme de réticulocytes qui deviennent, après quelques jours, des

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érythrocytes. La durée de vie moyenne des érythrocytes est de 120 jours, et le taux d’hémoglobine dépend de l’équilibre entre leur production et leur destruction4,5. Changements physiologiques chez les femmes enceintes

Durant la grossesse, le volume du sang circulant augmente pour un total de 6 à 7 litres6. Cette augmentation s’explique par une hausse de 30 à 50 % du volume plasmatique qui débute dès le premier trimestre et atteint un plateau au troisième trimestre. La masse des globules rouges augmente également de 15 à 30 %, ce qui résulte en une hémodilution, soit une diminution de la concentration d’hémoglobine d’environ 10 %4,6. Cela explique donc la variation des concentrations d’hémoglobine durant la grossesse. En réponse à l’augmentation du volume plasmatique et des besoins en fer du fœtus, les concentrations sériques diminuent au premier trimestre, atteignent un creux au deuxième trimestre pour finalement remonter au troisième trimestre. En effet, il est reconnu que, durant le deuxième trimestre, les taux d’hémoglobine diminuent de 5 g/L, ce qui explique la limite de 105 g/L d’Hb comme valeur diagnostique au deuxième trimestre1,7. Changement du métabolisme du fer chez les femmes enceintes

L’anémie ferriprive s’installe lentement dans le corps. Le métabolisme du fer est modifié durant la grossesse, et les besoins pendant la grossesse sont augmentés pour l’érythropoïèse maternelle, la croissance et le développement fœtaux. Les besoins physiologiques augmentent de 1 mg à 6 mg de fer par jour au fur et à mesure que la grossesse avance. Au total, la femme enceinte aura besoin d’environ 1000 mg de fer durant la grossesse : 500 mg pour l’expansion des globules rouges maternels, 300 à 350 mg pour la croissance placentaire et la production de globules rouges fœtales, puis 250 mg pour les pertes sanguines durant l’accouchement4. À titre informatif, une perte de sang de 500 mL équivaut environ à 250 mg de perte en fer6. Conséquences de l’anémie Femme enceinte

Une déficience en fer, avec ou sans anémie, est associée à de la fatigue, à une diminution de la qualité de vie, à une dépression post-partum et à un risque de mortalité par hémorragie post-partum4,7,8. Une étude observationnelle menée au Royaume-Uni a montré que 60 % des femmes enceintes avec une Hb < 85 g/L ont eu un épisode d’hémorragie post-partum, le quart ayant progressé vers une hémorragie post-partum sévère3. Les conséquences sont résumées dans le Tableau I . Fœtus et nouveau-né

L’anémie modérée à sévère (Hb < 99 g/L) peut favoriser l’augmentation de la mortalité et morbidité périnatales et néonatales, un faible poids à la naissance, un risque de prématurité et une restriction de la croissance intra-utérine3,4,9. Lorsqu’une déficience en fer durant la grossesse n’est pas corrigée, il y a moins de ferritine sérique chez le nouveau-né. La majorité du fer fœtal est transférée de la mère lors du troisième trimestre, période critique pour le développement du cerveau3. La déficience en fer peut engendrer une myélinisation défectueuse chez les nourrissons, ce qui produit des problèmes de développement mental et de performance10. Certaines études, dont Auerbach 201926 et CADTH, ont observé une augmentation du risque d’autisme, de schizophrénie et de malformation au niveau cérébral chez les femmes ayant une déficience en fer tout au long de la grossesse2. Cependant, la majorité des études sont observationnelles et les données probantes sur les troubles neuro-développementaux ne sont pas constantes3. Dépistage de l’anémie et de la déficience en fer

Selon l’ACOG, le CDC et le CADTH 2019, le dépistage de l’anémie se fait à la première visite prénatale et entre la 24e et la 28e semaine de grossesse à l’aide de la formule sanguine complète (FSC). De plus, l’Hb est mesurée à chaque trimestre pour vérifier le risque d’anémie. Par contre, le dépistage d’une déficience en fer ne se fait pas toujours, car la ferritine n’est pas dosée systématiquement chez les non-anémiques à cause des > Québec Pharmacie

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> coûts et des délais associés. Toutefois, certaines sources, dont les lignes directrices du Danemark et de la Turquie, le suggèrent11,12. Étant donné que l’anémie survient à des stades plus avancés d’une déficience en fer, il y aurait un intérêt à doser la ferritine chez toutes les femmes enceintes. En fait, selon une étude rétrospective de 2019, la ferritine mesurée au premier trimestre permettrait de prédire quelles patientes seraient à risque d’anémie durant la grossesse14. Cela dit, les nouvelles lignes directrices du Royaume-Uni et le rapport du CADTH 2019 proposent de doser la ferritine sérique seulement chez les femmes enceintes présentant certains facteurs de risque, dont des hémoglobinopathies (thalassémie, anémie falciforme) ou une déficience en acide folique ou en B12 (voir Tableau II )2,3. Bien sûr, une ferritine normale n’exclut pas de manière définitive une déficience en fer puisque la ferritine est une protéine de phase aiguë qui augmente, entre autres, lors d’infections, d’inflammations systémiques, d’insuffisance rénale chronique ou de tumeurs malignes malgré un bas niveau d’hémoglobine3. Il faut donc tenir compte des autres problèmes de santé de la femme enceinte lors de l’interprétation de la ferritine. Approche non pharmacologique

En prévention de l’anémie, toutes les femmes enceintes devraient adopter un II INDICATIONS POUR UN TRAITEMENT EMPIRIQUE 3 régime alimentaire riche en fer. En effet, DE FER ET POUR LE DOSAGE DE LA FERRITINE selon Santé Canada, l’apport nutritionnel Femmes anémiques pour Femmes non anémiques Femmes non anémiques recommandé en fer est de 27 mg par jour lesquelles un dosage de la mais présentant un risque mais pour lesquelles un pendant la grossesse, dose que l’on ferritine est nécessaire élevé de déficience en fer dosage de la ferritine retrouve souvent dans la majorité des avant de commencer la et pour lesquelles un pourrait être nécessaire multivitamines prénatales. À titre de supplémentation en fer traitement empirique comparaison, il est de 18 mg par jour chez de fer est indiqué les femmes de 19 à 50 ans non enceintes14. Risque élevé de saignement Hémoglobinopathie connue Antécédent d’anémie Le fer contenu dans l’alimentation pendant la grossesse ou à Avant l’utilisation de fer Multiparité (≥ trois grossesses) existe sous deux formes : le fer hémique et l’accouchement parentéral le fer non hémique. Le fer non hémique Grossesse gémellaire Femmes qui refusent les est présent dans toutes les sources de fer, Intervalle entre deux grossesses transfusions sanguines qu’elles soient d’origine animale (volailles, < 1 an (p. ex., Témoins de Jéhovah) viandes rouges, poisson) ou encore Mauvaise alimentation Femmes avec un groupe végétale (légumineuses, légumes, fruits, Régime végétarien ou végan sanguin peu compatible produits céréaliers, noix). Le fer hémique Histoire récente de saignement est quant à lui présent exclusivement dans important les sources d’origine animale14. Il est deux Adolescentes enceintes à trois fois mieux absorbé que le fer non hémique. De plus, la viande renfermerait des composants organiques favorisant l’absorption du fer non hémique3. Ainsi, les femmes enceintes devraient être encouragées à consommer du fer d’origine animale. L’absorption du fer alimentaire varie aussi en fonction des aliments consommés conjointement lors des repas. En effet, les polyphénols, présents dans le thé et le café, les phytates, présents dans le riz, les produits céréaliers non raffinés, les légumineuses et certains légumes, ainsi que le calcium, principalement contenu dans les produits laitiers, diminuent l’absorption du fer non hémique en s’associant à celui-ci, le rendant insoluble. À l’opposé, la vitamine C augmente son absorption en favorisant la réduction de la forme ferrique du fer en sa forme ferreuse. Par conséquent, il faut conseiller aux femmes de séparer la prise de thé, de café et de produits laitiers d’une à deux heures avant ou après les repas. Par ailleurs, l’ajout d’une source de vitamine C à leurs repas devrait être encouragé, spécialement lors des repas sans viande. La vitamine C se retrouve principalement dans les agrumes et leurs jus, mais également dans d’autres fruits et légumes tels que le brocoli, la pomme de terre, le cantaloup, la fraise, le kiwi, etc14. Les changements apportés à l’alimentation n’étant pas suffisants pour la majorité des femmes enceintes nord-américaines afin de maintenir un apport en fer suffisant, elles auront besoin d’un supplément de fer.

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Approche pharmacologique Indications du fer oral en obstétrique

Le fer par voie orale constitue le traitement de première ligne. Il est indiqué en cas de déficience en fer ou d’anémie au premier trimestre3. En prévention de l’anémie, Santé Canada recommande d’emblée la prise quotidienne d’un supplément contenant 16 à 20 mg de fer élémentaire chez toutes les femmes enceintes, alors que l’OMS suggère 60 mg de fer élémentaire3. En effet, cette quantité de fer ajoutée à celle contenue dans une alimentation variée permet aux femmes enceintes d’obtenir la quantité nécessaire pendant toute leur grossesse14. Les lignes directrices du Royaume-Uni et le CADTH 2019 recommandent de donner empiriquement 40 à 80 mg de fer élémentaire par jour aux femmes non anémiques, mais à risque élevé de déficience en fer, ou de mesurer leur ferritine avant (voir Tableau II ). Si la ferritine mesurée est inférieure à 30 mcg/L, il s’agit d’une déficience en fer; un supplément devrait alors être prescrit2,3. En traitement de l’anémie ferriprive, la dose quotidienne usuelle recommandée est de 100-200 mg de fer élémentaire4. Cependant, les lignes directrices du Royaume-Uni suggèrent une dose plus faible, soit 40-80 mg par jour3. Le raisonnement derrière cette nouvelle recommandation sera discuté dans la section « Stratégies pour améliorer la tolérance du fer oral ». Différentes préparations de fer oral

Il existe deux types de préparation de fer oral : les sels ferreux (Fe2+, ionique) et les sels ferriques (Fe3+, non ionique). Les sels ferreux demeurent préférables étant CAS CLINIQUE 2/6 donné leur meilleure absorption et leur plus grande biodisponibilité. Les sels À l’étude de ses valeurs de laboratoire au DSQ, vous notez que son taux d’Hb était de 102 g/L il y ferreux sont le fumarate ferreux (p. ex., a deux semaines. Comme il s’agit du premier trimestre de grossesse et que la valeur d’Hb est PalaferMD), le sulfate ferreux (p. ex., inférieure à 110 g/L, Mme FS est potentiellement anémique. Vous lui expliquez que la FerodanMD) et le gluconate ferreux ( p. ex. supplémentation en fer prescrite permet de traiter l’anémie en grossesse et d’éviter les FertinicMD). Le seul sel ferrique disponible conséquences pour elle et son nouveau-né. Malgré la prise du Materna, il arrive que la quantité sur le marché canadien est le complexe de fer contenue dans la multivitamine ne suffise pas à combler les besoins augmentés en fer. polysaccharide fer (p. ex., FeraMAX MD). Étant donné qu’elle prend du Synthroïd le matin et pour éviter l’interaction avec le fer, vous lui Le ProferrinMD, quant à lui, serait un conseillez de prendre son fer au coucher avec du jus d’orange. Côté effets indésirables, vous dérivé des globules rouges de bovins. Les mentionnez qu’elle peut avoir des nausées, des douleurs à l’estomac, de la constipation et une caractéristiques propres à chacun de ces coloration plus foncée de ses selles. Vous l’informez des mesures à prendre pour les prévenir. sels sont présentées dans le Tableau III . Ils seraient tous équivalents du point de vue de leur efficacité à dose équivalente de fer élémentaire3. Cependant, une revue systématique publiée en 2013 par CanceloHidalgo et coll comparant l’innocuité de plusieurs préparations de fer oral chez des adultes a conclu que le sulfate ferreux est mieux toléré que le fumarate ferreux et que le sulfate ferreux à libération prolongée avec mucoprotéose serait le mieux toléré de tous15. Cependant, cette formulation n’est pas offerte au Canada. Parmi les sels commercialisés au Canada, le fer polysaccharide (p. ex., FeraMAX MD) et le sulfate ferreux anhydre (p. ex., Slow-FeMD) seraient les préparations les mieux tolérées étant donné leur formulation à libération retardée, mais l’usage de préparations de fer à enrobage entérique ou à libération prolongée est déconseillé. En effet, elles libèrent le fer au-delà du duodénum, là où il est majoritairement absorbé3, ce qui compromet leur efficacité. Malgré tout, il est à noter que, dans la pratique, le sulfate ferreux est le sel le plus prescrit. En effet, c’est la préparation de fer la moins coûteuse et la seule à être couverte par le Régime public d’assurance médicaments du Québec. Stratégies pour améliorer la tolérance du fer oral

Il est bien connu que les préparations de fer par voie orale occasionnent des effets indésirables au niveau gastro-intestinal, tels que les nausées, la dyspepsie, la constipation et la diarrhée. Ces effets sont dose-dépendants et jusqu’au tiers des femmes enceintes va les ressentir au point de limiter la dose de supplément de fer3. > Québec Pharmacie

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L’intolérance au fer et l’inobservance pouvant en découler sont les principaux > facteurs limitant l’efficacité du fer oral. Dans le but de limiter les effets indésirables associés à la prise de fer et de favoriser l’observance du traitement, il est parfois nécessaire de diminuer la dose pour améliorer la tolérance ou de faire l’essai d’une préparation de fer différente3. Une autre stratégie employée et ayant gagné en popularité au cours des dernières années est la prise intermittente de fer qui, selon des études plus récentes (Stoffel et coll, 2017, Demircioğlu et coll, 2020, Orgul et coll, 2020), favorise l’absorption optimale du fer et, par conséquent, prévient la survenue d’effets indésirables gastro-intestinaux16,17,18,19. La prise intermittente consiste à espacer l’intervalle de prise du fer. Par exemple, la patiente peut prendre son supplément tous les deux jours (lundi, mercredi, vendredi). Pour comprendre le raisonnement derrière cette méthode, il est important de parler du rôle de l’hepcidine. L’hepcidine est une hormone produite par le foie lors d’un surplus de fer plasmatique et/ou de la ferritine ou d’un état inflammatoire20 et qui inhibe CAS CLINIQUE 3/6 l’absorption du fer au niveau duodénal. Sa sécrétion varie également selon la dose de Une semaine plus tard, Mme FS vous appelle à la pharmacie, car elle se plaint de douleurs fer élémentaire prise. En effet, une dose abdominales depuis la prise de fer. Elle rapporte avoir essayé de le prendre avec du jus d’orange, de fer élémentaire supérieure ou égale à mais elle n’arrive pas à bien le tolérer. Elle voudrait tenter le FeraMAXMD qu’une amie lui a 60 mg pour les femmes ayant une suggéré, car elle le tolérait mieux. Comment pouvez-vous l’aider ? déficience en fer ou supérieure ou égale à 100 mg pour les femmes anémiques va

III

COMPARAISON DES TRAITEMENTS DE FER ORAL35,36, 37 Polypeptide de fer hémique

Gluconate ferreux

Sulfate ferreux anhydre

Sulfate ferreux

(p. ex., ProferrinMD)

(p. ex., FertinicMD)

(p. ex., Slow-FeMD)

Teneur usuelle

11 mg

300 mg

160 mg

Quantité et % de fer élémentaire

11 mg/co (100 %)

35 mg/co (12 %)

50 mg/co (30 %)

Effets indésirables

Coloration des selles en noir, troubles G-I (nausées, dyspepsie, constipation, diarrhée)

Coûts approximatifs

0,75 $/co

0,07 $/co

0,50 $/co

Couverture RAMQ

Non

Non

Non

Fumarate ferreux

Fer polysaccharide

(p. ex., PalaferMD)

(p. ex., FeramaxMD)

300 mg et solution de 75 mg/ml ou 150 mg/5 ml

300 mg et suspension de 300 mg/5 ml

150 mg

60 mg/co (20 %)

100 mg/cap (33 %)

150 mg/cap (100 %)

0,06 $/co

0,09 $/cap

0,80 $/cap

Oui

Non

Non

(p. ex., FerodanMD)

stimuler une sécrétion accrue en hepcidine qui demeure dans l’organisme pendant 24 à 48 heures21. C’est pour cette raison que les nouvelles lignes directrices du Royaume-Uni suggèrent une dose de fer élémentaire quotidienne plus faible de 40 à 80 mg au lieu de 100 à 200 mg pour traiter l’anémie de grossesse, et qu’en présence d’effets indésirables gastro-intestinaux, la prise intermittente devrait être considérée3. Les informations à donner sur la prise du fer et les interactions sont résumées dans la partie « Conseils aux patientes  ». Dans la mesure où il y a intolérance au fer par voie orale malgré les différentes stratégies mentionnées plus haut ou absence d’amélioration malgré une prise adéquate du fer, et où l’accouchement est imminent, un passage à la voie parentérale (IV) devient

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justifié. De manière générale, le fer par voie intraveineuse est mieux toléré et permet d’atteindre les cibles d’hémoglobine plus rapidement22. Suivi

L’hémoglobine doit être mesurée deux à trois semaines après avoir entrepris un traitement à base de fer par voie orale pour évaluer la réponse au traitement. Une fois que l’hémoglobine atteint l’intervalle visé selon le trimestre, le traitement doit être poursuivi pendant trois mois et au moins jusqu’à six semaines postpartum dans le but de restaurer les réserves de fer3. Il est également suggéré de mesurer la ferritine toutes les huit semaines jusqu’à la fin de la grossesse2. Afin d’évaluer adéquatement CONSEILS AUX PATIENTES3 l’efficacité du traitement, il faut considérer que l’augmentation de l’hémoglobine n Informer sur l’innocuité du fer et des différentes formulations durant la grossesse dépend de plusieurs facteurs, dont la n Renseigner sur les bienfaits du traitement pour la grossesse, le fœtus et le nouveau-né valeur de base de l’hémoglobine et des n Conseiller sur la posologie du traitement réserves de fer avant le début du n Conseiller sur la quantité de fer nécessaire selon la gravité de l’anémie traitement, les pertes concomitantes n Conseiller sur la prise du traitement : la même façon chaque jour, à jeun et/ou avec une (saignements, pertes gastro-intestinales), source de vitamine C d’autres carences en micronutriments n Espacer la prise d’antiacides, de calcium, de multivitamines, de lévothyroxine (si applicable), (vitamine B12, folate), des infections de thé, de café et de produits laitiers de deux à quatre heures 3 actives ou l’insuffisance rénale . De plus, n Conseiller sur les effets indésirables possibles et les mesures à prendre pour atténuer leur pour optimiser son absorption, il faut impact (si applicable) rappeler de prendre le fer à jeun avec du jus n Pour les nausées ou les crampes abdominales, le fer peut être changé pour une préparation d’orange et d’espacer sa prise des aliments ayant une teneur plus faible en fer élémentaire, ou la prise tous les deux jours peut être mentionnés plus haut. conseillée Pour ce qui est de l’innocuité, le suivi n Pour la constipation, la consommation de fibres, un émollient ou un laxatif peuvent être devrait être effectué tous les mois. Les conseillés effets gastro-intestinaux sont les effets n Les préparations à libération lente ou avec un enrobage entérique sont à éviter indésirables à considérer. En cas de n Conseiller sur l’approche alimentaire à adopter et, au besoin, diriger vers une nutritionniste constipation, une alimentation plus riche pour des conseils diététiques plus approfondis en fibres et une plus grande consommation d’eau sont à conseiller. En cas de douleurs abdominales, une prise intermittente peut être suggérée. Indications du fer IV en obstétrique

CAS CLINIQUE 4/6

De manière générale, le fer parentéral est mieux toléré que le fer oral, corrige plus Vous lui proposez de prendre son sulfate ferreux tous les deux jours, par exemple les lundis, rapidement le taux d’hémoglobine et de mercredis et vendredis. Vous lui expliquez cette nouvelle stratégie qui est de plus en plus ferritine, permet d’atteindre un taux suggérée par les études. De cette façon, le fer est mieux absorbé et mieux toléré. Pour ce qui est d’hémoglobine plus élevé et diminue le du FeraMAXMD, vous lui répondez que cette formulation peut être mieux tolérée, mais qu’elle nombre de transfusions post-partum4. Le demeure moins efficace, étant absorbée plus loin dans l’estomac. De plus, il n’est pas couvert traitement peut être envisagé en présence par les assurances. d’intolérance au fer oral malgré les stratégies mises en place, de malabsorption à cause de maladies inflammatoires de l’intestin telles que la maladie de Crohn ou la colite ulcéreuse, d’inobservance ou d’anémie modérée à sévère (Hb < 99 g/L) survenant aux deuxième et troisième trimestres2,3. Le fer intraveineux n’est pas indiqué au premier trimestre, car son utilisation est peu documentée à cette période. Par ailleurs, comme la voie intramusculaire cause plus de douleurs au site d’injection, d’infections et de réactions anaphylactiques (0,6-0,7 %), la voie intraveineuse est préférable4. Le fer-saccharose (VenoferMD) est actuellement le fer IV le plus utilisé parce que c’est celui qui bénéficie du plus grand nombre d’expositions chez la femme enceinte publiées à ce jour, qu’il présente un profil d’innocuité favorable et qu’il est possible > Québec Pharmacie

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IV

ÉTUDES DU FER PAR VOIE ORALE16,17,18,19,23

Étude

Définition des variables

Résultats

Conclusions/ Commentaires

Demircioğlu et coll, 2020

Le premier groupe (Hb moyenne de 96 g/L, ferritine moyenne de 4,6 mcg/L) a reçu 160 mg de fer élémentaire deux fois par jour pour un mois

Le taux d’Hb a augmenté significativement dans les 3 groupes, soit 123 g/L, 128 g/L et 123 g/L

Le deuxième groupe (Hb moyenne de 104 g/L, ferritine moyenne de 4,5 mcg/L) a reçu 80 mg de fer élémentaire une fois par jour pour un mois

La ferritine a augmenté significativement dans les 3 groupes (30, 20, 19 mcg/L)

L’efficacité d’une prise quotidienne ou tous les deux jours est similaire.

Femmes anémiques de 18 à 50 ans

Le troisième groupe (Hb moyenne de 103 g/L, ferritine moyenne de 4,7 mcg/L) a reçu 80 mg de fer élémentaire tous les deux jours pour un mois Orgul et coll, 2020 Femmes enceintes anémiques d’un hôpital en Turquie

Le premier groupe a reçu du fumarate ferreux 100 mg tous les jours pendant deux mois Le deuxième groupe a reçu du fumarate ferreux tous les deux jours pendant deux mois Les valeurs de base de la ferritine et d’Hb ne sont pas connues

Effets indésirables gastro-intestinaux chez 68 % des participants du groupe 1, chez 24 % du groupe 2 et 10 % du groupe 3 Le taux de ferritine a augmenté de 3,9 mcg/L dans le groupe prenant le fer de manière intermittente (n=140) et de 4,9 mcg/L dans le groupe prenant le fer tous les jours (n=124) Le taux de Hb a augmenté de 1,6 g/L dans le groupe prenant le fer de manière intermittente (n=140) et de 1,4 g/L dans le groupe prenant le fer tous les jours. Effets secondaires gastro-intestinaux plus fréquents dans le groupe prenant le fer tous les jours

Stoffel et coll, 2017 (étude #1)

Les deux groupes à l’étude avaient une ferritine < 25 mcg/L

Femmes déficientes en fer de 18 à 40 ans recrutées par l’ETH et l’Université de Zurich, en Suisse

Le premier groupe a reçu 60 mg de fer élémentaire tous les jours pour 14 jours

Stoffel et coll, 2017 (étude #2)

Les deux groupes à l’étude avaient une ferritine < 25 mcg/L

Pas de différence significative pour l’absorption du fer fractionné et total

Femmes déficientes en fer de 18 à 40 ans recrutées par l’ETH et l’Université de Zurich, en Suisse

Le premier groupe a reçu 120 mg de fer élémentaire une fois par jour pour trois jours

Concentration de l’hepcidine sérique plus élevée dans le deuxième groupe (n=10) que dans le premier groupe (n=10)

Ortiz et coll, 2011

80 femmes enceintes atteintes d’anémie ferriprive (avec Hb ≤ 105 g/L, ferritine ≤ 15 mcg/L et VGM < 80 fL) étaient randomisées 1:1 à 100 mg fer élémentaire deux fois par jour pour 90 jours

Femmes enceintes atteintes d’anémie ferriprive

Le deuxième groupe a reçu 60 mg de fer élémentaire tous les deux jours pour 28 jours

Absorption du fer totale de 131 mg dans le premier groupe et de 175 mg dans le deuxième groupe Taux d’hepcidine plus élevé dans le premier groupe après 14 jours de traitement

Le deuxième groupe a reçu 60 mg de fer élémentaire deux fois par jour pour trois jours

Le deuxième groupe a reçu du sulfate ferreux

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La prise intermittente de fer oral est aussi efficace et cause moins d’effets secondaires gastrointestinaux que la prise quotidienne de fer oral

Étude 1 : l’administration du fer un jour sur deux améliore son absorption et réduit la concentration sérique en hepcidine. Étude 2 : l’absorption du fer est meilleure lorsqu’il est pris en dose quotidienne et non en dose fractionnée Donc, cette façon de prendre le fer serait préférable

14 jours après la dernière dose, le régime posologique a été inversé

Le premier groupe a reçu un complexe d’hydroxyde de fer-III-polymaltose (Maltofer)

30

Absorption du fer de 16,3 % dans le premier groupe (n=21) et de 21,8 % dans le deuxième groupe (n=19)

La prise tous les deux jours a une incidence moindre d’effets secondaires gastro-intestinaux

Le taux d’hémoglobine a augmenté de 21,6 g/L dans le groupe 1 et de 19,3 g/L dans le groupe 2. Le taux de ferritine moyen était de 179 mcg/L dans le groupe 1 et de 157 mcg/L dans le groupe 2. Les effets secondaires gastro-intestinaux plus fréquents dans le deuxième groupe (56,4 % pour le sulfate ferreux et 29,3 % pour le Maltofer)

Le complexe d’hydroxyde de ferIII-polymaltose montre une efficacité similaire, mais un profil d’effets secondaires moindre que le sulfate ferreux pour le traitement de l’anémie ferriprive chez les femmes enceintes


> d’administrer des doses maximales plus grandes que pour le fer gluconate (FerrlecitMD). D’ailleurs, ce dernier contient 90 mg d’alcool benzylique, agent de conservation pouvant comporter un risque de dépression du SNC chez le nouveau-né. Cependant, à cette dose, le risque demeure faible et son utilisation reste sécuritaire en grossesse puisqu’il est métabolisé au niveau hépatique par la mère et n’affecte pas le fœtus4. Quant au fer-isomaltoside 1000, il est le fer intraveineux le plus CAS CLINIQUE 5/6 récent à être commercialisé sur le marché canadien, et son utilisation en grossesse Quelques semaines plus tard, Mme FS, maintenant à sa 29e semaine de grossesse, revient vous comporte plusieurs avantages qui seront voir à la pharmacie avec une nouvelle ordonnance de MonoferricMD 100 mg/mL 10 mL en discutés plus loin. Le Tableau V injection intraveineuse en une dose. Elle se rappelle avoir dû recevoir deux injections par voie présente les différents types de fer intraveineuse d’un certain type de fer à l’hôpital à sa première grossesse et se demande s’il intraveineux et leurs caractéristiques. s’agissait du MonoferricMD. Que lui dites-vous ? Fer-isomaltoside

Depuis septembre 2018, un nouveau fer IV a été commercialisé au Canada, le ferisomaltoside 1000 (MonoferricMD). Ce V COMPARAISON DES TRAITEMENTS dernier contient du fer fortement lié dans DE FER INTRAVEINEUX36,38, 39 des particules sphériques de fer/glucide (l’isomaltoside 1000), ce qui permet une Fer gluconate Fer-saccharose Fer-isomaltoside libération contrôlée de fer dans le corps, (FerrlecitMD) (VenoferMD) (MonoferricMD) et, par conséquent, offre la possibilité Dose test requise Non Non Non d’administrer toute la quantité en une seule dose, contrairement au ferDose maximale 125 mg 200-300 mg 1000 mg saccharose (VenoferMD)3. Bien qu’il soit Possibilité d’injecter en Non Non Oui (max. : 20 mg/kg) indiqué chez la femme enceinte aux une dose deuxième et troisième trimestres au Royaume-Uni, son utilisation au Canada Quantité de fer 12,5 mg/mL 20 mg/mL 100 mg/mL est officiellement restreinte à la femme élémentaire adulte non enceinte. Cependant, selon sa Effets indésirables Rash, prurit, douleur au site d’injection, tâche cutanée due à une monographie, le calcul de la dose doit se extravasation, palpitations, étourdissements faire selon le poids avant la grossesse chez 36 25 241 $/format 275 $/ format 450 $/ format Coûts approximatifs les femmes enceintes . Cela laisse donc de 10 mL de 10 mL de 10 mL supposer que son utilisation demeure possible dans cette population. Dans la Couverture RAMQ Oui Oui Oui revue de la littérature médicale, deux études (PROVIDE 2017 et FERWONIDA 2019) ont comparé le VenoferMD au MonoferricMD chez l’adulte; elles ont démontré que le MonoferricMD est CAS CLINIQUE 6/6 supérieur pour augmenter l’hémoglobine en deux semaines avec un profil d’effets Vous lui répondez qu’il s’agissait probablement du VenoferMD ou du FerrlecitMD qu’elle a reçu à indésirables similaire26,27. De plus, l’étude l’hôpital la dernière fois, soit le fer IV le plus prescrit pour traiter l’anémie, et qu’il se donne en deux de Wesstrom, publiée en avril 2020, ou trois injections. Vous l’informez que le MonoferricMD est un nouveau type de fer IV mis sur le évaluant l’efficacité et l’innocuité du fermarché depuis 2018. Bien qu’il coûte un peu plus cher que le VenoferMD, il peut être donné en une isomaltoside 1000 est arrivée à la seule dose, ce qui nécessite un seul déplacement à l’hôpital pour la patiente et réduit par le fait conclusion que ce dernier semble efficace même l’absentéisme au travail, les effets secondaires et les coûts liés au personnel infirmier. et sécuritaire pour traiter l’anémie de grossesse28. En prenant tout cela en considération, il y aurait donc avantage à l’utiliser chez la femme enceinte aux deuxième et troisième trimestres. D’un point vue économique, le seul inconvénient envisageable demeure son coût plus élevé (voir Tableau V ), mais son utilisation est justifiée compte tenu de l’absentéisme au travail et du besoin du personnel infirmier réduit associés au nombre d’injections moindre. > Québec Pharmacie

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> Analyse et critique des études du fer oral Les études sur le fer oral ont montré qu’une prise intermittente augmente l’absorption du fer et diminue la sécrétion sérique d’hepcidine, comparativement à une prise fractionnée. De plus, elles montrent que la prise intermittente est aussi efficace que la prise quotidienne et cause moins d’effets secondaires. Ces résultats nous permettent d’avoir une meilleure compréhension du rôle et de l’impact de l’hepcidine sur

VIa ÉTUDES SUR LE FER PAR VOIE IV26,27,28,29,30,31 Étude

Définition des variables

Résultats

Conclusions/Commentaires

Wesstrom et coll., 2020

Le groupe à l’étude (n=213) a reçu une dose de fer-isomaltoside selon le poids à la 1re visite. Chacune des femmes a reçu une infusion durant le deuxième ou troisième trimestre. 17 % des femmes de ce groupe ont reçu l’infusion après 36 semaines de grossesse.

Pas de différence entre les deux groupes concernant les objectifs de grossesse (maternels et fœtaux)

Le fer-isomaltoside en dose unique est efficace pour traiter l’anémie ferriprive de grossesse et présente un profil d’innocuité rassurant dans ce contexte.

Taux de réaction indésirable légère de 4,7 % observé dans le groupe à l’étude

Les effets indésirables observés dans l’étude étaient reliés à l’infusion IV et se présentaient principalement sous forme de flushing, de nausées ou d’anxiété. Ces symptômes se résolvaient après quelques minutes d’interruption de l’infusion et ne se reproduisaient pas à la reprise du traitement. Plus spécifiquement, si une réaction était observée, l’infusion était interrompue pendant 10-15 minutes. Les patientes demeuraient sous surveillance. Les signes vitaux étaient surveillés. Les symptômes s’amélioraient pour enfin disparaître au bout de quelques minutes. Ensuite, l’infusion était reprise à pas plus que 50 % de la vitesse de perfusion initiale. Enfin, après 5-10 minutes, la vitesse de perfusion était augmentée à nouveau.

426 femmes enceintes aux 2e et 3e trimestres ayant accouché au Maternity Ward du Falu Hospital en Suède entre le 6 août 2013 et le 31 juillet 2018

Les femmes ayant reçu le fer IV présentaient une anémie et/ou déficience en fer symptomatique et déterminée tel que Hb < 100 g/L et/ou ferritine < 20 mcg/L Le groupe témoin (n=213) était composé d’un nombre égal de femmes n’ayant pas reçu de fer IV, appariées aux femmes du groupe à l’étude selon la date d’accouchement, l’âge maternel (± deux ans) et la parité

FERWON-IDA, 2019

Le premier groupe a reçu une dose unique de 1000 mg de fer-isomaltoside

Hommes et femmes de 18 ans et plus, anémiques, recrutés dans 114 sites différents à travers les États-Unis

Le deuxième groupe a reçu jusqu’à cinq doses de 200 mg de fer-saccharose Les deux groupes étaient comparables (Hb moyenne de 92,5 g/L et ferritine de 14,4 mcg/L dans le groupe recevant du fer-isomaltoside vs Hb moyenne de 91,2 g/L et ferritine de 11,9 mcg/L dans le groupe recevant du fersaccharose). Patients inclus avec une Hb inférieure ou égale à 110 g/L, une saturation en transferrine (TSAT) < 20 % et une ferritine < 100 mcg/L Les patientes des deux groupes avaient un score FACIT moyen de 24,0 Le score FACIT (Functional Assessment of Chronic Illness Therapy) est un score qui mesure les symptômes de fatigue. Le score est mesuré à l’aide d’un formulaire de questions que le patient doit remplir. Un score inférieur à 30 est considéré comme de la fatigue sévère.

Aucune réaction indésirable sévère observée Dans le groupe à l’étude, l’Hb moyenne est passée de 97 g/L avant la dose de fer à 116 g/L à l’accouchement.

L’augmentation d’Hb après huit semaines était non inférieure pour le fer-isomaltoside comparativement au fersaccharose Le temps moyen pour que l’Hb augmente de ≥ 20 g/L était de 28 jours pour les deux groupes À tout moment dans l’étude, 70 % des femmes dans le groupe de ferisomaltoside avaient une ferritine supérieure ou égale à 100 mcg/mL et une TSAT entre 20 %-50 % vs 34 % dans le groupe de fersaccharose

L’administration d’une dose unique de ferisomaltoside a permis une augmentation de l’Hb plus rapide et plus prononcée. Le fer-isomaltoside permet de maintenir l’Hb à un niveau thérapeutique jusqu’à 8 semaines après son administration. Le fer-isomaltoside permet non seulement une amélioration des paramètres hématologiques mais également une amélioration du score FACIT, ce qui se traduit par une amélioration de la qualité de vie. L’incidence d’effets secondaires est similaire entre le fer-isomaltoside et le fer-saccharose.

Le score FACIT a augmenté dans les deux groupes, soit à 39,98 pour les patients recevant du ferisomaltoside et 39,93 pour les patientes recevant du fersaccharose.

l’absorption du fer. Cependant, chacune comportait quelques lacunes. Les études de Stoffel étaient des études ouvertes, de 14 à 28 jours, menées chez 20 femmes qui n’étaient pas anémiques, mais seulement déficientes en fer. L’issue des études était l’absorption du fer et le taux sérique d’hepcidine. Le type d’étude, sa courte durée et la petite taille d’échantillon ne permettent pas de généraliser les résultats à la population entière. Également, l’issue primaire n’était pas la correction de l’anémie. Quant à l’étude de >

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VIb ÉTUDES SUR LE FER PAR VOIE IV26,27,28,29,30,31 Étude

Définition des variables

Résultats

Conclusions/Commentaires

Qassim et coll, 2018

Revue systématique de 47 études portant sur le fer- saccharose (41 études), le fer carboxymaltose (quatre études) et le fer polymaltose (trois études). Parmi les 41 études, il y avait 21 essais randomisés contrôlés et 26 études observationnelles.

Toutes les études ont montré une amélioration significative dans les paramètres hématologiques.

Bien que l’utilisation du fer IV améliore les paramètres hématologiques, elle ne se traduit pas par une amélioration des objectifs cliniques en grossesse.

Revue systématique

L’augmentation médiane était de 21,8 g/L à 3-4 semaines de grossesse et 30,1 g/L à l’accouchement. Toutefois, il n’y avait aucune preuve d’amélioration des objectifs cliniques. L’augmentation médiane d’Hb était plus importante si une dose plus élevée était administrée La prévalence médiane d’effets secondaires était moindre chez les patients recevant du fer polymaltose (2,2 %; intervalle : 0-4,5 %) que du fer carboxymaltose (5,0 % intervalle : 0-20 %) et le fer-saccharose (6,7 %; intervalle : 0-19,5 %)

PROVIDE, 2017 491 hommes et femmes de 18 ans et plus, anémiques et recrutés dans 48 sites différents aux États-Unis

Le premier groupe (n=330) a reçu le ferisomaltoside pour cinq semaines (dose cumulative basée sur le poids et l’Hb avec une moyenne de 1640,2 mg reçu) Le deuxième groupe (n=161) a reçu le fersaccharose pendant cinq semaines (dose cumulative calculée selon la formule de Ganzoni avec une moyenne de 1227,9 mg reçus) La dose maximale reçue est de 2000 mg pour les deux types de fer Les patients avaient une Hb < 110 g/L et une ferritine sérique < 100 mcg/L

Neeru et coll, 2012 100 femmes entre la 14e et 36e semaine de grossesse avec anémie ferriprive

Le premier groupe (n=50) a reçu du fersaccharose selon la formule : Dose (mg)=[250 × (Hb cible (110 g/L) – Hb actuelle) + 500 mg (pour réserves en fer)] Le deuxième groupe (n=50) a reçu du fumarate ferreux 300 mg Les deux groupes étaient comparables et il n’y avait pas de différence significative Le taux d’Hb était entre 65 et 109 g/L et la ferritine était en bas de 27 mcg/L

Le fer-isomaltoside a fait augmenter l’Hb de 27,4 g/L, alors que le fer- saccharose a fait augmenter l’Hb de 22 g/L après 5 semaines Le temps moyen pour que l’Hb augmente de 20 g/L était de 26 jours dans le groupe ayant reçu le fer-isomaltoside vs 37 jours pour le groupe ayant reçu le fer-saccharose Incidence d’effets indésirables non significatifs dans les deux groupes (22,5 % pour le ferisomaltoside vs 17,3 % pour le fer-saccharose) Plus d’effets indésirables cutanés rapportés dans le groupe ayant le fer-isomaltoside (7,5 %) vs le fer-saccharose (3,0%)

Aucune préparation de fer IV n’a été démontrée supérieure. Le choix de la préparation est guidé par le coût et la disponibilité du personnel pour l’administration.

L’augmentation de l’Hb dans le groupe recevant le ferisomaltoside est statistiquement significative par rapport au groupe recevant le fer-saccharose. Le fer-isomaltoside permet une administration moins fréquente que le fer-saccharose. L’incidence d’effets secondaires est similaire entre le fer-isomaltoside et le fer-saccharose.

Le taux d’Hb a augmenté de 14,11 % dans le groupe fumarate ferreux et de 23,62 % dans le groupe fer- saccharose

Le fer-saccharose est sécuritaire et efficace dans le traitement de l’anémie ferriprive en grossesse.

Le taux d’Hb cible de 110 g/L a été atteint chez 66 % des patients du groupe - fer saccharose vs 61 % du groupe fumarate ferreux (pas de différence significative)

Le fer-saccharose et le fer fumarate permettent d’observer une augmentation de l’Hb comparable.

L’augmentation de la ferritine était significativement plus élevée dans le groupe fer-saccharose (139 mcg/L vs 27 mcg/L)

Le fer-saccharose permet une meilleure réplétion des réserves en fer que le fer fumarate. Le traitement à base de fer par voie IV est significativement plus dispendieux que le traitement à base de fer par voie orale.

Van Wyck et coll, 2007 352 femmes anémiques à moins de 10 jours postpartum (Hb ≤ 100 g/L)

Le premier groupe (n=174) a reçu le carboxymaltose ferrique IV (à ≤ 1000 mg en 15 minutes, répété toutes les semaines pour atteindre une dose de remplacement individualisé ou un maximum de 2500 mg) Le deuxième groupe (n=178) a reçu le sulfate ferreux 325 mg (65 mg de fer élémentaire) trois fois par jour pendant six semaines.

Le premier groupe avec le fer IV ont eu une augmentation d’Hb de ≥ 20 g/L en 7 jours par rapport au deuxième groupe avec le fer oral

Le carboxymaltose ferrique est mieux toléré et augmente plus rapidement le taux d’Hb.

La proportion de patients qui ont atteint une augmentation de ≥ 20 g/L à la fin de l’étude était similaire (96,4 % IV vs 94,1 % oral) Taux d’effets indésirables de 22,99 % avec groupe IV vs 34,27 % avec le groupe oral. Aucun effet secondaire majeur rapporté.

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> Demircioglu et coll, étude prospective menée chez 150 femmes anémiques, et celle d’Orgul et coll, étude de cas-témoins menée chez environ 264 femmes anémiques, les patientes n’étaient pas des femmes enceintes, ce qui rend plus difficile la généralisation à la population étudiée. Analyse et critique des études sur le fer intraveineux

Les études sur le fer intraveineux ont montré que le fer-isomaltoside s’est montré non inférieur et même significativement supérieur au fer-saccharose pour augmenter le taux d’hémoglobine de 20 g/L et pour corriger plus rapidement les paramètres hématologiques (ferritine, TSAT et fer sérique). Également, l’étude de Wesstrom illustre qu’aucune différence statistiquement significative n’a été observée lorsqu’on comparait avec les femmes n’ayant pas SUIVI ET SURVEILLANCE DE LA THÉRAPIE2,3 reçu de fer IV quant à la survenue de complications maternelles et fœtales. Les Pendant la grossesse Après l’accouchement résultats de cette étude indiquent qu’il est rassurant d’utiliser le fer-isomaltoside en Dosage de l’hémoglobine à la première visite L’hémoglobine doit être mesurée dans les grossesse. Malgré tout, il faut demeurer prénatale avant 12 semaines de grossesse et 24-48 heures suivant l’accouchement, à la 28e semaine de gestation, et de la particulièrement pour les femmes qui vigilant quant à l’usage du ferferritine chez certaines patientes perdent plus de 500 ml de sang (250 mg de isomaltoside en grossesse. En effet, un cas (hémoglobinopathie connue, déficience en fer), qui avaient une anémie mal maîtrisée isolé de bradycardie fœtale a été rapporté acide folique ou B12) pendant la période prénatale ou qui chez une femme de 24 ans atteinte de la présentent des symptômes suggestifs Dosage de l’hémoglobine deux à trois maladie de Crohn et dont l’état a d’anémie après l’accouchement (syncopes, semaines après le début du traitement afin nécessité une césarienne urgente après pâleur, tachycardie) d’évaluer la réponse au traitement ainsi que l’administration du fer-isomaltoside33. l’adhésion Les femmes qui ont une hémoglobine < 100 Par contre, les études mentionnées g/L dans les 48 heures suivant Lorsque l’hémoglobine est dans l’intervalle avaient quelques points faibles. Dans les l’accouchement, sont stables thérapeutique, le traitement doit être hémodynamiquement et asymptomatiques études PROVIDE et FERWON-IDA, maintenu pour trois mois et au moins six ou modérément asymptomatiques devraient études prospectives, ouvertes, semaines post-partum pour refaire les prendre un supplément de fer oral avec une réserves de fer. randomisées et multicentriques menées teneur en fer élémentaire de 40 à 80 mg par chez des patients souffrant d’anémie de Si l’hémoglobine ne revient pas à la normale jour pour au moins trois mois. malgré le traitement, il faut confirmer diverses étiologies, les femmes enceintes L’utilisation du fer IV post-partum doit être l’adhésion au traitement et envisager des étaient exclues. Leurs résultats ne sont réservée aux femmes qui ont une intolérance causes sous-jacentes à l’anémie, comme une donc pas généralisables à la population antérieure, ou qui ne répondent pas au fer déficience en acide folique ou une qui nous intéresse. De plus, certains oral, et/ou qui ont besoin d’une prise en malabsorption. auteurs ayant participé aux deux études charge rapide en raison de la gravité des Envisager l’utilisation de fer IV à partir du 2e symptômes d’anémie. étaient employés ou consultants pour trimestre de grossesse chez des patientes Pharmacosmos A/S, compagnie ayant avec une déficience en fer confirmée et qui commercialisé le MonoferricMD. Ces ne tolèrent pas ou ne répondent pas au études étaient d’ailleurs financées par traitement à base de fer oral cette même compagnie. La possibilité Envisager l’utilisation de fer IV pour les qu’il y ait eu conflit d’intérêts ne peut femmes qui ont une Hb < 100 g/L après 34 semaines de gestation alors être exclue. Notons également que d’autres fers IV ont été étudiés en grossesse, dont le fer carboxymaltose et le fer polymaltose, mais ceux-ci ne sont pas commercialisés au Canada. Toutefois, la revue systématique de Qassim a démontré leur efficacité et leur sécurité pour traiter l’anémie en grossesse. Par ailleurs, d’autres études sont actuellement en cours, dont celle de Markova (étude de phase IV) qui évalue la prise du fer MonoferricMD comparativement à la prise de fer fumarate34. L’objectif de l’étude est de déterminer si un traitement à base de fer par voie IV ou un traitement intensifié de fer par voie orale serait la meilleure deuxième ligne de traitement pour prévenir une détérioration de la déficience en fer après un échec au traitement standard pendant quatre semaines.

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Analyse et critique des études comparant le fer oral au fer intraveineux

Les études de Neeru et Qassim permettent de conclure que le fer IV est associé à une plus grande augmentation de l’Hb que le fer oral, mais cette différence reste modeste étant donné l’effet du fer oral par rapport au placébo. Elles rapportent aussi que le fer oral est associé à une incidence élevée d’effets indésirables gastro-intestinaux pouvant avoir un impact important sur l’adhésion au traitement, alors que le fer IV est associé à un taux plus faible d’effets indésirables surtout reliés à l’infusion. Les résultats de Neeru et coll semblent montrer que le fer IV permet une meilleure réplétion des réserves en fer. Toutefois, tel que l’indiquent les résultats des 17 études comparant le fer IV au fer oral dans la revue systématique de Qassim et coll, il n’est pas encore clair si de meilleurs paramètres hématologiques sont associés à de meilleurs objectifs de grossesse. Ainsi, il serait pertinent que des études se penchent sur cette question. Suivi

Après l’injection du fer IV, les réticulocytes se forment après 7 à 10 jours, et l’hémoglobine s’élève après deux à trois semaines, comme avec la prise orale. Une FSC devrait être réalisée quatre à huit semaines après l’injection2. Si la réponse au fer est adéquate, certaines références suggèrent de mesurer périodiquement l’Hb et la ferritine toutes les huit semaines tout au long de la grossesse2,11,12. Conclusion et rôle du pharmacien

L’anémie est un problème de santé commun chez les femmes enceintes. Le pharmacien doit être informé sur la pathologie afin de bien conseiller les patientes et de gérer la pharmacothérapie. En effet, il peut jouer un rôle important dans les soins des femmes atteintes d’anémie. Il est responsable de bien les conseiller sur les bienfaits de leur traitement, de prévenir les interactions médicamenteuses, de les conseiller sur la gestion des effets indésirables et d’assurer un suivi régulier. En présence d’anémie au premier trimestre, il doit pouvoir déterminer les besoins des patientes en supplémentation orale de fer. Aux deuxième et troisième trimestres, il doit être capable de reconnaître les femmes qui pourraient bénéficier d’un traitement IV et de les adresser à leur spécialiste pour éviter les complications éventuelles sur le déroulement de la grossesse. Points-clés des nouveautés sur le traitement de l’anémie en grossesse selon les lignes directrices 2019 du Royaume-Uni

1. Il est recommandé de doser la ferritine et de traiter empiriquement avec 40 à 80 mg de fer oral les patientes ayant des facteurs de risque d’une déficience en fer (voir Tableau II ). 2. Il est recommandé de donner 40 à 80 mg de fer élémentaire par jour en traitement de l’anémie, au lieu de 100 à 200 mg. 3. Afin d’améliorer la tolérance au traitement à base de fer en anémie légère à modérée, une prise tous les deux jours pourrait être conseillée. 4. Les formulations de fer à enrobage entérique et à longue durée d’action sont déconseillées parce qu’elles sont libérées plus loin dans le tractus gastro-intestinal, ce qui réduit l’absorption. 5. Le MonoferricMD est un nouveau traitement IV efficace et sécuritaire pour traiter l’anémie de grossesse chez les femmes enceintes aux deuxième et troisième trimestres. Il présente les avantages d’augmenter plus rapidement le taux d’hémoglobine et d’être administré en une seule dose comparativement au VenoferMD et FerrlecitMD, mais à un coût pour la patiente un peu plus élevé. n

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> Références Les références en gras indiquent au lecteur les références principales de l’article, telles que choisies par les auteures.

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Répondez à ces questions en vous rendant sur ·ca Accréditation valide du 1er décembre 2021 au 31 décembre 2022

8.

Donne : 3 h 30 N° d’accréditation : 10114

9.

Concernant les changements physiologiques en grossesse, quel énoncé parmi les suivants est faux ? n Le volume plasmatique augmente dès le premier trimestre. n Le volume plasmatique atteint un plateau au deuxième trimestre. n L’augmentation du volume plasmatique totale représente une augmentation d’environ 30 à 50 %. n En réponse à l’augmentation du volume plasmatique et des besoins en fer du fœtus, les concentrations sériques atteignent le creux au deuxième trimestre. Concernant la définition de déficience en fer, quel énoncé parmi les suivants est vrai ? n Un taux d’hémoglobine normale et une ferritine < 30 mcg/L n Un taux d’hémoglobine normale et une ferritine entre 30 mcg/L et 50 mcg/L n Un taux d’hémoglobine entre 105 g/L et 115 g/L, et une ferritine normale n Un taux d’hémoglobine < 105 g/L et une ferritine < 30 mcg/L

10. Concernant les mesures non pharmacologiques pour la déficience en fer,

quel énoncé parmi les suivants est faux ? Toutes les femmes enceintes devraient être avisées d’adopter un régime alimentaire riche en fer. n Le fer contenu dans l’alimentation existe sous deux formes : le fer hémique et le fer non hémique. n Le fer hémique est présent exclusivement dans les sources d’origine animale. n Le fer non hémique est présent exclusivement dans les sources d’origine végétale. n

11. Concernant le nouveau fer IV Monoferric

MD , quel énoncé parmi les suivants est faux ? Le Monoferric permet d’administrer toute la quantité en une seule dose. n Le Monoferric est indiqué chez les femmes enceintes aux deuxième et troisième trimestres, au Canada. n Les études PROVIDE 2017 et FERWON-IDA 2019 ont montré que le Monoferric est supérieur au VenoferMD pour augmenter l’hémoglobine en deux semaines avec un profil d’effets indésirables similaire. n Le Monoferric coûte plus cher que les fers saccharose et gluconate.

n

12. Quels éléments de suivi sont importants pour les suppléments de fer PO et IV ? n n n

n n

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L’hémoglobine doit être mesurée deux à trois semaines après le début d’un traitement à base de fer par voie orale afin d’évaluer la réponse au traitement. Une FSC devrait être mesurée quatre à huit semaines après l’injection de fer IV. Une fois que l’hémoglobine atteint l’intervalle visé selon le trimestre, le traitement doit être poursuivi pendant trois mois et au moins jusqu’à six semaines post-partum, dans le but de restaurer les réserves de fer. Un suivi en matière d’innocuité devrait être fait chaque mois auprès de la patiente. Toutes ces réponses.


13. Concernant le rôle de l’hepcidine dans l’absorption du fer, quel énoncé parmi

les suivants est faux ? L’hepcidine est produite en début de journée, lors d’un état inflammatoire et lors d’une élévation du fer plasmatique et/ou de la ferritine. n L’hepcidine est une hormone produite par le pancréas. n La sécrétion d’hepcidine inhibe l’absorption du fer au niveau du duodénum et la relâche de fer par les macrophages. n Une supplémentation en fer élémentaire supérieure ou égale à 60 mg pour les femmes ayant une déficience en fer ou supérieure ou égale à 100 mg pour les femmes anémiques vient stimuler une sécrétion accrue d’hepcidine qui demeure dans l’organisme pendant 24 à 48 heures. n

14. Quel énoncé est faux à propos des interactions avec le fer ? n

Si la tolérance à la prise de fer à jeun n’est pas favorable, il faut rappeler les aliments à éviter en concomitance, tels que le thé, le café et les produits laitiers qui devraient être pris une à deux heures avant ou après les repas. n Suggérer d’espacer de deux heures la prise de fer avec une source de vitamine C. n Suggérer d’espacer de quatre heures la prise d’antiacides, de calcium, de multivitamines et de lévothyroxine (si applicable). n Suggérer d’espacer la prise de fer avec certains antibiotiques.

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e r è i n r De ance ! ch Novembre – décembre 2020 vol. 67 n˚ 6

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JAN. – FÉV. 2021 VOL. 68 N˚ 1

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0,75 UFC ux h m c qu co î l él v l é.

Le Conseil canadien de l’éducation continue en pharmacie a accordé 0,75 unité de FC à cette leçon. CCECP No 1329-2021-3299-I-P

Obj c f Après avoir réussi ce leçon, le pharmacien sera capable de : 1. Décrire la pathophysiologie et le présentation clinique des migraines menstruelles 2. Comparer les différentes classes de médicaments pour traiter les migraines menstruelles 3. Fournir des stratégies fondées sur des données probantes pour le traitement des migraines menstruelles 4. Décrire le rôle du pharmacien dans la prise en charge des migraines menstruelles

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RPh, BScPhm, Ph mD, EAD, CCPE,

V u ll z co ul c l ço l u Co x.c ou co î l él v l é. DIVULGATION Les auteurs et les réviseurs scientifiques de cette leçon de FC ont déclaré n’avoir aucun conflit d’intérêts réel ou potentiel avec le commanditaire. Dans le présent document, les mots de genre masculin appliqués aux personnes désignent les hommes et les femmes.

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RPh, Ph mD

ménopause, lorsque les concentrations hormonales changent de façon erratique, et sont donc plus difficiles à traiter(2). Les migraines menstruelles entraînent une incapacité importante chez les personnes qui en souff rent, surtout en présence de symptômes vasomoteurs (p. ex. bouffées de chaleur, transpiration, sensations de chaleur), et leur fardeau en termes d’incapacité est plus important que celui des migraines non menstruelles(2).

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1. Après avoir lu attentivement cette leçon, étudiez chaque question, puis choisissez la réponse qui vous semble correcte. Répondez en ligne sur eCortex.ca. 2. Une note d’au moins 70 % est nécessaire pour réussir cette leçon (5 bonnes réponses sur 6). 3. Remplissez le formulaire de commentaires pour cette leçon sur eCortex.ca.

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Les migraines menstruelles (ou migraines cataméniales) sont définies comme des céphalées migraineuses qui surviennent en étroite relation temporelle avec le début des menstruations et les fluctuations physiologiques associées des niveaux d’œstrogènes(1,2). Cela inclut les menstruations avec saignements utérins pendant les changements hormonaux endogènes d’un cycle menstruel normal, ou à la suite du retrait d’hormones exogènes, comme pendant la période sans hormone des contraceptifs hormonaux combinés(2). Parmi les 14,7 % de personnes impactées par les migraines dans le monde, les migraines menstruelles représentent 20 à 25 % de toutes les femmes qui en souff rent et 22 à 70 % de toutes les consultations dans les cliniques spécialisées dans la prise en charge des personnes souff rant de céphalées(2,3). La prévalence de la migraine chez les femmes augmente après la puberté, au début de l’adolescence, en relation avec l’apparition des règles, présente un pic d’incidence entre 20 et 24 ans, et diminue nettement après la ménopause(4). Les migraines menstruelles s’améliorent généralement pendant la grossesse. Cependant, les migraines menstruelles augmentent en fréquence et en intensité pendant la péri-

C

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T bl u cl qu Les migraines se caractérisent par une inflammation neurogène et une vasodilatation, causées par des changements neurologiques complexes dans les voies centrales de la douleur, la stimulation du système trigémino-vasculaire et la libération de substances pro-inflammatoires comme le peptide relié au gène calcitonine (PRGC), les cytokines et les prostaglandines(2,5,6). Les migraines menstruelles sont liées à la diminution des œstrogènes pendant les menstruations(2). L’œstrogène joue un rôle important dans la physiopathologie de la migraine en modulant la neurotransmission de la douleur, en régulant la sensibilisation des neurones du nerf trijumeau et la libération de neuropeptides tels que le PRGC, lequel est impliqué dans l’inflammation et la vasodilatation(2,5,6,7). Les migraines menstruelles sont classées en deux catégories : les migraines cataméniales pures, qui ne surviennent que pendant les règles et sont moins fréquentes (7 % des migraines chez les femmes), et les migraines liées aux menstruations, qui surviennent pendant les règles et à d’autres moments, et sont plus fréquentes (34,5 % des migraines chez les femmes) (voir Tableau 1)(8). Les deux types de migraines

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menstruelles commencent deux jours avant ou trois jours après le premier jour des menstruations ou du saignement de retrait(1). Les deux types de migraines menstruelles peuvent se présenter avec ou sans aura(1). Les migraines sans aura durent généralement de 4 à 72 heures et se présentent souvent avec une douleur unilatérale, pulsatile, d’intensité modérée à sévère, s’aggravant avec l’activité physique, une sensibilité à la lumière et/ou au son, et sont associées à des nausées(1). La plupart des migraines menstruelles impliquant une privation en oestrogènes se présente typiquement comme des migraines sans aura (22 à 70 % des migraines menstruelles)(1,2). (Tableau 2) Les migraines avec aura présentent des symptômes neurologiques focaux transitoires, tels que des manifestations visuelles, sensorielles, de la parole/du langage, motrices, du tronc cérébral ou de la rétine, qui sont entièrement réversibles et précèdent ou accompagnent généralement la céphalée(1). (Tableau 2) 18 à 25 % des migraines menstruelles sont avec aura(2). Les migraines, avec ou sans aura, évoluent généralement en trois phases : prodrome, céphalée et postdrome(10). Le prodrome peut précéder l’apparition de la douleur jusqu’à 72 heures et comprend des symptômes de fatigue, de troubles de la mémoire, de difficultés de concentration, de changements d’humeur, d’irritabilité, d’envie de manger, de bâillements, de raideur de la nuque, de photophobie et de phonophobie(11). La phase de céphalée commence par l’apparition d’une douleur unilatérale, lancinante; elle est exacerbée par l’effort physique(11). La sensibilisation des nerfs, connue sous le nom d’allodynie, sur le cuir chevelu, le visage et le cou est typique et peut rendre douloureuses des activités courantes comme se peigner, se raser, porter des lentilles de contact ou des lunettes(12). La photophobie et la phonophobie sont également présentes chez jusqu’à 80 % des personnes migraineuses(11). Enfin, le postdrome (phase de récupération) peut durer un à deux jours après la disparition des symptômes de la céphalée et peut consister en une fatigue, une réduction de l’appétit et des changements d’humeur(13). Notamment, les migraines menstruelles sont généralement plus sévères, de plus longue durée et associées à des taux de rechute plus élevés que les migraines typiques(1).

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Répondez en ligne sur eCortex.ca

TABLEAU 1

TABLEAU 2

Migraine cataméniale pure

Migraine sans aura

Critères de diagnostic : • Crises chez une femme ayant ses règles et remplissant les critères de la migraine sans aura. • Les crises surviennent entre 2 jours avant et 3 jours après le premier jour des règles ou du saignement de retrait - Au moins deux cycles menstruels sur trois. - À aucun autre moment du cycle

A. Au moins cinq crises répondant aux critères B à D

Migraines liée aux menstruations Critères de diagnostic : • Crises chez une femme ayant ses règles et remplissant les critères de la migraine sans aura. • Les crises surviennent entre 2 jours avant et 3 jours après le premier jour des règles ou de l’hémorragie de privation. - Au moins deux cycles menstruels sur trois. - À d’autres moments du cycle Adapté de Headache Classification Committee of the International Headache Society, 2018; Diener et al, 2019(1,9)

Dépistage et signaux d’alarme

B. Crises de céphalées durant 4 à 72 heures (non traitées ou traitées sans succès) C. La céphalée présente au moins deux des caractéristiques suivantes : • Localisation unilatérale • Douleur de nature pulsatile • Intensité de la douleur modérée ou sévère • Aggravation par ou entraînant l’évitement d’une activité physique habituelle (par exemple, marcher ou monter des escaliers) D. Lors de maux de tête, au moins un des éléments suivants : • Nausées, vomissements, ou les deux • Photophobie et phonophobie E. N’est pas mieux pris en compte par un autre diagnostic de la Classification internationale des céphalées-4 (CIC-4) Migraine avec aura

Le diagnostic de la migraine menstruelle repose sur l’évaluation des antécédents médicaux et l’examen physique(1). Les patientes sont encouragées à tenir un journal des céphalées pendant au moins 2 à 3 mois, afin d’établir un lien temporel entre les crises de migraine et les menstruations, d’évaluer la fréquence et la gravité des maux de tête et d’identifier les déclencheurs hormonaux endogènes et exogènes(1). Cela aidera également à établir un diagnostic entre la migraine cataméniale pure et la migraine liée aux menstruations. Outre la relation temporelle avec les menstruations, un questionnaire d’identification de la migraine en trois questions peut aider à diagnostiquer rapidement les migraines chez les patientes. Une réponse positive à 2 questions sur 3 a une valeur prédictive de 93 %(14). (Tableau 3) En outre, le moyen mnémotechnique « SNOOP » peut être utilisé pour écarter toute cause secondaire potentielle de céphalée et identifier les signaux d’alarme qui peuvent justifier l’orientation vers un médecin ou les soins d’urgence(15). (Tableau 4)

A. Au moins deux attaques répondant aux critères B et C

Stratégies de traitement de la migraine menstruelle

• Les crises peuvent durer de 2 à 72 heures • Par rapport aux adultes, les maux de tête sont plus souvent bilatéraux; un modèle adulte de douleur unilatérale apparaît généralement à la fin de l’adolescence ou au début de l’âge adulte. • La photophobie et la phonophobie peuvent être déduites du comportement des jeunes enfants.

L’objectif principal du traitement aigu est d’obtenir rapidement un soulagement de la douleur dans les deux heures qui suivent le traitement(1,16). Chez les patientes qui subissent des crises de longue durée avec un risque élevé de récidive, le soulagement durable de la douleur est également un critère d’évaluation

B. Un ou plusieurs des symptômes d’aura suivants, totalement réversibles : • Visuel • Sensoriel • Parole et/ou langage • Moteur • Tronc cérébral • Rétinien C. Au moins trois des six caractéristiques suivantes : • Au moins un symptôme d’aura s’étend progressivement sur plus de 5 minutes • Deux symptômes ou plus surviennent successivement • Chaque symptôme d’aura individuel dure de 5 à 60 minutes • Au moins un symptôme d’aura est unilatéral • Au moins un symptôme d’aura est positif (par exemple, troubles visuels, sensations de picotement, discours confus ou aphasique) • L’aura est accompagnée ou suivie dans les 60 minutes par des céphalées D. N’est pas mieux pris en compte par un autre diagnostic CIC-4 Caractéristiques de la migraine chez les enfants et les adolescents

Adapté du Comité de classification des céphalées de l’International Headache Society, 2018(9)


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TABLEAU 3

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Outil ID Migraine en 3 questions (Lipton, 2003)(14)

Question

Oui

Non

Avez-vous eu des nausées ou des vomissements lorsque vous avez eu les maux de tête? La lumière vous gênait-elle (beaucoup plus que lorsque vous n'avez pas de maux de tête)? Vos maux de tête vous ont-ils empêché de travailler, d'étudier ou de faire ce que vous deviez faire pendant au moins une journée? TABLEAU 4

S

(pour Systemic symptoms or secondary risk factors, such as fever, weight loss, cancer or HIV.)

N

(pour Neurological symptoms, such as arm Symptômes neurologiques, tels qu'engourdissement numbness, altered consciousness, loss of du bras, altération de la conscience, perte de la vision.) vision.

O

(pour Onset; an abrupt, thunderclaplike onset can indicate an acute bleed requiring emergency care.)

Apparition; une apparition soudaine, semblable à une décharge, peut indiquer un saignement aigu nécessitant des soins d'urgence.

O

(pour Older than 40 at onset, suggesting temporal arteritis or acute angle-closure glaucoma.)

Plus de 40 ans au moment de l'apparition, ce qui suggère une artérite temporale ou un glaucome aigu par fermeture de l'angle.

P

(pour Previous headache history: has it changed, or is it a new headache?; Positional: does it change upright vs. lying down?; Papilledema: are there visual obscurations?)

Antécédents de céphalées : La céphalée a-t-elle changé ou s'agit-il d'une nouvelle céphalée? Position : la céphalée change-t-elle en position debout ou couchée? Œdème papillaire : y a-t-il des obscurcissements de la vision?

Symptômes systémiques ou facteurs de risque secondaires, tels que fièvre, perte de poids, cancer ou VIH.

Adapté de Dodick, 2003(15)

important(1,16). Les autres critères d’évaluation comprennent le soulagement des symptômes associés à la migraine, tels que les nausées ou les vomissements, la réduction des effets indésirables du traitement et le retour à des activités et des fonctions normales(16). Il existe de nombreuses options thérapeutiques pour la migraine menstruelle, notamment le traitement aigu, le traitement préventif (à court ou à long terme) ou une combinaison de ces traitements(1,16). Les triptans et les AINS (dont l’acide acétylsalicylique), seuls ou en association, restent les médicaments de première intention pour le traitement aigu(1,16). Les premières étapes de la prise en charge des crises de migraine menstruelle doivent être abordées de la même manière que pour une crise de migraine ordinaire(16). Les traitements établis utilisés pour la migraine ordinaire peuvent être utilisés pour les migraines cataméniales pures et les migraines liées aux menstruations(2,17). La réponse des patientes au traitement aigu est très individuelle(1). Par conséquent, si un traitement ne procure pas un soulagement satisfaisant de la douleur, un autre agent peut être essayé lors des crises suivantes(16).

Étant donné que les migraines menstruelles sont souvent plus graves, plus durables et associées à un risque de rechute plus élevé que les migraines typiques, le choix de traitements médicamenteux ayant une demi-vie et une durée d’action plus longues peut apporter un soulagement plus durable(1,16,18). Les taux de rechute plus élevés dans les migraines menstruelles peuvent également justifier l’étude du taux de rechute de chaque nouveau traitement à l’essai lors de l’évaluation de la réponse et de l’efficacité globale chez les patientes(1). Les patientes qui éprouvent des nausées ou des vomissements plus graves et qui ne peuvent tolérer les comprimés sous forme orale peuvent bénéficier d’autres formes posologiques comme l’injection ou le vaporisateur nasal pour optimiser l’absorption du médicament, prévenir la régurgitation de la dose et contourner la gastroparésie associée à la migraine(16,18). De même, l’ajout d’antagonistes de la dopamine comme antiémétiques aux traitements interruptifs peut également être envisagé pour réduire les nausées(16). Si le traitement par triptans et/ou AINS et antiémétiques est inefficace pour les migraines menstruelles, la prévention à

court terme (également appelée prophylaxie à court terme) est souvent la prochaine étape(19). Il n’existe pas de médicaments indiqués pour la prophylaxie à court terme, la prise de médicaments sur ordonnance à cette fin est donc hors indication officielle(2). La prophylaxie à court terme consiste généralement à commencer à prendre les médicaments sur ordonnance quelques jours avant les règles prévues et à les poursuivre pendant toute la durée des menstruations pour prévenir les migraines menstruelles(16). L’obtention d’un historique détaillé des céphalées de la patiente et de son cycle menstruel est une première étape cruciale pour l’approche de la prophylaxie à court terme, car le moment de la prise des médicaments est un facteur clé(20). Si les patientes présentent des migraines fréquentes en dehors de la période périmenstruelle, le risque de céphalée due à la surconsommation de médicaments doit également être pris en compte. Les patientes doivent limiter l’utilisation d’acide acétylsalicylique, d’AINS et d’acétaminophène à moins de 15 jours par mois, et l’utilisation de triptans, d’ergots, d’opioïdes ou d’analgésiques associés à moins de 10 jours par mois(16). Si le traitement aigu est inefficace et que la prophylaxie à court terme est inefficace ou inappropriée, l’ajout d’une prise quotidienne de médicaments à titre préventif peut être nécessaire(2). TRIPTANS

Les triptans constituent un traitement de première intention pour les migraines modérées à sévères(16, 21). Les triptans sont des agonistes des récepteurs de la sérotonine qui se lient préférentiellement aux récepteurs 5-HT1B et 5-HT1D des vaisseaux sanguins endothéliaux cérébraux, entraînant une vasoconstriction et inhibant la libération de médiateurs de l’inflammation neurogène(21). Des essais comparatifs randomisés ont démontré que le frovatriptan, le naratriptan, l’almotriptan, le sumatriptan et le zolmitriptan sont tous des traitements aigus efficaces des migraines menstruelles(8). D’autres triptans qui n’ont pas été étudiés spécifiquement pour les migraines menstruelles peuvent encore être recommandés(20). Les triptans sont plus efficaces lorsqu’ils sont pris dès l’apparition de la douleur de la céphalée(16). Si la migraine revient ou si la patiente a eu une réponse partielle, le même triptan peut être repris une fois 2 heures (c.-à-d. sumatriptan(22), rizatriptan(23), élétriptan(24), almotriptan(25), zolmitriptan(26)) ou 4 heures plus tard (c.-à-d.


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ANTI-INFLAMMATOIRES NON STÉROÏDIENS (AINS)

Les AINS inhibent l’enzyme cyclooxygénase (COX), diminuant ainsi la synthèse des substances chimiques inflamma-

FIGURE 1 Migraine menstruelle et dysménorrhée - Réponse sans douleur en 2 heures et durable(46)

■ Sumatriptan 85 mg/Naproxen 500 mg

■ Placebo

Absence de douleur pendant 2 heures p<0.001

60 %

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52 %

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42 %

40 % 30 %

Absence de douleur soutenue de 2 à 24 heures *p<0.05; †<0.001

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22 %

20 % 10 %

% des patientes

50 % % des patientes

frovatriptan(27), naratriptan(28)) dans une période de 24 heures. Le frovatriptan se distingue des autres triptans par sa longue demi-vie de 26 heures, ce qui lui confère une durée d’action plus longue qui peut être utile chez les patientes souffrant de migraines menstruelles plus prolongées ou réfractaires(29). Des essais randomisés sur les migraines menstruelles montrent un soulagement de la douleur et des taux d’absence de douleur similaires pour le frovatriptan par rapport aux autres triptans, mais des taux de rechute significativement plus faibles (absence de douleur pendant 24 heures(29)). La disponibilité du sumatriptan en format injectable off re un moyen de contourner le tube digestif pour les patientes souff rant de nausées et de vomissements extrêmes(30). Les triptans intranasaux comme le sumatriptan et le zolmitriptan sont également disponibles pour les patientes qui éprouvent des troubles gastro-intestinaux ou qui ont une aversion pour les injections(30). En plus de leur rôle dans le traitement aigu, le frovatriptan à 2,5 mg, une ou deux fois par jour, le naratriptan à 1 mg, deux fois par jour, et le zolmitriptan à 2,5 mg, deux ou trois fois par jour, sont des traitements prophylactiques efficaces à court terme pour les migraines menstruelles qui ont une présentation prévisible(8,16,20). Le sumatriptan et l’élétriptan peuvent également être utilisés pour la prophylaxie à court terme, mais les données probantes sont limitées par le fait qu’il s’agit d’études ouvertes(31,32). Les effets indésirables les plus fréquemment signalés des triptans sont la somnolence, les vertiges, les nausées, la sensation d’oppression de la poitrine/du cou, la fatigue, la sensation de chaud/froid et la paresthésie(33). Les triptans sont contre-indiqués chez les patientes ayant des antécédents d’infarctus du myocarde, de maladie coronarienne, d’accident vasculaire cérébral, d’hypertension non contrôlée et de vasculite, car les propriétés vasoconstrictrices des triptans peuvent s’étendre aux récepteurs 5-HT1B/1D présents sur les artères coronaires et des membres et entraîner des effets néfastes sur la santé cardiovasculaire(21). De même, les patientes souffrant de migraines hémiplégiques, ophtalmoplégiques ou basilaires doivent également éviter les triptans(21).

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40 % 30 % 20 %

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Étude 2

toires(34). Ils préviennent l’inflammation à médiation neurogène dans le système trigémino-vasculaire et inhibent le traitement central des entrées nociceptives du nerf trijumeau(35). Les AINS confèrent un avantage supplémentaire, celui de traiter d’autres symptômes périmenstruels, tels que la dysménorrhée comorbide, traitant efficacement les symptômes de la migraine et des menstruations(35). L’acide méfénamique à 500 mg, pris toutes les 8 heures, s’est révélé efficace pour le traitement aigu des migraines menstruelles(36). D’autres AINS sont également considérés comme efficaces pour les migraines menstruelles(20). Afin d’optimiser l’efficacité, il est important de choisir une forme pharmaceutique avec un début d’action rapide et d’administrer le traitement immédiatement au début de la douleur de la céphalée(16). Le diclofénac potassique à 50 mg, en poudre dans une solution orale, confère les avantages d’un temps de réponse rapide de 15 minutes (contre 60 minutes pour les comprimés), d’une réponse sans douleur plus durable aux maux de tête et d’une réduction de l’intensité de la céphalée dans les 2 premières heures par rapport aux comprimés de diclofénac(1,16,37). De même, le naproxène sodique (libération immédiate) à 550 mg, jusqu’à deux fois par jour, l’acide acétylsalicylique (comprimés effervescents) à 975 mg-1 000 mg, jusqu’à toutes les 4 à 6 heures, et l’ibuprofène à 400 mg (capsules de gel liquide), jusqu’à toutes les 4 heures, peuvent être privilégiés par rapport à leurs autres formulations en raison de leur action plus rapide(16).

Étude 1

Étude 2

La prophylaxie à court terme par le naproxène s’est avérée bénéfique et peut constituer un traitement sûr et peu coûteux(17). Un essai en double aveugle contrôlé par placebo portant sur l’administration de 500 mg de naproxène deux fois par jour, à partir de 7 jours avant les menstruations et jusqu’au 6e jour des menstruations, a permis de réduire l’intensité des céphalées et de soulager la douleur(39). Des données moins concluantes suggèrent que la réduction de la posologie à 550 mg de naproxène, une fois par jour, peut encore réduire le nombre, la durée et la sévérité des migraines(40). Les effets indésirables les plus fréquents des AINS sont la dyspepsie, les brûlures abdominales ou les malaises abdominaux et la diarrhée(41). Les plaintes peu fréquentes comprennent la tendance aux ecchymoses, le prurit ou les éruptions cutanées, ainsi qu’une réaction d’hypersensibilité chez certaines personnes asthmatiques(41). Les effets indésirables plus graves peuvent inclure une gastrite ou une œsophagite, des saignements gastro-intestinaux, une insuffisance rénale, une insuffisance hépatique et un risque accru d’événements cardiovasculaires en cas d’utilisation chronique(41). COMBINAISON MÉDICAMENTEUSE TRIPTAN ET AINS

L’association d’un triptan et d’un AINS s’attaque aux multiples mécanismes impliqués dans la pathogenèse de la migraine et se traduit par une efficacité supérieure à celle du sumatriptan ou du naproxène pris seuls, par un potentiel d’observance accrue et par un profi l d’innocuité bien toléré, avec des taux d’effets


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indésirables similaires à ceux de la monothérapie par le sumatriptan(42,43). La Canadian Headache Society recommande fortement l’utilisation simultanée de naproxène sodique à 500 mg et de sumatriptan, en cas de réponse inadéquate au sumatriptan pris seul(15). De plus, une revue systématique de 12 études renforce le fait que l’association sumatriptan-naproxène est plus efficace pour le traitement de la migraine aiguë que le sumatriptan ou le naproxène en monothérapie(44). La posologie recommandée de l’association sumatriptan à 85 mg plus naproxène sodique à 500 mg est un comprimé au début de la douleur migraineuse; il peut être répété une fois dans les 2 heures si nécessaire(45). L’utilisation de l’association sumatriptan-naproxène sodique peut être particulièrement utile pour les femmes qui développent la crise de migraine menstruelle dans les deux premiers jours du flux menstruel et qui souff rent simultanément de dysménorrhée(35). Deux essais randomisés ont montré que chez les femmes ayant des antécédents de migraines menstruelles couplées à une dysménorrhée, l’association sumatriptan-naproxène utilisée dans l’heure qui suit la crise de migraine menstruelle était statistiquement supérieure au placebo pour ce qui est de la réponse sans douleur soutenue de 2 heures et de 2 à 24 heures, de l’utilisation de médicaments de secours pour les maux de tête et les règles et de plusieurs symptômes menstruels sans douleur (Figure 1)(46). Une analyse post-hoc des deux mêmes essais randomisés a en outre montré que les symptômes de la dysménorrhée étaient soulagés 2 à 4 heures après le traitement. Notamment, un soulagement significatif de la fatigue, de l’irritabilité, des douleurs abdominales et dorsales jusqu’à 24 heures après le traitement par sumatriptan-naproxène(47). Vingt-quatre heures après l’administration de la dose, les patientes qui ont pris une association de comprimés de sumatriptan-naproxène ont signalé une plus grande satisfaction statistiquement significative en ce qui concerne l’efficacité, la fonctionnalité et la facilité d’utilisation dans le questionnaire sur la perception de la migraine par le patient « Patient perception of Migraine Questionnaire-Revised (PPMQ-R) »(48). La formulation sous la forme d’un seul comprimé de sumatriptan et de naproxène sodique peut être prise avec ou sans nourriture (45), un avantage par rapport au naproxène sodique en mono-

thérapie, qui doit être pris avec de la nourriture ou du lait(49). Étant donné l’importance de prendre le médicament interruptif à temps et son association fréquente avec des nausées, le fait que le medicament peut être pris sans la nourriture est très pratique. L’association sumatriptan-naproxène sodique est bien tolérée et son profi l d’innocuité correspond à celui des deux composants individuels(48, 50). Les effets indésirables les plus fréquemment signalés ont été les nausées (2,6 %), les étourdissements (2,6 %), la paresthésie (1,0 %) et la sécheresse de la bouche (1,0 %)(48). COMBINAISON MÉDICAMENTEUSE TRIPTAN ET CORTICOSTÉROÏDE

La dexaméthasone est un corticostéroïde qui a été proposé pour prévenir la récurrence des migraines par sa prévention de l’inflammation neurogène(51). L’association de 10 mg de rizatriptan et de 4 mg de dexaméthasone à l’apparition de la migraine menstruelle est significativement plus efficace que le rizatriptan ou la dexaméthasone en monothérapie pour ce qui est du soulagement de la douleur pendant 2 heures et de l’absence de douleur pendant 24 heures, mais elle est associée à un taux plus élevé d’effets indésirables(52). Cette association pourrait être envisagée pour les sujets présentant une incapacité élevée, un soulagement incomplet ou une récurrence de la douleur avec la monothérapie par triptan(52). L’utilisation de la dexaméthasone seule dans le traitement des migraines liées aux menstruations n’est pas recommandée(52). Cependant, le rizatriptan combiné à la dexaméthasone a été associé à plus d’effets secondaires (33,8 %) que le rizatriptan seul (18,6 %) et la dexaméthasone seule (15,2 %)(52). Les effets indésirables comprennent les sensations ressenties lors d’essais cliniques antérieurs sur les triptans (somnolence, courbatures, sensibilité dans le cou, les épaules et la poitrine) et sur les stéroïdes avec la dexaméthasone (dyspepsie)(52). Aucun effet indésirable grave n’a été signalé dans aucun des groupes d’étude(52).

pas exclu les patientes souff rant de migraines menstruelles(53). ERGOTAMINE, OPIOÏDES ET BARBITURIQUES

L’ergotamine ne doit pas être utilisée de façon systématique pour les crises de migraine aiguës, en raison de son efficacité inférieure à celle des triptans et du risque plus élevé d’effets secondaires. (16). Les opioïdes, le tramadol et les barbituriques doivent généralement être évités en raison de leur manque d’efficacité et du risque considérable d’effets indésirables, de dépendance ou de mésusage, de sevrage après l’arrêt du traitement et de céphalées de surconsommation(16). ANTIÉMÉTIQUES

Les nausées et les vomissements sont un symptôme courant des migraines et peuvent être particulièrement aggravés par les migraines menstruelles(1). Les antiémétiques peuvent être utilisés en association avec des médicaments abortifs pour soulager les symptômes associés que sont les nausées et les vomissements, améliorer la vidange gastrique ou améliorer l’efficacité des traitements de la migraine aiguë(16). Le métoclopramide à 10 mg ou la dompéridone à 10 mg, par voie orale, peuvent être pris avec les médicaments pour la migraine aiguë afin de soulager les nausées associées aux migraines(16). Le dimenhydrinate, bien que largement utilisé pour les nausées dans d’autres conditions, n’est pas recommandé en raison de son manque d’efficacité dans les nausées liées à la migraine et de son risque de consommation abusive(16). Les données probantes sont insuffisantes pour recommander l’ondansétron comme antiémétique pour les migraines(16). Les effets indésirables du métoclopramide comprennent la sédation, les effets extrapyramidaux et, dans de rares cas, la dyskinésie tardive(16). La dompéridone est généralement bien tolérée, mais peut provoquer un allongement de l’intervalle QT(16). ŒSTROGÈNES

ACÉTAMINOPHÈNE

Il n’existe aucune étude qui évalue formellement l’utilisation de l’acétaminophène spécifiquement pour les migraines menstruelles. Étant donné que l’acétaminophène est largement utilisé pour les migraines légères générales, il est raisonnable de penser qu’il peut également être utilisé pour les migraines menstruelles légères, car des études antérieures n’ont

La manipulation hormonale, y compris la supplémentation en œstrogènes autour de la période des menstruations, et l’utilisation continue de contraceptifs oraux combinés peuvent être envisagées pour prévenir la chute d’œstrogènes, mais d’autres options de traitement doivent être essayées en premier lieu(15). Les patientes qui fument, qui souff rent de migraines avec auras ou qui présentent


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des facteurs de risque cardiovasculaire doivent être mises en garde contre l’utilisation d’un contraceptif oral continu(15). PRISE EN CHARGE PAR DES TRAITEMENTS NON PHARMACOLOGIQUES

Les traitements non pharmacologiques pour les migraines les mieux documentés sont la neuromodulation et les thérapies biocomportementales, telles que la thérapie cognitivo-comportementale, le traitement par rétroaction biologique et les techniques de relaxation(54). L’utilisation de la physiothérapie, de la gestion du sommeil, de l’acupuncture et des modifications du régime alimentaire sont moins bien démontrées(54). L’application topique de chaleur sur l’abdomen peut aider les migraineuses menstruelles souff rant de dysménorrhée comorbide et soulager la détresse générale(55). La tenue d’un journal des céphalées est utile pour les patientes afin de déterminer le début des menstruations et le jour où la migraine commence par rapport au flux menstruel(8). Cela peut également aider à identifier les déclencheurs de migraine (8).

Rôle du Pharmacien Les pharmaciens sont dans une position idéale pour aider les patientes souff rant de migraines menstruelles à gérer, individualiser et optimiser le régime de traitement, en choisissant le médicament approprié, en évaluant l’efficacité et en assurant l’innocuité du traitement. Dans les provinces où les pharmaciens ont le pouvoir de prescrire des médicaments pour des malaises mineures, ils ont un rôle et une responsabilité supplémentaires pour identifier la migraine menstruelle, orienter les patientes vers des

médecins et d’autres soins médicaux si nécessaire, et prescrire les médicaments appropriés. À l’aide des outils fournis, comme le questionnaire en trois questions sur la migraine (tableaux 2, 3, 4), le pharmacien peut rapidement identifier la migraine menstruelle. Étant donné que les migraines menstruelles présentent un risque élevé de rechute, les pharmaciens jouent un rôle important en donnant des instructions précises sur les quantités mensuelles maximales de médicaments autorisées pour la durée des crises migraineuses, afin de prévenir les céphalées dues à une surconsommation de médicaments. Les pharmaciens travaillant en milieu communautaire peuvent également identifier de manière proactive les patientes ayant des antécédents de renouvellements précoces de traitements antimigraineux abortifs, afin de gérer et de résoudre ces risques. Les pharmaciens peuvent également recommander et instruire les patientes à tenir un journal de leurs céphalées ou un journal électronique tel que l’application « Canadian Migraine Tracker » qui peut enregistrer la relation entre les crises de migraine et le cycle menstruel, les déclencheurs hormonaux, la fréquence des crises, la sévérité, l’efficacité du traitement et le taux de rechute. Les pharmaciens peuvent aider les patientes à évaluer l’efficacité et l’innocuité d’un traitement interruptif et les aider à rechercher des traitements alternatifs si le soulagement de la douleur par le traitement n’est pas satisfaisant. Les pharmaciens peuvent également aider à instruire et guider l’utilisation d’un régime de prophylaxie à court terme lorsque cela est justifié pour les patientes ayant des menstruations prévisibles.

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Les pharmaciens peuvent également prévenir le mauvais usage et les mauvaises indications des médicaments en vente libre. Une étude a révélé qu’un nombre important d’admissions à l’hôpital liées à la codéine en vente libre découlent de l’utilisation de la codéine pour traiter les migraines/céphalées(56). Ainsi, les patientes qui recherchent des produits contenant de la codéine en pharmacie pour soulager leur migraine doivent être informées des risques et orientées vers des traitements plus sûrs ou un médecin. Les pharmaciens peuvent orienter les patientes admissibles vers un médecin ou suggérer de modifier un régime contraceptif existant afin de minimiser les migraines menstruelles dues au retrait des œstrogènes(57). Les pharmaciens peuvent également aider les patientes à comprendre les coûts, le fardeau financier et la couverture des médicaments associés au traitement des migraines menstruelles. Les triptans sont un pilier du traitement de la migraine, mais ils peuvent être coûteux. Un plan de traitement individualisé peut nécessiter de nombreuses visites, l’essai de différents médicaments et les conseils avisés du pharmacien avant que la douleur et le stress associés à la nature cyclique des migraines menstruelles ne disparaissent. Les références relatifs à cette le on de FC peuvent être consultés en ligne sur le site www.ecortex.ca. Le questionnaire du test de cette le on de FC se trouve sur le site www.ecortex.ca

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Collaborateurs – Guide du pharmacien sur la migraine menstruelle À PROPOS DES AUTEURS Kevin Leung RPh, PharmD, a obtenu son doctorat en pharmacie à l’Université de Toronto. Il travaille comme pharmacien chez Shoppers Drug Mart. Victor Wong, RPh, BScPhm, PharmD, EAD, CCPE est pharmacien-propriétaire des pharmacies Shoppers Drug Mart situées à Toronto, Ontario, Canada. En plus de sa passion pour la prestation de soins communautaires de première ligne

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et la conduite de ses affaires, M. Wong est professeur associé à la faculté de pharmacie de l’Université de Toronto et administrateur en chef et examinateur en chef du Bureau des examinateurs en pharmacie du Canada.

RÉVISION SCIENTIFIQUE Toutes les leçons sont révisées par des pharmaciens afin d’en assurer l’exactitude et la validité ainsi que la pertinence pour la pratique pharmaceutique.

Directrice des projets de FC : Rosalind Stefanac Concepteur graphique : Shawn Samson

Information sur la FC : ecortex@professionsante.ca. Ce document ne peut être reproduit, en tout ou en partie, sans l’autorisation écrite de l’éditeur.

Cette leçon est publiée par EnsembleIQ, 20, avenue Eglinton Ouest, bureau 1800, Toronto (Ontario) M4R 1K8. Tél. : 1 877 687-7321 Téléc. : 1 888 889-9522

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Rédaction

Révision

Ann-Laurence Brière, Pharm. D., Lydia Parent, Pharm. D., Nicholas Ouellet, Pharm. D., M. Sc., Institut national d’excellence en santé et en services sociaux, Marie-Ève Tremblay, Pharm. D., M. Sc., Institut national d’excellence en santé et en services sociaux, et Julie Rivard, Pharm. D., M. Sc., Institut national d’excellence en santé et en services sociaux.

Pierre Lauzon, M. D.

Films de buprénorphine/ naloxone par voie sublinguale ou buccale Objectifs d’apprentissage 1. Connaître les particularités liées aux films de buprénorphine/naloxone.

Responsable de cette chronique Mathieu R. Tremblay, Pharm. D., Ph. D. Texte original : 8 septembre 2021 Texte final : 26 octobre 2021 Les auteurs ne déclarent aucun conflit d’intérêts lié à la rédaction de cet article.

2. Déterminer les suivis à effectuer lors d’un changement dans les formes pharmaceutiques de buprénorphine/naloxone. 3. Renseigner les patients sur l’usage des films de buprénorphine/naloxone.

Au Canada, l’augmentation du nombre de surdoses observée avec les opioïdes est attribuable à un ensemble complexe de facteurs, dont le taux élevé de prescriptions d’opioïdes et l’apparition d’opioïdes puissants sur le marché noir1. Au Québec, entre avril 2020 et mai 2021, 530 décès ont été attribués à une intoxication suspectée aux opioïdes ou à d’autres drogues2. La crise des opioïdes a incité le monde médical à se questionner sur la prise en charge optimale des patients ayant un trouble lié à l’usage des opioïdes (TUO). La cinquième édition du Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (DSM-5) définit ce trouble comme un mode d’utilisation problématique des opioïdes conduisant à une altération du fonctionnement psychosocial ou à une souffrance > Québec Pharmacie

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> significative sur une période d’au moins 12 mois3. Les comportements évoquant un mésusage des opioïdes incluent notamment la modification de la voie d’administration ou de la posologie, l’obtention d’opioïdes de plusieurs sources et la présence de maladies concomitantes, notamment l’abus d’autres substances ou des comorbidités psychiatriques4. Le traitement à l’aide d’une thérapie de remplacement des opioïdes (TRO) permet aux personnes atteintes de retrouver ou de préserver un niveau fonctionnel et psychosocial adéquat. Les TRO contribuent aussi à réduire la mortalité, la transmission du virus d’immunodéficience humaine (VIH), les crimes et l’usage de drogues associées à la dépendance aux opioïdes5. Les principales molécules indiquées à titre de TRO sont la méthadone et l'association de la buprénorphine/naloxone (B/N). L’association de B/N se présente sous la forme de comprimés sublinguaux (s.l.) ou de film. Les lignes directrices de l’Initiative canadienne de recherche sur l’abus de substance (ICRAS) ainsi que l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) privilégient la B/N au lieu de la méthadone chez les patients avec un TUO en raison de son profil d’innocuité avantageux4,6. La buprénorphine en injection sous-cutanée (SublocadeMD) ou en implant (ProbuphineMD) sont aussi des options pour les patients stabilisés sous B/N. Les films de B/N (SuboxoneMD), administrés par voie sublinguale (s.l.) ou buccale (sur la paroi intérieure de la joue), sont commercialisés par Indivior. L’avis CAS CLINIQUE 1/2 de conformité de Santé Canada a été obtenu en juillet 2020 et ils sont indiqués Monsieur MB, 45 ans, est un patient bien connu de votre pharmacie en raison d’un TUO traité depuis plus de 10 ans. Depuis que vous le suivez, sa TRO est constituée de 12/3 mg de B/N en « pour le traitement substitutif de l’adulte comprimés. Aujourd’hui, il vous fait part de son désir d’essayer les films. Il a entendu dire que ces aux prises avec une dépendance derniers ont une dissolution plus rapide que ses comprimés. À la révision de son dossier problématique aux opioïdes »7. Ces films pharmacologique, vous ne trouvez que de la venlafaxine XR 150 mg. sont offerts aux teneurs de 2/0,5 mg, En dehors de l’exemption en vigueur depuis la pandémie de COVID-19 et prolongée par Santé 8/2 mg et 12/3 mg. Cette nouvelle forme Canada jusqu’au 30 septembre 2026, il n’est pas permis d’ajuster l’ordonnance d’un stupéfiant. vient s’ajouter à l’arsenal thérapeutique et Malgré l’exemption, une collaboration avec le médecin est toujours de mise. Selon votre pourrait avoir des impacts cliniques évaluation, le patient pourrait retirer des bénéfices de ce changement et ne présente aucune intéressants pour certains patients et contre-indication. Vous procédez donc à l’ajustement de l’ordonnance en modifiant la pharmaciens. formulation, dose pour dose, et prescrivez un film de 12/3 mg administré par voie s.l. Vous expliquez le mode d’administration au patient et supervisez la prise de la première dose. Vous l’avisez qu’il doit surveiller les symptômes de surdose durant les prochains jours. Vous communiquez aussi avec son médecin traitant afin de l’informer de la situation et du suivi que vous effectuerez auprès du patient. Les autres informations pertinentes à communiquer figurent  ». dans la section « Conseils aux patients

Pharmacologie et mécanisme d’action

La buprénorphine est un agoniste partiel des récepteurs des opioïdes mu pour lesquels elle a une grande affinité. Cela lui permet de déplacer les autres opioïdes employés en concomitance8. Sa vitesse de dissociation des récepteurs mu est lente, ce qui réduit les symptômes de sevrage sur une période d’au moins 24 heures8. La buprénorphine a aussi un effet antagoniste sur les récepteurs delta et kappa, ce qui permet notamment de réduire les risques d’effets indésirables, tels que la constipation, la dépression respiratoire, l’anxiété et le développement de la dépendance9. N’étant pas absorbée par les voies s.l. ou buccale, la naloxone n’exerce pas son action d’antagoniste sur les récepteurs mu. Lorsqu’administrée en association avec la buprénorphine, elle vise à dissuader l’utilisation de la B/N par d’autres voies que celles recommandées6. Pharmacocinétique

Il a été statué par Santé Canada que certaines teneurs de film ne sont pas bioéquivalentes à la teneur correspondante en comprimés s.l.10. Le film et le comprimé de 2/0,5 mg sont bioéquivalents, alors que la biodisponibilité des films de 8/2 mg et 12/3 mg, administrés par voie s.l. ou buccale, est supérieure à leur teneur équivalente en comprimés s.l.10-11. De plus, la combinaison de différentes teneurs affecte la biodisponibilité. Lors d’un changement de formulation, le pharmacien doit donc surveiller l’apparition des symptômes de surdosage et de sevrage.

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Le temps de dissolution moyen des films s.l. est plus court d’une à trois minutes par rapport aux comprimés s.l.12. Dans une étude en contexte d’utilisation en vie réelle, cette différence est plutôt d’environ une minute13. L’administration buccale des films est associée à un temps de dissolution moyen plus élevé que celui de l’administration s.l. à la même teneur14. Si trois films ou plus sont administrés en même temps, il est plus facile de les retirer entièrement ou en partie de la cavité buccale, ce qui augmente le potentiel de diversion13. D’ailleurs, la monographie recommande d’administrer un maximum de deux films à la fois et d’éviter les superpositions7. La buprénorphine est principalement métabolisée par glucoronidation et par N‑désalkylation au niveau du cytochrome P450 3A4 (CYP3A4). Cette dernière voie génère un métabolite actif, la norbuprénorphine, dont la contribution à l’effet thérapeutique est inconnue. La buprénorphine est majoritairement éliminée par excrétion directe dans la bile et n’est que très faiblement éliminée par voie rénale (30 %). En raison de son métabolisme, la B/N doit être ajustée en insuffisance hépatique, alors qu’aucun ajustement n’est recommandé d’emblée en insuffisance rénale7. Le temps de demi‑vie (t ½) des films de B/N varierait entre 24 et 42 heures7, contrairement à 37 heures pour les comprimés s.l.11. L’absorption de la naloxone de façon sublinguale ou orale étant négligeable, sa pharmacocinétique ne sera donc pas abordée ici. Cependant, si elle est administrée par voie intraveineuse (IV) ou insufflée, la naloxone sera absorbée en quantité suffisante pour induire des symptômes de I PHARMACOCINÉTIQUE7,10,11 sevrage6. Film Les principaux paramètres pharmacocinétiques sont résumés dans le Tableau I  .

Comprimé s.l.

Bioéquivalence (SSC et Cmax) selon la teneur

Essais cliniques

2/0,5 mg

Bioéquivalent

L’étude de Lintzeris et coll.13 compare les 8/2 mg Non bioéquivalent comprimés s.l. aux films s.l. de B/N. Les sujets inclus dans cet essai avaient un 12/3 mg Non bioéquivalent TUO, étaient traités par B/N depuis au Paramètre pharmacocinétique moins trois mois et recevaient une dose stable sous forme de comprimés s.l. Temps de dissolution Réduction de 1 à 3 minutes par rapport aux comprimés s.l. depuis au moins 30 jours. Après une t ½ 24 à 42 h 37 h période d’observation de sept jours (phase 1), ils étaient répartis Cmax : concentration maximale; s.l. : sublingual; SSC : surface sous la courbe; t ½ : temps de demi-vie aléatoirement pour poursuivre la prise du comprimé s.l. ou recevoir le film s.l. à dose équivalente. Les traitements étaient administrés à double insu, à l’aide d’un double placébo sous forme de film et de comprimé, pendant 10 jours (phase 2), puis en devis ouvert pour 14 jours supplémentaires (phase 3). Parmi les 92 sujets inclus, 85 ont mené l’étude à terme. Bien qu’aucune description détaillée de la population ne soit présentée, les auteurs affirment que les caractéristiques des patients sont similaires entre les deux groupes à l’étude. L’âge moyen des sujets est de 39 ans et la dose quotidienne moyenne de buprénorphine est de 17 mg. Le temps de dissolution du film s.l. est plus court d’environ une minute que celui des comprimés s.l., ce qui peut être un avantage en pharmacie lors de la supervision de l’administration des doses. De plus, la capacité à retirer partiellement ou entièrement le film s.l. diminue avec le temps depuis l’administration. Peu de patients ont été en mesure de retirer les films après une minute, lorsque l’administration nécessitait seulement un ou deux films simultanément. Par ailleurs, les patients rapportent que le film s.l. est plus difficile à avaler accidentellement que les comprimés s.l.. Dans cette étude, 61 % des patients préfèrent le film s.l., 23 % les comprimés s.l. et 16 % n’ont pas de préférences quant à la formulation. L’implication du patient lors du choix d’une formulation ainsi que le respect de sa préférence personnelle pourraient contribuer à favoriser l’adhésion au traitement. Bien que les auteurs ne rapportent pas de > Québec Pharmacie

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> différences entre les groupes pour les effets indésirables pendant la phase 2, certaines problématiques uniques à l’administration du film ont été énoncées, soit l’adhérence du film aux dents, au palais ou aux joues, des difficultés à manipuler le film et l’adhérence du film aux doigts humides. En raison de la courte durée de l’étude, il n’est pas possible de se prononcer sur l’innocuité à long terme. L’étude de Clay et coll.15 est un essai de cohorte rétrospective ayant pour but de comparer le film au comprimé s.l. de B/N à partir des données provenant de la base de données Invision DataMart qui recense les réclamations des assurances de 30 millions de personnes aux États-Unis. Comme ces données sont issues de réclamations d’assurance, l’usage s.l. ou buccal des films ne peut être distingué puisqu’il s’agit d’une même forme pharmaceutique. L’étude porte sur 4306 patients inscrits pendant au moins

II RÉSUMÉ DES PRINCIPALES ÉTUDES CLINIQUES PORTANT SUR LE FILM DE B/N Auteurs

Type et durée

Nombre de sujets et population

Traitements

Lintzeris et coll.

Étude multicentrique à répartition aléatoire à devis ouvert pour la phase 1 et 3, et à double insu pour la phase 2

92 adultes

Phase 1 : 7 jours

Inclus : n TUO selon le DSM-IV-TR n B/N 4 à 32 mg en prise continue depuis ≥ 3 mois n Dose stable de B/N ≥ 30 jours n Sans comorbidité psychiatrique ou physique sévère

Comprimé s.l. à dose équivalente à celle reçue avant l’étude

Durée du suivi : 31 jours Réalisée en 2010

Phase 2 : 10 jours Comprimé s.l. ou film s.l. à dose équivalente à celle de la phase 1 Phase 3 : 14 jours Poursuite du traitement de la phase 2 (sans insu)

Clay et coll.

Étude de cohorte rétrospective

4 306 sujets

Durée du suivi : 9,76 mois (film) à 13,76 mois (comprimé s.l.)

Inclus :

Réalisée chez les patients ayant entrepris un traitement de septembre 2010 à novembre 2012

Patients entreprenant un nouveau traitement par B/N (film ou comprimé s.l.).

n

Couverture d’assurance ≥ 1 an avant la date d’index n Sans utilisation de B/N dans l’année précédant la date d’index n ≥ 1 renouvellement de B/N entre 30 et 75 jours après la date d’index Date d’index : jour de la première réclamation de B/N

Butler et coll.

Étude transversale rétrospective Durée du suivi : 1 évènement Réalisée en 2015

ASI-MV 45 695 évaluations pour problème d’abus de substance

Patients déclarant un abus ou mésusage de B/N

Inclus : n ≥ 18 ans n TUO n

Consommation d’un opioïde prescrit dans les 30 derniers jours

RADARS 482 cas d’abus ou de mésusage rapportés

ASI-MV : Addiction Severity Index-Multimedia Version; B/N : buprénorphine/naloxone; c. : contre; RADARS : Researched Abuse, Diversion, and Addiction-Related Surveillance; s.l. : sublingual; TUO : tro

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un an avant la date d’index, n’ayant pas reçu de B/N l’année précédant la date d’index et ayant renouvelé leur ordonnance de B/N au moins une fois entre 30 et 75 jours après la date d’index. La date d’index correspond au jour de la première réclamation de B/N effectuée après le 1er septembre 2010. Les caractéristiques des patients recevant le film diffèrent légèrement de celles des patients recevant le comprimé s.l.. Cela s’explique notamment par la préférence du clinicien à l’égard d’une formulation de B/N plutôt qu’une autre, selon les caractéristiques de son patient. Cependant, les analyses statistiques ont été ajustées pour les différences observées. Initialement, 64,93 % des patients recevaient le film et 35,07 %, le comprimé s.l.. La durée de suivi moyenne était de 9,76 mois pour le film et de 13,76 mois pour le comprimé s.l.. Cette différence a notamment été observée en >

Résultats

Commentaires

Temps de dissolution n Film s.l. : 173 ± 71 secondes n Comprimé s.l. : 242 ± 141 secondes

Les sujets recrutés tolèrent la B/N, sont observants et suivis dans des centres spécialisés, ce qui ne reflète pas la pratique clinique.

Capacité à retirer le film s.l. en totalité ou en partie n Après 30 secondes : 0 % (1 film), 53 % (2 films), 58 % (3 films) et 75 % (4 films) n Après 1 minute : 0 % (1 film), 33 % (2 films), 57 % (3 films) et 75 % (4 films)

Plusieurs paramètres sont rapportés par les patients et sont, par conséquent, sujets aux biais de performance et de mémoire. Le temps de dissolution peut être affecté par la sécheresse buccale; cette variable n’a pas été contrôlée.

Préférence des patients Film s.l. : 61 % n Comprimé s.l. : 23 % n Aucune : 16 % n

Effets indésirables : aucune différence pendant la phase 2 Changement de formulation n Comprimé s.l. vers film : 16,62 % n Film vers comprimé s.l. : 3,65 % Persistance à suivre le traitement n À 6 mois : 63,78 % (film) et 58,13 % (comprimé) n À 12 mois (estimé) : 47,14 % (film) et 41,34 % (comprimé)

Données permettant une analyse en contexte de vie réelle L’étude inclut seulement les nouveaux utilisateurs de B/N. L’analyse des données à partir de la date de commercialisation du film (septembre 2010) ne laisse pas aux cliniciens le temps d’acquérir leur expertise.

Diminution du coût des ressources en santé chez les patients traités par film s.l. n Sur une période de 6 mois : 24 % n Sur une période de 12 mois : 27 % ASI-MV Taux d’abus (par 100 répondants et ajusté pour 100 000 unités) n 0,47 avec les comprimés n 0,38 avec les films

Données de l’ASI-MV rapportées par les patients, donc sujettes aux biais de désirabilité sociale et de mémoire.

Prévalence d’abus par insufflation n 34,4 % avec les comprimés n 8,9 % avec les films

Les motivations à l’origine des abus de B/N ne sont pas documentées.

Le faible nombre d’abus par insufflation rapportés limite la puissance statistique de l’analyse.

Prévalence d’abus par injection n 25,7 % avec les comprimés n 17,5 % avec les films RADARS Prévalence d’abus par insufflation n 5,8 % avec les comprimés n 3,4 % avec les films Prévalence d’abus par injection n 26,7 % avec les comprimés n 15,6 % avec les films

oubles liés à l’usage des opioïdes.

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> raison d’un faible taux de prescription du film durant les premiers mois de sa commercialisation aux États-Unis, en septembre 2010. La dose journalière de B/N était plus élevée chez les patients avec le film au début du traitement, puis cette tendance s’est inversée après cinq mois de suivi. L’expérience clinique acquise avec le film au cours de l’année suivant la commercialisation pourrait expliquer en partie ce changement. Pendant la période de l’analyse, 16,62 % des patients sont passés des comprimés s.l. aux films, alors que 3,65 % sont passés des films aux comprimés s.l.. La persistance, définie comme l’absence d’arrêt de traitement après 6 et 12 mois de suivi, est plus élevée avec le film qu’avec le comprimé s.l.. Ces données en contexte de vie réelle se montrent donc favorables au film pour ce paramètre. Il ne faut cependant pas oublier que les patients ne renouvelant pas au moins une fois leur prescription ont été exclus de l’étude et que les traitements renouvelés pouvaient ne pas être pris par les patients. La persistance à suivre son traitement est un facteur clé dans la CAS CLINIQUE 2/2 réduction de l’utilisation des ressources en santé et dans la diminution des coûts Le lendemain de la première dose du film s.l., vous appelez le patient pour faire le suivi. Il préfère cette forme et rapporte n’avoir remarqué aucun changement. Il vous mentionne qu’il aimerait pour le système de santé. À 12 mois, essayer la voie buccale lorsque ce sera possible. Ensemble, vous convenez de poursuivre l’utilisation des ressources de santé était l’utilisation du film tout en observant les symptômes de surdose jusqu’au prochain suivi en plus faible avec le film, notamment la pharmacie. À ce moment-là, vous évaluerez si le changement en faveur de la voie buccale sera probabilité ajustée d’être hospitalisé au adéquat. Entre-temps, votre patient vous contactera s’il y a un problème. Vous transmettez les moins une fois. De plus, l’utilisation du informations pertinentes à son médecin. film, comparativement aux comprimés s.l., diminuait de 27 % les coûts ajustés pour le système de santé sur 12 mois. L’étude de Butler et coll.16 est un essai transversal rétrospectif réalisé au cours III EFFETS INDÉSIRABLES D’INTÉRÊT DE L’ASSOCIATION des trois premiers trimestres de 2015 aux BUPRÉNORPHINE/NALOXONE14 États-Unis et ayant pour but d’évaluer les Effets indésirables Comprimé par voie s.l. Film par voie s.l. mécanismes entourant l’abus et le mésusage des différentes formulations de Nausées 23,6 % 40,1 % B/N s.l.. Il est à noter que cette étude Céphalées 11,5 % 22,4 % inclut aussi les comprimés de B/N s.l. à dissolution rapide (ZubsolvMD) qui ne Étourdissements 7,7 % 18,3 % sont pas offerts au Canada. Les données proviennent du système de surveillance Somnolence 3,8 % 14,6 % Researched Abuse, Diversion, and Vomissements 6,1 % 14,4 % Addiction-Related Surveillance (RADARS) des centres antipoison qui Douleurs abdominales 7,7 % 13,5 % recueille les informations concernant Constipation 4,8 % 10,7 % les expositions à des substances potentiellement toxiques. L’outil s.l. : sublingual Addiction Severity Index-Multimedia Version (ASI-MV) a aussi été utilisé pour colliger des données dans les centres de traitement de la toxicomanie participant au système de surveillance National Addictions Vigilance Intervention and Prevention Program. L’ASI-MV est un questionnaire en ligne, rempli par le patient, qui évalue le type et la gravité de l’abus. Les patients ayant répondu à l’ASI-MV sont majoritairement des hommes d’origine caucasienne et 60 % des épisodes de soins inclus découlent d’une exigence du système judiciaire. La population du système RADARS semble mieux refléter les caractéristiques de la population générale, mais comprend seulement les intoxications assez graves pour nécessiter un appel à un centre antipoison. Parmi les 45 695 questionnaires ASI-MV remplis, 7,7 % des répondants rapportent un abus d’une forme de B/N. La prévalence d’abus, ajustée selon le volume de prescription, est plus élevée avec le comprimé qu’avec le film de B/N. Après ajustement selon le volume de prescription et la région, les résultats pour la population du RADARS vont dans le

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même sens. Plus précisément, les données provenant de l’ASI-MV et de RADARS montrent un taux d’abus par insufflation et par injection plus élevé avec les comprimés qu’avec les films, mais celles de RADARS n’ont pas réussi à démontrer une différence statistiquement significative entre les formulations pour le taux d’abus par insufflation. Ce résultat peut s’expliquer par le faible nombre de cas rapportés (n = 13). Les principaux essais cliniques sont résumés dans le Tableau II . Effets indésirables

Les principaux effets indésirables observés dans l’étude de Lintzeris et coll.13 étaient l’anxiété, la xérostomie, la léthargie et la constipation. Leur fréquence était similaire entre le film s.l. et le comprimé s.l.. Les effets indésirables d’intérêt sont présentés dans le Tableau III . Ceux‑ci proviennent de plusieurs études ayant des devis, des populations (patients naïfs ou non à la B/N) et des durées variables14. La prudence est donc de mise dans l’interprétation des pourcentages. Somme toute, compte tenu des conséquences qu’un TUO non traité peut engendrer, les profils d’innocuité des différentes formulations de B/N semblent acceptables. Mise en garde et contre-indications Grossesse4,17

L’instauration ou la poursuite d’un traitement de substitution permet de réduire les complications maternelles et fœtales, notamment en permettant aux femmes de maintenir une meilleure hygiène de vie et un suivi de grossesse plus régulier. La buprénorphine traverse la barrière placentaire. On dispose de peu de données sur la naloxone, mais la pharmacocinétique de cette dernière indique une exposition fœtale marginale compte tenu de sa faible biodisponibilité orale et de son effet de premier passage hépatique important. L’INESSS considère qu’il vaut mieux éviter les changements de TRO durant la grossesse et établit que l’usage de la B/N est sécuritaire pendant la grossesse. Les doses de TRO devront toutefois être réévaluées au cours de la grossesse. Allaitement17-18

La buprénorphine et la norbuprénorphine sont faiblement excrétées dans le lait maternel. Un enfant exclusivement allaité reçoit 2,5 % de la dose maternelle ajustée au poids, ce qui correspond à 5 à 20 % des doses néonatales minimales utilisées pour le traitement du syndrome de sevrage aux opioïdes. Toutefois, on ne dispose d’aucune donnée sur l’excrétion de la naloxone dans le lait. Sa faible biodisponibilité orale laisse croire à une exposition peu significative pour le nourrisson. Compte tenu des bénéfices de l’allaitement sur le développement du nouveau-né, les mères prenant de la B/N sont encouragées à allaiter. Par prudence, le clinicien devrait s’assurer que la mère est en mesure de reconnaître les signes et symptômes d’intoxication chez son nourrisson. Pédiatrie

Bien que les formulations de B/N n’aient pas été étudiées chez les moins de 18 ans, l’American Academy of Pediatrics recommande d’offrir un traitement pharmacologique, incluant les traitements à base de buprénorphine, chez les adolescents présentant un TUO en raison de la chronicité de ce trouble et de ses conséquences19. L’exposition accidentelle à la B/N peut causer des effets indésirables sérieux aux enfants, pouvant aller jusqu’à une dépression respiratoire sévère, voire mortelle. L’emballage du film de B/N pourrait contribuer à réduire l’exposition accidentelle chez les enfants, comparativement aux comprimés de B/N20. Cependant, la dissolution plus rapide et la difficulté à retirer le film après l’application buccale pourraient donner lieu à des intoxications plus importantes si l’enfant avait accès au film11. Gériatrie7

Les films, ainsi que les comprimés, de B/N n’ont pas été étudiés chez les personnes de 65 ans et plus. Aussi, la prudence usuelle est de mise dans le choix de la dose et dans le suivi des effets indésirables. > Québec Pharmacie

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> Interactions médicamenteuses7 Pour chacune des interactions présentées, il est important d’évaluer les risques et les bénéfices associés aux effets d’une interaction potentielle et les conséquences d’un TUO non traité. Dépresseurs du système nerveux central (SNC)

L’administration concomitante de buprénorphine et de dépresseurs du SNC peut provoquer une sédation excessive ou même une détresse respiratoire par effet cumulatif sur le SNC. L’emploi de benzodiazépines, particulièrement par voie parentérale, doit être pris en considération, de même que la consommation d’alcool. Inhibiteurs et inducteurs du CYP 3A4

Les inhibiteurs du CYP 3A4 augmentent les concentrations de buprénorphine, alors que les inducteurs les réduisent. Des interactions avec certains médicaments, notamment ceux utilisés dans le traitement du VIH, sont à surveiller.

IV POSOLOGIE ET COÛTS DU TRAITEMENT6,7,12 Doses moyennes de maintien

Teneurs offertes au Canada

Disponibilité des formulations génériques

Couverture RAMQ

2/0,5 mg Oui B/N en comprimé

12 à 16 mg/jour s.l.

Oui

8/2 mg

Nonc

16/4 mg 2/0,5 mg B/N en filmb

2,84 $ (original); 0,71 $ (génériques) 5,04 $ (original); 1,26 $ (génériques) 7,56 $

12/3 mg

12 à 16 mg/jour s.l. ou buccale

Prix coûtant au pharmacien (par unité)a

2,84 $

Non

8/2 mg 12/3 mg

10,08 $

Ouid

5,04 $ 7,56 $

B/N : buprénorphine/naloxone; INESSS : Institut national d’excellence en santé et en services sociaux; RAMQ : Régie de l’assurance maladie du Québec. a Selon la Liste des médicaments de la RAMQ (juillet 2021) et McKesson Canada. b La teneur de 4/1 mg pour le film a obtenu un avis de conformité de Santé Canada, mais elle n’est pas commercialisée. c L’INESSS a émis un avis de refus d’inscription sur les listes des médicaments pour les teneurs de 12/3 mg et 16/4 mg en comprimés, mais à la date de publication, la décision du ministre était toujours en suspens (juillet 2018).

Posologie et coûts du traitement

Selon la monographie, les recommandations quant aux doses de B/N en film sont les mêmes que pour les comprimés. Les doses de maintien varient habituellement entre 12 et 16 mg par jour, et la dose maximale quotidienne peut aller jusqu’à 32 mg4. Pour la phase initiale d’induction des films de B/N, il faut employer la voie s.l.. Lorsqu’une dose de maintien est atteinte, le passage à la voie buccale est alors envisageable7. Cependant, l’alternance entre les différentes voies d’administration des films n’est pas recommandée. Que ce soit pour le passage des comprimés s.l. vers les films ou inversement, Santé Canada recommande un changement dose pour dose10. Lors du passage des comprimés vers les films, puisque la biodisponibilité des films est plus élevée, les patients devraient être suivis pour des signes et des symptômes de surdosage. À l’inverse, le passage des films vers les comprimés nécessite un suivi des signes et des symptômes de sevrage10. Le clinicien doit exercer son jugement afin d’adapter la conduite à chaque patient. Pour plus

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d’informations sur les protocoles d’ajustement de la B/N, veuillez vous référer aux guides et lignes directrices québécoises4,6. Pour les comprimés, la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) rembourse seulement le prix le plus bas (PPB) des formulations génériques pour les doses de 2/0,5 mg et 8/2 mg. À titre indicatif, pour une même teneur, les formula s.l. tions génériques de B/N en comprimés correspondent à 25 % du prix de l’original. Pour le pharmacien, le prix coûtant d’une unité de B/N en film est identique à celui de sa teneur correspondante en comprimés de marque originale. L’analyse pharmacoéconomique de l’INESSS a comparé les coûts de traitement moyens, incluant notamment les honoraires du pharmacien, associés aux films de 2/0,5 mg, 8/2 mg et 12/3 mg par rapport à ceux des comprimés génériques de B/N remboursés par la RAMQ12. Les films seraient environ deux fois plus chers que les comprimés inscrits12. Dans son avis transmis au ministre en décembre 2020, l’INESSS recommande l’inscription des films aux teneurs ci-haut mentionnées pour le traitement du TUO à condition que le fabricant accepte d’atténuer le fardeau économique12. Le Tableau IV illustre la posologie et les coûts de traitement des films, comparativement aux comprimés sublinguaux. Les films ont été inscrits lors de la mise à jour de la Liste des médicaments du 29 septembre 2021. Un rappel des conseils à donner aux patients est présenté dans l’encadré « Conseils aux patients  ».

CONSEILS AUX PATIENTS Les conseils généraux en lien avec une TRO devraient être abordés avec le patient. Seuls les conseils spécifiques aux films de buprénorphine/naloxone seront abordés dans cette section. n

Si vous passez des comprimés aux films, vous devriez surveiller les symptômes de surdose, puisque les films sont mieux absorbés. Assurez-vous de connaître la procédure à suivre en cas de surdose.

n

Si vous désirez revenir aux comprimés après avoir essayé les films, avisez votre professionnel de la santé. Lorsque vous procéderez au changement, vous devrez surveiller les symptômes de sevrage. En cas de sevrage, contactez votre professionnel de la santé.

n

Lorsque vous entreprenez un traitement par film(s), vous devrez le(s) mettre sous la langue jusqu’à ce que votre dose soit stabilisée. Ensuite, vous pourrez continuer à le(s) mettre sous la langue ou les coller à l’intérieur de la joue. Une fois votre choix fait, vous devrez toujours mettre le(s) film(s) au même endroit.

n

Conserver les films dans leur emballage à une température entre 15 et 30 °C, hors de la portée des enfants et des animaux de compagnie.

n

Les films ne doivent pas être jetés à la poubelle. Rapportez les doses inutilisées à la pharmacie.

n

Avisez votre professionnel de la santé si vous éprouvez de la difficulté avec les films.

Mode d’emploi n

Lors de l’administration d’une dose, n’alternez pas les voies sublinguale (sous la langue) et buccale (à l’intérieur de la joue).

n

Avant de prendre la dose, il est conseillé de se mouiller la bouche. Cela aide le film à se dissoudre plus rapidement.

n

Séchez vos mains. Ouvrez le sachet en le déchirant sur la ligne pointillée ou utilisez des ciseaux.

n

Ne gardez pas votre sachet ouvert pour l’utiliser plus tard.

Par voie sublinguale n

Tenez le film par les rebords extérieurs. Placez-le sous votre langue du côté droit ou gauche.

n

Si un deuxième film doit être utilisé pour compléter votre dose, placez-le de l’autre côté sous votre langue. Les films ne doivent pas se toucher. Utilisez au maximum deux films en même temps.

n

Si trois films ou plus doivent être utilisés, attende la dissolution complète des deux premiers avant d’en placer d’autres sous la langue.

n

Les films doivent rester sous la langue jusqu’à leur dissolution complète. Évitez d’avaler, de boire ou de manger tant que le ou les films sont dans votre bouche.

Conclusion

La crise des opioïdes a eu et continue d’avoir d’importantes répercussions au pays. Elle rappelle l’importance de la prise en charge des patients avec un TUO. L’association B/N est l’option privilégiée pour le traitement substitutif des personnes aux prises avec un TUO4,6. Les films de B/N viennent donc s’ajouter aux traitements à base de buprénorphine, soit les comprimés s.l., l’injection et l’implant. La place précise des films dans l’arsenal thérapeutique actuel reste à définir. D’ailleurs, ils ne sont pris en >

Par voie buccale n

Tenez le film par les rebords extérieurs. Placez-le sur la face intérieure de votre joue droite ou gauche.

n

Si un deuxième film doit être utilisé pour compléter votre dose, placez-le à l’intérieur de votre autre joue. Utilisez au maximum deux films en même temps.

n

Si trois films ou plus doivent être utilisés, attendre la dissolution complète des deux premiers avant d’en placer d’autres dans vos joues.

n

Les films doivent rester dans vos joues jusqu’à leur dissolution complète. Évitez d’avaler, de boire ou de manger tant que le ou les films sont dans votre bouche.

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> charge que depuis peu par le régime public québécois, par conséquent, les cliniciens ne sont pas encore totalement familiarisés avec leur usage. La sélection des films comparativement aux comprimés devrait être individualisée et reposer sur les avantages potentiels de cette forme thérapeutique. Le taux de persistance du traitement semblerait plus élevé avec les films, et ces derniers présenteraient un potentiel d’abus par injection ou par insufflation moindre que les comprimés15-16. De plus, la dissolution SUIVI ET SURVEILLANCE DE LA THÉRAPIE plus rapide des films pourrait se traduire POUR LES FILMS DE B/N par une diminution du temps de supervision par le professionnel13. Il a Efficacité aussi été évoqué que l’utilisation des films n S’assurer que le patient comprend le mode d’administration; serait associée à une réduction des coûts n Demander au patient d’éviter d’alterner les voies d’administration; ajustés au système de santé, quoique cela n Enseigner au patient les principaux symptômes de sevrage : agitation, irritabilité, anxiété, reste à confirmer dans le contexte nausées, vomissements, douleurs, larmoiement, rhinorrhée, dilatation des pupilles, piloérection, québécois15. transpiration, tachycardie, tremblements, diarrhées, bâillement, envie impérieuse (craving); Les bénéfices potentiels de cette n Vérifier que le patient reçoit une dose adéquate lors de l’administration de chaque dose supervisée. nouvelle forme thérapeutique doivent cependant être mis en parallèle avec les Innocuité problèmes propres observés avec son n Avant l’administration de chaque dose supervisée, s’assurer que le patient n’est pas intoxiqué utilisation : difficultés liées à la ni en surdose; manipulation et adhérence des films aux n Enseigner au patient les symptômes généraux d’une surdose : constriction des pupilles, dents, au palais, aux joues ou aux doigts13. nausées, vomissements, sédation, somnolence, hypotension, bradycardie, hypoventilation, Bien qu’une préférence pour les films difficulté respiratoire; semble être observée13,15, une validation n Vérifier la présence d’effets indésirables. périodique devrait être effectuée auprès de chaque patient. Observance En intégrant les avantages et les n Confirmer que la forme et la voie d’administration conviennent au patient; limites possibles qui s’appliquent à une n Valider périodiquement que le patient n’éprouve pas de problèmes liés à la technique situation donnée, le clinicien devrait d’administration des films : adhérence du film aux dents, au palais, aux joues ou aux doigts pouvoir cibler les patients pour lesquels ainsi que difficultés à appliquer correctement le film; les films de B/N pourraient être n Vérifier la date du dernier service et s’assurer que le patient n’a pas omis de doses. bénéfiques et assurer les suivis appropriés. n

OPINION D’UN EXPERT SUR LE MÉDICAMENT Compte tenu que la TRO est un traitement de longue durée qui a un impact sur la qualité de vie du patient, les préférences de ce dernier en matière de commodité et de facilité d’administration devraient occuper une grande importance dans le choix du traitement. Une formulation associée à une plus grande observance et à une meilleure persistance à suivre le traitement pourrait justifier un coût plus élevé étant donné les risques et les coûts sociaux associés à l’abandon ainsi qu’au non-traitement. Une dissolution plus rapide ou une plus grande difficulté à enlever le film de la bouche pourrait représenter un avantage en milieu de détention. Le film semble toutefois requérir plus de dextérité, ce qui pourrait constituer une limitation pour les personnes avec certains handicaps. D’une manière générale, une plus grande palette de choix pour les patients avec un TUO est toujours une bonne nouvelle. Pierre Lauzon, M. D.

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Références 1. Gouvernement du Canada. Opioïdes et crise des opioïdes – Obtenez les faits. Ottawa (ON) [Modifié le 12 mai 2021]. [En ligne. Consulté le 28 juin 2021]. Disponible : https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/opioides/obtenez-les-faits.html

Les références en gras indiquent au lecteur les références principales de l’article, telles que choisies par les auteurs.

2. Institut national de santé publique du Québec (INSPQ). Décès reliés à une intoxication suspectée aux opioïdes ou autres drogues au Québec. [Modifié en juin 2021]. [En ligne. Consulté le 29 juin 2021]. Disponible : https://www.inspq.qc.ca/substances-psychoactives/opioides/surdose/deces-intoxication/intoxication-suspectee 3. American Psychiatric Association (2013). Substance-Related and Addictive Disorders. In Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (5e édition). https://doi.org/10.1176/appi.books.9780890425596 4. Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS). Traitement par agoniste opioïdes : trouble lié à l’usage d’opioïdes. 31 Mai 2021. Disponible : https://www.inesss.qc.ca/publications/repertoiredes-publications/publication/traitement-par-agonistes-opioides-trouble-lie-a-lusage-dopioides.html 5. Larance B, Mattick R, Ali R, et coll. Diversion and injection of buprenorphine-naloxone film two years post-introduction in Australia. Drug Alcohol Rev. 2016;35(1): 83-91. 6. Initiative Canadienne de Recherche en Abus de Substance (ICRAS). Ligne Directrices Nationales sur la prise en charge clinique du trouble lié à l’usage d’opioïdes. 2018. Disponible : https://www.cmaj.ca/content/cmaj/suppl/2018/02/27/190.9.E247.DC1/170958-guide-1-at.pdf 7. Monographie de produit : SuboxoneMD (film soluble de buprénorphine et de naloxone). Indivior UK ltée. 17 juillet 2020. Disponible : https://pdf.hres.ca/dpd_pm/00057722.PDF 8. Machealth. Buprenorphine Reference Guide: for the treatment of opioid use disorder. University of Toronto and McMaster University. [Modifié en juillet 2019]. Disponible : https://machealth.ca/programs/opioids_clinical_primer/m/buprenorphine_rg_and_course_handouts/2403 9. Gudin J, Fudin J. A Narrative Pharmacological Review of Buprenorphine: A Unique Opioid for the Treatment of Chronic Pain. Pain Ther. 2020;9(1): 41–54. 10. Santé Canada. Renseignements importants en matière d’innocuité sur Suboxone (buprénorphine et naloxone) et le risque de surdosage ou sous-dosage lors de la commutation entre les formes posologiques et les voies d’administration. 2021. [Modifié le 7 janvier 2021]. [En ligne. Consulté le 30 avril 2021]. Disponible : https://canadiensensante.gc.ca/recall-alert-rappel-avis/hc-sc/2021/74719a-fra.php 11. Food and Drug Administration (FDA): Center for Drug Evaluation and Research. Medical review(s) 022410Orig1s000: Suboxone (Buprenorphine/naloxone) sublingual film. 21 août 2009. Disponible : https://www.accessdata.fda.gov/drugsatfda_docs/nda/2010/022410Orig1s000MedR.pdf 12. Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS). Avis transmis au ministre : SuboxoneMD (film) – trouble lié à l’usage d’opioïdes. Décembre 2020. Disponible : https://www.inesss.qc.ca/fileadmin/doc/ INESSS/Inscription_medicaments/Avis_au_ministre/Janvier_2021/Suboxone_2020_12.pdf 13. Lintzeris N, Leung SY, Dunlop AJ, et coll. A randomised controlled trial of sublingual buprenorphine-naloxone film versus tablets in the management of opioid dependence. Drug Alcohol Depend. 2013;131(1-2): 119-26. 14. European Medicines Agency. Assessment report: Suboxone. 30 avril 2020. Disponible : https://www.ema.europa. eu/en/documents/variation-report/suboxone-h-c-697-x-0042-epar-assessment-report-extension_en.pdf 15. Clay E, Khemiri A, Zah V, et coll. Persistence and healthcare utilization associated with the use of buprenorphine/ naloxone film and tablet formulation therapy in adults with opioid dependence. J Med Econ. 2014; 17(9): 626-636. 16. Butler SF, Black RA, Severtson SG, et coll. Understanding abuse of buprenorphine/naloxone film versus tablet products using data from ASI-MV substance use disorder treatment centers and RADARS System Poison Centers. J Subst Abuse Treat. 2018;84: 42-49. 17. Ferreira E, Martin B, Morin C. Grossesse et allaitement : guide thérapeutique (2e édition). Montréal : Éditions du CHU Sainte-Justine; 2013. 18. Drugs and Lactation Database (LactMed). Bethesda (MD) : U.S. National Library of Medicine. 2016. Buprenorphine. [Modifié le 15 février 2021]. Disponible : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK501202/ 19. American Academy of Pediatrics: Committee on Substance Use and Prevention. Medication-Assisted Treatment of Adolescents With Opioid Use Disorders. Pediatrics. 2016; 138(3): e20161893. 20. Lavonas EJ, Banner W, Bradt P, et coll. Root causes, clinical effects, and outcomes of unintentional exposures to buprenorphine by young children. J Pediatr. 2013;163(5): 1377-83.e1-3.

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Répondez à ces questions en vous rendant sur ·ca Accréditation valide du 1er décembre 2021 au 31 décembre 2022

15. Parmi les affirmations suivantes sur les films de buprénorphine/naloxone,

laquelle est vraie ? La voie buccale doit être utilisée lors de l’induction avec les films. n Pour les films, un changement de la voie s.l. en faveur de la voie buccale nécessite un suivi des signes et symptômes de sevrage. n Les films ont une biodisponibilité inférieure à leur teneur correspondante en comprimés. n Un changement des comprimés s.l. en faveur de l’administration s.l. des films nécessite un suivi des signes et symptômes de surdose. n

Donne : 3 h 30 N° d’accréditation : 10114

16. Quel énoncé parmi les suivants est faux ? n

L’étude de Lintzeris et coll. mentionne que la dissolution du film prend environ une minute de moins que les comprimés s.l.. n Dans l’étude de Linzteris et coll., le nombre de films administrés simultanément ainsi que la superposition des films facilitent leur retrait, particulièrement si deux films ou plus sont appliqués en même temps. n Dans l’étude de Clay et coll., une plus grande proportion de patients avait effectué le changement des comprimés s.l. en faveur des films s.l. que l’inverse. n Les données provenant de l’ASI-MV dans l’étude de Butler montrent un taux d’abus par insufflation et par injection plus élevé avec les comprimés qu’avec les films.

17.

Parmi les affirmations suivantes sur la buprénorphine/naloxone, laquelle est vraie ? Les films devraient être recommandés systématiquement à tous les patients présentement traités par les comprimés s.l.. n La buprénorphine est principalement éliminée dans les fèces par excrétion biliaire de ses métabolites glucuronoconjugués. Par conséquent elle ne doit pas être ajustée en insuffisance rénale. n Les films existent aux mêmes teneurs que les comprimés s.l.. n Les mères prenant de la buprénorphine/naloxone ne sont pas encouragées à allaiter en raison des risques possibles pour le développement de leur nouveau-né. n

18. Pour sa dose quotidienne, un patient doit utiliser trois films de buprénorphine/ naloxone. Laquelle des affirmations suivantes est la plus juste ? Il peut mettre simultanément deux films sur la face interne de la joue droite et un film sur la face interne de la joue gauche. n Il peut mettre simultanément un film sur la face interne de chaque joue et un film sous la langue. n Il peut mettre un film sur la face interne de chaque joue et attendre leur dissolution complète. Ensuite, il pourra mettre un autre film sous la langue. n Il peut mettre un film de chaque côté du frein de la langue et attendre leur dissolution complète. Ensuite, il pourra mettre un autre film sous la langue. n

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vous remercie et vous donne rendez-vous pour le numéro de janvier – février 2022.

N’hésitez pas à exprimer votre opinion ! cleduc@ensembleiq.com


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