Québec Pharmacie Novembre Décembre

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NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2022 VOL. 69 N ˚ 6 3 h 00 DE FC N° d’accréditation de l’OPQ 10865 Casse-tête des ordonnances vétérinaires en pharmacie Le lemborexant (DayvigoMD) Prescrire la déprescription médicamenteuse pour mieux soigner ?

Aider à bâtir un marché des produits injectables résilient au Canada

L’Unité d’affaires des hôpitaux de Pfizer s’engage à faire équipe avec la communauté des soins de santé, dans le but d’aider à bâtir un système de soins de santé résilient.

Notre objectif est de rechercher des solutions globales qui profitent à tous les intervenants, mais aussi, et surtout, aux patients.

Nous suggérons de mettre l’accent sur : 1 un processus décisionnel fondé sur la valeur en matière de soins de santé; 2 l’attribution de produits à plusieurs fournisseurs; 3 la mise en place d’un dialogue sur la transparence et de discussions raisonnables sur les modalités.

Pfizer maintient son engagement à offrir des produits injectables aux professionnels de la santé et aux patients qui comptent sur ces médicaments en :

investissant dans les gens, les infrastructures et l’expertise;

revendiquant des changements raisonnables dans les pratiques actuelles en matière d’approvisionnement dans le but de favoriser un marché équitable et résilient.

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Québec Pharmacie novembre – décembre 2022 3 NOVEMBRE – DÉCEMBRE 2022 VOL. 69 N˚ 6 sommaire Prescrire la déprescription médicamenteuse pour mieux soigner ? à vos soins éditorial Au revoir et merci ! 7 5 Contacter Bélec Frappier 514 231-2922 ccarrier@belecfrappier.com PHARMACIE À VENDRE Pharmacie indépendante de quartier située sur la rive-nord de Montréal avec près de 50 000 Rx par année. Grand potentiel de développement QP_Belec_202211.indd 3 2022-11-30 13:43 avez-vous entendu parler de… Le lemborexant (DayvigoMD) 35 Casse-tête des ordonnances vétérinaires en pharmacie 17 les pages bleues

Le remboursement de CONCERTA® est offert par la RAMQ* (avec le code « SN280 ») pour le traitement des patients avec un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité1.

Inscrit à l’annexe V, CONCERTA® n’est pas visé par la « méthode du prix le plus bas » de la RAMQ*. Autrement dit, la RAMQ* n’appliquera pas le prix le plus bas même si, pour une même dénomination commune, de même forme et de même teneur, deux fabricants ou plus ont des médicaments inscrits à la Liste des médicaments2

CONCERTA® est le seul traitement anti-TDAH qui utilise la technologie OROS®, un système de libération contrôlée du médicament3†

CONCERTA® (chlorhydrate de méthylphénidate) est indiqué pour le traitement du TDAH chez les enfants (6 à 12 ans), les adolescents (13 à 18 ans) et les adultes (> 18 ans). Consultez la monographie de produit à l’adresse www.janssen.com/canada/fr/products pour obtenir des renseignements importants sur :

• les contre-indications dans les cas de thyrotoxicose, d’artériosclérose en phase avancée, de maladie cardiovasculaire (CV) symptomatique, d’hypertension modérée à sévère ou de glaucome; chez les patients hypersensibles au méthylphénidate; et pendant un traitement avec des inhibiteurs de la monoamine-oxydase, ainsi que pendant un minimum de 14 jours suivant l’arrêt d’un traitement par un inhibiteur de la monoamine-oxydase;

• les mises en garde et précautions les plus importantes concernant le risque de mort subite chez les patients présentant des anomalies cardiaques structurelles préexistantes ou d’autres troubles cardiaques graves, et le risque de pharmacodépendance;

• les autres mises en garde et précautions pertinentes concernant la prise par voie orale; les patients qui présentent des sténoses digestives préexistantes; les patients qui participent à des exercices ou des activités vigoureux, qui prennent d’autres agents sympathomimétiques contre le TDAH ou qui ont des antécédents familiaux de mort subite ou mort cardiaque; les maladies CV et vasculaires cérébrales préexistantes; l’utilisation du médicament pour la prévention ou le traitement de la fatigue; l’hypertension et les autres affections CV; le risque d’inhibition de la croissance à long terme; les troubles vasculaires cérébraux; les tics et le syndrome de Gilles de la Tourette; les effets sur la capacité

L’image présente des modèles et sert à des fins d’illustration seulement.

à conduire un véhicule ou à utiliser des machines; la pression intraoculaire et le glaucome; les cas de psychose et de trouble bipolaire préexistants, l’émergence de nouveaux symptômes psychotiques ou maniaques, l’agressivité, l’anxiété marquée et l’agitation, et les comportements et idéations suicidaires; le syndrome sérotoninergique lors d’une administration concomitante de médicaments sérotoninergiques; les symptômes extrapyramidaux lors d’une administration concomitante de certains antipsychotiques; la vasculopathie périphérique; les épreuves de laboratoire périodiques en cas de thérapie prolongée; le priapisme; l’utilisation chez les femmes enceintes ou qui allaitent; et la consommation d’alcool pendant le traitement;

• les conditions d’usage clinique, les effets indésirables, les interactions médicamenteuses, la posologie et l’administration.

Vous pouvez également vous procurer la monographie de produit en composant le 1-800-567-3331 ou le 1-800-387-8781.

* Le mot RAMQ est une marque officielle de la Régie de l’assurance maladie du Québec. Pour de plus amples renseignements sur la RAMQ, visitez le site http://www.ramq.gouv.qc.ca/fr/regie/Pages/mission.aspx

† La portée clinique comparative n’a pas été établie.

Références : 1. Régie de l’assurance maladie du Québec. Codes des médicaments d’exception. En ligne à l’adresse : http://www.ramq.gouv.qc.ca/ SiteCollectionDocuments/professionnels/medicaments/codes-medicamentsexception/codes_medicaments_exception.pdf. Consulté le 15 juillet 2019.

2. Liste des médicaments. Régie de l’assurance maladie du Québec. En ligne à l’adresse : https://www.ramq.gouv.qc.ca/sites/default/files/documents/listemed-2020-12-16-fr.pdf. Consulté le 16 décembre 2020. 3. Monographie de CONCERTA® (chlorhydrate de méthylphénidate), Janssen Inc., 17 avril 2019.

19 Green Belt Drive | Toronto (Ontario) | M3C 1L9 | www.janssen.com/canada/fr © 2021 Janssen Inc. | Marques de commerce utilisées sous licence. | CP-201818F

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Au revoir et merci !

Quand j’ai intégré l’équipe de rédaction de Québec Pharmacie il y a un peu plus de 10 ans, j’étais bien loin de me douter à quel point cette aventure serait enrichissante. En devenant rédactrice en chef adjointe, puis rédactrice en chef en 2016, je m’étais donné comme mission secrète de vous insuffler ma passion pour la pratique et son avancée. Je voulais être porteuse d’espoir et pas seulement critiquer le système. Je me sentais honorée, et ô combien responsable, d’avoir cette tribune pour vous présenter mon point de vue, et surtout mes espoirs pour la profession. Je voulais réussir à m’adresser à tous les pharmaciens, de tous les horizons (ça fait un peu cliché, je l’avoue). Vous saurez me dire si j’ai rempli ma mission secrète.

J’ai obtenu mon diplôme au siècle dernier, en 1999, alors que les soins pharmaceutiques émergeaient. Le pharmacien « clinicien » en était à ses balbutiements. Mon premier éditorial, en novembre 2012, portait justement sur l’évolution de la pratique pharmaceutique, et comment à force de s’exercer on peut évoluer dans sa profession. C’est ainsi, qu’au fil des années, je vous ai parlé de réforme du système de santé, des factures détaillées en pharmacie, du paiement pour les actes cognitifs en pharmacie, des pharmaciens en GMF, du manque de main-d’œuvre, de la mondialisation de la distribution des médicaments, de la COVID-19… J’ai abordé la pratique et son évolution grâce aux projets de loi marquants : 90, 28, 41 et 31. Mes sujets de prédilection étaient ceux qui rejoignaient le volet humain derrière la profession : la maladie, la souffrance, la qualité de vie, la mort. Mais également, d’autres aspects touchant plus spécifiquement les pharmaciens : l’erreur humaine, l’anxiété, l’épuisement professionnel, la solidarité professionnelle, la reconnaissance et la fierté d’évoluer dans cette profession incontournable.

Le travail de rédactrice en chef ne se résume pas à écrire l’éditorial. Avec l’aide de mon collègue Christophe Augé, mon travail consistait aussi à choisir soigneusement les sujets proposés pour chaque chronique et assurer la relecture de tous les numéros. C’est avec la plus grande rigueur que j’ai révisé chacun des textes soumis, parfois tard le soir et même la fin de semaine. J’en profite d’ailleurs pour souligner l’apport de mon conjoint qui m’a toujours soutenue dans cette entreprise.

En terminant, j’aimerais saluer tous les acteurs de Québec Pharmacie. Que vous soyez auteur, réviseur, responsable de chronique ou simplement lecteur, vous contribuez à votre manière à la vie de Québec Pharmacie

Merci d’avoir pris le temps de me lire et de commenter mes textes. Vos réactions étaient toujours les bienvenues. J’aimerais également remercier Christian Leduc, rédacteur en chef de Profession Santé, et les divers collaborateurs avec qui j’ai eu le plaisir d’échanger. Je m’en voudrais aussi de ne pas souligner l’excellent travail de Christophe Augé, qui sera de retour à titre de rédacteur en chef à compter du prochain numéro. Merci encore ! n

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éditorial Céline Léveillé-Imbeault, pharmacienne, B. Pharm., M. Sc. Rédactrice en chef
« J’aimerais saluer tous les acteurs de Québec Pharmacie. Que vous soyez auteur, réviseur, responsable de chronique ou simplement lecteur, vous contribuez à votre manière à la vie de Québec Pharmacie. »

LA PRECISION LE TRAITEMENT LÀOÙÇACOMPTE. LA PERFORMANCE DANS DE L’ACNÉ.

Le premier rétinoïde topique indiqué pour le traitement de l’acné du visage et du tronc1-3.

• La molécule de trifarotène se lie précisément au RAR le plus pertinent dans l’acné (RAR-ɣ)1

• En ce qui a trait à l’acné du visage, les patients peuvent constater des résultats significatifs en quatre semaines3

• Les patients ont signalé des améliorations substantielles sur le plan de la confiance en soi, de la vie sociale et du bien-être émotionnel4 grâce à une atténuation de leur acné

AKLIEF.ca

Indication et usage clinique : AKLIEF® (crème de trifarotène 50 mcg/g) est indiqué pour le traitement topique de l’acné vulgaire sur le visage et/ou le tronc chez les patients de 12 ans et plus.

L’innocuité et l’e cacité chez les patients âgés (≥ 65 ans) n’ont pas été établies.

Contre-indications :

• Eczéma ou dermatite séborrhéique

• Femmes enceintes ou planifiant une grossesse

Mises en garde et précautions les plus importantes :

• Destiné à l’usage externe seulement. Ne pas utiliser dans les yeux.

• Femmes enceintes ou planifiant une grossesse : On a signalé de rares cas d’anomalies congénitales associées à l’utilisation des rétinoïdes topiques pendant la grossesse.

Références :

Les femmes en âge de procréer doivent être informées des risques potentiels et utiliser des moyens contraceptifs e caces

Autres mises en garde et précautions pertinentes :

• Cesser d’utiliser si des réactions d’allergie/ hypersensibilité se produisent

• Éviter tout contact avec les yeux, les lèvres, les angles du nez, les muqueuses, les écorchures, les plaies ouvertes, les coupures, les zones eczémateuses et les coups de soleil

• Éviter d’utiliser d’autres médicaments dermatologiques et produits topiques potentiellement irritants et fortement asséchants, ainsi que des produits contenant une forte concentration d’alcool, d’astringents, d’épices ou de lime

• Utiliser des cosmétiques non comédogènes

• La région traitée ne doit pas être recouverte de pansements ni de bandages

• Les conditions météorologiques extrêmes, comme le vent ou le froid, peuvent exacerber l’irritation

• Il faut éviter l’exposition excessive au soleil, lampes solaires comprises. On recommande d’utiliser un écran solaire e cace et de porter des vêtements protecteurs

• Certains signes et symptômes cutanés peuvent apparaître avec l’application du produit

• Ne pas utiliser l’électrolyse, les « cires » ni les dépilatoires chimiques

• Prudence lors de la prise concomitante de médicaments photosensibilisants

• Éviter d’utiliser sur la poitrine pendant l’allaitement

Pour de plus amples renseignements : Veuillez consulter la monographie d’AKLIEF® à https://pdf.hres.ca/dpd_pm/00054310.PDF pour obtenir de l’information importante sur les éléments qui ne sont pas abordés dans le présent document, notamment les e ets indésirables, les interactions et la posologie.

Vous pouvez également obtenir la monographie de produit en nous appelant au 1 800 467-2081.

1. Monographie d’AKLIEF®, Galderma Canada Inc., 25 novembre 2019. 2. Aubert J, et al. Nonclinical and human pharmacology of the potent and selective topical retinoic acid receptor-γ agonist trifarotene. Br J Dermatol. 2018;179(2):442-456. 3. Tan J, et al. Randomized phase 3 evaluation of trifarotene 50 μg/g cream treatment of moderate facial and truncal acne. J Am Acad Dermatol. 2019;80(6):1691-1699.

4. Blume-Peytavi U, et al. Long-term safety and e cacy of trifarotene 50 μg/g cream, a first-in-class RAR-γ selective topical retinoid, in patients with moderate facial and truncal acne. J Eur Acad Dermatol Venereol. 2021;34(1):166-173. RAR-ɣ : récepteur de l’acide rétinoïque gamma.

AKLIEF® est une marque déposée de Galderma Canada Inc. Galderma Canada Inc. Thornhill (Ontario) CA-AFC-2200003

à vos soins

RESPONSABLE DE CETTE CHRONIQUE

Prescrire la déprescription médicamenteuse pour mieux soigner ?

Objectifs d’apprentissage

1. Connaître le principe de la déprescription médicamenteuse.

2. Savoir peser les risques et les bénéfices d’un médicament, dans le but de le déprescrire.

3. Savoir cibler les interventions en fonction des priorités.

Introduction

La population québécoise est vieillissante. L’Institut de la statistique du Québec projette qu’en 2031, près du quart des Québécois seront âgés de 65 ans ou plus. Selon l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), en 2016, 72,8 % des aînés de plus de 65 ans ont utilisé plus de 5 médicaments au cours d’une année, et 16,2 % en avaient utilisé 15 ou plus1

La déprescription devient un enjeu important dans un contexte de population vieillissante et polymédicamentée. Selon le rapport annuel de 2021 du Réseau canadien pour la déprescription, cette dernière est définie comme étant « la réduction de dose

RÉDACTION

Amélie Cadieux , pharmacienne, Pharmacie Jean Coutu Marie-Claude Raymond

RÉVISION

Louise Mallet, professeure titulaire de clinique, Faculté de pharmacie de l’Université de Montréal, pharmacienne en gériatrie. Centre universitaire de santé McGill

Texte original : 26 septembre 2022

Texte final : 13 novembre 2022

L’auteure et la réviseure ne déclarent aucun conflit d’intérêts liés à la rédaction de cet article.

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ou la cessation d’un médicament qui n’a plus d’effet bénéfique ou qui risque de nuire au patient. Il s’agit d’un processus planifié et supervisé, dont le but est de maintenir ou d’améliorer la qualité de vie du patient 2 ». Des outils peuvent aider le clinicien pour y parvenir. Les plus connus sont les critères de Beers3 ainsi que STOPP (screening tool of older persons prescription) et START4 (screening tool to alert doctors to right treatment). Toutefois, ces outils sont des aides à la décision, mais les actions doivent être individualisées et priorisées en fonction des objectifs souhaités.

Dans l’exemple de Mme LB, la première étape consiste donc à mettre à jour son portrait global. Cette vision d’ensemble va orienter son pharmacien vers les décisions à prioriser.

n Femme, 85 ans, 46 kg, 1,52 m, IMC 19,9.

n Aucune consommation d’alcool, drogue ou tabac.

n Aucune allergie.

n Prise d’acétaminophène en vente libre : 500 mg 1-2 cos toutes les 6 h PRN, prend en moyenne 1 à 2 comprimés par jour.

n Aucun autre médicament en vente libre (MVL), produits de santé naturels (PSN) ou autres médicaments servis à une autre pharmacie.

n Antécédents médicaux : trouble anxio-dépressif, insomnie chronique, diabète de type 2, dyslipidémie, hypertension artérielle, vessie hyperactive, ostéoporose fracturaire (fracture du poignet il y a 10 ans).

n Profil médicamenteux (service en pilulier, hebdomadaire) :

CAS CLINIQUE 1/1

Mme LB consulte son médecin de famille, Dr MP, car elle se sent étourdie et elle a peur de tomber. Cela l’inquiète, car elle habite seule et ses enfants ne viennent l’aider que rarement. Ces étourdissements l’empêchent d’accomplir certaines tâches ménagères et culinaires. Dr MP vous contacte pour vous mentionner qu’il note une détérioration de l’état général de Mme LB, mais il ne trouve pas de cause apparente. Il se demande si cela peut être causé par ses médicaments. Il vous demande, dans un premier temps, de réviser la pharmacothérapie de sa patiente et de suggérer un plan d’action afin d’améliorer sa qualité de vie en réduisant le risque d’étourdissements et, dans un second temps, de réduire le nombre de médicaments potentiellement inappropriés pour la patiente.

n Mirtazapine 7,5 mg DIE HS

n Amitriptyline 25 mg DIE HS

n Citalopram 30 mg DIE AM

n Fésotérodine 4 mg DIE HS n Metformine 500 mg BID AM et au souper n Gliclazide MR 60 mg DIE AM n Atorvastatine 40 mg DIE HS n Vitamine B12 1200 mcg DIE AM n Pantoprazole 40 mg DIE AM n Aspirine EC 80 mg DIE AM

n Ramipril 5 mg DIE AM n Amlodipine 7,5 mg DIE HS n Calcium 500 mg BID AM et au souper n Vitamine D 10 000 U 1X/sem. le dimanche n Risédronate 35 mg 1X/sem. le dimanche n Lorazépam 0,5-1mg DIE PRN si anxiété ou insomnie, hors pilulier (30 comprimés de 0,5 mg utilisés tous les 45 jours en moyenne)

n Mesure moyenne de la pression artérielle rapportée par la patiente (prise BID depuis les 2 dernières semaines) : 110/65 mm Hg, pouls 60 bpm. Il y a 6 mois, la moyenne était de 120/70 mm Hg, pouls 62 bpm.

n Prises de glycémie difficiles par la patiente (dextérité diminuée); elle ne pense pas faire d’hypoglycémie, mais n’est pas certaine (aucun renouvellement de bandelettes depuis 10 mois).

n Dernières glycémies il y a 6 mois : 5,3 mmol/L à jeun et 6,2 mmol/L 2 heures après le souper

n Dernière prise de sang il y a 2 mois : fonction hépatique normale, fonction rénale diminuée : débit de filtration glomérulaire (CKD-EPI) autour de 45  mL/min/1,73 m 2 il y a 6 mois, 35  mL/min/1,73 m 2 il y a 2 mois. Électrolytes normaux, bilan lipidique (LDL à 1,6 mmol/L), B12 normale, HbA1c à 6,6 %.

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n Dr MP est son médecin de famille. Pas d’autres intervenants au dossier.

n Lors de la discussion avec la patiente, celle-ci dit prendre ses médicaments régulièrement. Elle trouve qu’elle en prend beaucoup, mais mentionne qu’à son âge, c’est normal ! Elle ne connaît pas les indications de ses médicaments.

Nos objectifs principaux consistent à optimiser son traitement médicamenteux et réduire les étourdissements potentiellement associés.

Les médicaments agissant sur le système nerveux central sont une des premières causes médicamenteuses pouvant expliquer les symptômes de la patiente. On sait que le vieillissement amène des modifications physiologiques qui peuvent affecter la concentration plasmatique de certains médicaments en modifiant leur pharmacocinétique ou par une sensibilité accrue aux effets recherchés ou indésirables (pharmacodynamie). Cela pouvant entraîner plus d’effets indésirables, comme des étourdissements 6

Le fardeau anticholinergique en lien avec les médicaments est non négligeable dans le cas de Mme LB. En utilisant l’échelle du risque anticholinergique (DBI Drug Burden Index)5, on note que le fardeau anticholinergique est de 2,58. L’amitriptyline, le citalopram, la fésotérodine, la mirtazapine et le lorazépam ont contribué à cette charge 6 .

Les antidépresseurs tricycliques, dont l’amitriptyline, ainsi que les benzodiazépines ne sont pas recommandés en gériatrie, car ils sont associés à une augmentation des risques de chutes, d’étourdissements et de pertes de mémoire. Même si un patient ne ressent pas de déclin cognitif associé à ces médicaments, à long terme, leur effet est non négligeable; ce qui doit être mentionné à la patiente. Pour la patiente, ce déclin pourrait se traduire par des difficultés à se concentrer, des oublis passagers, une baisse de motivation ou une certaine lassitude ou encore de la difficulté à effectuer des tâches qu’elle faisait auparavant, comme le calcul mental ou l’écriture. >

n Mme LB se sent plus étourdie récemment et elle a peur de tomber.

n Habitant seule, elle trouve que s’occuper des tâches de la vie quotidienne devient difficile. Elle reçoit parfois de l’aide de ses enfants pour accomplir les tâches plus complexes.

Voir plus haut dans la mise à jour du portrait global. Fracture de la hanche à l’âge de 70 ans

n Charge anticholinergique élevée pouvant contribuer aux symptômes de la patiente (amitriptyline, lorazépam, mirtazapine, fésotérodine, citalopram) DBI 2,58.

n Utilisation d’une sulfonylurée mettant à risque d’hypoglycémie. n Hypertension artérielle surtraitée. n Plusieurs médicaments sans indication par rapport aux antécédents médicaux (pantoprazole, aspirine). n Traitement adéquat pour l’ostéoporose fracturaire. n Évaluation des risques-bénéfices pour poursuite de la statine. n Possibles cascades médicamenteuses pantoloc+metformine  carence en B12  B12

Changements pouvant être faits immédiatement n Changement du gliclazide MR pour le linagliptine 5 mg DIE. n Diminution de l’amlodipine à 5 mg DIE HS. n Cessation de la fésotérodine. n Diminution de l’amitriptyline de 5 mg toutes les 4 semaines jusqu’à l’arrêt complet. n Prévoir la cessation de l’ASA et du pantoprazole.

Changements à faire de façon graduelle n Diminution du citalopram à 20 mg, QTc et avis médical. n Tenter de diminuer la prise de lorazépam, évaluer la pertinence d’un plan de sevrage.

Suivi dans 2 semaines Efficacité, tolérance, adhésion : glycémies (possible aide des enfants pour aider la patiente à prendre ses glycémies, voir les possibilités d’implication du CLSC), pressions artérielles, étourdissements, sommeil, humeur (QSP-9 si besoin), état général.

Par la suite, faire des suivis aux changements de dose toutes les 2 semaines ou plus si besoin, et faire un suivi des symptômes urinaires.

De façon périodique lors de la stabilisation (par exemple tous les 3 mois) Surveillance de l’efficacité, tolérance et adhésion, tension artérielle, état général, glycémie si possible.

Prévoir des prises de sang de contrôle de façon régulière si non disponible : fonction rénale, ions, Hba1c, bilan lipidique.

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Le contexte de l’ajout de l’amitriptyline n’est pas clair. Il a été introduit il y a plus de 10 ans, et il n’y a pas d’historique de migraine ni de douleurs neuropathiques. La diminution graduelle de l’amitriptyline doit être fortement envisagée.

Mme LB prend du lorazépam. Ce dernier ainsi que l’oxazépam et le témazépam sont les premiers choix de benzodiazépines en gériatrie vu leur métabolisme sous forme inactive par conjugaison, non affecté par l’âge 6. La patiente l’utilise surtout pour traiter son anxiété et non contre l’insomnie. Elle semble à l’aise avec l’idée d’une diminution graduelle du nombre moyen de comprimés par jour.

De plus, elle prend de la mirtazapine à raison de 7,5 mg par jour au coucher. Cela reste un choix de première ligne en gériatrie 6. Bien que plus sédative à petite dose, la mirtazapine peut avoir un impact positif sur le sommeil, l’humeur et la prise de poids; ce qui en fait un choix adéquat pour elle.

Mme LB prend du citalopram 30 mg DIE, un choix de première ligne en gériatrie contre les troubles anxieux et dépressifs. Cependant, ce dernier peut avoir des effets secondaires qui s’accentuent avec l’âge, comme les étourdissements et la somnolence. La dose de 30 mg est élevée à la vue des potentiels effets secondaires et du risque d’augmentation de l’intervalle QT. L’avis de Santé Canada concernant la réduction de la dose maximale de citalopram chez les personnes de plus de 65 ans à 20 mg doit être discuté avec le médecin et la patiente, car certains patients ont tout de même besoin d’une dose plus élevée, malgré leur âge.

ACTES PHARMACEUTIQUES FACTURABLES

DC : Demande de consultation adressée à un pharmacien

JM (analyse pharmacologique pour déterminer la présence où l’absence d’un médicament en cause dans un problème de santé ou une anomalie de laboratoire)

Un ECG afin d’obtenir la valeur de l’intervalle QTc pourrait nous rassurer. Notons que cette dernière a des facteurs de risques non modifiables associés à un QT potentiellement long : sexe féminin et insuffisance rénale. Les facteurs rassurants sont l’absence de maladies cardiaque et hépatique, de bradycardie, d’hypokaliémie et d’hypomagnésémie. Cependant, une carence en magnésium corporel total peut être rencontrée avec un magnésium sérique normal (voir https://www.em-consulte. com/article/261523/desordres-de-lamagnesemie), ce qui pourrait être le cas chez Mme LB vu la prise de pantoprazole à long terme. Toutefois, le problème restant potentiel et étant donné les changements prévus et le fait que la patiente prend déjà du lorazépam au besoin (que l’on ne souhaite pas voir augmenté), la réduction de la dose de citalopram ne sera considérée que dans un second temps.

Mme LB prend aussi un médicament pour traiter la vessie hyperactive : la fésotérodine, un antimuscarinique qui, lui aussi, peut entraîner des effets anticholinergiques non négligeables (sécheresse buccale, constipation, confusion, troubles mnésiques, etc.). Au questionnaire, la patiente mentionne ne pas avoir d’incontinence urinaire ni de symptômes d’urgence mictionnelle; la fréquence de ses urines lui apparaît normale. Elle dit ne plus avoir ces problèmes depuis longtemps sans savoir si c’est lié à un de ses médicaments.

Dans les circonstances, l’arrêt de la fésotérodine doit être envisagé, avec suivis fréquents. En cas de retour de symptômes urinaires, une option serait de changer pour le mirabegron, un agoniste sélectif des récepteurs bêta 3-adrénergiques. Ce dernier n’est pas un antimuscarinique, mais il reste associé à des étourdissements et il pourrait augmenter la concentration de l’amitriptyline (par inhibition de son métabolisme au cytochrome 2D6), mais d'ici là il sera potentiellement cessé.

Une autre cause possible des symptômes de la patiente est une pression artérielle trop basse. En effet, la pression artérielle de Mme LB est en moyenne de 110/65 mm Hg avec un pouls de 60 bpm, ce qui peut être acceptable si elle n’a pas de symptômes d’hypotension (fatigue, vertiges, voile noir devant les yeux, etc.). Selon la Société

10 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie

internationale d’hypertension, on recommande une cible <140/90 mm Hg chez les plus de 65 ans, à moins d’être un patient robuste chez qui les cibles usuelles s’appliquent7. La cible peut augmenter en fonction de la fragilité du patient. Par exemple, un patient très fragile pourra avoir comme cible une systolique inférieure à 160 mm Hg.

Dans le cas de Mme LB, nous pourrions tenter de diminuer l’amlodipine à 5 mg DIE HS. Ainsi, nous viserions une tension artérielle plus élevée (<140/90 mm Hg) afin d’observer voir si cela est associé à une diminution des étourdissements.

La patiente est aussi diabétique. Elle habite seule et a énormément de difficultés à prendre ses glycémies; elle surveille donc peu sa glycémie. Il se peut qu’elle ait de la difficulté à reconnaître les symptômes d’une hypoglycémie. Cette condition médicale peut accentuer ses étourdissements et sa fatigue. L’utilisation d’une sulfonylurée augmente le risque d’hypoglycémie et devrait être évitée en gériatrie 6

Un changement de médication vers un inhibiteur de la dipeptidyl peptidase-4 (iDPP4) pourrait être une option à privilégier afin de diminuer les risques d’hypoglycémie 6,7. Tous les iDPP4 peuvent être utilisés au moins jusqu’à une clairance de la créatinine supérieure à 15  mL/min. La linagliptine ne s’ajuste pas selon la fonction rénale et peut être utilisée de façon sécuritaire jusqu’à 15  mL/min6. En bas de 15  mL/min, son utilisation n’est pas contre-indiquée, mais elle doit être utilisée avec prudence. Dans le cas de Mme LB, il apparaît plus bénéfique de ne pas courir le risque d’hypoglycémie que de viser une HbA1c et des glycémies plus basses pour réduire les complications du diabète. Une cible de 7 % d’HbA1c serait acceptable chez cette patiente.

Mme LB prend plusieurs autres médicaments potentiellement inappropriés. D’autres changements pourraient donc être planifiés avec elle et son médecin, malgré le fait que ces médicaments ne contribuent pas directement à ses étourdissements. C’est plutôt pour répondre au besoin de la patiente de diminuer le nombre de ses médicaments, sans pour autant faire trop de modifications simultanément.

LETTRE DESTINÉE AU MÉDECIN

Bonjour Dr MP, À la suite de la révision du dossier pharmacologique de Mme LB, je remarque que les symptômes de la patiente pourraient être de cause médicamenteuse. Voici donc mes recommandations :

n Changer la sulfonylurée pour un iDPP4 (p. ex. : linagliptine 5 mg DIE), car possible risque d’hypoglycémie pouvant contribuer aux étourdissements, dont la reconnaissance et la gestion peuvent être difficiles.

n Cessation de la fésotérodine (afin de diminuer la charge anticholinergique) avec suivi rapproché.

n Diminution de l’amlodipine à 5 mg DIE HS, car possible hypotension reliée à une pression moyenne de 110/65 mm Hg et un pouls moyen de 60.

n Charge anticholinergique élevée (2,58) avec plusieurs médicaments jouant au SNC pouvant expliquer l’état de la patiente. Selon l’échelle du risque anticholinergique (DBI), elle est donc à risque élevé. Je suggère une diminution très graduelle de l’amitriptyline.

n Ensuite, une réévaluation de la dose de citalopram, vu l’âge de la patiente et l’avis de Santé Canada (max 20 mg si >65 ans), pourra être faite.

n Le lorazépam est un choix adéquat de benzodiazépine en gériatrie, nous pourrions éven tuellement tenter de diminuer le nombre de comprimés en fonction de l’état de la patiente.

n Finalement, cessation de l’ASA, car non recommandé en prévention primaire, et arrêt du pantoprazole vu la cessation de l’ASA.

Concernant le reste de la médication, le traitement de l’ostéoporose est adéquat. La statine peut être conservée, car Mme LB n’a pas d’effets secondaires reliés à cette médication (dosage des CK devrait être envisagé). Le ramipril et la vitamine B12 peuvent être conservés pour le moment.

Je m’assurerai du suivi pharmacologique à la suite des changements de façon régulière et je pourrai prescrire des prises de sang au besoin.

En toute collaboration, La pharmacienne

Mme LB prend de l’aspirine en prévention primaire, le médecin ne rapportant pas d’antécédents cardiovasculaires. Comme vu dans le précédent « À vos soins », l’aspirine n’est plus recommandée en prévention primaire, notamment à la suite d’études publiées en 2018 : ASPREE et ASCEND. L’étude ASPREE8 évaluait ASA 100 mg comparé à un placébo, chez les personnes de plus de 70 ans (>65 ans chez certaines populations) en santé, sans maladie cardiovasculaire, dont 11 % étaient diabétique. Les résultats à 4,7 ans ont démontré une augmentation de la mortalité et une augmentation significative des saignements gastrointestinaux et intracrâniens majeurs.

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De plus, l’étude ASCEND9 évaluait ASA 100 mg comparé à un placébo chez les personnes de plus de 40 ans, diabétiques, sans maladie cardiovasculaire. Les résultats démontrent une réduction du risque relatif d’événements cardiovasculaires majeurs de 12 % comparé au placébo, mais cela est contrebalancé par une augmentation de 29 % des saignements majeurs comparé au placébo. Dans le cas de Mme LB., vu son âge, sa fragilité et l’absence de maladie cardiovasculaire et malgré le fait qu’elle soit diabétique, la cessation de l’ASA devrait être envisagée.

Concernant le traitement de la dyslipidémie, le calcul du risque cardiovasculaire chez la personne âgée de plus de 75 ans est difficile, car le modèle de Framingham n’est pas validé à cet âge. Les bénéfices de prescrire une statine aux plus de 80 ans en prévention primaire n’ont pas été clairement démontrés. Par contre, Mme LB prend déjà une statine, car elle a des facteurs de risques de maladie cardiovasculaire : diabète de type 2 et maladie rénale chronique. L’arbre décisionnel du RUSHGQ6 pour la gestion des hypolipémiants chez les plus de 80 ans montre que si l’espérance de vie est supérieure à 5 ans, le maintien de la statine peut être acceptable si cette dernière est bien tolérée et qu’elle n’occasionne pas d’effets secondaires, comme les myopathies.

Certains facteurs de risques de myopathies reliées aux statines incluent le sexe féminin, une dose élevée, IMC<21, >80 ans, certaines maladies chroniques (IRC, insuffisance hépatique, hypothyroïdie non traitée, diabète), et certaines interactions 6. Comme Mme LB est semi-autonome et que sa statine ne lui occasionne pas d’effets secondaires, il peut être adéquat de continuer le médicament, avec un contrôle périodique du bilan lipidique. Notons que, puisqu’elle présente plusieurs facteurs de risques de myopathie reliée à son atorvastatine, il faut être à l’affût de cet effet secondaire et faire un dosage des CK. Mme LB prend un IPP, le pantoprazole, sur une base régulière. L’indication n’est pas claire, elle mentionne ne jamais avoir eu de reflux ou de problème gastrique. Le médecin mentionne que ce traitement a été prescrit au départ comme prophylaxie cytoprotectrice, car Mme LB prend de l’ASA.

Les critères Beers/STOPP mentionnent qu’il faut éviter de prendre des IPP durant plus de 8 semaines, à moins d’avoir une condition médicale le nécessitant 3,4. Le risque d’effets indésirables à long terme surpasse les bénéfices. Les IPP ont démontré une augmentation du double du risque d’infection à C. difficile, et une augmentation de la perte osseuse et des fractures de l’ordre de 25 % à 50 % aux hanches10. Leur utilisation à long terme peut aussi mener à une carence en B12 et une hypomagnésémie pour lesquelles il peut être nécessaire de prendre des suppléments. Il pourrait y avoir un lien entre l’utilisation des IPP à long terme et le risque de développer une démence ou une pneumonie acquise en communauté, bien que plus de preuves soient nécessaires pour confirmer ce lien. Lors de l’arrêt de l’aspirine, le pantoprazole pourrait aussi être arrêté, mais en faisant un suivi rapproché après 4 semaines.

Mme LB a subi une fracture de la hanche à l’âge de 70 ans. Cela rend d’autant plus importante la révision de sa pharmacothérapie afin d’éviter au maximum le risque de chutes. En prévention secondaire de l’ostéoporose, le risédronate, le calcium et la vitamine D sont adéquats. L’utilisation des outils CAROC et FRAX (qui se fait en ligne, sans l’obligation d’avoir une DMO) démontre que la patiente est à haut risque de subir de nouveau une fracture. La décision de faire une pause thérapeutique doit être discutée, mais généralement, si le risédronate est bien toléré et que la fonction rénale est supérieure à 30  mL/min, il apparaît adéquat de continuer le traitement. Si la fonction rénale de Mme LB passe sous les 30  mL/min, un changement vers le denosumab pourrait être envisagé en prenant en compte le risque augmenté d’hypocalcémie. Des prises de sang pré et post injection vérifiant le calcium ionisé ou le calcium et l’albumine ainsi que la fonction rénale seront à prévoir11. n

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Références

1. Gosselin, Emmanuelle et coll., Portrait de la polypharmacie chez les aînés québécois entre 2000 et 2016 Québec, Institut national de santé publique du Québec, INSPQ, 2020, 1 ressource en ligne (11 pages) : illustrations en couleur, Collections de BAnQ.

2. Réseau canadien pour la déprescription [En ligne]. Algorithmes de déprescription et Rapport annuel 2021 — Réseau canadien pour la déprescription; Disponible : www.reseaudeprescription.ca/algorithmes et www.reseaudeprescription.ca/rapports

3. Nicoteri J A. Practical use of the american geriatric society Beers criteria® 2019 update. The Journal for Nurse Practitioners [En ligne]. Juil 2021; 17(7):789-94. Disponible : https://doi.org/10.1016/j.nurpra.2021.04.014

4. O’Mahony D. STOPP/START criteria for potentially inappropriate medications/potential prescribing omissions in older people: origin and progress. Expert Review of Clinical Pharmacology [En ligne]. 30 nov. 2019; 13(1):15–22. Disponible : https://doi.org/10.1080/17512433.2020.1697676

5. Dispennette R, Elliott D, Nguyen L, Richmond R. Drug Burden Index score and anticholinergic risk scale as predictors of readmission to the hospital. Consult Pharm. 2014; 29(3):158-68 Calculs possible sur le site : https://anticholinergicscales.es

6. Daniel Tessier, Faranak Firoozi. Gestion des dyslipidémies en UCDG 3e édition (2022) — Judith Latour, Louise-Papillon Ferland, Gestion des antihypertenseurs en UCDG 3e édition (2021), Liliane Raduly et José A.Morais, Gestion médicamenteuse du diabète en UCDG, 2021) RUSHGQ.

7. Barbara Farrell et coll., Déprescription des antihyperglycémiants chez les personnes âgées. Canadian Family Physician [En ligne]. 1 nov 2017 ; 63 (11) : e452-e465. Disponible : https://www.cfp.ca/content/63/11/e452#fn-group-1

8. McNeil JJ, Nelson MR, Woods RL, Lockery JE, Wolfe R, Reid CM et coll. Effect of aspirin on all-cause mortality in the healthy elderly. New England Journal of Medicine [En ligne]. 18 oct. 2018 [cité le 21 sept. 2022];379(16):151928. Disponible : https://doi.org/10.1056/nejmoa1803955

9. Ascend study collaborative group, Effects of aspirin for primary prevention in persons with diabetes mellitus. New England Journal of Medicine [En ligne]. 18 oct 2018; 379 (16):1529-39. Disponible : https://doi.org/10.1056/nejmoa1804988

10. Maes ML, Fixen DR, Linnebur SA. Adverse effects of proton-pump inhibitor use in older adults: a review of the evidence. Therapeutic Advances in Drug Safety [En ligne]. 29 juin 2017; 8 (9) : 273-97. Disponible : https://doi.org/10.1177/2042098617715381

11. Brown J. L’ostéoporose : le rôle du pharmacien dans la prise en charge du traitement; Présentation virtuelle et notes, 14 sept. 2022; Québec, Canada.

Les références en gras indiquent au lecteur les références principales de l’article, telles que choisies par les auteurs.

décembre 2022 13
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Répondez aux questions en vous rendant sur ·cca

Période d’accréditation valide

1er décembre 2022 au 31 décembre 2023

Donne : 3 h 00

N° d’accréditation : 10865

QUESTIONS DE FORMATION CONTINUE (QUESTIONS

1 À 3)

Prescrire la déprescription médicamenteuse pour mieux soigner ?

1. Concernant les médicaments en gériatrie, quel énoncé est vrai ?

n Il est recommandé de cesser absolument toute médication apparaissant dans les critères de Beers chez nos patients gériatriques.

n Il est recommandé de diminuer la dose de citalopram à 20 mg DIE, selon la recommandation de Santé Canada.

n La décision de cesser, poursuivre ou ajouter une médication doit se prendre de façon collaborative et le patient doit se sentir impliqué et reconnaître les risques et bénéfices associés à une médication.

2. Concernant l’utilisation d’IPP en gériatrie, quel énoncé est vrai ?

n Leur utilisation chronique a démontré qu’ils sont une cause de démence.

n Leur utilisation devrait être d’une durée maximale de 8 semaines et doit être réévaluée régulièrement, à moins d’avoir une condition médicale nécessitant la prise de façon chronique.

n Il est nécessaire de contrôler la B12 après 4 semaines de traitement.

3. Concernant la prise en charge d’un patient gériatrique, quel énoncé est vrai ?

n Les cibles de pression artérielle doivent être individualisées chez les individus fragiles et l’on peut tolérer des cibles supérieures à celles reconnues.

n La mirtazapine est contre-indiquée en gériatrie, même à faible dose, car elle cause trop de somnolence.

n Il est recommandé de cesser la statine chez toute personne de plus de 80 ans, en prévention primaire.

14 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie

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NOUS RECRUTONS ! NOUS RECHERCHONS DES AUTEURS ET DES RÉVISEURS SCIENTIFIQUES JUILLET AOÛT 2022 2 h 00 DE FC N° d’accréditation Glycémie à jeun et HbA1c divergentes quand le laboratoire nous joue des tours L’utilisation des pansements dans le traitement des plaies mineures en pharmacie L’oxyhydroxyde sucro-ferrique 2 h 30 DE FC N° d’accréditation Traitement de l’insuffisance cardiaque UN DOMAINE EN PLEIN ESSOR Le pharmacien et la prophylaxie post-exposition accidentelle au VIH Comment intégrer les soins palliatifs en pharmacie communautaire MVL ENQUÊTE ANNUELLE Ménopause LA TIBOLONE MAINTENANT APPROUVÉE AU CANADA Psychose post-partum Prévention et traitement des mucosites Pédiatrie retombées de l’implication du pharmacien 3 h 00 DE FC N° d’accréditation Vous aimeriez contribuer à la revue de formation continue des pharmaciens ? Vous êtes une pharmacienne ou un pharmacien inscrit(e) au tableau de l’OPQ ? Rejoignez notre équipe éditoriale !
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RESPONSABLE DE CETTE CHRONIQUE

Alice Collin, B. Pharm., D. E. S. S., M. Sc.

Le casse-tête des ordonnances vétérinaires en pharmacie

Objectifs d’apprentissage

1. Reconnaître les aspects légaux et déontologiques associés au service de médicaments destinés aux animaux domestiques en pharmacie communautaire.

2. Être en mesure d’évaluer la conformité d’une ordonnance vétérinaire et d’identifier les éléments essentiels à une prestation de soins pharmaceutiques sécuritaire et adaptée aux animaux domestiques.

3. Être en mesure de se référer à des ressources d’information spécifiques à la pharmacothérapie chez les animaux domestiques.

Résumé

Les pharmaciens du Québec peuvent servir des médicaments destinés à un usage vétérinaire en pharmacie. Par contre, ils ne disposent que de peu de formation et de connaissances sur la pharmacothérapie animale. Le présent article vise donc à faire un survol des informations essentielles à connaître pour assurer le service sécuritaire de ce type de clientèle en pharmacie communautaire.

RÉDACTION

Camille Dupuis-Brousseau, Pharm. D., B. Sc., Pharmacie Jérôme Bergeron et Camille Dupuis-Brousseau et Taïs Gomes, Pharm. D., Pharmacie Maria Deich

RÉVISION

Dre Beatriz Gomes, D. M. V., Clinique vétérinaire Liesse

Texte original : 22 août 2022 Texte final : 6 octobre 2022

Les autrices et la réviseure scientifique ne déclarent aucun conflit d’intérêts lié à la rédaction de cet article.

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les pages bleues

Dans un premier temps, les concepts légaux et déontologiques seront présentés, puis les composantes d’une prestation de service pharmaceutique de qualité adaptée à cette clientèle seront détaillées. Les particularités du service des médicaments, notamment les précautions concernant les formulations à servir, ainsi que le métabolisme des médicaments seront abordés. Finalement, différentes ressources spécifiques à la pharmacothérapie animale auxquelles les pharmaciens peuvent se référer seront présentées.

Introduction

Au Québec, les vétérinaires et les pharmaciens sont les deux seuls professionnels habilités à préparer et à servir des médicaments destinés à la clientèle animale1,2 . Même si la majorité des médicaments destinés à ce type de clientèle est remise directement par les médecins vétérinaires à leurs patients, il arrive occasionnellement que ceux-ci dirigent les propriétaires d’animaux domestiques vers une pharmacie avoisinante pour se les procurer.

En effet, différentes situations peuvent inciter le vétérinaire ou le maître de l’animal à utiliser cette option, notamment des raisons financières ou encore d’inventaire. Comme de nombreux médicaments offerts en officine pour les humains peuvent également être utilisés chez les animaux, plusieurs propriétaires sont parfois tentés de se les procurer dans leur pharmacie habituelle plutôt que directement chez le vétérinaire.

CAS CLINIQUE 1/3

Madame Plourde demande à vous voir en consultation. Elle part en voyage en voiture d’ici peu avec sa famille et son chien, qui pèse environ 10 kg. Comme elle a approximativement 10 heures de route à faire et que son chien a tendance à être malade lors des longs trajets en voiture, elle aimerait avoir quelque chose contre le mal des transports, comme ce que vous lui avez recommandé l’an dernier pour elle-même. Les symptômes sont, selon elle, assez typiques du mal des transports : augmentation de la salivation, nervosité, agitation et vomissements. À son dossier, vous voyez un service de vente libre pour du Gravol en comprimé il y a environ 1 an. Comme il s’agit d’un médicament en vente libre et qu’elle part bientôt, elle veut éviter une visite chez le vétérinaire.

Afin d’assurer une prestation de soins pharmaceutiques sécuritaire pour ce type de clientèle, il importe d’abord de reconnaître les limites du champ d’expertise des pharmaciens et de ne pas offrir de produits destinés à un animal en l’absence d’une consultation et de l’ordonnance d’un médecin vétérinaire.

Les pharmaciens ne disposent que de peu de formation leur permettant de développer les aptitudes nécessaires à l’offre d’un service adapté aux animaux.

La connaissance des aspects légaux encadrant le service en pharmacie pour ce type de clientèle est un autre aspect important. Même chose en ce qui concerne le contenu des différentes annexes du Règlement sur les conditions et les modalités de vente des médicaments régissant la vente de médicaments destinés aux animaux, puisqu’il est bien différent de celui des annexes pour les médicaments destinés aux humains3.

Les pharmaciens doivent également être en mesure de s’assurer de la conformité des ordonnances vétérinaires et de connaître les particularités du service pharmaceutique pour la clientèle animale, notamment les règles concernant la substitution et les différentes formulations disponibles. Plusieurs excipients étant potentiellement toxiques pour les animaux, il est important d’y porter une attention supplémentaire. Il faut aussi reconnaître l’existence de certaines particularités associées aux médicaments chez les animaux de compagnie, notamment en ce qui concerne le métabolisme, les doses utilisées et l’effet obtenu qui peuvent être complètement différents de ce qui est rencontré en pratique chez les humains.

Un service pharmaceutique complet et adapté, de la collecte de données à l’analyse jusqu’au contenu du conseil à faire, sera essentiel pour assurer la sécurité de l’animal et l’efficacité du traitement tout en s’assurant de respecter les standards de pratique de l’Ordre des Pharmaciens du Québec (OPQ)4

Pour ce faire, les pharmaciens doivent être en mesure de se référer à des ressources fiables et spécifiques à la pharmacothérapie chez les animaux, puisque les références habituellement utilisées en pharmacie se concentrent exclusivement sur la pharmacothérapie humaine.

18 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie

Les deux espèces les plus communes d’animaux domestiques et pour lesquelles des ordonnances sont rencontrées plus fréquemment en pharmacie communautaire sont les chiens et les chats. C’est pourquoi ce sont celles-ci qui sont abordées dans cet article.

Aspects légaux et déontologiques

Pourquoi des ordonnances vétérinaires en pharmacie communautaire ?

Plusieurs raisons peuvent mener à l’exécution d’une ordonnance vétérinaire en pharmacie communautaire. D’abord, certaines molécules n’existent pas en formulation spécifiquement homologuée pour la clientèle animale. Dans ce cas, par un principe appelé « utilisation de médicaments en dérogation des directives de l’étiquette (UMDDE) », c’est la formulation destinée aux humains qui sera utilisée, mais les vétérinaires n’y ont pas toujours accès5,6. Par exemple, le lévétiracétam n’existe pas en formulation homologuée pour l’animal. Il est probable que le médecin vétérinaire remette alors l’ordonnance au maître de l’animal pour qu’il aille se le procurer en pharmacie communautaire.

Lorsqu’il n’existe pas de formulation commercialisée adéquate pour l’animal, notamment si la formulation destinée aux humains contient des excipients potentiellement toxiques pour les animaux, les vétérinaires font alors appel à l’expertise du pharmacien pour la préparation et le service d’une préparation magistrale5. Ces cas sont plus rares et nécessitent davantage de recherche de la part du pharmacien pour trouver un endroit où faire fabriquer de telles préparations et quels ingrédients utiliser.

Les problèmes de ruptures d’inventaire touchent également les cliniques vétérinaires, et cela oblige occasionnellement les médecins vétérinaires à se tourner vers les pharmacies afin d’éviter des retards ou des interruptions de traitement1,2

Finalement, l’une des principales raisons évoquées par les patients qui se présentent avec de telles ordonnances en pharmacie est sans aucun doute l’aspect financier. Les médicaments, tout comme les soins vétérinaires, sont dispendieux7,8. Sur Internet ou sur les médias sociaux, plusieurs articles populaires auprès des propriétaires d’animaux domestiques traitent des moyens d’économiser sur les médicaments destinés aux animaux7,8,9,10

L’une des principales astuces est de demander une ordonnance écrite au vétérinaire pour s’approvisionner en pharmacie plutôt que directement à la clinique. Aux États-Unis, dans les hôpitaux vétérinaires, le prix de vente des médicaments est souvent de deux à trois fois le prix d’acquisition, en plus d’y ajouter un honoraire professionnel pour la rédaction de l’ordonnance11. Un problème tel qu’un projet de loi américain a été proposé en 2015, le Fairness to Pet Owners Act, qui vise principalement à aider les propriétaires d’animaux à économiser de l’argent sur les médicaments vétérinaires en leur octroyant le libre choix du lieu d’approvisionnement, notamment en obligeant les vétérinaires à toujours remettre une copie de l’ordonnance avant d’offrir de la servir12

Plusieurs facteurs peuvent influencer le prix de vente des médicaments en clinique vétérinaire. D’abord, ces milieux tiennent des inventaires de médicament plus restreints, ce qui implique un prix unitaire plus élevé. De plus, ces cliniques ne sont pas assujetties aux mêmes règles que les pharmacies communautaires en ce qui concerne le prix de vente des médicaments13,14. Selon l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec (OMVQ), le vétérinaire est libre d’établir ses prix et il n’existe aucune réglementation encadrant ceux-ci. Ce qui explique qu’ils varient grandement d’une clinique à l’autre15

Lorsque les médicaments sont servis en pharmacie, c’est le principe du prix usuel et coutumier, relativement semblable d’une pharmacie à l’autre et qui doit être le même pour tous les patients, qui s’applique. Celui-ci doit être juste et raisonnable, selon le code de déontologie des pharmaciens, et doit être calculé en fonction du prix d’acquisition du médicament, de la composante technique (préparation) et de la composante clinique (surveillance), sans autre charge non justifiée13,16

Les médicaments destinés aux animaux de compagnie ne sont pas couverts par les régimes d’assurance usuels des patients. Ceux-ci doivent donc être payés à 100 % par le

Québec Pharmacie novembre – décembre 2022 19
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propriétaire de l’animal. De plus, en vertu de la loi sur la taxe d’accise canadienne et de la loi sur la taxe de vente du Québec, les médicaments et les fournitures destinés à un usage vétérinaire ne sont pas détaxés. Puisqu’il en est de même au palier provincial, il faudra donc que les deux taxes, soit la TPS et la TVQ, soient appliquées lors de la vente en pharmacie, tout comme en clinique vétérinaire17,18. À noter que lors de la création d’un dossier-patient, lorsque celui-ci est codifié comme étant celui d’un animal, la majorité des logiciels d’officine chargent automatiquement les taxes sur les reçus de médicaments prescrits.

Au sein du code de déontologie des médecins vétérinaires, il est mentionné que « le médecin vétérinaire doit respecter le droit du client de faire exécuter ses ordonnances de médicaments ou de traitements auprès du professionnel de son choix » et doit lui remettre l’ordonnance si le client la demande14. Un propriétaire d’animal peut ainsi demander au vétérinaire de lui rédiger une ordonnance pour aller chercher le médicament prescrit ailleurs, notamment en pharmacie, pour des raisons financières ou simplement par préférence9

Par contre, en pharmacie communautaire, nous n’avons pas communément accès aux médicaments exclusivement homologués pour les animaux, sauf si la pharmacie possède un compte avec le distributeur pancanadien des pratiques vétérinaires (CDMV)19. De plus, en deçà d’un certain nombre de produits sur la commande, le CDMV charge un frais de livraison significatif. Ce qui augmente le coût d’acquisition du médicament et donc le prix à payer par le maître de l’animal.

L’aspect financier ne devrait pas être le seul facteur à prendre en considération puisque la priorité reste, avant tout, le bien-être et la sécurité de l’animal. En effet, le service de médicaments destinés à la clientèle animale comporte son lot de particularités. Il faudra que le pharmacien qui exécute ce type d’ordonnance connaisse les aspects légaux associés à ce type de service ainsi que les limites de son champ d’expertise afin de diriger le patient vers une clinique vétérinaire si nécessaire.

Champs d’expertise et limitations

Les connaissances acquises dans le cadre du Doctorat de premier cycle en pharmacie au Québec sont concentrées exclusivement sur la santé des humains20. En présence d’un autre type de clientèle, comme les animaux domestiques, comment alors procéder à une évaluation complète et reconnaître, par exemple, les signaux d’alarme pouvant dissimuler un problème sous-jacent plus grave ? Une consultation avec un médecin vétérinaire, menant à la rédaction d’une ordonnance, est essentielle pour que le pharmacien puisse assurer un service de qualité répondant à ses obligations professionnelles. En effet, dans sa pratique quotidienne, le pharmacien a l’obligation de procéder à l’évaluation et au suivi du dossier-patient lorsqu’il prodigue des soins pharmaceutiques, et ce, peu importe le type de clientèle4

Les vétérinaires sont les seuls professionnels habilités à examiner, à poser un diagnostic et à prescrire un médicament pour la clientèle animale5. La prudence est de mise puisqu’un pharmacien qui exécute une ordonnance pour un médicament destiné à un animal et qui a été rédigée par un professionnel autre qu’un médecin vétérinaire s’expose à des mesures disciplinaires. En effet, comme il s’agit d’un acte réservé, l’ordonnance n’est pas considérée comme valide5. Il en va de même pour le fait de remettre ou même de conseiller des médicaments en l’absence d’une ordonnance vétérinaire valide puisque cela constituerait une pratique illégale de la médecine vétérinaire21. Il est donc interdit pour un pharmacien de donner un conseil sur un médicament en vente libre pour un animal. De plus, il est important de savoir que, selon le Règlement sur les ordonnances des médecins vétérinaires, le vétérinaire peut faire une ordonnance verbale24. Par contre, il doit tout de même rédiger une ordonnance écrite et la transmettre au pharmacien dans les 48 heures suivantes, en copie papier par l’entremise du propriétaire de l’animal ou par télécopieur24

Dans les activités professionnelles autorisées aux pharmaciens, il est notamment permis de « prolonger une ordonnance émise par tout professionnel habilité à prescrire

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au Canada 22 ». Il est donc théoriquement permis, lorsqu’elle a initialement été émise par un médecin vétérinaire, qu’une ordonnance soit prolongée par un pharmacien lorsqu’elle est échue. Par contre, comme mentionné précédemment, puisque les pharmaciens n’ont pas de formation spécifique au domaine vétérinaire, ils ne peuvent pas pleinement évaluer l’efficacité et l’innocuité de la thérapie médicamenteuse. Puisqu’une telle prolongation engage nécessairement la responsabilité professionnelle du pharmacien, il vaut mieux éviter de poser un tel acte. La prolongation de l’ordonnance devrait être faite seulement en dernier recours et pour la plus courte durée possible. Par exemple, afin d’éviter une interruption de traitement potentiellement dangereuse pour l’animal, lorsqu’il n’est pas possible pour le client de retourner consulter ou que le pharmacien n’est pas capable de joindre le vétérinaire par téléphone. Prendre l’habitude d’aviser les patients lorsque leur ordonnance arrive bientôt à échéance pourrait éviter de telles situations.

Le pharmacien doit donc être en mesure de reconnaître les limites de son champ d’expertise en ce qui concerne la clientèle animale. Le code de déontologie des pharmaciens spécifie, à l’article 39 : « Le pharmacien, doit, dans l’exercice de la pharmacie, tenir compte de ses capacités [et] de ses limites », donc de diriger le client vers le vétérinaire le cas échéant13. L’instauration d’une relation de confiance et de collaboration avec les cliniques vétérinaires avoisinantes est essentielle afin d’assurer une meilleure continuité des soins pour les animaux de compagnie, surtout en contexte de pénurie de médecins vétérinaires.

De plus, une attention particulière est nécessaire puisque plusieurs produits offerts en pharmacie, comme l’ibuprofène, peuvent être toxiques pour les animaux, et que plusieurs médicaments en vente libre nécessitent une ordonnance pour cette clientèle.

Le tableau I présente une liste non exhaustive de produits pharmaceutiques toxiques pour les animaux domestiques couramment rencontrés en pharmacie.

Annexes de médicaments

I MÉDICAMENTS POTENTIELLEMENT TOXIQUES POUR LES ANIMAUX

25,34,43,44

CHIEN CHAT

AINS (ibuprofène, naproxène, etc.)

AINS (ibuprofène, naproxène, etc.)

Benzocaïne/xylocaïne Acétaminophène

Phénobarbital

Doxycycline (à haute dose)

Pseudoéphédrine/phényléphrine Perméthrine

Imidazolines (oxymétazoline, naphazoline) Antiacides (à haute dose)

Au niveau fédéral, il existe deux principales lois encadrant le service des médicaments destinés aux humains ou aux animaux : la Loi sur les aliments et drogues et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances23,24. Au niveau québécois, au sein du Règlement sur les conditions et les modalités de vente des médicaments de la Loi sur la pharmacie, il existe cinq annexes indiquant le statut de chacun des médicaments qui s’y rapportent3 : n I : Médicaments destinés aux humains et vendus sur ordonnance n II : Médicaments destinés aux humains et vendus sous contrôle pharmaceutique n III : Médicaments destinés aux humains et vendus sur surveillance pharmaceutique n IV : Médicaments destinés aux animaux et vendus sur ordonnance n V : Médicaments destinés aux animaux et vendus sous surveillance professionnelle

On y distingue deux annexes spécifiques pour les médicaments destinés aux animaux, soit les annexes IV et V3. Il est impératif de se familiariser avec celles-ci, puisque le contenu de ces annexes est complètement différent des annexes pour les médicaments destinés aux humains. Un même médicament disponible en vente libre pour l’humain peut nécessiter une ordonnance pour l’administration chez l’animal. Vous trouverez différents exemples dans le tableau II

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CAS CLINIQUE 2/3

L’annexe V traite des médicaments destinés aux animaux et vendus sous surveillance professionnelle3. Cette annexe pourrait correspondre, en quelque sorte, aux annexes 2 et 3 que nous connaissons pour les humains, c’est-à-dire les médicaments en vente libre. Elle concerne surtout les produits vendus sans ordonnance directement en clinique vétérinaire. Ainsi, malgré l’existence de cette dernière annexe, une consultation avec un médecin vétérinaire doit toujours être recommandée par le pharmacien pour des questions concernant la santé des animaux de compagnie. Comme mentionné précédemment, il faut en tout temps s’assurer d’avoir une ordonnance valide de la part du vétérinaire avant de servir des médicaments destinés à ce type de clientèle5,21

En plus de cet aspect législatif, l’OPQ mentionne qu’une évaluation complète de l’état de santé du patient par le pharmacien est nécessaire à tout conseil de médicament de vente libre4. Comme l’animal ne peut communiquer verbalement ses symptômes, mais les manifeste plutôt en changeant de comportement, il est impossible pour le pharmacien de détecter de potentiels symptômes d’alarme indiquant une pathologie sous-jacente plus importante. Un examen complet par le médecin vétérinaire est nécessaire afin de bien identifier le problème et d’éviter les complications25,26. Le code de déontologie des pharmaciens invite notamment ses membres à refuser de fournir des services pharmaceutiques si c’est dans l’intérêt du patient13

En fonction de ces différentes considérations, une ordonnance vétérinaire est donc essentielle pour pouvoir servir des médicaments destinés à des animaux en pharmacie, et ce, peu importe l’annexe du Règlement sur les conditions et les modalités de vente des médicaments dans laquelle ils se trouvent.

Comme le produit est destiné au chien de la patiente et non pas pour elle-même, vous devez créer un dossier distinct pour l’animal. Par contre, le diménhydrinate, l’ingrédient actif du Gravol, se trouve dans l’annexe IV du Règlement. Ce produit ne peut donc être vendu que sur présentation d’une ordonnance vétérinaire valide. À la suite d’une discussion ouverte lors de laquelle vous abordez les obligations légales, les limites du champ de pratique du pharmacien ainsi que les risques associés à la médication disponible en pharmacie pour les animaux, la cliente accepte d’aller consulter à la clinique vétérinaire. Elle revient plus tard avec une ordonnance vétérinaire indiquant « Gravol co 50 mg/co #10 1 co PO 30 à 60 min avant le départ puis q 8 hres PRN NR ». Elle demande à avoir le produit en formulation liquide pour en faciliter l’administration à l’animal.

La transparence avec les maîtres d’animaux domestiques, qui sont souvent eux-mêmes des patients de la pharmacie, est primordiale afin qu’ils comprennent les limites du champ de pratique des pharmaciens et que le lien de confiance avec eux reste solide. Il y a un travail de sensibilisation et d’éducation à faire auprès de la clientèle afin d’éviter des frustrations. Plutôt que de simplement refuser le service, il faut ouvrir avec eux la discussion sur les bénéfices et les risques associés aux médicaments offerts en pharmacie. Ceux-ci ne sont pas les mêmes pour l’animal domestique que pour les humains et n’ont pas été étudiés chez la clientèle animale. En mettant l’accent sur l’obligation légale d’avoir une ordonnance pour servir des médicaments destinés aux animaux, il est possible d’expliquer aux clients que la formation et les connaissances des pharmaciens sont axées sur la pharmacothérapie destinée aux humains.

Finalement, il est important de leur expliquer que les signes exprimés par l’animal, qui pourraient être indicateurs d’un problème plus important, sont impossibles à interpréter par un pharmacien et que recommander le mauvais produit pourrait empirer le problème.

Conformité des ordonnances vétérinaires

Tout comme pour les ordonnances pour la clientèle humaine, il existe des exigences de rédaction pour les ordonnances vétérinaires. Celles-ci, dictées au sein du Règlement sur les ordonnances des médecins vétérinaires, doivent être respectées afin que les ordonnances soient considérées comme étant conformes27. S’il manque l’une ou l’autre des informations nécessaires sur l’ordonnance, le pharmacien doit contacter le vétérinaire prescripteur afin de la faire corriger avant de l’exécuter.

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Plusieurs exigences de base sont semblables aux ordonnances humaines : nom du prescripteur, numéro de permis, signature, date. Les informations nécessaires concernant la médication sont également similaires, soit le nom du médicament, la forme pharmaceutique, la concentration, la voie d’administration, la quantité prescrite ainsi que la posologie27. Par contre, étant donné que le patient est un animal, des exigences supplémentaires s’y ajoutent. On doit retrouver, directement sur l’ordonnance, les informations sur le propriétaire de l’animal : le nom, l’adresse et le numéro de téléphone; et celles spécifiques à l’animal : sa race, son sexe, son âge ainsi que son poids27

Finalement, le nombre de renouvellements et la durée de validité de l’ordonnance vétérinaire doivent être limités à un maximum de 1 an5. En plus de ces exigences, s’il s’agit d’un troupeau d’élevage, il faut y inscrire l’espèce, le nombre de sujets et le site où les animaux sont localisés27. Étant donné que ce genre de service est plus rare et qu’il nécessite une collaboration accrue avec l’équipe vétérinaire, ces aspects ne seront pas traités ici.

À noter : certaines abréviations utilisées par les vétérinaires diffèrent de celles habituellement rencontrées en pharmacie. Les vétérinaires inscrivent parfois « SID » pour indiquer une prise 1 fois par jour, plutôt que « DIE »25,29 Ils inscrivent aussi parfois « SQ » pour une administration sous-cutanée plutôt que « SC ». Les suspensions et les formulations liquides pour la clientèle vétérinaire sont souvent prescrites en mg/mL plutôt qu’en mg/5 mL25. Les pharmaciens exécutant des ordonnances vétérinaires doivent donc porter une attention supplémentaire à celles-ci puisqu’elles peuvent différer en plusieurs points de ce qui est rencontré dans la pratique courante en pharmacie.

Service pharmaceutique adapté

II MÉDICAMENTS VENDUS SUR ORDONNANCE POUR LES ANIMAUX (ANNEXE IV) SE TROUVANT EN VENTE LIBRE DANS LES PHARMACIES

Bacitracine Magnésium

Bleu de méthylène Mélatonine Charbon activé Minoxidil Clotrimazole Naloxone

Dextrométhorphane

Naproxène sodique

Diclofénac Nicotine Diménhydrinate Nitroglycérine Diphenhydramine Oméprazole

Docusate de sodium Peroxyde de benzoyle Épinéphrine Polymyxine

Selon le code de déontologie des pharmaciens, le pharmacien qui prodigue des services pharmaceutiques à un patient est responsable d’assurer le bon usage et la sécurité de la thérapie médicamenteuse13. Puisqu’il n’y a pas de distinction concernant l’espèce, le pharmacien qui exécute une ordonnance vétérinaire a les mêmes responsabilités professionnelles que lorsqu’il s’agit d’un patient humain. Il doit donc être en mesure de valider et d’analyser l’ordonnance, de transmettre les informations importantes, puis d’assurer le suivi de la thérapie et, finalement, de consigner correctement les informations au dossier-patient4. De la création du dossier jusqu’au conseil au maître de l’animal, il faut respecter les standards de pratique de l’OPQ, assurer une prestation de soins pharmaceutiques de qualité et adapter celle-ci à la clientèle animale.

Famotidine Potassium Glycopyrrolate Pyrantel Ibuprofène Ranitidine Insuline Scopolamine Lopéramide Urée

3,28

Ouverture de dossier et collecte de données

En premier lieu, le pharmacien doit créer un dossier distinct pour l’animal lui-même. Comme mentionné précédemment, les médicaments prescrits pour les animaux ne sont pas couverts par les régimes d’assurance usuels des patients. La consignation d’une ordonnance vétérinaire dans le dossier du propriétaire de l’animal et la réclamation à >

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ses assurances serait une fraude et le pharmacien en serait reconnu responsable. Il existe de plus en plus d’assurances pour les frais encourus pour les soins de santé des animaux domestiques, mais ce sont les propriétaires qui doivent faire les réclamations manuellement30

Pour la création du dossier-patient de l’animal, l’OPQ mentionne de saisir comme prénom le nom de l’animal, et de mettre le nom de famille du propriétaire de l’animal1 Il importe également de documenter au dossier l’âge, le sexe, le poids et la race de l’animal1,2

Comme pour le dossier-patient d’un humain, la documentation des allergies, des intolérances et des échecs médicamenteux antérieurs font partie intégrante d’une collecte de données complète4. Étant donné qu’il est possible que l’animal reçoive de la médication du vétérinaire lui-même et qu’il n’existe pas de DSQ pour les animaux, il faudra valider verbalement auprès du propriétaire s’il y a prise d’autres médicaments.

En cas de doute, un appel à la clinique vétérinaire pour faire une vérification pourrait être indiqué. Une vérification supplémentaire quant au désir de faire reproduire l’animal ou non est également une bonne information à documenter au dossier afin d’éviter la prise de médicaments antinéoplasiques ou associés à une augmentation du risque de malformation congénitale.

Tout comme pour les ordonnances usuelles servies en pharmacie, la vérification de l’intention thérapeutique auprès du propriétaire doit être consignée au dossier puisqu’elle permettra de procéder à une vérification optimale de l’ordonnance. S’ensuivront la validation de l’ordonnance par le pharmacien ainsi que l’analyse du dossier, qui doivent être basées sur des informations en provenance de ressources adaptées4

Consignation de l’information et conseil Pour la consignation de l’ordonnance au dossier-patient, dans ce cas-ci le dossier de l’animal, les règles sont les mêmes. Pour les étiquettes des médicaments, le Règlement sur l’étiquetage et l’emballage des médicaments destinés aux animaux de la Loi sur les médecins vétérinaires spécifie les informations qui doivent être indiquées31 : n Nom, adresse et numéro de téléphone de l’établissement (c’est-à-dire informations de la pharmacie) n Nom du client n Identification de l’animal n Nom du prescripteur n Nom générique et commercial du médicament n Quantité n Posologie n Renseignements supplémentaires si applicables : n Concentration n Mode d’administration n Mode particulier de conservation n Précautions particulières n Date de péremption n Date d’exécution n Nombre de renouvellements

restants

Les informations qui doivent y figurer sont donc sensiblement les mêmes que les renseignements exigés pour les étiquettes de médicaments destinés aux humains, tel que spécifié par la Loi sur la pharmacie32 . Certaines exigences supplémentaires peuvent s’appliquer pour le service destiné à un troupeau ou dans le cas d’élevage destiné à la consommation humaine, soit l’identification ou le signalement du groupe d’animaux

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ainsi que le délai d’attente pour la consommation humaine du produit animal31 De plus, s’il s’agit de préparations magistrales, des renseignements additionnels sont requis5 : n Étiquetage identifiant clairement que c’est une préparation magistrale n Liste et noms génériques de tous les ingrédients actifs n Date de fabrication n Date de péremption, selon les données de stabilité n Posologie et délais d’attente, s’il y a lieu n Nom de la personne/pharmacie préparatrice n Consignes d’entreposage

Comme requis par les Standards de pratique de l’OPQ, il faut par la suite transmettre l’information pertinente au bon usage du médicament pour le patient, procéder au conseil, puis documenter l’ensemble des interventions au dossier-patient4. Le conseil doit être adapté puisque l’usager ne sera pas la personne à qui le pharmacien s’adresse, mais plutôt son animal de compagnie. Les informations sur l’indication, la façon de prendre le médicament et les effets indésirables probables doivent être abordées. Il faudra se référer à des ressources spécialisées en pharmacologie vétérinaire puisque les effets attendus, tout comme les effets indésirables, ne sont pas les mêmes que pour les humains25

D’ailleurs, il faudra éviter de remettre au maître de l’animal le feuillet-conseil associé avec le médicament du logiciel de pharmacie puisque les informations qui y sont inscrites ne concernent que le traitement chez l’humain. Des feuillets-conseils spécifiques à la pharmacothérapie pour les animaux peuvent être remis au propriétaire. Ils sont notamment disponibles, en anglais seulement, à partir du Plumbs et du Papich handbook of veterinary drugs38,48

Finalement, comme le maître devra administrer le médicament à l’animal, aborder différentes techniques d’administration avec lui peut aider à favoriser une meilleure observance.

Administration des médicaments aux animaux

L’une des barrières principales à l’observance du traitement pour la clientèle vétérinaire est l’administration du médicament à l’animal. Il est fréquent que les propriétaires d’animaux domestiques rapportent des difficultés à faire avaler les médicaments à leurs compagnons à poil. Il existe des techniques pouvant faciliter l’administration de médicaments solides per os aux chiens et aux chats.

La plus connue est celle de dissimuler le médicament à l’intérieur d’un morceau de nourriture ou d’une gâterie. L’utilisation d’un aliment très apprécié de l’animal et donné en de plus rares occasions sera davantage perçue comme une récompense par l’animal; le médicament sera donc plus facilement accepté35. Il faudra recommander au propriétaire de tester cette technique sans médicament dans un premier temps afin de s’assurer que l’animal avale la bouchée sans recracher. De plus, si l’animal a tendance à mastiquer, le médicament risque de donner un mauvais goût à l’aliment et il risque de ne plus en vouloir à l’avenir. Comme les chats ont davantage tendance à mastiquer les aliments, la technique de dissimuler le médicament dans de la nourriture risque de moins bien fonctionner puisque le médicament sera plus souvent recraché36

Une autre technique consiste à déposer le médicament manuellement directement dans le fond de la gueule de l’animal. Il faut d’abord se positionner à côté de l’animal et tenir la mâchoire du haut avec la main non dominante en plaçant le pouce et l’index de chaque côté puis tirer la tête de l’animal vers l’arrière. Pour le chien, il faudra ouvrir sa bouche, plier délicatement la lèvre supérieure par-dessus les dents, puis maintenir celle-ci en plaçant le pouce dans le palais, afin de réduire le risque de morsure37

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CAS CLINIQUE 3/3

Avec les chats, cette technique diffère. Il faut seulement lever la tête du chat et la mandibule s’ouvre automatiquement 36. Ensuite, en tenant le médicament entre l’index et le pouce de la main dominante, maintenir la bouche ouverte avec le majeur placé au-dessus des petites incisives à l’avant. Finalement, déposer le comprimé ou la capsule le plus loin possible sur la langue, puis fermer immédiatement la bouche et souffler sur le museau pour l’inciter à avaler36,37. Pour faciliter la déglutition, massez le cou de l’animal pendant quelques secondes et, une fois le médicament avalé, récompenser l’animal. Il importe de toujours rester calme lors de l’administration de médicament pour éviter un stress supplémentaire chez l’animal et une potentielle morsure.

Il existe aussi, sur le marché, des produits spécialement conçus pour faciliter l’administration des médicaments solides per os. Par exemple, on trouve des gâteries sous forme de pochettes communément appelées pill pockets. Elles sont faites d’un aliment dont le goût plaît à l’animal et dont la texture molle permet de dissimuler un comprimé ou une capsule à l’intérieur33. Les essayer dans un premier temps sans médicament et choisir la saveur la plus appréciée de l’animal pourrait augmenter les chances de succès.

Il existe aussi des dispositifs sous forme de seringues orales allongées, dont l’embout est en caoutchouc mou et dans lequel le comprimé peut s’insérer. Appelés « lancepilules » ou pill popper34 et devant être insérés dans la gueule de l’animal, ils permettent de positionner le médicament le plus loin possible dans la cavité buccale pour éviter qu’il soit recraché, tout en diminuant le risque de morsure. Plusieurs vidéos en démontrant l’utilisation sont accessibles sur Internet.

Après avoir consigné les informations importantes au dossier (sexe, âge, race, poids, allergies et indication du traitement), votre technicien vous remet le panier avec une bouteille de Gravol liquide pour enfants. Par contre, comme il est indiqué sur l’ordonnance de servir en comprimés, il ne vous est pas permis de substituer la formulation. De plus, dans la liste des ingrédients de la formulation liquide, vous remarquez du sorbitol et du polysorbate 80, qui sont tous deux potentiellement toxiques pour les chiens. Après vérification et validation de l’ordonnance, il vous faudra servir le produit tel que prescrit sur l’ordonnance, soit le Gravol original en comprimés, puisque la substitution générique est également proscrite.

Si l’administration des formes solides per os s’avère trop ardue, il faudra encourager le propriétaire de l’animal à consulter son vétérinaire pour voir si des formulations liquides, plus faciles à administrer, sont disponibles ou peuvent être fabriquées. En l’absence d’une formulation ou d’une préparation magistrale destinées aux animaux, les pharmaciens doivent éviter de substituer la forme pharmaceutique sans la consultation d’un médecin vétérinaire.

Particularités chez les animaux Substitutions et formulations disponibles D’autres considérations spéciales existent en ce qui concerne la prestation de soins pharmaceutiques pour la clientèle animale. D’abord, la substitution des médicaments prescrits n’est pas permise pour les ordonnances vétérinaires25,38. Le fabricant d’un médicament générique doit démontrer la bioéquivalence de son produit au produit novateur, notamment la similitude de l’aire sous la courbe et de la concentration maximale39. Par contre, cela doit être démontré chez l’espèce cible et la bioéquivalence des génériques disponibles en pharmacie a été étudiée chez les humains et non pas chez les animaux 39,40. Il importe donc, si un pharmacien envisage de procéder à une substitution, de valider celle-ci avec le vétérinaire prescripteur et d’éviter de substituer en l’absence de l’autorisation de ce dernier25,40

Il faut aussi signaler que lorsqu’une compagnie spécifique a été indiquée sur l’ordonnance animale, celle-ci doit être respectée41. Par exemple, si le vétérinaire indique « pms-fluoxetine 10mg », il faut servir celle-ci spécifiquement puisque les excipients peuvent être différents d’une compagnie générique à l’autre. En l’absence d’une compagnie spécifique sur l’ordonnance vétérinaire et lorsque seul le nom générique du médicament est indiqué, le pharmacien peut alors servir la compagnie de son choix41

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Il faut porter une attention supplémentaire aux formulations liquides, puisqu’elles sont plus à risque de contenir des ingrédients potentiellement toxiques pour les animaux 38,42 . Ceux-ci peuvent causer des dommages irréversibles lorsqu’ingérés, même en très petites quantités. Tout médicament, excipient, arôme, conservateur ou colorant doit être soigneusement évalué avant d’être considéré comme sécuritaire pour les animaux42 . Le tableau III présente une liste de certains excipients couramment rencontrés en pharmacie communautaire et qui sont à éviter chez les animaux domestiques.

Il peut également arriver qu’une même molécule soit disponible sous deux noms originaux distincts, soit une formulation destinée à l’usage chez l’humain, et l’autre chez l’animal. Par exemple, le clonazépam, que l’on connaît en pharmacie sous le nom original de Rivotril, est également offert en formulation homologuée spécifiquement pour l’usage chez les animaux sous le nom de Klonopin38. Le pharmacien, tout comme le médecin vétérinaire, doit toujours privilégier, lorsqu’elles sont disponibles, les formulations homologuées pour les animaux 5. Comme celles-ci ont été spécifiquement étudiées pour cette clientèle, les risques associés à leur utilisation sont moindres. Lorsque la formulation homologuée pour les animaux est non disponible, il est alors acceptable de se tourner vers la formulation homologuée pour l’humain à partir du principe de l’UMDDE, si le vétérinaire le juge adéquat et rédige une ordonnance5,6

III LISTE NON EXHAUSTIVE DES EXCIPIENTS À ÉVITER POUR LA CLIENTÈLE VÉTÉRINAIRE

38,42,43

EXCIPIENT

Xylitol/sorbitol

Polysorbate 80

CATÉGORIE ANIMAL AFFECTÉ

Édulcorants artificiels Chien

Surfactants et préservatifs Chien

Crémophor Surfactants et préservatifs Chien

Alcool/éthanol et dérivés Solvants/stabilisateurs Chien/chat

Particularités pharmacocinétiques

Sur le plan pharmacocinétique, il existe de grosses différences entre les animaux et les humains. En effet, un même médicament peut être métabolisé complètement différemment d’une espèce à l’autre, nécessitant donc des ajustements de doses à administrer, selon la clientèle à traiter. Il est important de reconnaître l’existence de telles variations et d’utiliser les ressources appropriées afin de s’assurer que la dose soit adéquate pour l’animal. Les chiens disposent d’un ratio plus élevé du volume sanguin par rapport à leur masse corporelle, ayant environ 30 % plus de sang par kilogramme que les humains25. De plus, l’élimination rénale est plus rapide chez les chiens, qui ont un débit de filtration glomérulaire (DFGe) plus élevé25,38. Ces deux paramètres peuvent ainsi faire varier significativement les demi-vies des médicaments et faire diminuer leurs concentrations sanguines. Il n’est donc pas surprenant de rencontrer des doses à administrer plus hautes et une fréquence d’administration plus rapprochée pour certains médicaments chez cet animal que chez l’humain. Par exemple, les doses de Lévothyroxine pour un chien souffrant d’hypothyroïdie sont significativement plus importantes, allant parfois jusqu’à 800 microgrammes par dose, parfois même administrées deux fois par jour25,38

En ce qui concerne les chats, leur métabolisme est aussi bien différent de celui de l’humain. Plusieurs voies métaboliques, surtout celle du foie, comme la glucuronoconju gaison, l’hydroxylation et la déméthylation 25,38, sont inexistantes chez les félins. Il faudra

TOXICITÉ

Hypoglycémie importante, nécrose hépatique grave

Libération d’histamines, réactions anaphylactiques

Libération d’histamines, réactions anaphylactiques

Insuffisance hépatique grave

Québec Pharmacie novembre – décembre 2022 27
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IV LISTE DE RESSOURCES DISPONIBLES SUR LES MÉDICAMENTS DESTINÉS AUX

RESSOURCE ACCESSIBILITÉ CARACTÉRISTIQUES

Plumb’s38

En ligne Abonnement (gratuit via Université Laval)

Merck Veterinary Manual44 En ligne Gratuit

Canadian-Wide Distributor for Veterinary Practices (CDMV)16

En ligne Abonnement requis (ouvrir un compte)

BSAVA Small Animal Formulatory: Canine and Feline45

Guide d’utilisation –100+ médicaments pour usage vétérinaires disponibles en officine46

Papich handbook of veterinary drugs (Science Direct)47

Base de données sur les produits pharmaceutiques de Santé Canada49

Saunders Handbook of Veterinary Drugs29

Veterinary Pharmacology & Therapeutics50

Guide du Conseil Vétérinaire à l’Officine51

ANIMAUX38,42,43

n Base de données américaine en anglais n Semblable à UpToDate, mais pour la médecine vétérinaire n Monographies complètes n Recherche d’information facile n Régulièrement mis à jour n Fiches d’informations à remettre aux patients disponibles n Très complet – référence de choix pour les vétérinaires

n Ressource américaine en anglais n Information regroupée par pathologie n Recherche plus complexe d’information spécifique aux médicaments n Information très sommaire sur les médicaments se concentrant principalement sur les dosages à utiliser

n Ressource canadienne disponible en anglais et en français n Site du distributeur pancanadien de produits et services vétérinaires (gestion, marketing, plateforme virtuelle, etc.) n Surtout utilisé par les vétérinaires pour commander des médicaments et de la nourriture, disponible pour les pharmaciens qui désirent y avoir accès

En ligne ou papier Abonnement ou achat n Référence britannique en anglais n Chats et chiens seulement n Monographies succinctes en ordre alphabétique de noms génériques n Recherche d’information facile n Attention aux molécules européennes

Papier Achat

n Référence québécoise en français n Chats et chiens seulement n Monographies succinctes en ordre alphabétique de noms génériques n Destiné aux pharmaciens communautaires n Seulement les molécules les plus fréquemment rencontrées en pharmacie

Papier ou en ligne Achat ou abonnement (gratuit via Université Laval)

En ligne Gratuit

n Référence américaine en anglais n Monographies en ordre alphabétique de noms génériques n Information complète sur les médicaments n 150 feuillets-conseils sur des médicaments disponibles48 pour remettre aux propriétaires d’animaux domestiques

n Contient de l’information sur l’utilisation des médicaments chez l’être humain et les animaux n Mise à jour régulièrement n Contient les étiquettes des médicaments destinés aux animaux n Pas d’information détaillée sur les médicaments

En ligne ou papier Gratuit (3e édition) ou abonnement

n Référence américaine en anglais n Monographies succinctes en ordre alphabétique de noms génériques n Information sommaire sur les médicaments n Attention : la version gratuite date de 2011

En ligne ou papier Gratuit (10e édition) ou achat

Papier Achat

n Référence américaine en anglais n Informations regroupées par famille de médicaments, selon système touché n Plus difficile de trouver l’information pour une molécule spécifique n Axé sur la pathophysiologie et la pharmacologie, moins pertinent pour les pharmaciens

n Référence française n Introduction aux pathologies majeures des animaux de compagnie n Attention aux molécules européennes n Accent sur les conseils destinés à la médication vétérinaire en pharmacie

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donc faire preuve de vigilance pour les médicaments métabolisés par le foie, comme l’acétaminophène qui est contre-indiqué pour les chats.

En effet, en l’absence de métabolisation par glucuronoconjugaison, il y a formation rapide de métabolites toxiques38,44. Une dose aussi faible que 40 mg pourrait ainsi être fatale. D’autres variations dans le foie existent chez les chats. Ils ne sont notamment pas capables de transformer la prednisone en prednisolone comme le ferait un humain25,38. Il faudra donc la leur administrer directement afin d’obtenir l’effet thérapeutique souhaité.

Ressources spécifiques à la pharmacothérapie animale

Comme mentionné précédemment, les animaux diffèrent des humains sur de nombreux aspects, et les effets d’un médicament donné peuvent être complètement différents sur eux. Il est donc important d’utiliser des ressources adaptées afin d’assurer l’efficacité et la sécurité du service pharmaceutique pour la clientèle animale.

Comme les ressources quotidiennement utilisées en pharmacie (Vigilance, MicroMedex, UpToDate, etc.) traitent des médicaments chez l’humain seulement, elles ne peuvent être utilisées pour ce type de patient. De plus, les connaissances acquises sur les médicaments destinés à l’usage humain ne doivent pas être extrapolées aux animaux de compagnie.

Le tableau IV présente différentes ressources accessibles aux pharmaciens pour rechercher l’information sur la pharmacothérapie animale afin de valider les ordonnances vétérinaires.

Conclusion

Le service à la clientèle vétérinaire en pharmacie est complexe et nécessite une grande prudence de la part des pharmaciens. Nombreux sont les propriétaires d’animaux à se présenter en pharmacie pour obtenir des médicaments pour leurs compagnons à poils, et ce, avec ou sans ordonnance. Le pharmacien devrait toujours s’assurer d’avoir une ordonnance vétérinaire valide avant d’offrir un service pharmaceutique pour un animal.

CONSEILS AU MAÎTRE DE CHIEN SUR LE DIMÉNHYDRINATE

n Ce médicament est indiqué pour la prévention et le traitement du mal des transports pour votre chien.

n Il faudra lui administrer environ 30 à 60 minutes avant l’heure de départ prévue. Il commencera à faire effet 1 à 2 heures après son administration. Vous pourrez répéter l’administration tous les 8 heures au besoin, si retour de symptômes.

n La technique la plus courante pour faciliter l’administration d’un médicament à un chien consiste à dissimuler le comprimé dans un aliment qu’il aime beaucoup et qu’il reçoit occasionnellement seulement. Testez d’abord cette technique sans médicament pour vous assurer que votre chien avale la bouchée sans recracher ni mâcher l’aliment. Vous pouvez également utiliser des pill pockets, offertes en animalerie.

n Il est aussi possible de déposer manuellement le médicament au fond de la gueule de votre animal, mais cette technique est plus risquée et demande davantage d’habileté de votre part. Vous trouverez différents tutoriels à ce sujet sur Internet.

n Il est important de toujours rester calme lorsque vous administrez un médicament à un animal pour éviter de lui causer un stress supplémentaire.

n L’effet indésirable principal de ce médicament est la somnolence, mais il est possible que votre animal développe une tolérance à cet effet avec le temps. Il se peut également que votre chien ait la bouche plus sèche. Assurez-vous d’avoir un bol et de l’eau pour pouvoir lui en donner durant le trajet.

n Si votre animal présente des effets plus importants ou qui durent plus de 24 heures, contactez un vétérinaire.

n Gardez ce médicament dans un endroit sec, à température pièce, à l’abri de l’animal pour éviter une ingestion accidentelle. Si un tel cas se présente et que vous soupçonnez qu’il a consommé une dose plus grande que celle prescrite, contactez rapidement un vétérinaire.

Il est important de reconnaître notre champ d’expertise et les aspects légaux associés au service de ce type de clientèle, puisque la responsabilité professionnelle du pharmacien est engagée. Une sensibilisation de la population à ces aspects est nécessaire afin d’éviter des frustrations auprès de la clientèle. Le service d’une ordonnance vétérinaire nécessite également une adaptation de chacune des étapes de la prestation de soins pharmaceutiques, de la collecte de données jusqu’au suivi.

Finalement, le recours à des ressources spécifiques à la pharmacothérapie chez les animaux est essentiel puisque le métabolisme des médicaments et leurs effets sont différents d’une espèce à l’autre. Il n’est donc pas possible de se fier aux ressources habituellement utilisées en pharmacie puisque celles-ci traitent exclusivement de la pharmacothérapie humaine. n

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Les références en gras indiquent au lecteur les références principales de l’article, telles que choisies par les auteurs.

Références

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6. Utilisation de médicaments en dérogation des directives de l’étiquette (UMDDE) [En ligne]. Santé Canda. [Cité le 13 août 2022]. Disponible : www.canada.ca/fr/sante-canada/services/medicaments-produits-sante/medicamentsveterinaires/utilisation-medicaments-derogation-directives-etiquette.html

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19. Canadian-wide Distributor for Veterinary Practices - CMDV. [En ligne] Disponible : www.cdmv.com/en/

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30 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie

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27. Règlement sur les ordonnances des médecins vétérinaires - Loi sur les médecins vétérinaires. [En ligne]. LégisQuébec [cité le 14 août 2022]. Disponible : www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/ rc/M-8,20r.%2014%20/#:~:text=Le%20m%C3%A9decin%20v%C3%A9t%C3%A9rinaire%2C%20qui%20 prescrit%20un%20m%C3%A9dicament%20et%20qui%20ex%C3%A9cute,il%20y%20a%20lieu%2C%20l

28. Base de produit MVL. [En ligne]. Ordre des pharmaciens du Québec. [Cité le 14 août 2022] Disponible : http://prod.opq.org/mvl/ProduitsView.aspx

29. Papich, M. G. Saunders Handbook of Veterinary Drugs - Elsevier eBook on VitalSource, 3rd Edition (2011), 896 pages.

30. Si vous devez faire une demande d’indemnité. [En ligne]. Petline Insurance. [Cité le 14 août 2022]. Disponible : www.petinsurancehbc.com/fr/howtoclaim.aspx

31. Règlement sur l’étiquetage et l’emballage des médicaments destinés aux animaux. [En ligne]. LégisQuébec [cité le 14 août 2022]. Disponible : www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/rc/M-8,%20r.%2011%20/

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33. Greenies Pill Pockets pour chats. [En ligne]. MonVet. [cité le 14 août 2022]. Disponible : https://monvet.com/fr/produits/66/greenies-pill-pockets-pour-chats-

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35. Frankel G, Kusno A, Louizos C. Five things every community pharmacist should know when dispensing for 4-legged patients. Can Pharm J (Ott). 2016 Mar;149(2):99-106. doi: 10.1177/1715163516628543. Epub 2016 Feb 5. Disponible : www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4813516/pdf/10.1177_1715163516628543.pdf

36. How do you give oral medications to a cat ? [En ligne]. Washington State University. [cité le 15 août 2022]. Disponible : https://hospital.vetmed.wsu.edu/2021/11/02/how-do-you-give-oral-medications-to-a-cat/

37. Giving oral medications to your dog. [En ligne]. Washington State University. [cité le 15 août 2022]. Disponible : https://hospital.vetmed.wsu.edu/2022/01/12/giving-oral-medications-to-your-dog/

38. Plumb’s Veterinary Drugs [En ligne]. [Cité le 15 août 2022]. Disponible : www.plumbsveterinarydrugs.com

39. Accès aux médicaments génériques au Canada. [En ligne]. Gouvernement du Canada. [Cité le 15 août 2022]. Disponible : www.canada.ca/fr/sante-canada/services/medicaments-produits-sante/medicaments/feuilletsinformation/acces-aux-medicaments-generiques.html

40. Veterinarius Vol 29 No 5, Décembre 2013. P. 48-49. Disponible : www.omvq.qc.ca/DATA/DOCUMENT/66_ fr~v~decembre-2013-vol-29-no5.pdf

41. FDA Approved Veterinary Medications. [En ligne]. Compassionate Care Veterinary Hospital. [cité le 16 août 2022]. Disponible : www.compassionatecareveterinaryhospital.com/pharmacy/prescriptioninformation/fda-animal-drugs-versus-human-generics/

42. Davidson, G. Veterinary Compounding: Regulation, Challenges, and Resources. Pharmaceutics, Janvier 2017, 9(1), 5; https://doi.org/10.3390/pharmaceutics9010005. Disponible : www.mdpi.com/1999-4923/9/1/5/htm

43. Gwaltney-Brant, S. M. (2012) Small animal toxicology essentials. Edited by R. H. Poppenga. Ames, IA: Wiley. 714 pages. Disponible : https://onlinelibrary.wiley.com/doi/book/10.1002/9781118785591

44. Merck Veterinary Manual. [En ligne] [Cité le 16 août 2022]. Disponible : https://www.merckvetmanual.com/

45. Harding, R. (2004) Bsava Small Animal Formulary Part A : Canine and Feline. Quedgeley, Gloucestershire, British Small Animal Veterinary Association, 10 th Ed. Disponible : www.bsavalibrary.com/content/formulary/canine-and-feline

46. Dupuis-Brousseau, Gomes et Thériault-Bérubé, Guide d’utilisation - 100+ médicaments pour usage vétérinaires disponibles en officine, Montréal (2021), 119 pages

47. Papich, M. G. (2021) Papich handbook of veterinary drugs. Fifth edn. St. Louis, Missouri: Elsevier. Disponible : www.sciencedirect-com.acces.bibl.ulaval.ca/book/9780323709576/papich-handbook-of-veterinary-drugs

48. Papich, M.G. (2021) Client handouts. [En ligne] Papich: Saunders Handbook of VETERINARY DRUGS: Small and Large Animal. [Cité le 17 août 2022] Disponible : www.papichdrugformulary.com/index.php

49. Base de données sur les produits pharmaceutiques : Accéder à la base de données. [En ligne] Santé Canada. [Cité le 17 août 2022] Disponible : www.canada.ca/fr/sante-canada/services/medicaments-produits-sante/medicaments/ base-donnees-produits-pharmaceutiques.html

50. Riviere, J.E. Papich, M.G. (2018) Veterinary Pharmacology and Therapeutics. 10th edition. New Jersey. Wiley. Disponible : www.vet-ebooks.com/veterinary-pharmacology-and-therapeutics-10th-edition/

51. Almosni-Lesueur, F. Guide du conseil vétérinaire à l’officine. Éditions MED’COM, France (2013), 540 pages.

52. Lapierre, M. L’usage vétérinaire des médicaments - un aperçu de ce que le pharmacien doit savoir dans sa pratique quotidienne. Capsule FC. [En ligne] L’Actualité pharmaceutique. Novembre 2014. Page 25 à 29. Disponible : https://assets1.professionsante.ca/files/2016/06/LAP_FC_20141216.pdf

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Québec Pharmacie novembre –
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QUESTIONS DE FORMATION CONTINUE (QUESTIONS

4 À 10)

Le casse-tête des ordonnances vétérinaires en pharmacie

4. Les médecins vétérinaires ont le droit d’exiger que la médication prescrite à un animal soit distribuée par la clinique vétérinaire.

n Vrai n Faux

5. Dans le cadre de ses activités professionnelles, le pharmacien devrait éviter de prolonger ou d’ajuster une ordonnance vétérinaire de manière autonome en vertu de la Loi 31, et plutôt s’adresser au vétérinaire. n Vrai n Faux

6. Parmi les médicaments suivants, lequel ne nécessite pas d’ordonnance de la part d’un médecin vétérinaire pour être servi pour un animal ?

n Diménhydrinate n Lopéramide n Tramadol n Acide acétylsalicylique n Aucune de ces réponses

7. Afin qu’une ordonnance vétérinaire soit considérée comme étant conforme, il faut que les informations du propriétaire de l’animal y soient également indiquées. n Vrai n Faux

8. Vous recevez une ordonnance vétérinaire d’insuline Lantus pour un chat. Votre technicienne constate que vous n’avez que le biosimilaire, Basaglar, dans le réfrigérateur du laboratoire et que le Lantus est en rupture de stock. Quelle conduite allez-vous tenir ?

n Substituer le Lantus par le Basaglar et servir ce produit.

n Contacter le vétérinaire prescripteur.

n Attendre le retour du Lantus et laisser l’ordonnance en attente au dossier.

9. Vous recevez une ordonnance vétérinaire de diphénhydramine 25 mg pour un chien, sans précision sur la formulation à servir. Votre technicienne fait la saisie dans le dossier du chien et choisit la diphénhydramine en suspension liquide. Durant la vérification de l’ordonnance, vous remarquez sur la bouteille la liste des ingrédients suivants : chlorhydrate de diphénhydramine, acide citrique, arômes, benzoate de sodium, carboxyméthylcellulose sodique, citrate de sodium, eau, glycérine, saccharine sodique et sorbitol. Est-ce que vous servez ce produit ? n Oui n Non

10. Vous recevez une ordonnance de métronidazole 250 mg BID pour 10 jours pour un chien. Comme vous n’avez jamais exécuté d’ordonnance vétérinaire en pharmacie, vous êtes un peu perplexe. Vous considérez la dose prescrite adéquate puisqu’il s’agit de la dose usuellement rencontrée en pharmacie et vous utilisez l’information disponible sur Vigilance pour donner le conseil sur les effets indésirables au maître de l’animal. Laquelle des affirmations suivantes est vraie ?

n Le vétérinaire est responsable à 100 % de l’ordonnance. S’il y a un problème, c’est lui qui sera considéré comme seul responsable.

n En l’absence de ressources spécialisées en pharmacothérapie vétérinaire, il est possible d’extrapoler à partir des informations des médicaments et de leurs effets chez les humains.

n Le pharmacien engage sa responsabilité professionnelle lorsqu’il exécute une ordonnance pour un patient animal, au même titre que s’il s’agissait d’un patient humain.

32 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie
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RESPONSABLE DE CETTE CHRONIQUE

Mathieu R. Tremblay, Pharm. D., Ph. D.

Le lemborexant (DayvigoMD)

Objectifs d’apprentissage

1. Comprendre le mécanisme d’action du lemborexant, sa posologie et son utilisation dans le traitement de l’insomnie chronique.

2. Évaluer l’efficacité du lemborexant en comparaison avec les autres thérapies utilisées dans le traitement de l’insomnie chronique.

3. Informer les patients sur sa bonne utilisation, ses effets indésirables et les éléments nécessaires pour un suivi adéquat et efficace.

Introduction

L’insomnie chronique se définit comme un trouble du sommeil caractérisé par une difficulté à s’endormir ou à rester endormi, au moins trois fois par semaine et pendant au moins trois mois1. Cette condition est débilitante chez les patients puisqu’elle affecte plusieurs sphères des activités quotidiennes (p. ex. : activités domestiques, productivité au travail, niveau d’énergie physique, etc.). L’insomnie chronique n’est toutefois pas occasionnée par des circonstances dites environnementales (p. ex. : changements de climat, température, bruits, etc.) ou par la difficulté de trouver l’occasion de se mettre au lit à proprement parler2

RÉDACTION

Mathieu R. Tremblay, Pharm., D., Ph. D., Pharmacie Michèle Favreau, Pierre-Jean Cyr et Josianne Elias.

RÉVISION

Claude Dagenais, B. Pharm., Ph. D., coordonnateur principal, chargé de cours et conférencier, Faculté de pharmacie de l’Université de Montréal.

Texte original : 4 novembre 2022

Texte final : 20 novembre 2022

L’auteur et le réviseur scientifique ne déclarent aucun conflit d’intérêts lié à la rédaction de cet article.

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L’insomnie devient chronique chez 86 % des patients 1 an après le diagnostic formel, et chez 59 % des patients après 5 ans1. L’insomnie chronique peut résulter d’une condition primaire (p. ex. : trouble neurologique, syndromes, etc.) ou secondaire à d’autres comorbidités, notamment des troubles de la santé mentale, l’usage de drogues récréatives ou le diabète. Sa prévalence dans le monde industrialisé est estimée à 5 % à 10 % de la population 2

En plus des traitements ciblés pour les conditions primaires ou secondaires, quelques options de traitements pharmacologiques de l’insomnie chronique sont disponibles, notamment les benzodiazépines; les hypnotiques en Z; certains antipsychotiques ou antidépresseurs tricycliques; la mirtazapine et la trazodone. Plus précisément, les benzodiazépines et les hypnotiques en Z activent les récepteurs neuronaux de l’acide γ-aminobutyrique (GABA) afin de faciliter la relaxation et diminuer l’anxiété; les antipsychotiques bloquent le signal dopaminergique et cholinergique pour diminuer l’anxiété, et les antidépresseurs tricycliques, la mirtazapine et la trazodone bloquent principalement les signaux cholinergiques et histaminergiques afin d’induire le sommeil 2

Durant les dernières années, plusieurs études ont révélé que les orexines avaient pour fonction d’être un médiateur du cycle éveil/sommeil chez l’humain. Les orexines sont des neuropeptides sécrétés par un groupe de neurones de l’hypothalamus latéral, incluant les noyaux périfornicaux, postérieurs, latéraux et dorsomédiaux. Ainsi, les orexines ont un effet excitatoire sur les neurones cibles3

CAS CLINIQUE 1/4

Madame AP demande à vous voir en consultation. Cette patiente de 68 ans est bien connue de votre pharmacie pour ses troubles du sommeil récurrents. Elle vous confie avoir tenté plusieurs médicaments pour l’aide au sommeil, notamment la trazodone, le zopiclone et le zolpidem, sans succès. Elle vous présente une ordonnance pour du lemborexant 5 mg à prendre 1 à 2 comprimés HS. Madame AP a de forts doutes sur l’efficacité du produit : elle se demande comment se distingue le lemborexant des autres produits qu’elle a déjà pris, et si elle devrait encore essayer un autre médicament.

Depuis les années 2000, une nouvelle classe de médicaments, les antagonistes des récepteurs des orexines (ARO), a fait son apparition. On y retrouve notamment le suvorexant (Belsomra MD, que Merck a arrêté de produire, au Canada, pour des raisons commerciales); le daridorexant (QuviviqMD aux États-Unis, en attente d’approbation par Santé Canada au moment de la rédaction de cet article); le seltorexant (en cours d’études cliniques de précommercialisation aux États-Unis), et le lemborexant.

De cette nouvelle classe, seul le lemborexant est actuellement approuvé par Santé Canada. Il est commercialisé sous le nom de DayvigoMD depuis 2020. Il est disponible aux États-Unis depuis 2019 et en Europe depuis 2020.

Nous décrirons ici les différentes études ayant mené à la commercialisation du lemborexant, son mécanisme d’action, son profil d’innocuité, ainsi que sa place dans l’arsenal thérapeutique visant à soulager l’insomnie chronique.

Pharmacologie et mécanisme d’action

Le lemborexant est offert sous forme orale en comprimés de 5 mg et de 10 mg4. Il est un antagoniste réversible des récepteurs des orexines OX1R et OX2R. Les orexines A et B, aussi connues sous le nom d’hypocrétines, sont deux neuropeptides sécrétés par des neurones de l’hypothalamus. Leur principale fonction est de stimuler l’état d’éveil. La perte de sécrétion des orexines entraîne la narcolepsie avec cataplexie chez l’humain3

Les deux types de récepteurs des orexines sont présents dans plusieurs parties du cerveau, notamment le thalamus, le cortex cérébral et l’hypothalamus. Leur activation par les orexines crée un effet excitatoire sur les neurones cibles. Le lemborexant, en bloquant les récepteurs des orexines, supprime l’état d’éveil et favorise ainsi le sommeil. Ce mécanisme se distingue de celui orchestré par les benzodiazépines et les hypnotiques en Z, qui activent les récepteurs GABA présents dans le cerveau en induisant un effet inhibiteur généralisé.

36 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie

Pharmacocinétique

Le lemborexant démontre une pharmacocinétique linéaire jusqu’à des doses de 25 mg5 en doses simples ou multiples. À l’état d’équilibre, il y a une augmentation de la concentration plasmatique du lemborexant de l’ordre de 1,5 à 2 fois, par rapport à la première dose. Son absorption est rapide avec une atteinte de la concentration plasmatique maximale entre une heure et trois heures après l’ingestion. La prise avec nourriture peut diminuer l’absorption du lemborexant (diminution de 23 % de la Cmax, de 18 % de l’aire sous la courbe) et retarder le moment de sommeil chez le patient (retard de deux heures de la Tmax)4. Le lemborexant démontre une forte association aux protéines plasmatiques. Sa distribution dans les tissus n’a pas été évaluée.

Le lemborexant est métabolisé par la famille des cytochromes P450 de sous-classe 3A, notamment le CYP3A4. Le métabolisme du lemborexant produit trois métabolites : le M4, le M9 et le M10; ce dernier est le métabolite majeur circulant et serait inactif « pharmacologiquement » parlant. Le lemborexant natif et M10 sont également des inducteurs de la famille des CYP3A et du CYP2B6 dans des études in vitro4,5. Le temps de demi-vie du lemborexant varie entre 17 et 19 heures; 57,4 % de la dose ingérée est éliminée par voie fécale et 29,1 % de cette dose est éliminée par voie rénale, dont moins de 1 % est non métabolisée. Les principales caractéristiques pharmacocinétiques sont résumées dans le tableau I

Indications et essais cliniques

Le lemborexant est indiqué dans le traitement de l’insomnie chronique. Il est considéré comme étant une alternative aux benzodiazépines, aux hypnotiques en Z, aux antihistaminiques de type H1, à certains antipsychotiques ou à la trazodone.

Deux études cliniques principales ont déterminé l’efficacité et l’innocuité du lemborexant, soit SUNRISE-1 et SUNRISE-2. Ces deux études étaient multicentriques, à double insu et comparées au placébo. Les sections qui suivent décrivent chacune de ces études en détail, et les principaux éléments à retenir sont résumés dans le tableau II .

Étude SUNRISE-1

I PHARMACOCINÉTIQUE DU LEMBOREXANT

DOSE DE LEMBOREXANT 5 MG 10 MG

Temps pour atteinte de la concentration plasmatique maximale (Tmax)

Temps moyen de demi-vie d’élimination

De 1 à 3 heures

4,5

En présence de nourriture, on observe une diminution de 23 % de la Cmax, de 18 % de l’aire sous la courbe, et un retard de 2 heures de la Tmax

De 17 à 19 heures

Par cytochromes P450 3A majoritairement Élimination

Métabolisme

Fécale : 57,4 % (dose ingérée non métabolisée)

Rénale : 29,1 % (dose ingérée métabolisée)

Cette étude avait pour but de comparer les effets du lemborexant aux doses de 5 mg et 10 mg à ceux du placébo et du zolpidem à la dose de 6,25 mg. Pour ce faire, les participants ont tout d’abord pris deux comprimés de placébo cinq minutes avant l’heure du sommeil pendant deux semaines. Cela afin d’éliminer un biais lié à une réponse au placébo et de sélectionner et conserver des participants pouvant maintenir un journal du sommeil durant le reste de l’étude. Cette étape préliminaire était à simple insu. L’étude ne précisait pas si des mesures d’hygiène du sommeil ont été renforcées chez les sujets à l’étude.

Ensuite, 1006 patients de plus de 55 ans ont été séparés de façon aléatoire en trois groupes distincts et ont reçu le traitement sélectionné pendant 30 jours. Dans un premier temps, toutes les données obtenues ont été mesurées objectivement à partir d’une polysomnographie effectuée en clinique du sommeil. Par la suite, pour recueillir les données subjectives, rendu à la maison, chaque participant devait remplir un journal du sommeil quotidien durant la première heure après le réveil6

Québec Pharmacie novembre – décembre 2022 37
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II RÉSUMÉ DES PRINCIPALES ÉTUDES CLINIQUES SUR LE LEMBOREXANT

TYPE/DURÉE NOMBRE DE SUJETS ET TYPE DE POPULATION

SUNRISE-1

Randomisée

Double insu Multicentrique 30 jours

1006 patients 55 ans et plus Avec insomnie chronique avec ou sans difficulté à s’endormir

TRAITEMENT ET SCHÉMA POSOLOGIQUE

3 groupes à l’étude contre placébo HS

1. lemborexant 5 mg HS

2. lemborexant 10 mg HS

3. zolpidem 6,25 mg HS

Utilisation de PSG et d’un journal quotidien par le patient

Données collectées pour les nuits 1 et 2, et 29 et 30 (données objec tives) et après 7 jours et 1 mois de traitement (don nées subjectives)

PRINCIPAUX RÉSULTATS

SUNRISE-2

Randomisée Double insu Multicentrique 2 périodes d’étude : n 7 jours à 6 mois n 12 mois

Publiée en plusieurs articles

949 patients 18 à 88 ans (âge moyen : 55 ans) Avec insomnie chronique, avec ou sans difficulté à s’endormir Avec comorbidi tés selon limite permise n troubles psychiatriques n dépression n anxiété n migraines n hypertension diabète

Exclusions : n apnée du sommeil n SJSR n trouble du cycle circadien n narcolepsie n troubles complexes du sommeil

3 groupes à l’étude : 1. lemborexant 5 mg HS 2. lemborexant 10 mg HS 3. placébo HS

Après 6 mois, le groupe placébo a de nouveau été séparé de façon aléatoire dans les 2 groupes lemborexant

Utilisation d’un journal quotidien par le patient

Données collectées après les 7 premières nuits, et tous les 30 jours pendant 6 et 12 mois.

LPS (par PSG) :

Nuits 1 et 2 contre PLB : -6,5 min

LEM 5 mg : -16,6 min (log : 0,85); p=0,009

LEM 10 mg : -19,5 min (log : 0,80); p<0,001 vs ZLP : -12,6 min

LEM 5 mg : log : 0,87 min; p = 0,02 LEM 10 mg : log : 0,82 min; p < 0,001

Nuits 29 et 30 contre PLB : -7,9 min

LEM 5 mg : -19,5 min (log : 0,77); p < 0,001

LEM 10 mg : -21,5 min (log : 0,72); p < 0,001

contre ZLP : -7,5 min

LEM 5 mg : log : 0,63 min; p < 0,001 LEM 10 mg : log : 0,59 min; p < 0,001

sSOL

À partir de 7 nuits et jusqu’à 6 mois

PLB : -11,43 min LEM 5 : -21,81 min; p < 0,0001 LEM 10 : -28,21 min; p < 0,0001

Pourcentage de patients présentant une diminution de 20 min ou plus

De 7 nuits a 6 mois

PLB : 30,4% LEM 5 : 45,5 % (p < 0,0001) LEM 10 : 44,5 % (p < 0,0001)

À 12 mois

LEM 5 : 40,4 % LEM 10 : 43,3 %

SE (par PSG) :

Nuits 1 et 2 contre PLB : +4,2 %

LEM 5 mg : +13,6 % (log : 9,0 %); p < 0,001

LEM 10 mg : +16,5 % (log : 11,6 %); p < 0,001 contre ZLP : +11,7 %

LEM 5 mg : log : 2,1 %; p = 0,001 LEM 10 mg : log : 4,6 %; p < 0,001

Nuits 29 et 30 contre PLB : +5,4 %

LEM 5 mg : +12,9 % (log : 7,1 %); p < 0,001

LEM 10 mg : +14,1 % (log : 8,0 %); p < 0,001

contre ZLP : +9,1 %

LEM 5 mg : log : 3,9 %; p < 0,001

LEM 10 mg : log : 4,9 %; p < 0,001

sSE

À partir de 7 nuits et jusqu’à 6 mois

PLB : +71,40 %

LEM 5 : +78,55 %; p = 0,0001 LEM 10 : +76,53 %; p < 0,0001

sTST

À partir de 7 nuits et jusqu’à 6 mois PLB : 356,03 min LEM 5 : 392,98 min; p = 0,0034 LEM 10 : 379,25 min; p = 0,0004

WASO (par PSG) :

Nuits 1 et 2

contre PLB : -15,1 min

LEM 5 mg : -50,0 min (log : -33,4 min); p < 0,001

LEM 10 mg : -59,6 min (log : -42,3 min); p < 0,001 contre ZLP : -44,4 min

LEM 5 mg : log : -6,2 min; LEM 10 mg : log : -15,0 min; p < 0,001

Nuits 29 et 30 contre PLB : -18,6 min

LEM 5 mg : -43,9 min (log : -24,0 min); p < 0,001

LEM 10 mg : -46,4 min (log : -25,4 min); p < 0,001 contre ZLP : -36,5 min

LEM 5 mg : log : -7,7 min; LEM 10 mg : log : -9,1 min;

sWASO

À partir de 7 nuits et jusqu’à

PLB : 103,1 min

LEM 5 : 81,79 min; p = 0,0005 LEM 10 : 86,38 min; p = 0,0105

Légende : HS = au coucher; LEM = lemborexant; LPS = latency to persistant sleep; PLB = placébo; PSG = polysomnographie; Pts = points; sSE = subjective sleep efficiency; SJSR = syndrome des jambes sans

38 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie

0,001 0,001 p = 0,02 min; 0,001 0,001 p = 0,002; min; p < 0,001

sSOL (par journal) :

Après 7 nuits

contre PLB : -6,8 min

LEM 5 mg : -22,5 min (log : 0,82); p < 0,001

LEM 10 mg : -21,9 min (log : 0,75); p < 0,001

contre ZLP : -16,2 min

LEM 5 mg : log : 0,90 min; p = 0,01

LEM 10 mg : log : 0,83 min; p < 0,0001

Après 1 mois

contre PLB : -8,1 min

LEM 5 mg : -25,2 min (log : 0,75 min); p < 0,0001

LEM 10 mg : -24,8 min (log : 0,69 min); p < 0,0001 contre ZLP : -17,0 min

LEM 5 mg : log : 0,88 min; p = 0,02

LEM 10 mg : log : 0,81 min; p < 0,0001

sSE :

Après 7 nuits

contre PLB : +6,7 %

LEM 5 mg : +10,6 % (log : 3,8 %); p < 0,00

LEM 10 mg : +14,0 % (log : 6,8 %); p < 0,0001 contre ZLP : +12,0 %

LEM 5 mg : log -1,4 %; p = 0,20

LEM 10 mg : log 1,7 %; p = 0,11

Après 1 mois

contre PLB : +8,4 %

LEM 5 mg : +12,9 % (log : 4,6 %); p < 0,001

LEM 10 mg : +16,1 % (log : 7,2 %); p < 0,0001 contre ZLP : +14,8 %

LEM 5 mg : log -1,5 %; p = 0,22 LEM 10 mg : log 1,1 %; p = 0,40

sWASO :

Après 7 nuits

contre PLB : -27,9 min

LEM 5 mg : -39,3 min (log : -12,4 min); p = 0,009

LEM 10 mg : -55,1 min (log : -26,3 min); p < 0,0001 contre ZLP : -48,9 min LEM 5 mg : log : 8,1 min; p = 0,07 LEM 10 mg : log : -5,8 min; p = 0,19

Après 1 mois contre PLB : -36,0 min LEM 5 mg : -44,5 min (log : -11,5 min); p = 0,04 LEM 10 mg : -58,0 min (log : -20,6 min); p < 0,001 contre ZLP : -63,5 min LEM 5 mg : log : 14,5 min; p = 0,006 LEM 10 mg : log : 5,4 min; p = 0,31

COMMENTAIRES

jusqu’à 6 mois 0,0005 0,0105

Pourcentage de patients présentant une diminution de 60 min ou plus

De 7 nuits à 6 mois

PLB : 24,2 %

LEM 5 : 27,8 % (p < 0,01)

LEM 10 : 30,2 % (p < 0,05)

À 12 mois

LEM 5 : 27,8 %

LEM 10 : 27,7 %

Qualité du sommeil Écart p/r niveau de base

6 mois

PLB : +0,9 pts

LEM 5 : +1,2 pts (p = 0,0224)

LEM 10 : +1,2 pts (p = 0,0103)

9 mois

LEM 5 : +1,4 pts

LEM 10 : +1,5 pts

12 mois

LEM 5 : +1,5 pts

LEM 10 : +1,6 pts

Niveau de vigilance matinale (ou rapport somnolence/ vigilance)

Écart p/r niveau de base

6 mois

PLB : +0,78 pts

LEM 5 : +0,93 pts (p=0,2248)

LEM 10 : +1,04 pts (p=0,0298)

9 mois

LEM 5 : +1,00 pts

LEM 10 : +1,13 pts

12 mois

LEM 5 : +1,11pts

LEM 10 : +1,34 pts

sans repos; sSOL = subjective sleep onset latency; sTST = subjective total sleep time; sWASO = subjective wake-after-sleep onset; ZPD = zolpidem.

n Effets chez population < 55 ans non étudiés n Étude de très courte durée n Comparatif (zolpidem) à dose non disponible au Canada n Comorbidités peu définies n Présence ou non d’un effet de dépendance non abordée n Profil d’innocuité à long terme inconnu

n Subjectivement similaire au zolpidem pour certaines issues n Effets des mesures non pharmacologiques sur l’insomnie non pris en comptes n Coût élevé de la molécule par rapport au zolpidem n Place dans la thérapie à mieux cerner

n Population à l’étude représentative de la pratique clinique n Longue durée n Comorbidités sous-jacentes non détaillées par les auteurs n Efficacité quasi-identique des doses de 5 mg et 10 mg après 12 mois

n Effet d’une possible médication concomitante non évalué n Données subjectives non dépourvues de possibles biais n Effet des mesures non pharmacologiques sur l’insomnie non évalué

n Aucun comparatif à l’étude autre que le placébo n Place dans la thérapie à mieux cerner

Québec Pharmacie novembre – décembre 2022 39

Les différentes données d’efficacité ont été mesurées pour les nuits 1 et 2 et les nuits 29 et 30 en clinique du sommeil. Cette période était courte, mais relativement similaire à plusieurs études menées pour le zolpidem7,8. Les auteurs ont identifié comme issue primaire de l’étude la période d’atteinte du sommeil persistant (Latency to Persistant Sleep (LPS)), défini comme le nombre de minutes calculées entre le moment d’éteindre la lumière et la période de 20 moments consécutifs de 30 secondes en état de non-éveil. Les auteurs ont présenté les données avec transformations logarithmiques afin de normaliser les valeurs mesurées pour analyse statistique.

CAS CLINIQUE 2/4

Vous consultez le dossier de Madame AP.

n La patiente souffre d’anxiété généralisée. Elle est également suivie pour de l’ostéoporose et une vessie hyperactive.

n Au dossier pharmacologique :

n Escitalopram 20 mg DIE

n Dexlansoprazole 60 mg DIE

n Alendronate 70 mg 1 fois par semaine

n Citrate de calcium + vitamine D, 500 mg-400 UI, 1 comprimé BID

n Oxybutynine 2,5 mg 1 à 2 comprimés DIE

n Médicaments servis récemment : n Zolpidem 5 mg SL HS PRN (10 comprimés servis il y a 2 semaines) n Zopiclone 5 mg 1 à 1 ½ comprimé HS PRN (15 comprimés servis il y a 1 mois) n Trazodone 50 mg ½ à 1 comprimé HS PRN (non renouvelé depuis 2 mois)

Vous constatez que plusieurs notes apparaissent au dossier, précisant que la patiente a fait des essais de 2 à 4 semaines avec les autres médicaments pour dormir et a cessé la prise. Vous expliquez alors à la patiente que le lemborexant est une option alternative de traitement pour le trouble du sommeil qui vaut la peine d’être essayée. Il modifie des éléments du cerveau impliqués dans la transition éveil-sommeil et permet de rester endormi plus longtemps. De plus, le lemborexant provoque peu d’effets indésirables, mais il faut surveiller la présence de somnolence durant la journée. Il présente peu de risque de dépendance, selon les études publiées. Vous précisez que le lemborexant doit être pris seul comme médicament pour dormir, donc il ne faut pas le combiner avec d’autres médicaments prescrits pour dormir. Vous expliquez que le produit exerce un effet significatif dès les premiers soirs de prise et son effet sur la qualité du sommeil dure plusieurs mois. Vous suggérez de commencer la prise à 5 mg pour l’instant; il sera toujours possible d’augmenter à 10 mg après 1 mois si les effets ne sont pas encore satisfaisants.

Vous recommandez à la patiente de ne pas prendre de médicaments en vente libre pour dormir, notamment la mélatonine ou les produits antihistaminiques aidant à dormir. Vous expliquez les mesures habituelles d’hygiène du sommeil (se mettre au lit à la même heure, un certain temps après le dernier repas, éviter les distractions technologiques (écrans lumineux, musique, télévision) avant de se mettre au lit, etc.). Vous planifiez un suivi téléphonique avec la patiente après 7 jours.

Pour les deux doses de lemborexant à l’étude, les auteurs ont constaté une différence moyenne significative en réduction du LPS par rapport au niveau de base dès les nuits 1 et 2 (placébo : -6,5 min; lemborexant 5 mg : -16,6 min; p = 0,009; 10 mg : -19,5 min; p < 0,001) et en comparaison au zolpidem (zolpidem : -12,6 min; lemborexant 5 mg : p = 0,02; 10 mg : p < 0,001). L’effet du lemborexant sur le début du sommeil persistait aux nuits 29 et 30 (placébo : -7,9 min; lemborexant 5 mg : -19,5 min; p < 0,001; 10 mg : -21,5 min; p < 0,001) et en comparaison au zolpidem (zolpidem : -7,5 min; lemborexant 5 mg : p < 0,001; 10 mg : p < 0,001). Ainsi, les patients traités au lemborexant s’endormaient plus rapidement que ceux traités avec le placébo dès les premières nuits, tout comme ceux traités au zolpidem, mais cet effet persistait pour le lemborexant après 30 nuits, ce qui n’était pas le cas avec le zolpidem.

Comme issues secondaires de l’étude, les auteurs ont mesuré :

1. l’efficacité du sommeil (SE, sleep efficiency), définie comme la proportion du temps passé à dormir par rapport au temps total au lit;

2. le temps d’éveil après sommeil (WASO, Wakefulness After Sleep Onset) défini par le nombre de minutes d’éveil à partir du LPS jusqu’à allumer les lumières, et après 240 minutes après avoir éteint les lumières, soit dans la deuxième partie de la nuit (WASO2H). Pour les 2 doses de lemborexant à l’étude, les auteurs ont constaté une différence significative en augmentation moyenne de la SE dès les nuits 1 et 2 (placébo : +4,2 %; lemborexant 5 mg : +13,6 %; p < 0,001; 10 mg : +16,5 %; p < 0,001) et en comparaison au zolpidem (+11,7 %; lemborexant 5 mg : p = 0,001; 10 mg : p < 0,001). Comme pour l’issue primaire de l’étude, l’effet du lemborexant sur la SE persistait aux nuits 29 et 30 (placébo : +5,4 %; lemborexant 5 mg : +12,9 %; p < 0,001; 10 mg : +14,1 %; p < 0,001) et en comparaison au zolpidem (+9,1%; 5 mg : p < 0,001; 10 mg : p < 0,001).

40 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie

Pour la mesure du WASO, les auteurs ont dénoté des valeurs de diminution moyenne plus élevées dès les nuits 1 et 2 par rapport au placébo (placébo : -15,1 min; lemborexant 5 mg : -50,0 min; p < 0,001; 10 mg : -59,6 min; p < 0,001) et au zolpidem (-44,4 min; lemborexant 5 mg : p = 0,02; 10 mg : p < 0,001). Les mêmes résultats ont été observés aux nuits 29 et 30 (placébo : -18,6 min; lemborexant 5 mg : -43,9 min; p < 0,001; 10 mg : -46,4 min; p < 0,001) et en comparaison au zolpidem (placébo : -36,5 min; lemborexant 5 mg : -7,7 min; p = 0,002; 10 mg : -9,1 min; p < 0,001). Les auteurs rapportaient des différences significatives similaires pour le WASO2H (données non présentées ici).

Les auteurs mentionnent que les effets bénéfiques du zolpidem ont diminué pour atteindre un niveau similaire au placébo dans le dernier quart de la nuit. Par contre, les effets observés chez les patients traités au lemborexant ont duré la nuit entière.

En conclusion, en proportion, les patients traités au lemborexant dormaient plus longtemps durant la période de sommeil que ceux traités avec le placébo ou le zolpidem. Le lemborexant apparaît donc comme étant supérieur au zolpidem après un mois de traitement.

La tenue d’un journal a permis aux auteurs de mesurer subjectivement (d’où l’utilisation du préfixe s) la période de début du sommeil (Subjective Sleep Onset Latency (sSOL)), définie comme le nombre de minutes entre le moment où le patient essaie de s’endormir et celui du début du sommeil. Les auteurs ont mesuré le sSOL à la fin des sept premières nuits de traitement et après le premier mois. Ils ont constaté des diminutions significatives pour les patients traités avec le lemborexant après sept nuits par rapport au placébo (-6,8 min; lemborexant 5 mg : -22,5 min; p < 0,001; 10 mg : -21,9 min; p < 0,001) et au zolpidem (-16,2 min; lemborexant 5 mg : p = 0,01; 10 mg : p < 0,0001). Après le premier mois, les données étaient similaires en faveur du lemborexant comparé au placébo et au zolpidem (tableau II ). Ainsi, les patients sous lemborexant semblaient s’endormir plus rapidement (moins de 20 minutes en majorité) que ceux sous placébo ou sous zolpidem dès le début de la thérapie, et ce, jusqu’à un mois plus tard.

III PRINCIPAUX EFFETS INDÉSIRABLES DU LEMBOREXANT OBSERVÉS DANS LES ÉTUDES

Nausée 1 (0,2) 8 (1,4) 4 (0,7)

Fatigue 0 12 (2,1) 9 (1,5)

Nasopharyngite 5 (0,9) 16 (2,8) 10 (1,7)

Infection des voies respiratoires hautes 5 (0,9) 7 (1,2) 4 (0,7)

Infection urinaire 6 (1,1) 4 (0,7) 12 (2,1)

Douleur musculaire dorsale 3 (0,6) 4 (0,7) 6 (1,0)

Maux de tête 21 (4,0) 35 (6,0) 27 (4,6)

Somnolence 7 (1,3) 29 (5,0) 49 (8,4)

Rêves anormaux 4 (0,8) 2 (0,3) 6 (1,0) Cauchemars 2 (0,4) 3 (0,5) 6 (1,0)

Les auteurs ont également évalué subjectivement, grâce à la tenue d’un journal quotidien, l’efficacité du sommeil (sSE) et le WASO (sWASO). Pour les deux issues, le lemborexant était supérieur au placébo, mais non au zolpidem après sept nuits et un mois (tableau II ). Ainsi, de manière subjective, le lemborexant et le zolpidem ont un effet similaire sur la perception des patients quant à l’amélioration de leur sommeil.

L’étude décrit un profil d’innocuité favorable chez les patients traités au lemborexant. Les principaux effets indésirables répertoriés sont détaillés au tableau III et décrits dans la section sur les effets indésirables.

En conclusion, cette étude a démontré que le lemborexant apportait environ 60 minutes de sommeil supplémentaires chez les patients traités et raccourcissait la période nécessaire au sommeil à moins de 20 minutes, ce qui s’apparente à la durée observée chez les patients ne souffrant pas d’insomnie. Le profil d’innocuité était

Québec Pharmacie novembre – décembre 2022 41
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LEMBOREXANT
CLINIQUES4,6,9,10 EFFETS INDÉSIRABLES FRÉQUENTS PLACÉBO (N=528) N (%) LEMBOREXANT 5 MG (N=580) N (%)
10 MG (N=582) N (%)

favorable et semblable aux effets indésirables du zolpidem. Il est à noter que l’effet de somnolence est proportionnel à la dose ingérée.

Cette étude comporte plusieurs limites notoires, dont certaines sont adressées dans l’étude SUNRISE-2 (voir prochaine section) : l’échantillon des sujets à l’étude se situe principalement entre 55 et 65 ans (55 % de la cohorte) ou plus de 65 ans (45 % de la cohorte), ce qui n’évalue en rien les effets chez les patients plus jeunes. La durée de l’étude est relativement courte (1 mois). Il faut donc se référer à l’étude SUNRISE-2 pour évaluer l’effet à plus long terme (6 mois à 1 an) d’un traitement au lemborexant (voir section plus bas). De plus, plusieurs patients souffrant d’insomnie chronique présentent des comorbidités, notamment des troubles de santé mentale tels que l’anxiété ou la dépression nécessitant des traitements de type inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (ISRS) ou des stabilisateurs de l’humeur. L’effet combiné du lemborexant avec ces différentes thérapies n’a pas été abordé dans cette étude. Enfin, les effets du lemborexant sur les issues secondaires subjectives de l’étude, c’est-à-dire le sSE et le sWASO, sont équivalents au zolpidem. Ce qui suggère que le lemborexant n’apporte aucun avantage clair et ne se distingue pas du zolpidem selon la perspective des patients.

Étude SUNRISE-2

CAS CLINIQUE 3/4

Vous contactez la patiente au téléphone après 7 jours. Madame AP vous informe avoir mieux dormi; elle croit s’être moins réveillée durant la nuit.

Cette étude multicentrique avait pour but d’étudier les effets du lemborexant sur une période plus longue, soit de 6 à 12 mois9,10. Pour ce faire, les auteurs ont identifié 949 patients âgés de 18 à 88 ans (âge moyen de 55 ans) ne souffrant d’aucun trouble du sommeil primaire en comorbidité (notamment : apnée du sommeil, narcolepsie, syndrome des jambes sans repos, etc.), mais pouvant souffrir de troubles psychiatriques ou de l’humeur tels que la dépression majeure ou l’anxiété. Ces sujets ont été séparés aléatoirement en trois groupes, soit placébo et lemborexant 5 mg et 10 mg. Après 6 mois, les sujets du groupe placébo ont été séparés à nouveau aléatoirement et intégrés aux deux groupes lemborexant à l’étude. Toutes les données ont été collectées subjectivement à partir d’un journal quotidien tenu par les patients.

Les auteurs ont identifié comme issue primaire principale de l’étude le changement moyen du sSOL après 6 mois (période 1). À partir de 7 nuits, et jusqu’à 6 mois, les groupes traités au lemborexant 5 mg ou 10 mg ont démontré une diminution du sSOL (placébo : -11,43 min; lemborexant 5 mg : -21,81 min; p < 0,0001; 10 mg : -28,21 min; p < 0,0001).

De plus, comme mentionné dans l’étude, à 6 mois, 45,5 % des sujets sous lemborexant 5 mg et 44,5 % des sujets sous 10 mg démontraient une diminution de sSOL de 20 minutes ou plus, comparativement à 30,4 % des sujets sous placébo9. L’effet était maintenu pendant jusqu’à 12 mois de traitement (durant la période 2) alors que 40,4 % (5 mg) et 43,3 % (10 mg) des patients démontraient toujours une diminution de sSOL d’au moins 20 minutes (tableau II )10

Les issues secondaires étaient le sSE, le sTST (Total sleep time, soit le temps total passé à dormir) et le sWASO. La prise de lemborexant 5 mg et 10 mg augmente le pourcentage du sSE à 6 mois (placébo : 71,4 %; lemborexant 5 mg : 78,5 %, p = 0,0001; 10 mg : 76,5 %, p < 0,0001). Le lemborexant augmente également significativement le sTST (placébo : 356,0 min; lemborexant 5 mg : 392,0 min, p = 0,0034; 10 mg : 379,2 min, p = 0,0004) (tableau II ). En fait, il semble que la prise de lemborexant augmentait en moyenne la durée du sommeil de 30 à 60 minutes par rapport au placébo, selon le mois étudié. Ces résultats s’apparentent à ceux observés chez les patients ne souffrant pas d’insomnie. Les périodes d’éveil après sommeil chez les patients sous lemborexant étaient plus courtes, comme démontré par le sWASO (tableau II ) par rapport à la prise de placébo (103,1 min; lemborexant 5 mg : 81,79 min; p = 0,0005; 10 mg : 86,38 min;

42 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie

p = 0,0105). À 6 mois, 27,8 % et 30,2 % des patients sous lemborexant 5 mg et 10 mg ont démontré une diminution de 60 minutes ou plus du sWASO par rapport au niveau de base alors que seulement 24,2 % des patients dans le groupe placébo ont subi le même effet9. À 12 mois, 27,8 % des patients sous lemborexant 5 mg et 27,7 % des patients sous lemborexant 10 mg démontraient le même effet de diminution.

Ainsi, la prise de lemborexant facilitait le sommeil, allongeait le temps endormi et raccourcissait les périodes d’éveil durant le sommeil après 6 mois de traitement, et cet effet durait jusqu’à 12 mois. Les auteurs n’ont fourni aucun renseignement sur les effets du lemborexant au-delà de 12 mois, puisque les patients ont alors cessé la prise du médicament. Ils ont tout de même poursuivi la tenue du journal quotidien.

Les auteurs mentionnent également avoir évalué deux indicateurs de qualité de vie, soit le niveau de qualité du sommeil (Quality of sleep (QOS) rating) et le niveau de vigilance matinal (Morning alertness rating), à l’aide de l’autodéclaration des patients, le matin au réveil. Le niveau de qualité du sommeil augmentait à la suite de la prise de lemborexant 5 mg et 10 mg (placébo : +0,9 point; lemborexant 5 mg : +1,2 point; p = 0,0244; lemborexant 10 mg : +1,2 point; p = 0,0103) dès 6 mois et jusqu’à 12 mois (tableau II ).

Par contre, le niveau de vigilance matinal semblait surtout amélioré avec la dose de 10 mg dès 6 mois (placébo +0,78 point; lemborexant 5 mg : +0,93 point; p = 0,2248; lemborexant 10 mg : +1,04 point; p = 0,0298), et ce, jusqu’à 12 mois. La dose de 5 mg semblait exercer son effet sur ce rapport plus tard, soit à 9 mois, mais les données statistiques étaient peu détaillées dans l’étude10. Ainsi, après 6 à 12 mois de traitement, les patients déclaraient avoir une meilleure nuit de sommeil et un réveil plus reposé après la prise de lemborexant.

L’étude SUNRISE-2 a évalué le profil d’innocuité du lemborexant à long terme. Les effets indésirables les plus fréquents observés après 12 mois et qui semblaient se distinguer du traitement au placébo étaient la nausée, la nasopharyngite, la somnolence diurne et les maux de tête. Les auteurs n’ont pas noté d’effet d’insomnie rebond ni d’effet de sevrage jusqu’à deux semaines après la fin de l’étude et l’arrêt de la prise de lemborexant.

OPINION D’UN EXPERT SUR LE MÉDICAMENT

Le lemborexant, un antagoniste des récepteurs de l’orexine (ARO), a un profil clinique intéressant pour traiter l’insomnie chronique par un nouveau mécanisme, avec certains avantages d’efficacité et d’innocuité, mais avec un potentiel d’abus similaire à celui du zolpidem et à coût nettement supérieur par rapport aux traitements établis qui sont remboursés par les régimes d’assurance médicaments.

Il sera intéressant de connaître le résultat de l’évaluation du lemborexant par l’ACTMS, car la décision de remboursement aura un impact sur son adoption par les prescripteurs (l’INESSS partage certains mécanismes d’évaluation avec cet organisme canadien). Des indications éventuelles pour le traitement adjuvant d’abus de substances sont aussi à surveiller.

Par ailleurs, la démonstration d’avantages à long terme par rapport aux benzodiazépines et aux médicaments en Z – dont l’utilisation inappropriée est une aversion historique des pharmaciens et pharmaciennes – pourrait permettre à cette classe de se démarquer davantage, surtout chez la personne âgée (p. ex. : risque de chutes et de fractures, effets cognitifs négatifs, mortalité). Malheureusement, la compétition avec des médicaments remboursés qui sont utilisés hors indication continuera probablement de brouiller les cartes en l’absence d’études cliniques comparatives bien conçues.

Dans la prise en charge globale de la patientèle souffrant d’insomnie, on doit agir tôt pour prévenir la chronicisation et suggérer des manières de la gérer sans pilules (éducation sur l’hygiène du sommeil, stratégies reposant sur la thérapie cognitivo-comportementale).

La déprescription doit aussi être considérée chez la patientèle réceptive18

Cette étude, comme SUNRISE-1, démontrait plusieurs limites : les auteurs n’ont pas considéré comme covariable la présence de comorbidités chez les patients. On peut supposer que la présence d’une maladie chronique sous-jacente aurait pu jouer sur les résultats. De plus, les auteurs présentent ici des résultats qui ont été obtenus subjectivement, selon ce qu’avaient rapporté les patients. Cela limite la portée de ces résultats, d’autant plus que la précision des mesures présentées dans le texte (au dixième ou centième près) semble quelque peu invraisemblable. Néanmoins, la méthode utilisée représente plus fidèlement la réalité quotidienne des patients que lors d’une analyse en laboratoire du sommeil.

En conclusion, les auteurs soulignaient que l’étude SUNRISE-2 a démontré l’efficacité et l’innocuité du lemborexant sur une période à long terme. Ils rappelaient l’importance

Québec Pharmacie novembre – décembre 2022 43
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de considérer l’effet placébo, qui est omniprésent dans les études cliniques mesurant le sommeil et qui aurait pu contribuer aux effets bénéfiques observés du lemborexant. L’étude SUNRISE-2 rapportait des données subjectives provenant d’un journal tenu par les sujets, mais qui étaient similaires à celles décrites dans l’étude SUNRISE-1 qui, elles, étaient principalement objectives.

Néanmoins, les auteurs croient que SUNRISE-2 trace un portrait plus juste des effets du lemborexant puisque les indicateurs d’efficacité évalués, comme le WASO, le QOS, le TST et le SE, étaient en accord avec les lignes directrices en vigueur selon l’American Academy of Sleep Medicine2 . De plus, les sujets à l’étude présentaient des symptômes actifs ou un historique de comorbidités typiques accompagnant les troubles du sommeil en pratique clinique. Par contre, les auteurs ne présentaient pas la nature exacte de ces comorbidités ni dans quelle proportion les sujets en étaient atteints.

Effets indésirables

CAS CLINIQUE 4/4

Un mois et demi plus tard, la patiente revient vous voir : elle prend le lemborexant 5 mg depuis maintenant plusieurs semaines. Elle dit pouvoir s’endormir plus facilement et se sent plus reposée le lendemain au réveil. Elle croit que son meilleur sommeil semble faire diminuer son niveau d’anxiété. Par contre, elle dit avoir ressenti de la somnolence durant la journée lorsqu’elle a tenté la prise de lemborexant à 10 mg les soirs d’insomnie plus importante.

Les effets indésirables les plus fréquents observés pour le lemborexant sont la fatigue, les maux de tête, la somnolence diurne et la nasopharyngite (voir section plus bas). Des situations plus rares et plus graves sont rapportées par la monographie, soit la paralysie du sommeil (1,3 % à 1,5 %), des hallucinations hypnagogiques (0,1 % à 0,7 %), des convulsions (1 seul sujet à l’étude) et des comportements complexes reliés au sommeil (p. ex. : conduite automobile sans éveil complet, amnésie à la suite d’activités de la vie quotidienne, exacerbation de l’apnée du sommeil). Dans de tels cas, le fabricant recommande de cesser la prise de lemborexant. Dans l’étude SUNRISE-1, les observations semblent démontrer une incidence plus faible des effets indésirables graves chez les patients traités au lemborexant comparés aux patients traités au zolpidem6,11

Dans l’étude SUNRISE-2, le risque de symptômes de sevrage a été abordé : les auteurs mentionnent qu’aucun symptôme significatif n’a été observé dans les 14 jours après l’arrêt du lemborexant 9,10

Les effets indésirables à faible incidence (<1 %) ne sont pas décrits ici. Le lecteur est invité à se référer à la monographie du produit pour une liste complète.

Les principaux effets indésirables du lemborexant sont décrits dans le tableau III

Mises en garde et contre-indications Changements de comportement et de raisonnement Plusieurs changements au comportement des patients ont été observés, notamment de l’amnésie, de l’anxiété, des hallucinations et des exacerbations de symptômes neuropsychiatriques. Ces effets restent très rares dans les études cliniques décrites à la section précédente. Seule la monographie avise le professionnel de la santé des comportements à tenir en cas d’incidence chez les patients traités au lemborexant.

Effet dépresseur sur le système nerveux central (SNC)

La monographie avise de rester prudent lorsque la prise du lemborexant est combinée à la prise de dépresseurs du SNC comme les benzodiazépines, les opiacés, les antidépresseurs tricycliques ou la consommation d’alcool12 . La prise combinée pourrait diminuer le niveau de vigilance. La monographie ne recommande pas la prise de lemborexant avec d’autres médicaments visant à traiter l’insomnie. Il est à noter que les études SUNRISE-1 et 2 incluaient des méthodes de sélection restrictive des sujets devant la consommation d’alcool et autres traitements dépresseurs du SNC.

44 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie

Comportements complexes reliés au sommeil

La monographie rapporte certains comportements complexes tels que la conduite automobile en état de semi-éveil (sleep driving) ou l’amnésie à la suite d’activités de la vie quotidienne (préparer les repas, faire des appels téléphoniques, quitter la maison ou avoir des relations sexuelles). Ces comportements ont été rapportés par des patients naïfs ou conditionnés à la prise d’hypnotiques. Les patients souffrant de certaines comorbidités, comme l’apnée du sommeil ou le syndrome des jambes sans repos (SJSR), seraient plus à risque de présenter des comportements complexes reliés au sommeil. Le lemborexant est contre-indiqué chez les patients souffrant de narcolepsie4

Paralysie du sommeil, hallucinations hypnagogiques/hypnopompiques, symptômes

de cataplexie

La paralysie du sommeil observée était une incapacité à parler ou à bouger durant plusieurs minutes pendant les périodes de transitions éveil-sommeil, accompagnée d’hallucinations et de perceptions erronées. La monographie recommande aux professionnels de la santé d’expliquer ce risque aux patients au moment de prescrire ou de servir les comprimés de lemborexant4

SUIVI ET SURVEILLANCE DE LA THÉRAPIE

Efficacité

Décompensation de la dépression/idées suicidaires

Dans les études SUNRISE-1 et SUNRISE-2, le risque de décompensation de troubles de l’humeur a été évalué par questionnaire. Lors du déroulement des études, les auteurs mentionnent ne pas avoir constaté d’augmentation de la suicidalité ou de décompensation majeure de la dépression. Néanmoins, la monographie fait une mise en garde concernant les patients à risque d’abus ou d’intoxication intentionnelle. Il est à noter que le profil d’innocuité pour des doses de lemborexant jusqu’à 200 mg a été étudié sans observation d’augmentation des effets indésirables graves ou de signes d’intoxication5,13. La monographie recommande tout de même le service restreint de comprimés chez certains patients.

Diminution de la vigilance

n Prise en monothérapie. Aucun recours à des médicaments en vente libre comme appoint.

n Effet sur le sommeil dès les premières nuits, et effet maximal dès le premier mois.

n Temps plus court pour s’endormir.

n Meilleure qualité du sommeil: rester endormi plus longtemps, se sentir reposé le lendemain.

n Augmentation à dose de 10 mg possible après 1 mois si résultat non atteint.

Innocuité

n Surveiller la somnolence diurne, la fatigue, les symptômes de nasopharyngite.

n Absence d’effets rares nécessitant l’arrêt de la thérapie.

Observance

n Mesures d’hygiène du sommeil à renforcer. S’assurer également d’une prise régulière à la même heure tous les soirs; expliquer au patient d’ajuster l’heure de prise si le moment d’aller au lit varie.

n Surveiller l’absence de surconsommation dans le dossier pharmacologique en pharmacie.

Il est recommandé de prendre le médicament au moins 9 heures avant une activité nécessitant de la vigilance, comme la conduite automobile ou l’opération de machinerie lourde. Cette recommandation n’est pas surprenante vu la longue demi-vie du lemborexant. Des effets semblables sont observés pour le zolpidem alors que sa demi-vie est nettement plus courte (environ 3 heures14). La diminution de la vigilance est proportionnelle à la dose de lemborexant. Ainsi, dans certains cas, la monographie recommande de limiter la dose quotidienne de lemborexant à 5 mg.

Risque d’abus et patients sujets à la dépendance pharmacologique

Les études cliniques présentées ici n’ont pas rapporté de risque significatif de dépendance ou de symptômes de sevrage à la suite de la prise de lemborexant. Néanmoins, une étude récente a établi que le risque potentiel d’abus au lemborexant est similaire à celui du

Québec Pharmacie novembre – décembre 2022 45
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zolpidem13. D’ailleurs, aux États-Unis, les autorités ont classé le lemborexant à l’annexe restrictive (Schedule IV ) des substances contrôlées, au même titre que les benzodiazépines et les hypnotiques en Z. Au Canada, le lemborexant est classé, tout comme la zopiclone, au statut régulier de médicament d’ordonnance (Pr).

IV PRINCIPALES INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES DU LEMBOREXANT

SUBSTANCES/ MÉDICAMENTS (EXEMPLES)

EFFET DE L’INTERACTION

Rifampicine (dose de 600 mg) Inducteur puissant du CYP3A4.

Augmente le métabolisme du lemborexant et diminue la Cmax (-92 %) et l’aire sous la courbe (-97 %).

Itraconazole (dose de 200 mg) Inhibiteur puissant du CYP3A4.

Diminue le métabolisme du lemborexant et augmente la Cmax (+36 %) et l’aire sous la courbe (+270 %).

COMMENTAIRES

4,5

Diminution possible de l’efficacité du lemborexant.

Augmentation possible des effets indésirables du lemborexant, comme la somnolence et des effets résiduels au réveil. On peut diminuer la dose de lemborexant durant le traitement à l’itraco nazole.

Fluconazole (dose de 200 mg)

Fluoxétine

Pamplemousse

Alcool

Inhibiteur modéré du CYP3A4.

Diminue le métabolisme du lemborexant et augmente la Cmax (+62 %) et l’aire sous la courbe (+317 %).

Inhibiteur faible du CYP3A4.

Diminue le métabolisme du lemborexant et augmente la Cmax (+21 %) et l’aire sous la courbe (+77 %).

Inhibiteur puissant du CYP3A4 et de la Pgp. Pourrait diminuer le métabolisme du lemborexant.

Augmentation de la Cmax (+35 %) et de l’aire sous la courbe (+70 %) pour le lemborexant lors d’une concentration plasmatique de 0,08 % d’alcool.

Famotidine (dose de 40 mg) Modification du pH gastrique. Diminue la Cmax (-27 %).

Éthinyl estradiol + noréthindrone (dose de 0,030 mg + 1,5 mg)

Bupropion (dose de 75 mg)

Aucun effet sur le lemborexant. Par contre, le lemborexant augmente l’aire sous la courbe de l’éthinyl estradiol (+13 %).

Le lemborexant diminue la Cmax (-50 %) et l’aire sous la courbe (-46 %) du bupropion et de son métabolite.

Augmentation possible des effets indésirables du lemborexant, comme la somnolence et des effets résiduels au réveil. On peut diminuer la dose de lemborexant durant le traitement à l’itraco nazole.

La monographie recommande de limiter la dose quotidienne de lemborexant à 5 mg.

Le fabricant recommande d’éviter la consommation du pample mousse et de son jus pendant un traitement avec lemborexant. Aucune étude n’a évalué à proprement parler les effets sur le métabolisme.

Possible effet additif sur la somnolence. La monographie recom mande de ne pas consommer d’alcool lors de la prise de lembo rexant.

La prise d’anti-H2 et d’IPP n’a eu aucun effet sur l’efficacité et l’innocuité du lemborexant dans les études cliniques. Selon la monographie, aucun ajustement de dose de famotidine ou d’IPP n’est requis.

Aucun ajustement de dose du contraceptif ou du lemborexant n’est requis.

La monographie ne recommande pas d’ajustement de dose du lemborexant. Cette interaction semble médiée par un effet du lemborexant sur le CYP2B6 et ses substrats, sans toutefois démon trer un effet clinique significatif.

Midazolam (dose de 2 mg)

Aucun effet sur les taux de midazolam.

Millepertuis Inducteur puissant du CYP3A4. Diminution de l’efficacité du lemborexant.

Aucun ajustement de dose requis.

La monographie recommande d’éviter l’association.

Légende : Cmax = concentration plasmatique maximale; CYP = cytochrome P; anti-H2 = inhibiteur de l’histamine-2; IPP = inhibiteur de la pompe à protons; PgP = glycoprotéine P.

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Effet sur l’intervalle QT

Certaines études visant à évaluer les effets du lemborexant sur l’allongement de l’intervalle QT ont été effectuées avant la mise en marché du lemborexant. Aucun effet cliniquement significatif n’a été observé sur l’intervalle QT en présence d’une concentration plasmatique de 240 ng/mL de lemborexant (comparée à environ 32 ng/mL après ingestion d’une dose de 10 mg)5

Insuffisance hépatique/biliaire/pancréatique

L’utilisation du lemborexant n’a pas été étudiée chez les patients avec insuffisance hépatique/biliaire/pancréatique importante. Vu l’élimination principalement hépatique du lemborexant, il serait raisonnable de limiter son usage chez les patients souffrant d’insuffisance hépatique. La monographie recommande, chez les patients avec insuffisance modérée, de limiter la dose de lemborexant à 5 mg. Chez les patients en insuffisance légère, aucune limitation de dose ne s’applique15

V POSOLOGIE ET COÛT DES PRINCIPALES OPTIONS DE TRAITEMENTS DE L’INSOMNIE CHRONIQUE16

MÉDICAMENTS

Mécanisme d’action pour induction du sommeil

Antagoniste des récepteurs des orexines

Agoniste des récepteurs GABA

Agoniste des récepteurs GABA

Effet anti-ACh et anti-H1

Effet anti-ACh Effet anti-ACh et anti-H1 Agoniste des récepteurs GABA

Posologie usuelle 5 à 10 mg DIE 0,5 à 2 mg DIE 3,75 à 10 mg DIE 12,5 à 100 mg DIE 12,5 à 50 mg DIE 15 à 45 mg DIE 5 à 10 mg DIE

Forme Comprimés Comprimés réguliers et sublinguaux

Indication offi cielle en insom nie chronique

Comprimés Comprimés Comprimés Comprimés réguliers et orodispersibles

Comprimés sublinguaux

Oui Non Oui Non Non Non Oui

Couverture RAMQ Non Oui Non Oui Oui Oui Non

Coût mensuel du traitement (avec honoraires) (approx.)

Trouble respiratoire ou apnée

9,34 $ pour 30 comprimés réguliers de 1 mg

22,74 $ pour 30 compri més de 5 mg

9,66 $ pour 30 comprimés de 50 mg

La prise de lemborexant n’affecte pas la fréquence des événements reliés à l’apnée du sommeil. La monographie mentionne que la prise du lemborexant n’a pas été étudiée chez les patients souffrant de la maladie pulmonaire obstructive chronique.

Populations spéciales

Grossesse et allaitement Aucune donnée n’est disponible chez la femme enceinte. Lors d’études de toxicité chez le rat, on a observé des malformations et de l’embryotoxicité à des doses représentant 143 fois la dose recommandée chez l’humain. Aucune malformation ou embryotoxicité n’a été observée chez le lapin à des doses de 139 fois la dose chez l’humain. La monographie recommande d’établir le rapport risque versus bénéfice avant l’utilisation chez la femme enceinte.

10,92 $ pour 30 comprimés réguliers de 15 mg >

9,48 $ pour 30 comprimés de 25 mg

64,87 $ pour 30 compri més de 5 mg

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LEMBOREXANT LORAZÉPAM ZOPICLONE TRAZODONE QUÉTIAPINE MIRTAZAPINE ZOLPIDEM
67,61 $ pour 30 comprimés de 5 mg

Aucune donnée n’est disponible chez la femme qui allaite. On ne sait pas si le lemborexant est excrété dans le lait humain.

Pédiatrie

Il n’est pas recommandé d’utiliser le lemborexant chez la population de moins de 18 ans. Aucune étude d’innocuité n’a été conduite.

Gériatrie

CONSEILS AUX PATIENTS

Votre médecin vous a prescrit le lemborexant. Ce médicament favorise le sommeil, c’est-à-dire qu’il aide à s’endormir et à rester endormi.

n Le lemborexant bloque les récepteurs des orexines, un signal du cerveau qui stimule l’éveil. Ainsi, en diminuant l’éveil, on favorise le sommeil.

n On recommande de prendre le lemborexant le soir, environ 15 à 20 minutes avant d’aller au lit. Il faut noter que l’effet maximal du lemborexant peut se faire ressentir environ de 1 à 3 heures après la prise. On peut ajuster le moment de la prise du médicament selon la réponse, après quelques jours.

n Les principaux effets indésirables sont la somnolence prolongée diurne, la fatigue et la présence de nasopharyngite. Il est important de prendre le lemborexant seulement si on planifie passer une nuit complète, soit au moins 7 heures de sommeil et 9 heures avant une activité demandant de la vigilance.

n En cas d’effets indésirables rares, mais graves, comme la paralysie du sommeil, la perte de conscience, un changement du comportement ou du raisonnement, ou la présence de somnambulisme avec amnésie, il est recommandé de cesser la prise du lemborexant.

n Il est recommandé d’éviter la prise de nourriture au moment de prendre le lemborexant afin de ne pas retarder son effet pharmacologique.

n Il est recommandé de cesser la prise de tout autre médicament aidant à dormir au moment de commencer la prise de lemborexant. Selon votre état de santé et les recommandations de votre médecin, il pourrait être nécessaire de cesser ou de conserver la prise de certains médicaments des autres classes comme les antidépresseurs, les antipsychotiques, etc.

n Il faut respecter la dose prescrite et, le cas échéant, ne pas dépasser la dose quotidienne de 10 mg.

n Afin de maximiser l’effet de tout médicament aidant à dormir, il est toujours recommandé de suivre une hygiène du sommeil, c’est-à-dire d’aller dormir à la même heure chaque jour, d’éviter toute distraction (p. ex. : exposition à un écran) avant le sommeil, s’assurer d’avoir mangé quelques heures avant de se mettre au lit, etc.

n Le lemborexant n’occasionne pas de risque de dépendance, mais peut porter à un potentiel d’abus. Il faut toujours respecter la posologie prescrite.

n Les effets bénéfiques du lemborexant devraient s’installer après quelques jours de prise et atteindre son maximum après 1 mois d’usage.

n Le lemborexant peut interagir avec certains médicaments en vente libre, qui pourraient modifier ses effets thérapeutiques. Avant de prendre des médicaments en vente libre, il est préférable de discuter avec un pharmacien afin d’évaluer la prise des médicaments et le risque d’interaction médicamenteuse avec le lemborexant.

La population gériatrique a été étudiée comme sous-groupe lors des études SUNRISE-1 et SUNRISE-2 (proportions : SUNRISE-1 : 55 % des patients entre 55 et 65 ans, 45 % des patients de plus de 65 ans; SUNRISE-2 : 72 % des patients de 18 à 65 ans, 22 % entre 65 et 75 ans, 6 % de plus de 75 ans). Les données d’efficacité et d’innocuité étaient semblables pour le lemborexant chez les patients de plus de 65 ans en comparaison aux patients plus jeunes. Néanmoins, on peut supposer raisonnablement que les effets indésirables du lemborexant, comme la somnolence diurne ou les étourdissements, peuvent accroître le risque de chute chez les personnes plus âgées. Cet aspect n’a pas été abordé par les études cliniques SUNRISE-1 et 2.

Interactions médicamenteuses

La majorité des études de métabolisme avec le lemborexant et son métabolite M10 ont été effectuées in vitro5. Le lemborexant subit des interactions surtout avec les inhibiteurs des CYP3A, dont certaines combinaisons ont un effet clinique important et requièrent une attention particulière de la part du pharmacien.

Le tableau IV résume les interactions significatives décrites dans la monographie du lemborexant. La conduite à tenir pour le patient ou le pharmacien est résumée dans la colonne Commentaires.

Posologie et coût de traitement

Le tableau V illustre la posologie et le coût du traitement avec le lemborexant comparativement à certains autres traitements (à titre d’exemple) déjà disponibles sur le marché canadien. Ces coûts se limitent au prix du médicament incluant un honoraire approximatif. La couverture du lemborexant par le régime général d’assurance médicament était en cours d’évaluation par l’INESSS lors de la rédaction de ce texte.

Nous présentons un rappel des conseils à donner aux patients dans l’encadré Conseils aux patientes

48 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie

Conclusion

Le lemborexant bloque les récepteurs des orexines dans plusieurs régions du cerveau dans le but d’inhiber l’état d’éveil et de favoriser le sommeil. Il fait partie d’une nouvelle classe médi camenteuse à être la seule approuvée au Canada en insomnie en plus de 20 ans. Le lembo rexant est une alternative aux médicaments traditionnels à risque d’abus et avec des effets indésirables à long terme problématiques comme les benzodiazépines et les hypnotiques en Z. D’autres membres de la famille sont également commercialisés, notamment le suvorexant (BelsomraMD, discontinué au Canada, mais toujours commercialisé aux États-Unis) et le daridorexant (QuviviqMD aux États-Unis et en attente d’approbation par Santé Canada au moment de la rédaction de ce texte). Le seltorexant est toujours au stade d’étude clinique et semblerait présenter des effets antidépressifs en plus de faciliter le sommeil17

Le lemborexant présente une efficacité et un profil d’innocuité favorables selon des études cliniques, notamment par un sommeil plus rapide, plus long et de meilleure qualité et avec peu d’effets indésirables en comparaison avec un traitement au zolpidem. De plus, les études semblent rassurantes sur le faible risque d’abus associé à la prise de lemborexant. L’usage du lemborexant en pratique clinique déterminera si ses bénéfices sont maintenus à plus long terme et si son profil d’innocuité surpasse celui des benzodiazépines et des hypnotiques en Z. D’autre part, le coût élevé du lemborexant et la couverture limitée par les régimes d’assurance restreignent son accès pour le moment. Certains prescripteurs pourraient conserver son usage en dernier recours. n

Références

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3. Jacobson, LH., Hoyer, D., de Lecea, L., et coll. Hypocretins (orexins): The ultimate translational neuropeptides. J Intern Med. 2022 May;291(5):533-556.

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5. Landry, I., Nakai, K., Ferry, J., et coll. Pharmacokinetics, Pharmacodynamics, and Safety of the Dual Orexin Receptor Antagonist Lemborexant: Findings From Single-Dose and Multiple-Ascending-Dose Phase 1 Studies in Healthy Adults Clinical Pharmacology in Drug Development. 2021, 10(2) 153–165.

6. Rosenberg, R., Murphy, P., Zammit, G., et coll. Comparison of lemborexant with placebo and zolpidem tartrate extended release for the treatment of older adults with insomnia disorder. A Phase 3 randomized clinical trial (SUNRISE 1). JAMA. 2019. 2(12): e1918254. 16 pages. Publié en ligne.

7. Roger, M., Attali, P., Coquelin. JP. Multicenter, double-blind, controlled comparison of zolpidem and triazolam in elderly patients with insomnia. Clin Ther. 1993 Jan-Feb;15(1):127-36.

8. Roth, T., Soubrane, C., Titeux, L., Walsh, JK. Zoladult Study Group. Efficacy and safety of zolpidem-MR: a doubleblind, placebo-controlled study in adults with primary insomnia. Sleep Med. 2006 Aug;7(5):397-406.

9. Kärppä, M., Yardley, J., Pinner, K., et coll. Long-term efficacy and tolerability of lemborexant compared with placebo in adults with insomnia disorder: results from the phase 3 randomized clinical trial SUNRISE 2. Sleep. 2020 Sep 14;43(9)

10. Yardley, J., Kärppä, M., Inoue, Y., et coll. Long-term effectiveness and safety of lemborexant in adults with insomnia disorder: results from a phase 3 randomized clinical trial SUNRISE 2. Sleep Med. 2021 Apr;80:333-342.

11. McElroy, H., O’Leary, B., Adena, M., et coll. Comparative efficacy of lemborexant and other insomnia treatments: a network meta-analysis. J Manag Care Spec Pharm. 2021;27(9):1296-308.

12. Landry, I., Hall, N., Aluri, J., et coll. Effect of alcohol coadministration on the pharmacodynamics, pharmacokinetics, and safety of lemborexant: A randomized, placebo-controlled crossover study. J Psychopharmacol. 2022 Jun;36(6):745-755.

13. Landry, I., Hall, N., Aluri, J., et coll. Abuse Potential of Lemborexant, a Dual Orexin Receptor Antagonist, Compared With Zolpidem and Suvorexant in Recreational Sedative Users. J Clin Psychopharmacol. 2022 JulAug;42(4):365-373.

14. Sublinoxmd, le zolpidem. Monographie canadienne avec renseignements aux patients. Bausch Health Canada. Révisée en mars 2022. Consulté en ligne le 24 août 2022. https://bauschhealth.ca/wp-content/uploads/2022/03/ Sublinox-PM-F-2022-03-17.pdf

15. Dayal, S., Aluri, J., Hall, N., et coll. Effect of hepatic impairment on pharmacokinetics, safety, and tolerability of Lemborexant. Pharmacol Res Perspect. 2021 Apr;9(2):e00758.

16. Liste des médicaments. Régis de l’assurance-maladie du Québec. Révisée le 15 août 2022. Consultée en ligne le 24 août 2022. www.ramq.gouv.qc.ca/fr/media/13791

17. Recourt, K., de Boer, P., Zuiker, R., et coll. The selective orexin-2 antagonist seltorexant (JNJ- 42847922/MIN-202) shows antidepressant and sleep-promoting effects in patients with major depressive disorder. Translational Psychiatry (2019) 9:216.

18. Tannenbaum, C., Martin, P., Tamblyn, R., et coll. Reduction of Inappropriate Benzodiazepine Prescriptions Among Older Adults Through Direct Patient Education. The EMPOWER Cluster Randomized Trial. JAMA Intern Med. 2014;174(6):890-898.

Les références en gras indiquent au lecteur les références principales de l’article, telles que choisies par l’auteur.

Québec Pharmacie novembre – décembre 2022 49

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Donne : 3 h 00 N° d’accréditation : 10865

QUESTIONS DE FORMATION CONTINUE (QUESTIONS 11

À 15)

Le lemborexant (DayvigoMD)

11. À propos du mécanisme d’action du lemborexant, quel énoncé suivant est vrai ?

n Le lemborexant est un agoniste des récepteurs GABA et stimule ainsi le sommeil.

n Le lemborexant agit sur les taux d’acétylcholine et d’histamine permettant de stimuler le sommeil.

n Le lemborexant agit comme adjuvant aux effets pharmacologiques des hypnotiques en Z et doit donc être pris avec le zopiclone pour un meilleur effet thérapeutique.

n Le lemborexant est un inhibiteur des récepteurs OX1R et OX2R des orexines qui sont responsables de maintenir l’état d’éveil.

12. Parmi les énoncés suivants au sujet de l’indication du lemborexant dans la thérapie de l’insomnie chronique, lequel est faux ?

n Le lemborexant est indiqué pour le traitement de l’insomnie chronique avec ou sans comorbidités.

n Le lemborexant doit être utilisé avec prudence chez les patients souffrant de narcolepsie. On recommande de limiter la dose à 5 mg.

n L’usage du lemborexant est favorisé en monothérapie pour l’insomnie chronique afin d’éviter les effets additifs avec les autres hypnotiques.

n On peut commencer un traitement au lemborexant chez les patients dits naïfs ou déjà sous hypnotiques avec sevrage le cas échéant.

13. Au sujet des études cliniques sur le lemborexant, quel énoncé suivant est faux ?

n Dans les études, les effets du lemborexant ont été comparés au placébo et au zolpidem.

n Le lemborexant permet environ 60 minutes de sommeil supplémentaire chez les patients traités, et il raccourcit la période nécessaire au sommeil à moins de 20 minutes; ce qui s’apparente à la durée observée chez les patients ne souffrant pas d’insomnie.

n Le lemborexant a démontré des effets nettement supérieurs au zolpidem dans toutes les issues étudiées.

n Le lemborexant améliore le sommeil chez les patients souffrant de comorbidités, comme la dépression majeure ou l’anxiété.

14. À propos des effets indésirables et des interactions médicamenteuses du lemborexant, quel énoncé parmi les suivants est faux ?

n Le lemborexant occasionne surtout de la somnolence diurne, de la fatigue et un risque de nasopharyngite chez les patients traités.

n Le lemborexant est un médicament à potentiel d’abus.

n Le lemborexant est un inhibiteur puissant du CYP3A4 et du CYP2B6 et toute interaction avec des médicaments métabolisés par ces cytochromes doit être évitée.

n Les anti-H2 et les IPP n’affectent pas l’efficacité et l’innocuité du lemborexant.

n Il est recommandé d’éviter la prise de jus de pamplemousse chez les patients traités au lemborexant.

15. Identifiez le conseil approprié à donner au patient qui commence une thérapie sous lemborexant :

n Le lemborexant doit toujours être pris à jeun puisque la nourriture accélère ses effets de somnolence.

n On devrait combiner la prise de lemborexant avec le millepertuis afin de maximiser l’efficacité du lemborexant et limiter ses effets indésirables.

n La prise d’alcool n’est pas recommandée lors de la prise de lemborexant.

n Le lemborexant peut être pris durant la nuit en cas d’éveil imprévu puisque sa durée d’action est très courte.

50 novembre – décembre 2022 Québec Pharmacie

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À VOS SOINS

Christophe Augé, pharmacien, M. Sc., Ph. D. PLACE AUX QUESTIONS

Sandra Bélanger, B. Pharm. Geneviève Tirman, B. Pharm., diplôme de 2e cycle en pharmacie communautaire À VOTRE SERVICE SANS ORDONNANCE

Alice Collin, B. Pharm, DESS, M. Sc. LES PAGES BLEUES Alice Collin, B. Pharm., DESS, M. Sc. AVEZ-VOUS ENTENDU PARLER DE… Mathieu Tremblay, Pharm. D., Ph. D. INTERVENIR Jean-François Bussières, B. Pharm., M. Sc., MBA

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