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MAGAZINE DES ETUDIANTS DE DEUXIÈME ANNÉE JOURNALISME - IUT DE TOURS
ISSN 0291-4506
Hors série Sésame - spécial MAROC - juillet 2007 - n°14 - 2 euros
FIGUIG
en quête d’avenir
Portraits de femmes traditionnelles ou modernes, elles sont l’âme de l’oasis Chemin des écoliers tous les enfants sont
scolarisés. Un record Frontière les déchirures de l’histoire Portfolio entre ombre
et lumière, balade dans les ruelles des ksour Quand jeunesse se casse peu de loisirs, poids des traditions. Les jeunes
rêvent d’ailleurs Pratique comment y aller, comment s’y loger, comment s’y promener ? Figuig se mérite.
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Oran Tanger Rabat Fes Oujda Casablanca Figuig Marrakech
Edito
Beni Ounif
Bechar
D «Innova» Tours, n° 14 Hors-série Sésame juillet 2007 Etudiants en deuxième année de journalisme, Institut universitaire de technologie de Tours, 29 rue du Pont-volant 37000 Tours Tél. : 02 47 36 75 63 ISSN n°0291-4506
Directeur de la publication : Claudine Ducol Coordination : Hélène Lafarie, Olivier Sanmartin, François Simon. Rédaction, secrétariat de rédaction, maquette et photos : Julien Billy, Romain Brusc, Emilie Cailleau, Lucie Dorothé, Amandine Dudek, Mélanie Le Beller, Laurence Mijoin, Lucie Pehlivanian, Nolwenn Roussier, Caroline Vallois Photo de couverture : Nolwenn Roussier Cartographie : Florence Troin Remerciements : à toute la famille Messaoudi-Duquenne pour son hospitalité et sa disponibilité Imprimé sur papier recyclé par Alinea 36, Châteauroux.
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epuis Oujda, 400 kilomètres de route droite qui file dans le désert caillouteux. Quelques lacets dans la montagne, la route s’arrête, bute sur la frontière. Et l’oasis est là. En pleine lumière. Figuig. Au bout du monde. Mais dans le monde. « Salam Aleikoum … Soyez les bienvenus ! » Paroles d’accueil qui résonnent au détour des ruelles ou sur la place du marché. Pour l’étranger comme pour le natif de l’oasis. A Figuig, on salue comme on sourit. Et l’on sourit tout le temps. Pourtant, la situation de la ville ne se prête guère aux démonstrations de joie. L’eau se fait rare, le désert gagne. Les jeunes, désir d’Occident, caressent l’espoir de partir. Une palmeraie désertée, des ksour en ruine, un patrimoine dégradé. Figuig, une vieille légende tombée dans l’oubli ? Si les Figuiguis baissent les bras, à quoi ressemblera demain l’oasis ? Alors, malgré les obstacles, Figuig se veut bel et bien debout. Fière. A l’heure de la standardisation des cultures, quand traditions riment trop souvent avec folklore, cette perle du sud-est marocain affirme ses particularités. L’atout de Figuig est bien sa solidarité sans faille. Du simple geste amical aux dons de nourriture pour les nomades, là-bas, on offre plus que l’on ne possède. Figuig, c’est avant tout une seule et même famille qui se serre les coudes pour faire face à un destin aride. « Salam Aleikoum … Soyez les bienvenus ! »
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sommaire
FIGUIG, UNE FRONTIÈRE, QUEL HORIZON ?
DU CARREFOUR À L’ENCLAVE Ancien carrefour commercial, Figuig étouffe depuis la fermeture de la frontière qui la sépare de l’Algérie. Retour sur deux siècles d’histoire…p. 11
Une palmeraie perdue dans l’extrême orient marocain. Une palmeraie qui se bat pour sa survie : ressources en eau limitées, émigration... Face aux difficultés, les Figuiguis s’organisent. pp. 4 à 10
KSOUR D’OMBRE ET DE LUMIÈRE Balade dans le dédale des ksour de Figuig, à la découverte des ruelles à sabas et des maisons en terre crue. pp. 15 à18
AMES DE FEMMES Elles représentent les deuxtiers de la population Traditionnelles ou modernes, les femmes incarnent l’esprit de Figuig dans toute sa diversité . pp. 12 à14
IL FAUT BIEN QUE JEUNESSE SE CASSE
MIEUX VAUT PRÉVENIR... Peu de médecins et d’infrastructures hospitalières : la prise en charge sanitaire reste un problème majeur dans la palmeraie. Des démarches préventives permettent d’éviter le pire…p.19
Une ville à l’écart de tout, peu de loisirs, poids des traditions : les jeunes rêvent de prendre le large. Etudier, trouver du travail, se divertir, bref faire et vivre sa vie… L’ émigration est-elle inéluctable? pp. 22-24
LE CHEMIN DES ÉCOLIERS Les espoirs des Figuiguis reposent sur les nouvelles générations. Tous les enfants vont à l’école. Pour rêver et espérer un avenir meilleur… pp.20-21
PRATIQUE Vous venez d’atterrir à Oujda, à 400 km de votre destination, Figuig. Bus, voiture ou taxi : vous y serez (peut-être !) dans six heures ! pp.25 à 27
Figuig
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FIGUIG,vers quels h
Zenaga, l’un des sept ksour de Figuig, émerge d’une forêt de 140 000 palmiers. La ligne de crête délimite la frontière avec l’Algérie.
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s horizons ? Loin de Marrakech et de Casablanca, un autre Maroc. A la frontière algérienne, l’oasis de Figuig survit tant bien que mal, grâce à la solidarité de ses habitants et à l’apport de ses émigrés. Un tourisme maîtrisé, la promotion de l’artisanat et la relance de l’agriculture portent aujourd’hui les espoirs de la population.
A
ux portes du désert, niché au cœur de l’Atlas saharien, Figuig. Une oasis aux confins de l’Est marocain, où s’étendent à perte de vue les palmiers dattiers. Trois kilomètres séparent cette ville de quelque 13 000 âmes de l’Algérie. Ici pas de feu rouge : la charrette tirée par un âne et la bicyclette sont les principaux moyens de locomotion. Aucune goutte de pluie durant l’été depuis sept ans, les relevés pluviométriques dépassent rarement les 130 millimètres annuels. Le climat est aride, l’air sec, la lumière intense sublime HORS SÉRIE
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DOSSIER les ocres des habitations en terre crue. Mais ce décor de carte postale masque une réalité bien moins idyllique. « Les oasis agonisent, s’inquiète Brahim Bahou, chargé de la coopération à la municipalité, 4% des palmiers disparaissent chaque année. » La gestion des ressources en eau est au coeur des préoccupations des agriculteurs. L’oasis fonctionne selon un système traditionnel d’irrigation : les foggaras. Des canaux souterrains creusés à une quinzaine de mètres de profondeur, conduisent l’eau jusqu’à de grands bassins collectifs, il y en a 200 à Figuig. Un réseau complexe de canalisations, les séguias, irriguent les parcelles. La quantité d’eau disponible pour chaque jardin est établie grâce à une méthode séculaire. Aujourd’hui, ce mode de gestion perdure, mais les sources se tarissent. Pluies rares, pompage excessif et consommation domestique épuisent les réserves hydriques. « Chacun a son puits. C’est de là que vient le danger. Il faut centraliser le système d’irrigation », prévient Aziz Ziani, responsable de l’association Acaf (Association de coopération agricole de Figuig). Pour ce spécialiste, la centralisation permettrait un meilleur partage de l’eau et résoudrait les problèmes de salinité. En effet, avec les forages, le sel remonte en surface et stérilise les sols cultivables. UN FLÉAU, LE BAYOUD
La maladie du bayoud affecte les palmiers. Ce champignon se propage par les outils ou l’eau chaude des forages et provoque le dépérissement rapide des arbres (variable de quelques semaines à plusieurs mois). La seule solution envisagée à ce jour consiste à planter cinq pieds pour compenser la perte d’un arbre. Un projet qui consiste à semer des plants cultivés in vitro résistants à la mala6 INNOVA 2007 HORS SÉRIE
die est en cours : l’Etat marocain en produit et en distribue 500 par an à Figuig. Trop peu pour l’Acaf, qui en réclame trois fois plus. Protéger la palmeraie est devenu l’un des principaux enjeux. Loin devant les cultures céréalières et fourragères (blé, orge, luzerne), maraîchères (pommes de terre, courgettes, tomates) et fruitières (amandes, grenades, olives), le palmier procure l’essentiel des ressources pour les agriculteurs, avec 3 600 tonnes de dattes par an. La fierté locale, c’est l’Aziza Bouzid, une variété réputée pour ses qualités gustatives et sa conservation. Face à la fragilité du milieu naturel, le développement de l’agriculture passe par l’extension des surfaces cultivées à l’extérieur de la palmeraie et par l’utilisation de techniques
d’irrigation plus économes (goutteà-goutte). Figuig veut également promouvoir des produits de qualité. Si les ressources en eau suffisent à peine à répondre aux besoins agricoles et domestiques, comment imaginer un avenir touristique à Figuig ? Depuis la fermeture de la frontière en 1994, la ville est un cul-de-sac. Une route unique dessert l’oasis, assurant la liaison avec Bouarfa, le chef-lieu de la province de Figuig, à une centaine de kilomètres. L’aéroport le plus proche est à Oujda, à 360 kilomètres ; seul un service d’autocars relie les deux villes. Pour l’heure, les capacités d’accueil restent limitées : deux hôtels de vingt et vingt-quatre lits, dont l’un au confort sommaire, un camping de quinze emplacements et un système
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Comme tous les mardis matins, des marchands venus de loin, d’Oujda ou de Bouarfa, approvisionnent Figuig.
La répartition de l’eau répond à des règles précises. Chronomètre en main, le sraïfi mesure l’eau qui va vers les bassins collectifs.
LE REVERS DE LA FRONTIÈRE En 1994, la fermeture de la frontière interdit les échanges entre l’Algérie et la province marocaine de l’Oriental. Le commerce parallèle prend alors le relais. Aujourd’hui, la contrebande procure une source de revenu pour ceux qui assurent un trafic quotidien entre les deux pays. Subventionnés en Algérie, essence, gasoil, farine ou lait en poudre sont acheminés vers les
zones frontalières marocaines . Jeans et chaussures empruntent, quant à eux, le chemin inverse. A dos d’âne, la nuit, à travers les pistes montagneuses, les
Depuis son apparition dans les années 60, la maladie du bayoud a détruit plus de 15 millions de palmiers en Algérie et au Maroc.
contrebandiers achètent leur passage d’un pays à l’autre. Une alternative pour l’économie de la région, handicapée par son enclavement et la rupture des échanges avec son voisin algérien.
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La population de Figuig compte de nombreux retraités. Les plus de 60 ans représentent 14% de la population, contre 5% pour le Maroc dans son ensemble. L’agriculture de la palmeraie s’organise sur trois étages : céréales et légumes ; au-dessus, les arbres fruitiers et, pour couronner le tout, les palmiers.
de chambres d’hôtes tout juste naissant. Pour pallier ce manque d’infrastructures, les projets fleurissent. On parle même d’un complexe de 6 000 lits conçu par une société espagnole. Une perspective qui suscite quelques réticences de la part de la municipalité. « J’ai vu Ouarzazate et Marrakech il y a vingt ans, et aujourd’hui. Le tourisme de masse n’a pas que des retombées bénéfi8 INNOVA 2007 HORS SÉRIE
ques au niveau local », soutient Amar Abbou, premier adjoint. Dégradation de l’environnement, déséquilibres sociaux, consommation excessive de l’eau, autant de dérives que la ville cherche à éviter en misant sur les spécificités locales : patrimoine, artisanat, tradition de l’accueil. Plutôt qu’un tourisme débridé, c’est l’idée d’un tourisme durable et raisonné, reposant sur la participation des habi-
tants, qui fait son chemin. Afin de permettre un partage équitable de la manne touristique, l’association montpelliéraine Liens France (Lieux d’initiative et d’échanges nord-sud), en partenariat avec la municipalité, envisage de transformer en chambres d’hôtes une vingtaine de maisons de familles démunies. Liens France forme dans le même temps des jeunes du pays aux métiers du tourisme. Un tour opérateur d’Oujda serait prêt à faire étape dans l’oasis. Mais pour accueillir un car entier, il faudrait doubler les possibilités d’hébergement de l’hôtel Figuig, le plus coquet des deux établissements de la ville. Or, l’argent manque. « Figuig est une ville oubliée du gouvernement. Tant que la frontière sera fermée, il sera
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LE PROJET DE RÉHABILITATION DU QUARTIER JUIF Depuis deux ans, le ksar de Loudaghir, au nord de Figuig, fait l’objet d’attentions particulières. La municipalité s’est rapprochée de l’université Paris 7 Diderot, de l’école d’architecture Paris-Val-deSeine et du Conseil général de Seine-SaintDenis pour lancer un projet de revalorisation de son patrimoine architectural. Dans le cadre de son diplôme d’architecture, Hervé Micaud s’est installé à
Figuig pendant quatre mois, pour y mener une étude sur la réhabilitation du quartier juif, le mellah. Construit aux environs du XIe siècle, ce quartier a été habité jusqu’à la fin des années 50, quand les dernières familles juives sont parties. Le pari consiste à revitaliser le Figuig traditionnel via un quartier « test » pour en répercuter les effets positifs sur l’ensemble du ksar. « Le mellah est un symbole
de la richesse figuiguie. Il illustre la cohabitation qui existait entre les différentes communautés de l’oasis », souligne le jeune Français qui souhaiterait, à terme, ouvrir un musée dans ce ksar. Son travail est une des initiatives qui permettrait de développer un tourisme maîtrisé à Loudaghir, et plus largement à Figuig. L’avancement du projet dépendra des financements .
difficile de développer des activités », explique Mohamed Berriane, géographe et doyen de la faculté de sciences humaines de Rabat. La solution viendra-t-elle des émigrés figuiguis ? Qu’ils vivent à l’étranger, ou qu’ils soient installés dans les grandes villes du Maroc, leur apport est à la fois essentiel et difficilement quantifiable. Les pensions des retraités font vivre de nombreuses familles. De surcroît, les émigrés fournissent une aide décisive dans les domaines de la santé, de l’entretien des ksour et de la scolarisation, en HORS SÉRIE
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dossier soutenant les associations. Financièrement, mais aussi grâce à leurs compétences et à leurs réseaux. « L’oasis ne subsiste que par l’émigration. Mais certains projets individuels ne respectent plus les traditions, ajoute Mohamed Berriane. L’émigré veut parfois montrer les signes de sa réussite en construisant de grandes maisons, dotées d’équipements modernes, souvent incompatibles avec le climat et les ressources en eau de Figuig. » D’autant plus que la population double durant l’été : les premiers touristes sont les émigrés originaires de Figuig. Par ailleurs, certains achètent des terrains, privilégiant la valeur sentimentale au potentiel économique. Cet investissement affectif n’est pas toujours rationnel. Toutefois, des établissements fonctionnent uniquement grâce aux dons de ceux que l’on surnomme les « bienfaiteurs ». Mais la manne se raréfie avec le durcissement des politiques migratoires en Europe : moins d’émigrés, moins de devises pour les familles restées au pays. Construit en 1981 en marge de l’hôpital public, la clinique du
Le tissage est une tradition à Figuig. L’association La femme et l’enfant aide des familles pauvres à travers un projet de développement artisanal.
LES ASSOCIATIONS TISSENT LEUR TOILE Ils l’appellent la twiza (entraide en berbère). A en croire les anciens, cette solidarité serait particulièrement développée à Figuig. C’est au moment de l’indépendance du Maroc, en 1956, que le mouvement associatif figuigui se développe. Lorsque l’Etat se met en place, des carences apparaissent dans de
nombreux domaines. Les habitants prennent alors le relais en se rassemblant au sein d’associations. On en compte aujourd’hui une centaine, œuvrant dans tous les domaines de la vie locale : jeunesse, agriculture, artisanat, éducation, santé ou culture … Parmi elles, l’association Ada
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propose des activités pour les jeunes, du soutien scolaire à la bibliothèque en passant par le sport ou l’accès à internet. Forums thématiques, débats : le local, est devenu le QG des adolescents après leur journée d’école. Ada assure également un programme d’alphabétisation des adultes.
Croissant-Rouge est un exemple de l’implication des Figuiguis qui sont partis. Ici, la construction, les salaires du personnel et les médicaments sont entièrement pris en charge par les émigrés. L’équipement et les effectifs dépendent des fluctuations de l’aide : d’un médecin et cinq infirmières il y a quelques années, l’équipe médicale s’est réduite à deux professionnels. Si le tissu associatif tente de se substituer au rôle de l’Etat, il ne suffira pas à assurer la pérennité de l’oasis. Les collectivités ont eu tendance à diminuer, voire supprimer certaines subventions nécessaires aux associations. Aujourd’hui, Figuig est à l’heure des choix. S’appuyer uniquement sur la solidarité peut conduire au repli sur soi. Mais s’en remettre aux investisseurs extérieurs et abdiquer son pouvoir de décision, c’est prendre un autre risque : perdre son âme. ■
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histoire
Du carrefour à l’enclave
Oubliée du Maroc, prise au piège des rivalités avec l’Algérie, l’oasis, qui fut un lieu de passage tout au long de son histoire, est aujourd’hui un cul-de-sac. Fermée pour la première fois dans les années 60, la frontière cristallise tensions et malentendus entre le Maroc et l’Algérie. Depuis 1994, plus d’échanges officiels entre Figuig et Beni-Ounif.
F
iguig s’est développée à partir du XIe siècle. Carrefour caravanier sur les routes du commerce transsaharien, l’oasis était également une étape pour les pèlerins se rendant à La Mecque. Avec la colonisation, au XIXe siècle, la région devient une zone frontière. En soutenant l’émir Abd El-Kader, qui mène l’insurrection contre la présence française en Algérie dès les années 1830, les habitants de Figuig s’attirent les foudres de la France. Les tensions s’accentuent au début du XXe siècle alors que les Figuiguis contestent l’avancée de l’armée française. En 1903, l’oasis subit un bombardement puis un nouveau tracé de la frontière, lui faisant perdre progressivement ses territoires de l’est, autour du ksar de Beni-Ounif. La construction d’un chemin de fer côté algérien la marginalise par rapport aux grandes voies de circulation. La domination française devient inéluctable, elle est officialisée en 1912 avec la signature du protectorat. Loin de s’apaiser avec les indépendances du Maroc (1956) et de l’Algérie (1962), la situation se
dégrade pour Figuig, tandis que la rivalité entre les deux pays s’accentue. Un conflit éclate dès 1963 avec la guerre des Sables qui a pour objet le tracé de la frontière saharienne. Figuig se retrouve prise au piège, elle est le théâtre des principaux combats. AMPUTÉE DE SES TERRES
La fermeture de la frontière qui s’ensuit bouleverse une nouvelle fois l’organisation socio-économique de l’oasis. Les paysans sont obligés d’obtenir des laissez-passer pour cultiver leurs terres du côté algérien. La rupture est totale au milieu des années 1970 avec le déclenchement du conflit du Sahara occidental. L’Algérie soutient alors les velléités d’indépendance des Saharaouis sur l’ancienne colonie espagnole, annexée par le Maroc. Figuig se retrouve totalement enclavée tandis que 45 000 Marocains sont expulsés d’Algérie. Avec l’apaisement des relations diplomatiques et les perspectives d’intégration régionale (création de l’Union du Maghreb arabe en 1989),
la frontière est rouverte en 1986. Figuig redevient un lieu de passage. Un attentat perpétré à Marrakech en 1994 met fin à l’accalmie. Le Maroc accuse les services secrets de son voisin, expulse ses ressortissants et impose des visas. En représailles, l’Algérie décide de fermer à nouveau la frontière. Depuis, hormis la contrebande, les liens sont rompus entre Figuig et l’Algérie. L’oasis se retrouve amputée de ses terres, des familles sont séparées. Une situation qui hypothèque lourdement les possibilités de développement d’une région historiquement vouée au commerce et aux échanges. La frontière reste un enjeu central et l’objet de revendications. « Notre terre et notre terroir se trouvent dans un autre pays », souligne Amar Abbou, premier adjoint au maire. Dans le cadre de la détente politique amorcée au Maroc au début des années 2000, l’association Equité et réparations réclame des indemnités pour la perte des terres (elle estime à 130 000 le nombre de palmiers dattiers perdus) et demande la renégociation du tracé de la frontière. ■ HORS SÉRIE
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portraits
Ames de femmes
AÏCHA, Cœur du foyer, pas toujours maîtresses de leur destin, les femmes de Figuig représentent les deux tiers de la population. Leur discrétion les rend presque insaisissables. Rencontrées au détour d’une ruelle ou sur la place du marché, elles se confient. Parfois avec crainte, mais toujours avec le sourire. 12 INNOVA 2007 HORS SÉRIE
morte, trop tôt. Aujourd’hui, les rôles sont inversés. Sa famille éprouve beaucoup de respect à son égard et la visite régulièrement. Obligée de rester au lit parce que ses pieds ne la portent plus, la très vieille femme prie toute la journée. Son visage porte les marques du temps. Des rides profondes expriment cette longue vie, heureuse et pleine de dévotion. Une vie bouleversée par la présence française au Maroc. Aïcha se souvient de la peur qu’elle a ressentie lors des bombardements de Figuig en 1903. Dès qu’elle entendait des tirs, elle rentrait se cacher. Les mains serrées l’une contre l’autre, elle écoute ses proches raconter des anecdotes sur leur passé commun. Le regard apaisé et bienveillant, Aïcha garde dans son cœur toutes ces années de bonheur et espère en vivre encore. Inch Allah.
inch Allah
U
ne toute petite femme émerge d’un amas de couvertures. Péniblement, elle s’assoit en tailleur. Aïcha, 110 ans, ouvre ses grands yeux noirs et commence à raconter son enfance... Avec ses frères, elle emmène paître les moutons, de l’aube à midi. Pour déjeuner, ils mangent des dattes et boivent du lait. L’après-midi, elle joue. Mariée à 13 ans à un homme choisi par ses parents, elle devient mère de deux filles. Analphabète, elle ne sait que tisser. De sa voix fluette, Aïcha dit être fière d’avoir élevé seule ses trois petites-filles quand leur mère est
Naïma, à gauche, secrétaire de l’association, soutient les femmes dans leur quotidien
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HABIBA,
tisser pour survivre
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ssise par terre dans le patio de sa maison, Habiba tisse un tapis. Tout près d’elle, sa mère peigne la laine et la roule contre son tibia. Le tissage, « ennuyeux et fatigant », est la seule activité qui lui assure une rémunération. Cette femme seule de 42 ans raconte « la vie très simple » qu’elle a toujours menée dans le quartier de Zenaga. Une vie qui ne l’empêche ni de sourire ni de plaisanter. Mariée par sa mère, juste avant sa majorité, à un homme de dix ans son aîné, elle divorce une année plus tard. Habiba ne l’aimait pas. Pour son unique fils, elle veut la plus grande liberté. Elle lui paie des études de géographie à l’université d’Oujda pour qu’il devienne professeur. « Bien sûr, les 150 dirhams que je gagne par tapis ne suffisent pas, alors mon frère m’aide un peu. » Depuis la mort de son père, elle tisse pour éviter la misère. La journée, elle doit aussi aller au marché acheter quelques légumes, les cuisiner, s’occuper de sa maison, de sa mère… C’est pour cela qu’elle met une dizaine de jours à réaliser un tapis. Malgré les difficultés, sous son voile noir, elle ne laisse paraître que sa joie de vivre. Toujours optimiste, elle n’hésite pas à parler du jour où sa vie changera. Le premier de ses souhaits est de se remarier. « J’attends l'homme qui passera par hasard et deviendra mon mari ! »
QUAND LES MENTALITÉS CHANGENT... Aider les femmes. Rompre avec la monotonie de leur vie.Valoriser leur savoir-faire lors d’expositions, et pourquoi pas, envisager pour elles une activité salariée. L’association pour la femme et l’enfant a de vraies ambitions pour ses 160 membres. Agir dans tous les domaines : économique, social, culturel, sanitaire… « Les ateliers,les réunions, sont aussi le moyen de faire sortir les femmes de chez elles et de faire évoluer les mentalités », explique Naïma, secrétaire de l’association.
Il y a sept ans, la première réunion a bousculé les habitudes. Les toutes nouvelles adhérentes avaient honte de se rassembler dans le petit local d’exposition sur la place principale, sous le regard des hommes assis au café tout proche.Aujourd’hui,la seule association de la ville dont le bureau est exclusivement féminin a prouvé son efficacité et réalise, peu à peu, toutes ses promesses. L’opinion des hommes a évolué. S’ils n’avaient pas reconnu les bénéfices apportés par l’association, celle-ci
n’existerait peut-être plus. « Le changement a été lent.Les hommes craignaient que cette nouveauté ne crée des problèmes au sein de leur famille », raconte Naïma. Le défi actuel : la valorisation du patrimoine. En mai, Fouad Lahbib, chercheur à l’Institut royal de la culture amazighe (berbère) de Rabat, a formé les tisseuses à la création de tapis typiques du ksar de Zenaga.Un atelier de cinq jours seulement,mais qui doit aboutir à un projet plus ambitieux. Fatima, la présidente de
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LATIFA,
une vie sans choix
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ans la palmeraie, au détour d’une rigole, un lavoir improvisé. Accroupie dans la mousse, avec deux de ses filles, Latifa fait sa lessive. « Je rêve d’une machine à laver », avoue la mère de famille avec un grand sourire. Tous les jours, elle apporte sa brouette de linge sale pour laver les vêtements usés de son mari et de ses neuf enfants. En 1990, cette femme a quitté Figuig pour suivre son époux dans sa quête de travail. « Au Liban, la vie était plus agréable. L’alimentation moins chère, l’eau et l’électricité gratuites, les hôpitaux toujours ouverts…» Une époque heureuse qui s’est achevée au bout de neuf ans. Elle regrette d’être revenue dans l’oasis. « C’est mon mari qui a voulu rentrer. Il voulait élever nos enfants ici pour qu’ils apprennent l’arabe et le français. » Rinçant les petits pantalons de ses chérubins, Latifa raconte qu’elle n’est jamais allée à l’école. Elle a seulement appris le tricot. En scolarisant tous ses enfants, elle espère pour eux un avenir meilleur.
LEILA,
désir de liberté
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es yeux noirs soulignés de khôl, Leila circule sans voile dans les rues de Figuig. Dans cette petite oasis, c’est presque une rebelle. « Je veux me sentir libre », explique-t-elle. Fonctionnaire, elle vit avec sa mère et ses soeurs dans une belle maison de Figuig. À l’évocation de sa situation actuelle, son visage empreint de douceur
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l’association, veut à moyen terme proposer une formation continue de tissage. Elle souhaite créer une coopérative, de façon à mettre en commun le matériel et rassembler les femmes aujourd’hui isolées. « Il faut poursuivre sur notre lancée. » Une trentaine de femmes recréent des motifs traditionnels,oubliés depuis trois générations au profit de ceux des tapis bon marché d’Orient. Elles dessinent, tissent et colorent avec des pigments végétaux. Elles espèrent ainsi s’inscrire dans une logique de commerce équitable, grâce à la vente de « vrais » tapis traditionnels.
se crispe. Ses mots sont virulents. « Ici, tu ne peux pas mettre ta djellaba sans un pull en dessous. Tu ne peux pas aller au café. Tu ne peux pas avoir de relations avec les garçons. » Malgré tout, Leila parle aux hommes dans la rue, porte sa djellaba sans pull quand il fait chaud, mais la resserre au cou quand elle croise quelqu’un. Sans cesse, l’image qu’elle renvoie l’obsède. Déchirée entre son désir de liberté et le poids de la tradition, son existence est une contradiction perpétuelle. Leila rêve de partir. Changer sa vie. L’été, quand les femmes émigrées reviennent, son envie d’ailleurs s’accentue. Comme une jeune fille qui tombe amoureuse, elle évoque sa rencontre avec un Français sur internet. Ils voudraient se voir, en vrai, mais Leila hésite. Sa famille n’acceptera jamais. Figuiguienne de naissance, elle a été fiancée plusieurs fois par sa mère. Elle a refusé d’épouser ces hommes : le mariage, c’est par amour. Sa vie de femme à Figuig contraste avec son envie. A presque 40 ans, elle est heureuse, mais espère, un jour, pouvoir sourire sans contrainte. Ailleurs. ■
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Ksour d’ombre et de lumière Un dédale de passages couverts, les ruelles à sabas : pour l’étranger, les ksour traditionnels de Figuig, en terre crue, sont un labyrinthe obscur où seuls quelques puits de lumière permettent de se repérer. Ce maillage organise la circulation à l’intérieur du quartier. Les impasses mènent aux maisons dont la porte seule révèle l’existence. HORS SÉRIE
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Pour préserver l’intimité familiale, les maisons n’ont pas de fenêtres sur les passages. Seule la pièce réservée aux invités (tanesrit) dont l’accès peut se faire par un escalier indépendant ouvre sur l’extérieur.Le patio (saray), est le coeur de la maison. C’est un puits de lumière, un espace de vie, de détente et d’accueil des invités pendant les fêtes, de jeu pour les enfants… Les différentes pièces de la maison s’organisent tout autour. Sur la terrasse, une galerie couverte orientée au sud abrite, au fil des saisons, les activités: le filage de la laine, le tissage, le séchage
des dattes… Ces terrasses, après les murs aveugles des ruelles obscures, s’offrent comme une récompense. Elles ouvrent sur l’horizon, le ciel et la lumière. Les soirs de chaleur, la 16 INNOVA 2007 HORS SÉRIE
famille peut y dormir. Comme elles communiquent entre elles, une vie sociale s’y organise. Aux époques de résistance, elles permettaient aux opposants d’échapper aux forces de représsion.
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Les briques (adobes) de terre crue, faites d’argile et d’eau, sont séchées au soleil. Un matériau adapté au climat désertique
des maisons sont encore habitées. Mais pour combien de temps ? Le savoir-faire se perd. Une ONG italienne (Africa 70) a formé des jeunes aux techniques de construction traditionnelles. Des projets de réhabilitation, de tourisme solidaire avec des maisons d’hôte existent. Mais l’argent du développement manque cruellement.
puisqu’il garde la fraîcheur l’été et la chaleur l’hiver. Les plafonds sont faits de troncs et d’écailles de palmier (kaernafs) ou de branches de laurier, suivant la richesse des habitants. Zenaga, dont une des portes d’entrée vient d’être restaurée, est le ksar le plus peuplé de l’oasis. 80% HORS SÉRIE
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portfolio
Au détour des ruelles à sabas, quelques arcades élégantes surprennent : c’est la jema’a, désignant à la fois l’assemblée des anciens qui prenaient les décisions politiques du ksar et le lieu où ils se réunissaient. Le ksar s’ouvre par des chemins bordés de murs en terre crue sur la palmeraie. Dans l’espace ainsi retrouvé, la vie collective s’organise : rue commerçante, services publics qui portent encore
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les traces de la colonisation française, lieux sacrés comme les tombes de marabouts (saints). La taille et l’architecture du mausolée varient en fonction de la popularité du Saint. La renommée de Sidi Malak, dont le mausolée est seulement peint, ne doit guère aller au delà des murs du ksar de Loudaghir…
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SANTÉ
Mieux vaut prévenir... Les médicaments manquent, le matériel est obsolète. Mais l’état sanitaire de la population figuiguie est satisfaisant. Grâce à la prévention. Les maladies parasitaires et les cancers sont les deux bêtes noires du docteur Abdelhak. « Manque d’hygiène alimentaire », diagnostique-til. En poste à la clinique du CroissantRouge depuis 26 ans, ce médecin généraliste a assisté à la disparition du trachome (forme de conjonctivite pouvant entraîner la cécité) et au recul de la tuberculose. Il relève une amélioration de l’état sanitaire de la population. Figuig affiche aujourd’hui une espérance de vie de 70 ans, supérieure à la moyenne nationale. La crise économique cache une conséquence positive : pas de pollution industrielle, ni d’accidents du travail dans la région. Menées par l’Etat marocain, les campagnes de prévention (ophtalmologie et hygiène dentaire) ont porté leurs fruits. Une action renforcée par le soutien des émigrés et l’aide des partenaires étrangers. En 2005, la ville de Stains (Seine-Saint-Denis) offrait un cabinet dentaire au Croissant-Rouge. Rudimentaire mais fonctionnel. Le dentiste ne consulte que deux fois par semaine. RECOURS AUX SOINS TRADITIONNELS
Un exemple symptomatique du système de santé précaire de Figuig. Laissée pour compte, la ville, qui recense six généralistes, couvre ses besoins de santé grâce aux aides des associations et des émigrés. « Nous manquons de tous les médicaments, de l’aspirine jusqu’aux médicaments d’urgence », confie le docteur Abdelhak. Il existe un hôpital de 120 lits à Figuig. Pas de spécialiste, qua-
L’hôpital public de Figuig compte quatre généralistes mais aucun spécialiste. A la clinique du Croissant-Rouge, le docteur Abdelhak est, lui, l’unique médecin en poste .
tre médecins s’occupent des cas bénins. L’établissement le plus proche, équipé pour des opérations complexes, n’est distant que de sept kilomètres. Seul problème : il est situé à Beni-Ounif, en Algérie. Depuis la fermeture de la frontière, impossible d’y accéder. L’hôpital de Bouarfa, à une centaine de kilomètres, a pris le relais. Pas de transport en hélicoptère. Le trajet s’effectue à bord de l’une des six ambulances offertes par la Belgique, la France, le Japon et le Croissant-Rouge. De plus, pas de personnel médical pour accompagner les accouchements. Des assistantes sont recrutées dans la famille ou le voisinage. Le suivi des nourrissons est assuré par la clinique. Beaucoup d’habitants de Figuig s’en remettent aux médecines tradition-
nelles. En cas de crise d’épilepsie, priorité aux exorcistes. L’hôpital est le dernier recours si les rebouteux locaux n’ont pas réussi à calmer la douleur. « Un ancien commerçant s’est reconverti en spécialiste des plantes. Il a fait fortune », raconte le docteur Abdelhak, qui s’avoue avec regret impuissant face aux croyances ancestrales. Si l’on peut parfois soigner par les plantes, attention aussi à l’intoxication. ■ HORS SÉRIE
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éducation
Chemin des écoliers Les petits Figuiguis sont bien lotis. Leur ville a le taux de scolarisation le plus élevé du Maroc. Il avoisine les 100%. Dès 3 ans, tous occupent les bancs de l’école. Reportage dans la classe de maternelle An-Nasr à Zenaga.
«
S
alam Aleikoum ! ». Les voix des enfants résonnent dans la classe. Il est 8 heures, les petits de maternelle chantent pour accueillir leur maîtresse. Dans cette ancienne habitation, l’école a pris ses quartiers. Les élèves de 3 à 5 ans s’accomodent des murs gris et du sol poussiéreux. Ils sont 40, assis derrière leurs pupitres. Face à eux, un tableau décrépi. Rien dans les casiers. Des cartons de lessive en guise de guirlande pendent du plafond. Quelques vieux Lego traînent dans des fonds de bidons. Au milieu de ce décor sommaire, la maîtresse, Karima, commence la leçon. Au programme ce matin, écriture. Chacun reproduit sur son ardoise, plus ou moins soigneusement, la lettre arabe dessinée au tableau. L’institutrice passe dans les rangs pour vérifier le 20 INNOVA 2007 HORS SÉRIE
travail. Blotti dans un coin, un enfant trisomique semble un peu perdu, ne sachant que faire de sa craie. La maîtresse ne peut lui accorder plus de temps. Les plus grands passent en premier : ils affronteront le CP l’an prochain. Ce sont les seuls à avoir leur propre manuel. Dans le fond, deux élèves finissent leur nuit, pendant que les filles du premier rang s’agitent. Pour autant, Karima ne perd pas patience. Sous son voile noir et blanc, elle arbore un sourire permanent. UNE BONNE RÉPUTATION
Mais cette passionnée sait aussi être stricte quand il le faut. Sans hausser la voix, juste avec un regard qui force le respect. C’est ce comportement qui lui vaut d’avoir autant d’élèves dans sa classe. Les parents du quartier ont donné leur accord pour son affectation, comme pour chaque nouvelle maîtresse. Ce sont également eux qui la payent, grâce aux cotisations données, chaque année, pour la maternelle. L’institutrice, comme la plupart de ses consoeurs de Figuig, n’est pas mariée et n’a pas d’enfants. Karima a remplacé
L’association Amicale coopération Figuig a équipé cinq écoles maternelles depuis 1995. Sans elle, les enfants seraient encore assis à même le sol, sur des tapis.
une amie enseignante qui vient de se fiancer. Le mariage ? Elle a le temps d’y penser. C’est l’heure de la récré. Tous les bambins reposent leur ardoise, pressés de rejoindre leur terrain de jeux : la terrasse exiguë de l’ancienne bâtisse. ■
DANS LE DÉSERT, “ QUA ND
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éducation
DES SOUS POUR LES BOUTS D’CHOU Questions à Mohammed Hammou, président de la Caisse des écoles publiques. Les Caisses des écoles publiques existent depuis 1958 au Maroc. Comment a évolué celle de Figuig ? « Le ministère a encouragé la création de ces Caisses pour aider les écoles primaires. Les moyens n’étaient pas suffisants, beaucoup ont donc disparu. Celle de Figuig a survécu grâce à l’investissement des habitants. Ils financent notre budget à 60 %. Aujourd’hui, la caisse contribue à l’éducation des 500 enfants des quatre écoles primaires de Zenaga. » 70 % de votre budget est consacré à l’achat de fournitures scolaires. Quelles sont vos autres actions ? « Nous proposons du sport, du théâtre et des randonnées. En juin, nous recensons les besoins des enfants pour la rentrée. Nous avons organisé un forum en mars pour faire un état des lieux. Les parents ont pris conscience des
QUA ND ON VEUT ON PEUT ” Un bloc de béton rose au milieu des sables. Sur les murs, des dessins aux couleurs vives. Pour le rejoindre, les enfants de nomades marchent près de deux heures. C’est leur école, située à plusieurs kilomètres du premier ksar de Figuig. L’école du désert. A 7 ans, c’est la première fois que les enfants tiennent un stylo. Chez eux, ils devront faire leurs devoirs sans électricité et par terre. Ikram travaille à l’école du désert depuis 5 ans. C’est son premier poste d’institutrice. « Je n’ai pas choisi
d’enseigner ici, mais le sourire des enfants est la plus belle des récompenses. Mon travail est valorisé », déclare-t-elle timidement. Et pour cause. Les bédouins sont, pour la plupart, analphabètes et s’intéressent peu à la scolarisation de leurs enfants. Pauvres, ils n’ont souvent pas les moyens d’acheter les fournitures. Ikram ne voit quasiment jamais ces parents, même si elle les aide quand elle peut. Des personnes, attachées à l’éducation des nomades, participent également en donnant des vêtements.
problèmes liés à l’éducation en primaire. Le but est aussi d’améliorer la qualité de notre service, en nous équipant par exemple d’ordinateurs. » Vous aidez les écoles primaires, qu’en est-il des maternelles ? « Elles ont un statut particulier. Elles ne dépendent pas de l’Etat, les parents d’élèves s’en occupent. L’association Amicale coopération Figuig les a équipées en matériel en 1995. Depuis elle s’investit moins. Les écoles maternelles sont une spécificité de Figuig. Tous les enfants y sont scolarisés et ce sont les pépinières des écoles primaires. »
Pour la pharmacie, il faudra en revanche attendre un peu. « Si un enfant se blesse, il n’y a rien à faire. Et l’hôpital est trop loin », déplore Ikram. Mais il en faudrait plus pour décourager les petits nomades. Ils aiment venir dans leur classe aux murs jaunes. Le travail y est moins dur qu’à la maison. « Ils sont attirés par le repas de midi », affirme la jeune institutrice en souriant. Manger à sa faim et avoir l’espoir de ne pas mener la même vie que ses parents est plus fort que tout. « Quand on veut, on peut », lit-on sur le mur de l’école. HORS SÉRIE
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enquête
A Figuig, pas de cinéma ni de discothèque. Difficile pour un jeune de fuir la routine. Filles et garçons tentent de s’évader chacun à leur manière. Avec en tête, toujours la même question : partir ou rester ? 22 INNOVA 2007 HORS SÉRIE
Il faut bien que jeunesse se casse!
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enquête Entre garçons et filles, une barrière invisible. Alors que les premiers restent en bande dans les locaux de l’association Ada, les secondes restent à l’écart, sous le poids des traditions familiales.
É
cole, asso, dodo. Tel est le quotidien de Mohamed, jeune Figuigui de 23 ans. Chaque jour, c’est la même rengaine. Levé à 6 h 30, l’étudiant en informatique enfile son bas de jogging, attrape son blouson en jean et saute dans ses baskets. Le voilà prêt à affronter ses huit heures de cours. Ensuite, direction le local de l’association Ada (1), situé à quelques centaines de mètres de son établissement. Un véritable QG où il retrouve des amis pour discuter. Plutôt introverti, le jeune homme
y a trouvé sa place. Ce passionné d’ordinateur peut alors s’évader de cette routine qu’il subit depuis trop longtemps. Le sentiment de Mohamed, tous les jeunes de l’oasis le partagent. « Il n’y a rien à faire ici », résume-t-il. Hormis l’école, la bibliothèque et l’association, le seul lieu de rencontre des jeunes reste finalement la rue. Quand ils n’errent pas les mains dans les poches, ils font du vélo ou restent assis à converser durant des heures, parfois accompagnés du son d’une guitare. A Figuig, pas de cinéma, pas de théâtre, et encore moins de discothèque. La première est à environ 400 kilomètres. 6 000 EUROS POUR ÉMIGRER
Alors, ils passent leur temps libre à surfer sur le Net. Figuig compte de nombreux cybercafés, donnant sur la rue au rez-de-chaussée des maisons. Quelques ordinateurs séparés par de simples rideaux, pour « chatter » de longues heures durant à l’abri des regards indiscrets. Les autres loisirs se comptent sur les doigts de la main : baby-foot, volley, football. Et mieux vaut être motivé au vu des
conditions de jeux. Terrain vague pour le foot, bétonné pour le volley. Au final, peu de jeunes s’entraînent régulièrement. Un sur vingt seulement s’adonne à un sport de ballon. Tous des hommes. Pour les jeunes filles, la palette d’activités est encore plus restreinte. « On ne peut pas faire de sport en dehors des cours. C’est réservé aux garçons », regrette Fatima, pourtant très dynamique. La jeune fille au caractère bien trempé s’habille d’un survêtement et ajuste soigneusement son voile. Pour cette pétillante lycéenne, pas question non plus de sortir trop tard. Sa famille le lui interdit. Rachida, plus timide, confirme : « Quand je suis rentrée à 21 heures d’un forum organisé par l’association, mes parents n’ont pas apprécié. » Dans un contexte où le poids de la famille reste important, les adolescentes sont tiraillées entre tradition et modernité. Sara, tout de rose vêtue, est déjà en quête de liberté. A peine majeure, cette fan de Diam’s s’interroge : « Comment faire pour réaliser notre rêve tout en respectant la tradition ? » Kribii Abdslen, HORS SÉRIE
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enquête Kribii (ci-dessous, à droite) a voyagé dans les grandes villes marocaines avant de s’installer en France en 2000. Samir (ci-contre), rêve d’un destin similaire : partir étudier en Belgique.
31 ans, vit désormais en France, à Poitiers. Aujourd’hui restaurateur, il se souvient de son adolescence passée à Figuig : « Si une fille a un copain, ses parents ne doivent pas le savoir. S’ils se promènent ensemble, ça donne une mauvaise image de la fille. » On pourrait alors penser que le mariage est la solution. Mais encore faudrait-il que l’union soit synonyme de liberté. Ce qui n’a rien d’évident, les mariages arrangés étant encore de mise. « Mes parents m’ont présentée à un étranger. J’ai fugué quatre jours. Ils ont réalisé que je n’avais aucune envie de passer ma vie à ses côtés », confie une Sara volubile. Difficile dans ces conditions de s’épanouir. Leur espace de liberté, les adolescentes le trouvent au sein des associations. « Je peux y exprimer mon point de vue et parler sans contraintes », murmure Rachida, encore peu sûre d’elle. En attendant, peut-être, de pouvoir le faire en d’autres lieux, et pourquoi pas en France. Comme une envie d’évasion, d’un ailleurs prometteur. Certains, comme Mohamed, pensent même à l’immigration illégale : « On me demandait 60 000 dirhams (environ 6 000 euros), mais j’ai refusé à cause des 24 INNOVA 2007 HORS SÉRIE
conditions de voyage. Il fallait passer par la Libye et l’Italie pour rejoindre la France. Je saisirai la prochaine occasion, même si le prix est plus élevé. » « ILS M’EN METTENT PLEIN LA VUE »
Chaque été, le retour de ses proches émigrés en France nourrit l’espoir de fouler un jour le sol de ce pays. « Ils m’en mettent plein la vue, avec leur voiture, leurs vêtements et leur portable dernier cri », reproche Mohammed, envieux. Mais tous les jeunes ne sont pas aussi déterminés. L’attachement à leur terre, à leur famille est le plus fort. « Vivre loin d’ici me fait peur. Je ne veux pas être seule et séparée de mes proches », appréhende Fatima. Pourtant, cette brillante élève devra quitter Figuig l’année prochaine. Les sept années
de médecine qui l’attendent se passeront à Rabat. En effet, après le lycée, il n’existe qu’un seul établissement supérieur dans la ville, une école d’informatique. Les jeunes sont donc obligés d’aller à Oujda ou ailleurs. S’il y avait ce qu’il fallait à Figuig, Fatima resterait volontiers : « Si nous n’étions pas sous pression de la société, je ne partirais pas. » Et une fois ailleurs, les jeunes tournentils définitivement la page ? « Quand les jeunes Figuiguis s’en vont, c’est avec l’espoir de revenir » soupire Kribii, nostalgique de son oasis natale. Un jour peut-être… Luimême songe à retrouver Figuig, son « petit paradis ».■ (1) Association possédant une salle informatique et proposant des activités parascolaires.
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Se documenter Trois pages dans le Guide du Routard Maroc pour Figuig. Et ce commentaire alléchant : « Une chance pour le voyageur qui découvre ici une oasis authentique. »
S’y rendre « Comme les arbres qui ont des feuillages différents, les villes ont chacune leur caractère ».
Se loger
PROVERBE ARABE
Pour vous loger à Figuig, deux solutions.
L’hôtel Figuig hôtel, qui compte dix chambres avec, chacune, salle d’eau et WC, est ouvert toute l’année. R. N. Figuig Centre (près de la municipalité) Tél. : (0212) 36 89 93 09 figuig_hotel@yahoo.fr
Tous les chemins ne mènent pas à Figuig. Il faut d’abord se rendre à Oujda, au nord-est du Maroc. En avion, vol direct le samedi depuis l’aéroport de RoissyCharles-de-Gaulle. Ensuite, il vous faut prendre le bus qui se rend à Figuig. Quelques compagnies (CTM, MidNord et Champion) proposent des navettes dans la journée pour 90 dirhams. Attention, pour parcourir les quelque 400 km qui séparent les deux villes comptez six bonnes heures de route.
Tarifs : chambre simple : 120 à 200 DH, chambre double : 190 à 320 DH, place supplémentaire : 60 DH Possibilité de camping et de caravaning dans l’enceinte même de l’hôtel.
Les chambres d’hôtes à l’Auberge Oasis Figuig. Trois chambres double (douche et WC privatifs) sont proposées pour 300 DH par jour en pension complète. Rue Jemaa dans le ksar de Zenaga. Contacter Smail Harkass. Tél. : (00212) 36 89 92 62, ou (00212) 68 26 38 20. harkass-smail@hotmail.fr
Se déplacer
Le meilleur moyen de locomotion sera vos pieds.Prévoyez de bonnes chaussures en conséquence.Le moyen de transport privilégié des Figuiguis est le vélo. Il n’existe pas de compagnies de location de cycles officielles, mais vous pouvez toujours tenter d’en emprunter un à quelqu’un. HORS SÉRIE
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CAFÉS ET RESTAURANT Le seul restaurant de Figuig est celui de l’hôtel. Sa terrasse fait office de café et propose jus de fruits frais, sodas, cafés ou thés à la menthe avec une vue de Zenaga depuis le jorf (escarpement rocheux). Mais les meilleurs endroits pour vous mêler à la population locale sont les sept cafés que compte Figuig.
À VOIR ◆
Marchés
BANQUES
Dans le quartier administratif et dans la rue principale de Zenaga, se trouvent deux agences de la Banque populaire et une Poste, avec distributeurs et change. 26 INNOVA 2007 HORS SÉRIE
Sur la place principale de Zenaga, le mardi dès 5h du matin puis à la municipalité de midi à 18h, vous y trouverez produits locaux, épices, dattes, fruits et légumes de saison. On y fait aussi des affaires : quincaillerie, produits de beauté, chaussures…
Le charme de Figuig réside dans son architecture en terre crue, liée à son histoire. Pour l’apprécier pleinement, promenezvous dans le dédale de rues à sabas (rues couvertes), ou perdez-vous dans les méandres de la palmeraie. Et, pour les contempler d’en haut, le moindre balcon ou point de vue fera l’affaire. ◆ Vous voulez un guide? Demandez Mohammed Slimani à l’hôtel. Il vous fera découvrir Figuig, ses minarets, peintures rupestres, etc., pour 200 DH la journée. ◆ Un site préhistorique se trouve dans la région d’El Haiitima, à 8 km de Figuig. Vous y trouverez un ensemble de tumulus (tombes)et d’objets de pierre. ◆ On trouve des articles de l’artisanat local, sur la place principale de Zenaga, dans les locaux de l’association pour la femme et l’enfant. Et dans le centre artisanal situé dans le quartier administratif.
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figuig pratique
L’Amazigh Tiddatt, jeu d’échec local
L’Exil
Dans une oasis lointaine, très lointaine, existe un jeu : l’Amazigh Tiddatt, ou guerre de l’eau. C’est une sorte de jeu d’échec propre à la région de l’Atlas saharien. Il n’est joué que par les hommes, jeunes comme plus âgés. L’échiquier est composé de vingt-cinq cases, qui pour la plupart ont des noms spécifiques. Le but du jeu étant de le traverser pour aller boire près de la source ennemie, à l’angle opposé, avant de se rendre au terminus, dans un des angles de l’échiquier. Le tout, par une série de déplacements, tous plus ou moins complexes.
L’exilé, oh ! maman l’exilé, dans les pays lointains devient orphelin Ni parents ni ami(e)s, n’a que Dieu comme tuteur L’espace d’une vie oubliée ne s’accélère pas, et, l’univers oublié ne se hâte pas Une fois que le Maroc se calmera, nous renoncerons à l’exil à contre-cœur Et même si l’amertume s’instaure entre ami(e)s, elle sera meilleure que le miel qui s’échange entre des inconnus. Je préfère ma pauvreté dans mon pays, que d’être riche et exilé MEKKI ATHMANE Né dans les années 1950 à Figuig, le poète Mekki Athmane vit à présent en France. Ses poèmes, particulièrement appréciés des femmes, abordent des thèmes aussi divers que l’histoire, la politique ou la société. La plupart évoquent Figuig. Ils sont aujourd’hui appris par les enfants dans les écoles de l’oasis.
Le trid (recette de base)
Temps de préparation : 1h Pour 4 à 5 personnes. Ingrédients : 500 g de semoule fine, 500 g de farine, 1 cuillère à café rase de sel, eau, huile Tamisez la semoule et la farine dans un grand plateau. Faites un puits et versez un demi-verre d’eau, mélangez le tout. Travaillez énergiquement la pâte en l’aspergeant de temps en
temps d’eau jusqu’à ce qu’elle devienne assez molle, mais toujours élastique. Recouvrez d’une serviette et laissez reposer 5 minutes. Huilez vos paumes pour que la pâte glisse facilement. Formez des boules de la grosseur d’un œuf en roulant la pâte entre vos mains. Mettez un plat huilé à feu doux, déposez une boule de pâte dessus, étirez-la délicatement dans tous les sens du bout des doigts jusqu’à obtenir une galette très fine. Aspergez-la d’huile. Etirezla à nouveau. Laissez cuire 30 secondes sans laisser sécher pour que la feuille reste molle. Posez la feuille pliées dans un plat. Répétez l’opération jusqu’à
épuisement des boules de pâte. Ces voiles de pâte peuvent être consommés avec de la confiture ou du miel. On les utilise également pour des plats salés (voir photo). Par exemple : avec des petits morceaux de poulet, revenus avec des oignons, de l’ail, des carottes, des épices à couscous (ras-el-hanout) et du concentré de tomate. Ajoutez des raisins secs et des œufs durs… Mettez la préparation au centre du plat où les feuilles de trid ont été disposées. Dégustation : servez-vous des feuilles de trid pour attraper l’accompagnement. Bssaha ! HORS SÉRIE
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abrid aziza le chemin vert
Concert nomade 11 mai 2007 : Abrid Aziza et l’association figuiguienne An-Nahda (Renaissance) sont à l’origine de ce concert qui a réuni, dans une belle improvisation, le groupe de musique traditionnelle FG 7K (Figuig 7 Ksours), la chanteuse Marie-Hélène Martin et la chorale des enfants des écoles. D’autres musiciens, d’autres chanteurs et chanteuses ont, dans la simplicité de ce moment partagé, permis à la variété des répertoires de se mélanger, de se fondre, et d’entraîner un public très divers dans la farandole des sons métissés. La musique et la voix ont parlé le langage du cœur. Ce soir-là, le chant s’est fait offrande.
Une association pour la préservation des oasis le développement du tourisme solidaire et les échanges cullturels siège social : M. et Mme Messaoudi-Duquenne 34 avenue Raspail 94250 Gentilly