Livre de julie

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Errance nf litt Action d’errer.

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Déambuler vi marcher sans but précis.

Divaguer vi tenir des propos incohérents, délirer. Flâner vi 1. Se promener sans but. 2. Perdre du temps en lambinant. Rôder vi aller et venir çà et là, parfois avec des intentions suspectes. marcher vi 1. Se déplacer par la marche, aller d’un point à un autre. 2. Poser le pied sur, ou dans quelque chose. 3. Accepter de participer à une action. 4. Se laisser tromper. 5. Se déplacer. 6. Fonctionner. 7. Avoir du succès. Traîner vt 1. Tirer derrière soi en faisant glisser. 2. Emmener quelqu’un de force à la piscine. 3. Supporter avec peine un état qui dure. 4. Pendre jusqu’à terre. 5. S’attarder, être trop lent. 6. Durer trop longtemps. 7. Etre laissé n’importe comment. Vagabonder 8. Marcher avec peine. vi 1. Se déplacer çà et là. 9. Etre languissant. 2. Aller d’un sujet à l’autre, sans suite. 10. Se déplacer en rampant.

Se tromper vi 1. Commettre une erreur. 2. Prendre quelque chose pour une autre.


Errance : C’est marcher sans but précis en tenant des propos incohérents, proches du délire. Se promener sans but et perdre du temps en lambinant. Aller et venir ça et là, parfois avec des intentions suspectes. C’est se déplacer par la marche, aller d’un point à un autre en faisant des pas. Poser le pied sur, ou dans quelque chose, c’est accepter de participer à une action, en acceptant de se laisser tromper. C’est se déplacer, fonctionner et avoir du succès. C’est aussi tirer derrière soi en faisant glisser. C’est emmener quelqu’un de force, péniblement, supporter avec peine un état qui dure et pendre jusqu’à terre. S’attarder, être trop lent, durer trop longtemps. Etre laisser n’importe comment et marcher avec peine et être languissant, et se déplacer en rampant. C’est se déplacer ça et là, aller d’un sujet à l’autre sans suite. C’est commettre une erreur. C’est prendre une chose pour une autre.






tude, tout en gardant leurs formes d’une façon à la fois absurde et inoubliable. La pensée de ma personne de même est froide et lointaine. Elle est quelque part hors de moi, paisible et engourdie comme l’une d’entre toutes ces choses qui sont sous le soleil. Je suis une certaine forme dans laquelle on a coulé une certaine histoire qui n’est pas à moi. Je me mets à la porter, ce sérieux et cette indifférence avec lesquels on se charge de ce qui ne vous appartient pas. Je pense bien cependant qu’il pourrait exister un événement qui serait le mien tellement que je l’habiterais tout entier. Alors, je me réclamerais de mes défaites, de mon insignifiance et de même de cet instant. Mais avant, inutile d’essayer. La petite caisse qui est arrivée l’autre jour sur la plage ne tenait que par quelques clous dont certains dépassaient, rouillés et tordus. Sur l’une des planches on devinait les mots:«oranges» et «Californ». Elle avait dû être ouverte par l’équipage d’un cargo, vidée de ses oranges et jetée à la mer. Elle était là, débarrassée de ce qu’elle avait servi à contenir. Et cependant elle durait toujours, plus inutile que jamais et plus que jamais caisse-à-contenir-desoranges. La marée descendante l’a remportée.Elle est repartie à la crête des vagues toute vivante et délirante. Entre ses quatres planches tenait la place d’une véritable histoire, d’un véritable manque d’histoire qui se criait à la face du ciel.


Marguerite Duras, La vie tranquille.




village le remplaçait. Depuis trois jours, en effet, il passait ses journées avec les parents du démineur. Deux clients s’informaient de ceux-ci. Ce fut Gina qui répondit. -Ils sont toujours là. Ils dorment là. Ca va tant qu’il ne pleut pas. Ils attendent que les gendarmes s’en aillent pour ficher le camps, voilà ce qu’il y a. -Ils s’endormiront, dit Diana. Elles s’en allèrent. Gina avait l’air préoccupée. -Tu es encore allée voir les parents du démineur ? demande Sara. -J’en viens, dit Gina. Elle ajouta : Pourquoi me demandes-tu ça ? -Pour rien. Moi je ne pourrais pas, c’est pour ça. -Tu es comme lui, dit Gina, s’il n’y avait que des égoïstes comme vous... Il faut bien qu’il y en ait, dit Diana, qui le peuvent, mais je préférerais que ce soit une autre que toi. Gina haussa les épaules et ne répondit pas. Il y avait sur la plage, très exactement, tous les estivants de l’endroit, une trentaine de personnes environ. Elles dirent bonjour à beaucoup d’entre eux. Elles étaient à différents titres, les femmes les plus populaires de l’endroit. En général elles étaient ensemble, ce qui ne satisfait pas la plupart des autres. Sara et Diana étaient de plus des femmes qui buvaient dix campari par jour, qui étaient étrangères. Gina, elle, ne buvait rien, mais elle était la femme de Ludi. Une femme qui faisait beaucoup parler d’elle – dans l’innocence et le plus grand naturel


Marguerite Duras, Les petits chevaux de Tarquinia.




-Tu trouves que je suis trop petite, n’est-ce pas? Je ne te comprends pas bien? J’ai caressé ses cheveux. Je pensais: On ne sait plus que vouloir. Tout ce qu’on faisait tournait mal; ça finissait par ne plus avoir d’importance d’agir ainsi ou autrement. Puisque j’avais envie qu’elle se crût aimée, je n’avais qu’à dire les mots qu’elle souhaitait etendre. -Tu as grandi depuis deux ans, dis-je. J’ajoutai: Mes sentiments pour toi ont grandi aussi. -Oui? dit-elle; elle serra ma main: Tu as l’air de tenir à moi plus qu’avant. -Tu sais, tu te plaignais que je n’aie pas besoin de toi: c’était vrai mais tu as créé ce besoin. A présent, tu m’es nécessaire. -Moi? nécessaire à toi? dit-elle. -Tu m’es nécessaire parce que je t’aime, dis-je. Tu étais dans mes bras, et mon coeur était lourd, à cause de ces lâches rumeurs de fête, et parce que je te mentais. Écrasé par ces choses qui existaient malgré moi et dont me séparait seulement mon angoisse. Il n’y a plus rien. Sur ce lit, plus personne; devant moi, un gouffre de néant. Et l’angoisse éclate, seule dans le vide, par-delà des choses évanouies. Je suis seul. Je suis cette angoisse qui existe seule, malgré moi; je me confonds avec cette existence aveugle. Malgré moi, et pourtant ne jaillisant que de moi-même. Refuse d’exister: j’existe. Décide d’exister: j’existe. Décide. J’existe. Il y aura une aube.


Simone de Beauvoir, Le sang des autres.




cohérente. Il a parlé d’un ton rêveur. Je n’ai pas très bien saisi ce qu’il a voulu dire. Il a ajouté que je n’étais pas menteuse, que si je disais des choses inexactes, c’était que j’étais encore en train de chercher la vérité. Peut-être avait-il raison, mais cela m’était parfaitement égal tout à coup. Je n’avais jamais supposé qu’il pouvait se tromper. Peut-être avait-il eu raison aussi de ne pas descendre chez moi pendant plusieurs mois. Je venais d’oublier pendant un long moment que ce soir encore, c’était moi qui étais venue le retrouver. Il avait beau en savoir sur mon compte, en ce moment, il ignorait ce que je pensais. Après l’avoir attendu pendant des nuits et des nuits, je m’étais décidée à venir le trouver. Tout ce qu’il venait de découvrir sur moi et qui le faisait sourire du plaisir d’avoir réussi à le connaître, m’intéressait moins, moi, que de constater que j’avais réussi à être auprès de lui une partie de la nuit. En ce moment, il me caressait doucement la figure, je sentais la paume chaude de ses mains sur mes joues et sur mon front. Lui ne savait pas que ce n’était possible que parce que je l’avais voulu. Il devait penser en ce moment qu’il n’était pas complétement étranger à la mort de Jérôme et s’étonner de me voir si habile à ne pas me l’avouer. Moi aussi je venais de découvrir que je n’avais été dégouté de Jérôme et de Clémence que parce que moi j’étais seule pendant qu’ils étaient ensemble. Mais je me disais que j’y penserai plus tard. Pour le moment,


Marguerite Duras, La vie tranquille.




Elle le prenait dans sa bouche, le prenait dans son ventre, elle se donnait à lui. Les yeux toujours ouverts, ses grands yeux fatigués. Et elle l’a pris en elle.Et comme il n’arrivait pas à dormir, elle l’écoutait encore. Rassurante et immense, son corps chaud ses yeux tristes. Et le matin venu, il était soulagé, vidé et aplani. Il s’est rhabillé, l’a embrassée et remerciée.Elle lui souhaita bonne chance, dit qu’elle voulait dormir un peu, rester dans la chambre jusque midi.Elle lui souhaita bonne chance sur le pas de la porte. Ses grands yeux rassurants, aimants et disponibles, elle l’a regardé partir. Il rappela sa maitresse, pour s’excuser et promettre qu’il viendrait bientôt, sa femme pour dire qu’il l’aimait, qu’il rentrait sur-le-champ, qu’il fallait qu’ils discutent, et son travail, pour savoir si tout allait bien. Et tout allait bien. Les choses lui revenaient,une à une et intactes. Juste un sale moment. Il était soulagé. Repensant à la nuit, à cette femme aimante, il regretta un moment de ne pas lui avoir demandé son numéro. Pour la rappeler et la remercier encore, peut-être la revoir.Une femme de chambre a hurlé au premier, il a remonté les étages quatre à quatre, sans réfléchir, voir ce qui se passait. La porte de leur chambre, la porte grande ouverte. La femme pendue au milieu de la pièce. Ses deux yeux grands ouverts, vides. Son corps nu, blanc et lourd. Par la porte grande ouverte, son corps se balançait.


Virginie Despentes, Mordre au travers.




même où je dévale avec les armées des choses, hommes, femmes, bêtes, blés, mois... Ma vie: un fruit dont j’aurai mangé une partie sans le goûter, sans m’en apercevoir, distraitement. Je ne suis pas responsable de cet âge ni de cette image. On la reconnaît. Ce serait la mienne. Je le veux bien. Je ne peux pas faire autrement. Je suis celle-ci, là, une fois pour toutes et pour jamais. J’ai commencé de l’être il y a vingt-cinq ans. Je ne peux même pas me saisir entre mes bras. Je suis rivée à cette taille que je ne peux saisir entre mes bras. Je suis rivée à cette taille que je ne peux pas entourer. Ma bouche, et le son de mon rire, toujours je les ignorai. Je voudrais pourtant pouvoir embrasser celle que je suis et l’aimer. Je ressemble aux autres femmes. Je suis une femme d’aspect assez quelconque, je le sais. Mon âge est un âge moyen. On peut dire qu’il est encore jeune. Mon passé, les autres seuls pourraient me dire s’il est intéressant. Moi je ne sais pas. Il est fait de jours et de choses dont je n’arrive pas à croire qu’ils me sont arrivés vraiment. C’est mon passé, c’est mon histoire. Je n’arrive pas à m’y intéresser parce qu’il s’agit de la mienne. Il me semble que mon passé c’est demain qui commancera vraiment à le contenir. À partir de demain soir, le temps comptera. Pour le moment, tout autre passé que le mien m’appartient davantage.C’est parce que l’on ne m’a pas prévenu que je vivrai. Si j’avais su que j’aurais un jour une histoire, je l’aurais choisie, j’aurais


Marguerite Duras, La vie tranquille.




Virginie Despentes, Baise-moi.


-Comment t’as pu faire ça ? Comment t’as pu te laisser faire comme ça ? Manu ne répond pas tout de suite. Elle sent qu’elle dégoute Karla encore plus que les mecs. Comment elle a pu faire ça ? Quelle connerie... Elle les entend démarrer. C’est fini. Elle répond : -Après ça, moi je trouve ça chouette de respirer. On est encore vivantes, j’adore ça. C’est rien à côté de ce qu’ils peuvent faire, c’est jamais qu’un coup de queue. Karla hausse le ton, annonce la crise de nerf : -Comment tu peux dire ça ? -Je peux dire ça parce que j’en ai rien à foutre de leurs pauvres bites de branleurs et que j’en ai pris d’autres dans le ventre et que je les emmerde. C’est comme une voiture que tu gares dans une cité, tu laisses pas des trucs de valeur à l’intérieur parce que tu peux pas empêcher qu’elle soit forcée. Ma chatte, je peux pas empêcher les connards d’y entrer et j’y ai rien laissé de précieux... Karla la regarde, elle a la gueule bien amochée. Elle n’arrive pas à parler. Elle est comme suffoquée. Elle va exploser. Manu corrige au plus vite. Surtout la calmer, surtout ne pas avoir à supporter la crise de nerfs : -Excuse-moi, j’veux pas en rajouter. C’est juste des trucs qui arrivent... On est jamais que des filles. Maintenant, c’est passé, tu vas voir, ca va aller. Elle voit Karla debout penchée au dessus d’elle, avec du sang qui sort de sa bouche et de son nez,




Elle marchait à mes cotés en clopinant. Ses souliers lui faisaient toujours mal parcequ’elle les achetait au hasard d’une occasion, d’un échange, d’un service à rendre. -Ils pensent que demain sera meilleur qu’aujourd’hui, dis-je. Je le pensais aussi. A travers les hésitations de ce début d’expérience, tant de promesses étaient en train d’éclore! -Peuh! quoi qu’ils fassent, la vie ne faudra jamais cher. Je ne répondis pas; je n’essayais jamais de discuter avec Madeleine; plus les arguments qu’on lui opposait étaient convaincants, plus elle se méfiait de leurs artifices. D’ailleurs il était vrai que sa vie ne valait pas cher, puisqu’elle la mettait elle-même à si bas prix; son corps ne valait pas cher, elle le livrait avec indifférence à qui l’en sollicitait; son temps ne valait pas cher, elle l’employait surtout à dormir ou à fumer, les yeux dans le vague; elle n’aurait pas été dépourvue d’intelligence si elle n’eût estimé que ses pensées non plus ne valaient pas cher: c’était rare qu’elle consentît à s’y arrêter. Ses plaisirs, ses intérêts, ses ennuis, ses sentiments mêmes ne comptaient guère à ses yeux et personne ne pouvait faire qu’il fût important pour elle d’exister. Mais pour ces hommes qui défilaient en chantant, c’était une entreprise importante que d’être un homme. Demain, la vie allait trouver un sens, elle en avait un déjà par la force de leurs espoirs.


Simone de Beauvoir, Le sang des autres.





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