Attaquer la pollution par les racines Thierry LEBEAU Espace des Science – Rennes – 7 février 2017
POLLUSOLS en quelques mots Le sol, une ressource convoitĂŠe Pollution diffuse des sols et leur gestion Potentiel et applications de la phytoremĂŠdiation
POLLUSOLS
Zone critique
20 laboratoires (Pays de la Loire) 5 établissements Portage OSUNA Co‐financement Région
• • • • • •
Pollutions diffuses inorganiques (Cu, Pb, Hg, platinoïdes, radionucléïdes…) Continuum terre‐mer Approche temporelle (usages passés et futurs des sols) Méthodologie commune : sources, transfert, impact, gestion, patrimoine Approche multi‐échelles (sites ateliers, zones géographiques) Production de connaissances en sciences quantitatives et sciences humaines et sociales
le B riv e t
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Cu, Pb, Hg, Pt
Estuaire
la Sèv
Cu, Pb, Hg, Pt, U
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Maine‐et‐Loire
Cu +
0
240
480
960 Kilomètres
Pb, Hg
Loire‐Atlantique
Domaine marin
le
Fa
lle
ro
U, Po, Ra
n
+ Cu, Pb, + Hg Vendée
0
12,5
25
50 Kilomètres
Secteur minier 7
Éléments de contexte Le sol : épiderme en interaction très lentement renouvelable Pollutions ponctuelles vs. diffuses
Le sol : un épiderme en interaction
Stockage vs. libération gaz à effet de serre
- Stockage de l’eau - Filtre (qualité de l’eau phréatique)
- Nutrition des plantes (et de l’humanité) - Accumulation des contaminants (rôle sur la biodiversité)
Pédogénèse (≈1 cm/siècle)
2
6
« bienfaits que les hommes obtiennent des écosystèmes naturels »
Commissariat Général au Développement Durable. Les différents types de services écosystémiques (d’après Étude & Documents n°20, Mai 2010)
Braat L. & Ten Brink P. 2008
Services écosystémiques :
Importance des biens et services écologiques
Des fonctions et des services
Ressource convoitée et fragile Une consommation actuellement non durable 1 siècle pour former 3 à 8 mm de sol 10 siècles pour un horizon A (climat tempéré) 10 à 50 fois moins de temps pour éroder les sols (Sundquist 2011). A l’échelle mondiale, l’équivalent de 12‐25% du territoire français disparait annuellement La vitesse de « consommation » des sols excède celle de leur renouvellement (Carbon Farming Expo & Conference, 7‐28 oct. 2010) : x 17 en Europe x 57 en Chine
Pollutions ponctuelles vs. diffuses
Sites et sols pollués (2012)
Sites et sols potentiellement pollués (2002-2003) Source : l’Expansion (2008)
4 142 sites & sols pollués en France (BASOL, 2012) 300 000 sites potentiellement pollués (BASIAS, 2012) UE : 500 000 sites & sols pollués ; potentiellement 3,5 millions Belgique et Pays‐Bas : 700 km2 de pollution diffuse des sols (Witters et al. 2009) Chine : 19% des sols agricoles > seuils pour métaux/métalloïdes (Zhao et al. 2015)
Origine des pollutions diffuses Vignoble : • 3% de la SAU (792 000 ha, OIVV 2014)
• 20% des pesticides commercialisés Jusqu’à 1000 mg Cu/kg de sol (fond géochimique 20 mg/kg)
Retombées atmosphériques issues des activités industrielles et du trafic routier
Quelles gestions de la pollution diffuse ?
La réalité d’aujourd’hui (pollutions ponctuelles) Gestion des sites et sols pollués : • 4,8 millions de tonnes traitées en 2010 • 57% des sols excavés
ADEME (2012). Taux d’utilisation et coûts des différentes techniques et filières de traitement des sols et des eaux souterraines pollués en France (synthèse des données 2010) 114 pp.
Le cas spécifique des pollutions diffuses Des volumes gigantesques : • Fukushima (césium). 600 km2 > 600 000 Bq/m2 240 millions de tonnes !!! Des coûts inimaginables sur la base des traitements des pollutions ponctuelles. Actuellement : • France : 470 millions d’Euros (CGDD 2012) • UE : 59 à 109 milliards d’Euros (Le Corfec 2011) Ressource limitée OR une fois excavé, le sol est un déchet (sauf si réutilisation sur site) …. et des sites de stockage déjà saturés Terres de remplacement de qualité parfois médiocre Pour le traitement des pollutions diffuses : • Gestion in situ MAIS des contraintes temporelles (Ex : aménagements urbains)
• Réutilisation locale des terres excavées MAIS des contraintes règlementaires
L’engouement pour la phytoremédiation Intérêts • Des capacités démontrées de dépollution • Seule méthode d’extraction in situ des métaux • Ecologique (conserve les propriétés des sols, sobre en énergie) • Intérêt paysager • Biomasse valorisable (bio‐énergie, bio‐ catalyseurs, bio‐fortification) • Faible coût • Socialement bien acceptée GREENLAND
Limites • • • • • •
Lenteur Limitée à la profondeur d’enracinement Gestion de la biomasse (déchet) Contrôle du traitement Pas d’hyperaccumulateurs du Cu, Pb… Peu d’essais sur le terrain
Différents modes d’action1.2 Pollutions diffuses Disparition totale de l'atrazine (en jours)
Favas et al. 2014
Traitements in situ respectueux des sols 45 40 35 30 25 20 15 10 5 0
t tes s plan
é ér il is
es
tes n plan
é es yé e s ett oy netto n o tes n plan
1ère incubation 3ème incubation
2ème incubation 4ème incubation
Phragmites australis - McKinlay et al. 1999
Pycnandra acuminata
16
La phytoextraction de métaux/métalloïdes
Métal dans la plante
hyperaccumulatrice
Accumulatrice
Exclusive
Populus sp. (Salicaceae)
Thlaspi caerulescens (Brasicaceae)
Métal dans le sol
Un millier d’espèces végétales potentiellement utilisables en phytoextraction > 450 plantes hyperaccumulatrices
Alyssum murale (Brasicaceae)
Brassica juncea (Brasicaceae) 16
Disponibilité des métaux et capacités de phytoextraction « Anthropique »
« Naturel »
Bouquet et al. 2017
170 mg Pb/kg MS sol
Des métaux plus ou moins phyto‐disponibles % phytoextraction Cd « disponible » en 3 mois de culture (Gérard et al. 2000)
Des plantes plus ou moins performantes
Augmenter la phyto‐disponibilité
[métal] Biomasse
D’après Salt, Smith et Raskin, 1998
Chélatants synthétiques : • toxicité • coût prohibitif pour une application en conditions réelles
Phénomène d’hyperaccumulation
Sheoran et al 2009
Les raisons de l’hyperaccumulation : • Adaptation aux métaux • Protection contre les herbivores et pathogènes
Les mécanismes :
latex of Sebertia acuminata max. 26% (w/w) Ni
• Surexpression de transporteurs racinaires • Translocation racines/parties aériennes élevée (voie symplastique & circulation xylémienne) • Détoxification par complexation dans les vacuoles (ligands : ac. organiques, phytochelatines, métalothionéines…)
2‐ Limites & perspectives de la phytoextraction in situ Phytomine/Agromine : • Phytoextraction du nickel • Réhabilitation de mines • Culture de sols sans intérêt agronomique
La question du déchet
Concentration ≈ 1% (Bani et al. 2007) 120 kg de Ni/ha/an
Marge nette 2008 ≈ 1000 €/ha Marge nette 2016 ≈ 300 €/ha
Pour comparaison, marge nette du blé ≈ 100 à 300 €/ha (selon l’année) Van der Ent et al., ES&T 2015
Produire des aliments sains tout en dépolluant par phytoextraction ?
Réduire l’accumulation de cadmium dans le maïs • Maïs non conforme en monoculture • Association avec Sedum Alfredii (hyperaccumulateur)
Non conforme
Conforme
D’après présentation Morel, 2010
Cultiver des légumes exclusifs du plomb (POLLUSOLS) Jardin des Eglantiers (ville de Nantes) : • 92 parcelles (2 ha) • 50 parcelles (plan de gestion) ‐ 3200 m2 réaménagés (200 000 € soit ≈ 62 €/m2) :
terrassement, apport de 60 cm de terre végétale, remplacement des cabanes, remise en état du réseau d’eau ‐ 4 parcelles contaminées (expérimentation)
Jean-Soro et al. 2014
Cultiver des légumes exclusifs du plomb (POLLUSOLS) Tomate-moutarde brune
Système de culture associant : • un légume « exclusif »
Association
Rotation (tomate en saison)
• une plante accumulatrice (en association ou en rotation) Cf. base BAPPET (Base de données sur les teneurs en Eléments Traces métalliques de Plantes Potagères)
D. Bouquet (thèse CIFRE – ville de Nantes)
Teneur en Pb dans Tomate et chou < seuil règlementaire (CEE)
2‐ Limites & perspectives de la phytoextraction in situ Une boucle vertueuse du cuivre ? (POLLUSOLS) Gestion intégrée des pollutions viticoles
Phytoextraction in situ en inter rangs : • A minima compenser les apports en Cu • Réduire l’érosion
Phytoremédiation & aménagement urbain
Phytomanagement d’espaces urbains vacants • Transformer des espaces urbains vacants (pollués) en espaces verts • Phytoremédiation ‐‐> phytomanagement (intégré au projet d’aménagement) • Maintenir des zones ouvertes au public (Todd et al. 2016)
Saskatoon, Canada, 222 189 hab. Surface projet : 3500 m2 Stockage de pétrole : hydrocarbures, HAP, métaux
Fétuque, Élyme du Canada
Peuplier, saule
2‐ Limites & perspectives de la phytoextraction in situ Place de la phytoremédiation dans le réaménagement d’un quartier
Gestion intégrée des pollutions urbaines
Ancienne zone industrielle d’Amsterdam (Wilschut et al. 2013)
Création de cordons de sols pollués végétalisés séparant différents modes de trafics
Sol très pollués. Dépollution et production de biomasse à vocation énergétique
Parcs sur sols pollués avec phytoremédiation « naturelle » Zones de cheminement sans contact avec le sol pollué : évite de remplacer la terre.
Stockage de terres sur barges (phytoextraction long terme) 28 Traitement des eaux de surface dans zones humides artificielles
MERCI DE VOTRE ATTENTION