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LE PRINCIPE DE LA NECESSITE INTERIEURE CHEZ EAMON ORE-GIRON: L’EXPOSITION «AUTO-TUNE» 14 I

Cat.01 INFINITE REGRESS CLX, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 69x54in / 175x137cm 60 I 62

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Cat.02 INFINITE REGRESS CLXI, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 69x54in / 175x137cm 27 I 39

Cat.03 INFINITE REGRESS CLXII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 72x72in / 183x183cm 56 I 57 I 75

Cat.04 INFINITE REGRESS CLXIII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 72x72in / 183x183cm 01 I 06 I 49 I 60 I 61

Cat.05 INFINITE REGRESS CLXIV, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 10 I 40

Cat.06 INFINITE REGRESS CLXV, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 11 I 41

Cat.07 INFINITE REGRESS CLXVI, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 11 I 41

Cat.08 INFINITE REGRESS CLXVII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 10 I 40 Cat.09 INFINITE REGRESS CLXVIII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 52 I 53 I 71

Cat.10 INFINITE REGRESS CLXIX, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 44

Cat.11 INFINITE REGRESS CLXX, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 45 I 47

Cat.12 INFINITE REGRESS CLXXI, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 24x20in / 61x50.8cm 42

Cat.13 INFINITE REGRESS CLXXII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 58 I 60

Cat.14 INFINITE REGRESS CLXXIII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 59 I 60

Cat.15 INFINITE REGRESS CLXXIV, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 35 I 36

Cat.16 INFINITE REGRESS CLXXV, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 59 Cat.17 INFINITE REGRESS CLXXVI, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 51

Cat.18 INFINITE REGRESS CLXXVII, 2021 Mineral paint and Flashe on linen Peinture minérale et Flashe sur lin 48x35in / 121.9x88.9cm 35 I 36

Cat.19 TALKING SHIT WITH QUETZALCOATL / I LIKE MEXICO AND MEXICO LIKES ME, 2017 Loom-woven tapestry Tapisserie tissée sur métier 93x76in / 236x193cm 53 I 55 I 66

Cat.20 TALKING SHIT WITH COATLICUE, 2020 Loom-woven tapestry Tapisserie tissée sur métier 145x114in / 369x291cm 45 I 48

EAMON ORE-GIRON EN CONVERSATION AVEC VALENTINA LOCATELLI 30 JUILLET 2021

VL / Eamon, tu es né en Arizona, mais en grandissant, tu as passé beaucoup de temps au Mexique, en Espagne et même au Pérou - d'où était originaire ton père. Ce bagage multiculturel a clairement influencé ta pratique artistique. Y a-t-il un moment clé lors de ton parcours où tu as compris que tu voulais devenir artiste? Est-ce que pour toi, il existe un lien entre cette décision et l'un de tes environnements culturels en particulier?

EOG / Je vivais en Espagne en 1982. A cette époque, j'avais 9 ans, presque 10. Ma mère m'emmenait au Museo del Prado pendant le week-end. Je me souviens avoir été obsédé par Saturne dévorant un de ses fils et Le colosse de Francisco Goya, ainsi que Le jardin des délices de Jérôme Bosch. Ces trois tableaux m'ont profondément marqué. Ils étaient si inquiétants et incroyables à la fois. Enfant, je pouvais puiser directement dans leur force narrative, et j’ai le souvenir de m’être dit que je voulais peut-être devenir artiste quand je serais grand… Ma mère s'est toujours entourée de musiciens et de personnes créatives, aussi bien en Espagne qu'en Arizona, où je suis né. Cela a certainement renforcé le sentiment qu'être un artiste était une option viable. Elle était très attachée à la communauté amérindienne et a enseigné dans la nation de Tohono O'odham, une réserve à l'ouest de Tucson et la deuxième plus grande terre autochtone de l'Etat. Elle connaissait également l'un des principaux acteurs culturels du peuple Yaqui à Tucson, Felipe Molina, et était amie avec un peintre du peuple Diné nommé Justin Tso. Je pense que ces deux expériences culturelles, l'une en Espagne et l'autre en Arizona, ont toutes deux contribué à ma décision de devenir artiste.

VL / Le savoir-faire, la matière et la couleur sont trois des éléments fondamentaux de ton travail. Tes peintures donnent la sensation d'une forte présence palpable qui est liée à l'utilisation de la toile de lin brut et renforcée par son interaction avec les couleurs acryliques saturées que tu utilises dans tes compositions. Peux-tu nous en dire plus sur la façon dont tu as commencé à travailler avec ces matériaux? EOG / J'ai travaillé pendant plusieurs années à tendre des toiles dans un endroit à Los Angeles appelé Fine Art Stretcher Bars. Je tendais de la toile de lin selon la vieille technique éprouvée de la colle de peau de lapin, et il y avait une beauté dans ce rapport quotidien à la matière tout en étant dans une ambiance de travail. Cela m'a fait connaître le matériau et apprécier cette présence palpable dont tu parles. J'adorais la physicalité du lin et ma relation à l'objet. La peinture Flashe est très mate, et j'aime le fait qu'elle ne réfléchisse pas mais absorbe la lumière; elle accentue les espaces négatifs du lin. A bien des égards, la peinture ressemble davantage à un objet. Le lien avec l'idée de construire quelque chose m'a conduit d'une certaine manière à explorer les idées constructivistes sur la réalisation de tableaux.

VL / La couleur a évidemment un rôle central dans ton travail. Ta palette est riche et variée et tes arrangements chromatiques sont toujours différents et soigneusement composés. Comment choisis-tu quelles couleurs utiliser dans un tableau? Est-ce que tu suis un plan ou un schéma progressif et continu? Quelle place l'imprévu et le hasard ont-ils dans ta démarche artistique?

EOG / Mes premières peintures sont fondées sur l'utilisation de couleurs primaires. Au fur et à mesure que ma pratique se développait et en me lançant dans la série Infinite Regress, mes peintures se sont complexifiées. Elles ont fait leur chemin davantage vers des relations de couleurs secondaires et tertiaires. Les plus grandes œuvres de la série Infinite Regress de l'exposition «Auto-Tune» à l’Espace Muraille se concentrent principalement sur des nuances de bleu et de lavande. J'ai décidé de travailler autour de cette partie du spectre chromatique, et en même temps j'ai aussi trouvé des espaces où le spectre évoluait vers des relations plus inhabituelles générant une certaine tension. D'autres œuvres de cette exposition sont davantage liées aux premières œuvres de la série, avec des couleurs plus vives, comme des oranges, turquoises et verts émeraude. Je pense qu'il y a une certaine vulnérabilité à la palette précédente; elle nous permet du recul par rapport à la sophistication d'un dégradé. D'une certaine manière, elle me rappelle les couleurs utilisées par l'architecte mexicain Luis Barragán, avec ces roses, oranges et bleus vifs. Il y a évidemment un lien avec la sensibilité chromatique latino-américaine. Mes peintures abstraites ne suivent aucune logique mathématique. Elles sont principalement guidées par l'émotion et l'intuition, et je crois que c'est la plus grande différence entre mes abstractions et celles des peintres de la tendance Hard Edge des années 1970 auxquels mon travail est parfois comparé. Je n'ai pas besoin d'avoir une formule mathématique pour justifier mes décisions et, pour moi, ceci est au cœur du concept de la décolonisation de l'abstraction, quelque chose qui m'intéresse beaucoup et que j'explore constamment.

VL / L'influence de la musique est fondamentale dans ton travail visuel et tes peintures ont une qualité intrinsèquement synesthésique. Même si tu n'es pas un «réel» synesthète, peux-tu essayer de nous expliquer comment tu laisses la musique façonner ton vocabulaire visuel? Est-ce que tu écoutes de la musique en dessinant et en peignant?

EOG / Il y a quelques années, j'ai failli devenir aveugle de l'œil droit. Maintenant, je suis habitué à voir comme de grands arcs-en-ciel et des éclats de lumière dans cet œil. J'ai réalisé que j'ai commencé à jouer avec les formes et les couleurs de manière plus primaire depuis que j’ai été touché par ce problème. Je me considère comme un synesthète, et je crois que quiconque fait de la musique l'est, dans une certaine mesure. Il y a beaucoup de rythme dans mes peintures; il y a des moments où les choses se répètent et il y a des moments où tout est lié. Chaque élément dépend des autres éléments. De cette façon, la peinture est très similaire à la musique. Le bleu est la caisse claire, le rouge est la basse, l'or est la batterie… et quand tout est réuni, tu obtiens l'énergie de l'ensemble. Si tu écoutes mes œuvres de musicien et producteur et que tu regardes ensuite mes peintures, il y a une relation directe avec l'hybridité culturelle. Il y a des peintures qui résonnent clairement avec l'hybridité, une hybridité de références et d'histoires. Lorsque les œuvres sont terminées, que l'exposition est installée et que les pièces sont placées dans un environnement, c'est à ce moment-là que j'entends un son, j'entends les pièces faire écho les unes aux autres. Il n'y a rien de spécifique en termes de religion, mais il y a incontestablement une résonance spirituelle dans ces œuvres. Et cette résonance est la qualité synesthésique que je ressens.

VL / Tu as récemment été chargé d'importantes commandes publiques officielles pour des stations de métro près du LACMA au Wilshire Boulevard à Los Angeles et à Brooklyn, New York. Pour la Biennale de Los Angeles «Made in LA» en 2018, tu as également peint une fresque murale à grande échelle dans le hall d'entrée du Hammer Museum. Est-ce que tu penses que ta méthodologie de travail en tant que peintre a été influencée par ces expériences? Ces commandes de grande envergure ont-elles eu un impact sur ton travail en atelier?

EOG / L'expérience de ces commandes publiques fait dialoguer mon travail avec des artistes comme Roberto Burle Marx au Brésil et beaucoup d'autres artistes latino-américains du milieu des années 1900. Il existe une relation forte avec l'idée du sens civique, et je pense qu'elle provient en grande partie des grands muralistes mexicains. Selon moi, la période du récit figuratif dans les travaux publics est quelque chose du passé. Ce qui m'intrigue à cette échelle, c'est de travailler avec l'abstraction. De simples gestes et formes se transforment lorsqu'ils sont produits à grande échelle; ils modifient les structures architecturales, ajoutant de nouvelles dimensions et transformant la façon dont nous vivons un espace. Lorsque je réalise de grandes œuvres pour un espace public, je me pose la question: «Comment ces formes fonctionnent-elles dans une société pluraliste, avec de nombreuses différentes histoires et expériences vécues? Quel est leur rapport à un langage visuel collectif?» Ce sont ces idées qui m'intéressent et qui m'inspirent. En termes d'échelle, je dirais que l'œuvre qui a eu le plus d'impact sur ma pratique artistique est la peinture murale que j'ai réalisée au Hammer Museum de Los Angeles. Pour cette commande, j'ai dû réagir à un espace très ambitieux et à ses caractéristiques architecturales, comme l'escalier dans le hall d'entrée du musée. Cela m'a appris à voir mon travail dans le contexte de l'architecture et à réfléchir à la façon dont l'architecture peut façonner le travail.

VL / A l'Espace Muraille, tu présentes de nouvelles peintures de la série continue Infinite Regress. Au moment où nous parlons, la série comprend 177 œuvres au total. Quand penses-tu que la série sera potentiellement terminée? Ou l'idée de fin et d'achèvement est-elle en fait impossible pour ce corpus d'œuvres, comme son titre l'indique?

EOG / Je n'y mets aucune limitation. La série Infinite Regress est un processus continu; c'est en quelque sorte une pratique heuristique et en ce sens, elle se génère elle-même.

VL / Je t’ai entendu comparer tes peintures à des structures architecturales rappelant des «sanctuaires». Des adjectifs comme «transcendant», «spirituel», «mystique» sont très souvent utilisés par les critiques pour décrire tes œuvres. Y a-t-il en réalité aussi une composante religieuse ou sacrée dans ton travail?

EOG / Je considère en effet que mes pièces ont certains moments très architecturaux, surtout si tu regardes la partie inférieure de mes peintures de la série Infinite Regress. En fait, je pense qu'ils sont directement liés à l'architecture. Par exemple, j'ai toujours été très inspiré par Carlo Scarpa. La façon dont il incorporait des éléments en or dans son travail et son obsession avec les cercles et les carrés en tant que formes élémentaires résonnent beaucoup en moi. Plus je produis des pièces à grande échelle, plus je commence à les considérer comme des extensions de l'architecture. Pour ce qui est de l'aspect spirituel de mon travail, j'essaie d'éviter toute simplification. Bien sûr, le travail d'un artiste peut faire l'objet d'interprétations différentes, et mes œuvres comportent une certaine part de transcendantalisme. Surtout quand je pense à l'état d'esprit dans lequel j'étais quand j'ai commencé la série… A certains égards, la peinture a toujours été pour moi un lieu sacré. Je pense que l'on sous-estime à quel point la peinture peut aider un artiste à explorer de nombreuses idées, émotions et expériences. Il y a quelque chose de magique et de divin dans le fait de pouvoir évoquer un contenu émotionnel et de pouvoir le traduire et le communiquer à tant de personnes. En même temps, je veux que les gens se sentent libres d'avoir leur propre interprétation. Je me sens lié à un sentiment de spiritualisme quotidien, quelque chose qui naît de la vie de tous les jours. Ce travail m'intéresse comme moyen d'explorer mon histoire personnelle ainsi que l'idée du temps et des différentes histoires culturelles. VL / A quoi ressemble ton avenir professionnel? Quels sont tes prochains projets et sur quoi travailles-tu en ce moment?

EOG / Il y a des choses passionnantes qui se dessinent… Pour commencer, au début de l'année prochaine, je participerai à une grande exposition individuelle au Museum of Contemporary Art Denver pour laquelle nous produisons également un catalogue d'exposition publié par Rizzoli. J'inaugure également une exposition intitulée «Non Plus Ultra» à la Collection Anderson à l'Université de Stanford cet automne. EAMON ORE-GIRON IN CONVERSATION WITH VALENTINA LOCATELLI JULY 30, 2021

VL / Eamon, you were born in Arizona but growing up you spent lots of time in Peru - where you father was from -, Mexico and even Spain. This multicultural background has clearly influenced your artistic practice. Is there a key moment in your biography when you came to the realization that you wanted to become an artist? Do you link this decision with any of these cultural contexts in particular?

EOG / I was living in Spain in 1982. At that time, I was 9 years old going on 10. My mother would take me to the Museo del Prado during the weekend. I remember being obsessed with Francisco Goya’s Saturn Devouring His Son and The Colossus and Hieronymus Bosch’s The Garden of Earthly Delights. Those three paintings had a visceral impact on me. They were so disturbing and incredible at the same time. As a child I could tap directly into their narrative, and I remember thinking that maybe I wanted to be an artist when I grew up… My mother always surrounded herself with musicians and creative people, both in Spain and in Arizona, where I was born. That certainly fostered the sense that being an artist was a viable option. She was very connected to the Native American community and taught in the Tohono O'odham Nation, a reservation west of Tucson which is the second-largest indigenous land holding in the state. She also knew one of the main Yaqui cultural figures in Tucson, Felipe Molina, and was friends with a Diné painter named Justin Tso. I think these two cultural experiences - one in Spain and the other in Arizona - both contributed to my decision to become an artist.

VL / Craftsmanship, material and color are equally fundamental components of your work. Your paintings have a strong haptic presence which is determined by the use of the raw linen canvas and enhanced by its interaction with the saturated acrylic colors you use in your compositions. Can you tell us more about how you came to start working with these materials? EOG / I used to work for several years stretching canvases at a place in Los Angeles called Fine Art Stretcher Bars. I would stretch linen using the old technique of rabbit skin glue, and there was something beautiful about that daily relationship to material in a working atmosphere. It made me know the material and appreciate that haptic presence you are referring to. I loved the physicality of the linen and my relationship to the object. Flashe paint is very matte, and I like the fact that it does not reflect but absorbs light; it accentuates those negative spaces of the linen. In many ways, it makes the painting feel more like an object. The connection to the idea of constructing something led me in some way to explore constructivist ideas about making paintings.

VL / Color has obviously a central role in your work. Your palette is rich and varied and your chromatic arrangements are always different and carefully composed. How do you choose which colors to use in a painting? Do you follow a progressive and regular scheme or pattern? What space do contingency and accident have in your artistic process?

EOG / My earlier paintings are rooted in the use of primary colors. As my practice developed and I embarked on the Infinite Regress series, my paintings became more complex. They have moved more into secondary and tertiary color relationships. The larger works from the Infinite Regress series in the Espace Muraille exhibition focus mostly around blue and lavender nuances. I decided to work around that part of the color spectrum, and at the same time I also found spaces where the spectrum is shifting into more unconventional relationships that create a certain tension. Other works in this exhibition are more connected to the earliest works in the series, with bolder colors, like oranges and turquoises and emerald greens. I think there is a certain vulnerability to this earlier palette; it is a step back from the sophistication of a gradient. In a certain way they remind me of the colors used by the Mexican architect Luis Barragán, those bold pinks, oranges and blues. There is clearly a connection to the color sensibilities of Latin America. My abstract paintings do not follow any mathematical scheme. They are mostly led by emotion and intuition, and I believe that this is the biggest difference between my abstractions and those of hard-edge painters from the 1970s to which my work sometimes gets compared. I don’t need to have a mathematical formula to justify what my decisions are, and, for me, this is at the core of the concept of decolonizing abstraction, something I am very interested in and constantly exploring.

VL / The influence of music is fundamental in your visual work and your paintings have an intrinsic synesthetic quality. Even if you are not an ‘actual’ synesthete, can you please try to unpack for us how you let music inform your visual vocabulary? Do you listen to music while drawing and painting?

EOG / A couple of years ago I almost went blind in my right eye. Now I am used to seeing big rainbows and flashes of light in that eye. I realized that it was when I started being affected by this problem that I started to play with shapes and colors in more primary ways. I do think of myself as a synesthete, and I believe that anybody who makes music is, to a certain degree, a synesthete. There is a lot of rhythm in my paintings; there are moments when things get repeated and there are moments when things all come together. Everything relies upon each other. In this way painting is very similar to making music. Blue is the snare, red is the bass, gold is the drums… and when it all comes together you get the energy of the whole piece. If you listen to my works as a musician and a producer and then you look at my paintings, there is a direct relationship to cultural hybridity. There are paintings which have a clear resonance with hybridity, a hybridity of references and histories. When the pieces are done, and the show is installed, and the works are in an environment, that’s when I hear a tone, I hear the pieces playing off of one another. There is nothing specific in terms of a religion, but there is definitely a spiritual resonance that the work has. And that resonance is the synesthetic quality that I feel.

VL / You have recently been assigned important official public commissions for subway stations near LACMA on Wilshire Boulevard in Los Angeles and in Brooklyn, New York. For the Los Angeles Biennial “Made in L.A.” in 2018 you also painted a large-scale mural in the lobby of the Hammer Museum. Do you think that your working methodology as a painter has been influenced by these experiences? Have these large-scale commissions had an impact on your work in the studio?

EOG / The experience of these public commissions puts my work in dialogue with artists like Roberto Burle Marx in Brazil and a lot of other Latin American artists from the mid 1900s. There is very much this relation to the idea of civic mindedness, and I think a lot of it originates from the great muralists in Mexico. The period of figurative narrative in public works is, for me, something that lives in the past. To work in abstraction on that scale is what intrigues me. Simple gestures and forms transform when realized at a large scale; they change architectural structures, adding new dimensions and transforming how we experience a space. When making large works for a public space I ask myself, “How do these forms function in a pluralistic society, with numerous different lived experiences and histories? What is their relationship to a collective visual language?” These are the ideas that interest me and are inspiring. In terms of the scale, I would say that the work which had the biggest impact on my artistic practice is the mural I painted at the Hammer Museum in Los Angeles. For that commission I had to react to a very ambitious space and its architectural characteristics, such as the staircase in the museum’s lobby. This taught me how to view my work in the context of architecture and to think about how architecture can inform the work.

VL / At Espace Muraille you are presenting new paintings from the ongoing Infinite Regress series. As we are speaking, the series comprises 177 works in total. When do you imagine the series might be complete? Or is the idea of completion and end an essentially impossible circumstance for this body of work, like its title suggests?

EOG / I am not putting any limitation on it. The Infinite Regress series is an ongoing process; it is in some ways a heuristic practice and in this sense, it generates itself.

VL / I have heard you compare your paintings to architectural structures reminiscent of “sanctuaries”. Adjectives like “transcendent”, “spiritual”, “mystical” are very often used by critics to describe your paintings. Is there actually also a religious or sacred component in your work?

EOG / In terms of architecture I do think of my pieces as having certain moments that are very architectural, especially if you look at the lower section of my paintings in the Infinite Regress series. In fact, I think they directly relate to architecture. For instance, I have always been very inspired by Carlo Scarpa. The way he incorporated some gold elements in his work and his obsession with the circle and the square as elemental forms very much resonate with me. The more I produce pieces at a large scale, the more I start to view them as extensions of architecture. In terms of the spiritual aspect of my work, I try to avoid any simplification. Of course, an artist’s work can end up being interpreted in many different ways, and there is a certain element to transcendentalism within my work. Especially when I think about the state of mind I was in when I started to create the series… In some ways, painting for me has always been a sacred place. I think it is underestimated how much painting can function for an artist as a place to work through many different ideas, emotions and experiences. There is something magical and divine about being able to conjure up this emotional content and being able to translate that and communicate it to so many people. At the same time, I want people to feel free to have their own interpretation. I am connected to a sense of quotidian spiritualism, something that is born out of everyday life. I am interested in the work as a means to explore my personal history as well as the idea of time and different cultural histories. VL / What does your professional future look like? What are your next projects and what are you working on at the moment?

EOG / There are exciting times ahead for me… To start with, early next year I have a large solo show at the Museum of Contemporary Art Denver for which we are also producing an accompanying catalogue published by Rizzoli. I am also opening an exhibition titled “Non Plus Ultra” at the Anderson Collection at Stanford University this fall.

BIOGRAPHIE EAMON ORE-GIRON

L'ARTISTE / Né en 1973 à Tucson, Arizona, Eamon Ore-Giron a passé de longues périodes au Mexique et au Pérou, avant de s'installer à Los Angeles, où il continue de vivre et de travailler. Il a obtenu un baccalauréat en beaux-arts au San Francisco Art Institute et une maîtrise en beaux-arts à l'Université de Californie à Los Angeles.

Le travail d'Eamon Ore-Giron a été présenté dans d'importantes expositions collectives, notamment «Soft Power» au San Francisco Museum of Modern Art (2019) et «Made in LA 2018» au Hammer Museum à Los Angeles (2018). Il a participé à «Something Else», la Biennale OFF du Caire (2015) et à la California Biennial du Orange County Museum of Art à Newport Beach en Californie (2008). Son travail a également fait l'objet de plusieurs expositions personnelles, entre autres au LAXART à Los Angeles (2015) et à la Pennsylvania Academy of the Fine Arts en Philadelphie (2005). Au sein du duo artistique LOS JAICHACKERS, son travail a été exposé au Pérez Art Museum Miami (2013), au Los Angeles County Museum of Art (2008), et à l'occasion de «Prospect.3» à la Nouvelle-Orléans (2014).

Ore-Giron a été sélectionné pour réaliser d'importantes commandes publiques par la New York Metropolitan Transportation Authority et LA METRO pour les stations de métro de Brooklyn et Los Angeles, respectivement. Ses œuvres font partie des collections suivantes: Hammer Museum, Los Angeles; Kadist, San Francisco; Los Angeles County Museum of Art; Museum of Fine Arts, Boston, MA; Pennsylvania Academy of the Fine Arts, Philadelphia; Pérez Art Museum Miami; San Francisco Museum of Modern Art; et le Whitney Museum of American Art, New York.

BIOGRAPHY EAMON ORE-GIRON

THE ARTIST / Born in 1973 in Tucson, Arizona, Eamon Ore-Giron spent extended periods of time in Mexico and Peru, before settling in Los Angeles, where he continues to live and work. He received a BFA from the San Francisco Art Institute and an MFA from the University of California, Los Angeles.

Eamon Ore-Giron’s work has been featured in important group shows, including “Soft Power” at the San Francisco Museum of Modern Art (2019) and “Made in L.A. 2018” at the Hammer Museum, Los Angeles (2018). He participated in “Something Else”, the OFF Biennale Cairo (2015) and the California Biennial at the Orange County Museum of Art, Newport Beach, California (2008). He has also had numerous solo exhibitions, among others at LAXART, Los Angeles (2015) and the Pennsylvania Academy of the Fine Arts, Philadelphia (2005). As part of the artistic duo LOS JAICHACKERS, his work has been shown at Pérez Art Museum Miami (2013), the Los Angeles County Museum of Art (2008), and on the occasion of “Prospect.3” in New Orleans (2014).

Ore-Giron has been selected to realize major public commissions by the New York Metropolitan Transportation Authority and LA METRO for subway stations in Brooklyn and Los Angeles, respectively. His work is held in the following collections: Hammer Museum, Los Angeles; Kadist, San Francisco; Los Angeles County Museum of Art; Museum of Fine Arts, Boston, MA; Pennsylvania Academy of the Fine Arts, Philadelphia; Pérez Art Museum Miami; San Francisco Museum of Modern Art; and the Whitney Museum of American Art, New York.

IMPRESSUM / COLOPHON

Traduction / Translation Sophie Müller

Crédits photographiques / Photo credits Luca Fascini, Geneva Charles White, New York / pages 01, 19 (fig.1), 29, 40, 41, 47, 62 Barbara Katus / page 19 (fig.2)

Graphisme / Design 2S Stefan Sigel

Photolitho / Prepress Solutionpixel

Imprimeur / Printer Atar Roto Presse SA

Imprimé à 500 exemplaires 500 copies printed

© Espace Muraille 2021 © Eamon Ore-Giron 2021 All rights reserved. No part of this publication may be reproduced in any manner without permission, in writing, by publisher and artist. All images are courtesy of the artist and the Espace Muraille. All texts reproduced by kind permission of the authors. Commissaire d'exposition / Exhibition curator Valentina Locatelli

Remerciements / Acknowledgements Studio Eamon Ore-Giron Caroline et Eric Freymond Nicolas Christol, Antoine Boillet Christopher Duckett

ESPACE MURAILLE

5 PLACE DES CASEMATES CP 3166 / 1211 GENEVE 3 / SUISSE

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