« En dix mots comme en cent » n° 4 mars 2016

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« En dix mots comme en cent »

Le journal des « dix mots » en Auvergne-rhône-Alpes n° 4 — Mars 2016

Création collective réalisée au cours de l’atelier « Cadavre exquis des dix mots » avec Antoine LouisgrAnd. Journée de rencontre régionale, le 15 octobre 2015 – Centre culturel le Toboggan – DéCines (69).

21e Semaine de la langue française et de la Francophonie du 12 au 20 mars 2016


► édito

par Thierry renard

Bien commun « On n’en finira jamais avec la sensation. » André Breton, L’Amour fou Depuis 1999, l’espace Pandora coordonne en Rhône-Alpes les actions menées, chaque année, autour du jeu des dix mots et de la Semaine de la langue française et de la Francophonie. Depuis 1999, nous concentrons efforts et énergie sur cette noble cause : assurer la promotion – non la défense – de la langue française, en veillant à respecter la diversité de ses voix. La tâche est périlleuse mais porteuse d’espoirs véritables. elle consiste, en particulier, à faire bouger les lignes et à rendre la parole à celles et à ceux qui ne l’ont plus.

Depuis plusieurs années maintenant, un Comité de pilotage régional – composé de partenaires financiers et d’associations de terrain – préside aux destinées de toute l’opération. notre territoire s’est également élargi puisque l’Auvergne est aujourd’hui entrée dans notre champ d’action. C’est d’ailleurs pourquoi nous avons décidé d’unir quelques-unes de nos forces à celles de l’équipe de la semaine de la poésie de Clermont-Ferrand – avec qui nous entretenons déjà des liens étroits depuis longtemps. Les enjeux sont de taille et ne manquent pas. De plus, nous nous devons de relever tous les défis du moment. Je l’ai souvent dit, ou écrit, sans passé pas de futur. Mais, attention, veillons à ce que rien ne reste figé, évitons le chemin des habitudes ou la facilité mensongère. Osons, à chaque instant. et, surtout, inventons, inventons des choses

belles, inventons de nouveaux espaces langagiers et de nouvelles expériences artistiques. inventons, avec nos outils, nos moyens, les rêves de demain.

Favorisons l’émergence des talents en herbe, diffusons avec élan notre patrimoine littéraire. Agissons dans le bon sens afin d’écarter de nos « missions » les partisans du repli sur soi, identitaire, ou ceux de la banale exclusion. Chassons les idées noires, les passions tristes, tout ce qui pousse au refus ou qui conduit au renoncement. en toute circonstance, restons vigilants.

nous défendons le concept simple d’une langue pour tous et par tous. Car, plus que jamais, nous sommes convaincus que la langue française est notre bien commun le plus précieux. On n’en finira jamais avec le merveilleux. Amitiés fraternelles et poétiques !

Thierry Renard Directeur de l’espace Pandora, « Agitateur poétique » [Lyon, le 24 février ; saint-Julien-Molin-Molette, le 26]


ChAfouin•ChAMPAgné•déPAnnEur•drAChEr•fAdA

LuMEroTTE•PoudrEriE•risTrETTE•TAP-TAP•VigoussE Définitions extraites des dictionnaires : Le Petit Robert, 2015 & Le Grand Robert 2015

ChAfouin, inE

n. et adj. VieUX. Personne qui a une mine sournoise, rusée. adj. mod. rusé, sournois.

ChAMPAgné

interj. et n. m. Personne d’influence aux nombreuses relations.

déPAnnEur

n. m. Petit commerce, aux heures d’ouverture étendues, où l’on vend des aliments et d’autres articles.

drAChEr

v. impers. Pleuvoir à verse, à torrents.

fAdA

LuMEroTTE

n. f. source de lumière de faible intensité. Légume (betterave, potiron, citrouille, etc) évidé et percé de petites ouvertures, dans lequel on place une source lumineuse.

PoudrEriE

n. f. neige chassée par le vent (souvent en rafales ; cf. Blizzard).

risTrETTE

n. m. Petit café très fort, fait à la vapeur au percolateur (de l’italient ristretto). adj. ORAL. Au sens métaphorique (souvent en lien avec le temps) : serré, limité.

TAP-TAP

n.m. Petit car rapide.

VigoussE

adj. et n. Régional (Midi). Un peu fou. Cinglé.

adj. Vigoureux, vif, plein de vie, alerte (personne). Vigoureux, fort, robuste, résistant (animal, plante). Composition du jury régional du jeu des dix mots 2016 Mercredi 24 février – Centre Culturel Œcuménique (CCo) de Villeurbanne

Pierre-Pascal ANTONINI, Espace Pandora Thierry AUZER, Théâtre des Asphodèles Lola BRINGUIER, Maison de quartier Darnaise Philippe CAMAND, Agence Rhône-Alpes pour le livre et la documentation (ARALD) Marie DELORME, Espace Pandora Philippe DELPY, Préfecture du Rhône Émilie GEORGET, Caravane des dix mots Ansu JACK, Caravane des dix mots Michel KNEUBÜHLER, consultant Clémentine LEGAY, Filigrane

Fernanda LEITE, Centre Culturel Œcuménique (CCO) Toufik OUAHDI, Unité Éducative d’Activité de Jour (UEAJ) de Vénissieux Émilie OUDET, Caravane des dix mots Blandine PILI, Direction régionale et départementale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRDSJS) Denis POURAWA, auteur Thierry RENARD, Espace Pandora Marie-Caroline ROGISTER, Espace Pandora Athénaïs THÉODOSSOPOULOS, Filigrane Patrice VANDAMME, Les arTpenteurs Karine ZUGARO, Délégation académique aux arts et à la culture (DAAC)

Les objectifs du jeu des dix mots :

– inciter toute personne à une expression individuelle ou collective,

– permettre la valorisation de cette expression grâce à différents supports (textuels, visuels, sonores, multimédias).

En 2016, 544 textes individuels & collectifs et 181 créations plastiques ont été reçus dans le cadre de l’appel à contributions des dix mots en Auvergne-Rhône-Alpes. ici sont réunis 57 textes & 12 créations plastiques, tous retenus de manière anonyme.

repères : Opération « Dis-moi dix mots »

organisation : Ministère de la Culture et de la Communication (Délégation générale à la langue française et aux langues de France).

Partenaires francophones : Belgique, France, suisse, Québec et Organisation internationale de la Francophonie (70 pays dans le monde). Plus d’infos : www.dismoidixmots.culture.fr

Comité de pilotage rhône-Alpes : Direction régionale des affaires culturelles d’Auvergne-Rhône-Alpes ; Préfecture du Rhône ; Direction régionale et départementale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale ; Région Auvergne-Rhône-Alpes ; Délégation académique aux arts et à la culture de Lyon ; Agence Rhône-Alpes pour le livre et la documentation ; les associations Filigrane, Caravane des dix mots et espace Pandora.


écrivains francophones d’ici et de là-bas… denis Pourawa

né en 1974 à nouméa, nouvelle-Calédonie, denis Pourawa trace une écriture crue issue de l’urbain, concise, ciselée, mais aussi chaleureuse et habillée des rythmes de sa riche culture mélanésienne.

Poète forgé par son pays, venu à Paris avec la ferme volonté de se frotter au vieux continent, il y entreprend un projet d’écriture et de recherche sur les arts de la scène (performance / théâtre / spoken word / vidéo…).

ses derniers livres : La Tarodière (Vents d’ailleurs, 2010) ; Entre voir les mots des murs (l’herbier de feu – grain de sable, 2006) ; Téâ Kanaké, l’homme aux cinq vies (grain de sable jeunesse, 2003). denis Pourawa est le septième auteur en résidence à Vénissieux, du 1er février au 30 avril 2016.

Témoin Chacun l’a vécue une histoire de terre revendiquée de rêve désemparé d’habitation carbonisée d’effort blessé ***

rosée du chemin Quand tu lèches le grand matin gonfle nos vies entre tes mains nous t’aimons libre rosée du chemin sans cesse tu renais dans la magie d’un monde aîné Amour et longue nuit

Xwi xwâî rè ngêê pa dopua Kè va fa xëtë têpe rè nèjâârèköö Mè ngêê nöö va xwèrii rö ***

Crache ton venin sur ces murs de béton frappe du poing et que gicle ton sang Tiens-toi debout, à genoux sur ton ombre respecte le danger et ne souffre jamais Le premier respire avec dignité Le second renifle sa fierté Le troisième cherche

© Michel Calzat

Trouve Chaussure à son pied dans cette terre plus qu’ailleurs respecte et ne doute jamais

Ces trois textes sont extraits du recueil Entre voir : les mots des murs (éditions L’herbier de feu /éditions grain de sable, 2006).

fatoumata Keita

écrivaine talentueuse, fatoumata Keita est née en 1977 au Mali. Administratrice de l’action sociale, elle est diplômée en socio-anthropologie et en socioéconomie du développement. Telle une pluie torrentielle sur une vie qui a besoin d’éclat de soleil, ses poèmes chantent les combats encore à mener par les femmes maliennes pour l’amélioration de leurs conditions de vie.

surnommée par ses proches comme « La fille rebelle du Mandé », fatoumata Keita se définit elle-même comme « une poétesse engagée et révoltée par tout ce que nos politiques font vivre aux populations ».

Elle est l’auteure du roman Sous Fer (sahélienne/ harmattan 2013), traitant du tabou de l’excision, mais également de Crise sécuritaire et violences au Nord du Mali (2014, sahélienne), de Polygamie gangrène du peuple (nouvelle, nEA 1998), et du recueil de poèmes À toutes les Muses (Mandé éditions, 2014).

souvenir Je me souviens d’un rêveur qui aimait le fleuve. il disait que le fleuve est source de bonheur. de bonheur mais aussi d’espoir inouï. Qu’avec lui, la joie ne dit jamais au revoir. Qu’avec lui chaque matin appelle l’espoir. Le fleuve rassemble ceux qui respirent la vie... il embellit nos villes et relie les rêves, chantait-il. Cet homme qui aimait le fleuve se nommait grand-père. il avait toujours un air rêveur. Le soir, me disait-il, quand le soleil se mire dans les yeux de l’eau, avant d’aller mourir au coin du ciel, le fleuve sur ces berges répand la paix et l’amour. il m’a gavé de joies et d’histoires, cet homme qui aimait le fleuve. Allongé dans son hamac, il nous faisait comprendre que le fleuve unifie les régions qu’il longe ou traverse et apporte les morceaux des uns dans le logis des autres. C’est pourquoi lui il le chante ; car il force l’admiration de ceux qui le contemplent et écoutent ses murmures. il porte sur son flanc le progrès à travers les champs, les rizières et les potagers qu’il nourrit. il rassemble les êtres vivants et les invite à la fête. Je me souviens de ce sage qui, sa flûte suspendue à ses lèvres, jouait pour le fleuve. grâce au fleuve, disait-il, dans ses refrains, les ponts sont possibles. des ponts pour nous voir. des ponts pour nous croiser. des ponts pour nous rencontrer. des ponts pour nous écouter. des ponts pour nous sentir. des ponts pour nous parler. des ponts pour nous comprendre. des ponts pour nous aimer. des ponts pour nous unir et pour donner à l’humanité ses fruits. J’aimais cet homme qui chantait le fleuve. Cet homme qui aimait le fleuve, le fleuve qui vivifie les cœurs, qui abreuve les amours et assure la survie de l’humanité. Moi, j’aime les ponts sans lesquels la liaison des deux rives est malaisée. Ce texte de fatoumata Keita est inédit. il réunit les deux fleuves, le niger, d’une part, qui coule à Bamako, le rhône, d’autre part, qui coule à Lyon. il a été écrit à l’occasion du projet d’échanges entre lycéens de Lyon et de Bamako (Lycée saint-Exupéry et Lycée Liberté), dans le cadre de l’édition 2016 du Printemps des Poètes, en partenariat avec l’association ALTErEss.


Les dix mots vus par Antoine Louisgrand Propos recueillis par Julie Dorille – Comment êtes-vous rentré dans « l'aventure dix mots » ?

J’ai découvert les dix mots en 2006, lors d'une invitation à rejoindre la Caravane des dix mots pour y apporter ma contribution en tant qu'artiste visuel. Je me souviens de cette première réunion très vivante, emplie d'artistes et de personnes engagées en direction des arts, de la langue française et du partage. Une démarche novatrice à l'époque, qui a su se renouveler et évoluer au fil des années.

– Que représentent les dix mots pour vous ?

Les dix mots sont un jeu de l'esprit fondé sur une base commune. s’ils tiennent peu de place, ils ouvrent grand la porte à là sensibilité des êtres, à l'expression, à la rencontre, au partage et à la poésie de la vie. Dans mon cas, ce sont surtout 10 ans de « création partagée », à jouer avec l'imaginaire des publics rencontrés. Mon principe de travail est simple. Je cherche à retranscrire en dessins ce que produit dans l'esprit un mot ou une combinaison de mots. Ce principe est adapté aux temps limités des ateliers et va à l'essentiel : imaginer, visualiser, exprimer une idée, avant de la mettre en forme par le dessin, et de la faire briller. Ce procédé s'est avéré être sur le terrain un formidable outil, basé sur le langage universel de l’image. Utile pour aller à la rencontre, partager en plaisir, valoriser des individus, fédérer des groupes et faire naître ensemble ce que nul n'aurait imaginé en entrant dans l'atelier. Que ce soit à l’école, en prison, en foyer, en formation, en centre social, à l'hôpital, en iMe ou en maison de retraite, je peux vous garantir que nous nous sommes bien joués des dix mots... et que je ressors enrichi de ces années de partages. – Parmi les dix mots cette année, lequel a votre préférence ?

Cette année les dix mots sont « tous azimuts », ouverts sur les richesses du monde francophone, à la différence de certaines années où ils tournaient autour d'une thématique et d'un auteur. Mon attention se porte sur le mot « dépanneur ». Au-delà de son sens premier et de son origine canadienne, il met en jeu la notion de « système D », de débrouille : trouver une solution, aller à la rencontre de quelqu'un pour résoudre un problème. Cela fait écho aux ateliers des dix mots que je mène, où quelque soit la situation, les publics, le contexte, je tente de proposer une solution adaptée pour tirer le meilleur de la rencontre. Une véritable science de la jonglerie et de l'improvisation. Vous pouvez retrouver les bilans PDF de ces ateliers sur le site : www.alart.in, au chapitre « Création partagée ».

du côté des territoires

Propos recueillis par Julie Dorille L’AssfAM - Association Service Social Familial Migrants – est présente en ile-de-france et en région Auvergne-rhône-Alpes. Elle a pour mission d’accueillir les migrants et leur famille, de faciliter leur arrivée et leur installation, de contribuer à leur insertion, de les informer sur leurs droits, leurs devoirs, le fonctionnement des institutions et administrations françaises et de favoriser leurs liens avec leur nouvel environnement de vie. En isère, l’AssfAM compte 4 travailleurs sociaux (2 à Vienne et 2 à grenoble), qui mènent, entre autres, des actions culturelles au service de la maîtrise du français. Les ateliers de pratique artistique autour des dix mots font partie de ces actions. ils sont destinés aux personnes d’origine étrangère dont la non maîtrise de la langue est un frein à l’insertion, car nous sommes convaincus que l’accès à la culture est un vecteur d’insertion. Patricia Mathern, Conseillère en économie sociale et Familiale, formatrice FLe à l’AssFAM de Vienne – Patricia, pourquoi avoir choisi de travailler avec les «dix mots ?

Un (heureux) hasard ! Début 2012, toute nouvellement arrivée à l’AssFAM, j’ai été sollicitée par ViennAgglo, tout comme les autres structures du territoire, pour participer à une action autour des dix mots. en partenariat avec le Centre social de Malissol, nous avons décidé de proposer une activité « calligraphie » aux apprenantes de l’Atelier socio Linguistique de l’AssFAM et à des femmes qui fréquentaient le Centre social pour des activités de socialisation. nous avons ainsi démarré ce qui est aujourd’hui une fructueuse collaboration avec Filigrane, en faisant intervenir une artiste calligraphe : salima Lekouara.

Ce fut non seulement l’occasion d’expérimenter un processus de création, mais aussi de favoriser des échanges entre les habitants du quartier, de vivre des moments de rencontres entre celles qui maîtrisaient le français et celles qui étaient en apprentissage de la langue, et de mettre en valeur les créations artistiques des participantes lors d’une restitution finale qui a réuni de nombreuses structures au cours d’une soirée festive. Depuis, à Vienne, nous avons renouvelé l’aventure chaque année avec, à chaque fois, de nouveaux mots et une nouvelle pratique artistique (LsF/ photos/…), sous la direction bienveillante d’autres artistes de Filigrane. À partir de 2013, en collaboration avec la Maison Pour Tous des Roches, nous avons mis en place une action similaire avec les apprenants de Villefontaine. Puis, en 2016, les apprenantes des Ateliers socio Linguistiques de Chavanoz et de Charvieu ont été réunies pour participer au projet débouchant sur l’exposition actuelle de calligraphie. – Pourquoi donc avoir continué à participer à l’opération ?

Une vraie volonté !… avec l’ambition de mettre chaque participant(e) au centre du projet.

si, dans chacun des ateliers menés, tous les dix mots ont été exploités, expliqués, triturés, écrits, parlés, déformés parfois, provoquant perplexité ou rires chez les participants, ils sont surtout prétextes à provoquer des émotions, à apporter du bien-être, à mettre en avant des potentialités, à permettre des expressions artistiques, à construire quelque chose ensemble, à donner confiance, à créer une ouverture (sur soi, sur autrui, sur leur territoire), à favoriser les liens dans le groupe, à rapprocher des artistes et des publics qui en général n’ont pas facilement accès à la culture, et surtout à s’enrichir mutuellement (participants /artistes/ et… moi, animatrice des Ateliers socio Linguistiques)...

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des projets plein la tête Par Julie Dorille

de plus en plus, les dix mots séduisent les scolaires. Cette année encore, pas moins de 20 classes de la région – et d’ailleurs – ont participé au Jeu des dix mots Auvergne-rhône-Alpes. Qu’ils soient accompagnés par des auteurs, des artistes plasticiens, ou tout simplement par les enseignants, les ateliers autour des dix mots permettent aux élèves de s’ouvrir à la francophonie, d’une part, d’avoir une nouvelle approche de l’écriture et de la langue, d’autre part. Myriam Monfront, professeure de Lettres Modernes en zone d’éducation prioritaire (ZEP), au Collège Maria-Casarès de rillieux-la-Pape (69), nous a fait part de sa propre démarche pédagogique et de son intérêt pour l’opération. C’est en 2010, grâce à la documentaliste du collège, que la professeure découvre l’opération « Dis-moi dix mots ». Dès lors, elle participera et fera participer ces élèves chaque année : « Le concours des dix mots nous jette une poignée de mots sur le tapis, sans forcément de lien entre eux... Et du coup, comme le Petit Prince, il nous faut les explorer chacun, comme une nouvelle planète… Chaque fois, on redevient un enfant ouvrant un paquet-surprise ! ». Ainsi, chaque année, Myriam Monfront découvre avec bonheur les nouveaux mots et s’exerce à l’écriture et à la création plastique avant de proposer un nouveau projet pédagogique autour de ceux-ci à ses élèves. « Cela fait plusieurs années que je constate que si je prends la peine de me retrousser les manches pour écrire, cela stimule les élèves par ricochet et les éperonne. Si je leur propose mes dessins aussi maladroits ou gauches soientils, cela aiguise leur propre imaginaire et leur désir de trouver leur mode d’expression personnel, autant au niveau des arts plastiques que de l’écriture… ».

Ce qu’apprécie tout particulièrement la professeure dans ce concours régional, c’est la proximité et la valorisation du travail fourni, ce qui n’est pas toujours le cas au niveau national – et elle ne tarie pas d’éloge à ce sujet : « Désormais je fais le choix de ne concourir qu’au niveau régional car l’équipe du Jury est reconnaissante vis-à-vis de nos productions et cela communique de nouvelles forces pour poursuivre cette investigation individuelle et collective avec mes élèves ».

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« Ce qui est génial, c’est que l’aventure des dix mots stimule notre capacité de créer d’inventer, d’imaginer, de rêver à partir des mots, et d’écrire… d’accoucher de textes, de poèmes, de dessins, de projets nouveaux, variés… inédits. Comme chaque année les mots changent, cela oblige l’enseignant et ses élèves à s’adapter à des situations imprévues… C’est ce que j’aime et qui me plaît dans cette démarche. […] La pratique de l’écriture permet en effet aux élèves de s’approprier des techniques, des procédés observés dans les textes étudiés en classe et de les réinvestir dans le jeu de l’écriture, d’où l’intérêt de ce Concours, tremplin idéal pour une pratique systématique et ludique de l’écriture. Cela s’inscrit comme un prolongement des séquences didactiques effectuées en classe. »

ses élèves en sont d’ailleurs régulièrement récompensés puisque des textes ont été sélectionnés à plusieurs reprises par le Jury. notamment en 2013, Bouquet de couleurs, texte collectif ; 2014, Toc Toc Toc dans un immeuble de oufs, texte collectif de rap travaillé avec le duo Les Réfugiés Poétiques ; 2015, Songe chromatique et Anagramme Polaire – Texte collectif d’une classe du Collège Jean-Perri, et aussi en 2016 !

« Les enjeux sont pédagogiques et humanistes »

elle insiste par ailleurs sur l’enjeu éducatif et culturel de l’opération : « Les dix mots apportent un enrichissement au niveau linguistique et culturel… nous intriguent. [...] Ils nous obligent à nous interroger sur notre langue comme matériau vivant, multiple et multiculturel ». ils permettent ainsi de donner confiance aux élèves dans la démarche de l’écriture, qui engendrent un épanouissement, à la fois collectif et individuel, « de trouver une voie singulière, à travers leurs mots, à travers leur cheminement et leur réflexion personnels, de cultiver leur sensibilité, d’explorer leur créativité enfouie, d’exister, tout simplement, car l’acte d’écrire nous pose, nous ancre, nous socialise aussi, en tant qu’individu et en tant que citoyen. ».

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1. roxanne – 2. sylvia – Atelier d’art-thérapie – Centre hospitalier – sAinT-CyR-AU-MOnT-D’OR (69). Animatrice : Christine ChALARD

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rencontre avec Yvon Le Men Propos recueillis par Thierry Renard – Cher Yvon Le Men, cher Yvon, cette année tu es l'un des parrains (en direction de la jeunesse !) de l'édition nationale du Printemps des Poètes, tu es pareillement l'un des auteurs retenus pour le choix de l'un des dix mots à l'occasion de la prochaine semaine de la langue française et de la Francophonie. Et tu as choisi « tap-tap » ! C'est, donc, ton mot ?

© éric Legret

C’est la Semaine qui a choisi le mot. ils l’ont trouvé dans un poème que j’ai cueilli en haïti. Ce pays de peintres et de poètes. il flottait au vent d’un autobus bondé comme un sac de bonbons, la veille de noël. il cahotait d’un trou à l’autre sur la route qui suivait le rivage. et les gens de là-bas lui avait donné, depuis longtemps, le nom qui lui convenait : tap-tap , car il trimbalait le monde, de long en large, de flaques en flaques et surtout de haut en bas, entre terre et ciel, contre lequel, parfois, il se cognait la tête. C’est de la poésie involontaire, à l’état pur, comme l’aurait dit Paul éluard. Oui c’est un nom que j’aime, parce j’aime ce qu’il raconte.

– Tu as connu certains démêlés personnels avec Pôle Emploi, tu as été blessé, profondément je le sais... Et tu es là, toujours, porteur d'une parole d'espérance et de révolte. Mais chez toi tout passe par la langue, tu exprimes tout, du plus bas jusqu'au plus haut. Peux-tu nous dire quel est, du coup, ton rapport intime, privilégié, poème ou prose, à notre langue ? J’aime les mots. J’aime quand ils se frottent l’un contre l’autre, comme deux silex, pour allumer le poème. Quand j’étais petit et que nous devions faire la vaisselle, on la divisait en deux parts : la vaisselle sale et la vaisselle propre. La sale était non pas celle qui n’était pas lavée, mais celle des cuillères, des casseroles et des fourchettes : la grise. La propre, qui n’était pas non plus lavée, était celle des assiettes, des verres, et des soupières : la blanche. Ce n’était pas logique, c’était poétique. J’aime les mots, car sans eux nous sommes collés au sol à jamais. Avec les mots et une pile électrique nous changions de vies, à chaque livre et sous les draps, dans la nuit de nos enfances. nous tentions de traverser le chemin qui nous séparait de l’aimée, à perte parfois, mais sans eux, c’était pire. Avec les mots, nous levions le poing, nous remontions notre âme au bord des lèvres, nous faisions pousser nos ailes. Avec les mots, quand ils deviennent des noms, le monde s’éclaircit, s’épaissit et s’éclaircit à nouveau. À la poursuite de la lumière, en sautant à pieds joints à travers les ombres. Qu’ils soient en prose, pour ne pas laisser s’échapper le moindre détail, ou en vers, pour aller plus vite à l’essentiel, les mots, quand ils deviennent une langue tendue comme un fil au-dessus du vide, nous sauvent, de nos ailes de géants qui nous empêchent de marcher.

– Les rumeurs de Babel (éd. Dialogue, illustrations emmanuel Lepage) est un long poème écrit sur le vif dans le quartier de Maurepas, le lieu « le plus pauvre » de Bretagne :

À Maurepas, qu’on le veuille ou non, nous sommes ensemble par le bruit qui déborde de partout. Trop ensemble, par le plancher, le plafond, les fenêtres. nous sommes ensemble contre notre gré. Mais pas toujours. D’où le poème en continu qui m’attend dans la tête en battant la mesure comme une vibration qui nous relie les uns aux autres. Avec peine, de temps en temps ; avec joie, aussi. si le voisin est bon, la chanson sera bonne…

– Une île en terre (éd. Bruno Doucey) se souvient de mon enfance à la campagne dans le plus petit hameau qui soit et que certains gamins de l’école d’à côté appelaient le « Bronx » :

Cinq, six maisons, une route au milieu. La première église, la première école à trois kilomètres à pied, entre chien et loup, pour les enfants ; à vélo, puis plus tard à mobylette, à pas d’heure, pour les parents. L’école pour grandir sur la terre, l’église pour monter au ciel et un jour y enterrer ses parents.

Mon pays, c’est le pays de mes tombes. Mon pays, c’est le pays de mes rêves qui passaient par la lucarne de la cuisine, en bleu et blanc comme les cygnes sauvages quand ils traversaient les nuits de mes premières lectures. sans ciel, pas de terre ; sans terre, pas de ciel.

– Tirer la langue (éd. La passe du vent), comme son titre l’indique, raconte le frottement entre les langues, celles des jours et des nuits qui traversent toutes les vies et celles des « spécialistes » en tous genres : politiques, scientifiques, culturels etc. etc. Quand on tire sur la langue, quand on tire la langue, quand on étire la langue jusqu’à l’aplatir. – Enfin, quels sont aujourd'hui tes projets, dans l'écriture comme dans « l'autre » vie ? Mes projets, comme toujours, c’est que le poème et la vie se rejoignent dans ma vie... enfin !

– Plusieurs ouvrages de toi paraissent en ce printemps poétique. Tu viens à Lyon comme chez toi. Tu es parmi nous en début de Printemps et, aussi, en fin de semaine, présent lors des deux manifestations. Peux-tu, d'une part, nous présenter en quelques mots chacune de tes récentes publications et, d'autre part, pourquoi tu tires toujours la langue ?

Tirer la langue.- éditions La passe du vent, 2016. 60 p., 12,5 x 21 cm.- isBn 978-2-84562-281-4.- 10 €

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Cyrille BirTÈQ uE, 46 ans – Ateliers d'arts plastiques à l'ARiMC par les arTpenteurs – LyOn (69)

Rocky, il met un coup de poing, il tap-tap un mec, paf paf !

filinto gonCALVEs, 44 ans Atelier ARiMC – éCULLy (69) Animateurs : Jean-Baptiste CABAUD, poète & Annie LeBARD, plasticienne – Les arTpenteurs

« Poudrerie poudre roule poule roucoule poule débaroule. Poudrerie poursuivent , poursuivant la poule piaillant poussant ses poussins en poussette… » hugo nguyEn, classe de 5e 2 Collège MARiA-CAsARÈs – RiLLieUX-LA-PAPe (69) enseignante : Myriam MOnFROnT

tte

Collectif : Chloé Bossé, stéphanie giBELin, Jinane griCh et inès MiChALon Classe de 6e 2, Collège/Lycée Chevreul Lestonnac – LyOn (69) – enseignant : Matthieu FinCk

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CARneT De BORD

Mes mots vont prendre la parole, dracher, faire une farandole, vous conter l’périple en tap-tap, entre Agadir et Ouarzazate.

LA PoudrEriE

La poudrerie dans l’aube rose si doucement la poudrerie Que le chaton croit rêver C’est à peine s’il ose marcher

Le TAP-TAP enDiABLé

C’est le plus top des tap-taps, Jamais trouvé dans un troc. Lavé, décroûté, décrotté, Rapatrié dans le charter d’un champagné, il mène un train d’enfer, Traverse les contrées, Fait défiler les lumerottes à l’envers, secoue les corps, secoue les morts, Agrippe la terre en marche arrière, Dans une poussière crachée par un fada furieux. il peut dracher, poudrer, champagner, On peut être mille à s’accrocher aux portières, Rien, absolument rien, ne peut arrêter, sa course folle de lévrier.

La poudrerie dans l’aube rose si doucement la poudrerie Que les choses semblent avoir changé

et le chaton noir n’ose s’aventurer dans le verger À cette blancheur où se posent Comme pour le narguer Des moineaux effrontés

noham ghouLAM, 8 ans école élémentaire FAURieL classe de Ce2/CM1 sAinT-éTienne (42) enseignante : Mme FAURe

danièle sAVoiE, 72 ans – ViLLeURBAnne (69)

Dès le matin en sortant de chez moi Une douce poudrerie dehors Mlamaly nissoiTy, classe de 6e Collège JULes-MiCheLeT – VénissieUX (69) Animateur : Thierry RenARD

L’chargement qui n’en finit pas, les motos qu’on hisse sur le toit, à l’intérieur les passagers, sont presque tous endimanchés : Des hommes vigousses ou gringalets et tout devant le Champagné, un père blanc à l’air chafouin, quelques femmes qui donnent le sein. Ça s’interpelle, ça rit ça pleure, il y a d’la vie et d’la couleur. Des coups d’ klaxon, les coups d’volant, l’fada qui traverse juste devant… !

Mes mots vont planter le décor, vous emm’ner cette fois dans l’grand nord, là où la neige tombe en rafales, où poussent des aurores boréales.

Le départ au petit matin sur une route en serpentin et tout là-bas un ours brun que l’on distingue dans le lointain. À dix heures la pause ristrette, tartine au beurre de cacahuète. Le soir dîner dans une gargote éclairée à la lumerotte. Le petit commerce d’à coté, est prisé des gens du quartier, l’dépanneur ouvre jusqu’à minuit, même par temps de poudrerie !

Je me souviens comme Georges Pérec de l’Afrique noire et du Québec. Marcel goudEAu – sAinT-éTienne-De-ChiGny (37)

CARnAVAL Des 10 MOTs Qu’ils sont loin du bonheur

Des petits dépanneurs et de la poésie

Des jours de poudrerie

Tous les chafouins fadas Qui ont pour seul dada

De vivre en champagnés Au-dessus du panier

en Rolls, pas en pousse-pousse

ils se sentent vigousses

Pourtant leur vie ristrette est vraiment tristounette À nous les lumerottes

Les joyeuses marottes

À bord de nos tap-taps

De la pluie on s’en tape

Oui, il peut bien dracher

Rien ne peut nous fâcher. Jany goBEL (73 ans) – ThOnOn-Les-BAins (73)

sabrina nAfouTi, 11 ans – Centre social et culturel – GRiGny (69) Animatrice : Evelyne droZ

« En dix mots comme en cent » – Mars 2016 – Page 9


De LA VigoussE À LA Vie DOUCe

Vigousse je vibre, je tremble, je m’agite, je fébrile, je hoquète, je sursaute, vite, Vite, Vite, ViTe, ViTe, de plus en plus ViTe. Je désynchronise, je m’énergise, j’accélère, j’halète, je m’excite, je m’affole. Puis je baisse la cadence, je décélère, je ralentis, je me calme, je m’apaise. et là, tout à coup je stoppe, je cesse, mon corps enfin au repos. et je sens tout ce fluide déployé qui continue à circuler dans mes mains, dans mes poignets, dans mes bras, dans mes épaules, dans ma poitrine, dans mon ventre, dans mes reins, dans mes cuisses, dans mes pieds et même dans mes fesses, dans mes mollets, dans mon sang, dans mes nerfs, dans mes muscles, dans mes os. Ça fourmille, ça frémit, ça s’agite. Puis ce fluide ralentit, se calme, s’apaise, s’arrête. Martine siLBErsTEin Atelier Journée de rencontre régionale Le TOBBOGAn – DéCines (69) Animateur : yves BéAL

Parisien Champagné Avec ton ego voltigeur Tu te moques du dépanneur et pourtant t’es rien sans ton blé Dans ton costume de pingouin De là-haut, tu nous balances des regards chafouins Mais aujourd’hui c’est avec toi, Paris, que je pleure Ça a draché des corps Ça a draché des cœurs Ça a tap-tap et troué le décor Mais tous ensemble on sera plus fort

Ce soir du 8 décembre 2015 notre ville brille d’infinies lumerottes Pour rendre hommage à tous nos potes Ce soir dans tous les cafés C’est ristrette à volonté

Aujourd’hui c’est avec toi, Paris, que je pleure Ça a draché des corps Ça a draché des cœurs Ça a tap-tap et troué le décor Mais tous ensemble on sera plus fort

De marchand de sommeil à marchand de soleil Jamais « Jawad, j’irai dormir chez toi » Dans cette maison de fadas Où on ne joue pas à la Fifa, mais seulement à la guérilla. Demain, la poudrerie se taira Demain, enfin le jour se lèvera

J’en ai marre De tous ces mots Qui sans crier gare Font les rigolos

ils changent de sens comme bon leur semble et quand ils se ressemblent C’est problème immense !

Vigousse ou vigoureux Lumerotte ou lanterne dracher ou pleuvoir et j’en passe !

Aujourd’hui c’est avec toi, Paris, que je pleure Ça a draché des corps Ça a draché des cœurs Ça a tap-tap et troué le décor Mais tous ensemble on sera plus fort. Collectif : elèves de terminales (17 ans) : Atelier Les sLAMeURs De L’heURe Alix ChArVin, Marjorie ChEniVEssE, Léa CLErC, Adam diouri, Cécile godArd, Margo JournET, élodie LAMBErTi, Jade LAuriAn, Marie-Amélie MArCo Lycée privé LA XAViÈRe – Lyon (69) Professeures : nadia GUiChARD et Virginie sPADeR

Agnès CArosso Atelier d’écriture ChATULiVRe ChATUZAnGe-Le-GOUBeT (26) Animatrice : évelyne ChOVeT

LE TAP TAP

Jour dE PLuiE

Christian décide de ne pas sortir aujourd'hui. Pas question. Pas moyen. il drache depuis le matin : du jamais vu ! Ça veut pas s'arrêter. Des seaux d'eau qui s'abattent sur la ville. il n'a jamais vu new york comme ça. il se demande si ça serait pas le signe du dérèglement climatique. Les nuages sont si épais qu'il fait nuit en plein jour. « Comment travailler dans ces conditions ? » il peste et, d'un air chafouin, fait les cent pas, trépigne. son rendez-vous avec le champagné, il a dû l'annuler. il est bien embêté. Le mec, la dernière fois, lui avait promis une expo dans une grande galerie : « J'ai mon réseau. Je peux te présenter des gens importants », qu'il avait dit. Ça l'avait scié. Personne jusqu'à présent ne s'était jamais vraiment intéressé sérieusement à ses sculptures. Dans son entourage, on lui demandait toujours : « T'as voulu représenter quoi au juste ? » Ça le foutait en rogne. Bref. La revanche, c'est pas encore pour aujourd'hui. Christian essaie quand même de faire quelque chose. Pas évident parce que, par-dessus le marché, les plombs ont sauté. il malaxe mollement sa terre glaise et n'arrive à rien avec cette lumerotte. Rien trouvé de mieux pour s'éclairer. C'est décidément pas son jour ! Finalement, il jette l'éponge. il ne créera rien de bon. il le sent. il a un coup de mou. Pas mal d'années qu'il attend le grand jour. Celui de la reconnaissance. Avec un grand « R ». De quoi devenir fada. Mais ça vient pas. À cinquante ans, il est aigri, déçu. il se dit : « C'est ristrette maintenant pour devenir quelqu'un ! » et broie du noir. Au fond, Christian, il n'a jamais été très vigousse. C'est sans doute ça qu'il paie. son manque de vigueur. Ce soir, si la pluie s'arrête, il passera au dépanneur, s'acheter une bouteille. Pour se relancer. nathalie EsTEBAn, 35 ans – RAMOnViLLe-sAinT-AGne (31)

il file sur la piste, le tap-tap bariolé, bondit sur les bosses, secoue ses passagers, comme dans un saladier. notre seigneur peint en rouge et or sur le capot, ouvre grand ses bras protecteurs, aux voyageurs. Dans la lumière pâle, une poudrerie de poussière rêche, assèche les bouches, irrite les yeux. À l’étape ristrette, on avale quelques gorgées. Le chauffeur à la mine chafouine, encaisse la monnaie : ces gourdes1 qu’il faut régler, à chaque tronçon du trajet. sous la visière, ses lumerottes irritées, se raniment à la vue des billets. Comme des fadas, de pauvres bougres aux poches percées, s’accrochent à l’arrière, en dépit du danger. De leurs bras vigousses ils résistent aux secousses, prêts à chavirer. C’est dans leur cahute, tapie en douce dans les ravines, sous la maison rose du champagné, qu’ils veulent aller. Dans la cabine surchauffée, les hôtes tressautent, se désarticulent, dans une danse ridicule, bien loin de la kompa2. sans argent, sans logis, Melissa, Tehrani et Janina, vont là où le vent les mène, comme des graines envolées, dans un ailleurs rêvé, bien loin des favellas. et malgré les cahots, ils s’assoupissent, affalés sur les ballots. 1. gourde : monnaie d’hawaï. 2. kompa : danse d’hawaï.

danièle sAVoiE, 72 ans – ViLLeURBAnne (69)

« En dix mots comme en cent » – Mars 2016 – Page 10


Comptine du TAP TUk

Le tap-tap fait cossu le tuk-tuk est tape-cul le tap-tap est tip top le tuk-tuk fait teuf teuf le tap-tap c'est un truc que jalousent les trucks le tuk-tuk est plein d'tags le tap-tap plein d'images dans l'tuk-tuk on a l'trac dans le tap-tap on s'en tape le tuk-tuk is very cheap le tap-tap est plus chic le tuk-tuk est pour l'fun le tap-tap est pour l'trip le tuk-tuk est un thaï le tap-tap est d'hawaï l'un et l'autre font tut tut le tuk-tuk est tape-cul le tap-tap plus cossu

Claudine BAiLLy, 62 ans Atelier de la MJC d’Annonay – AnnOnAy (07) Animatrice : Claudine BAiLLy

filinto gonCALVEs, 44ans – Ateliers d'arts plastiques à l'ARiMC par les arTpenteurs – LyOn (69)

À Monsieur LuMEroTTE

Agent commercial des magasins LuMEroTTE père et fils, spécialisé dans l’équipement éclairage public Cher Monsieur,

suite à la commande passée par notre service « création », datant du 4e jour de la semaine Génèse, nous voulons d’abord vous féliciter pour la qualité du matériel fourni : Un projecteur tournant pour notre programme jour – référence « soleil » –, aux couleurs nuancées orange et rouge dans sa période de mise en route ou d’extinction et d’une luminosité puissante et resplendissante dans sa marche à plein gaz.

Pour le programme nuit, une suspension chinoise – référence « lune » – ainsi que des plafonniers à led, faible consommation, aux appellations diverses « du berger », « polaire », ou « filantes » procurant une ambiance nocturne douce et paisible. Cependant nous constatons dernièrement des problèmes de surchauffe et des risques de brûlure provoqués par le « luminaire-jour » ainsi qu’une baisse sensible de l’éclat des « spots-nuit » et nous voulons vous en alerter. s’il venait une panne générale, ce serait un « des-astres » !

Comptant, Monsieur Lumerotte, sur votre « bien-veillance » 24h sur 24h et sur vos idées lumineuses pour éclairer notre situation d’urgence, recevez mes salutations énergiques. Eva VIGOUSSE, service écologie, détachée aux relations humaines de notre planète Retour de courrier, une année-lumière plus tard ... À Madame VigoussE

L’hiver apporte avec soi Les frissons d’une saison et embellit le paysage D’étoiles givrées

emmitouflée dans mon manteau Je marche silencieusement Dans ce tourbillon de poudrerie effaçant mes pas Michelle gArniEr, 65 ans – GenAs (69)

MA TATA

« Tata prend le tap-tap pour franchir un cap sur sa map. elle rentre à Rillieux-La-Pape et elle attrape son écharpe ». Vincente AinBiZé , classe de 5e 2 Collège MARiA-CAsARÈs – RiLLieUX-LA-PAPe (69) enseignante : Myriam MOnFROnT

Chère Madame,

Votre lettre me laisse percevoir que vous êtes sur le point, dirons-nous vulgairement de « péter les plombs » et de « broyer du noir ». Je voudrais avant tout vous rappeler que notre prestation est garantie à vie, sous conditions d’utilisation aux normes. Une dégradation du site d’implantation et une pollution extrême de l’atmosphère ont rompu ce contrat initial !

Mais je vous sais vigoureuse, Madame VigoussE, dévouée à la vie, prête à vous porter à la rescousse pour rétablir l’équilibre de notre jardin « la terre ».

Fidèle à la devise de l’entreprise LuMEroTTE : « Que la lumière soit et la lumière fut », je reste à votre service. Emmanuel LUMEROTTE odile iMBErTon

Assise au coin du feu serrant fébrilement Une feuille jaunie et froissée Dévoilant quelques mots

D’un passé presque oublié inclinant mon regard Près d’une lumerotte Dessinant des souvenirs

Michelle gArniEr, 65 ans – GenAs (69)

« En dix mots comme en cent » – Mars 2016 – Page 11


Minus T’es pas fada petit bonhomme haut comme 3 pommes De t’prendre pour un grand champagné Vois donc comme t’es accompagné !

Refrain T’es qu’un atome minuscule Dans l’Univers, ça se bouscule Tu prends des poses ridicules Pour t’assembler en molécules

Refrain T’es qu’un atome minuscule Dans l’Univers, ça se bouscule Tu prends des poses ridicules Pour t’assembler en molécules

Mais qui se ressemble s’assemble À ce qu’il semble et la môle où tu rentres est molle T’es qu’un grain d’sable pauvre fol !

Tu t’dis vigousse, mais quand ça drache Toi tu te caches La pluie éteint les lumerottes, T’as peur de marcher dans les crottes

T’es qu’un atome minuscule Dans l’Univers, ça se bouscule Tu prends des poses ridicules Pour t’assembler en molécules Claude JAMBon, 70 ans – BRiOn (01)

Le vent était si vigousse qu'il paraissait sortir tout droit des soufflets de l'enfer actionnés par des diablotins aux museaux chafouins auxquels satan aurait promis des bons points. Tirée par une haridelle, la carriole aux couleurs des pourpres du crépuscule semblait un tap-tap égaré aux cinq cents diables Vauvert des grands espaces du pays de l’hiver.

A l'intérieur, serrés comme un ristrette, deux voyageurs : un champagné de la ville emmitouflé d'hermine à la mine benoîte et un petit moine maigriot, l'air un peu fada de qui aurait pris un coup de lune, qui accordait ses litanies à celles du vent tout en rêvant d'ortolans .

Dans un hourvari de foirail, les bourrasques furibondes troussaient la neige en une poudrerie telle qu'il drachait des hallebardes glacées, autant d'escarbilles dans les quinquets que le cocher ouvrait tout grand dans l'espoir d'apercevoir, tel un sémaphore, le brasillement de la lumerotte du dépanneur où il méditait depuis longtemps d'acquérir, au mépris de toute vergogne, de quoi faire ribote.

Allez, hue Cocotte ! Ce n'est pas le moment d'aller voir saint Pierre et encore moins celui de trouver buisson creux et de se contenter d'une soupe aux pierres !

Des étoiles ont le mal de mer Parce qu’elles sont restées trop longtemps dans le ciel sur le point de s’évanouir elles ont peur de revenir sur terre

Peur qu’on les vole pour en faire des bijoux De ne plus illuminer, redevenir des pierres Qu’on kidnappe leur esprit dans ce monde fada Qu’on étouffe leur imagination et leur voix

Collectif école sAinT-eXUPéRy, classe de Ce2 – VénissieUX (69) enseignante : sabrina DABiC Animateur : hassan GUAiD

Je rêve de voyage, un voyage immobile à travers ces pays où l’on parle français avec des mots colorés, acidulés, sucrés comme des berlingots. Je suis à peine montée dans le tap-tap que le ciel s’obscurcit et il se met à dracher. J’ai beau être assez vigousse, je suis vite trempée jusqu’à la moelle et je grelotte. heureusement nous arrivons sur une place de village. Dans un bistrot aux mille senteurs je peux déguster un ristrette dont la chaleur se répand dans mon corps. Des lumerottes taillées dans des pâtissons, des christophines et autres cucurbitacées éclairent doucement le décor et les visages. Le serveur pas très affable présente une mine un peu chafouine. Je fais le premier pas et engage la conversation. il ne bavarde pas à tort et à travers mais file à l’essentiel. il m’indique deux rues plus loin un dépanneur où je pourrai trouver un parapluie. surprise ! Je suis accueillie par un champagné digne et magnifique dans son boubou turquoise et orangé. son visage s’éclaire d’un magnifique sourire puis il éclate de rire en me voyant dégouliner sur son plancher. Tu n’es pas un peu fada de te balader sous cette ondée ? Tu ferais bien de regagner tes pénates parce que lorsque la nuit va tomber on risque une rude poudrerie. Josette Brun, 60 ans Atelier d’écriture de la médiathèque – sAinT-héAnD (42)

denyse ArnouLd, 58 ans ARMOy (74)

Benjamin ROQUes, 28 ans – Tremplin AnePA – LyOn (69)

« En dix mots comme en cent » – Mars 2016 – Page 12


Tap-tap : oiseau exotique qui frappe aux carreaux quand il a faim.

Le ChAnT DU ROssiGnOL VigoussE

« Le charme des charmilles, ensevelies sous la rosée, fait chanter le rossignol vigousse. Plus les fleurs s’ouvrent et s’épanouissent plus vigousse est le rossignol. Vigousse le rossignol quand les zéphyrs l ‘effleurent. Vigousse le rossignol baigné par le soleil.

dracher : emmener ses draps quand on va dormir chez des gens, pour économiser ceux de ses hôtes. (Démarche éco-responsable, figurant à l’Agenda 21) dracher : Ce n’est pas mâcher des dragées, ni s’harnacher de draps mouillés C’est un peu cracher, sans toutefois se fâcher C’est aussi lâcher sans lâcheté, ou, en toute logique, tâcher de bâcher … il pleut, il drache C’est la fête à…la vache, à la mâche voire à la moustache ? Mais surement pas aux Apaches !

Claudine dELErCE, 56 ans Atelier d’écriture Association « GénéRATiOn en MOUVeMenTs » CRAPOnne (69) Animatrice : Claudine DeLeRCe

Vigousse le rossignol quand c’est la reverdie

Vigousse mon cœur heureux quand son chant me ravit ». AnTAr LAsfEr Collège MARiA-CAsARÈs, classe de 5e 4 RiLLieUX-LA-PAPe (69) enseignante : Myriam MOnFROnT Cadavre exquis de la poudrerie

Allongé au soleil, sur la plage de mes amours ne rien faire, rêver, sans détour

écouter le tap-tap des vagues et le chant des oiseaux se souhaiter un monde nouveau Collectif école sAinT-eXUPéRy, classe de Ce2 – VénissieUX (69) enseignante : sabrina DABiC Animateur : hassan GUAiD

POÈMe sAns POÈMe

Comme au temps de ma jeunesse, Aux beaux jours d'allégresse, je voulais écrire un poème avec tout plein de merveilles. en douceur, raconter en prose, la vie des autres, en rose.

Collectif : solange BAnos, Anne-Marie BArnEZET, danielle BErnArd, Monique BonnET, Jean gALLioT, Mireille gAThu, nicole LAnnEs, Michelle nony, denise PAiLLE, odette VAssELon ATeLieR DU GROUPe De PAROLe eT éCRiTURe Centre social du Moulin à vent – Vénissieux (69) Animatrice : Janie ARGOUD

Je songeais aux couplets à rimes, cœur avec bonheur, heureux et amoureux, Comme souvent, vingt-ans avec printemps, et aurais osé, passion avec émotion sans oublier, bien-sûr, amour pour toujours.

eXQUis

Lumerotte, vigousse, chafouin, comment écrire un quatrain avec des mots jamais entendus et d'autres tout biscornus, Champagné, dracher, ristrette. Me voilà envahie de tristesse, nuit et jour, à toute heure, j'en ai rêvé, presque en pleurs. en vain, pas l'ombre d'une idée, ni pour un poème, pas même un sonnet, au risque de passer pour un pamphlet. Pour les dix mots en folie, comme jadis, je voulais honorer la poésie, mais je n'étais guère à l'aise. Bien que cela ne me plaise, malgré les labeurs j'ai dû abandonner. il n'y aura rien cette année pour les dix mots en folie, tant pis, je n'en ferai pas une maladie. Kérima rouABhiA, 50 ans VénissieUX (69)

La femme se saupoudrait dans la poudrerie pendant que son homme chargeait la poudre dans la sainte-barbe du galion. L’homme avançait péniblement sous la poudrerie. Tout le monde riait en se roulant dans la neige, sous la poudrerie. C’était la fête, la poudrerie passait par les portes ouvertes. On riait, on dansait, sous la poudrerie qui nous gelait le bout du nez. La vie est belle, à la montagne, sauf en période poudrerie. soyons fous, oh ! Oui ! J’adore la neige et la poudrerie sur la route. Quelle chaleur, dommage qu’il n’y ait pas la poudrerie aujourd’hui. Joyeux noël, tout blanc, belle poudrerie ! Ça glisse. À mardi gras on se déguise, j’ai choisi le grand nounours, c’est génial sous la poudrerie. La femme se saupoudrait dans la poudrerie pendant que son homme chargeait la poudre dans la sainte-barbe du galion.

ex de qui, quitte ou double, oublier, liaison on n’y peut rien, rien n’y fait, fédérale, ralentis, tisserand, randonnée, népotisme. ismaël, maelström, eum, hum, humanoïde, oïdium, idiomatique ticket d’bus, bustier, t’y es pas fou ? Le Cadavre exquis qui tirait la langue française Monsieur fada des Panneures

A rencontré à la mairie Madame l’élue Meroth

il lui a dit : « Jeeuh sssuis ppréssssé j’ai qqquelqquechose à à vivitt tap taper à llla mmmacchiiine ppppour l’en en en voyer. »

elle lui a répondu : « Retrouvons-nous à Vigue où ce dimanche… nnnous pourrrions piiiique-niiiquer et poser sur le champ pppaniers, naappe et serrrviettes ».

Alors, Lui lui prenant d’une main adroite sa main gauche, et en seconde main chat, foin, elle, paya son drap chez le teinturier, après s’être mise en beauté avec un peu de poudre-de-riz sur le bout du nez. L’élue et son fada sourirent joyeusement, pressentant que triste ne serait pas leur retraite! soudain, alléchés par l’arôme de café torréfié, ils proposèrent ensemble : « ristrette ? »

Jacqueline LiEBEr, 68 ans LyOn (69)

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Des mots bateau Des mots de toujours Des mots de tous. Des mots qui donnent le goût des mots.

Ma vie Un voyage en tap-tap Tap-tap fourgon Tap-tap Madeleine Tap-tap nous fait tanguer.

Bateau tonnerre Bateau cim’tière Sous-marin atomique Bateau déclic.

Dans le J7 nous chargeons les cerises, Les abricots, Des cagettes bien remplies. nous les ramènerons vides. Après une longue journée de ramassage, nous livrons à Brignais. Tap-tap camion gris. Le moteur s’arrête Devant la maison.

Après la saison des fruits je retourne dans le tap-tap. Deux cassettes : Brel, Balavoine. Tantôt l’une Tantôt l’autre. Une chanson me touche Me berce Me fait tanguer : Bateau toujours Duo, avec Michel Berger. Bateau bagage Bateau tangage Bateau mirage.

Bateau j’ai peur Bateau je pleure Bateau Noé Arche d’aimer.

étrange adolescence Avec des temps forts – en solitude – Dans un J7 sur des mélodies de mots.

Je voudrais avoir écrit cette chanson. Je voudrais la chanter au monde entier. Je la trouve aussi belle Que l’histoire d’une hirondelle. elle est l’histoire des hirondelles Qui volent, s’épuisent, se débattent et se laissent glisser sur les courants de l’air. se laissent planer se risquent se blessent. Le bateau, L’oiseau L’oiseau, le bateau La mer L’Amour. Voilà tout ce que j’aime. Voilà ce qui vaut le coup. Tap-tap sur les vagues Trou d’air et cahot Appel d’air et câlin chaud Bateau j’ai peur Bateau je pleure Bateau de mots Coque de noix infime vaisseau De survie, Les mots. Agnès BArdiEr, 46 ans ROnTALOn (69)

Le fAdA eT sA LuMEroTTE Lumerotte qui clignote, chaque nuit dans l’arrière pays, Une grande ombre marche, joue à cache-cache, entre vignes et oliviers. Dans sa main, la lumerotte tremblote et sifflote, il a perdu le nord sous le ciel du Midi, le fada…… et dans sa tête de linotte, il radote, le fada.

Mais ce soir, c’est bizarre, le fada s’est assis, dans la mousse, sans bruit. Lumerotte se berçote et s’assoupit aussi.

Mais où va chaque nuit le fada, cahin-caha ? On ne sait pas. Or, voilà qu’il se lève, il toussote, il pivote, se tarabiscote, on dirait bien qu’il flanche, sous la lune blanche le fada fatigué, aux longs bras agités. il appelle, crie à l’aide mais qui va secourir le fada ? La lumerotte crachote, bougeotte le fada s’emmitoufle dans le vent, épuisé. sa lumerotte saignotte puis sanglote… sous le vieil olivier, sans fracas, le fada… est passé Au marché, on chuchote, on parlotte, il est mort le fada… Ou peut-être qu’il dort pour l’éternité et sa lumerotte va l’accompagner. Monique gAuThiEr, 76 ans Villeurbanne (69100)

Derrière la maison est un petit endroit Pour bricoler un peu. Avec beaucoup d ‘astuce nicolas et François nous montreront comment en y mettant du coeur Une vieille voiture pourra Ressusciter !

Dans l’immédiat, emmène moi Par les chemins À l’aventure non n’allons pas trop vite et regardons tranquillement Une Rose trémière... Fée ? Ange ? Démon ! Au secours.....

simone MouriEr Atelier d’écriture L’enCRieR Centre social de sous-Paulat FiRMiny (42)

« Drôle de mot ! » « Pouvez-vous m’aider à trouver ce que veut dire champagné ? Qu’est-ce qu’un champagné ? suis-je un champagné ?

C’est un adjectif, un nom ou un verbe conjugué ? Je vous en prie, il faut m’aider ! est-ce mon amie qui l’a inventé ? Ou bien j’ai mal écouté ? Vite, vite, vite il faut trouver ce que veut dire champagné ! Avant mon amie en train de chercher…

Pour le moment elle n’a pas trouvé… J’épluche tout le dictionnaire sacrée corvée, sacrée corvée ! Mais zut ! Voilà Chloé a gagné ! sur son portable 4G, elle a surfé C’en est fini elle m’a devancée

Reconnaissons tout de même Que ce mot est bien rare et compliqué… La faute au Jury qui a chafouiné ! ». Binti nourA dJAffAr, classe de 5e 2 Collège MARiA-CAsARÈs – RiLLieUX-LA-PAPe (69) enseignante : Myriam MOnFROnT

Au Pôle nord, il drache Le hamster polaire cherche un abri en courant partout Justine gouTEyron, 8 ans école élémentaire FAURieL, classe de Ce2/CM1 sAinT-éTienne (42) enseignante : Mme FAURe

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Le CABAnOn

Une de mes amie, native de Marseille, mais habitant Québec depuis son mariage, vient me voir un jour à nice, comme elle le faisait chaque année. Je lui proposai alors de faire une petite randonnée, le long du littoral et lui dis : – Si tu veux nous allons faire le tour du Cap Martin et je te montrerai un cabanon.

– Tu plaisantes, me répondit-elle, des cabanons, il n’y en a qu’entre Marseille et Cassis. – Tu verras , lui dis-je

nous avons donc pris le tap-tap du coin, c’est-à-dire le TeR, car le sentier partait de Roquebrune-Cap-Martin. nous avons pris le sentier d’un pas vigousse car il fallait au moins deux heures pour faire le tour du Cap. Je l’avais prévenue qu’il n’y aurait ni poudrerie, ni dépanneur, ni ristrette, et nous nous étions munies d’une bouteille d’eau ! Le ciel était beau à notre départ et le sentier passait à travers de belles villas du XiXe siècle, avec des oliviers, des arbousiers et des mimosas en fleurs. Mais tout à coup de gros nuages noirs apparurent et, en quelques secondes, il se mit à dracher. Cela ne dura pas ; nous avons repris la promenade et au détour du sentier nous avons vu le « cabanon ». Mais la porte était fermée, il n’y avait aucune lumerotte. extérieurement, il semblait minuscule, comme une maison de poupée. – Voilà le cabanon du fada, dis-je à mon amie qui n’en revenait pas.

Pour la petite histoire, Le Corbusier y venait chaque année et, le 27 août 1965, il partit se baigner comme à son habitude…et ne revint pas. Il est enterré au cimetière de Roquebrune-Cap-Martin. Son cabanon mesure à peine 12 m2. Il est actuellement en restauration. PAuLE, 90 ans Atelier d’écriture RésiDenCe ALBeRT-DUBURe ViLLeFRAnChe-sUR-sAÔne (69) Animatrice : Anne BOnneL Joëlle AndrEys, 43 ans – Ateliers d'arts plastiques à l'ARiMC par les arTpenteurs

ART-GOT

LuMEroTTE

J’écope J’assure pourtant sans souci elle sourit s’accommode et rassure elle danse sursaute Articule et se cache J’accumule Désastres et soupirs Rigole l’autre D’un trait Toute entière s’effile elle râle Triche Bat du pied Regarde haut Disposée D’un air elle tournicote A l’équerre se laisse couler D’une triste mine elle s’efface Fleurs sauvages en vase clos Lumerotte gillian fErrEirA, 40 ans Lyon (69)

ici, Du Plateau aux états-Unis en passant par la Guill' On raconte notre vie normal que tu n'y comprennes tchi On appelle ça le langage de la street Tu n'y captes rien comme l'arrivée de la poudrerie ! Dix mots ? Dis-moi, est-ce que tu la connaissais cette poésie ?

Grandi à la sACVL au ter-ter à vesqui les beb et guette le p'tit Chips comment y lève Passe au tieks pour prendre ton D Caillasse le bon vieux Overmars Tu connais le courant d'air Le four de la Duchère On est champagnés Mais on garde les mêmes valeurs Tu peux nous croiser À n'importe quelle heure Au dépanneur

Les frères sont chauds depuis la crèche Tous ristrettes dans la street Ça envoie les petits à la tayeche et quand ils finissent leur peine ils se perdent avec Daesh Pour une histoire de rain-té Tu étais prêt à l'allumer On a pas pu le réanimer Tu te tapes une GAV à Marius-Berliet Pour être transféré en maison d'arrêt

On est champagnés Mais on garde les mêmes valeurs Tu peux nous croiser À n'importe quelle heure Au dépanneur

Depuis tout petit, on pense à l'argent Toujours O.P. comme un tap-tap Ça taffe dur pour mettre à l'abri ses parents Quand ils me demandaient comment, C'était blessant D'y repenser, J'ai du mal à l'avouer

Le « Bd » c'est là où j'ai vécu Ça peut être tendu Beaucoup de frères perdus Mais qu'on a pas oubliés Fumer, louer, braquer, Pas besoin de barreaux pour se sentir prisonnier On est champagnés Mais on garde les mêmes valeurs Tu peux nous croiser À n'importe quelle heure Au dépanneur

Je suis à Pattaya Je profite, Je MBLC de ces hattya Tony Tony Tony n'a jamais besoin de Manni Manni Manni Pour allumer ta famille Ça c'est tchi Moi je roule en Maserati Gros, chabe la frappe à la Verratti

Argent, quartier, vécu Parents, prisonnier, rue Comment oublier ? Tendu Blessant, avouer, perdu

Adam, Mohamed, Elvis & hani UeAJ – VénissieUX (69) Animateur : Toufik OUAhDi

« En dix mots comme en cent » – Mars 2016 – Page 15


FAUT PAs CROiRe Les POLiTiCiens

Faut pas croire les politiciens, Les dictateurs, Les journalistes, Les arracheurs de dents, Les bonimenteurs, Les terroristes, Les délinquants, Les djihadistes, Les prévisionnistes, Les colporteurs, Les marchands de sommeil, Les chafouins, Les zigotos, Les malandrins, Les godelureaux, Les banquiers, Les agitateurs, Les manipulateurs Les braconniers, Les champagnés, Les maîtres-chanteurs, Les assureurs, Les médias langue de bois.

Mais qui faut-il croire ? Faut-il croire, les naïfs, les fadas ? Les repentis, les prêcheurs ? Faut-il croire aux syndicats ? Au prolétariat ? Aux artistes, aux créateurs ? Au Créateur ?.... … en Dieu ?

Marie-françoise fErLAy, 65 ans – Atelier LA BOULAnGeRie D’ART – Moras en Valloire (26) Animatrice : sandrine CeRDAn, Artiste peintre

Lumerottes brillez pour la paix ! Un vent de folie souffle dans la poudrerie Même le ciel nous inonde de sa drache et les champagnés comme les chafouins Restent fadas face à la déferlante. Ont-ils amassé tant de bric-à-brac dans leur dépanneur ? Testent-ils l’hydromel ou le ristrette ? Tempêtent-ils pour être vigousses à l’extrême ? espèrent-ils remplacer le tap-tap par le chameau ? seul l’avenir nous le dira. Pierre PLATroZ, 73 ans DOMMARTin (69)

Commencer par croire en soi ! Voir si dans son cœur, On est beau à l’intérieur, Pas besoin de le crier sur les toits, Ça se voit ! Marie-Thérèse CrisTALdi sATOLAs-eT-BOnCe (38)

Je n’avais plus de lumerotte. il était tard. Je suis sortie pour aller chez le dépanneur. Comme j’étais vigousse, je suis arrivée en un instant chez ce chafouin de tunar. il y avait ce fada de voisin qui essaie toujours de jouer au champagné. J’ai acheté ce qu’il me fallait sans m’attarder. en sortant, il drachait. J’ai sauté dans le tap-tap qui passait par là. Je me suis retrouvée chez moi, devant un ristrette de café à contempler la poudrerie qui s’était mise à tomber. MoniQuE Atelier radio « AU FiL Des VOiX » Centre hospitalier sAinT-JeAn-De-DieU – LyOn (69) Animatrice : Cécilia DeVARine

Tu rêveras de tout et de rien À ton réveil, tu sursauteras Puis, tu te rendormiras et tu rêveras de … Tap-Tap, mais il ne sera pas comme tous ceux que tu vois tous les matins, il sera À toi, très coloré Plein de bonbons, de chocolat et de sucettes Loula PhiLiT, 10 ans éCOLe éLéMenTAiRe FAURieL, classe de Ce2/CM1 sAinT-éTienne (42) enseignante : Mme FAURe

À la frontière de mon enfance, je me souviens d’un ciel plombant l’horizon, toute la journée, il drache et au fond du jardin, une lumerotte indique la présence des betteraves cultivées avec soins par mon grand-père. heureusement, pour nous réchauffer, il y a les frites craquantes de ma grand-mère, sans oublier la bonne odeur des gaufres au miel. Annick LEfEBVrE, 62 ans Atelier de l’association « GénéRATiOn en MOUVeMenTs » CRAPOnne (69) Animatrice : Claudine DeLeRCe

« En dix mots comme en cent » – Mars 2016 – Page 16


Poudrerie : je ris, je danse, je m’envole Pour de vrai, je vois les flocons éternuer Poudre à fumer, poudre à rigoler Mon imagination virevolte

Champagné : état d’une personne ayant abusé du champagne un soir de réveillon. Chafouin : chat cherchant souris dans une botte. dracher : déformation novlangue du verbe draguer. dépanneur : service jamais disponible quand on en a besoin. Lumerotte : une lumière qui émet des borborygmes en fin de repas. fada : en Provence, c’est le contraire du Ravi. ristrette : version française du vrai café italien. Poudrerie : magasin affectionné par les dames soucieuses de leur beauté. Vigousse : se dit d’une poule qui a perdu une aile et avalé un ver de travers. Tap-tap : rythme entraînant incitant à taper des pieds et des mains.

Annick LEfEBVrE, 62 ans Atelier de l’association « GénéRATiOn en MOUVeMenTs » CRAPOnne (69) Animatrice : Claudine DeLeRCe

Le fada égaré éclairé par la lumerotte placée au coin de la rue, il se rendit rapidement chez le dépanneur pour y boire un ristrette. L’hiver n’était pas loin, et en sortant de la boutique, il fût aspergé de poudrerie, ce qui lui fit rentrer les épaules et lui donna un air chafouin. il se mit ensuite à dracher aussi décida-t-il de prendre un tap-tap. il était encore vigousse et bien que champagné, sans le sou dans ce coin perdu, il se sentit soudain bien seul… Jacques LEfEBVrE Atelier d’écriture sCRiBes en DéLiRe – LyOn (69) Animatrice : Cécile MAThiAs

régis PAuLET Atelier d’écriture Les Ateliers de la Rue Raisin sAinT-éTienne (42) Animatrice : Véronique GUiLLAUMe

elle est retrouvée, quoi, l'éternité C'est la mer allée avec le soleil C'est le silence dénudé du plateau cévenol C'est la poudrerie dans le ciel bleu de l'himalaya C'est la tempête sur les côtes déchirées de l'écosse où seules sont visibles les lumerottes des naufrageurs.

La lumerotte se tortillote Tout doucement en descendant, et remonte vers le ciel bleu qui s’éclaire peu à peu

Laurence ThéVEnouX, 44 ans AURAL (Association pour l’Utilisation du Rein Artificiel dans la région Lyonnaise) – LyOn (69) Animatrice : Claudine Arnaud, écriture – les arTpenteurs

yassine BEnLounis, 9 ans éCOLe éLéMenTAiRe FAURieL, classe de Ce2/CM1 sAinT-éTienne (42) enseignante : Mme FAURe

Collectif : Chloé Bossé, stéphanie giBELin, Jinane griCh et inès MiChALon Classe de 6e 2, Collège/lycée CheVReUL LesTOnnAC – LyOn (69)

« En dix mots comme en cent » – Mars 2016 – Page 17


LeTTRe À MOn AMie risTrETTE Lumerottes, brillez pour tous ces disparus Une nuit de décembre, le huit exactement, Maintes fois allumées les flammes des bougies éclairent les rebords des fenêtres des logis Réfléchissent les lueurs et l’amour dans les cœurs Ou les yeux des badauds s’embrument de douceur Tant de vies, des familles en pleurs Tant d’errance en les rues de PARis espèrent trouver l’âme de leurs proches partis sans haine, pour qu’on ne les oublie. Catherine hEiLMAnn, 55 ans LA TOUR De sALVAGny (69)

Le MAL DU PAys

il patientait à la terrasse d’un bistrot. Assis devant un ristrette, il contemplait Le flot confus et bigarré, l’incessant ballet Des voitures et des tap-taps dans les flaques d’eau. il drachait dru. La rue virait à la gadouille. Pliant son étalage, en face un dépanneur, Dans son empressement échappa une citrouille. elle roula sur la chaussée, un gamin prit peur.

Chère ristrette, mon amie, ma très douce,

C’est avec un grand désespoir que je me vois dans l’obligation d’annuler notre voyage au Québec. en effet, ici, en Belgique, dracher est un bien faible mot pour t’expliquer les débordements de vigousse déferlant sur notre rue, notre ville et tout le département… il faudrait être complètement fada pour tenter une sortie car il ne nous reste pour nous éclairer que quelques lumerottes de pacotille qui servent d’habitude pour les anniversaires… Ah comme je rêve de votre poudrerie d’hiver tourbillonnant pour le bonheur des enfants dans un froid de canard ! Mais revenons à notre si pénible épopée, nous voici donc installés depuis hier soir au premier étage et c’est en barque que nous sommes ravitaillés par les pompiers… toutes nos réserves de piles pour les lampes de poche sont terminées, nous attendons sans grand espoir un dépanneur, le pompier venu ce matin, qui doit nous ravitailler en lumière et en nourriture… nous passons le temps en écoutant le tap-tap de l’eau qui, allègrement, se promène de tuyaux en tuyaux, ricochant à travers les étages et les murs… Ah si, il faut que je te raconte : le pompier en question est un peu particulier, il a une tête de chafouin, le nez pointu, le menton en galoche, l’air sournois et rusé de celui qui sait se débrouiller dans toutes les occasions… au point que je me demande si c’est un vrai pompier ! Peut-être avons-nous confié nos demandes et l’argent qui allait avec à un drôle de personnage… nos valises étaient toutes prêtes, l’heure de rendez-vous à l’aéroport est déjà passée depuis quelques heures, nous n’avons pu nous y rendre comme tu peux le deviner, mais je crois qu’elles vont nous servir à rejoindre dès que possible Champagné dans la sartre où habitent mes parents… il paraît que là-bas il ne pleut pas… Ma chère ristrette, comme j’aime t’appeler ainsi, toi la passionnée de café italien… cela me console un peu de ne pas être là pour te raconter nos déboires de vive voix autour d’un ristrette bien serré… Ta poudrette préférée.

Maryse CornET CArAyoL, 59 ans ViLLeFRAnChe-sUR-sAÔne (69)

il songea aux lumerottes de son enfance : De grosses courges évidées, monstres ricanant Qu’il posait au bord du chemin le soir tombant Afin d’effrayer quelques candides passants.

soudain une profonde nostalgie l’envahit. il neigeait à cette époque dans sa chère patrie, elle devait aussi tomber en fortes poudreries. il revit ses ballades en traîneau et à ski. s’exiler ainsi, il faut être un peu fada. sûr il vivait bien comme un champagné ici, Mais il se sentait encore vigousse le vieux rat ; s’il rentrait monter quelques affaires au pays.

elle apparut alors sa chafouine adorée, Trempée, le visage inondé de lumière, Celle qui l’avait traîné là et ensorcelé. elle aimait les pays chauds, sa douce geôlière. gilles gArAudET ViLLARs-Les-DOMBes (01)

ici, depuis mon lit De l’extérieur Le mélange des sons semble Un peu fada. Grincement des portes qui s’ouvrent et se ferment Paroles des soignants dans le couloir, À propos des patients Consignes de soin lancées à tue-tête Cliquetis des chariots qui circulent Cris et râles venant des chambres Quelques notes de piano Bruit des télévisions en marche écoulement de l’eau dans les tuyauteries Bonjour et au revoir des visiteurs Ronronnement de la climatisation. C’est la vie sonore de l’hôpital Qui dérange parfois, qui rassure souvent. Chantal PEQuAy, 68 ans Atelier de l’hôpital gériatrique des Charpennes ViLLeURBAnne (69) Animateurs : Jean-Baptiste CABAUD & Annie LeBARD Les arTpenteurs

Collectif par les arTpenteurs – Ateliers d'arts plastiques à l'ARiMC

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fAdA

Je suis coco le clown, fada comme une toupie enchantée, fada du matin au soir ; mon arme est le rire, nez rouge et mascara sont ma tenue de combat. Accompagné par mon fidèle compagnon prénommé Fêlé, épagneul croisé berrichon et bourbonnais, ensemble nous luttons contre la tristesse ambiante. Citoyens attendez-vous à rire, à vous déformer les zygomatiques, vous êtes cernés par la folie, fada moi ? Oui j'assume, je plastronne, je vantardise, j'ironise.... Braves gens vous êtes condamnés à disjoncter, la joie, le bonheur, la rigolade sera votre nouvelle sainte-trinité, riez pour nous pauvres prêcheurs... Un fada averti en vaut trois, allons enfants de la patrie marchons vers la route du bonheur, nez rouge et serpentins en étendard, allons convertir tous les tristes du monde pour rejoindre la confrérie des fadas. Jean-do friAnd-dELAhAyE Atelier radio « AU FiL Des VOiX » Centre hospitalier saint-Jean-de-Dieu - ARhM – LyOn (69) Animatrice : Cécilia DeVARine

Je voudrais voyager dans le volcan de ma mémoire, Danser sur la lune qui brillera demain, M’asseoir sur les escalators de mon cerveau, Arracher mon cœur pour ceux dans le besoin, nager avec les lumerottes du soleil, Chercher mon enfance cachée, Tuer le temps qui avance, Caresser le monde des merveilles.

Collectif école ChARLes-PeRRAULT, classe de CM1/CM2 VénissieUX (69) enseignante : Léa DUFOURneT Animateur : hassan GUAiD

Un gros objet bleu. On le tape. On le tap-tap tap, ça fait de la musique. J’ai dessiné des gens, ils sont tap-tapistes. Camille BAssET, 34 ans ARiMC ecully (69) Groupe d'adultes infirmes moteurs cérébraux Animateurs : Jean-Baptiste CABAUD, poète Annie LeBARD, plasticienne Les arTpenteurs

L’ADieU DU Chien AU sDF Je n’ai pas été souvent vigousse, mais j’espère que ma compagnie ne t’a pas trop pesé. Tu as parfois été fada, mais tu ne m’as jamais oublié, jamais battu non plus, et j’ai apprécié tes caresses affectueuses. Quand il se mettait à dracher, ou qu’il y avait de la poudrerie en hiver, tu m’as toujours protégé en me mettant à l’abri de ton vieux manteau. Je sens que je vais bientôt partir vers un autre monde, et ce qui me peine le plus, c’est de te laisser à ta solitude. À qui parleras-tu, toi qui n’a pas de champagné dans tes relations ? À part le propriétaire du dépanneur au coin de la rue où passent régulièrement les tap-tap et qui t’offre un ristrette de temps en temps, tu ne connais pas grand monde. Quand j’étais à tes pieds, mes aboiements empêchaient les chafouins de trop s’approcher de toi et je les dissuadais de t’insulter lorsqu’ils passaient devant toi. J’étais petit, mais ils me craignaient. ne sois pas triste, je pars, mais souviens-toi qu’il y aura toujours une lumerotte au-dessus de toi pour te tenir compagnie… ne m’oublie pas ! Jacques LEfEBVrE Atelier d’écriture sCRiBes en DéLiRe – LyOn (69) Animatrice : Cécile MAThiAs

Christiane finTZ, 67ans – Atelier La Boulangerie D’art – Moras en Valloire (69)

PAysAGes DU CAMBODGe

PoudrEriE

Je dis poudrerie et je vois des cocottes endimanchées se refaire une beauté avec leur poudre de merlin pimpettes.

Je dis poudrerie et je vois des barriques en dix rangées se faire rouler sur le côté partir pour le front à perpette.

Je dis poudrerie et je vois une fabrique embastillée se défaire de ses pleutres patentés prendre la poudre d'escampette. Pascaline TErELLi MOnTLUeL (01)

J'aime bien regarder la mer de Chine si calme, si chaude l'eau fraîche des cascades les étendues vertes des rizières sous le soleil. Au milieu des forêts chantent les insectes les crapauds pleurent dans le noir la nuit dans les paysages sans lumerotte J'aime être là-bas dans les paysages de mon enfance.

KhAMrong TAT, 52 ans AURAL (Association pour l’Utilisation du Rein Artificiel dans la région Lyonnaise) LyOn (69) intervenante : Claudine Arnaud, écriture – les arTpenteurs

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La grande enquête du petit Robert est la nouvelle lauréate du concours Quais du Polar, écrite par sylvère Mereaud, 13 ans, dans le cadre du Club lecture organisé au Cdi du collège Jean-Jaurès à Villeurbanne (69)

La grande enquête du petit robert ChAPiTrE 1 : une surprise

Bonjour, moi Robert, toute ma vie tout le monde se moquait de mon nom et de ma taille. À l'école j'étais le contraire d'un champagné et personne ne venait me voir. Mais maintenant c'est la vie des grandes personnes ; je la partage avec mon chien émile.

Après avoir essayé plusieurs fois, je réussis mon concours pour devenir policier. Mais même au commissariat on a continué à se moquer de moi et à m’appeler Le PeTiT ROBeRT.

À ma première semaine de travail, alors que je faisais une ronde autour du quartier, je me suis arrêté devant un immeuble pour refaire mon lacet, et là, par le soupirail d'une cave dont la lumière était encore allumée, je vis une personne couchée par terre avec des éclats de verre sur la tête et du vin partout.

Après de longues recherches sur cet homme, je découvris qu'il s'appelait Roger Larousse, qu'il n'avait ni femme ni enfants et que ses parents étaient morts. Je suis allé faire une enquête de voisinage :

– Il était complètement fada à la fin, dit Madame harrap's, il se faisait même appeler Rocher.

– Pourtant d'habitude, il était plutôt vigousse et sportif, m'a dit un voisin qui était suisse .

– Mais à la mort de ses parents, il est tombé dans l'alcool et devait de l'argent à Monsieur Flammarion. Je les ai entendus en parler avant le jour de l'An, ajouta l'Anglaise.

ChAPiTrE 2 : L'enquête

Alors que l'enquête piétinait, je décidai d'aller fouiller la cave où avait eu lieu le meurtre : – Mince c'est fermé, dis-je en essayant d'ouvrir la porte.

– Allons voir le gardien, il doit avoir les clés de cette cave, dit hachette, mon second.

Alors que nous arrivions devant la porte du gardien, je vis dans la poubelle une clé que je pris. hachette toqua et le gardien sortit : – Monsieur, avez-vous la clé de toutes les caves ? lui demandai-je.

– Merci monsieur et à bientôt. – Au revoir.

hachette trouva ça bizarre que, pile le soir du meurtre, Flammarion perde la clé, et que moi je la trouve dans la poubelle. Alors nous sommes retournés à la cave et j’ai essayé d'ouvrir la porte avec la clé ramassée. – Bingo, ça marche, ai-je dit.

Vu que nous n'avions pas de voiture avec nous, nous avons pris le tap-tap qui mène au commissariat. De retour au commissariat je suis parti parler au chef de tout ça :

– Commissaire Collins, Hachette et moi nous avons trouvé un cadavre au 26 rue du dictionnaire. – D’accord je vous confie l'enquête et prévenez-moi s'il y a du nouveau.

ChAPiTrE 3 : Les indices

hachette et moi nous avons décidé de faire le tour de tous nos indices :

– Nous savons que la victime s'appelle Larousse, qu'il habitait au 26 rue du dictionnaire, qu'il n'avait ni femme, ni enfants, ni parents, qu'à la fin de sa vie il devenait un peu fada même si d'ordinaire il était plutôt vigousse.

– Aussi, dit hachette, il a été assassiné dans la cave 7 à l'aide d'une bouteille de vin, il était bourré et le gardien avait bizarrement perdu la clé ce jour-là. ChAPiTrE 4 : L'interrogatoire

nous sommes allés voir le gardien et nous l'avons amené au commissariat pour l'interroger :

– Ce meurtre s'est passé dans une des caves avec une bouteille, le 3 janvier 1975 soit exactement 100 ans jour pour jour après la mort de Pierre Larousse, qu'avez-vous à dire pour votre défense ? – Je devais une bouteille à Larousse et il était bourré ce soir-là.

– Moi je pense plutôt que vous ne vouliez pas offrir de bouteille à Larousse mais qu'il vous devait de l'argent et vous lui avez dit : « ça fait plus de deux mois maintenant je veux mon argent », donc vous l'avez tué sur un coup de colère. – Avouez et votre peine sera moins lourde, dit hachette.

– Oui pourquoi ?, répondit-il.

– D'accord, j'avoue, Larousse me devait 5000 euros, et ce depuis plusieurs mois, alors j'ai vu rouge, je lui ai pris la bouteille des mains et la lui ai cassée sur la tête mais je ne voulais pas le tuer.

– Maintenant que vous le dites, j'ai perdu cette clé. L'auriez-vous retrouvée ?

ChAPiTrE 5 : une fin ?

– Car un meurtre a été commis dans la cave 7.

– Non. Quand l'avez-vous perdue ?, demandai-je.

– Samedi soir.

– Quel est votre nom ?

– Je m'appelle Flammarion.

Deux mois plus tard, le procès arriva et le gardien écopa d'une peine de dix ans de prison pendant laquelle il décida d'écrire un livre, moi je fus promu commissaire et Collins fut muté à Paris… son rêve. Je réussis une très belle carrière ! Peut-être aurai-je un jour ma place dans le dictionnaire… Sylvère Mereaud, écrivain, Club lecture CDi Collège Jean-Jaurès, Villeurbanne (69)

En « dix mots » comme en cent...

édité à l’occasion de la 21e Semaine de la langue française et de la francophonie (12 au 20 mars 2016) par l’espace Pandora. Renseignements : espace Pandora – 04 72 50 14 78

Directeur de la publication : Thierry Renard Rédactrice en chef : Julie Dorille

Conception graphique et suivi : Myriam Chkoundali impression : iPs – ReyRieUX (01)

« En dix mots comme en cent » – Mars 2016 – Page 20

issn 2268-4832


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