INFOSPAS Handicap novembre 2018

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INFOSPAS Novembre 2018

S E R V I C E D E P R É VOYA N C E E T D ’A I D E S O C I ALE S

LA TRANSITION MINEUR-MAJEUR, UNE ÉTAPE CLÉ POUR LES JEUNES EN SITUATION DE HANDICAP ET LEUR FAMILLE 2 3 4 5 6 7 8 9

Introduction Le système de transition mineur-majeur L’orientation des jeunes dans le dispositif Point de vue: Insieme-Vaud Point de vue: SESAF Des solutions d’accompagnement plus flexibles L’accueil dans une institution pour adultes News: Violence domestique

Les enfants en situation de handicap vivent – dans leur grande majorité – au domicile de leurs parents et bénéficient des prestations du secteur de l’enseignement spécialisé. A l’âge de 18 ans, un autre univers s’ouvre à eux. Pour certains, ils doivent s’adapter à un nouveau mode de vie en institution, avec une prise en charge différente. C’est un changement majeur. Les familles, quant à elles, doivent construire un nouveau soutien adapté pour un adulte. La réussite de ce passage est cruciale pour l’avenir du jeune. Il est donc primordial que les deux services concernés, le Service de prévoyance et d’aide sociales (SPAS – et dès le 1er janvier 2019, la Direction générale de la cohésion sociale) et le Service de l’enseignement spécialisé et de l’appui à la formation (SESAF) aient une vision commune, travaillent main dans la main et fassent preuve d’anticipation. C’est pourquoi la Commission cantonale sur les déficiences mentales et associées du Canton de Vaud (CCDMA), créée pour orienter les politiques en lien avec le handicap mental et identifier les points sensibles en concertation avec des experts et des partenaires externes, s’est intéressée à ces questions. La transition mineur-majeur étant très vite apparue comme une étape cruciale, la CCDMA a mené une réflexion de fond, avec notamment pour objectifs d’assurer une continuité des prestations après 18 ans et de proposer des alternatives à la vie en institution durant la phase de transition. La CCDMA a consigné les résultats de ses travaux dans un important rapport paru en avril 2018 («Jeunes et handicap: Favoriser la cohérence des transitions vers la vie adulte»).

Nous tenons à remercier toutes les personnes qui ont contribué à cette réflexion, qui donne au Canton les bases nécessaires pour continuer à développer son offre. Ainsi, au cours des prochaines années, l’Etat aura à cœur de rendre les prestations plus flexibles et de poursuivre le développement des structures d’accueil adaptées aux besoins. Il s’attachera en particulier à étoffer les possibilités d’hébergement à temps partiel, de relève parentale, d’accompagnement à domicile et de courts séjours. Les collaborations et la coordination entre les acteurs du handicap et de l’enseignement spécialisé seront en outre renforcées.

Giancarlo Valceschini Chef du Service de l’enseignement spécialisé et de l’appui à la formation (SESAF)

Françoise Jaques Cheffe du Service de prévoyance et d’aide sociales (SPAS)

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Introduction

La transition du statut de personne mineure à celui de personne majeure implique de grands bouleversements dans les parcours de vie des individus. C’est en effet au cours de cette période que les jeunes sont amenés à endosser de nouveaux rôles sociaux et à se projeter, notamment, dans la formation et le monde du travail. Le passage à l’âge adulte est une étape importante dans tous les parcours de vie individuels, mais cette phase est particulièrement cruciale pour les jeunes en situation de handicap, qui ont des difficultés spécifiques et rencontrent encore des obstacles dans leur vie quotidienne. La transition vers l’âge adulte est également une période délicate pour l’entourage des jeunes en situation de handicap. Chaque année, 80 à 100 jeunes en situation de handicap quittent le secteur de l’enseignement spécialisé (sous la responsabilité du SESAF) pour celui des prestations pour adultes (sous la responsabilité du SPAS). Cette transition s’accompagne de changements qui soulèvent des questions spécifiques à cette population, notamment celles relatives à l’accompagnement dont le ou la jeune pourra bénéficier après ses 18 ans et aux modalités d’accès aux prestations qui lui sont destinées. En 2014, la Suisse a ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Elle s’engage ainsi à éliminer les obstacles auxquels sont confrontées les personnes handicapées, à protéger celles-ci contre les discriminations et à promouvoir leur inclusion et leur égalité au sein de la société civile. L’action publique a donc un rôle primordial à jouer pour favoriser les opportunités de participation sociale et d’intégration pour toutes et tous. De ce fait, il est indispensable d’anticiper les changements afin de sécuriser ces jeunes et leurs familles en leur offrant des solutions adaptées. Un groupe de travail de la Commission cantonale sur les déficiences mentales et associées (CCDMA) s’est penché sur la problématique de la transition vers la vie adulte des jeunes avec une déficience intellectuelle, une déficience physique ou un polyhandicap. Ces travaux ont permis d’identifier les lacunes du dispositif actuel et d’étudier les améliorations à envisager pour que les transitions d’un secteur à l’autre se fassent dans le respect des besoins et souhaits spécifiques des personnes concernées, tout en assurant la continuité des prestations offertes.


LE SYSTÈME DE TRANSITION MINEUR-MAJEUR La transition fait intervenir plusieurs domaines de prestations: la pédagogie spécialisée pour les jeunes proches de la majorité (à partir de 16 ans), les structures de transition pour les jeunes entre 15 et 25 ans, les prestations pour adultes (hébergement et activités de jour), les formations professionnelles pour les mineur-e-s (à partir de 16 ans) et les mesures de réinsertion AI pour les jeunes adultes (18-25 ans). L’offre en matière d’activités de jour se décline selon l’âge des individus, le domaine dans lequel elles s’inscrivent (école, formation, travail) et les instances qui les pilotent ou en conditionnent

l’accès (Service de l’enseignement spécialisé et de l’appui à la formation (SESAF), Service de prévoyance et d’aide sociales (SPAS), Office de l’Assurance-invalidité (OAI).

Les transitions Ouverture dossier AI

Orientation professionnelle AI

Mesures AI

Formation professionnelle initiale (16 LAI) Aide au placement (18 et 18a LAI) Mesures de réinsertion (14a LAI) Rente AI

Secteur pour mineur-e-s

Secteur pour majeur-e-s

Job coaching Ateliers Centres de jour DCISH

Classe spécialisée en institution

Structures de transition en ESE

Classe officielle d’enseignement spécialisé

Formation TEM

Scolarisation inclusive en classe ordinaire

Prolongation de scolarité

PES

14 ans

16 ans

18 ans

Par ailleurs, la majorité civile implique de trouver une solution de logement adaptée parmi différentes alternatives. Les options prévues dans le secteur pour mineurs se résument essentiellement à l’hébergement au domicile des parents ou dans une structure résidentielle dans le cas des enfants et adolescents avec des besoins éducatifs

20 ans

25 ans

particuliers. Avec l’arrivée à l’âge adulte, la palette s’élargit. Le secteur pour majeurs offre des solutions plus nombreuses et plus flexibles, par exemple des logements autonomes avec soutien à domicile ou avec soutien éducatif, des hébergements résidentiels à temps partiel ou encore des hébergements en foyer décentralisé.

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L’ORIENTATION DES JEUNES DANS LE DISPOSITIF Depuis 2012, le Dispositif cantonal d’indication et de suivi pour personnes en situation de handicap (DCISH) informe les bénéficiaires et leur entourage sur l’offre existante (hébergement et activités de jour) et les oriente vers les prestations qui correspondent le mieux à leurs besoins.

Le DCISH a un rôle central

Le DCISH joue un rôle central. C’est un partenaire expert qui connaît toute la palette des prestations et constitue une porte d’entrée vers les prestations des établissements socio-éducatifs (ESE). Il simplifie la tâche des familles en leur donnant un accès aisé aux informations. Il recense les besoins et les propositions d’orientation et donne forme au projet de la personne, en collaboration avec l’Instance d’évaluation des besoins individuels (IEBI) de Pro Infirmis Vaud qui se charge de l’évaluation initiale et de la recherche des prestataires.

rapport initial qui expose les besoins et les attentes de la personne et donne des indications de prestations. Pour le jeune qui arrive du secteur pour mineurs avec tout un actif derrière lui, le DCISH permet d’assurer la continuité et de capitaliser sur ce qui a déjà été fait.

Le DCISH aide les institutions à élaborer le projet individuel de la personne en leur fournissant un

Plus d’informations sur www.vd.ch/dcish ou à l’adresse info@dcish.ch

Le DCISH est un outil de planification pour l’Etat. Il permet de recenser les besoins non satisfaits, d’assurer un suivi des admissions et de privilégier les alternatives au placement résidentiel.

Le point de vue de...

M. Gilbert Pieri Père d’un jeune adulte en situation de handicap mental Quels sont à votre avis les avantages du DCISH pour les parents? Le DCISH est très utile pour orienter les parents et les informer sur les prestations et les démarches administratives et financières obligatoires en vue d’être conforme aux obligations prescrites par les lois. Le passage à l’âge adulte est un moment difficile. On veut protéger son enfant et on a très peur de manquer quelque chose d’important. Les procédures sont parfois lourdes et ça peut être galère! Comment s’est passée la transition dans votre cas? La transition a été harmonieuse. J’ai rapidement reçu les informations nécessaires par la Fondation Renée Delafontaine et j’ai eu la chance de ne pas devoir changer Arthur d’institution. Aujourd’hui, il travaille à La Cordée à 50% et je planifie un hébergement d’ici trois ans. Pour moi, c’est une grande inconnue.

Je veux garantir que la solution trouvée respectera son autodétermination et son autonomie et lui permettra de continuer à évoluer. Quelles améliorations pourraient encore être apportées au dispositif selon vous? Ma frustration est le manque de formation continue pour les personnes en situation de handicap mental. Il faudrait offrir aux jeunes une poursuite des apprentissages jusqu’à 25 ans. On gagnerait à offrir de la stimulation pour préserver l’autonomie et maintenir les acquis. Une médiation entre secteurs mineur et majeur serait aussi utile. Une personne de référence, une sorte de «case manager», pourrait donner une continuité dans le suivi entre la fin de la scolarisation et l’âge adulte et aider les parents dans les démarches, par exemple pour une demande AI ou pour une curatelle.


Mme Catherine Roulet Co-présidente d’Insieme-Vaud, association vaudoise de parents et des personnes concernées par le handicap mental Mme Véronique Nard Membre du comité et mère d’un jeune de 18 ans en situation de handicap Quels besoins avez-vous identifié parmi les membres de votre association s’agissant de la transition mineur-majeur? Les parents, membres de notre association, disent manquer d’informations ou avoir des informations contradictoires. Il manque une sorte de guichet unique qui servirait de point d’orientation et d’information pour permettre aux parents d’avoir une vue d’ensemble des démarches à faire avant les 18 ans de l’enfant. Cela les aiderait à se projeter dans l’avenir, en réduisant le stress lié à cette transition.

Le point de vue de...

L’administratif est aussi lourd. Il faut faire de nombreuses démarches et il y a un manque de synchronisation entre les services concernés. C’est compliqué, parce qu’il n’est pas possible de demander certaines prestations avant que d’autres décisions aient été prises. Les parents sont perdus dans ce dédale administratif. Quelles est votre appréciation du DCISH aujourd’hui? Nous nous sommes aperçues que les parents ne connaissent pas vraiment le rôle du DCISH, et cela malgré les efforts d’information faits également par notre association. De plus leur site est compliqué, il est difficile de s’y retrouver. Par exemple, une fois la demande déposée, le traitement est très long avant de rencontrer une collaboratrice du IEBI (instance d’évaluation des besoins individuels), il ne se passe plus rien pendant une année, alors que de nombreuses démarches seraient à entreprendre, comme découvrir toutes les possibilités qui existent pour le futur de ces jeunes. Ensuite,

après cette année tout se précipite, tout est à faire en même temps. Qu’est-ce qui pourrait être fait ou développé pour accompagner encore mieux les parents pendant la transition? Nous insistons, les parents sont démunis. Il serait utile d’avoir une personne «guide» qui coordonnerait et aiderait à faire les démarches, que les parents sachent précisément ce qu’ils doivent faire dès 16 ans avec une marche à suivre afin de ne rien oublier, du type de celle de Procap. Davantage d’offres, surtout à temps partiel serait nécessaire, et plus de flexibilité. Il existe bien des solutions de répit pour les parents de mineurs avec handicaps, mais pas pour les adultes. Une forme d’Unité d’accueil temporaire (UAT) pourrait également décharger les parents d’adultes avec de handicap et vivant à domicile. Que fait votre association pour soutenir ses membres? Nous assurons des représentations dans différentes commissions cantonales ou organismes touchant le monde du handicap. Nous suivons de près l’actualité politique pouvant influencer la vie des familles. Nous avons un service de conseil et soutien pour guider les familles, nous organisons des groupes de parole et des conférences en collaboration avec l’Etat. Nous organisons aussi de nombreux camps et loisirs qui permettent aux personnes en situation de handicap d’accéder à des vacances épanouissantes et de développer leur autonomie, ce qui permet également aux parents de souffler.

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Le Service de l’enseignement spécialisé et de l’appui à la formation (SESAF) a pour mission d’offrir appui et soutien à l’ensemble du système de formation, au travers des outils de la pédagogie spécialisée, de l’orientation professionnelle et de la prévention et la promotion de la santé. Il assure et soutient également la scolarisation des enfants et jeunes ayant des besoins particuliers. Enfin, il accompagne le processus d’insertion sociale par la formation professionnelle. L’Office de l’enseignement spécialisé propose différents types de mesures destinées aux enfants et élèves de 0 à 20 ans en situation de handicap et en appui aux enseignants.

M. Philippe Nendaz Chef de l’Office de l’enseignement spécialisé

Le point de vue de...

Comment se passe la préparation du projet pour les jeunes qui vont faire appel aux prestations du secteur adulte? Les transitions, quelles qu’elles soient, engendrent un stress important pour chacun d’entre nous. Pour les jeunes en situation de handicap, le passage à l’âge adulte additionne, en un seul événement, le déménagement, le changement d’activité et la modification des relations interpersonnelles. La transition entre le domaine de la formation et le domaine de la formation professionnelle ou du secteur adulte constitue un vaste champ d’intervention pour le SESAF, et plus particulièrement de l’Office de l’enseignement spécialisé. Les collaborations sont multiples, tant avec le monde professionnel, l’Office cantonal AI, l’Ecole de la Transition, les centres de formation professionnelle et le secteur institutionnel adulte relevant du SPAS. Dans ce dernier domaine, les collaborations sont d’autant plus nécessaires que les situations des jeunes présentent une complexité croissante. Comment la continuité des prestations dans ce passage d’un secteur à l’autre est-elle assurée? Les directions des institutions de pédagogie spécialisée sont responsables de l’admission et du transfert des élèves qui leurs sont confiés. Pour éviter des ruptures ou des échecs au moment de la transition, le SPAS et le SESAF appliquent une procédure permettant une meilleure anticipation des besoins des jeunes dont la situation nécessite un examen particulier en raison de la complexité de leurs besoins. Par ailleurs, toutes les situations sont annoncées par l’intermédiaire d’une enquête annuelle permettant la meilleure transition possible.

L’âge administratif de la transition est 18 ans. Qu’est ce qui est mis en place ou devrait être développé pour répondre à des besoins différents? A 18 ans, chaque jeune passe en effet d’une situation de mineur à une situation d’adulte, avec des statuts et des droits différents. Cependant, il est d’usage de ne pas figer le moment de la transition au passage à la majorité. Par exemple, il est important pour nos élèves de pouvoir terminer une année scolaire. Des admissions dans le secteur adultes peuvent ainsi être anticipées ou retardées, en principe sur une période de 6 mois avant ou 6 mois après la date de la majorité. Les projets individualisés de formation ainsi que la pression exercée sur les places institutionnelles tant dans le domaine des mineurs que celui des adultes conditionnent le suivi des jeunes en question. Avez-vous constaté une évolution des besoins ces dernières années? Les besoins d’informations entre l’institution «mineurs» et l’institution «adultes» deviennent de plus en plus importants pour que les transitions se passent au mieux. L’implication des parents, l’anticipation du projet ainsi que la préparation du jeune dans une perspective d’autodétermination sont essentielles. La transition vers le monde des adultes implique également la poursuite d’un projet de formation, tant du point de vue des connaissances que de celui des compétences. Les principaux axes de développement sont le maintien des acquis scolaires, l’éducation numérique et le développement des compétences liées à l’autonomie.


DES SOLUTIONS D’ACCOMPAGNEMENT PLUS FLEXIBLES Au terme de leur scolarité obligatoire, les jeunes en situation de handicap peuvent désormais compter sur des solutions d’accompagnement plus flexibles jouant un rôle particulier dans la perspective de la transition vers la vie adulte.

S’adapter aux besoins spécifiques

C’est notamment le cas des prestations de formation et d’insertion professionnelle qui permettent d’assurer la continuité de la formation ou du projet professionnel du jeune en capitalisant sur les savoirs et les compétences acquises dans le secteur pour mineurs (enseignement spécialisé ou formation professionnelle initiale).

d’autisme. Strada offre un programme d’accompagnement sur 4 ans visant à favoriser l’acquisition de compétences individuelles et professionnelles en vue de l’intégration en entreprise, en structure de vie ou en milieu socio-professionnel.

Ces dernières années, les établissements socioéducatifs (ESE) spécialisés dans la déficience intellectuelle ont fait évoluer leurs prestations vers une modularisation et une adaptation des rythmes d’apprentissage.

L’accompagnement proposé permet de préparer les jeunes à la vie adulte selon leurs possibilités, en tenant compte au mieux des besoins spécifiques liés aux troubles du spectre autistique. Des approches thérapeutiques sont également proposées afin de soutenir les jeunes dans leur développement corporel et émotionnel.

C’est par exemple le cas du Foyer à Lausanne. Cet ESE a créé en 2008, la structure Strada, qui accueille en externat 8 jeunes adultes de 16 à 20 ans atteints

L’offre de structures de transition analogues sera développée et augmentée au cours des prochaines années.

Le point de vue de...

M. Ghiskan Sakijha Directeur de l’Association Le Foyer Qu’est-ce qui a conduit Le Foyer à mettre en place la structure Strada en 2008 ? Plusieurs familles dont les enfants terminaient leur scolarité dans notre école spécialisée nous ont approchés pour nous demander quelle allait être la suite de leur accompagnement. L’offre d’établissements de transition étant limitée, nous avons développé et présenté un projet à l’Etat d’une structure de transition mineur-majeur spécialement adaptée aux adolescents atteints d’autisme qui tienne compte de toutes leurs particularités et besoins. Quel regard portez-vous sur ces dix années d’expérience? La structure fait sens et représente une bonne alternative pour la transition vers le monde des adultes. Nous avons pu développer des compétences spécifiques à ce type d’accompagnement. Le fait que

nous n’ayons pas désempli et que nous recevions encore des demandes montre que Strada répond à un besoin évident. Quelles sont vos perspectives pour les années à venir? Nous prônons un partenariat fort entre tous les acteurs concernés par la question de l’autisme et nous souhaitons partager notre expérience pratique de terrain. Le Foyer a créé et pilote la démarche «Autisme Partenaires» qui encourage le développement des compétences des équipes et souhaite rendre plus visibles les bonnes pratiques institutionnelles. Nous avons plus que jamais besoin des forces et de l’engagement de tous les acteurs pour tendre vers une meilleure compréhension de l’autisme et un accompagnement plus efficient.

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L’ACCUEIL DANS UNE INSTITUTION POUR ADULTES Le Dispositif cantonal d’indication et de suivi pour personnes en situation de handicap (DCISH) est le point d’entrée donnant accès aux prestations pour adultes. Sur la base d’une évaluation réalisée par Pro Infirmis Vaud, le DCISH propose des prestations d’accompagnement au jeune. Des alternatives à l’institution sont proposées autant que possible, par exemple la poursuite de l’accompagnement à domicile si la famille le souhaite.

Construire le projet individuel

Pro Infirmis Vaud établit un rapport initial qui clarifie les besoins et les attentes des jeunes et donne des indications de prestations générales. Ces informations sont précieuses pour les institutions pour adultes amenées à accueillir le jeune. Elles les aident à développer le projet individuel de façon à favoriser l’autonomie des personnes. L’accueil dans un établissement socio-éducatif peut être envisagé lorsque le projet d’accompagnement élaboré par Pro Infirmis Vaud a été validé par la Commission cantonale d’indication et de suivi (CIS) et que l’établissement socio-éducatif

(ESE) sollicité a donné son accord pour une admission. Le SPAS devra encore ratifier le projet de placement.

Le SPAS et le SESAF ont pris des mesures pour faciliter la transition. La collaboration étroite entre les deux services permet une bonne anticipation des besoins, de façon à développer les prestations nécessaires pour faciliter l’accueil dans le secteur pour adultes. Le SESAF a par exemple la possibilité de prolonger les mesures pour mineur jusqu’à l’âge de 20 ans; des procédures spécifiques existent par ailleurs pour les situations complexes.

Le point de vue de...

Mme Mireille Scholder Directrice de la Fondation de Vernand Qu’est-ce qui est mis en place pour accueillir et intégrer un jeune venant du secteur pour mineurs à son entrée dans votre institution? Nous avons un centre de formation qui poursuit le développement des compétences scolaires et renforce les compétences sociales et métier, afin de construire un projet professionnel, chaque fois que possible en entreprise. Du côté de l’hébergement, nous avons développé des places d’accueil à temps partiel qui permettent de vivre une première expérience de prise de distance avec le cocon familial, de découvrir la richesse d’un environnement collectif et de développer plus d’autonomie dans la vie quotidienne. Comment élaborez-vous le projet individuel d’une personne à son arrivée? Nous travaillons à renforcer l’autodétermination des personnes. Cela veut dire construire une relation

d’adulte à adulte. Ce n’est pas toujours facile pour des jeunes dont la maturité affective est en décalage avec leur majorité civile. Les outils du Processus de production du handicap permettent de définir les habitudes de vie qui sont prioritaires pour le jeune, soit en développant ses compétences, soit en trouvant les ressources et aides nécessaires pour renforcer sa participation sociale. Quels sont selon vous les défis d’avenir du point de vue de la transition mineur-majeur? Assurer un continuum de prestations en cohérence avec celles de la scolarité ou formation, afin de consolider les acquis. Le partenariat avec les familles est essentiel: reconnaître leur expertise, créer des relations de confiance, avoir une vision des ressources offertes, permet à chacun de se repositionner dans le contexte du passage à la vie d’adulte.


NEWS Entrée en vigueur de la loi-cadre sur la violence domestique et de son règlement d’application L’entrée en vigueur au 1er novembre 2018 de la loicadre d’organisation de la lutte contre la violence domestique (LOVD) et de son règlement d’application concrétise un véritable changement de paradigme dans la lutte contre ce fléau. La violence domestique peut prendre diverses formes, physique, sexuelle, psychologique ou économique. Elle touche tous les milieux socio-économiques et tous les âges de la vie. Elle s’exerce dans tout type de relation de couple (maritale ou extra-maritale, hétérosexuelle ou homosexuelle, mariage forcé, relation actuelle ou passée).

Les statistiques policières de la criminalité donnent un aperçu de l’ampleur de ce phénomène au niveau national: n

Une femme sur cinq est maltraitée physiquement ou sexuellement au cours de sa vie de couple1. n Deux femmes sur cinq le sont psychologiquement1. n Pour l’ensemble des homicides consommés en 2017, 46,7% se sont déroulés dans la sphère domestique2.

Face à ce fléau, le Conseil d’Etat agit Face à la gravité de ce phénomène, le Conseil d’Etat a décidé d’agir fermement. Il a pris des mesures contre la violence domestique, à la fois pour protéger les victimes et intervenir plus efficacement auprès des auteur-e-s. En 2015, il a mis en place un paquet de mesures transitoires urgentes placées sous le slogan «Qui frappe part!». Jusqu’alors, c’était la victime qui devait quitter son domicile, parfois en urgence, pour trouver refuge et protection auprès d’organismes spécialisés. Avec la mesure «Qui frappe part!», la police peut expulser les auteur-e-s de violences domestiques de leur habitation et leur en interdire l’accès pendant quatorze jours. Elle peut également éloigner l’auteur-e

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de violences domestiques qui ne se trouve pas en ménage commun avec la victime mais qui lui rend visite régulièrement. En 2017, le Parlement a adopté le projet de loi-cadre d’organisation de la lutte contre la violence domestique (LOVD) présenté par le Conseil d’Etat. Cette loi consolide les mesures de «Qui frappe part!» grâce un renforcement du mécanisme des expulsions des auteur-e-s du domicile conjugal. Elle introduit également des entretiens socio-éducatifs obligatoires pour les auteur-e-s dans le but de limiter la récidive. La coordination de ces mesures sera assurée par une direction inter services supervisée par le Bureau de l’égalité entre les femmes et les hommes (BEFH).

L. Gillioz, J. De Puy, V. Ducret, Domination et violence envers les femmes dans le couple, Ed. Payot, Lausanne, 1997. Voir aussi le rapport du Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes (BEFG) La violence dans les relations de couple: ses causes et les mesures prises en Suisse; 2008. Statistiques policières de la criminalité (OFS; 2017).

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NEWS Violence domestique: les prestations financées par le SPAS Le Service de prévoyance et d’aide sociales (SPAS) pilote et soutient financièrement les organismes spécialisés qui dispensent les prestations destinées à aider et protéger les victimes de la violence domestique et qui offrent un soutien aux auteurs dans le but

de prévenir les récidives. Ces partenaires mettent aussi en œuvre des actions spécifiques de prévention ou de recherche. Chaque année, ce sont plus de 10 millions qui sont alloués au dispositif de lutte contre les violences.

Les prestations pour les victimes Le Centre Malley-Prairie Ouvert 24 h sur 24 et 7 jours sur 7, le Centre d’accueil Malley-Prairie (CMP) accueille en urgence ou sur rendez-vous des femmes avec ou sans enfant victimes de violences conjugales ou de violences familiales. A Lausanne, le CMP propose un hébergement pour accueillir les victimes et leurs enfants, un soutien psycho-social et la possibilité pour les enfants de fréquenter un centre de vie enfantine. Il offre aussi des consultations ambulatoires à Bex, Montreux, Vevey, Nyon, Orbe, Yverdon-les Bains et Payerne

(ou ailleurs dans le canton sur demande des services médico-sociaux).

Depuis l’entrée en vigueur de «Qui frappe part!», le CMP a mis en place le programme Guidance, qui propose un soutien à domicile aux victimes de violence domestique, hommes ou femmes, afin de leur offrir une aide concrète après l’expulsion de l’auteur-e par la police. Le CMP collabore étroitement avec l’Equipe Mobile d’Urgences Sociales (EMUS). Contact et informations: www.malleyprairie.ch

Chiffres clés n Chaque année, 150 à 200 femmes hébergées avec leurs enfants. n Plus de 1200 consultations ambulatoires ou au domicile.

Le centre LAVI Le centre de consultation LAVI (Loi fédérale sur l’aide aux victimes d’infractions) apporte aux victimes d’infractions et/ou à leurs proches une aide psychologique, juridique, sociale et matérielle. Il informe les victimes tout au long des procédures et les oriente

vers le réseau d’intervention. Le centre LAVI est géré par la Fondation PROFA et collabore étroitement avec les autres intervenants du réseau, notamment le Centre Malley-Prairie et avec l’association ASTREE. Contact et informations: www.lavi.ch

Chiffres clés n En 2017, plus de 2800 consultations réalisées. n Dans 70% des cas, la victime connaît l’auteur-e des violences.


S NEWS L’Unité de médecine des violences (UMV) L’Unité de médecine des violences (UMV) assure aux victimes de violences une consultation médicolégale. Après un épisode de violence, il est en effet indispensable de faire établir rapidement un constat médical détaillé qui peut servir à faire valoir ses

droits dans une procédure ultérieure. Ouverte au CHUV en 2006, l’UMV est aujourd’hui aussi présente à Yverdon-les-Bains, Montreux et Nyon (depuis le 1er octobre 2018). Contact et informations: voir le site de l’UMV.

Chiffres clés n Plus d’un millier de consultations médico-légales depuis 2016.

ASTREE (Association de soutien des victimes de traite et d’exploitation) La traite des êtres humains désigne le commerce de personnes à des fins d’exploitation et utilisant des moyens déloyaux. Il peut s’agir d’une exploitation sexuelle, de la force de travail ou en vue du prélèvement d’organes. Depuis 2015, l’association ASTREE écoute, héberge, conseille et soutient les personnes

qui sont victimes de ces phénomènes. Certaines personnes soutenues par ASTREE peuvent avoir été victimes d’un mariage forcé. Dans ces situations, ASTREE collabore notamment avec le Bureau cantonal de l’intégration (BCI). Contact et informations: www.astree.ch

Chiffres clés n En 2017, 52 victimes de traite hébergées. n 1400 entretiens de suivi et d’accompagnement. n 87 entretiens de détection.

Prestations pour les auteur-e-s de violence Le Centre de prévention de l’Ale (CPAle) Le SPAS soutient le Centre Prévention de l’Ale (CPAle), qui a pour mission d’aider toute personne qui exerce une ou plusieurs formes de violence au sein du couple ou de la famille. Des entretiens individuels ou en groupe, ainsi que des programmes de sensibilisation et thérapeutiques, sont proposés par des intervenants spécialisés.

Le CPAle et le Centre d’accueil Malley-Prairie collaborent afin de proposer des consultations à des couples qui vivent de la violence dans leur relation, en prenant en compte l’impact de ces comportements dans la famille. Contact et informations: www.prevention-ale.ch

Chiffres clés n En 2017, 191 hommes et 41 femmes ont bénéficié de prestations. n 60% des bénéficiaires sont orientés par la police et 40% sont volontaires.

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NEWS La nécessité de la prévention Une part importante des comportements violents a lieu au sein de la famille ou dans une relation de couple. Des mesures visant à les prévenir sont ainsi essentielles. Le Centre social protestant et la

Fondation PROFA offrent des consultations de couple qui peuvent permettre de prévenir l’émergence de comportements problématiques. Contact et informations: www.problemedecouple.ch

Chiffres clés n En 2017, près de 2000 personnes ont bénéficié de plus de 3000 consultations.

Les enfants sont aussi touchés Les enfants peuvent être victimes de violence directe, mais aussi indirecte en étant témoins de violence domestique. Celle-ci porte atteinte à leur sécurité émotionnelle et met en danger leur bien-être et leur développement. Constatant l’ampleur de ce phénomène, de nombreux services se mobilisent pour les accompagner. Le SPAS a mandaté l’association ASTRAME (www.astrame.ch) pour qu’elle développe un projet visant à soutenir la coparentalité afin de favoriser la stabilité du cadre familial. Il soutient également l’association Dis No (www.disno.ch), qui a pour mission de prévenir la maltraitance et les abus sexuels envers les enfants. Enfin, il a récemment transféré au Service de protection de la jeunesse (SPJ) la subvention destinée à l’association ESPAS (www.espas.info),

qui s’engage auprès des enfants et des adultes concernés par les abus sexuels. Le dispositif venant en aide aux enfants victimes, directes ou indirectes, de violence domestique est riche et complexe. Les entités de l’Etat et leurs partenaires développent, dans leurs domaines de compétences respectifs, des mesures appropriées. Le défi actuel est de s’assurer que ces acteurs disposent d’une information suffisante sur ce dispositif et que leurs actions se déploient de manière coordonnée. Pour le domaine de l’enfance et de la jeunesse, une Commission de coordination, présidée par le SPJ, assure ces missions. Le temps est venu de penser une meilleure articulation des domaines de l’enfance et de la violence domestique pour offrir une prise en charge la plus efficace possible aux enfants en difficultés.

Chiffres clés n 27 000 enfants sont exposés à la violence domestique chaque année, avec une surreprésentation d’enfants âgés de 0 à 6 ans. n Plus de 50% des enfants dont la mère a subi des violences étaient présents lors des événements violents.

INFOSPAS HANDICAP, novembre 2018. Auteur: SPAS. Graphisme et mise en page: Cayenne Communication Visuelle, Lutry. Distribution: Etablissements socio-éducatifs, partenaires du domaine du handicap et partenaires du SPAS.

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