Adomed1 complet bd

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P.13

Gynécologie “Pouvez-vous me prescrire la pilule ?”

La revue de la médecine pour les adolescents avril 2011 - n° 1 - 8 e

P.5

société

Tag story

Histoire et symbolique P.9

P.27

Cas clinique Un adolescent de 17 ans impubère Quels sont les diagnostics à évoquer ?

P.22

Les vaccins de l’adolescent Le rendez-vous manqué ?

Dermatologie Les formes d’acné

Toutes les occasions sont bonnes pour mettre à jour le calendrier vaccinal

Des progrès physiopathologiques aux diagnostics et traitements


éditorial

Adolescence et médecine 1 concept né de 3 observations Dr Hervé Lefèvre, Rédacteur en chef Pédiatre, Paris

« Je souhaite qu’Adolescence & Médecine constitue une aide pour nous médecins qui rencontrons ces adolescents de façon anecdotique ou régulière… »

L

e concept de la revue Adolescence & Médecine est le résultat de 3 observations. La première concerne l’intérêt transgénérationnel que suscite la médecine de l’adolescent, de nos jeunes collègues aux praticiens plus expérimentés, pour acquérir ou partager une formation sur ce thème. La seconde est le caractère transversal de cette activité qui regroupe des compétences multiples et complémentaires pour son exercice. La dernière est le constat de l’absence de revue périodique dédiée exclusivement à cette activité variée et évolutive. C’est ainsi qu’au terme d’une longue période de réflexion, de discussions avec un groupe d’amis médecins hospitaliers et libéraux, généralistes ou spécialistes, le projet s’est concrétisé après avoir persuadé, malgré le contexte économique, le Dr Antoine Lolivier et son équipe d’Expressions Santé. La revue est d’abord clinique et a pour objet de s’intéresser aux situations diagnostiques et thérapeutiques de la médecine de l’adolescent. Elles sont nombreuses, et riches d’enseignement, qu’elles concernent le développement somatique, les maladies chroniques et le handicap, les enjeux spécifiques de la transition, les enjeux psychodynamiques propres à l’adolescence et leurs retentissements normaux ou pathologiques, sans oublier les spécificités sociales (codes, expressions), éducatives et familiales propres à cette génération. Elle se décline à partir d’articles concis et pratiques, de cas cliniques, d’interviews, d’abstracts et, je l’espère, avec la participation de lecteurs aguerris pour alimenter la discussion, ou la controverse… Cette présentation optimiste n’a pas pour objet de dissimuler le contexte actuel responsable de la destruction insupportable de moyens déjà insuffisants. En ces temps difficiles, la précarisation touchera les plus fragiles de nos jeunes patients pour qui la prise en charge rapide et globale ne peut être un enjeu à court terme de comptables qui prétendent faire de la médecine, mais, tout au contraire, s’inscrit dans une politique de soins et de prévention pour améliorer la santé individuelle et collective des générations futures. Je souhaite qu’Adolescence & Médecine constitue une aide pour nous médecins, qui rencontrons ces adolescents de façon anecdotique ou régulière, pour enrichir nos temps de consultation et nous laisser le temps, pas toujours suffisant, de penser avec l’adolescent et ce qui l’entoure, une solution individuelle à travers différentes modalités de prise en charge. Bonne lecture à tous

Adolescence & Médecine

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L a

r e v u e

d e

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m e d e c i n e

p o u r

l e s

a d o l e s c e n t

Directeur de la publication : Dr Antoine Lolivier • Chef du Service Rédaction : Odile Mathieu • Rédacteur : Sébastien Cuvier • Secrétaire de rédaction : Annaïg Bévan • Chef de Fabrication et de Production : Gracia Bejjani • Assistante de Production : Cécile Jeannin • Chef de studio : Laurent Flin • Maquette : Elodie Lecomte • Illustration : Antoine Orry • Chef de publicité : Catherine Colsenet • Service abonnements : Claire Lesaint • Impression : Imprimerie de Compiègne 60205 Compiègne Rédacteur en chef Dr Hervé Lefèvre (Paris) • Conseiller scientifique de la rédaction : Dr Thomas Girard (Paris) • Comité scientifique : Dr Sophie Lemerle-Gruson (Créteil), Pr Claude Gricelli (Paris), Pr Régis Coutant (Angers), Pr François Doz (Paris), Pr Jean Wilkins (Montréal)

SOMMAIRE

Av ril 2011 - n° 1 - 8 e

société Tag story

Quelles significations du graffiti ? Maud Gibert

cas clinique Quels diagnostics évoquer ? Dr Claire Morel-Bouvattier

Gynécologie

P. 13

A propos de la contraception

“Pouvez-vous me prescrire la pilule ?” Dr Sophie Gaudu

on en parle Par les Drs Jean-Baptiste Bertrand et Hervé Lefèvre

• Comité de lecture ; Dr Catherine Naret (Paris) Dr Florence Moulin (Paris), Dr Chantal Deslandre (Paris), Dr Marie Noelle Lebras (Paris), Dr Dominique Cassuto (Paris), Dr Edith Gatbois (Paris), Dr François Bernard (Paris), Dr Chloé Lacoste (Paris), Dr Bertrand Vachey (Paris), Dr Sophie Gaudu (Paris), Dr Françoise Raynaud (Paris), Dr Delphine Martin (Paris).

Dr Bertrand Vachey

Les articles de “adolescence et médecine” sont publiés sous la r­ esponsabilité de leurs auteurs. Toute reproduction, même partielle, sans le consentement de l’auteur et de la revue, est illicite et constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal.

P. 9

Un adolescent de 17 ans impubère

• Comité de rédaction : Dr Emmanuelle Mimoun (Montpellier), Dr Paul Jacquin (Paris), Dr Arnaud Chalvon (Lagny) Dr Chantal Steinhert (Boulogne), Dr François Pinabel (Paris), Dr Claire Bouvattier (Paris).

Adolescence & Médecine est une publication © Expressions Santé SAS 2, rue de la Roquette, Passage du Cheval Blanc, Cour de Mai 75011 Paris Tél. : 01 49 29 29 29 - Fax : 01 49 29 29 19 E-mail : adomed@expressions-sante.fr RCS Paris B 394 829 543 N° de Commission paritaire : en cours ISSN : en cours 3 numéros par an

P. 5

Psychiatrie

P. 16

P. 18

Quand orienter un adolescent vers un psy ? Proposition d’une méthode d’évaluation

Dermatologie

P. 22

Acné chez l’adolescent

Des progrès physiopathologiques aux diagnostics et traitements des différentes formes Dr Réda Hadj-Slimane, Dr Françoise Raynaud

Prévention

P. 27

Les vaccins de l’adolescent Le rendez-vous manqué ? Dr Florence Moulin

Rendez-vous de l’industrie

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Abonnement

P. 25

Crédits de couverture : © antoneoneone ; Vignette en haut : © Ingo Bartussek-Fotolia ; Vignette en bas de gauche à droite : © Dr Hervé Lefèvre ; © Alexander Raths-Fotolia ; © Drs Réda Hadj-Slimane et Françoise Raynaud


société

Tag story Quelles significations du graffiti ? Sous nos yeux, chaque jour, faisant partie du décor urbain, ternes ou colorés, sauvages ou élaborés, les tags nous divisent. Certains les jugent agressifs et

Maud Gibert Sociologue, Paris

salissants, d’autres poétiques ou artistiques. S’imposant dans l’espace et dans le temps, ils méritent que l’on s’interroge sur leurs significations et leurs auteurs.

Histoire du graffiti bbUne origine datant b des années 60 Le graffiti est associé à la culture HipHop et reconnu comme une de ses disciplines, avec la Breakdance (danse hiphop), le Dj-ing (mix et scratch de vinyls), le Mc-ing (rap). Cependant, l’affiliation des tagueurs à cette culture n’est pas systématique. Le graffiti est un mouvement avec sa propre histoire, qui reste moins influencé que les trois autres disciplines étroitement liées par la musique. L’origine du graffiti est difficile à dater et les versions sur son apparition sont nombreuses.

La plupart des spécialistes datent son émergence du milieu des années 60, dans les quartiers noirs de Philadelphie (1) où un adolescent, surnommé Cornbread, taguait les métros de la ville pour attirer l’attention d’une dénommée Cynthia. Un de ses proches, Top Cat déménagea à New York en 1968 en emportant avec lui le tag. Au même moment, un jeune portoricain du Bronx, se baptisant Julio 204, le numéro de la rue où il était né, commença lui aussi à taguer.

bbEté 1971 : le tag s’affiche dans la presse Le tag apparaît dans la presse pour la première fois dans le New York Times de l’été 1971, avec l’interview d’un jeune tagueur américain d’origine grecque, Taki 183, expliquant pourquoi Adolescence & Médecine

Les pièces ou fresques représentent des versions de tag plus élaborées dans leur style, plus colorées et de plus grande envergure. il taguait son nom : « je ne me prends pas pour une célébrité en temps normal, mais quand les potes me présentent à quelqu’un, ils me donnent la sensation d’en être une ». Dans la suite, des milliers d’adolescents new yorkais écrivirent leur propre nom sur les arrêts de bus et les stations de métro des quartiers nord de la ville. Alors que l’influence des gangs s’affaiblit, les tagueurs, dans une démarche strictement individuelle, au nom de leur propre nom, « envahissent les territoires, sautent les clôtures, violent le concept de propriété et inventent une forme de liberté bien à eux » (2). Peu à peu, les graffitis ont envahi le métro,

et la municipalité a mis en place une législation anti-graffiti de plus en plus sévère. En 1972, l’étudiant en sociologie Hugo Martinez, créa la toute première association de graffeurs, United Graffiti Artists. L’effervescence de ce mouvement entraîna de plus en plus de jeunes d’origines sociales différentes. La compétition permanente les poussait à chercher des endroits toujours plus risqués ou sensationnels, comme le fit en 1972 l’une des premières graffeuses, Stoney, en taguant la Statue de la Liberté. Il s’agissait pour tous ces jeunes d’atteindre la célébrité en conquérant la ville, en imposant leur nom. 5


société bbLes artistes s’approprient b le phénomène Selon l’expression de Greg Tate, c’était « une colonisation inversée » et l’expression d’une génération souffrant d’invisibilité : « le graffiti est une manière d’acquérir un statut dans une société où l’identité se définit par la

des protagonistes donne une interview pour expliquer ce geste comme une contre-manifestation médiatique à la manifestation du FN du 1er mai, et une protestation contre l’effacement systématique des pièces de couleurs en laissant les autres tags pour influencer défavorablement l’opinion publique.

propriété » (3). Certains artistes com-

mencent à s’intéresser au phénomène, malgré une résistance hostile des deux camps, le monde de l’art et le monde de la peinture de rue. Henry Chalfant, sculpteur, suivit les tagueurs et photographia leurs œuvres pour les exposer dans son studio à Grandstreet. En 1980, il parvient à faire la première exposition dans la Harris Galery à Soho (NYc), sortant le graffiti de son cadre habituel. Parallèlement à cet engouement, la répression s’est accentuée et une brigade anti-graffiti a vu le jour. Le graffiti passa du simple délit au statut de crime. En 1984, un accident grave entre un vigile du métro et quatre adolescents déclencha de vives réactions de soutien… au vigile.

bbArrivée du tag en France Le graffiti arrive en France une dizaine d’années après son apparition aux Etats-Unis. Le phénomène présente de fortes similitudes et prend racine dans les quartiers périphériques des grandes villes. La première présentation dans la presse française est faite dans le journal Libération en octobre 1981, mais il est encore confondu avec l’art de rue des pochoirs et des slogans politiques émanant de la révolution culturelle de mai 68 et des années 70 (4). Sa prolifération accentue sa médiatisation et sa diabolisation. Le Figaro titre en septembre 1985 : « Paris est tatoué ». Les tageurs répondent à la politique d’effacement en descendant dans les tunnels du métro. Dans la nuit du 30 avril au 1er mai 1991, la station de métro Louvre est entièrement taguée par trois jeunes, après plusieurs années de rénovation. Le 1er mai, toute la presse se fait écho du “scandale”. L’un 6

La répression se durcit, le tag est pénalisé par des travaux d’intérêt général (souvent travaux d’effacement des graffitis), des contraventions, voire du sursis. La RATP (Régie Autonome des Transports Parisiens) entreprend une politique d’effacement et de nettoyage

“fresques” sont une version plus élaborée dans le style, plus colorée et de plus grande envergure. Le “sketch” est une esquisse ou un dessin perfectionné sur support papier dans un book, cahier où le tagueur travaille en miniature ses lettrages.

bbUne pratique sur plusieurs plans La pratique du tag se divise en plans légaux (murs autorisés, devantures d’épiceries, certains camions avec l’accord du propriétaire) et les plans vandales (toutes surfaces non autorisées ou espaces interdits). Les métros

« Le tag n’est pas dépourvu de codes et de lois qui sont, bien sûr, plus ou moins respectés » immédiat. En parallèle, une politique de prévention se met en place, reconnaissant ce phénomène comme l’expression d’une partie de la jeunesse et en essayant de lui donner un cadre légal, par la mise à disposition des murs à cet effet. Les endroits légaux sont investis, mais la dynamique “vandale” ne perd pas son souffle.

Les règles du tag bbPoint de vocabulaire Le tagueur choisit son nouveau nom, appelé “blaze”, en fonction de son imagination et de l’harmonie graphique des lettres entre elles. Il peut être affilié à un groupe, appelé “crew” ou plus anciennement “posse” et apposer à sa signature les initiales de son groupe. Ces outils principaux sont les marqueurs et les bombes de peinture en spray, mais beaucoup d’autres outils, comme le rouleau à peinture ou la peinture à l’aérographe, sont de plus en plus utilisés. Le “Tag” (étiquette de bagage en Anglais) est une signature rapide et vandale, le “Flop” est une performance graphique, consistant à peindre une pièce en un seul coup de bombe, tandis que les “pièces” ou

et autres véhicules sont très appréciés, car ils se déplacent dans les quartiers et dépassent les frontières. Le tag n’est pas dépourvu de codes et lois, qui sont bien sûr plus ou moins respectés. Taguer les biens personnels (voitures, maisons…) et certains supports (pierre de taille…) est proscrit. Il existe aussi

des règles de cœxistence entre les tagueurs. Un tagueur peut “repasser” le tag d’un autre et il peut aussi le rayer, autrement dit le “toyer” par défi ou parce qu’il le juge médiocre.

bbUne activité parfois risquée Généralement, le tagueur opère la nuit, pour ne pas se faire repérer. Il se balade dans la ville, seul ou accompagné, à la recherche d’un ou plusieurs endroits propices, ou cherche à se faire enfermer dans le métro, passant une bonne partie de la nuit dans les tunnels. Afin d’assurer discrétion et sécurité, le tagueur s’associe à de petites équipes. Les risques sont nombreux et propres à l’exercice. Le risque pénal est bien sûr le premier risque, mais d’autres dangers sont à redouter. Pour apposer

sa signature, il faut parfois accéder aux toits, grimper sur le mobilier urbain ou encore braver les clôtures. Les blesAdolescence & Médecine


Tag story

sures sont nombreuses. Deux cas de décès aux Etats-Unis sont à déplorer suite à une chute sous une rame d’un métro, et à l’explosion d’une bombe de peinture. En France, en 2004, un jeune tagueur de 19 ans décède noyé dans la Marne après une course poursuite avec la police. D’autres jeux dangereux sont appréciés et les performances les plus risquées sont filmées. Le “saut de rail” consiste à attendre l’arrêt du train sur le quai en face, à descendre sur la voix et profiter des quelques secondes de stationnement pour tager les wagons en pleine circulation. Le “Scriptambule”, pour reprendre l’expression de A. Vulbeau (4), est animé par l’émulation d’une compétition permanente où la prise de risque est une valeur ajoutée.

Les métros et véhicules sont très appréciés car ils se déplacent dans les quartiers.

Le tag du côté législatif

être accompagnée d’un emprisonne-

Du point de vu légal, le délit est estimé en fonction de deux critères : le support dégradé et l’indélébilité de la signature. Le fait de tracer, sans autorisation préalable, des inscriptions, signes ou dessins, n’ayant entraîné qu’un “dommage léger” (inscription effaçable sans attaquer le support) sur les façades des immeubles, des véhicules, les voies publiques ou mobilier urbain, entraîne la sanction d’une amende de 3 750 euros et/ou de travaux d’intérêt général allant de 40 à 240 heures. L’amende peut atteindre les 7 500 e s’il s’agit d’un endroit historique ou un monument classé et jusqu’à 15 000 e si les faits ont été commis en réunion « au préjudice d’une personne particulièrement vulnérable ou dans un lieu d’habitation ou destiné à l’entrepôt de fonds, valeurs, marchandises ou matériels après pénétration par ruse, effraction ou escalade ». Si les conséquences sont irréversibles et altèrent la valeur du support, l’acte est qualifiable de dégradation ou de détérioration volontaire du bien d’autrui au sens de l’article 322-1 alinéa 1er qui prévoit deux ans de prison et 30 000 e d’amende (5). Bien qu’il n’existe pas de peine type, la sanction est générale-

ment avec sursis de trois mois s’il y a

ment une amende de 500 euros, accompagnée de 120 h de TIG et peut Adolescence & Médecine

récidive.

Regard sociologique sur la pratique

lisation. Il s’impose au regard des passants, des usagers des transports et est perçu comme une invasion. Cependant, le caractère polémique que revêt le tag, souvent dû à son emplacement, n’est pas toujours à

bbQuelle symbolique ?

prendre comme un outrage systéma-

Le tag, élément incontournable de la décoration urbaine, est le sujet de nombreuses études sociologiques. Il est perçu comme une manière d’interagir avec un environnement public de moins en moins socialisant, et devient l’expression d’une catégorie d’une jeunesse invisible et muette. Ecrire son nom revient à planter son drapeau et à affirmer son existence. Dans les années 70, le graffiti américain est une spécialité urbaine, ethnique et générationnelle, portée par les jeunes Noirs et Portoricains de 12 à 24 ans. Son succès assurera une mixité sociale et générationnelle plus élargie. Le

tique. La ville, parfois inconnue, n’est

graffiti est compris sociologiquement comme une conquête de la ville, une appropriation des espaces publics et des supports de communication.

La signature est une empreinte individuelle, symbolisant l’apparition et la disparition du protagoniste. Le tag n’est pas figé, il est dispersé dans toute la ville, souvent éphémère et prend de la valeur dans sa répétition et sa loca-

pas perçue comme un “sanctuaire de valeurs” par ces jeunes (4). Les graffitis n’ont pas de vocation revendicatrice, ni une recherche de considération esthétique pour les non-initiés. Ils sont auto-centrés, le tagueur faisant sa propre promotion et créant sa propre liberté. Il cherche à être connu et reconnu parmi ses pairs pour son originalité, son cran, son audace et son style. La fonction socialisante est à la base de toute expression, et il s’agit bien de s’intégrer à un groupe social régi par des codes, et des classements hiérarchiques, les plus anciens, les plus reconnus. On entre dans une double compétition, avec les autres et avec soi-même. Poser sa signature, c’est l’envie de faire partie d’une mémoire collective, de marquer l’histoire, où la ville servirait de grand livret d’or. Selon le concept de P. Bourdieu (6), le tag devient un instrument d’“éternisation” pour enrayer un processus symbolique de disparition. Le tagueur 7


société se crée une nouvelle identité et choisit son blaze en toute liberté ; certains prennent des noms de héros de fictions, d’autres choisissent des qualificatifs ou des jeux de mots malins.

bbQui est le tagueur ? En France, la pratique du tag touche un milieu social et économique diversifié et le seul dénominateur commun des tagueurs reste leur classe d’âge. Le tag regroupe une population juvénile, essentiellement masculine, habitant généralement les villes. Ce constat

conduit à l’interprétation psychologique du temps de l’adolescence, paraissant plus pertinente qu’une analyse se focalisant sur une rébellion d’une classe socio-économique “dominée” et bafouée. Se basant sur des enquêtes qualitatives de tagueurs, l’adhésion au monde du tag est décodée comme un processus de rite initiatique de passage vers le monde adulte (7). Il assure les fonctions classiques d’identification et d’affiliation de la construction identitaire adolescente, instaurant un “entresoi” adolescent loin de la tutelle des adultes. L’ethnologue A. Van Gennep lit le tag comme un réel rite de passage, avec une première étape de “préliminarité”, où le novice rompt avec l’enfance, une deuxième étape de passage au monde adulte en se situant dans une période de marge, puis d’une troisième étape dite de “postliminarité”, où le jeune retourne dans la société avec son statut d’adulte (8). Ainsi, le tag assure un rite de séparation, d’agrégation et de réintégration, comme tout rite initiatique, de plus en plus inexistant dans nos sociétés.

bb“Carrière” d’un tagueur Le tag procure du plaisir, de l’action, de l’adrénaline et sert de défoulement, d’exutoire. La “carrière” du tagueur se déroule en plusieurs étapes (9). Il commence souvent à griffonner sur les cahiers d’école et choisit son blase, puis appose petit à petit sa signature sur ses trajets familiers comme le chemin pour l’école. Il intègre ensuite un “posse” et passe l’épreuve du “toyage” pour obtenir le droit au respect. Son activité s’intensifie et il se juge et est jugé comme un vrai tagueur. Les premières confrontations avec la police sont déterminantes dans l’arrêt ou la poursuite de la pratique. En

grandissant, il n’est pas rare que les pièces graffitis légales prennent plus d’importance que les tags vandales. L’âge adulte atteint, avec le statut social et les responsabilités qui lui incombent, le tag vandale devient de plus en plus incompatible avec la vie d’adulte.

Quand le tag devient discipline L’ambivalence de la perception du graffiti reste inhérente à sa dualité intrinsèque d’art et de vandalisme. Le tag reste une manière de s’affronter pacifiquement entre adolescents et de chercher ses propres limites et celles du monde qui l’entoure. Il faut cependant noter, que pour certains, la pratique du tag vandale ou légal les accompagne bien au-delà de l’adolescence et constitue une discipline à part entière. Cette pratique reste en constante évolution, loin d’une mode, certains parlant de “subculture”. L’apparition récente des gravures et d’autres techniques de tag démontre que cette discipline évolue, se transforme en réponse à la politique d’effacement, et se transmet de génération en génération. n

Mots-clés : Tags, Graffiti, Sociologie, Symbolique, Histoire, Signification, Société, Interdit, Sanctions, Artistes, Peinture, Loi

Un adolescent “repassant” un ”blase” : une forme de défi à un autre tageur.

Références 1. Stewart J. Subway graffiti: an aesthetic study of graffiti on the subway

rencontres. Bordeaux, juin 2003. Bordeaux : CRDP d’Aquitaine, 2004.

system of New York City. New York: New York University, 1999.

6. Bourdieu P. Le sens pratique. Paris : Editions de Minuit, 1980.

2. Chang J. Can’t stop won’t stop : une histoire de la génération Hip Hop.

7. Felonneau ML, Busquets S. Tags et grafs, les jeunes à la conquête de la

Paris : Editions Allia, 2006.

ville. Collection Psycho-Logique. Paris : Editions l’Harmattan, 2001.

3. Tate G. Graf rulers /Graf untrained: one planet under a groove, hiphop

8. Van Gennep A. Les rites de passage : étude systématique. Paris :

and contemporary art. New York : Bronx Museum of Arts, 2001.

Picard, 1981.

4. Vulbeau A. Légende des Tags. Paris : Sens et Tonka, 2009 .

9. Boudinet G. Pratiques tag, vers la proposition d’une « transe-culture ».

5. Civilise AM. Patrimoine, tags et graffs dans la ville, Actes des

Paris : Editions de l’Harmattan, 2002.

8

Adolescence & Médecine


cas clinique

Un adolescent de 17 ans impubère Quels diagnostics évoquer ? Le retard pubertaire est un motif de consultation fréquent en pédiatrie. Eliminer le diagnostic d’hypogonadisme hypogonadotrope est indispensable, le retard pubertaire simple est un diagnostic d’élimination.

Dr Claire Morel-Bouvattier, Endocrinologue pédiatre, Hôpital Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre

U

n adolescent de 17 ans se présente en consultation pour retard pubertaire. Il présente comme antécédents personnels une hernie inguinale gauche opérée, un testicule gauche dit “oscillant”. Parmi les antécédents familiaux, on note une cure de hernie inguinale chez son frère, une puberté retardée chez son grand-père et un oncle maternels, et une torsion testiculaire unilatérale chez 2 autres oncles maternels. Enfin, un de ses cousins du côté maternel présente une cryptorchidie. Sa sœur a 15 ans et est réglée depuis l’âge de 14 ans.

Examen clinique A l’examen clinique, il mesure 178 cm et pèse 56 kg. Sa courbe de croissance staturo-pondérale est présentée figure 1. Il n’a pas de gynécomastie. Sa pilosité est P4, mais sa verge est petite et fine de 35 mm sur 12 mm, le méat est en position apicale, et ses testicules ont un volume de 2 ml en place. Il est anosmique. Son examen neurologique est normal et ne présente pas de syncinésie d’imitation. L’absence de signe de puberté (pas

Figure 1 - L’IRM cérébrale montre une hypoplasie des bulbes olfactifs.

Tableau 1 – Bilan hormonal du patient. Fonction gonadotrope Autres fonctions anté-hypophysaires

• Test GnRH : - FSH : 0,2 UI/l de base, pic à 1,6 UI/l - LH : 0,05 UI/l de base, pic à 1,3 UI/l • Testostérone plasmatique : 0,26 ng/ml • Inhibine B : < 6 pg/ml • T4l : 14,6 pmol/l • TSH : 1,2 µUI/ml • IGF1 : 337 ng/ml • Cortisol : 20 µg/dl • Prolactine : 15 ng/ml

d’augmentation du volume testiculaire) chez un jeune homme de 17 ans doit faire évoquer un hypogonadisme (central ou périphérique), ou un retard pubertaire simple, diagnostic d’élimination. Les antécédents familiaux, le

micropénis et l’anosmie plaident en faveur d’un hypogonadisme hypogonadotrope congénital. Adolescence & Médecine

Explorations paracliniques • Le bilan hormonal (Tab. 1) vient confirmer le diagnostic. La testostérone et les gonadotrophines sont basses. Le reste du bilan anté-hypophysaire est normal.

• L’IRM cérébrale doit être faite de principe, pour éliminer une tumeur hypothalamohypophysaire. Les coupes centrées sur l’hypophyse sont normales. Il existe une hypoplasie des bulbes olfactifs (Fig. 2). • L’âge osseux est à 14 ans et demi. • L’échographie rénale est normale. 9


cas clinique Diagnostic étiologique d’hypogonadisme Cet adolescent présente un hypogonadisme hypogonadotrope diagnostiqué tardivement devant un impubérisme à l’âge de 17 ans. La pilosité pubienne, en rapport avec la sécrétion normale des androgènes surrénaliens, est normale. C’est l’absence d’augmentation du volume testiculaire à cet âge (la puberté débute autour de 13 ans chez les garçons) qui fait poser le diagnostic. La croissance staturale se poursuit régulièrement au rythme prépubère de 5 cm/an, sans accélération, ni ralentissement. Les concentrations basses de gonadotrophines FSH et LH affirment le diagnostic d’hypogonadisme hypogonadotrope, devant lequel il faut, de principe, éliminer un craniopharyngiome par une IRM hypophysaire.

Principales causes d’hypogonadismes hypogonadotropes Les principales causes d’hypogonadismes hypogonadotropes sont résumées dans le tableau 2.

bbLes tumeurs de la région hypothalamo-hypophysaire Elles entraînent le plus souvent des déficits hypophysaires multiples, souvent responsables d’un ralentissement de la vitesse de croissance en cas d’atteinte anté-hypophysaire, et/ou d’un diabète insipide en cas d’atteinte de la post-hypophyse.

bbLes hypogonadismes hypogonadotropes fonctionnels Ils sont le plus souvent associés à un retard statural dans les maladies et pathologies chroniques (diabète déséquilibré, maladie de Crohn, insuffisance rénale…).

bbLes hypogonadismes hypogonadotropes isolés Ils sont ou non associés à une anosmie (syndrome de Kallmann). Des anomalies de nombreux gènes (liés à l’X, autosomiques ou récessifs) impliqués dans la signalisation pubertaire 10

Figure 2 – Courbe de croissance staturo-pondérale.

sont en cause, mais ne permettent aujourd’hui d’expliquer que 30 % de ces maladies.

bbLes hypogonadismes dans le cadre d’un panhypopituitarisme congénital Ils sont souvent diagnostiqués au cours des premiers mois de vie chez le garçon, devant un ictère prolongé, un micropénis, et/ou une cryptorchidie, ou dans la petite enfance, devant un retard statural associé aux signes précédents. Les hypopituitarismes congénitaux sont génétiques, liés à

des défauts de gènes de développement de l’hypophyse. L’IRM hypophysaire retrouve une interruption de tige pituitaire et une post-hypophyse ectopique, une dysplasie septo-optique, une grosse hypophyse, ou est normale.

bbLe retard simple de la puberté Diagnostic d’élimination, il est la première cause de retard pubertaire du garçon. Il est associé un infléchissement de la vitesse de croissance qui peut débuter autour de 8-10 ans. Il existe en général des antécédents faAdolescence & Médecine


Un adolescent de 17 ans impubère

À retenir n Le retard pubertaire du garçon se définit par l’absence d’augmentation de la taille des testicules, après l’âge de 14 ans. Il nécessite toujours des explorations. n Le retard pubertaire simple, très fréquent, reste un diagnostic d’élimination.

miliaux de retards pubertaires. Le bilan biologique est peu contributif (testostérone et gonadotrophines basses). Le retard statural motive le plus souvent la consultation.

Le syndrome de Kallmann est confirmé Notre patient présente une mutation du gène KAL1. Il s’agit d’une maladie du développement neuronal associant un déficit gonadotrope congénital et une anosmie ou une hyposmie. L’anosmie est secondaire à l’hypoplasie ou l’aplasie des bulbes olfactifs visualisable en IRM. Il associe cliniquement une agénésie rénale dans 30 % des cas, et des syncinésies d’imitation dans plus de 50 % des cas. Le gène responsable du syndrome de Kallmann lié à l’X a été localisé, puis identifié grâce à une stratégie de clonage positionnel. Il est localisé au niveau du bras court du chromosome X près de la région pseudo-autosomique en Xp22.3.

Tableau 2 - Principales causes d’hypogonadisme hypogonadotrope. Atteinte du système nerveux central

• Tumeurs : craniopharyngiome, germinome, gliome, • astrocytome, tumeurs hypophysaires, adénome à • prolactine • Autres causes : histyocytose, hémochromatose, sarcoïdose, hypophysite lymphocytaire, antécédent d’irradiation, infections, traumatismes sévères Déficits • Syndrome de Kallmann (avec anosmie ou hyposmie) • par mutation de KAL-1 (anosmine) KAL-2/FGFR1 isolés en gonadotrophines • (récepteur de type 1 du FGF), PROK2 et son récepteur • PROKR2, FGF8, et dans les formes mineures • du syndrome CHARGE • Sans anosmie : mutations de GnRH et de son récepteur GnRHR, de GPR54/KISS1R, de TAC3 et son récepteur TACR3 • Mutations de la sous-unité bêta de LH • Idiopathiques (gènes non encore identifiés) • Hypoplasie congénitale des surrénales (DAX1) Déficits hypophysaires combinés d’origine génétique Pathologies • Syndromes : de Prader-Willi, de Laurence-Moon, diverses • de Bardet Biedl • Mutations de la leptine ou de son récepteur • Déficits fonctionnels en gonadotrophines : maladies systémiques chroniques, dénutrition, mucoviscidose, infection à VIH • Maladies digestives ou rénales chroniques, hypothyroïdie, diabète déséquilibré • Maladie de Cushing, hyperprolactinémie, anorexie mentale • Retards pubertaires induits par l’exercice physique • Toxicomanie

Le diagnostic est porté devant un im-

dotrope normalement présent à cet

pubérisme chez un adolescent, ou,

âge de la vie.

chez un nourrisson devant un micropénis, accompagné souvent d’une cryptorchidie. Il peut être confirmé entre 0 et 4-6 mois de vie par des taux souvent effondrés de gonadotrophines et de testostérone, confirmant l’absence d’activation de l’axe gona-

Mots-clés : Cas clinique, Syndrome de Kallmann, Diagnostic, Retard pubertaire, Hypogonadisme, Garçon

pour en savoir plus • Young J. Hypogonadismes hypogonadotrophiques congénitaux :

• Boyar RM, Wu PHK, Kapen S et al. Clinical and laboratory heterogeneity

développement récents. In : Mises au point cliniques d’endocrinologie,

in idiopathic hypogonadotropic hypogonadism. J Clin Endocrinol Metab

nutrition et métabolisme. Franconville : Editions de Médecine Pratique,

1976 ; 43 : 1268-75.

2005 : 169-87.

• Grumbach MM. A window of opportunity: the diagnosis of gonadotropin

• Nachtigall LB, Boepple PA, Seminara SB et al. Inhibin B secretion in

deficiency in the male infant. J Clin Endocrinol Metab 2005 ; 90 : 3122-7.

males with gonadotropin-releasing hormone (GnRH) deficiency before

• Quinton R, Duke VM, De Zoysa PA et al. The neuroradiology of

and during long-term GnRH replacement: relationship to spontaneous

Kallmann’s syndrome: a genotypic and phenotypic analysis. J Clin

puberty, testicular volume, and prior treatment -a clinical research center

Endocrinol Metab 1996 ; 81 : 3010-7.

study. J Clin Endocrinol Metab 1996 ; 81 : 3520-5.

Adolescence & Médecine

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Gynécologie

A propos de la contraception “Pouvez-vous me prescrire la pilule ?” A 15 ans, 15 % des filles ont eu des rapports sexuels, à 16 ans ce chiffre atteint 30 %, à 17 ans 50 %, et à 19 ans 90 %. Bien informés, près de 9 adolescents sur 10 commencent leur vie sexuelle avec un préserva-

Dr Sophie Gaudu, Gynécologue obstétricienne, responsable de l’Unité fonctionnelle de régulation des naissances, Hôpital Cochin, Paris

tif. Mais si le préservatif est un bon moyen de prévention des infections sexuellement transmissibles (IST), son efficacité contraceptive n’est pas excellente. D’après l’OMS, on observe 14 grossesses pour 100 femmes en un an d’utilisation courante. Il est donc important de savoir répondre à une demande...

« Toute demande de contraception par une adolescente mérite une réponse urgente quand elle est “enfin” formulée. »

Adolescence & Médecine : Quelle attitude adopter face à la demande de prescription d’une pilule contraceptive par une adolescente ? Dr Sophie Gaudu : Toute demande de contraception par une adolescente mérite une réponse urgente quand elle est “enfin” formulée. Globalement, il y a deux cas de figure. Celui de la jeune fille qui fait des imprudences contraceptives, risque une grossesse, et le sait sans toujours être capable de le dire, par crainte d’un jugement péjoratif ; et celui de la jeune fille très réfléchie qui anticipe l’arrêt du préservatif. Dans les deux cas, réussir à exprimer la demande auprès du médecin est déjà presque un exploit. Le moyen de contraception le plus facile à prescrire sera la pilule. C’est cependant une réponse très limitée au regard des autres moyens de contraception disponibles : préservatif, patch ou anneau œstro-progestatif, implant microprogestatif, injection trimestrielle de macro-progestatif, dispositif intra-utérin. Mais, pour les praticiens non gynécologues, la prescription d’une pilule est la plus accessible dans un premier temps. A&M : Comment démarrer une contraception chez une adolescente ? S. G. : L’idéal serait d’anticiper une demande de contraception, ne pas l’attendre. Les jeunes filles que je reçois pour demande d’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) ont quasiment presque toutes rencontré un médecin dans les mois qui ont précédé la grossesse. Le médecin n’a alors pas pensé (pas osé ?) à poser les questions : « où en es-tu de ta vie amoureuse,

Adolescence & Médecine

de ta vie sexuelle ? As-tu besoin d’une contraception ? » Ces questions font partie de l’interrogatoire d’une adolescente au même titre que celles sur sa vie familiale, scolaire, affective, la date de ses dernières règles, la consommation d’alcool, de tabac ou de cannabis, etc. Bien entendu, cet échange nécessite un temps de consultation seul(e) avec la jeune fille. Avoir abordé le sujet en tout début d’adolescence permettrait le temps venu de reprendre cette discussion plus facilement. A&M : Quelles sont les contre-indications à débuter une contraception orale ? S. G. : Dans la population tout venant, l’existence du facteur de risque thrombo-embolique veineux est LA contre-indication absolue à une contraception œstroprogestative. Il est éliminé à l’interrogatoire par la question : « existe-t-il des antécédents, personnels et/ou chez un ascendant du premier degré de moins de 50 ans, de phlébite ? ». Une réponse positive justifie d’attendre les résultats du bilan d’hémostase (Encadré 1) pour autoriser ou non la prescription d’une pilule œstroprogestative, et prescrire en attendant une pilule microprogestative. Dans tous les autres cas, cette prescription ne nécessite aucun bilan préalable. Un bilan métabolique à la recherche de facteurs de risque athéromateux est réalisé après la mise en route de la contraception œstroprogestative. Le tabagisme est à déconseiller mais il ne doit pas être mis en balance avec la contraception orale. Il est en effet incomparablement plus dangereux d’avoir une grossesse non désirée que de prendre la pilule et de fumer. Avant 35 ans et en l’absence 13


Gynécologie ddEncadré 1 Bilan d’hémostase en cas de facteurs de risque thrombo-embolique veineux • NFS, plaquettes • TP, TCA

serait que l’adolescente puisse partir de la consultation avec au moins une plaquette. Les progestatifs de troisième génération augmentent le risque trombo-embolique, il n’y a pas lieu de prescrire ces pilules. Elles sont d’ailleurs presque toutes non remboursées.

• Protéines S et C • Recherche d’une résistance à la protéine C activée • AT3

• Facteur V Leiden

« Il est préférable de commencer la pilule tout de suite afin de bloquer la prochaine ovulation. C’est la technique du Quick Start qui permet de démarrer la pilule n’importe quand dans le cycle. »

d’autres facteurs de risque associés, le tabac n’est pas une contre-indication aux œstroprogestatifs. A&M : Quel examen clinique de base doitêtre réalisé par un médecin non gynécologue ? S. G. : En l’absence de symptôme, un examen gynécologique n’est pas nécessaire pour prescrire une contraception. Mais il est toujours nécessaire à ce stade d’éliminer une grossesse en cours en s’informant sur la date des dernières règles, de la notion de rapports sexuels, du recours à la contraception d’urgence. Un test de grossesse urinaire doit être réalisé au moindre doute. Ces tests sont positifs dès le retard de règles. L’examen clinique peut se résumer à la mesure du poids, de la pression artérielle, et au palper abdominal. En effet, ce dernier permettra, une ou deux fois dans la carrière d’un praticien, de trouver une masse sus-pubienne évocatrice d’une grossesse, et d’orienter la patiente vers une consultation spécialisée. A&M : En l’absence de contre-indications, quelle pilule prescrire en première intention ? S. G. : Une pilule œstroprogestative monophasique avec 20 gamma ou 30 gamma d’éthynilœstradiol associés à un progestatif de 2e génération. L’intérêt de la pilule monophasique est de limiter le risque d’erreur, d’hésitation en cas d’oubli car tous les comprimés sont identiques. Elle coûte environ 2,50 euros la plaquette et est remboursée à 65 % par la Sécurité sociale. Les pilules sont données gratuitement dans tous les plannings familiaux aux mineures. L’idéal

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A&M : A quel moment l’adolescente peutelle commencer sa pilule ? S. G. : Classiquement, il est conseillé de commencer la pilule au premier jour des règles. Mais avec cette recommandation, certaines adolescentes tombent enceintes en attendant leurs règles. La pilule est achetée mais n’a pas pu être prise. Il est donc préférable de la commencer tout de suite afin de bloquer la prochaine ovulation. C’est la technique du Quick Start qui permet de démarrer la pilule n’importe quand dans le cycle. La couverture contraceptive sera effective 7 jours plus tard. Il est nécessaire d’expliquer comment “prendre la pilule”, détailler la conduite à tenir en cas d’oubli. Un calendrier et un document détaillant les conseils de prises sont utiles pour cette première prescription. J’en profite aussi pour discuter de consommation d’alcool, et/ou de cannabis, susceptibles de favoriser les oublis, les vomissements et les rapports non voulus. Je leur propose de noter le nombre d’oublis par mois jusqu’à notre prochain rendez-vous. A&M : Quel est le niveau de contraception théorique et pratique de la pilule ? S. G. : L’indice de Pearl dans les études contrôlées est de 0,1. Cela correspond à un risque de 0,1 grossesse pour 100 femmes qui prennent sans oublier leur pilule pendant 1 an. Mais en pratique, on observe 6 à 8 grossesses par an pour 100 femmes en raison d’oublis ou de vomissements. A&M : Quels sont les messages de prévention à transmettre à cette occasion ? S. G. : Je parle essentiellement de deux choses : du consentement au rapport sexuel et du risque d’infections sexuellement transmissibles. Le préservatif comme moyen de protection du risque d’infections sexuellement transmissibles est une notion acquise chez les adolescents, ils sont presque 9 sur 10 à avoir débuté leur vie sexuelle avec. Mais son usage

Adolescence & Médecine


A propos de la contraception

n’est pas si simple. Les jeunes filles rapportent souvent des incidents au cours de son utilisation (rupture, glissement), des oublis, ou des garçons parfois peu à l’aise avec son utilisation. Elles n’arrivent pas toujours à négocier le préservatif dans leur relation sexuelle. Selon l’âge de la patiente et l’ancienneté de sa vie sexuelle, nous discutons de la vaccination anti-papillomavirus. Je propose également à cette occasion à l’adolescente d’aller, avec son compagnon, faire un dépistage d’IST anonyme et gratuit. A&M : Quel suivi est proposé au décours de la mise en route de cette contraception ? S. G. : Je revois l’adolescente en consultation dans les 6 mois, pour évaluer la tolérance, l’observance et les résultats du bilan biologique prescrit au 3e mois (Encadré 2). En cas de normalité, il sera contrôlé tous les 5 ans selon les recommandations de la HAS. Je discute sur l’horaire de la prise, les oublis, et nous revoyons si la pilule est un bon choix comme moyen de contraception. Après avoir vérifié la normalité du bilan biologique, je la prescris pour un an : « prescription pour 3 mois renouvelable 3 fois, traitement d’un an ». Cela permet d’éviter des interruptions… de contraception malvenues. A&M : Quel est l’intérêt d’orienter une adolescente chez qui on a prescrit une contraception vers un Centre d’Education et de Planification Familial ? S. G. : Il offre expérience et gratuité. Des médecins, des conseillères conjugales, des infirmières formées à l’entretien autour de la sexualité et la question de la contraception y travaillent. C’est un lieu ressource pour les soins et les conseils. Les consultations médicales, les examens biologiques et la délivrance de contraception y sont anonymes et gratuits pour les mineures, et pour celles désirant garder le secret vis-à-vis des ayants droit. A&M : Quelle attitude adopter vis-à-vis de la famille d’une patiente mineure ? S. G. : Il y a 2 cas de figure. Soit l’adolescente ne souhaite pas aborder la question de la contraception avec sa famille, la loi autorise tout médecin à prescrire une contraception sans avoir besoin de l’autorisation d’un des parents. Soit la patiente est accompagnée, le plus souvent par sa mère. Il est alors indispensable d’aménager un

Adolescence & Médecine

ddEncadré 2 Surveillance biologique d’une contraception orale œstroprogestative • Glycémie • Cholestérol • Triglycérides

temps de consultation confidentiel avec l’adolescente, puis si elles le souhaitent un temps de consultation commun, pour expliquer les modalités de la mise en route de cette contraception et sa surveillance au parent accompagnant. A&M : Pour conclure, on a parlé de la pilule comme traitement contraceptif simple pour le praticien non spécialisé. Mais quelles sont les autres alternatives contraceptives pour ces jeunes filles ? S. G. : On peut proposer à une adolescente, comme à n’importe quelle autre femme de choisir sa contraception. Avoir choisi est capital pour l’observance. Comme contraception hormonale on peut leur proposer, outre la pilule œstroprogestative, l’implant contraceptif, qui est un micro-progestatif implantable pour 3 ans remboursé ; le patch et l’anneau intra vaginal, deux formes galéniques particulières d’œstro-progestatifs mais non remboursées par la Sécurité sociale ; et l’injection trimestrielle de médroxi-progestérone, progestatif retard. Et puis, pourquoi ne pas leur parler aussi du dispositif intra-utérin qui n’est plus contre-indiqué chez les nullipares depuis les recommandations de la HAS en 2004 ? Il peut même être proposé aux très jeunes en l’absence d’infection en cours, ou de risque infectieux majeur. A&M : Et la contraception d’urgence ? J’observe régulièrement un détournement de l’usage de la contraception d’urgence. Cette contraception gratuite est volontiers utilisée en cas de rapports sexuels peu fréquents, et il semble plus approprié pour certaines de prendre occasionnellement la pilule du lendemain, plutôt que de prendre chaque jour la pilule. L’appellation de “pilule du lendemain” a probablement induit les patientes en erreur. Répéter les prises de Norlévo® n’est pas dangereux mais l’efficacité contraceptive n’est pas optimale.

« On peut proposer à une adolescente, comme à n’importe quelle autre femme de choisir sa contraception. »

Mots-clés : Contraception orale, Pilule, Prescription, Recommandations, Prévention, Sexualité, IST

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© MacX / Fotolia

on en parle

Par les Drs Jean-Baptiste Bertrand et Hervé Lefèvre, Hôpital Cochin-Port Royal, Paris

Archives of Pediatrics & Adolescent Medicine

Syndrome de fatigue chronique chez l’adolescent : un diagnostic difficile 4 Van Geelen SM, Bakker RJ, Kuis W et al. Adolescent chronic fatigue syndrome : a follow-up study. Arch Pediatr Adolesc Med 2010 ; 164 : 810-4.

L

e Syndrome de Fatigue Chronique (SFC) est un diagnostic clinique évoqué devant une fatigue brutale et invalidante, évoluant depuis plus de 6 mois, non améliorée par le repos, et associée à au moins 4 symptômes parmi “les signes de Fukuda” : • perte de mémoire à court terme ou difficulté de concentration ; • odynophagie ; • adénopathies douloureuses cervicales ou axillaires ; • myalgies ; • arthralgies sans inflammation ; • céphalées, sommeil non réparateur ; • altération de l’état général persistante plus de 24 heures à la suite d’un exercice ou d’un effort. Sa prévalence est estimée dans les études anglo-saxones entre 1,3 % et 4,4 %, son incidence est de 0,5 %, le sex-ratio de 4 filles pour 1 garçon. Les diagnostics différentiels sont nombreux. Son étiologie est inconnue. Le rôle d’agents infectieux (viral ou autres),

d’un dysfonctionnement immunitaire ou d’une anomalie hormonale est souvent discuté. Dans cette étude, les auteurs ont étudié de façon prospective le devenir à 2 ans, et les facteurs de risque évolutifs d’un groupe de 54 adolescents âgés en moyenne de 16 ans atteints de SFC. Ils observent qu’un diagnostic de maladie somatique ou psychiatrique a été fait chez 20 % d’entre eux, et que 50 % des adolescents ont guéri. Cette étude nous apprend qu’à 2 ans, 70 % des cas de SFC ont évolué vers un diagnostic ou favorablement. Il serait intéressant de savoir ce que deviennent les 30 % restants pour améliorer la compréhension de cette entité clinique, souvent transitoire, sans support biologique, dont le retentissement essentiel est l’absentéisme scolaire.

Pediatrics

Quand puberté rime avec risque de passage à l’acte ! 4 Hemphill SA, Kotevski A, Herrenkohlet TI et al. Pubertal stage and the prevalence of violence and social/relational aggression. Pediatrics 2010 ; 126 : 298-305.

U

ne équipe américaine a évalué par auto-questionnaire la relation entre le stade pubertaire et le type de comportement de 4 610 adolescents. Il montre une augmentation par 3 des comportements violents à partir d’un stade de Tanner supérieur ou égal à 3, et ce indépendamment de l’âge, du sexe et du lieu d’habitation. Cette association reste significative quand on l’ajuste à certains facteurs sociaux favorisant les comportements violents (appartenance à un groupe, encadrement familial déficient).

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Cette étude confirme, s’il en était besoin, que la phase d’augmentation des stéroïdes sexuels correspond pour certains adolescents à une période de vulnérabilité pendant laquelle peuvent se produire des passages à l’acte agressifs ou violents. Cependant, ce déroulement pubertaire est contemporain d’autres enjeux pouvant intervenir dans le passage à l’acte (psychoaffectifs, scolaires, sentimentaux et autres...), pas toujours évaluables par autoquestionnaire.

Adolescence & Médecine


on en parle JAMA

Traitement de l’obésité sévère de l’adolescent par anneau gastrique 4 O’Brien PE, Sawyer SM, Laurie C et al. Laparoscopic adjustable gastric banding in severely obese adolescents. JAMA 2010 ; 303 : 519-26.

U

ne étude australienne a comparé les résultats à 2 ans de la prise en charge par anneau gastrique vs mesures hygiéno-diététiques, chez 50 adolescents âgés de 14 à 18 ans ayant un IMC supérieur à 35 kg/m2 (IMC moyen à 41 kg/m2). L’objectif principal de perte de 50 % de l’excès de poids a été atteint par 84 % des patients opérés vs 12 % non opérés, avec une perte de 34,6 kg dans le groupe anneau vs 3 kg dans le groupe hygiéno-diététique. Le syndrome métabolique a disparu chez 100 % des patients opérés. La qualité de vie s’est améliorée dans les 2 groupes, de façon plus importante dans le groupe anneau.

Aucune complication n’est survenue au premier mois post-opératoire. L’anneau a du cependant être reposé chez 28 % des patients en raison d’une dilatation gastrique. Le nombre de publications sur l’efficacité du traitement chirurgical de l’obésité chez des cohortes d’adolescents obèses s’est considérablement accru depuis quelques années. Les premières publications de cohortes d’adolescents obèses opérés en France ne devraient plus tarder pour aider à la prise en charge de nos patients.

Pediatrics

Le risque des boissons énergisantes chez le sujet jeune peut-il brûler les ailes d’une classe de produit en pleine ascension ? 4 Seifert S, Schaechter JL, Hershorin ER et al. Health effects of energy drinks on children, adolescents, and young adults. Pediatrics 2011 ; 127 : 511-8.

L’

enquête sur la consommation de boissons énergisantes a permis à cette équipe d’étudier 121 références internationales dont les 2/3 étaient scientifiques, les autres publiées par les agences gouvernementales ou les médias. Elle montre que la consommation progresse de façon très importante chez les sujets jeunes pour concerner jusqu’à 30 à 50 % d’entre eux aux USA ou en Allemagne. Sa régularité n’est cependant rapportée que chez moins de 5 % d’entre eux. Les garçons sont ceux qui ont le plus souvent essayé et en consomment plus fréquemment (23 % vs 5 %). Quelles sont les substances potentiellement nocives selon le type de consommation,l’âge,etlavulnérabilitédecessujetsjeunes?Onretrouve de la caféine, pouvant atteindre jusqu’à 20 fois la concentration dans un café ; de la guarana, plante connue pour ses fortes concentrations en caféine ; de la taurine, présente dans le système nerveux central

aux propriétés ”neurotransmettrices et protectrices” ; de la L-carnitine intervenant dans le métabolisme des acides gras ; du ginseng ; de la yohimbine aux propriétés stimulantes, érectiles et bienfaisantes ! De nombreuses explications sont données sur les seuils et effets toxiques de ces produits. Ils concernent la fonction cardiaque, la régulation de l’humeur ou du sommeil, les risques métaboliques. Ils peuvent être observés tant chez des sujets à risque (épilepsie, diabète, cardiopathie, troubles de l’humeur et du comportement), qu’en cas de traitement médicamenteux, mais aussi chez le sujet ”sain” selon l’importance de la consommation. Les auteurs concluent non seulement à l’absence d’effet bénéfique de ces boissons énergisantes, mais aussi à l’insuffisance de données sur la toxicité à moyen et longtermes, invitant au moins à la prudence, voire davantage.

JAMA

Dysfonction mitochondriale dans l’autisme : une réelle avancée ou une hypothèse de plus ? 4 Giulivi C, Zhang YF, Omanska-Klusek A et al. Mitochondrial dysfunction in autism. JAMA 2010 ; 304 : 2389-96.

L’

autisme est une maladie d’étiologie inconnue bien que des liens entre génétique et environnement soient admis. Les auteurs ont testé l’hypothèse de l’aggravation des déficits cognitifs des patients par des dysfonctions mitochondriales et métaboliques. Ils ont analysé l’ADN mitochondrial des lymphocytes de 10 patients autistes et l’ont comparé à celui de 10 témoins appariés. Il existait chez les autistes plus d’anomalies fonctionnelles mitochondriales (baisses de l’activité NADH oxydase et de l’activité du complexe I de la chaîne

Adolescence & Médecine

respiratoire, augmentation du taux de pyruvatémie et de la peroxydation mitochondriale) que chez les témoins. Cette étude plaide en faveur d’une association entre certaines manifestations cliniques et certaines anomalies fonctionnelles mitochondriales. Selon la formule consacrée, d’autres études sont nécessaires pour la confirmer et en déterminer le rôle.

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Psychiatrie

Quand orienter un adolescent vers un psy ? Proposition d’une méthode d’évaluation Tout médecin qui s’occupe d’adolescents s’interroge sur la situation psychologique de ses patients. Pour nous aider à plus de discernement, et orienter la prise en charge, cet article propose une méthode d’entretien, systémati-

Dr Bertrand Vachey, Pédopsychiatre, Hôpital Cochin, Paris

sable et simple pour débrouiller une situation problématique (ou jugée comme telle) chez un adolescent. Cet entretien permet de repérer les principaux diagnostics psychiatriques qui motiveront une consultation et/ou un suivi spécialisé. Il dure de 30 à 60 minutes en cas d’entretien ”exhaustif” de la situation. Les informations doivent être notées pour être réutilisées et transmises. Un entretien en 3 parties est proposé : les parents et l’adolescent, puis l’adolescent seul, puis à nouveau ensemble.

Entretien parents et adolescent

bbEléments biographiques actuels

La première partie de l’entretien se déroulera dans la majorité des cas (sauf situation de conflit suraiguë) en présence du (des) parent(s) et de l’adolescent. Il est parfois nécessaire de ne voir qu’un parent à la fois si ceux-ci sont séparés ou divorcés afin d’éviter que le trouble de l’adolescent ne soit utilisé dans le conflit qui les oppose, ou au contraire que la pathologie de leur enfant serve de réunificateur.

Après cette brève introduction sur le motif de consultation, il est plus fin de s’en écarter un moment, pour mieux comprendre l’adolescent et permettre une alliance thérapeutique. Il s’agit à ce moment, paradoxalement, de ne plus parler des problèmes mais de la vie de l’adolescent. On pourra lui demander : • son âge ; • sa classe, s’il a redoublé et, si oui, pour quelles raisons ; • son avis sur l’école (les notes, les amis, les profs, son comportement) ; • ce qu’il souhaite réaliser plus tard. A cette question souvent l’ado dit ne pas savoir mais un peu d’insistance bienveillante sur ce point permettra de voir ceux qui souhaitent s’orienter vers un métier littéraire, artistique, manuel… • chez qui il vit (ses parents, en alternance, en internat, en foyer).

bbHistoire de l’adolescent

On peut alors réaliser un arbre généalogique, complet, décrit par l’adolescent : • mère ;

D’abord demander à comment les parents se trés. Souvent, il l’ignore donc des choses de tion, parfois il le sait et

bbMotif de consultation Demander à l’adolescent de décrire brièvement le motif de consultation. Bien souvent, « il ne sait pas ; c’est mes parents qui veulent ! », mais il est important de lui faire verbaliser quel est, selon lui, le problème. Parfois, le motif sera selon le patient une baisse des résultats scolaires alors que les parents s’inquiètent davantage du comportement de l’adolescent. Une fois ce motif de consultation énoncé par l’adolescent puis les parents, pensez à demander s’il y a déjà eu un suivi “psy” ou s’il y en a un en cours… 18

• père ; • frères et sœurs ; • éventuels beaux-parents, demi-frères et demi-sœurs ; • grands-parents. Pour chacun des membres de la famille demander à l’adolescent d’en dire quelques mots (âge, prénom, métier ou scolarité, ses rapports avec lui, s’il va bien selon lui). Ce procédé permet à l’adolescent, “patient désigné”, de parler des siens et de leurs problèmes éventuels. On peut demander alors s’il existe des antécédents de problèmes psychologiques dans la famille ce qui donne des informations tant sur les facteurs de risque génétique (bipolarité par exemple) que sur les évènements de vie ayant pu toucher l’enfant (dépression de la mère ou du père, alcoolisme…).

l’adolescent sont renconet “apprend” la consultacomme c’est

Adolescence & Médecine


Quand orienter un adolescent vers un psy ?

habituellement un bon souvenir, la famille se détend peu à peu… Demander également pourquoi ils ont divorcé si c’est le cas, ou en tout cas ce que l’adolescent en a compris. A ce stade les parents reprendront davantage la parole. Demander quelques informations sur : • la grossesse, l’accouchement, les premiers jours de vie ; • le développement préscolaire (permettant de repérer les troubles sévères et précoces types “troubles envahissants du développement”) ; • l’entrée en maternelle (une scolarisation difficile avec refus itératifs de se rendre en cours peut être le signe du seul trouble anxieux commençant électivement dans l’enfance : l’anxiété de séparation qui peut parfois évoluer vers une “phobie scolaire”. Demander aux parents comment allait l’enfant à cette époque (s’il dormait bien, n’avait

bbL’entretien “psy” Cet entretien de débrouillage permet de repérer aisément certains troubles.

Contact, discours L’adolescent est-il opposant ou non, cohérent ou non. Un trouble du cours de la pensée et du discours devra faire penser à une entrée dans la schizophrénie ou à une prise de toxique.

Humeur L’adolescent présente-t-il un syndrome dépressif majeur ? Se sent-il : • triste (pleurs fréquents) ; • irritable (« tout le soule… »). L’irritabilité est repérée par les parents mais doit être en rupture avec un comportement antérieur et s’étendre aux autres milieux de vie de l’adolescent (l’école, les amis, les transports…) pour évoquer une dépression et non un conflit

« L’orientation de l’adolescent vers un spécialiste se fera d’autant plus facilement que vous vous êtes déjà mis d’accord avec l’adolescent avant le retour des parents. » pas de maux de ventre…) ; • la scolarité en primaire où l’adolescent peut, s’il s’en souvient, reprendre la parole. Se renseigner sur les apprentissages scolaires plus ou moins difficiles, la socialisation et le comportement à l’école et en dehors. Se renseigner sur une éventuelle énurésie primaire ou secondaire est possible. Les éléments en faveur d’un TDAH (trouble déficit attention et hyperactivité) nécessitent d’avoir accès aux bul-

letins scolaires et commentaires des professeurs concernant le comportement et les facultés de concentration de l’enfant. • Les années de collège et de lycée sont à énumérer les unes après les autres pour voir à quel moment les troubles ont commencé et si un incident n’en est pas à l’origine (divorce, agression à l’école, sentiment d’humiliation en classe, mauvaises rencontres…). Adolescence & Médecine

intrafamilial. • Une baisse des intérêts (voire une anhédonie). Il s’agit alors de lui demander ce qu’il aime ou aimait faire, et de lui faire préciser chacun de ses intérêts, de manière empathique : ses copains, en lui et demandant de citer leur noms permettant de mettre en évidence les adolescents isolés, la musique, la lecture de livres, de bandes dessinées ou de mangas, l’utilisation d’ordinateurs (streaming, Facebook…), la visualisation de films et séries TV, la réalisation de jeux vidéo sur console ou sur ordinateur, seul, ou avec des copains, ou en réseau, d’activités extrascolaires…). Une perte de plaisir pour ces différentes activités est en faveur d’un syndrome dépressif majeur (ou d’une histoire d’amour sur laquelle il vaut mieux questionner l’adolescent sans ses parents…). • Des troubles de la concentration en classe, mais aussi ailleurs comme de-

vant un film ou un livre qui peuvent expliquer une chute des résultats scolaires. • Un trouble de l’appétit (prise ou perte de poids) récent. Un trouble du comportement alimentaire pourra aussi être évoqué avec l’adolescent(e) seul(e) (éventuels vomissements). • Une insomnie (endormissement, cauchemars et/ou réveils précoces) ou une hypersomnie avec asthénie sont évocatrices de troubles anxieux ou de dépression. • Des idées noires (pessimisme ; « la vie, c’est nul » ; idées suicidaires).

Anxiété L’adolescent a-t-il présenté : • Des attaques de panique devant la présence d’épisodes de tachycardie, spasmophilie, sensation d’étouffement, vertiges, nausées et pensées affolantes avec crainte de mort imminente et parfois sentiments de déréalisation et de dépersonnalisation qui sont souvent confondus avec des hallucinations. • Des angoisses diffuses sur, par exemple, la santé de ses proches, les problèmes d’argent, la peur d’être en retard, les accidents qui pourraient survenir… elles sont en faveur d’un trouble anxieux généralisé. • Une anxiété à sortir de chez lui que ce soit pour aller chez des amis ou en cours et qui doit faire rechercher une anxiété de séparation ayant débuté dans l’enfance. • Une peur du regard des autres (en particulier de ses pairs) et de toute situation d’évaluation ou de jugement (oral du bac de Français), c’est-à-dire une anxiété sociale qui peut, comme l’anxiété de séparation être cause de “phobie scolaire”. A noter que l’anxieux social est souvent un grand amateur de jeux vidéo en ligne (World of Warcraft, Call of Duty…) qui lui permettent de se socialiser de manière “secure”. • Des somatisations anxieuses (maux de ventre très fréquents, maux de tête) qui pourraient bénéficier d’une approche corporelle type sophrologie ou relaxation. 19


Psychiatrie • Des troubles obsessionnels compulsifs (TOCs) avec vérification, range-

ment, lavage des mains…

Evènements de vie L’adolescent a-t-il subi une agression, un racket, une déception…

Difficultés d’apprentissage Elles apparaissent dès le début de la scolarité et pourraient bénéficier d’une évaluation spécialisée (test psychométrique, bilan orthophonique…). Des troubles de l’attention et une hyperactivité pourront être évalués si possibles mais restent un diagnostic de spécialiste.

Entretien individuel de l’adolescent La fin de l’entretien psychiatrique se déroulera sans les parents et permettra d’aborder les points suivants. • Les difficultés, comme elles sont perçues par l’adolescent (« c’est ma mère qui est folle ! »). • Les histoires sentimentales, à ne surtout jamais banaliser, le suicide romantique n’est jamais à exclure. • Des prises de toxiques (cigarettes,

cannabis, alcool, ecstasy, cocaïne…) : dépendance ou abus. Les conduites sexuelles “à risque” peuvent être abordées si l’adolescent est en confiance. • Des troubles du comportement (vols, agressions…). • Des passages à l’acte impulsifs auto-agressifs : scarification, prises de médicaments, vomissements. Ces questions ont pour but d’évaluer des conduites à risques à répétition, les antécédents de scarifications, de tentatives de suicide et autres éléments en faveur d’un trouble borderline. Une scarification sévère ou des brûlures de cigarettes doivent amener à se questionner sur un éventuel abus sexuel. Si l’adolescent n’est pas pleinement rassurant au décours de cette évaluation, lui demander s’il accepterait de refaire le point avec un spécialiste. A ce stade, et si l’alliance a été bonne, il est rare qu’il refuse.

Fin d’entretien avec les parents et l’adolescent Il s’agit alors de faire revenir les parents, en présence de l’adolescent si possible (parfois les parents veulent

voir le médecin seul, mais rarement s’ils ont été impliqués durant la première partie de l’entretien). Il est important de leur donner un avis médical (absence de trouble psychiatrique

évident, éléments anxieux, dépressifs, difficultés scolaires, familiales…). Cet avis médical est rassurant et nécessaire. Souvent des parents ont vu leurs enfants suivis des mois, voire des années, sans en connaître la raison… L’orientation de l’adolescent vers un spécialiste (pédopsychiatre, psychologue au CMPP ou à l’hôpital ou en ville) se fera d’autant plus facilement que vous vous êtes déjà mis d’accord avec l’adolescent avant le retour des parents. Un courrier au correspondant, peu fréquent malheureusement en psychiatrie, favorisera la prise de rendez-vous effective.

n

Mots-clés : Entretien, Psychiatrie, Anxiété, Troubles psychologiques, Humeur, Dépression, Idées suicidaires, Vie sociale, Hyperactivité, Déscolarisation

pour en savoir plus • American Psychiatric Association. Diagnostic and statistical manual of

• Mâle P. Psychopathologie de l’adolescence. Collection Quadrige Paris :

mental disorders. 4 ed. Washington DC : American Psychiatric Press, 1994.

PUF, 1999.

• Dumas JE. Psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent. 3e édition

• Marcelli D, Braconnier A. Adolescence et psychopathologie. Paris :

revue et augmentée. Paris : De Boeck, 2007.

Masson, 2008.

th

20

Adolescence & Médecine


Dermatologie

Acné chez l’adolescent Des progrès physiopathologiques aux diagnostics et traitements des différentes formes L’acné est une maladie chronique du follicule pilosébacé évoluant par poussées. Son impact psychologique et social affecte la qualité de vie. Si l’acné est présente chez plus de 85 % des adolescents, elle ne se limite pas à cet âge et peut continuer à l’âge adulte. Il existe des formes légères (80 %

Dr Réda Hadj-Slimane*, Dr Françoise Raynaud** * Université Paris Descartes, Paris ** Maison des adolescents, Maison de Solenn, Paris

des acnés). Les formes modérées et sévères quant à elles représentent 20 % des acnés (1).

Physiopathologie

d’une production accrue de sébum.

bbUn modèle remis en cause

bb... Régulé par le stress…

Du point de vue physiopathologique, l’acné est due à de multiples facteurs. Dans le passé, on pensait que la formation du comédon à partir du follicule pileux précédait la colonisation par Propionibacterium acnes, qui était responsable à son tour de l’inflammation (papules, pustules). Le scénario est actuellement remis en cause (2). L’inflammation infraclinique semble être le primum movens dans la physiopathologie de cette dermatose, avant l’hyperprolifération et les troubles de différenciation des kératinocytes du conduit du follicule pileux. Le Propionibacterium acnes (P. acnes), corynebactérie anaérobie Gram+ saprophyte de la peau, est ainsi l’élément central dans la physiopathologie. Plus récemment, le rôle de l’immunité innée a été largement confirmé dans le développement de l’acné.

Elle exprime des récepteurs aux neuropeptides comme la corticotropin-releasing hormone (CRH), les mélanocortines, les b-endorphines, la vasoactive intestinal polypeptide (VIP), neuropeptide Y et le calcitonin-gene-related-peptide (CGRP). Ces neuropeptides modulent l’activité des sébocytes. Ainsi, la glande sébacée est régulée par le stress, et est un centre de contrôle de l’action des neuropeptides qui agit comme l’axe hypothalamo-hypophysaire. Les sébocytes répondent au stress.

bbLa glande sébacée : un organe endocrine indépendant… La glande sébacée est un organe endocrine indépendant, qui répond aux modifications hormonales. L’hypersensibilité aux récepteurs de la dihydrotestostèrone du follicule pilo-sébacé est responsable 22

bb… Mais également immunocompétent La glande pilo-sébacée est également un organe immunocompétent : les kératinocytes et sébocytes agissent comme des cellules immunocompétentes dans la reconnaissance des agents pathogènes ainsi que des lipides anormaux. Le P. acnes active les kératinocytes et sébocytes via des molécules de l’immunité innée telles que les Toll-like récepteurs 2 et 4, CD14 et CD1d. Ainsi, ces cellules reconnaissent l’altération lipidique du sébum, ce qui induit la sécrétion de cytokines inflammatoires.

De plus, l’oxydation du sébum altère la tension en oxygène dans le follicule ce qui va modifier l’aréophilie et permettre à P. acnes de se développer. Par ailleurs, la glande sébacée va produire sous l’effet des P. acnes des peptides anti-microbiens, comme les défensines de type 2. Les kératinocytes et les sébocytes produisent aussi des métalloprotéinases, ce qui favorise les cicatrices et aggrave l’inflammation. L’hyperkératinisation de l’infundibulum folliculaire et du conduit sébacé va induire la formation du microcomédon, qui peut être en partie due à l’augmentation d’IL-1α et à l’augmentation de la dihydrotestostérone (DHT), ainsi qu’à la prolifération accrue des kératinocytes infondibulaires. Quant à l’afflux des cellules inflammatoires, on ne sait pas s’il précède ou non l’hyperkératinisation (Fig. 1).

etiologie bbL’alimentation Le rôle des sucres à absorption rapide et du lait n’a pas été clairement incriminé. L’insulin-Growth-Factor 1 (IGF-1) aurait été mis en cause. Des études bien conduites permettront de conclure. Adolescence & Médecine


Acné chez l’adolescent

bbLes causes endocriniennes b et non endocriniennes (3) Les maladies endocriniennes accompagnées d’acné Le syndrome des ovaires polykystiques, le syndrome de Cushing, l’hyperplasie congénitale des surrénales, les tumeurs sécrétant des androgènes d’origine ovarienne, testiculaire ou surrénalienne sont les différentes maladies rencontrées à l’adolescence.

Les maladies non endocriniennes avec acné • Le syndrome d’Apert, une acrocéphalosyndactylie de type I, est rare. Autosomique dominant, il est dû à une mutation du récepteur du fibroblast growth facteur. • Le syndrome Synovite Acné Pustulose Hyperostose et Ostéite (SAPHO) est responsable d’ostéomyélite multifocale avec une acné grave soit conglobata ou fulminans, ou un psoriasis palmoplantaire pustuleux. • Le syndrome de Behçet atteint la peau, les articulations, le système nerveux central et le tube digestif. L’acné est papulopustuleuse associée à des arthrites. • Enfin le syndrome PAPA associe le Pyoderma gangrenosum, des arthrites septiques et une acné, et est dû à une mutation de la protéine de liaison du CD2.

La dépression associée Il faut distinguer les caractères dépressifs normaux que sont l’ennui, la morosité, la dévalorisation de soi transitoires, de l’épisode dépressif majeur dont la prévalence est de 5 % à l’adolescence. Les études retrouvent des prévalences variables de dépression et suicide selon les études. Il faudra être prudent et faire la part entre les formes discrètes de dépression et les caractères dépressifs liés à l’adolescence,

que l’acné peut aggraver (4). Une prise en charge globale, multidisciplinaire est alors conseillée lors de Adolescence & Médecine

la prescription d’isotrétinoïne per os à cette période de la vie, où peuvent exister des troubles de l’humeur.

tients ont des cicatrices inflammatoires qui disparaissent.

bbLes types d’acné

L’examen clinique

L’acné polymorphe juvénile bbLes lésions élémentaires

L’acné polymorphe juvénile est de loin la forme la plus fréquente chez l’adolescent. Elle peut être de gravité variable, légère, modérée ou sévère. Elle débute le plus souvent avec la puberté et associe différents types de lésions : macules inflammatoires, comédons ouverts et fermés des papules et des pustules avec séborrhée. Le tout se concentre sur le visage, essentiellement sur le front, le menton et les joues, mais également le dos et le thorax. Ces localisations sont le siège de la séborrhée. L’atteinte du bas du dos et des épaules est un signe de sévérité au même titre que la notion d’antécédents familiaux d’acné.

1. Les comédons sont les points noirs, bouchons cornés qui bouchent le follicule pilo-sébacé. 2. Les microkystes (comédons fermés) sont des élevures de 2-3 mm, blanches, qui correspondent à des follicules dilatés par des débris cellulaires et lipidiques avec une ouverture microscopique à la surface de la peau. 3. Les papules sont de 5 mm de diamètre issues des microkystes, érythémateuses pouvant ou non évoluer vers la pustule. 4. Les pustules sont des papulopustules avec apparition de pus à la partie supérieure. 5. Les nodules mesurent plus de 5 mm de diamètre et souvent atteignent plus d’un follicule. Ils peuvent évoluer vers l’abcèdation. 6. Les cicatrices. La plupart des pa-

Sébum Epiderme Canal folliculaire

L’acné excoriée L’acné excoriée survient dans un contexte psychologique particulier, le plus souvent chez la fille, et sera res-

Inflammation follic Toll-like-R2/4 CD14 CD1d ulaire

Androgènes

Couche cornée

MMP

Sébum

R-CRH CD14 CD1d

Glandes sébacées Follicule pileux normal

Hyperkératose folliculaire

R-DHT Toll-like-R2/4

Acné : Microkystes

Défensines 2 IL-1

Derme MMP P acnés=

Acné : Papules, Pustules

Figure 1 - Physiopathologie de l’acné.

Figure 2 - Acné nodulaire au niveau

Figure 3 - Acné nodulaire de la joue.

de la face postérieure de l’épaule.

On observe les comédons ouverts et

Les différentes lésions élémentaires

fermés, les papulo-pustules, un kyste et

observées sont les comédons ouverts,

les cicatrices inflammatoires.

les papules, les papulo-croûtes, les cicatrices.

23


Dermatologie ponsable de cicatrices voire de complications infectieuses staphylococciques parfois graves.

ddEN PRATIQUE Quel est l’algorithme thérapeutique à adopter ? L’algorithme thérapeutique repose sur l’évaluation de la gravité clinique (8).

L’acné comédonienne, rétentionnelle L’acné comédonienne, rétentionnelle associe la séborrhée, les microkystes à rechercher à jour frisant et les comédons. Les lésions siègent sur le front, le nez, les joues et les oreilles. Cette forme légère est difficile à traiter. Les microkystes peuvent se transformer à tout moment en papulopustules.

L’acné nodulaire ou conglobata L’acné nodulaire ou conglobata (Fig. 2 et 3) est une forme rare mais sévère, où coexistent tous les types de lésions. Les kystes doivent être interprétés comme des comédons secondaires. Les abcès torpiques sont des lésions sans paroi, parfois volumineux. Le nodule inflammatoire signe une acné sévère. La particularité de cette forme clinique est le caractère très chronique, douloureux, suppuratif, responsable de cicatrices

• L’acné de sévérité légère : quand elle est comédonienne, les rétinoïdes locaux sont le premier choix thérapeutique. Quand elle est papulo-pustuleuse, le rétinoïde topique sera associé à un antibactérien. • L’acné de sévérité moyenne : l’acné papulo-pustuleuse et nodulaire est traitée en première intention par un antibiotique oral associé à un rétinoïde local et selon les cas, du peroxyde de benzoyle. • L’acné nodulaire sévère nécessite la mise sous l’isotrétinoïne per os de première intention.

que d’une altération de l’état général. Les nodules inflammatoires nombreux font soudre un pus hémorragique, avec parfois la survenue de nécrose responsable d’ulcération de la peau. La NFS montre une hyperleucocytose à polynucléose.

Les acnés dues à des agents externes • Il s’agit d’acné due à l’occlusion du follicule pileux responsable d’acné rétentionnelle. Elle peut être secondaire à une exposition au chlore (chloracné) qui

Quelques pièges sont à éviter. Les grains de milium sont blanchâtres, à ne

pas confondre avec des comédons. La kératose pilaire sera différenciée des microkystes. La pseudo-folliculite de la barbe est due à des poils incarnés. Pour mémoire, parfois il faut penser aux angiofibromes de la sclérose tubéreuse de Bourneville, aux folliculites à Malassezia furfur, à la sarcoïdose à petits nodules du visage, les tuberculides, les syphilides acnéiformes du visage et le lupus miliaire.

Les traitements

« Traiter tôt une acné sévère minimise b le risque d’apparition de cicatrices » en pont avec des fistules, des galeries cutanées, sans guérison spontanée. La localisation de cette dermatose est le visage, mais également le haut du dos ainsi que les épaules, la nuque mais aussi le bas du dos et les fesses. Elle est fréquente chez l’homme, avec des kystes qui communiquent entre eux, ainsi que des comédons pores multiples, source de cicatrices importantes.

L’acné fulminans L’acné fulminans est également une forme sévère qui est parfois déclenchée par la prise d’isotrétinoïne per os. D’apparition brutale, elle est accompagnée de fièvre à 39°-40°C, de myalgies et de douleurs articulaires, voire d’arthrites aseptiques sacro-iliaques, rachidiennes qui évolueront de façon autonome, ainsi 24

est peut être accidentelle, due à l’utilisation d’hydrocarbures, de cosmétiques contenant des huiles minérales, de corticoïdes responsables de dermite périorale, les rayons ultraviolets. • Certains médicaments sont responsables d’éruption acnéiforme : les corticoïdes sont responsables d’une acné inflammatoire monomorphe siégeant souvent dans le dos ; les autres traitements inducteurs sont les androgènes, les progestatifs de synthèse, les anti-épileptiques, le lithium, la ciclosporine, la vitamine B2, B6, B12, les antituberculeux, les médicaments halogénés mais également les inhibiteurs de l’EGFR.

bbDiagnostic différentiel Le diagnostic est en général évident.

Il faut en premier lieu évaluer la sévérité de l’acné (5). Une échelle a été élaborée par un groupe de dermatologues français avec des photos du visage qui permettent de classer la gravité1. De plus, des experts internationaux ont proposé un consensus sur les stades de gravité de l’acné et leur traitement (6).

bbRègles à suivre Dans tous les cas, il ne faudra pas utiliser un antibiotique seul. Si l’anti-

biotique est administré per os, il sera prescrit pour une durée qui n’excède pas 4 mois pour éviter l’éclosion de résistance de P. acnes.

Il faut vérifier l’absence d’utilisation de progestatif pro-androgénique pour la contraception, vérifier l’utilisation de cosmétiques non comédogènes, et s’enquérir de l’absence de grossesse. En cas de grossesse, seuls les antibiotiques locaux, le peroxyde de benzoyle Disponible à l’adresse suivante : http://www.ncbi. nlm.nih.gov/pubmed/20456560

1

Adolescence & Médecine


Acné chez l’adolescent

sont autorisés. Per os, seul le gluconate de zinc est permis.

zoyle-érythromycine, sulfacétamide sodique-sulfure et trétinoïne-clindamycine.

Enfin, traiter tôt une acné sévère minimise l’apparition de cicatrices.

bbLes traitements systémiques

bbLes traitements locaux

Les antibiotiques

• Les antibiotiques/antimicrobiens sont au nombre de six : l’acide azélaïque, le peroxyde de benzoyle, la clindamycine, la dapsone, l’érythromycine, le sulfacétamide sodique. • Les rétinoïdes locaux sont l’adapalène, la trétinoïne et le tazotène. • Cinq combinaisons existent : adapalène-peroxide de benzoyle, peroxide de benzoyle-clindamycine, peroxide de ben-

La doxycycline à doses non antibiotiques (40 mg/j) est préférée à la tétracycline et à l’érythromycine du fait des résistances. La minocycline a des effets secondaires potentiels de types troubles vestibulaires, hypertension intracrânienne bénigne entre autres.

L’isotrétinoïne L’isotrétinoïne est indiquée dans l’ac-

né sévère et résistante au traitement. La dose initiale est de 0,5 mg/kg/j. Le débat actuel porte sur son implication dans la survenue de troubles psychiatriques type dépression, le lien n’est pas établi (7). Cependant, la prudence et la prise en charge interdisciplinaire permettront de mieux appréhender les signes frustes de dépression, particulièrement chez l’adolescent (4).

Mots-clés : Acné, Dermatologie, Peau, Cicatrices, Rétinoïdes, Alcalinisation, Cosmétiques, Diagnostics, Traitements, Antibiotiques

Références 1. Dréno B. Recent data on epidemiology of acne. Ann Dermatol Venereol

Acad Dermatol Venereol 2011 ; 25 : 43-8.

2010 ; 137 : S49-51.

6. Thiboutot D, Gollnick H, Bettoli V et al. New insights into the

2. Jeremy AH, Holland DB, Roberts SG et al. Inflammatory events are

management of acne: an update from the Global Alliance to Improve

involved in acne lesion initiation. J Invest Dermatol 2003 ; 121 : 20-7.

Outcomes in Acne group. Global alliance to improve outcomes in acne. J

3. Lolis MS, Bowe WP, Shalita AR. Acne and systemic disease. Med Clin

Am Acad Dermatol 2009 ; 60 : S1-50.

North Am 2009 ; 93 : 1161-81.

7. Wolkenstein P. Isotretinoin, depression and medias. Ann Dermatol

4. Féton-Danou N. Psychological impact of acne vulgaris. Ann Dermatol

Venereol 2010 ; 137 : S69-71.

Venereol 2010 ; 137 : S62-5.

8. Dréno B. A therapeutic algorithm in acne: why? Ann Dermatol Venereol

5. Dréno B, Poli F, Pawin H et al. Development and evaluation of a Global

2010 ; 137 : S66-68.

Acne Severity Scale (GEA Scale) suitable for France and Europe. J Eur

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GYNÉCOLOGIE “Pouvez-vous me prescrire la pilule ?” LA REVUE DE LA MÉDECINE POUR LES ADOLESCENTS

P.5

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Histoire et symboliqry ue P.9

Cas clinique Un adolescent de 17 ans impubère Quels sont les diagnostics

à évoquer ?

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Les vaccins de l’adolescent Le rendez-vous manqué ?

Toutes les occasions sont bonnes pour mettre à jour le calendrier vaccinal

Dermatologie Les formes d’acné

Des progrès physiopathologiques aux diagnostics et traitements

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Signature obligatoire e

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prévention

Les vaccins de l’adolescent Le rendez-vous manqué ? De façon constante, les études consacrées à la couverture vaccinale observent une chute de celle-ci à l’adolescence. Plusieurs faits sont avancés pour

Dr Florence Moulin Hôpital Necker, Paris

expliquer ce phénomène, les uns liés à la perception de la vaccination, les autres à cette période spécifique de la vie.

bbUne période pour “se mettre à jour ” Peu malade, l’adolescent consulte peu. Les occasions de mettre à jour le calendrier vaccinal sont donc rares, ce d’autant que l’adolescent a parfois du mal à se soumettre à un acte médical de prévention. Par ailleurs, à l’exception de la vaccination anti-tétanique, les maladies à prévention vaccinale sont souvent assimilées à la petite enfance. Ainsi, si le besoin de protéger les nourrissons par la vaccination est généralement admis, la nécessité de rappels ou de rattrapages

but d’assurer la protection de l’adolescent mais aussi de contribuer à la protection collective. Cette dernière ne se manifeste que lorsqu’un taux suffisant de couverture vaccinale est atteint, taux variant selon la contagiosité de la maladie à prévenir. Ainsi, les autorités de santé ont fixé des objectifs de couverture vaccinale spécifiques pour la période de l’adolescence (2). Selon les différentes vaccinations ces objectifs sont plus ou moins approchés. © Alexander Raths - Fotolia

Spécificité de la période Adolescente

Vaccin contre la Diphtérie-Tétanospoliomyélite et coqueluche

au moment de l’adolescence ne jouit pas de la même perception. Or l’adolescence présente une étape spécifique en termes de protection vaccinale. En effet, au cours de cette

période, il va falloir prolonger l’immunité des vaccins administrés dans la petite enfance (rappels), “rattraper” les sujets non ou incomplètement vaccinés afin d’accroître l’immunité collective comme dans le cas de la rougeole (rattrapage). Il s’agit enfin de protéger l’adolescent juste avant qu’il ne soit exposé à des risques tels que les infections à papillomavirus ou l’hépatite B (vaccins spécifiques). Les tableaux 1 à 4 visent à rappeler le calendrier vaccinal spécifique à l’adolescence, et les différents cas possibles.

bbUn objectif de santé publique Comme à tout âge, la vaccination a pour Adolescence & Médecine

bbLes recommandations Un rappel par un vaccin quadrivalent DTPCa est recommandé à l’âge de 1113 ans (le rappel pour la poliomyélite étant lui obligatoire jusqu’à l’âge de 13 ans). A 16-18 ans, l’adolescent reçoit un rappel par un vaccin combiné tétanique-poliomyélique et diphtérique à concentration réduite (dTP). La justification de cette recommandation est la persistance d’une incidence élevée des cas de coqueluche chez les jeunes nourrissons contaminés par les jeunes adultes et les adolescents. Cette 5e dose de vaccin contre la coqueluche à l’âge de 11-13 ans est inscrite dans le calendrier vaccinal depuis 1998.

bbQuel taux de couverture ? L’objectif de couverture vaccinale des adolescents, permettant d’espérer une réduction significative des cas de co-

queluche chez les jeunes nourrissons, est évalué par le HCSP à 95 %. En pratique, si le taux de couverture vaccinale observé pour le DTP est de l’ordre de 80 à 85 % (3, 4), ce taux chute en ce qui concerne la coqueluche. Ainsi, en 2003-2004 (3), seuls 57,4 % des adolescents avaient reçu une vaccination complète. Plus récemment, si l’enquête menée par les laboratoires GlaxoSmithKline et l’Institut des Mamans (4) met en évidence une progression de la vaccination contre la coqueluche chez les adolescents (73 %), 42 % des sujets reçoivent encore, hors recommandation, une cinquième dose avant l’âge de 11 ans. Généralement, cette dose est administrée lors du rappel DTP de 5-6 ans. 27


prévention Tableau 1 - Vaccinations actuellement recommandées chez un enfant de moins de 11 ans. Conformément aux recommandations du Haut Conseil de Santé Publique (1), à 11 ans, au moment d’entrer dans l’adolescence, un enfant a reçu : • 5 doses de DTP (2-3-4 mois, 18 mois-6 ans) ; • 4 doses de coqueluche acellulaire (2-3-4 mois, 18 mois) ; • 3 doses de vaccin Pneumo13 (2-4 mois, 12 mois) ; • 2 doses de rougeole-oreillons-rubéole (12 mois, 18 mois) ; • 3 doses d’hépatite B (2-4 mois, 18 mois).

Tableau 2 - Vaccinations recommandées chez l’adolescent et l’adulte jeune. POur tous • 1 rappel de diphtérie-tétanos-poliomyélite (DTP) • 1 rappel de coqueluche (Ca) 3 doses de vaccin contre l’HPV pour les filles 1 rappel diphtérie (à dose réduite)-tétanos-poliomyélite (dTP) 1 dose de vaccin anti méningococcique C pour certains • 1 rappel diphtérie-tétanos-poliomyélite (dTP) 16/18 ans • 1 rappel de coqueluche pour les enfants qui n’auraient reçu le rappel à 11-13 ans 11/15 ans Hépatite B : vaccination à compléter ou à effectuer Rougeole-oreillons-rubéole : vaccination à compléter ou à effectuer (2 doses) 11/18 ans 2 doses de vaccin contre la varicelle pour les adolescents n’ayant jamais fait la maladie 12/18 ans 15/23 ans 3 doses de vaccin contre l’HPV pour les jeunes filles au plus tard dans l’année qui suit le début de leur vie sexuelle et non vaccinées à l’âge de 14 ans.

11/13 ans 14 ans 16/18 ans 11/24 ans

Tableau 3 - Vaccinations contre les risques particuliers. Selon le terrain : grippe, Pneumo23, BCG, hépatite A En fonction d’un voyage ou d’un séjour à l’étranger : voir les recommandations aux voyageurs (BEH)

Tableau 4 - Vaccinations obligatoires ou recommandées selon la profession. Pour les adolescents débutant un parcours professionnel dès l’âge de 16 ans, certaines vaccinations, liées au risque professionnel sont de plus obligatoires ou recommandées. Pour ces situations le médecin du travail évalue l’exposition au risque et vaccine ou non l’adolescent en conséquence. Vaccin Professions concernées Obligatoire/recommandée BCG • Professions de santé Obligatoire • Professions médico-sociales Hépatite A • Professions médico-sociales (personnel des établissements et service pour Recommandée l’enfance handicapée, des établissements de garde pour la petite enfance) • Restauration collective • Traitement des eaux usées Hépatite B • Professions de santé Obligatoire • Professions médico-sociales (en cas d’exposition) Tatoueur Recommandée Grippe • Personnel navigant des bateaux de croisière et avion Recommandée • Personnel accompagnant des voyageurs Leptospirose • Traitement des eaux usées Recommandée • Activités spécifiques en eaux douces Rage • Personnel des services vétérinaires Recommandée • Personnel en contact du matériel pouvant être contaminé (garde forestier, taxidermiste)

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Adolescence & Médecine


Les vaccins de l’adolescent

bbEn pratique Pour les enfants qui ont échappé à ce rappel à 11-13 ans, il est recommandé de leur faire un rattrapage par le vaccin quadrivalent dTPCa (diphtérie à dose réduite) à 16-18 ans. De même, pour ceux qui auraient reçu une cinquième dose à 5-6 ans, le rappel coqueluche sera différé à 11-13 ans, et vaccin le dTPca sera proposé à 16-18 ans.

Vaccination contre l’hépatite B bbLes recommandations Pour les enfants non vaccinés au cours de la première année de vie, le rattrapage de la vaccination contre l’hépatite B a été prolongé jusqu’à l’âge de 15 ans révolus. Chez les adolescents de 11-15 ans, non antérieurement vaccinés et en l’absence de risque élevé d’infection pour le virus de l’hépatite B, à la place du schéma classique en trois doses (0-1-6 mois), un

compléter la vaccination contre l’hépatite B au moment de l’adolescence.

Vaccination contre la rougeole, la rubéole et les oreillons (RRO) Pour les adolescents non vaccinés dans l’enfance, deux doses du vaccin trivalent sont recommandées en respectant un intervalle d’au moins un mois entre les deux. Les adolescents ayant reçu une seule dose dans l’enfance devraient recevoir une deuxième dose.

Cette deuxième dose ne constitue pas un rappel, l’immunité acquise étant de longue durée mais un rattrapage pour les sujets qui n’auraient pas séroconverti lors de la première vaccination.

bbQuels sont les objectifs de couverture vaccinale ? Les objectifs de couverture vaccinale pour éliminer la rougeole sont fixés pour la tranche d’âge des 2 ans à 95 %

« La vaccination contre le papillomavirus est la seule recommandée spécifiquement pour l’adolescence »

observé chez les nourrissons de moins d’un an, qui ne peuvent être protégés par la vaccination, une des caractéristiques de la situation épidémique actuelle est l’âge médian des cas qui est de 14 ans. La très grande majorité des cas survient chez des sujets non vaccinés ou incomplètement vaccinés (5).

bbUn vaccin remboursé maintenant à 100 % jusqu’à 17 ans Dans ce contexte, pour encourager le rattrapage des adolescents réceptifs, la CNAM a annoncé le remboursement à 100 % de la vaccination (2 doses) jusqu’à l’âge de 17 ans au lieu de 13 ans auparavant.

Vaccination contre le méningocoque C En 2010, le Haut Conseil de Santé Publique a ajouté la vaccination contre le méningocoque du groupe C aux recommandations vaccinales. La vaccination est recommandée à tous les nourrissons de 12 à 24 mois avec une seule dose de vaccin conjugué. Cependant, afin d’obtenir rapidement une immunité de groupe, garante d’un impact optimal, une extension systématique jusqu’à l’âge de

schéma simplifié de vaccination à deux injections à six mois au moins d’intervalle peut être proposé. Seuls les vaccins Engerix B® 20 µg et Genhevac B® Pasteur 20 µg ayant reçu l’AMM pour cette indication peuvent être utilisés dans ce cas. Pour les adolescents présentant une vaccination incomplète, il suffit de rattraper le nombre de doses manquantes pour qu’ils soient protégés, au moment où ils

deviennent exposés au risque.

bbLe taux de couverture Les objectifs de couverture vaccinale au moment de l’adolescence, permettant d’espérer un contrôle à long terme de l’hépatite B, sont de 75 %. Dans l’enquête de 2009 (4), seuls 44 % des adolescents ont reçu une vaccination complète. Ces chiffres sont comparables à ceux de 2003-2004, démontrant qu’il est encore difficile d’initier ou même de Adolescence & Médecine

des enfants ayant reçu au moins une dose et 80 % ayant reçu deux doses. A l’âge de 6 ans, 90 % des enfants devraient avoir reçu deux doses Il est noté une progression de la couverture vaccinale pour des adolescents (95,2 % ont reçu une dose en 2009), de même qu’une légère augmentation de la couverture pour la deuxième dose (86 % en 2009 vs 65,7 % en 2004). Cependant ces chiffres sont insuffisants pour interrompre la circulation du virus et la survenue de cas. Depuis 2008, la France est confrontée à des foyers épidémiques de rougeole avec plus de 5 000 cas déclarés en deux ans, ce qui la place au second rang des pays européens en termes d’incidence élevée.

bbUn âge médian épidémique b de 14 ans Si le taux d’incidence le plus élevé est

24 ans révolus est recommandée selon le même schéma d’une dose unique.

Vaccination contre le papillomavirus Il s’agit de la seule vaccination recommandée spécifiquement au cours de l’adolescence, au moment ou juste avant l’exposition au risque. Elle est recommandée depuis 2007 à toutes les adolescentes de 14 ans. Un rattrapage est possible entre 15 et 23 ans pour les jeunes filles qui n’auraient pas eu de rapports sexuels ou au plus tard dans l’année suivant le début de l’activité sexuelle. Un vaccin quadrivalent et un vaccin bivalent sont commercialisés. Dans l’état actuel des connaissances, le vaccin quadrivalent est recommandé préférentiellement. Le schéma vaccinal du vaccin quadrivalent comporte trois doses à 0, 2 et 29


prévention 4 mois. Pour le vaccin bivalent, trois injections sont nécessaires à 0, 1 et 6 mois. Les objectifs de couverture vaccinale fixés par le plan de Santé Publique sont de 60 % pour la vaccination complète.

ddEN PRATIQUE Trois vaccins sont recommandés à l’adolescence • 11/13 ans : DTPCa • 14 ans : anti-HPV • 16/18 ans : dTP

Or, si actuellement la moitié des adolescentes ont initié la vaccination, à peine un peu plus du tiers bénéficient d’une vaccination complète et sont donc protégées. Cette différence entre l’initiation et la vaccination complète est observée dans d’autres pays, les taux de couverture les plus élevés sont obtenus en cas de vaccination réalisée en milieu scolaire.

Vaccination contre la varicelle A l’exception des enfants appartenant à des groupes à risques spécifiques (BEH), la vaccination contre la varicelle est réservée aux adolescents de 12 à 18 ans n’ayant pas d’antécédents cliniques de varicelle. Cette recommandation figure dans le calendrier vaccinal depuis 2007. Le contrôle sérologique avant vaccination n’est pas obligatoire dans ce cas. Le schéma vaccinal consiste en deux doses espacées au moins d’un mois. L’enquête Vaccinoscopie (4) regroupe les seules données disponibles sur l’observation de cette recommandation. Ainsi parmi les adolescents réceptifs vis-à-vis de la varicelle, 5 % ont reçu au moins une dose, et à peine 10 % de ceux-ci la deuxième dose. Soit actuellement, seul un adolescent sur 100 sans antécédent de varicelle bénéficie d’une vaccination complète.

Conclusion : une couverture vaccinale de l’adolescent insuffisante L’insuffisance de couverture vaccinale des adolescents et des jeunes adultes trouve son illustration dans l’épidémie actuelle de rougeole. Même si des progrès ont été accomplis au cours des dix dernières années, cette couverture

des pouvoirs publics concernant spécifiquement la période de l’adolescence comme le remboursement à 100 % de la vaccination RRO jusqu’à l’âge de 17 ans ou l’extension du rattrapage de l’hépatite B jusqu’à 15 ans avec un schéma simplifié de 2 doses. En l’absence d’une réflexion sur l’opportunité de vacciner en milieu scolaire, stratégie qui a montré son efficacité dans différents pays, il

« Il est nécessaire de mettre à profit toutes les occasions de consultations en médecine communautaire ou hospitalière pour mettre à jour le calendrier vaccinal. » reste médiocre notamment pour la coqueluche, l’hépatite B et le vaccin rougeole-rubéole-oreillons.

est nécessaire de mettre à profit toutes les occasions de consultations en médecine communautaire ou hospitalière, pour mettre à jour le calendrier vacci-

Plus en détail, si le taux d’initiation des vaccinations est en hausse, persiste le problème des vaccinations incomplètes comme dans le cas du vaccin contre les infections à papillomavirus. Cette particularité rend compte des difficultés de l’adolescent à consulter plusieurs fois de suite pour un acte de prévention. Afin d’améliorer cette situation, différentes mesures ont été prises au niveau

nal.

n

Mots-clés : Vaccination, Diphtérie, Tétanos, Poliomyélite, Rougeole, Oreillons, Rubéole, Coqueluche, Pneumo23, Hépatite B, Varicelle, Calendrier Vaccinal, Epidémiologie, Papillomavirus

Références 1. Le calendrier des vaccinations et les recommandations vaccinales

milieu scolaire, 2001-2004. BEH 2007 ; 6 : 45-52

2010 selon l’avis du Haut conseil de la santé publique. BEH 2010 ; 14-15 :

4. Gaudelus J, Cohen R, Lepetit H et al. Vaccinoscopie : couverture

121-72.

vaccinale chez les adolescents en 2009. Méd Enf 2010 ; 387-91.

2. Principales recommandations et propositions en vue de la prochaine

5. Parent du Châtelet I, Antona D, Freymuth F et al. Spotlight on measles

loi pour une politique de santé publique. Décembre 2009. www.hcsp.fr

2010: Update on the ongoing measles outbreak in France, 2008-2010.

3. Antona D, Fonteneau L, Levy-Bruhl D et al. Couverture vaccinale des

Euro Surveill 2010 ; 15.

enfants et des adolescents en France : résultats des enquêtes menées en

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Adolescence & Médecine


rendez-vous de l’industrie Vaccination Prévention du cancer de l’utérus

Contraception orale Leeloo Gé®, pilule de 1re intention

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e laboratoire GSK a rappelé les recommandations pour prévenir le cancer de l’utérus. Deux stratégies existent : le dépistage par frottis cervico-utérin chez toutes les femmes de 25 à 65 ans et la vaccination anti-HPV des jeunes filles de 14 ans et jeunes femmes de 15 à 23 ans qui n’auraient pas eu de rapports sexuels ou, au plus tard, dans l’année qui suit le début de leur vie sexuelle. Concernant ce dernier point, existe Cervarix®, vaccin indiqué pour la prévention des lésions précancéreuses du col de l’utérus et du cancer du col de l’utérus dus à certains types oncogènes de Papillomavirus humains (HPV). Cette indication est basée sur la démonstration de l’efficacité chez les femmes âgées de 15 à 25 ans vaccinées avec Cervarix® et sur l’immunogénicité du vaccin chez les jeunes filles et les femmes âgées de 10 à 25 ans. Le schéma vaccinal recommandé de Cervarix® comporte 3 doses administrées à 0, 1, 6 mois. Si une flexibilité du schéma de vaccination est nécessaire, la deuxième dose peut être administrée entre 1 et 2,5 mois après la première dose, et la troisième dose entre 5 et 12 mois après la première dose. Cervarix® peut être administré simultanément, mais en des sites d’injection différents, avec : un vaccin combiné de rappel diphtérique (d), tétanique (T) et coquelucheux (acellulaire) avec ou sans valence poliomyélitique inactivée (P) (vaccins dTca, dTca-P) ou un vaccin combiné contre l’hépatite A (vaccin inactivé) et contre l’hépatite B (ADNr) (vaccin hépatite A/hépatite B). Les données recueillies lors des études cliniques et après commercialisation sont en faveur d’une tolérance satisfaisante de Cervarix®, notamment en matière d’absence de risque d’induction ou de révélation de maladie auto-immune. n

Contraception Lancement d’un site d’information pratique sur la pilule

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e laboratoire Théramex a annoncé le lancement d’un site Internet grand public dédié à l’information et à l’accompagnement des jeunes filles qui commencent une contraception orale : www.mapre mierepilule.com. L’objectif de ce site est d’informer et d’orienter les adolescentes qui peuvent se sentir un peu perdues lorsqu’elles souhaitent accéder à la contraception. Www.ma premierepilule.com propose ainsi des informations pratiques sur la pilule, des thématiques liées à la contraception à travers une rubrique « Sexualité » et une rubrique intitulée « Ma consultation gynécologique », où les jeunes filles peuvent trouver le descriptif d’une première consultation chez le gynécologue. Egalement sur le site, le Dr Christian Jamin répond à travers plusieurs vidéos consultables en ligne, aux différentes idées reçues sur la pilule. n

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ilule contraceptive Leeloo Gé® commercialisée par Théramex, laboratoire spécialisé dans la santé de la femme, Leeloo Gé® associe 20 µg d’éthynil oestradiol à un faible dose de lévonorgistrel (100 µg). Leeloo Gé® est une pilule de 1re intention monophasique et remboursée à 65 %. Pilule de 1re intention : Leeloo Gé® associe de l’éthynil et du lévonorgistrel progestatif de référence (2e génération). Les pilules de 2e génération selon l’HAS présenteraient un risque thromboembolique veineux plus faible que les pilules de 3e génération. C’est pourquoi elles doivent être privilégiées en 1re intention. Monophasique : Leeloo Gé® est une pilule monophasique. Dans leur utilisation, les pilules monophasiques sont plus simples, notamment en cas d’oubli d’un comprimé. Cette simplicité d’utilisation a d’ailleurs conduit l’OMS à prendre position pour les pilules monophasiques en 1er choix chez les femmes qui commencent à utiliser un “contraceptif oral”. Remboursement : son prix est de 2,50 € TTC pour la boite de 21 comprimés et de 5,89 € pour la boite de 3 x 21 comprimés. Ce remboursement répond une volonté forte de la HAS de rendre plus accessible aux plus jeunes, une contraception efficace notamment auprès des plus jeunes femmes dans le cadre de leur 1re contraception. Leeloo Gé® permet de retarder ou d’avancer facilement les n règles en modifiant le nombre de jours sans comprimé.

Dermatologie Epiduo®, gel dans le traitement de l’acné vulgaire

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piduo®, gel est indiqué dans le traitement cutané de l’acné vulgaire en présence de comédons, papules et pustules. Issu de la recherche clinique Galderma, Epiduo®, gel est une association fixe d’adapalène (0,1 %) et de péroxyde de benzoyle (2,5 %). L’adapalène est un dérivé de l’acide naphtoïque, chimiquement stable, d’activité type rétinoïde. C’est un modulateur de la différenciation cellulaire et de la kératinisation, et il possède des propriétés antiinflammatoires. Sur le plan du mécanisme d’action, l’adapalène se lie aux récepteurs nucléaires spécifiques de l’acide rétinoïque. Le péroxyde de benzoyle a montré une activité antimicrobienne, en particulier contre P. acnes, qui est anormalement présent dans le follicule pilo-sébacé acnéique. De plus, le peroxyde de benzoyle a démontré une activité exfoliante et kératolytique. Il est aussi sébostatique, agissant contre la production excessive de sébum associée à l’acné. La complémentarité de ces deux molécules permet la potentialisation de leurs effets thérapeutiques et confère à Epiduo®, gel une efficacité à la fois sur les lésions inflammatoires et les lésions rétentionnelles. n

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