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sclérose en plaques
1 Tout au long de la SEP D’avant le diagnostic, jusqu’au décès n Quelle évolution pour les syndromes radiologiquement isolés... Wait and watch ? Critères de SEP de MacDonald 2010 + LCR : une meilleure sensibilité ? Quels sont les facteurs prédictifs du passage de la forme RR à SP ? Quelles sont les causes de décès des patients SEP ?
Syndromes radiologiquement isolés (RIS)
Okuda [1] a présenté les résultats d’une étude rétrospective, regroupant 456 sujets RIS, à partir de 20 banques de données provenant de 5 pays : USA, Espagne, France, Italie, Turquie. Les critères de RIS de 2009 étaient utilisés. La moyenne d’âge de la population était de 37,2 ans, il s’agissait surtout de femmes, caucasiennes. Le symptôme le plus fréquent ayant conduit à la réalisation de l’IRM initiale était des céphalées (40 %). Dans 10 % des cas, on retrouvait une histoire familiale de SEP. La durée de suivi moyenne était de 4,4 ans. 64,7 % des sujets qui avaient eu une ponction lombaire présentaient un LCR anormal. La proportion de patients qui présentaient un premier événement clinique en 5 ans était de 34 %. Quatorze patients ont présenté un début d’emblée progressif. Ils avaient un âge moyen de 43,8 ans, et il s’agissait majoritairement d’hommes, caucasiens. En analyse multivariée, les patients les plus à risque de présenter un événement clinique (aigu ou progressif ) étaient de sexe
* Service de neurologie, Fondation A. de Rothschild, Paris
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Caroline Bensa*
Tableau 1 – Patients remplissant les critères de MacDonald 2010 et MacDonald 2010 + LCR positif à la baseline, à 1 an et à 5 ans. N = 134
MacDonald 2010
MacDonald 2010 et LCR+
Baseline
n = 109 (34,7 %)
122 (38,9)
A 1 an
71 %
76,8 %
A 5 ans
85,3 %
89 %
masculin (HR 1,8), avec des lésions dans la moelle épinière (HR 2,92). Ce risque augmentait avec l’âge.
d’études prospectives de dépistage en population générale.
Ce travail a été commenté par David Miller, de Londres, qui a rappelé que des études neuropathologiques plus anciennes (Gilbert et Sadler, 1983 : Danish MS registry) révélaient déjà : • que les “SEP silencieuses” existaient, avec la même prévalence que les SEP cliniques (1/500 à 1/1 000) ; • que les RIS comprenaient certainement une grande proportion de SEP bénignes ; • et que les critères radiologiques de SEP n’étaient pas spécifiques ; • qu’il fallait garder en tête le potentiel de diagnostic alternatif. Il recommande une approche de type Wait and watch. Il rappelle que cette population permet d’acquérir de nouvelles connaissances sur la pathogénie de la maladie, est une population idéale pour des études de neuroprotection précoce, et il soulève la possibilité
Diagnostic : Intérêt des données du LCR ajoutées aux critères diagnostiques de 2010
Xavier Montalban [2] décrit un travail multicentrique, visant à évaluer l’apport des critères LCR au diagnostic de SEP en utilisant les critères de MacDonald 2010. En effet, dans les critères 2010, l’analyse du LCR ne fait plus partie de ceux utilisés pour affirmer la dissémination dans l’espace, qui est basée sur l’utilisation des critères de Swanton. Rétrospectivement, sur la cohorte de CIS de l’étude BENEFIT, l’utilisation de critères LCR conjointement aux critères de MacDonald 2010, par rapport aux critères radiologiques seuls, permet un gain de sensibilité de +4,1 %, sans perte de spécificité (Tab. 1). Neurologies • Mai 2013 • vol. 16 • numéro 158
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Neurologies • Mai 2013 • vol. 16 • numéro 158
% de patients
32,7 %
0,50 RR RR RR SP AII
0,25
70 %
95 %
0,00 0
20
60
40
80
100
Temps jusqu'à EDSS 4 depuis la baseline (mois) Figure 1 – Progression jusqu’à un EDSS 4 [3]. 1 0,9 0,8 Durée de vie médiane SEP = 80 ans Contrôles = 86 ans
0,7 0,6 0,5 0,4
SEP Contrôles
0,3 0,2 0,1 0 10
30
40
50 Durée de vie (années)
60
70
80
90
Figure 2 – Courbe de survie chez les patients SEP et les contrôles [4].
50 40 30 20 10
er nc
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0
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En moyenne, les patients SEP décèdent 6 ans plus tôt que leur espérance de vie. Les données des certificats de décès ont un intérêt limité. Par exemple, ils mentionnent souvent comme cause finale du décès un arrêt cardio-respiratoire, qui est plutôt la conséquence universelle du décès, ou bien la sclérose en plaques, qui n’est pas la cause directe du décès. Les auteurs [4] ont utilisé les données d’une assurance américaine,
25 %
16,3 %
In
Les Causes de décès dans la SEP
10 %
0,75
Probabilité de survie
Une étude italienne [3] a suivi 597 patients depuis 2005, en IRM 1 Tesla, sur la même machine, selon le même protocole. Trois cent trois d’entre eux ont été réévalués à 9 ans. Les facteurs pronostiques cliniques évalués étaient l’âge de début, la durée de la maladie, l’EDSS, la présence d’un traitement de fond, le TAP, et la forme clinique. Les IRM étaient analysées par une procédure de segmentation automatique, avec mesure des gray matter fraction (GMf ), abnormal white matter fraction (AbWMf ), et cerebro-spinal fluid fraction (CSFf ). Les facteurs prédictifs du passage de la forme RR à SP étaient une baisse de la GMf et le score EDSS à baseline. Les facteurs prédictifs d’une progression de l’EDSS étaient l’augmentation de la CSFf (Fig. 1). En conclusion, l’atrophie de la substance grise et l’EDSS sont les meilleurs prédicteurs de la progression. La charge lésionnelle de la substance blanche n’est pas prédictive.
1,00
Excès de mortalité pour 100 000 personnes/an
Pronostic : valeurs prédictives de paramètres radiologiques couplés à la clinique, sur 9 ans
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Figure 3 – Principales causes de décès chez des patients SEP [4].
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qui regroupe 39 millions d’individus aux USA (Fig. 2 et 3). Ils ont comparé 31 051 patients SEP appariés à 92 511 contrôles, avec des taux de mortalité de 899 et 446 décès/100 000 personnesannées, respectivement. Les causes les plus fréquentes de décès dans la SEP sont :
1. les sepsis ; 2. les infections pulmonaires ; 3. les évènements cardiaques, sans entité diagnostique prédominante. n Correspondance Dr Caroline Bensa Fondation A. de Rothschild
Service de neurologie 25 rue Manin - 75019 Paris E-mail : cbensa@fo-rothschild.fr
Mots-clés : Sclérose en plaques, Syndrome radiologiquement isolé, Critères diagnostiques, LCR, Pronostic, Décès, Survie.
Bibliographie 1. Okuda D et al. Radiologically isolated syndrome (RIS): 5-year risk for an initial clinical event from a multinational cohort. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : PL01.002. 2. Apostolos-Pereira S et al. Clinical course of LETM associated with neuroschistosomiasis. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P03.235.
3. Lavorgna L et al. MRI and Clinical predictors in multiple sclerosis: 9 year follow-Up study. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S10.006. 4. Corwin M et al. Subcategory analysis of causes of death in Patients with multiple sclerosis from a large US insurance database. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S30.007.
• En bref Immunisation et risque de SEP On sait depuis longtemps qu’une infection systémique augmente, dans les semaines qui suivent, le risque de poussée de SEP. Qu’en est-il des vaccins ? J. Correale et M.F. Farez, qui travaillent sur le sujet depuis longtemps, ont publié plusieurs revues et métaanalyses du risque de poussée et du risque de SEP liés aux vaccins [1, 2]. Ils ont étudié les liens connus entre 23 vaccins courants et les risque de SEP : les vaccins contre l’hépatite B, la grippe, le BCG, le vaccin Diphtérie-Tétanos-Polio n’augmentent pas le risque de SEP. Pour les autres, les données sont insuffisamment abondantes pour conclure. Pour le risque de poussées, les vaccins BCG, contre l’hépatite B, la grippe, rougeole-
oreillons-rubéole, polio, typhoïde, n’augmentent pas le risque. Les auteurs ont étudié plus particulièrement le lien entre deux vaccins, celui contre la grippe H1N1 et le vaccin contre la fièvre jaune et le risque de poussées, en étudiant radiologiquement, cliniquement et biologiquement la période entre 2 et 5 semaines après la vaccination. Le résultat est négatif pour le H1N1. Par contre, seuls 7 patients voyageurs ayant fait le vaccin contre la fièvre jaune ont pu être recrutés en 2 ans ; cela est suffisant pour montrer qu’ils ont un risque de poussée 12 fois supérieur aux contrôles. Caroline Bensa (Fondation A. de Rothschild, Paris)
Références : 1. Farez MF, Correale J. Immunizations and risk of multiple sclerosis: systematic review and meta-analysis. J Neurol. 2011 ; 258 :1197-206. 2. Farez M. Effect of immunization on MS relapse activity. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S10.001.
• En bref Obésité et SEP : quelles relations ? L’obésité est un état inflammatoire à bas bruit. Ces dernières années la prévalence de l’obésité infantile et celle de la SEP pédiatrique ont augmenté concomitamment. Cela a conduit les auteurs (californiens) à rechercher un lien entre les deux. Soixante-quinze cas de diagnostics de SEP ou de CIS ont été tirés d’une base de données de maladies inflammatoires pédiatriques, entre 2004 et 2010. Le BMI précédant l’installation des
premiers symptômes était retrouvé, et comparé à celui d’une population-témoin. Il en ressort que les adolescentes obèses (BMI > 25) seraient plus à risque de SEP et de CIS, par rapport à la population témoin du même âge. Cet effet n’apparaît pas pour les garçons, ni avant l’âge de 12 ans. Caroline Bensa (Fondation A de Rothschild, Paris)
Référence : Brara S et al. Childhood obesity and risk of pediatric multiple sclerosis and clinically isolated syndrome. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S10.007
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