spécial AAN - 2e partie
démences
Imagerie des démences L’arrivée des traceurs fluorés de la plaque amyloïde... n L’imagerie fonctionnelle métabolique dans les démences, et en particulier dans la maladie d’Alzheimer (MA), a encore été un sujet d’actualité à l’AAN cette année. En France, l’année 2013 doit être l’année de mise sur le marché pour le premier traceur de la plaque amyloïde fluoré. Les cliniciens spécialistes des démences vont avoir à leur disposition un traceur spécifique du dépôt de plaque amyloïde in vivo.
Florence Le Jeune*
L
e dépôt de plaques amyloïdes est l’une des caractéristiques neuropathologiques de la maladie d’Alzheimer, et la détection in vivo de ces plaques va être réalisable grâce à l’imagerie TEP à la fin de cette année 2013 avec la mise sur le marché de traceurs fluorés. Au cours de sessions dédiées à l’exploration des démences [1], des conférenciers ont pu rapporter des données sur leur expérience et leurs questions quant à l’utilisation de ces traceurs en routine.
Quelques rappels sur les traceurs
Le PIB carboné a été le premier traceur développé et utilisé dans les études comme marqueur in vivo de la plaque amyloïde. Son marquage au carbone (durée de vie de 20 min) empêchant sa commercialisation, des traceurs fluorés (durée de vie de 110 min) ont été synthétisés pour permettre le développement de ce type de traceurs.
*Service de Médecine Nucléaire, Centre E. Marquis, Rennes
200
Figure 1 - Mise en évidence d’un dépôt cortical du traceur de la plaque amyloïde. A : examen considéré comme Aβ+. Absence de fixation corticale du traceur : examen considéré comme Aβ-.
Les principaux sont le florbetaben, le florbetapir et le flutemetamol. Différentes études ont comparé la fixation in vivo du traceur avec celle du référent carboné sans montrer de différence significative pouvant avoir une répercussion sur le plan clinique [2, 3]. Clark et al. ont, de plus, publié deux études montrant des résultats concordants entre la
fixation in vivo du florbetapir et les résultats anatomopathologiques post-mortem [4, 5]. A priori, seule l’analyse binaire des images, en noir et blanc, sera nécessaire pour poser le diagnostic de dépôt de plaques amyloïdes (Fig. 1). L’examen sera classé “amyloïde positif” s’il met en évidence une fixation intense du traceur Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
démences dans une région corticale ou l’existence d’une rétention corticale avec perte de contraste entre substance grise et substance blanche dans deux régions ; il sera classé “amyloïde négatif” en cas de rétention faible du traceur par la substance grise [2]. Une analyse semi-quantitative avec rapport de fixation avec le cervelet, une analyse quantitative par région d’intérêt après normalisation des images dans un repère commun ou utilisation de logiciel de comparaison à des bases de sujets sains fournis par les industriels seront aussi réalisables. Les orateurs ont voulu être particulièrement provocateurs au cours de cette session d’imagerie... Dès sa deuxième diapositive, Rabinovici a décrit les raisons pour lesquelles il ne faut pas réaliser l’imagerie de la plaque - non needed for the diagnosis of AD - car pas de traitement adapté, pas de prise en charge en cas de diagnostic précoce ou dans les formes génétiques, pas d’intérêt pour évaluer la sévérité de la maladie. Dans la suite de sa présentation, il décrit son expérience pour commencer à répondre aux questions qui se posent sur l’utilisation des ces traceurs et apporter des premières réponses.
Et la fixation des sujets cognitivement sains ? Un intérêt pronostique ?
Des études réalisées avec le PIB carboné avaient rapporté une fixation du traceur chez le sujet âgé cognitivement sain dans 20 à 30 % des cas (Oh et al., Neuroimage 2010). Johnson et al. évaluent les performances d’un traceur de la plaque fluoré chez 184 sujets, dont 79 sujets considérés comme cognitivement sains, et rapportent 14 % de fixation anomale du traceur dans ce groupe de sujets ; Villemagne et al. en rapportent 16 % [6]. Un chiffre un peu moins élevé qu’avec le PIB carboné ? A suivre… Plusieurs travaux rapportés lors de cette présentation à l’AAN par Rabinovici ont étudié la correspondance entre la charge amyloïde et le déclin cognitif chez les sujets sains. Les résultats de l’étude de Sperling supportent l’hypothèse que la charge amyloïde est associée à des performances diminuées dans les tests de mémoire épisodique chez les sujets âgés sans pathologie démentielle (50-92 ans). Ces résultats confirment les études préliminaires de Villemagne montrant l’association
spécial AAN - 2e partie fixation du traceur des plaques et rapide détérioration du déclin cognitif [7, 8]. Des études de suivi longitudinal devront être poursuivies pour déterminer si la fixation du traceur des plaques prédit le déclin cognitif [9]. Les études sont concordantes pour décrire que la fixation des traceurs de la plaque augmente avec l’âge. Dans la population MCI récemment diagnostiquée la positivité de la TEP amyloïde peut aussi avoir un intérêt évolutif. Plusieurs études avaient déjà montré l’intérêt de la fixation du PIB carboné dans la population MCI comme marqueur d’une conversion plus rapide, dans les 18 mois à 2 ans que durait le suivi clinique dans ces études (Engler H, Brain 2006). L’étude américaine multicentrique du groupe AV45-AV11 Study Group confirme cette hypothèse avec un marqueur fluoré, en montrant que la positivité de l’imagerie des plaques était associée à un profil clinique détérioré sur les échelles ADAS-Cog et CDR-SB aussi bien chez les sujets sains que chez les MCI récemment diagnostiqués. Chez les MCI, cette TEP+ était aussi associée à un déclin cognitif plus important dans les tests de mémoire. Enfin, ces MCI+ présentaient un taux de conversion
• En bref Café neuroprotecteur et également psychoprotecteur ? Une importante étude épidémiologique conduite par Chen et al. (Rockville, USA) a mesuré la consommation de café, de thé et de boissons sucrées de 263 925 individus âgés suivis depuis 1995-1996, et la survenue d’une dépression chez 11 316 d’entre eux entre 2000 et 2006. Les boissons sucrées sont fortement associées au risque dépressif, tandis que le café diminue signifi-
cativement le risque, que celui-ci soit consommé sans sucre ou avec sucre. Cette protection disparaît lorsque les sujets ajoutent à leur café de l’aspartame. Le risque de ce dernier et la protection de la caféine pourraient avoir de fortes implications en santé publique. Catherine Thomas-Antérion (Lyon)
Référence : Chen H et al. Sweetened-beverages, coffee, and tea in relation to depression among older US adults. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P05.122.
Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
201
spécial AAN - 2e partie
démences
plus grand vers la MA. Les auteurs considèrent cette imagerie comme une aide pour identifier les individus ayant un haut risque de déclin cognitif [10]. Un orateur a en particulier rapporté les résultats préliminaires d’une étude confirmant que la charge amyloïde est associée à des performances cognitives diminuées aussi bien chez les sujets cognitivement sains que chez les patients MA, mais que cette association est modifiée par la réserve cognitive suggérant que celle-ci pourrait protéger contre les altérations cognitives en rapport avec la présence de plaques amyloïdes [11]. L’âge est un facteur de risque de développer une démence. Les études en imagerie sont concordantes pour décrire que la fixation des traceurs de la plaque augmente avec l’âge. Dans leur étude récente, Kawas et al. ont étudié la fixation du traceur de la plaque chez les sujets très âgés (> 90 ans, Study 90+) présentant une discrète altération cognitive sans démence. Il existe une corrélation entre les performances cognitives et la fixation du traceur de la plaque et une association avec un déclin cognitif plus rapide dans les 18 mois de suivi [12]. Le facteur génétique APOE est un facteur de risque potentiel du développement de la maladie d’Alzheimer. Chez 147 sujets inclus comme sujets cognitivement sains, ils montrent que la fixation du traceur des plaques débute en moyenne vers l’âge de 56 ans chez les APOE + et 76 ans chez les APOE-. Chez les MCI-APOE+, la fixation du traceur est équivalente à celle des MA, alors qu’elle est comparable à celle des sujets sains chez les MCI-APOE-. Ces résultats confirment la pathologie hétérogène que représente les MCI sur le plan clinique. Johnson et al. évaluent les per202
Figure 2 - FDG-TEP : suspicion de maladie d’Alzheimer chez une patiente de 48 ans aux antécédents familiaux de MA (chez la mère). Les anomalies de fixation du FDG prédominent dans les régions postérieures de carrefours, les régions frontales sont préservées.
formances d’un traceur des plaques et retrouvent sur une série de 184 sujets (45 MA, 60 MCI et 79 sujets sains), en utilisant l’analyse visuelle binaire de la TEP, un examen + chez 76 % des MA, 38 % des MCI et 14 % des sujets sains. Cette TEP + est associée avec l’âge et le statut de porteur de l’allèle E4 [2]. Rowe montre qu’une fixation anormale du traceur des plaques peut être visualisée 15 ans avant l’installation des troubles démentiels, cet intervalle libre diminue à 10 ans chez les patients APOE+.
Existe-t-il une MA sans fixation du traceur de la plaque ?
16 % des MA sont APOE- et PIB-. Les auteurs exposent deux hypothèses pour expliquer ces résultats : • les patients présentent en fait une autre démence qui mime la MA
(DFT, DCL ou autre cause rare) ; • il existe une diminution de la sensibilité de détection des plaques par le traceur chez les APOE-. Cependant, les auteurs concluent que l’intérêt de cette imagerie sera de déterminer les patients qui bénéficieront d’un traitement antiamyloïde [13].
Et dans les autres démences ?
L’évaluation de la charge amyloïde permet de différencier la MA des autres démences et en particulier de la démence fronto-temporale. Rabinovici [14, 15], dans son intervention, rappelle que ce diagnostic différentiel a des implications pronostiques, d’hérédité, et thérapeutiques (surtout les traitements anti-amyloïde en développement). Cependant, il peut être difficile à poser du fait du recouvrement des tableaux cliniques et des profils neuropsychologiques présentés par ces deux pathologies. Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
démences
spécial AAN - 2e partie que dans la MA, ce qui est confirmé par les résultats des autopsies dans sa série [6].
Et on parle toujours du 18FDG ?
Figure 3 - FDG-TEP : suspicion de démence fronto-temporale chez un patient de 57 ans. Les anomalies de fixation du FDG prédominent dans les régions fronto-temporales bilatérales sans atrophie majeure sur l’IRM.
L’imagerie de la plaque va pouvoir aider à discriminer MA versus DFT puisqu’il n’y a pas de dépôts de plaque dans cette dernière. Il existe cependant quelques faux positifs (c’est-à-dire fixation du traceur de la plaque chez les DFT) encore mal expliqués et nécessitant la poursuite des examens anatomopathologiques : comorbidité MA-DFT ? MA mimant cliniquement la DFT ? Dans le cadre nosologique des aphasies primaires progressives, la forme d’aphasie primaire logopénique montre une fixation Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
diffuse du traceur de la plaque mimant la fixation anormale de la MA et suggérant l’association avec la pathologie Alzheimer. Une fixation anormale est moins systématique dans la forme d’aphasie progressive non-fluente et dans la démence sémantique [16]. Villemagne a également confirmé l’absence de fixation du traceur de la plaque dans la DFT, la maladie de Parkinson, la démence vasculaire. La fixation dans la démence à corps de Lewy peut être anormale mais avec une intensité moindre
Jagust a abordé également le sujet de l’utilisation du FDG dans l’exploration des démences [16]. Sa première diapositive montre deux images de PIB, l’une positive et l’autre négative avec une question : Demented or not Demented? L’examen ne permet pas de répondre à cette question puisque l’imagerie de la plaque montre uniquement le mécanisme physiopathologique du dépôt de plaque. Les anomalies mises en évidence par l’étude du métabolisme glucidique en TEP FDG informent, elles, sur la distribution des lésions cérébrales et reflètent plutôt le phénotype comportemental. Ces informations apportent des arguments supplémentaires, s’ajoutant aux arguments cliniques, neuropsychologiques, de l’imagerie morphologique et de l’étude du LCR, pour le diagnostic positif et différentiel des démences (Fig. 2 et 3). Le FDG est un bon marqueur du fonctionnement cognitif et les altérations de sa fixation sont corrélées avec le déclin cognitif [17]. Après avoir cité les non-indications de l’imagerie des plaques dès le début de son topo, Rabinovici aura détaillé les résultats obtenus avec les traceurs fluorés, marqueurs de la charge amyloïde et abordé les questions auxquelles cette imagerie pourra répondre : en cas de MCI persistant pour évaluer le risque évolutif, en cas de début des troubles chez un sujet jeune d’âge < 65 ans, dans le diagnostic différentiel avec la démence frontotemporale en particulier, pour les développements thérapeutiques 203
spécial AAN - 2e partie (sélection homogène et optimale des patients inclus dans les études, monitoring des traitements et des effets secondaires).
Conclusion
Au cours de ces sessions consacrées aux biomarqueurs de la MA dans la pratique clinique, soutenue par la Société américaine de médecine nucléaire (SMNMI), les orateurs ont débuté de façon provocatrice leurs exposés et certainement avec raison… A quoi va servir cette nouvelle imagerie ? Comme n’importe quelle imagerie, elle devra répondre à une question posée ayant un impact clinique, thérapeutique ou dans la prise en
démences charge du patient et de sa famille. Jagust, en porte-parole des médecins nucléaires, confirme que l’imagerie de la plaque ne répondra pas à la question : Demented or not demented ? Afin de ne pas desservir le développement de ce nouveau traceur, mais aussi de nouveaux, par une utilisation inappropriée, les sociétés savantes, les spécialistes des démences et de l’imagerie devront poursuivre les discussions multidisciplinaires pour en dégager les indications. Rabinovici a proposé quelques hypothèses de réflexion : possible MA, MCI persistant, âge inférieur à 65 ans, début précoce, développements thérapeutiques : sélection homogène et classification optimale des patients inclus
dans les essais thérapeutiques, optimisation du monitoring des traitements anti-amyloïde, évaluation des effets secondaires. n Correspondance Dr Florence Le Jeune Service de Médecine Nucléaire Centre E. Marquis Rue de la Bataille Flandres Dunkerque 35042 Rennes cedex E-mail : f.lejeune@rennes.unicancer.fr
Mots-clés : Démences, Maladie d’Alzheimer, MCI, Déclin cognitif, APOE, Age, Imagerie fonctionnelle, Traceurs, Plaque amyloïde, Flobetapen, Flobetapir, Flutémétamol, 18-FDG
Bibliographie 1. Integrated Neuroscience Session. Alzheimer’s biomarkers in clinical practice. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013. 2. Johnson KA, Sperling RA, Gidicsin CM et al. Florbetapir (F18-AV-45) PET to assess amyloid burden in Alzheimer’s disease dementia, mild cognitive impairment, and normal aging. Alzheimers Dement 2013, Epub ahead of print. 3. Rowe CC, Ellis KA, Rimajova M et al. Amyloid imaging results from the Australian Imaging, Biomarkers and Lifestyle (AIBL) study of aging. Neurobiol Aging 2010 ; 31 : 1275-83. 4. Clark CM, Schneider JA, Bedell BJ et al. Use of florbetapir-PET for imaging beta-amyloid pathology. JAMA 2011 ; 305 : 275-83. 5. Clark CM, Pontecorvo MJ, Beach TG et al. Cerebral PET with florbetapir compared with neuropathology at autopsy for detection of neuritic amyloid-beta plaques: a prospective cohort study. Lancet Neurol 2012 ; 11 : 669-78. 6. Villemagne VL, Ong K, Mulligan RS et al. Amyloid imaging with (18)Fflorbetaben in Alzheimer disease and other dementias. J Nucl Med 2011 ; 52 : 1210-7. 7. Villemagne VL, Pike KE, Darby D et al. Abeta deposits in older non-demented individuals with cognitive decline are indicative of preclinical Alzheimer’s disease. Neuropsychologia 2008 ; 46 : 1688-97. 8. Villemagne VL, Pike KE, Chetelat G et al. Longitudinal assessment of Abeta and cognition in aging and Alzheimer disease. Ann Neurol 2011 ; 69 : 181-92. 9. Sperling RA, Johnson KA, Doraiswamy PM et al. Amyloid deposition detected with florbetapir F 18 ((18)F-AV-45) is related to lower episodic
memory performance in clinically normal older individuals. Neurobiol Aging 2013 ; 34 : 822-831. 10. Doraiswamy PM, Sperling RA, Coleman RE et al. Amyloid-beta assessed by florbetapir F 18 PET and 18-month cognitive decline: a multicenter study. Neurology 2012 ; 79 : 1636-44. 11. Rentz DM, Locascio JJ, Becker JA et al. Cognition, reserve, and amyloid deposition in normal aging. Ann Neurol 2010 ; 67 : 353-64. 12. Kawas CH, Greenia DE, Bullain SS et al. Amyloid imaging and cognitive decline in nondemented oldest-old: The 90+ Study. Alzheimers Dement 2013 ; 9 : 199-203. 13. Fleisher AS, Chen K, Liu X et al. Apolipoprotein E epsilon4 and age effects on florbetapir positron emission tomography in healthy aging and Alzheimer disease. Neurobiol Aging 2013 ; 34 : 1-12. 14. Rabinovici GD, Furst AJ, O’Neil JP et al. 11C-PIB PET imaging in Alzheimer disease and frontotemporal lobar degeneration. Neurology 2007 ; 68 : 1205-12. 15. Rabinovici GD, Jagust WJ, Furst AJ et al. Abeta amyloid and glucose metabolism in three variants of primary progressive aphasia. Ann Neurol 2008 ; 64 : 388-401. 16. Jagust WJ, Bandy D, Chen K et al. The Alzheimer’s Disease Neuroimaging Initiative positron emission tomography core. Alzheimers.Dement 2010 ; 6 : 221-9. 17. Kadir A, Nordberg A. Target-specific PET probes for neurodegenerative disorders related to dementia. J Nucl Med 2010 ; 51 : 1418-30.
• En bref Troubles du comportement lors du sommeil paradoxal (TCSP) et démence Boeve (Rochester, USA) a détaillé les résultats d’une considérable étude anatomoclinique multicentrique de 172 cas de TCSP. Il en ressort qu’il s’agit d’une maladie touchant préférentiellement les hommes (x 5), débutant en moyenne à 62 ans (mais avec des bornes allant de 20 à 93 ans), débouchant sur des troubles cognitifs en moyenne après 7 ans (82,5 % des cas) et des signes parkinsoniens après en moyenne 6 ans. Si on se limite aux malades chez lesquels le TCSP fut diagnostiqué après polysomnographie (n = 82), le diagnostic neuropathologique fut celui d’une synucléinopathie dans 204
l’immense majorité des cas : une démence à corps de Lewy (DCL) chez 59 malades (72 %), une atrophie multisystématisée chez 16 patients (20 %). Ron Postuma (Montréal, Canada) a complété ces données par quelques chiffres. Le diagnsotic de synucléinopathie est de 94 % s’il existe un TCSP clinique, et de 98 %, si le diagnostic est affirmé par une polysomnographie. En cas de démence, il y a 80 fois plus de chances d’avoir une DCL qu’une MA ! Catherine Thomas-Antérion (Lyon)
Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159 Référence : Boeve R, Postuna R. Contemporary clinical issues plenary session. Clinicopathogenic correlations in 172 cases od REM sleep behavior th disorder ± coexisting neurologic disorders. 66 AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013.
spécial AAN - 2e partie
sclérose en plaques
1 Imagerie de la sclérose
en plaques
Pas de révolution ! n Pas de réelle révolution dans les différentes communications relatives à l’imagerie… Devant les limites de l’imagerie conventionnelle et des paramètres pris en considération dans notre pratique quotidienne, la tendance est toujours d’essayer d’identifier de nouveaux marqueurs plus fiables et pertinents pour étudier l’atteinte diffuse du tissu nerveux. Ces marqueurs pourraient permettre d’évaluer de façon plus fiable l’efficacité des futurs traitements…
Faut-il intégrer les mesures d’atrophie cérébrale dans le suivi des patients ?
L’atrophie cérébrale a pour avantage de pouvoir être évaluée à partir d’une IRM conventionnelle. Sa mesure est déjà intégrée dans un certain nombre d’essais cliniques. Une étude brésilienne [1] a suivi 191 patients pendant 5 ans. Près de la moitié de ces patients répondaient à la définition de la “liberté d’activité de la maladie”, c’est-à-dire qu’au cours du suivi, il n’avaient pas présenté d’activité clinique (poussée ou progression du score EDSS) ni d’activité radiologique “focale” (apparition de nouvelles lésions T2 ou prises de contraste par le gadolinium). Les auteurs ont pourtant montré que tous ces patients présentaient un taux d’atrophie (mesurée à la fois globalement et également au niveau du corps calleux) supérieur en comparaison à 23 sujets témoins appariés. Les conclusions suggèrent donc que la mesure d’atrophie devrait également faire partie de la définition du concept de liberté d’activité *Service de Neurologie, CHRU de Nice
206
Mikael Cohen*
de la maladie. A l’heure actuelle, plusieurs techniques de mesure d’atrophie existent et une uniformisation devra néanmoins être envisagée avant que ce type de mesure puisse être utilisée en pratique quotidienne.
L’atteinte de ces noyaux a été mise en évidence dès le stade du premier événement démyélinisant [3] et serait un facteur prédictif du risque de conversion vers une SEP. Il s’agirait également d’un facteur prédictif de l’apparition d’un handicap physique et cognitif [4]. n
L’imagerie de la substance grise
Correspondance Dr Mikaël Cohen Service de Neurologie - CHRU de Nice E-mail : cohen.m@chu-nice.fr
Plusieurs communications étaient consacrées à l’étude de la pathologie de la substance grise. L’équipe de Baltimore [2] s’est intéressée à la complexité des lésions retrouvées au niveau du cortex chez 40 patients présentant une SEP rémittente. Les auteurs ont retrouvé des lésions focales mais également des plages d’hypersignal diffus qu’ils ont nommées “substance grise sale” (en analogie au terme de “substance blanche sale” parfois retrouvée chez certains patients), principalement au niveau du cortex insulaire et temporo-mésial. La présence de lésions de substance grise sale était associée à un score EDSS plus élevé et à une charge lésionnelle corticale plus importante. Les noyaux gris centraux sont également des candidats potentiels.
Bibliographie 1. Figueira F et al. Challenging the “disease free status” concept in MS. Are we dealing with the appropriate parameters? 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.189. 2. Martini V et al. It’s not always black and white: the “dirty grey” shade of multiple sclerosis. 66th AAN Meeting, San Diego, March 1623, 2013 : P06.110. 3. Niccolini F et al. In vivo detection of thalamo-cortical pathology in patients with clinical isolated syndrome. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P06.113. 4. Ceccarelli A et al. Deep gray matter atrophy is associated with DTI-defined white matter tract damage in multiple sclerosis. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : PD06.003.
Mots-clés : Sclérose en plaques, Imagerie, Atrophie cérébrale, Substance grise
Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
sclérose en plaques
spécial AAN - 2e partie
2 Traitements de la SEP Les nouveautés de l’AAN n Le retour d’anciennes molécules et les derniers résultats des études sur les molécules acCaroline Bensa* tuelles ou en développement.
Le retour de l’Imurel ?
Taux annualisé de poussées
Une équipe italienne [1] a montré dans un essai multicentrique, randomisé, en ouvert, de 73 SEP-RR sous un interféron bêta (IFN) et 77 sous azathioprine (AZA), que le taux annualisé de poussée (TAP) est inférieur sous AZA que sous IFN ; l’analyse de non-infériorité montre que l’AZA fait au moins aussi bien que l’interféron sur ce paramètre (Fig. 1). L’efficacité sur les critères IRM est également comparable entre AZA et IFN.
0,7 0,6
P = 0,06
0,5 0,4 0,3
AZA IFN
0,2 0,1
Année 1
Année 2
Années 1 + 2
Figure 1 – Azatioprine (AZA) vs interféron (IFN) : taux annualisé de poussées [1].
Mitoxantrone et cancer colorectal
Dans ce travail allemand [2], 676 patients ont été suivis sur une durée médiane de 8,5 ans après le début du traitement. Le risque de cancer après mitoxanthrone est multiplié par 1,5 par rapport à la population générale. La fréquence des leucémies aiguës myéloïdes était dans la fourchette attendue (0,6 %). Le risque de cancer colorectal était multiplié par 3 (délai médian 6A). Pour les autres cancers le risque n’était pas augmenté. Si ces données sont confirmées le dépistage du cancer colorectal devrait faire partie du suivi systématique post-mitoxantrone.
* Service de neurologie, Fondation A de Rothschild, Paris
Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
BG-12 (diméthylfumarate) Sécurité et tolérance : analyse intégrée des phases II et III, vs placebo
Les données poolées de deux études de phase III, DEFINE et CONFIRM, et d’une étude de phase II ont été présentées [3], soit 1 215 patients SEP-RR dans le bras placebo, 1 196 dans le bras 240 mg deux fois par jour et 1 202 patients ayant reçu 240 mg trois fois par jour. L’incidence des évènements indésirables et des événements indésirables graves est semblable dans les trois groupes. Il n’a pas été observé d’infection opportuniste sous BG-12, ni d’augmentation du risque de cancer. Quatre décès ont été relevés, répartis entre les trois
bras, non liés au traitement. Les évènements indésirables les plus fréquents sous BG-12 étaient les flushes et les troubles gastrointestinaux (diarrhées, nausées, douleurs abdominales), dont la fréquence diminuait après le premier mois. Une lymphopénie modérée apparaissait en moyenne après 6 mois de traitement, sans atteindre le seuil pathologique. Seuls 6 % des patients traités par 240 mg deux fois par jour ont présenté une lymphopénie < 500, réversible. Les perturbations des bilans rénaux et hépatiques ont été observées de façon identique entre les trois groupes.
Evolution temporelle de l’effet du traitement
540 patients de DEFINE et 681 pa207
Natalizumab Le risque de LEMP est-il corrélé à sa concentration plasmatique ?
La concentration plasmatique de natalizumab (Tysabri®) augmente avec le nombre de perfusions, surtout après 33 mois ; cette concentration est liée à la saturation des récepteurs lymphocytaires VLA4, et à la masse corporelle (Fig. 2 et 3). Si le risque de LEMP est corrélé à la concentration plasmatique de natalizumab, les cas de LEMP devraient être plus fréquents chez les patients de poids inférieur. Effectivement, les auteurs [5] observent une incidence supérieure chez les patients de faible poids, expliquant peut-être la différence de prévalence entre l’Europe et les USA (Fig. 4). Ils suggèrent d’espacer les cycles de perfusion à 5 ou 6 semaines afin d’abaisser les concentrations plasmatiques.
Pharmacocinétique et pharmacodynamique du natalizumab, au cours de l’étude RESTORE
Dans ce travail [6] qui a suivi les patients au cours d’une fenêtre thérapeutique de 6 mois, les auteurs ont constaté que la désaturation des récepteurs lymphocytaires à 16 semaines coïncidait avec la reprise de l’activité radiologique. Les patients avec des concentrations plasmatiques plus faibles 208
40
AFFIRM n = 440 SENTINEL n = 259 RMMSC n = 204
35 30 25
Moyenne 6 mois 21,3 23,4
20 AFFIRM SENTINEL
15 10
Moyenne 24 mois 27,9 29,1
% d'augmentation 30 % 24 %
0 3 6 9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 48 51 54 57 60 63 66 Dose mensuelle (cycles de traitement de 28-30 jours)
Figure 2 – Evolution des concentrations plasmatiques de natalizumab [6].
50
Taux plasmatique moyen de natalizumab (µg/ml)
tients de CONFIRM ont été suivis en IRM (S24, S48, S96) [4]. 80 % ont terminé les études. L’effet sur le taux annualisé de poussées apparaît précocement (déjà présent sur la période 0-12 semaines). L’effet radiologique est précoce également (présent sur la période 0-24 semaines).
sclérose en plaques
Taux plasmatique moyen de natalizumab (µg/ml)
spécial AAN - 2e partie
40
p 0,0001
30 20 10
0
70
n = 60
90
n = 33
110 n = 23
130 n=5
> 150 n=3
Masse corporelle (kg)
n = 124 (cycles de 28-30 jours de traitement) Figure 3 – Masse corporelle et concentration plasmatique de natalizumab. Cohorte RMMSC [6].
8,2 % Reste du monde (27)
54,1 % USA (179)
37,6 % UE (125)
% de cas de LEMP prévus
6,3 % Reste du monde (21)
35,3 % USA (117)
58,3 % UE (193)
% de cas de LEMP observés
Figure 4 - Répartition géographique des LEMP sous natalizumab, attendues et observées [6]. Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
sclérose en plaques
CARE MS I
0,3 0,24
0,22 0,2 0,13 0,1 0 Y1
Y2
Y3
Taux annualisé de poussées
Taux annualisé de poussées
0,4
CARE MS II 0,4 0,3
0,28 0,25
0,25
0,2
Neuroprotection avec l’amiloride dans les SEP primaires progressives ?
Le canal ionique ASIC 1 est surrégulé dans la SEP. Son inhibition diminue la perte axonale dans des modèles animaux. Quatorze patients ont été suivis radiologiquement en prétraitement pendant 18 mois et sous traitement pendant 1 an [7]. La progression de l’atrophie (brain cerebral volume) est réduite dans le groupe traité (p = 0,018). Les dommages tissulaires mesurés en tenseur de diffusion sont réduits dans le corps calleux, le faisceau cortico-spinal et le thalamus.
ocrélizumab et SEP-RR
Le suivi à 144 semaines d’une étude de phase II a été présenté [8]. L’ocrélizumab (OCR) est un anticorps monoclonal humanisé anti-CD 20. Les patients, répartis en quatre bras, étaient traités 96 semaines, avec des doses de traitement toutes les 24 semaines. Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
gression du handicap et l’activité IRM. L’incidence des évènements indésirables et évènements indésirables graves est identique entre les trois groupes. Par ailleurs, ont été observés les mêmes effets secondaires qu’avec les IFN classiques.
0,1 0 Y1
Y2
Y3
Figure 5 – Alemtuzumab. Phase d’extension de CARE MS I et CARE MS II.
présentent une désaturation des récepteurs lymphocytaires VLA4 plus rapide.
spécial AAN - 2e partie
Un bras débutait par le placebo, un autre par un interféron, le 3e par OCR 600 mg et le 4e par OCR 1 000 mg. L’efficacité radiologique sur les prises de gadolinium se maintient à 144 semaines. L’efficacité sur le taux annualisé de poussées et la déplétion lymphocytaire se maintiennent. Un patient a présenté un syndrome inflammatoire systémique de sevrage (SIRS). Aucune infection opportuniste n’est apparue. Les phases III dans les formes PP (ORATORIO) et RR (OPERA I et II) sont en cours et les inclusions sont terminées. Les résultats sont attendus pour 2015.
Peg-interféron : étude ADVANCE
La liaison à une molécule de polyéthylène-glycol augmente la demivie et améliore l’immunogénicité de la molécule d’interféron. Dans cette étude [9] en trois bras, le premier recevait le placebo, le second 125 µg de Peg-IFN toutes les 4 semaines et le troisième 125 µg de Peg-IFN toutes les 2 semaines. Les doses ont été instaurées après une titration initiale. Le TAP à 1 an était réduit de 27,5 % sous Peg-IFN/4 sem et 35,6 % sous peg-IFN/2 sem. Les deux doses diminuent la pro-
Alemtuzumab : suivi à 3 ans des patients de CARE-MS I et CARE MS II [10-13]
Les deux études ont été réalisées versus comparateur actif (Rebif®). Dans les études princeps, le TAP est diminué de 55 % dans CARE MS I, et 49 % dans CARE MS II. La progression de l’EDSS contrôlé à 6 mois est réduite de 42 % dans CARE MS II. Au cours de la phase d’extension (Fig. 5 et 6), les patients qui présentaient une activité de la maladie pouvaient recevoir une cure supplémentaire à 48 mois ; cette procédure a concerné 18 % des patients de CARE MS I et 20 % des patients de CARE MS II. L’utilisation d’immunomodulateurs était autorisée, basée sur la décision de l’investigateur. Les patients qui avaient reçu initialement de l’IFN bêta-1a débutaient quant à eux le traitement par alemtuzumab avec deux cures annuelles. Des réactions liées à la perfusion ont été observées, de même type et avec la même fréquence que dans l’étude principale. Il n’est pas apparu de nouvel enjeu de sécurité. Les sorties d’étude ont concerné essentiellement les patients ayant reçu de l’IFN lors de la phase initiale (3,8 % vs 1,8 %). La proportion de patients libres de poussée était de 67 % la 3e année pour les patients de CARE MS I (78 % année 2), et 55 % dans CARE MS II (65 % année 2). La plupart des EDSS sont restés endessous des valeurs prétraitement. Les évènements indésirables ont 209
concerné 81,1 % des patients, les évènements indésirables graves 8,5 %. Les infections ont concerné 50,3 % des patients, les infections graves 1,6 %. Beaucoup d’infections herpétiques (16 %) ont été observées après chaque perfusion, dont la fréquence s’est montrée diminuée sous traitement préventif par aciclovir administré le premier mois. Des dysthyroïdies sont apparues chez 29,9 % des patients sur les 3 années. Leur incidence augmente de façon retardée la troisième année (Fig. 7). Des thrombopénies autoimmunes sont apparues chez 1,3 % des patients. Il y a eu 3 cas de néphropathie autoimmune. En conclusion, l’efficacité est durable, la sécurité est dans la lignée de ce qui était déjà connu. La gestion des effets indésirables devrait donner lieu à un protocole soutenu de monitoring et d’éducation des patients.
Laquinimod
La phase d’extension de l’étude ALLEGRO a été présentée [14], jusqu’à 36 mois. 372 patients étaient dans le bras early start et 368 dans le bras delayed start. En terme d’effet sur le handicap, le traitement est efficace également dans le bras delayed start, mais les courbes restent parallèles, l’écart se maintient au bénéfice des patients qui ont débuté le traitement plus tôt. A noter, des anomalies des transaminases dans 30 % des cas au début du traitement.
Tériflunomide Analyse en sous-groupes de l’étude TOWER
Le tériflunomide a un effet cyto statique sur les lymphocytes B. Dans l’étude TOWER [15], 273 patients étaient sous placebo, leur 210
sclérose en plaques
25
20 Pourcentage de patients
spécial AAN - 2e partie
■ Alemtuzumab 12 mg ■ Alemtuzumab 24 mg ■ Total Alemtuzumab
20,5
15
14,0
13,2 10,7
10
5
19,4
11,1
8,7 6,2
5,7
N à risque Alemtuzumab 12 mg Alemtuzumab 24 mg Total Alemtuzumab
Année 1
Année 2
Année 3
811 161 972
810 159 969
772 157 929
Figure 7 – Incidence des dysthyroïdies sous alemtuzumab.
taux annualisé de poussée (TAP) a été de 0,501 ; 300 patients étaient sous tériflunomide 7 mg, leur TAP a été de 0,389 ; et 258 patients étaient sous tériflunomide 14 mg, leur TAP a été de 0,319. De plus, la dose de 14 mg a réduit le risque de progression du handicap de 15,8 %. Les études de sous-groupes ont montré un effet sur la progression plus marqué chez les hommes et chez les patients qui avaient fait plus de 3 poussées l’année précédente ou plus de 4 les deux années précédentes. L’effet sur le TAP était plus marqué chez les Asiatiques et chez les patients qui n’avaient jamais reçu de traitement de fond.
Réponse immune après vaccin contre la grippe
Une étude [16] s’est intéressée à la réponse immune après vaccin contre la grippe, sous tériflunomide : la réponse biologique est en accord avec les valeurs attendues, comme sous traitement par interféron bêta.
Suivi des taux de leucocytes sous tériflunomide [17]
Les leucocytes baissent de 15 %
en moyenne, dans les 6 premiers mois, pour ensuite rester stables par rapport aux sujets sous placebo, concernant essentiellement les neutrophiles et les lymphocytes, sans atteindre des valeurs pathologiques. Le risque d’infection n’est pas augmenté par rapport au placebo.
Fingolimod : effet sur la progression radiologique de l’atrophie
Le fingolimod diminue la progression de l’atrophie par rapport au traitement par IFN bêta à 1 an dans TRANSFORMS, et par rapport au placebo à 2 ans dans FREEDOMS et FREEDOMS II [18] (Fig. 8). Cet effet apparaît dès le 6e mois, et il est plus marqué chez les patients qui avaient des lésions rehaussées après injection de gadolinium à l’entrée dans l’étude.
Correspondance Dr Caroline Bensa Fondation A de Rothschild Service de neurologie E-mail : cbensa@fo-rothschild.fr Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
sclérose en plaques
Atrophie moyenne vs baseline
Mois 0 0
12
Mois 0 0
6
12
spécial AAN - 2e partie
24
Mois 0 0
-0,2
-0,2
-0,2
-0,4
-0,4
-0,4
-0,6
-0,6
-0,6
-0,8
-0,8
-0,8
-1,0 -1,2
-1,0
TRANSFORMS Fingolimod 1,25 mg (n = 420) Fingolimod 0,5 mg (n = 423) IFN beta-1a IM (n 421)
-1,4
-1,2
6
12
24
-1,0
FREEDOMS Fingolimod 1,25 mg (n = 429) Fingolimod 0,5 mg (n = 425) Placebo IM (n 418)
-1,4
-1,2
FREEDOMS II Fingolimod 1,25 mg (n = 270) Fingolimod 0,5 mg (n = 258) Placebo IM (n = 355)
-1,4
Figure 8 - Fingolimod : évolution de l’atrophie vs IFN bêta à 1 an dans l’étude TRANSFORMS, et vs placebo dans FREEDOMS [19].
Mots-clés : Sclérose en plaques, Azatioprine, Mitoxanthrone, BG-12, Diméthylfumarate, Natalizumab, Amiloride, Ocrélizumab, Peg-interféron, Alemtuzumab, Laquinimod, Tériflunomide, Fingolimod
Bibliographie 1. Massacesi L et al. Direct comparison of azathioprine and beta interferon efficacy in multiple sclerosis. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.200. 2. Buttmann M et al. Cancer incidence in 677 mitoxantrone-treated people with multiple sclerosis: a retrospective German single center cohort study. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.175. 3. Theodore Phillips J et al. Safety and tolerability of BG-12 (dimethyl fumarate) in patients with relapsing-remitting multiple sclerosis: an integrated analysis of phase 2 and 3 placebo-controlled studies. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S30.003. 4. Kappos L et al. Timecourse of treatment effects of BG-12 (dimethyl fumarate) for relapsing-remitting multiple sclerosis. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S41.005. 5. Foley J. Natalizumab related PML: an evolving risk stratification paradigm. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S30.002. 6. Cree B et al. Natalizumab effects during a 6-month dose interruption: relationship of pharmacokinetic (PK), pharmacodynamic (PD), and MRI measurements. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S41.003. 7. Arun T et al. ASIC1 blockade in primary progressive multiple sclerosis: evidence of neuroprotection with amiloride. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S31.002. 8. Hause S et al. Week 144 results of a phase II, randomized, multicenter trial assessing the safety and efficacy of ocrelizumab in patients with relapsing-remitting multiple sclerosis (RRMS). 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S31.001 9. Calabresi P et al. Clinical efficacy and safety of peginterferon beta-1a in relapsing multiple sclerosis: data from the pivotal phase 3 ADVANCE study. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S31.006. 10. Miller T et al. Detection, incidence, and management of thyroid autoimmunity in comparison of alemtuzumab and Rebif® in multiple scle-
Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
rosis (CARE-MS) I and II. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.173. 11. Wray S et al. Comparison of infection risk with alemtuzumab and SC IFNB-1a in patients with multiple sclerosis who experienced disease activity while on prior therapy (CARE-MS II). 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.172. 12. LaGanke C et al. Adverse event profile of alemtuzumab over time in active relapsing-remitting multiple sclerosis patients who experienced disease activity while on pprior therapy (CARE-MS II). 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.174. 13. Fox E et al. Durable Efficacy of alemtuzumab in relapsing-remitting multiple sclerosis patients who participated in the CARE-MS studies: three year follow-up. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S41.001. 14. Comi G et al. Comparison of early and delayed oral laquinimod in patients with relapsing-remitting multiple sclerosis: effects on disability progression at 36 months in the ALLEGRO trial. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S41.004. 15. Moses H et al. Pre-defined subgroups analyses of TOWER, a placebocontrolled phase 3 trial of teriflunomide in patients with relapsing multiple sclerosis. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S41.006. 16. Dahlhaus S et al. Disease course and outcome of 15 monocentrically treated natalizumab-associated progressive multifocal leukoencephalopathy (PML) patients. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.168. 17. Singer B et al. Frequency of infections during treatment with teriflunomide: pooled data from three placebo-controlled teriflunomide studies. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.171. 18. Cohen J et al. Fingolimod-effect on brain atrophy and clinical/MRI correlations in three phase 3 studies, TRANSFORMS, FREEDOMS and FREEDOMS II. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S51.006.
211
spécial AAN - 2e partie
sclérose en plaques
3 Les traitements de la SEP Derniers résultats sur CombiRX, le switch natalizumab-fingolimod, et la fampridine n Si l’extension de CombiRX confirme de meilleurs résultats radiologiques avec la bithérapie IFN-acétate de glatiramère, cela n’est pas le cas sur le plan clinique par rapport à chacune des molécules. Le switch de patients traités par natalizumab vers le fingolimod est un sujet de débat. Des études complémentaires confirment les résultats les études pivots de la fampridine sur les troubles de la marche des patients avec EDSS 4-7.
IFN + acétate de glatiramère : extension de CombiRX
L’étude CombiRX [1, 2] est une étude originale pour plusieurs raisons. D’une part, il s’agit d’un des seuls essais thérapeutiques de phase III réalisés indépendamment de l’industrie pharmaceutique. D’autre part, il vise à combiner deux molécules couramment utilisées dans l’arsenal thérapeutique de la sclérose en plaques : l’interféron bêta-1a intramusculaire et l’acétate de glatiramère. Cette étude a concerné 1 087 patients présentant une sclérose en plaques rémittente ayant un score EDSS ≤ à 5. L’année dernière, les résultats de la phase initiale de l’étude, réalisée sur une durée de 3 ans, avaient révélé une supériorité de la bithérapie sur les critères radiologiques conventionnels (apparition de nouvelles lésions T2 et prises de contraste par le gadolinium), mais aucun bénéfice en terme de fréquence des poussées ou de progression du handicap. Cette année, les résultats de la phase d’extension sur une durée *Service de Neurologie, CHRU de Nice
212
Mikael Cohen*
100
90
1,0 0,8
88,40 % 82,70 %
84,90 % 0,6
80 0,4 70
60
0,2
Bithérapie
Interféron Béta Acétate de glatiramère
0,0
0,20 %
Bithérapie
0,26 %
0,19 %
Interféron Béta Acétate de glatiramère
Figure 1 - Proportion de patients ne pré-
Figure 2 - Taux annualisé de poussées au
sentant pas de lésions rehaussées par le
cours de l’étude. Absence de supériorité
gadolinium. Supériorité de la bithérapie
de la bithérapie par rapport à la mono-
par rapport à l’interféron bêta (p < 0,04)
thérapie la plus efficace de cette étude
et à l’acétate de glatiramère (p < 0,02).
(à noter : le taux annualisé de poussées était significativement plus faible dans
de 7 ans ont été présentés. Cette extension a concerné 687 patients. Sur le plan radiologique, les résultats confirment que les patients traités par bithérapie bénéficient d’un meilleur contrôle des paramètres inflammatoires radiologiques en comparaison aux patients traités par monothérapie (Fig. 1). Paradoxalement, une nouvelle fois, ce gain d’efficacité sur le plan radiologique ne se traduisait pas sur le plan clinique, quel que soit le critère utilisé : le taux annualisé de poussées (Fig. 2), la progression du handicap mesuré par le score EDSS ou l’échelle MSFC,
le groupe acétate de glatiramère vs groupe IFN).
ou l’absence totale d’activité clinique de la maladie. Ces résultats semblent donc écarter la possibilité de proposer aux patients une bithérapie associant ces deux molécules. Ils interrogent également sur les limites de l’utilisation des critères radiologiques conventionnels qui prennent uniquement en compte la composante inflammatoire de la maladie et qui dans cette étude ne sont pas corrélés à l’évolution clinique, y compris sur une longue période de suivi… Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
sclérose en plaques
Le switch entre natalizumab et fingolimod
Depuis la mise sur le marché du fingolimod (en fin d’année 2011 en France), la question de switcher les patients traités par natalizumab vers le fingolimod est un sujet de débat. Il pourrait s’agir d’une stratégie permettant de limiter le risque de LEMP chez les patients cumulant plusieurs facteurs de risque. Le fingolimod peut également être perçu comme un traitement plus confortable et plus simple. Cependant, plusieurs questions doivent être résolues avant de pouvoir proposer des recommandations plus précises sur l’indication et les modalités de réalisation d’un switch : quelle doit être la durée de la fenêtre thérapeutique ? Faut-il avoir recours à un traitement immunomodulateur pendant cette période ? Existe-t-il un risque en terme de tolérance ou de réactivation de la maladie ? Le Club Francophone de la Sclérose en Plaques (CFSEP) a présenté, à l’occasion de ce congrès, les données de la cohorte française de patients ayant switché du natalizumab vers le fingolimod (Etude ENIGM [3]). Près de 200 patients ont été concernés au cours de l’année 2012. Comme attendu, le risque de LEMP était la principale motivation du switch (dans 40 % des cas) (Fig. 3). Environ 30 % des patients ont présenté une réactivation de l’activité clinique de la maladie à l’arrêt du natalizumab, pendant la fenêtre thérapeutique. Ce risque était globalement plus important si la durée de la fenêtre thérapeutique était supérieure à 3 mois, et n’était pas prévenu par l’utilisation d’un traitement immunomodulateur ou de perfusions séquentielles de corticoïdes. Au cours des 6 premiers mois de traitement par fingolimod, 25 % des patients ont présenté au moins une pousNeurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
spécial AAN - 2e partie
70
58 %
60
30 %
50
40 %
40
29 %
30
Autre Echec au natalizumab
20
30 %
19 %
10 0
Risque de LEMP
< 3 mois
Entre 3 et 6 mois
> 6 mois
Figure 3 - Motif principal d’arrêt du
Figure 4 - Switch natalizumab-fingo-
natalizumab dans la cohorte du CFSEP.
limod. Risque de réactivation de la maladie selon la durée de la fenêtre thérapeutique.
50
50
48
40
46
45,10 %
44 42 40
30 20
41,70 %
Placebo
39 %
12 %
10
Fampridine 10 mg x2/j
0
Placebo
Fampridine 10 mg x2/j
Figure 5 - Fampridine : % de patients
Figure 6 - Fampridine : gain moyen en
améliorant leur distance de marche d’au
terme de périmètre de marche (m) après
moins 20 % sur un test de 6 minutes
4 semaines de traitement.
après 4 semaines de traitement.
sée et 3 % ont stoppé précocement le traitement en raison d’un échec thérapeutique. Les résultats soulèvent donc le risque inhérent à ce type de stratégie, et tendent à montrer qu’une fenêtre thérapeutique courte (inférieure à 3 mois) (Fig. 4) semble plus bénéfique, ce qui a également été suggéré par une autre communication française [4].
Le point sur la fampridine
La fampridine a été très récemment mise sur le marché en France pour le traitement symptomatique des troubles de la marche chez les patients atteints de sclérose en plaques ayant un score EDSS compris entre 4 et 7, avec des critères de prescription initiale et de renouvellement très stricts. Les
études pivots ayant abouti à l’autorisation de mise sur le marché étaient toutes basées sur l’amélioration de la vitesse de marche (sur un test de 25 pieds, soit environ 8 mètres) comme critère principal. Plusieurs études complémentaires ont été présentées au cours du congrès. • On retiendra en particulier une étude basée sur l’évaluation du périmètre de marche sur un test de 6 minutes [5]. Cette étude en double aveugle versus placebo, menée sur 450 patients (âge moyen 52 ans, score EDSS moyen à 6), a confirmé l’efficacité de la fampridine pour améliorer la distance de marche en comparaison au placebo (Fig. 5 et 6). • D’autre part, une étude multicentrique nommée ENABLE est en cours chez environ 900 patients, 213
tous traités par fampridine. Le but de cette étude est de comparer les patients répondeurs (définis par une amélioration de la vitesse de marche d’au moins 20 % après 15 jours de traitement) aux patients non-répondeurs. Les résultats intermédiaires de cette étude [6] montrent que les patients répondeurs ressentent une amélioration durable de la qualité de vie mesurée par l’échelle SF-36, notamment sur sa composante physique (Fig. 7). Aucune nouvelle alerte de pharmacovigilance n’a été rapportée au cours de ces deux communications. n Correspondance Dr Mikaël Cohen Service de Neurologie - CHRU de Nice E-mail : mikael.cohen@me.com
Mots-clés : Sclérose en plaques, Interféron, Acétate de glatiramère, Fingolimod, Natalizumab, Switch, LEMP, Fampridine, Marche
sclérose en plaques
5
Score de l’échelle SF-36
spécial AAN - 2e partie
4,6 %
4,2 % Patients non-répondeurs Patients répondeurs
4 3 2 1 0 -1 -2
-0,3 %
-0,9 % Semaine 12
Semaine 24
Figure 7 - Fampridine. Résultats intermédiaires de l’étude ENABLE. Les patients répondeurs présentent une amélioration significative de leur score physique de qualité de vie en comparaison aux patients non-répondeurs.
Rappel concernant la fampridine 1) Contre indication formelle si épilepsie ou si clairance de la créatinine < 80 ml/mn 2) Evaluation de la vitesse de marche par le test des 25 pieds (7 m 62) 3) Prescription initiale pour une durée de 15 jours, renouvelée uniquement si le patient est considéré comme répondeur (amélioration du test des 25 pieds supérieure ou égale à 20 %)
Bibliographie 1. Lublin F et al. Relapse activity in the CombiRx trial: blinded, 7-Year extension results. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S01.002. 2. Wolinsky J et al. MRI outcomes in CombiRx: blinded, 7-Year extension results. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S01.003. 3. De Paz R et al. Fingolimod initiation at the time of return of clinical activity Following natalizumab cessation: short term outcome. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S41.002. 4. Cohen M et al. ENIGM: a French observational study about switching from natalizumab to fingolimod in multiple sclerosis. 66th AAN Meeting,
San Diego, March 16-23, 2013 : P01.208. 5. Applebee A et al. Effects of 5mg and 10mg dalfampridine extended release tablets on 6-minute walk distance in people with multiple sclerosis: a subgroup analysis of a double-blind, placebo-controlled trial. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S01.007. 6. Macdonnell R et al. Change in quality of life outcomes with prolongedrelease fampridine treatment: interim analysis of the ENABLE study. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P03.218.
• En bref Un effet indésirable inattendu sous fampridine Une équipe a signalé 3 cas d’aggravation de névralgie du V, chez des patients traités par dalfampridine depuis moins d’1 mois, névralgies réfractaires aux traitements antalgiques ; et 1 cas d’apparition de névralgie du V, chez un patient traité depuis 18 mois, contrôlée par antalgiques médicamenteux. L’hypothèse est que ce traitement inhibiteur des canaux potassiques, qui
améliore la conduction nerveuse au prix d’une augmentation de la demande métabolique sur des axones en souffrance, pourrait contribuer à créer des lésions définitives. Caroline Bensa (Fondation A. de Rothschild, Paris)
Référence : 5. Birnbaum G et al. Severe worsening of trigeminal neuralgia associated with dalfampridine treatment in patients with multiple sclerosis. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S30.004.
214
Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
spécial AAN - 2e partie
sclérose en plaques
4 SEP et grossesse Des grossesses sous haute surveillance n Les résultats d’études ou registres pour les immunomodulateurs actuels et les nouvelles moléCaroline Bensa* cules sont plutôt rassurants, mais le suivi doit se poursuivre.
tériflunomide
Ce traitement est autorisé aux USA et en Australie depuis 2012. Il est non mutagène in vitro, et n’affecte pas la fertilité des rats. Par contre, il a montré une tératogénicité chez les rats et les lapins. En cas de désir de grossesse sous traitement, il est recommandé d’effectuer une procédure d’élimination rapide, jusqu’à des taux plasmatiques ≤ 0,02 mg/l (11 jours). Le tériflunomide est un métabolite du léflunomide (Arava®), utilisé dans la polyarthrite rhumatoïde depuis 1998. Le registre OTIS des grossesses sous léflunomide (78 grossesses) n’a pas montré de tératogénicité pour ce produit. Sous tériflunomide [1], dans les études princeps et depuis sa commercialisation, 44 grossesses ont été enregistrées. Deux sont en cours, 10 (23 %) ont donné lieu à des fausses couches spontanées (FCS) et 20 à des interruptions de grossesse ; 12 naissances vivantes ont eu lieu. La fréquence des FCS apparaît supérieure à celle de la population générale, à contrôler par un registre prospectif. Les 12 nouveau-nés exposés sont nés en bonne santé, d’un poids moyen de 3 318 g, à terme, sans malformation. La durée d’exposition était de quelques jours à 11 semaines. Il n’a pas non plus été enregistré de
* Service de neurologie, Fondation A. de Rothschild, Paris
216
signal négatif chez les enfants nés d’hommes sous traitement. Ces données sont plutôt rassurantes.
IFN bêta-1a : le registre américain
Entre le 17 mai 1996 et le 31 décembre 2012, 426 300 patients ont été exposés à Avonex®. Les données du US Avonex pregnancy registry data ont été présentées [2]. En l’absence de la possibilité de constituer un groupe contrôle de grossesses de patientes SEP, des experts examinateurs externes ont été recrutés pour évaluer l’existence ou non de malformations. Les nouveau-nés ont été suivis 8 à 12 semaines post-partum. 306 grossesses ont eu pour issues 1 enfant mort-né, 5 IVG, 28 FCS (10,5 %), 272 naissances vivantes, dont 14 (6,3 %) avec des anomalies congénitales. Ces données sont comparables à celles de la population générale, avec la limitation de l’absence de groupe contrôle SEP. Les auteurs prévoient d’utiliser comme base de comparaison les registres d’Europe du Nord.
natalizumab : le registre TPER
L’analyse du registre TPER (Tysabri Pregnancy Exposure Registry) a été présentée [3]. Les bébés étaient suivis 8 à 12 semaines après l’ac-
couchement aux USA, 4 semaines en Europe. Sur 377 grossesses (370 SEP, 7 maladies de Crohn) (Fig. 1), l’issue est connue pour 364, et 356 ont été suivies prospectivement. 9,3 % ont donné lieu à des fausses couches spontanées, ce qui est inférieur au taux de FCS dans la population générale (15 %). Des anomalies congénitales mineures et majeures ont été observées chez 30 enfants dont 3 paires de jumeaux.
BG-12 [4]
Cette molécule n’a pas révélé de tératogénicité fœtale chez l’animal, et n’affecte pas la fertilité des lapins et des rats. Chez l’Homme, 56 grossesses ont été enregistrées au cours des essais thérapeutiques, dont 38 dans les bras sous BG-12. Aucun signal d’alerte n’est apparu concernant l’issue des grossesses, la fréquence des malformations ou des fausses couches spontanées chez les patientes exposées au traitement. Ces données ne sont que préliminaires, et un registre des grossesses chez les patientes exposées sera mis en place en phase IV.
fingolimod : le Gilenya Pregnancy Registry
Le recueil rétrospectif au cours des essais ou dans les études postNeurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
sclérose en plaques
marketing a permis d’enregistrer 63 naissances. Dans cette cohorte le taux d’anomalies congénitales est de 6,3 % (3 % dans la population générale). Cette base comporte trop peu de patientes pour conclure, d’autant plus que le suivi rétrospectif a tendance à surestimer les issues défavorables. Le Gilenya Pregnancy Registry [5] a été mis en place récemment, visant à suivre 500 femmes enceintes exposées au fingolimod peu de temps avant ou pendant le début de la grossesse, et à les suivre prospectivement. Pour l’instant, seulement n 16 ont été enrôlées. Correspondance Dr Caroline BENSA Fondation A. de Rothschild Service de neurologie E-mail : cbensa@fo-rothschild.fr
spécial AAN - 2e partie
Patientes inclues de façon prospective n = 377
Issue de la grossesse inconnue / perdues de vue n = 21
Issue de la grossesse connue n = 364
Enfant vivant n = 316
A terme n = 238
Avortement spontané n = 33
Interruption de grossesse n = 14
Grossesse ectopique ou enfant mort-né n=1
Pré-terme n = 48
Figure 1 – Tysabri Pregnancy Exposure Registry : données jusqu’au 23 novembre 2012.
Mots-clés : Sclérose en plaques, Traitement, Grossesse, Interféron, Tériflunomide, Natalizumab, BG-12, Fingolimod
Bibliographie 1. Jung Henson L et al. Pregnancy outcomes from the teriflunomide clinical development program: retrospective analysis of the Teriflunomide Clinical Trial Database. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S30.005. 2. Tomczyk S et al. Pregnancy outcomes in patients exposed to intramuscular interferon beta-1a (IM IFNβ-1a). 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S30.006. 3. Cristiano L et al. Evaluation of pregnancy outcomes from the TYSABRI®
(Natalizumab) Pregnancy Exposure Registry. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P02.127. 4. Gold R et al. BG-12 (dimethyl fumarate) and pregnancy: preclinical and clinical data from the dlinical development program. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P02.129. 5. Geissbü Hler Y et al. Multinational Gilenya™ (Fingolimod) Pregnancy Exposure Registry: preliminary results. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P02.134.
• En bref Reproduction et risque de SEP Une équipe danoise a rapproché l’augmentation avec le temps du sex ratio F/H des patients atteints de SEP, passé en 40 ans au Danemark de 1,3/1 à 2,2/1, et l’augmentation de l’âge moyen du premier enfant. D’autres travaux avaient montré que le nombre des grossesses et le nombre d’enfants étaient corrélés à l’âge de début de la maladie. L’incidence de la maladie est maximale pour les femmes après 40 ans. Les Danois ont utilisé le registre national de SEP et le registre des naissances, entre 2000 et 2004, comparant 1 403 cas et 55 045 contrôles. L’âge moyen du premier enfant est comparable entre les cas et les contrôles. En
revanche, le nombre d’enfants (0 vs 1 vs >1) apparaît comme un facteur protecteur vis-à-vis de la maladie, essentiellement dans les 5 ans avant le début de la maladie. L’odd ratio est de 0,54 pour les femmes qui ont un enfant dans les 5 ans avant le début de la maladie, et de 0,68 pour celles qui ont plus d’1 enfant. Chez les hommes, on n’observe pas ce lien entre naissance des enfants et âge de début de la maladie. Les auteurs proposent l’hypothèse que l’immunomodulation positive liée à la grossesse persiste jusqu’à 5 ans. Caroline Bensa (Fondation A. de Rothschild, Paris)
Référence : Magyari M et al. Reproduction and the risk of multiple sclerosis. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S10.005
Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
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spécial AAN - 2e partie
Nerfs & MUSCLEs
1 Nerf périphérique, motoneurone
et jonction neuromusculaire Honneur aux Français...
n
La douzaine d’heures de vol a suffi à me faire regretter ma sur-spécialité ! Nerf, jonction
neuromusculaire, corne antérieure… manifestement, la crise s’étend aussi au périphérique ! Il est assez clair que les congrès spécialisés coupent l’herbe sous les pieds des congrès généralistes. Et pourtant, quand on est au bal, il faut danser, même si on n’aime pas la musique jouée. Alors allons-y et picorons le meilleur de cette mauvaise année ! Sans chauvinisme, je le promets, les Français en 2013 nous ont sauvé de l’ennui.
Nerf périphérique Neuropathies à la vincristine… les enfants ne sont pas des adultes “modèle réduit” !
L’équipe de Nantes a été mise en lumière, pour ne pas dire “highlightée”, avec un poster exposé deux fois et discuté. Pouclet-Courtemanche et al. [1] ont rapporté rétrospectivement, entre 2009 et 2012, 17 enfants âgés de 1 à 17 ans et ayant présenté une neuropathie périphérique à la vincristine. Alors que le profil attendu est une neuropathie axonale longueur-dépendante, les auteurs ont retrouvé 76,5 % d’atteinte motrice, 11,8 % d’atteinte de nerfs crâniens et 64,7 % de dysautonomie. Dans presque un quart des cas, la marche a été un moment impossible. A l’électroneuromyogramme (ENMG), le profil était toujours axonal, mais la distribution des anomalies était souvent non-lon-
*Service de Neurologie, CHU de Saint-Etienne
218
gueur-dépendante (52,9 %). Dans 4 cas (23,5 %), il s’agissait d’une atteinte multitronculaire. Toutes ces données, et notamment chez les sujets les plus jeunes, s’écartent des connaissances sur les neuropathies à la vincristine de l’adulte et doivent être connues pour un diagnostic et une prise en charge thérapeutique rapides et adaptés.
Neuropathie amyloïde familiale… les neurologues deviennent thérapeutes ?
Nous connaissons tous la gravité des neuropathies amyloïdes familiales. La possibilité d’un traitement par méglumine Vyndaqel® (tafamidis) représente une grande source d’espoir pour les patients. A quelques jours de la présentation d’un essai contrôlé lors d’un colloque dédié, Sekijima et al. [2] de Matsumoto, Japon, ont rapporté 18 patients traités en ouvert par 500 mg par jour de diflusinal dans des formes de la maladie à début tardif. La comparaison était réalisée avec un groupe contrôle histo-
Jean-Philippe Camdessanché*
rique. Les patients ont été traités 35 ± 2,4 mois. Ce stabilisateur de la TTR a permis d’augmenter le taux de TTR plasmatique (p = 0,001). Concernant l’amplitude du potentiel global d’action de nerf ulnaire, elle diminuait au cours de l’étude de 6,6 % sous diflusinal versus 30,5 % dans le groupe contrôle (p = 0,0003). Dans le même ordre d’idées, le nombre de nerfs tibiaux non stimulables à la fin de l’étude était de 33,3 % sous diflusinal versus 100 % sous placebo (p = 0,002). Ces résultats sont de bon augure. Il faudra ceux de l’étude randomisée pour conclure. Il est important de noter que le diflusinal est aussi peu cher et que la méglumine est coûteuse.
Neuropathies amyloïdes familiales en France… de plus haut, on voit mieux !
• Adams et al. [3] (Paris) ont rapporté l’expérience du centre référent 5 ans après sa création. Son travail met en exergue que, finalement, seulement un quart des patients correspond au profil Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
Nerfs & MUSCLEs
spécial AAN - 2e partie
portugais, avec une neuropathie sensitive de distribution longueur-dépendante et une dysautonomie au premier plan. Les autres patients ont des formes cliniquement beaucoup plus trompeuses avec une présentation multifocale, sensitivomotrice d’emblée, à prédominance motrice ou ataxiante. Il a montré aussi que la mutation Met30TTR n’était retrouvée que dans deux tiers des cas.
différents (p = 0,04), en défaveur des patients douloureux. L’épreuve durant 12h au total, l’aire sous la courbe représentée par la glycémie des patients douloureux durant les 5 premières heures était significativement supérieure. Cette étude, comme d’autres plus anciennes, incite à une grande vigilance quant à la possibilité d’avènement d’un diabète en cas de neuropathie débutante et/ou de douleurs neuropathiques.
l’hypothèse que certaines neuronopathies concernant les petites fibres pourraient avoir un substratum inflammatoire. Il va falloir maintenant rechercher des biomarqueurs et réfléchir à la thérapeutique.
• Théaudin et al. [4] (Paris) ont illustré cela en présentant 28 des 119 patients inclus dans le centre entre 2008 et 2012 et qui avaient une présentation multifocale avec un début aux membres supérieurs. Il s’agissait d’hommes surtout (82,1 %), d’âge moyen 62,6 ans (4184), avec un délai diagnostique moyen de 4 ans (1-21,7). La mutation Met30TTR n’était présente que dans 42,9 % des cas. Le début était sensitif chez 89,3 %, sans distribution tronculaire. La dysautonomie et les troubles sensitifs aux membres inférieurs commençaient 18 et 31 mois plus tard, respectivement. Les auteurs discutent un mécanisme vasculaire pour ces troubles, du fait de la mise en évidence de dépôts amyloïdes près des vaisseaux épineuraux, pouvant conduire à une occlusion de leur lumière.
Neuronopathie des petites fibres… du concept aux preuves ?
Le diagnostic de PIDC repose sur des données cliniques, neurophysiologiques et le cas échéant anatomopathologiques. Si la physiopathologie est inflammatoire autoimmune, le mécanisme concret de la maladie reste mal connu et nous ne disposons toujours pas d’un biomarqueur biologique. Illa et al. (Barcelone, Espagne) ont publié tout récemment dans Annals of Neurology un travail identifiant la contactin-1 comme étant la cible d’anticorps chez des patients PIDC. Ce travail a été l’objet d’un poster à l’AAN [7]. La contactin-1 est une protéine paranodale associée à CASPR1. Dans un série de 46 patients, 2 avaient des anticorps anti-contactin-1 et un autre en plus des anticorps anti-CASPR2. Dans les trois cas, le pattern électroclinique était identique, avec des tableaux d’installation rapide, un déficit moteur important et une atteinte axonale. Ce travail marque une étape importante dans la compréhension de la physiopathologie de la PIDC au moins pour un sous-groupe de patients.
Douleur neuropathique et intolérance aux hydrates de carbone… La vigilance doit être de mise
Chez les patients suspects de neuropathie, le bilan de première ligne est souvent décevant, et encore plus lorsque la plainte est uniquement sensitive. Gonzales-Duarte et al. [5] (Mexico) ont montré que, lors d’un test d’hyperglycémie provoquée, à 2h les résultats étaient significativement Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
La plus grande partie des neuropathies touchant les petites fibres de façon spécifique ou en association avec une atteinte des fibres de plus gros calibre, a une distribution longueur dépendante. • En 2008, Gorson et al. ont rapporté dans le JNNP des patients atteints de neuropathies des petites fibres répondant à un pattern non-longueur-dépendant. La possibilité d’une “neuronopathie des petites fibres” était discutée et une physiopathologie dysimmune avancée dans certains cas. • Laffon et al. [6] (Nice) ont rapporté 59 patients porteurs d’une neuropathie des petites fibres isolée attestée par une biopsie cutanée anormale. Le caractère non-longueur-dépendant de la neuropathie était défini chez 17 d’entre eux à partir du ratio de densité proximale et distal. Au total, dans le groupe non-longueur-dépendant, les femmes jeunes étaient surreprésentées (p = 0,019). Les tableaux étaient plus aigus (p < 0,01) et une ambiance dysimmune était plus fréquemment rencontrée (p = 0,035). Toutes ces données apportent de l’eau au moulin de
Polyradiculoneuropathies inflammatoires démyélinisantes chroniques (PIDC)… les anticorps anti contactin-1 comme biomarqueurS
TRPV4 : les outils pour ne pas manquer le diagnostic
Echaniz-Laguna et al. [8] (Strasbourg) ont présenté, dans deux sessions orales différentes, la série 219
spécial AAN - 2e partie
française des patients mutés pour TRPV4 dans le cadre d’un CMT2. Les auteurs ont testé 151 patients porteurs d’une neuropathie périphérique. Quatre-vingt-quinze avaient un CMT2 dominant sans autres signes. Cinquante-six autres avaient une neuropathie motrice héréditaire (36), ou un CMT2 (13) ou une atrophie scapulo-péronière (7) associée à une paralysie des cordes vocales et une dysplasie squelettique. Aucun des patients avec un CMT2 isolé n’était muté, alors que 6 des 56 autres (10,7 %) avaient une mutation. L’extension de l’étude aux familles a permis de colliger un total de 9 patients. Tous avaient les pieds déformés. L’atteinte des cordes vocales associée à une cyphoscoliose était présente chez 7 patients. Deux derniers patients avaient une chondrodysplasie. L’atteinte des cordes vocales était variable (stridor, dysphonie,
Nerfs & MUSCLEs
dyspnée à l’effort, apnée du sommeil) et tous les tableaux cliniques avaient commencé durant l’enfance.
Maladies du motoneurone TREG et SLA : vers une hypothèse inflammatoire ?
Si l’hypothèse de l’excitotoxicité a longtemps sous-tendu la physiopathologie de la SLA, il apparaît aujourd’hui clair que la maladie est d’origine plurifactorielle. Curieusement, pour une maladie avancée comme un modèle de maladie dégénérative, l’inflammation s’en mêle ! Henkel et al. [9] (Houston, USA) ont étudié les TREGs (T regulatory cells) ou lymphocytes T régulateurs, chez des patients SLA, ainsi
que FoxP3, un facteur de transcription nécessaire à la fonction des TREGs. Des lymphocytes ont été prélevés chez 54 patients SLA à différents niveaux d’évolution de leur maladie et chez 33 contrôles. Les auteurs ont pu monter que le nombre de TREGs était inversement corrélé à la vitesse de dégradation des patients SLA. A 3,5 ans, le taux de FoxP3 conduisait à des conclusions similaires puisque, en cas de taux bas, 35 % des patients étaient décédés ou sous ventilation mécanique contre 13 % en cas de taux de FoxP3 élevé. Ces données pourraient permettre d’isoler au sein de nos cohortes de patients SLA des sujets de moins bon pronostic, avec pour conséquence une surveillance encore plus rapprochée. De la même façon, le nombre de TREGs pourrait aider à l’évaluation des molécules d’intérêt lors d’essais thérapeutiques.
• En bref Une jolie observation Une myopathie parfois prise pour une dystrophie facio-scapulo-humérale (FSHD) est celle provoquée par des mutations du gène VCP (Valosin-containing protein), qui peuvent être responsables selon les cas de tableaux de myopathie à inclusion, maladie de Paget ou démence fronto-temporale. Une observation très instructive a été présentée par Fernandes-Filho et al. qui rapportent le cas d’un patient de 39 ans dont le mode d’entrée dans la maladie s’est fait sous la forme d’une camptocormie d’apparition progressive vers l’âge de 35 ans. Celle-ci était associée à une atteinte proximale des 4 membres. L’histoire familiale n’était pas neutre avec des antécédents de SLA chez la mère, de myopathie chez la grand-mère maternelle, le grand-oncle maternel et la tante du patient. L’EMG avait montré des fibrillations dans les muscles distaux et proximaux avec un pattern myogène prédominant en proximal, mais aussi la pré-
sence de salves myotoniques dans les muscles paraspinaux, le biceps ou le gastrocnémien interne. Les CK oscillaient entre 1 700 et 2 000 UI. La biopsie musculaire avait montré un aspect de myopathie à vacuoles bordées. Les phosphatases alcalines étaient normales et il n’y avait pas d’anomalies osseuses ou encore de signes de démence fronto-temporale. La génétique de la FSHD1 était négative et il a été mis en évidence une mutation sur le gène VCP. Cette pathologie à transmission autosomique dominante peut être tout à fait trompeuse, avec des modes d’expression très différents pour la même mutation, et même au sein d’une même famille. Savoir y penser, devant des portes d’entrée neurologiques très différentes, même si les phosphatases alcalines sont normales ! Emmanuelle Folgoas et Yann Péréon (Nantes)
Référence : Americo Fernandes-Filho J et al. Camptocormia in a patient with valosin-containing protein (VCP) mutation. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.117.
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Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
Nerfs & MUSCLEs
IRM et SLA… ça se précise !
Les nouvelles séquences IRM sont mises en avant depuis quelques années comme pouvant servir de biomarqueurs dans la SLA. Bede et al. [10] (Dublin, Irlande) ont proposé une belle étude chez 9 patients porteurs de la mutation C9orf72, 30 patients SLA sporadique et 44 sujets contrôle appariés. Chez les patients C9orf72, les lésions IRM (tenseur de diffusion, épaisseur du cortex) avaient une distribution spécifique touchant les régions fusiformes, operculaires, supramarginales, orbitofrontales et la pars triangularis. En cas de SLA sporadiques, les anomalies IRM concernaient, comme déjà décrit, le cortex moteur, les voies motrices et le cervelet, et donc peu ou pas les territoires extramoteurs. Les données présentées étaient en accord avec la neuropsychologie, qui étayait un diagnostic de démence fronto-temporale dans deux tiers des cas, alors que seuls 10 % des SLA sporadiques avaient des anomalies attestant d’un syndrome dysexécutif.
EMPOWER phase III… encore raté !
L’an dernier, je rapportais dans cette même revue les résultats de la phase II de l’étude EMPOWER comparant le dexpramipexole à un placebo dans une étude randomisée en double insu chez 102 des patients SLA. Le dexpramipexole aurait une action neuroprotectrice via une modulation de l’activité mitochondriale. L’espoir était de mise avec un effet discret sur la décroissance de l’ALSFRS-R (p = 0,117). Quelques neutropénies avaient été rapportées. L’AAN 2013 a été l’occasion d’entendre les résultats de la phase III réalisée dans deux groupes de 471 patients traités soit par dexpraNeurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
spécial AAN - 2e partie
mipexole soit par placebo associé ou non au riluzole (Cudkowicz, Charlestown, USA [11], et Van den Berg, Utrecht, Pays-Bas [12]). Bien sûr, le riluzole ne pouvait plus être introduit après le début de l’étude. Malheureusement, et encore une fois, le résultat est négatif avec un critère primaire combiné prenant en compte la survie et le score fonctionnel. Finalement, le seul bénéfice observé fut celui du riluzole. Il faut continuer à travailler…
correspondent à des biomarqueurs d’activité mitochondriale (Bcl/Bax ratio). A 6 mois donc, la diminution de l’ALSFRS-R était discrètement moindre avec le traitement actif, mais de façon non statistiquement significative. En termes de biomarqueurs, les résultats étaient un peu plus nettement positifs, en faveur d’un effet de la rasagiline. Attendons la fin de l’étude et croisons les doigts jusqu’à la fin du 1er semestre 2013 !
Ceftriaxone et SLA… encore raté !
Lower motor neurone disease… qu’est-ce que c’est ?
Les sciences fondamentales ont apporté des arguments pour une utilité de la ceftriaxone dans le traitement de la SLA via l’augmentation de l’expression des transporteurs du glutamate astrocytaires et la protection des motoneurones en culture de la mort cellulaire par excitotoxicité et apoptose. L’étude STAGE II avait montré la tolérance de la ceftriaxone chez des patients SLA. Cudkowicz et al. [13] (Charlestown, USA) ont présenté les résultats de STAGE III, une étude randomisée en double aveugle chez 513 patients avec l’ALSFRS-R comme critère primaire d’efficacité. Pour faire bref, l’essai a été stoppé pour cause de futilité !
Rasagiline et SLA…
Avec le même rationnel que le dexpramipexole, la rasagiline a été proposée comme traitement de la SLA. Wang et al. [14] (Fairway, USA) ont montré les résultats intermédiaires d’une étude multicentrique américaine. Trente-cinq patients ont été inclus, un patient est décédé, quatre patients sont sortis du fait d’effets indésirables. L’effet de 2 mg de rasagiline a été mesuré à 6 mois ; l’étude durera un an. Le critère primaire est basé sur l’ALSFRS-R. Les critères secondaires
Les Lower Motor Neuron Diseases (LMND) correspondent, comme leur nom l’indique, à des pathologies dépendantes d’une atteinte restreinte du motoneurone périphérique. En pratique, derrière ce titre générique, on retrouve des pathologies génétiques, dégénératives et beaucoup d’autres choses dont des erreurs d’aiguillage. Sanderson et al. [15] (Colombus, USA) ont analysé rétrospectivement tous les patients associant une faiblesse motrice, une atrophie et des fasciculations sans argument pour une atteinte du motoneurone central. Mille huit cents cas ont été revus et 128 ont été retenus pour l’étude. Il s’agissait d’hommes dans deux tiers des cas et l’âge moyen était de 60 ans. Une authentique maladie du motoneurone n’était identifiée que dans 48,4 % des cas, et il s’agissait alors d’une SLA dans 62,9 % des cas. Les autres diagnostics retenus étaient : une neuropathie inflammatoire (10,9 %) correspondant à des neuropathies à bloc pour l’essentiel, génétique (10,1 %) dont la moitié d’amyotrophie spinale, une cause infectieuse (8,6 %) c’est-à-dire syndrome post-polio surtout, des syndromes crampes/ fasciculations ou des fasciculations bénignes (4,7 %) et des myopathies 221
spécial AAN - 2e partie
(2,3 %). Si cette belle série ne nous renseigne pas plus sur ce concept de LMND, elle propose une vue large des diagnostics différentiels qu’il faut savoir évoquer chez un patient suspect d’un tel diagnostic.
Jonction neuromusculaire Mycophénolate mofétil et IPP : un couple sulfureux ?
Le mycophénolate mofétil (MFM) est utilisé en neurologie dans le cadre du traitement de la myasthénie autoimmune, mais pas que. Les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) sont aussi largement utilisés en France, et même de plus en plus dans la mesure où certaines galéniques sont disponibles sans ordonnance permettant l’automédication. Mahlstedt et al. [16] (Farmington, USA) ont étudié de mode évolutif des patients myasthéniques traités par MFM et recevant ou ne recevant pas par ailleurs un IPP. En effet, la modification du pH gastrique pourrait nuire à l’absorption du MFM. Ainsi, 106 patients
Nerfs & MUSCLEs
ont été inclus dans une étude rétrospective. Il apparaît que, chez les sujets les plus âgés cotraités par IPP, les hospitalisations étaient plus nombreuses. L’analyse des comorbidités dans l’étude apparaît insuffisante pour conclure à un rôle délétère des IPP. D’autres travaux seront nécessaires. Dans le délai, soyons vigilants.
Activités de repos à l’aiguille et syndrome de Lambert-Eaton
En électroneuromyographie, les activités de repos à l’aiguille sont le plus souvent rencontrées à l’occasion d’un processus neurogène, témoignant d’une déconnexion de la fibre musculaire de son motoneurone. Avec la même physiopathologie, on peut retrouver des potentiels de fibrillation et ondes lentes positives à l’occasion de processus myogènes nécrosants. Roy et al. [17] (Albuquerque, USA) rapportent le cas d’un patient sans anticorps anti-canaux calciques qui installa un déficit moteur proximal d’installation subaiguë avec des activités spontanées à l’aiguille. Ces
anomalies sont mises sur le compte d’un blocage complet de certaines jonctions neuromusculaires. Audelà du case report, ces anomalies doivent être connues au titre du diagnostic différentiel d’avec une myopathie ou une sclérose latérale n amyotrophique. Correspondance Dr Jean-Philippe Camdessanché Service de Neurologie, Hôpital Nord CHU de Saint-Etienne 42055 Saint-Etienne Cedex 2 E-mail : j.philippe.camdessanche@chust-etienne.fr
Mots-clés : Neuropathie périphérique, Motoneurone, Jonction neuromusculaire, Vincristine, Neuropathie amyloïde familiale, Douleur neuropathique, Neuronopathie des petites fibres, Polyradiculoneuropathies inflammatoires démyélinisantes chroniques, Génétique, TRPV4, Sclérose latérale amyotrophique, IRM, Dexpramipexole, Ceftriaxone, Rasagiline, Lower motor neuron disease, Mycophénolate mofétil, Syndrome de Lambert-Eaton
Bibliographie 1. Pouclet-Courtemanche H et al. Vincristine-induced neuropathies: an atypical ENMG pattern in children. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : PD1.008. 2. Sekijima Y et al. Safety and efficacy of long-term diflunisal administration in Familial amyloid Polyneuropathy. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : PD1.009. 3. Adams D et al. Familial amyloidosis with polyneuropathy (FAP): lessons from the French model of care in last 5 years from the National Referral Center (NNERF) and National Network for FAP (CORNAMYL). 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P05.063. 4. Théaudin M et al. Multifocal neuropathy with upper limb onset as a frequent phenotype in familial amyloid polyneuropathy in France. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P05.065. 5. Gonzales-Duarte A et al. Increased fasting glucose, 2-h, 3-h and 5-h OGT serum glucose levels are associated with neuropathic pain. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.126. 6. Laffon M et al. Is non-length-dependant small fiber sensory neuropathy an inflammatory neuropathy? 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.140. 7. Illa I et al. Antibodies to contactin-1 in chronic inflammatory demyelinating polyneuropathy. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.150. 8. Echaniz-Laguna A et al. TRPV4 mutations are a significant cause of childhood-onset neuropathies with vocal fold paresis and/or skeletal dysplasia. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S26.005.
222
9. Henkel J et al. T regulatory cells mediate ALS progression and survival. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P02.166. 10. Bede P et al. The neuroimaging signature of the C9orf72 hexanucleotide repeat in amyotrophic lateral sclerosis. A multimodal MRI study. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S06.005. 11. Cudkowicz M et al. Efficacy of dexpramipexole in amyotrophic lateral sclerosis: data from the phase III EMPOWER Trial. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : PL02.004. 12. Van den Berg L et al. Safety and tolerability of dexpramipexole for the treatment of ALS: results from the randomized, double-blind, placebocontrolled trial, EMPOWER. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : PL02.003. 13. Cudkowicz et al. Presentation of the Essey Award Session: Session S06: Anterior Horn: Basic Science. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S36.001. 14. Wang X et al. A multicenter screening trial of the safety and efficacy of rasagiline in people with ALS. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S36.006. 15. Sanderson A et al. The clinical spectrum of lower motor neuron syndrome. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P03.047. 16. Mahlstedt J et al. Impact of proton pump inhibitors on disease progression in autoimmune myasthenia gravis patients treated with mycophenolate mofetil. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P02.190. 17. Roy R et al. Abnormal spontaneous activity in Lambert-Eaton myasthenic syndrome. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P02.205.
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spécial AAN - 2e partie
Nerfs & MUSCLEs
2 Pathologies musculaires La FSH en tête n
San Diego est une cité américaine sans doute typique, mais possédant les charmes des
bords du Pacifique. La température agréable qui y régnait pendant le congrès n’était cependant pas suffisante pour que les body-builders qui arpentent les plages en été sortent et montrent leurs muscles. Ces derniers étaient donc surtout présents à l’intérieur du Convention Center et c’est la dystrophie facio-scapulo-humérale (FSHD) qui a retenu l’attention.
FSHD2 : avancées franconéerlandaises en génétique [1, 2]
La FSHD reste une physiopathologie mystérieuse qui se dévoile petit à petit. Si FSHD1 et FSHD2 sont cliniquement similaires, les anomalies génétiques en cause ne sont pas les mêmes. Dans les deux cas, il existe une relaxation anormale de la chromatine de la région D4Z4 (chromosome 4), provoquant un défaut de répression du facteur de transcription DUX4 qui conduit à la mort cellulaire. Dans le cas de FSHD1, cette relaxation est liée à une diminution du nombre de répétitions de D4Z4 (1 à 10 au lieu de 11 à 100 normalement). Concernant FSHD2, les mécanismes sont encore mal connus, la relaxation de l’ADN étant ici indépendante du nombre de répétitions de D4Z4. Le gène SMCHD1 (chromosome 18) jouerait un rôle de modulateur épigénétique du fragment D4Z4. En effet, si le taux de la protéine SMCHD1 dans les
*Centre de Référence Maladies Neuromusculaires NantesAngers, Hôtel-Dieu, Nantes
224
Emmanuelle Folgoas et Yann Péréon*
cellules du muscle squelettique diminue, on observe une relaxation de D4Z4 et l’expression inappropriée de DUX4, indépendante d’une diminution des répétitions de D4Z4. Les mutations du gène SMCHD1 pourraient donc être en cause dans les FSHD de type 2.
FSHD1 et SMCHD1
Dans la foulée et confirmant les données ci-dessus, l’équipe de Sabrina Sacconi [3] a présenté une étude réalisée sur 42 patients FSHD1, portant sur la relation entre nombre de répétitions et sévérité de la maladie. Dans les cas typiques, plus le nombre de répétitions est bas, plus l’atteinte est sévère. Mais il existe des cas atypiques où l’on n’observe pas cette concordance génotype/phénotype. Parmi ces 42 patients, 3 avaient un taux de répétitions relativement haut (9 RU) et un phénotype clinique sévère. Ces 3 patients étaient porteurs à la fois de la mutation FSHD1 (contraction de D4Z4) et d’une mutation dans le gène SMCHD1. Une mutation associée de SMCHD1 pourrait donc aggraver les phénotypes FSHD1.
FSHD et hypoacousie
Les formes précoces de FSH peuvent être associées à des déficits neurosensoriels, en particulier aux déficits auditifs. L’équipe de K. Lutz [4] a rapporté 11 cas d’hypoacousie dans une population de 59 patients FSHD. L’étude montre que le déficit neurosensoriel survient entre la naissance et 7 ans, est discret à modéré, bilatéral, d’apparition progressive et porte sur les hautes fréquences. L’hypoacousie est associée à une taille du fragment EcoRI-Blnl plus petite (en moyenne 12,9 kb contre 21,3 kb chez les FSHD non atteints). Il pourrait donc être nécessaire de dépister précocement une hypoacousie chez l’enfant atteint de FSHD (dès la naissance ?), ce d’autant que le fragment EcoRI-Blnl est court, ces patients pouvant bénéficier d’un appareillage précoce.
Dystrophie musculaire de Duchenne
Les présentations qui ont concerné la dystrophie musculaire de Duchenne (DMD) étaient moins “pepsi” que celles sur la FSHD. Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
Nerfs & MUSCLEs
• La perte de la marche représente un tournant dramatique dans la vie des patients atteints de DMD et de leur famille. Ciafaloni et al. ont étudié la masse de données du réseau américain Muscular Dystrophy Surveillance, Tracking, and Research Network (MD STARnet). L’étude de la population de patients Duchenne et Becker nés entre 1988 et 2009 a permis de montrer une corrélation entre l’âge des premiers symptômes de la maladie et celui de la perte de la marche [5]. Une porte ouverte enfoncée ? Ou plutôt, la confirmation statistique d’un sentiment clinique. • La question des stéroïdes est longtemps restée en suspens dans la prise en charge des garçons porteurs de DMD, mais un consensus se fait maintenant sur leur administration systématique au cours de la première décennie. Une équipe japonaise [6] a repris les données de 560 patients DMD issues d’un registre de dystrophie musculaire. Les garçons ont été sélectionnés sur les données de la biopsie musculaire (absence de dystrophine) et de la génétique (présence d’une mutation sur le gène de la dystrophine) ; 245 d’entre eux avaient été traités par prednisone, 315 n’en avaient pas reçu. Dans le premier groupe, la perte de marche est survenue à l’âge de 11 ans (10 ans et 6 mois11 ans et 6 mois), alors que les patients non traités ont perdu la marche à 10 ans et 1 mois (10 ans10 ans et 6 mois) (p = 0,0002). Cette étude rétrospective confirme à grande échelle ce bénéfice des corticoïdes qui, même s’il est limité, permet de gagner près d’un an sur l’âge de perte de la marche.
Myopathies des ceintures
Les dystrophies des ceintures Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
représentent un vaste sac d’où émergent plus de 25 myopathies, dont l’origine génétique a pour point commun de provoquer un déficit musculaire proximal. Leur prévalence est estimée de 0,5 à 4 pour 100 000 de par le monde. Wicklund et al. [7] ont dépouillé les résultats obtenus à partir des séquençages réalisés dans les laboratoires Athena Diagnostics, qui réalisent la plupart des diagnostics génétiques aux Etats-Unis. L’étude incluait les gènes CAPN3, CAV3, DYSF, FKRP, LMNA, SGCA, SGCB, SGCD et SGCG. De façon similaire à ce qui est observé en Europe occidentale, les calpaïnopathies représentent le groupe d’anomalies génétiques le plus fréquemment retrouvées (30 %), suivies, par fréquence décroissante par : dysferline (18 %), FKRP (17 %), LMNA (11 %), α-sarcoglycan (9%), β-sarcoglycan (5%), δ-sarcoglycan, caveolin (3 %) et γ-sarcoglycan (3 %). De façon globale, les sarcoglycanopathies représentent le 2e type de pathologie. Dans la session Highlights consacrée aux maladies musculaires, A. Amato est revenu sur plusieurs publications récentes concernant les myopathies inflammatoires et toxiques.
Dermatomyosite et polymyosite : nouveautés thérapeutiques, vraiment ? Rituximab
Une large étude tout juste publiée [8], randomisée, en double aveugle, contre placebo, a permis d’évaluer la sécurité et l’efficacité du rituximab dans les dermatomyosites (DM) et polymyosites (PM) réfractaires. Deux cents pa-
spécial AAN - 2e partie
tients issus de populations adulte et pédiatrique ont été inclus (76 PM, 76 DM, 48 DM juvéniles) et ont reçu le rituximab à J1 pour les uns et à J60 pour les autres. Les principaux critères d’évaluation portaient sur le temps nécessaire pour obtenir une amélioration clinique significative prédéfinie. Si 83 % des patients validaient ce critère d’amélioration, il n’y avait pour autant pas de différence significative entre l’administration précoce et tardive du rituximab.
Etanercept
Dans une étude de 2011, randomisée, contre placebo, menée par le Muscle Group Study [9], l’étanercept était administré à la dose de 50 mg par semaine pendant 52 semaines dans les DM. La prednisone était diminuée pendant les 24 premières semaines, jusqu’à la dose minimale nécessaire. Seize patients ont été inclus (étanercept 11 ; placebo 5). Les résultats ont montré une tendance à l’amélioration clinique sous étanercept, cependant non significative. Il n’y avait pas de différence concernant les effets secondaires (5 rashes dans le groupe traité, 1 dans le groupe placebo). Cinq des 11 sujets traités étaient sevrés en prednisone. Tous les patients ont présenté un échec thérapeutique, survenu au bout de 358 jours dans le groupe étanercept contre 148 dans le groupe placebo (p = 0,0002). La dose de prednisone était de 1,2 mg/j contre 29,2 mg/j dans le groupe non traité par étanercept.
Statines et myopathies
• Deux études publiées par Mammen et al. en 2011 et 2012 [10, 11] ont permis de mieux connaître les effets immunologiques des statines, qui induisent parfois des 225
spécial AAN - 2e partie
myopathies nécrotiques immunomédiées. L’exposition aux statines provoque l’expression d’antigènes de 100 kd et 200 kd en culture cellulaire, celui de 100 kd correspondant à l’HMGCoA réductase. Dans ce centre, 6 % des patients avaient un anticorps anti-HMGCoA réductase positif et, parmi ceux âgés de plus de 50 ans, 92,3 % avaient pris des statines. Par contre, en 2012, sur une large population de patients (n = 1 966) ayant pris ou prenant actuellement une statine, aucun anticorps anti-HMGCoA n’a été mis en évidence, y compris chez les 51 patients ayant une intolérance aux statines. Cet autoanticorps est rare, mais pourrait être spécifique de cette myopathie auto-immune. • L’équipe de Mangla et al. [12] rapporte une corrélation entre myopathies induites par statines et déficit en vitamine D. 84,8 % des patients suivis dans ce centre (n = 244), présentant une “myopathie” induite par une statine, ont un taux de vitamine D inférieur à 30 ng/ml (OR : 3,176 ; 95%CI : 2,17-4,63). Il pourrait donc être intéressant de supplémenter les patients carencés, en
Nerfs & MUSCLEs
attendant les données ultérieures d’une étude randomisée.
Fibrates et intolérance à l’effort
Les résultats de l’étude portant sur l’administration de bézafibrate dans les déficiences en CPT II (Carnitine PalmitoylTransferase) et Very Long Chain Acyl CoADehydrogenase (VLCAD) ont été présentés [13]. Bonnefont et al. avaient déjà montré, en 2009 [14], une amélioration de l’activité de ces deux enzymes in vitro après administration de bézafibrate et une amélioration de la qualité de vie (évaluée par auto-questionnaire) chez 6 patients dans une étude non randomisée. Dans cette deuxième étude, en double-aveugle, randomisée, contre placebo, l’oxydation totale des AG en condition d’exercice et le turnover du palmitate ont été évalués chez 10 patients (CPTII = 5 ; VLCAD = 5). L’oxydation des AG et la mesure du pouls pendant l’exercice constituaient les critères primaires. Les résultats montrent une diminution du
taux de LDL, triglycérides et des concentrations d’acides gras (AG) libres après bézafibrate. Il existe une tendance à l’augmentation de l’oxydation mais non significative, sans modification clinique du pouls. L’administration de bézafibrate ne modifie donc pas la bêta-oxydation et présente le désavantage de diminuer le taux des AG disponibles. Après des effets in vitro intéressants, il ne semble donc pas qu’il y ait lieu aujourd’hui de proposer le bézafibrate dans les n déficits en CPTII et VLCAD.
Correspondance Pr Yann Péréon Centre de référence des maladies neuromusculaires rares Nantes-Angers CHU Bd Jacques Monod 44093 Nantes Cedex 01 E-mail : Yann.Pereon@univ-nantes.fr
Mots-clés : Pathologies musculaires, Génétique, FSHD, Dystrophie musculaire de Duchenne, Myopathies des ceintures, Dermatomyosite, Polymyosite, Rituximab, Etanercept, Statines, Fibrates
Bibliographie 1. Sacconi S et al. Identification of the epigenetic modifier of the D4Z4 epiallele in FSHD2. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S05.001. 2. Lemmers RJ, Tawil R, Petek LM. Digenic inheritance of an SMCHD1 mutation and an FSHD-permissive D4Z4 allele causes facioscapulohumeral muscular dystrophy type 2. Nat Genet 2012 ; 44 : 1370-4. 3. Sacconi S et al. FSHD2 gene may act as (epi)genetic modifier for FSHD1. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S05.002. 4. Lutz K et al. Progressive hearing loss in facioscapulohumeral muscular dystrophy is associated with short EcoRI-BlnI fragments. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S05.003. 5. Ciafaloni E et al. Age at first symptoms/signs and loss of ambulation in Duchenne-Becker muscular dystrophy: data from the MD STARNet. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : PD3.001. 6. Takeuchi F et al. Prednisone therapy for Duchenne muscular dystrophy: A large-cohort study with patient registry. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : PD3.002. 7. Wicklund M et al. Relative prevalence of limb girdle muscular dystrophies in the United States population. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P07.030.
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8. Oddis CV, Reed AM, Aggarwal R. RIM Study Group. Rituximab in the treatment of refractory adult and juvenile dermatomyositis and adult polymyositis: a randomized, placebo-phase trial. Arthritis Rheum 2013 ; 65 : 314-24. 9. Muscle group study. A randomized, pilot trial of etanercept in dermatomyositis. Ann Neurol 2011; 70 : 427-36. 10. Mammen AL, Pak K, Williams A et al. Rarity of Anti-3-Hydroxy-3-Methylglutaryl-Coenzyme reductase antibodies in statin users, including those with self-limited musculosqueletal side effects. Arthitis Care Res 2012 ; 64 : 269-72. 11. Mammen AL, Chung T, Christopher-Stine L. Autoantibodies against 3-hydroxy-3 methylglutaryl-coenzyme A reductase in patients with statin-associated autoimmune myopathy. Arthritis Rheum 2011 ; 63 : 713-21. 12. Mangla A et al. Vitamin D insufficiency: a risk factor for statin-induced myopathy. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P07.042. 13. Bonnefont JP, Bastin J, Behin A. Bezafibrate for an inborn mitochondrial beta-oxidation defect. New Eng J Med 2009 ; 360 : 838-40. 14. Vissing J et al. Bezafibrate does not improve fat oxidation in patients with disorders of fat metabolism. A double blind, randomized clinical trial. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : S05.006.
Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
épilepsies
spécial AAN - 2e partie
Les épilepsies à l’AAN Monitoring EEG, états de mal, retard mental n L’affichage du CSA (Compressed Spectral Array) facilite l’analyse du monitoring EEG continu, en améliorant sa sensibilité. Un cas d’état de mal réfractaire ayant persisté 4 mois a été présenté, montrant la difficulté, chez ce type de patients, d’établir un pronostic. Le lacosamide aurait un intérêt dans l’épilepsie réfractaire associée à un retard mental. Philippe Derambure*
Monitoring EEG continu : méthode de détection des crises et des décharges épileptiques
L’enregistrement EEG continu est de plus en plus utilisé dans la détection des crises épileptiques des patients hospitalisés pour des troubles cognitifs non expliqués ou dans le cas de situations neurologiques aiguës qui peuvent se compliquer de crises (encéphalite, AVC, troubles métaboliques aigus, etc.). Le CSA (Compressed Spectral Array) est une méthode de visualisation de l’activité EEG à partir de l’analyse spectrale continue du signal qui affiche à l’écran la puissance dans les différentes bandes de fréquence en fonction du temps (Fig. 1). L’affichage CSA est de plus en plus utilisé dans le monitoring EEG continu, facilitant son utilisation, mais sa sensibilité pour la détection des crises reste inconnue. Une étude [1] a revu 119 enregistrements EEG continus par une analyse en aveugle des résultats affichés par le CSA en comparaison du signal EEG “brut”. Pour cela, deux neurophysiologistes expérimentés ont revu l’ensemble * Service de Neurophysiologie Clinique, CHRU de Lille
Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
Figure 1 - Mode CSA: mode condensé de visualisation de l’activité spectrale continue du signal EEG.
des 111 monitorings, l’un regardant le signal EEG, le deuxième regardant le CSA. Ils devaient tous les deux détecter les crises, les décharges épileptiques périodiques (DEPs), les activités delta rythmiques (ADR), les décharges d’allure épileptique. Parmi les 40 monitorings EEG contenant des crises, la visualisation du CSA a permis de les détecter dans 38 enregistrements (95 %). Le taux de détection de toutes les crises était de 89 % des 1 192 crises. Pour les autres patterns, la sensibilité du
CSA pour détecter les anomalies épileptiformes était de 94 % (66 enregistrements sur 70), des décharges delta rythmiques de 97 % (4 sur 35), et des ralentissements focalisés de 100 % (77 sur 77). Ces résultats indiquent que l’affichage du CSA apportait une très bonne sensibilité pour détecter les crises et les décharges épileptiques, même si, dans de rares cas, des crises focales brèves pouvaient ne pas être identifiées. Ce mode d’analyse pourrait faciliter l’analyse du monitoring EEG continu. 227
spécial AAN - 2e partie
Pronostic des états de mal réfractaires persistant plusieurs mois
Un poster [2] a rapporté le cas d’un jeune patient ayant présenté un état de mal réfractaire ayant persisté pendant 4 mois, avec une évolution favorable. Aucune étude n’a montré jusqu’alors quels étaient les facteurs prédictifs d’une évolution favorable chez les patients ayant un état de mal résistant, persistant plusieurs semaines à plusieurs mois. Chez ces patients, il n’existe pas, pour le moment, de stratégie de prise en charge bien codifiée en terme de traitement, de monitoring EEG et de surveillance (biologique, imagerie). Dans le cas de ce patient, aucune étiologie n’a été retrouvée et de nombreux traitements ont été utilisés : phénobarbital, kétamine, midazolam, et 8 antépileptiques selon différentes associations ont été essayés. Des traitements par corticothérapie, immunoglobulines intraveineuses
épilepsies
et la diète cétogène ont été essayés. Après 4 mois de persistance de l’état de mal, l’état clinique s’est amélioré avec un arrêt des crises et une récupération progressive des fonctions neurologiques. Selon les auteurs, ce cas illustre la difficulté chez ce type de patients d’établir un pronostic, même dans des cas qui pourraient être considérés comme défavorables. Dans la présentation de ce cas, les auteurs recommandent d’arrêter la sédation régulièrement au moins tous les 5-7 jours, en surveillant l’évolution de l’activité EEG et de reprendre un autre protocole en cas de réapparition des crises.
Lacosamide : chez les patients présentant une épilepsie associée à un retard mental
Une étude [3] a évalué l’efficacité et la tolérance de la lacosamide (Vimpat®) chez des patients institutionalisés présentant une épi-
lepsie réfractaire associée à un retard mental. Peu d’études se sont intéressées spécifiquement à cette population de patients présentant une épilepsie sévère associée à un retard mental. Cette étude a évalué l’effet de l’adjonction d’un traitement par lacosamide dans un groupe de 46 patients présentant une épilepsie sévère associée à un retard mental. L’étiologie était une anoxie néonatale chez 22 patients, une cause lésionnelle chez 10 patients, un syndrome de Lennox-Gastaut chez 5 et aucune cause retrouvée chez 9. Le nombre moyen d’anti épileptiques était de 2,6 ± 0,7. Les 46 patients avaient reçu auparavant plus de 6 antiépileptiques. Pour un tiers de la population, une diminution de plus de 50 % des crises a été observée suite à l’introduction de la lacosamide. Des effets secondaires ont été retrouvés chez 7 patients (15 %) et le traitement a été interrompu chez
• En bref Crises psychogènes non épileptiques : efficacité des traitements agissant sur le système noradrénergique De nombreuses études ont bien montré que la survenue d’un événement traumatique était souvent retrouvée comme élément déclencheur des crises psychogènes non-épileptiques (CPNE). Des études ont aussi évalué l’efficacité des médicaments d’action noradrénergique sur les patients présentant un stress post-traumatique. Comme les CPNE pourraient être l’expression clinique d’expériences post-traumatiques, les traitements noradrénergiques pourraient être efficaces chez les patients présentant des CPNE. Cette étude a évalué l’évolution de 14 patients nonépileptiques qui présentaient des CPNE confirmées
par un enregistrement vidéo-EEG et qui ont reçu des traitements agissant sur le système noradrénergique. Sept patients ont été traités par propranolol, 5 par prazosine et 2 par clonidine. Les 14 patients ont eu une évolution positive suite à l’introduction de leur traitement, avec une diminution importante de la fréquence des CPNE. Chez 4 patients, les CPNE ont totalement disparu. Ces résultats suggèrent que les médicaments agissant sur le système noradrénergique pourraient être utilisés dans le traitement des CPNE. Philippe Derambure (CHRU de Lille)
Référence : Kale A et al. The effect of adrenergic modulation treatment of psychogenic nonepileptic seizures (PNES): a retrospective chart review. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P03.120.
228
Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
épilepsies
6 patients (13 %). Les résultats obtenus étaient indépendants de l’étiologie et de l’importance du retard mental. Selon cette étude, la lacosamide semble avoir un intérêt dans cette population particulière, indépendamment de l’étiologie de l’épilepsie. n
Correspondance Pr Philippe Derambure CHRU de Lille Hôpital Roger-Salengro 2, avenue Oscar Lambret Service de Neurophysiologie Clinique 59037 Lille cedex E-mail : philippe-derambure@chru-lille.fr
spécial AAN - 2e partie
Mots-clés : Epilepsie, EEG continu, Compressed Spectral Array, Etat de mal réfractaire, Lacosamide, Retard mental
Bibliographie 1. Wahlster S et al. Sensitivity of compressed spectral array displays for seizures and other critical patterns in adult long term EEG monitoring. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.021. 2. Standley K et al. Good outcomes possible after a prolonged course of Refractory Status Epilepticus. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23,
2013 : P01.048. 3. Bermejo P et al. Lacosamide Use in Institutionalized Mentally Retarded and Refractory Epileptic Patients. 66th AAN Meeting, San Diego, March 1623, 2013 : P01.041.
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spécial AAN - 2e partie
sommeil
Syndrome des jambes sans repos idiopathique, ou maladie d’Ekbom Nouveautés sur la prise en charge n Le score IRLS peut être un bon indice de l’amélioration des symptômes du SJSR. Une étude pilote suggère que le traitement par stimulation transcutanée anodale serait efficace sur les symptômes sensitivomoteurs. Un traitement dopaminergique pourrait améliorer le bruxisme des patients ; à confirmer...
Comment évaluer l’effet des traitements sur la sévérité des symptômes ?
Le syndrome des jambes sans repos (SJSR) est une maladie difficile à évaluer du fait de l’hétérogénéité des symptômes, de leur sévérité et de leurs conséquences. L’échelle IRLS est une échelle permettant d’en évaluer la sévérité. Les auteurs de cette étude ont essayé d’utiliser le score IRLS pour déterminer des critères plus objectifs d’amélioration significative des symptômes. Pour cela, ils ont réanalysé une étude européenne ayant évalué l’efficacité de la rotigotine en comparaison à un traitement placebo. Dans cette étude, le score IRLS était de -13,2 ± 10 chez les patients ayant reçu 1 mg de rotigotine, -15,6 ± 9,6 chez les patients ayant reçu 2 mg et -16,1 ± 10,9 chez les patients ayant reçu 3 mg. Chez les patients ayant reçu du placebo, l’évolution du score IRLS était de -8 ± 9,7. * Service de Neurophysiologie Clinique, CHRU de Lille
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Philippe Derambure*
Trois cent sept patients avaient participé à cette étude et les résultats du score IRLS ont été analysés en fonction de l’effet ressenti par le patient sur l’importance de ses symptômes (score CGI : amélioration minime, importante ou très importante). Cela a montré qu’une diminution du score IRLS de plus de 6 points apparaissait significative, les patients ressentant une amélioration importante ou très importante. Ces résultats confirment que le score IRLS peut être un bon indice de l’amélioration des symptômes du SJSR [1, 2].
Efficacité d’un traitement par stimulation transcutanée spinale
Le SJSR est souvent associé à une augmentation de l’excitabilité médullaire. La stimulation par courant continu transcutané (tsDCS, transcutaneous direct) est une nouvelle méthode non invasive et sans douleur de modulation de l’excitabilité médullaire.
Une étude pilote [3] a été réalisée chez 20 patients présentant un SJSR et 14 sujets contrôles. Tous les participants ont reçu une session de stimulation cathodale, anodale ou SHAM (placebo) au niveau médullaire thoracique pendant 15 minutes (2,5 mA ; 0,056 mA/cm2). Pour évaluer l’excitabilité médullaire, l’analyse du reflexe H a été utilisée. Le ration Hmax/Mmax, et le rapport H2/H1 de 2 stimulations à 7 différents intervalles de temps ont été déterminés. Ces paramètres ont été mesurés avant l’application du courant transcutané médullaire et 30 minutes après. Les patients présentant un SJSR avaient un rapport H2/H1 significativement augmenté pendant les périodes où les symptômes étaient les plus ressentis (surtout la période vespérale), par rapport aux sujets contrôles. L’application d’un courant par stimulation anodale entraînait une diminution du rapport H2/H1 pour les intervalles 0,2 et 0,3 seconde, corrélée avec une amélioration des symptômes du SJSR, rapportée par les patients sur une échelle analogique. L’application d’un courant par stimulation cathodale entraîNeurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
sommeil nait aussi une diminution des symptômes, mais moins nette, et le rapport H2/H1 n’était pas significativement modifié. La stimulation SHAM n’entraînait pas d’amélioration et ne modifiait pas le rapport H2/H1. Cette étude suggère que le traitement par stimulation transcutanée anodale pourrait s’avérer efficace sur les symptômes sensitivomoteurs dans la maladie d’Ekbom. Les données neurophysiologiques apportent des informations très objectives sur la physiopathologie des troubles sensorimoteurs.
Bruxisme et syndrome des jambes sans repos : efficacité du traitement dopaminergique
Le bruxisme est un mouvement
involontaire fréquent de cause inconnue, affectant environ 10 % de la population. Le bruxisme est responsable d’insomnie et de troubles orthodontiques. Il n’y a pas actuellent de traitement médicamenteux. Seul les traitements par “gouttière” permettent de diminuer le risque de complications dentaires. Une étude [4] s’est intéressée à l’association fréquente du bruxisme au SJSR. Sur les 312 patients présentant un SJSR suivis, 127 (41 %) reconnaissaient avoir eu à un moment un bruxisme. Parmi ces patients, 54 ont vu leurs symptômes de SJSR améliorés par un traitement par agoniste dopaminergique. Sur les 54, 48 (85 %) ont vu leur bruxisme être également amélioré par ce traitement dopaminergique.
spécial AAN - 2e partie Les résultats de cette étude suggèrent une association forte entre SJSR et bruxisme. L’efficacité des traitements dopaminergiques sur le bruxisme des patients présentant un SJSR doit être confirmée par une étude en n double aveugle. Correspondance Pr Philippe Derambure CHRU de Lille E-mail : philippe-derambure@chru-lille.fr
Mots-clés : Sommeil, Syndrome des jambes sans repos, Score IRLS, Stimulation transcutanée anodale, Bruxisme, Médicaments dopaminergiques
Bibliographie 1. Kohnen R et al. Determination of the minimal clinically important improvement in IRLS total score in patients with moderate to severe restless legs syndrome treated with rotigotine transdermal system: a post hoc analysis from a 6-month placebo-controlled European study. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P02.056. 2. Ondo W et al. Minimal clinically important improvement in IRLS total score in patients with restless legs syndrome: a post-hoc analysis from a 6-month placebo-controlled US-based study with rotigotine transdermal
system. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P02.059. 3. Heide AC et al. Is transcutaneous spinal direct current stimulation efficient in symptomatic treatment of patients with idiopathic restless legs syndrome? 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P02.060. 4. Dickoff D et al. Bruxism associated with restless limbs syndrome (RLS): a dopamine responsive movement disorder. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P02.063
• En bref Sommeil : utilisation d’un traitement par mélatonine chez des patients hospitalisés en unité de soins intensifs Le sommeil est perturbé chez les patients hospitalisés en unité de soins intensifs. Il a été montré que ces patients ont un déficit en production de mélatonine qui peut induire une diminution du temps de sommeil. Le niveau de lumière et de bruit est aussi une cause de sommeil fragmenté chez les patients hospitalisés dans les unités de soins intensifs. Une étude s’est intéressée à l’utilisation d’un traitement par mélatonine chez ce type de patients, associé à des mesures prises pour limiter l’effet de la lumière et du bruit. Elle a consisté à étudier le sommeil chez
des patients suivis par monitoring EEG continu. Douze patients ont été évalués : chez 6 patients, un traitement par mélatonine était introduit, associé à la pause d’un casque limitant le bruit environnant et un masque oculaire limitant la lumière ; les 6 autres patients n’ont pas reçu de mélatonine ni bénéficié d’un casque anti-bruit ou d’un masque limitant la lumière. Aucune différence significative ne fut observée entre les deux groupes. Philippe Derambure (CHRU de LIlle)
Référence : Foreman B et al. Light & noise reduction to improve sleep in the neurological intensive care unit. 66th AAN Meeting, San Diego, March 16-23, 2013 : P01.025.
Neurologies • Juin 2013 • vol. 16 • numéro 159
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