EULAR 2013 : L’essentiel du congrès
Rhumatisme psoriasique Quoi de neuf dans la prise en charge thérapeutique ? n De nouveaux agents thérapeutiques, appartenant à la classe des agents biologiques ou à celle des petites molécules, donnent des résultats prometteurs dans le rhumatisme psoriasique.
Pr Arnaud Constantin*
Prise en charge thérapeutique du rhumatisme psoriasique La prise en charge thérapeutique du rhumatisme psoriasique repose actuellement sur les anti-inflammatoires non-stéroïdiens, certains traitements de fond non biologiques et les anti-TNF. D’autres options sont nécessaires afin de
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13 JUIN
couvrir les besoins actuellement insatisfaits chez les patients ayant répondu de façon inadéquate à ces agents thérapeutiques. Les résultats d’études contrôlées évaluant des agents thérapeutiques
Le brodalumab : un anticorps monoclonal humain ciblant l’IL-17 en phase II dans le rhumatisme psoriasique
Protocole
Le brodalumab est un anticorps monoclonal humain ayant pour cible le récepteur de l’IL-17 (IL17RA). Son efficacité et sa tolérance ont été évaluées dans le cadre d’une étude contrôlée de phase II, randomisée contre placebo, ayant inclus 168 patients atteints de rhumatisme psoriasique actif. Les patients recevaient du brodalumab (n = 113) par voie SC (140 ou 280 mg tous les 15 jours) ou du placebo (n = 55) par voie SC.
Résultats
Le brodalumab s’est révélé supérieur au placebo sur le critère principal avec des proportions de répondeurs ACR20 à la 12e semaine de 37 % (140 mg) et de 39 % (280 mg) contre 18 % pour le placebo (p < 0,05). Les proportions de répondeurs ACR20 étaient comparables que les patients soient naïfs de biothérapie (respectivement 36 % et 37 % contre 20 %) ou qu’ils aient préalablement reçu un agent biologique (respectivement 37 % et 42 % contre 16 %).
Événements indésirables *Centre de Rhumatologie, CHU Purpan, Toulouse
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en cours de développement ayant pour cibles l’interleukine-17 (IL17), l’interleukine-12 et l’interleukine-23 (IL-12 et IL-23) ou la phosphodiestérase-4 (PDE-4) ont été présentés à Madrid dans le cadre du congrès de l’EULAR 2013.
Les événements indésirables les plus fréquents étaient représen-
tés par les infections des voies aériennes supérieures (12 % brodalumab contre 7 % placebo). Quatre patients ont présenté un événement indésirable grave : cellulite (1 cas sous brodalumab 280 mg et 1 cas sous placebo), douleurs abdominales (1 cas sous brodalumab 140 mg) et cholécystite aiguë (1 cas sous brodalumab 280 mg). Ces résultats soutiennent la poursuite du programme de développement clinique du brodalumab dans le rhumatisme psoriasique, cet anticorps monoclonal antiIL-17 étant par ailleurs en cours de développement clinique dans le psoriasis en plaques (1). Rhumatos • Juin 2013 • vol. 10 • numéro 89
Rhumatisme psoriasique
Mercredi
12 JUIN
L’ustékinumab : un anticorps monoclonal humain ciblant l’IL-12 et l’IL-23 en phase III dans le rhumatisme psoriasique (PSUMMIT 2)
Protocole
L’ustékinumab est un anticorps monoclonal humain ayant pour cible la sous-unité p40 commune à l’IL-12 et à l’IL-23. Son efficacité et sa tolérance ont été évaluées dans le cadre d’une étude contrôlée de phase III (PSUMMIT 2), randomisée contre placebo, ayant inclus 312 patients atteints de rhumatisme psoriasique actif. Les patients recevaient de l’ustékinumab (n = 208) par voie SC (45 ou 90 mg à l’inclusion, à la 4e semaine, puis toutes les 12 semaines) ou du placebo (n = 104) par voie SC (remplacé par de l’ustékinumab 45 mg aux semaines 24, 28 et 40), avec une stratification sur le poids corporel, le traitement par méthotrexate à l’inclusion et l’antériorité d’un traitement par agent biologique.
Jeudi
13 JUIN
Résultats
L’ustékinumab s’est révélé supérieur au placebo sur le critère principal avec des proportions de répondeurs ACR20 à la 24e semaine de 43,7 % (45 mg) et de 43,8 % (90 mg) contre 20,2 % pour le placebo (p < 0,001). L’efficacité clinique se maintenait jusqu’à la 52e semaine. Les proportions de répondeurs ACR20 à la 52e semaine étaient plus grandes chez les patients naïfs d’anti-TNF (respectivement 60 % et 58,5 % pour ustékinumab 45 mg et 90 mg) que chez ceux préalablement traités par anti-TNF (respectivement 37 % et 40,7 % pour ustékinumab 45 mg et 90 mg).
Événements indésirables
Parmi les événements indési-
rables graves rapportés chez les patients traités par ustékinumab, on note 2 cas de tumeurs malignes (tumeur mammaire et carcinome spinocellulaire) chez des patients antérieurement traités par antiTNF, 2 cas d’infections graves et 3 cas d’infarctus du myocarde. Ces résultats soutiennent la poursuite du programme de développement clinique de l’ustékinumab dans le rhumatisme psoriasique, cet anticorps monoclonal antiIL-12 et anti-IL-23 étant déjà commercialisé en France dans le traitement du psoriasis en plaques modéré à sévère, chez l’adulte n’ayant pas répondu, ou présentant une contre-indication, ou étant intolérant aux autres traitements systémiques (2).
L’aprémilast : une petite molécule ciblant la PDE-4 en phase III dans le rhumatisme psoriasique (PALACE 3)
Protocole
L’aprémilast est une petite molécule, administrée par voie orale, régulant négativement les médiateurs de l’inflammation en inhibant la PDE-4. Son efficacité et sa tolérance ont été évaluées dans le cadre d’une étude contrôlée de phase III (PALACE 3), randomisée contre placebo, ayant inclus 486 patients atteints de rhumatisme psoriasique actif. Les patients recevaient de l’aprémilast (n = 322) par voie orale (20 ou 30 mg, 2 fois par jour) ou du placebo (n = 164).
Résultats
L’aprémilast s’est révélé supérieur Rhumatos • Juin 2013 • vol. 10 • numéro 89
au placebo sur le critère principal avec des proportions de répondeurs ACR20 à la 16e semaine de 29,4 % (20 mg x2) et de 42,8 % (30 mg x2) contre 18,9 % pour le placebo (respectivement p = 0,02 et p < 0,001). Les proportions de répondeurs ACR20 à la 16e semaine étaient comparables que les patients soient traités par aprémilast en monothérapie (respectivement 25 % et 45 % pour aprémilast 20 mg x2 et 30 mg x2 contre 14 % pour placebo) ou combiné au traitement de fond non biologique en cours au moment de l’inclusion (respectivement 32 % et 42 % pour aprémilast 20 mg x2 et 30 mg x2
contre 22 % pour placebo).
Événements indésirables
Des événements indésirables graves ont été respectivement rapportés chez 3 et 6 patients sous aprémilast 20 mg x2 et 30mg x2 et chez 9 patients sous placebo, sans infection opportuniste, lymphome ou augmentation apparente du risque d’événement cardiovasculaire (3). Les résultats à long terme d’une autre étude contrôlée de phase III (PALACE 1), randomisée contre placebo, ayant inclus 504 patients atteints de rhumatisme psoriasique actif ont objectivé le maintien de 165
EULAR 2013 : L’essentiel du congrès
la réponse clinique à l’aprémilast entre la 24e et la 52e semaine, sans signal négatif en termes de tolérance (4).
Ces résultats soutiennent la poursuite du programme de développement clinique de l’aprémilast dans le rhumatisme psoriasique. n
Mots-clés : Rhumatisme psoriasique, Thérapeutiques
Bibliographie 1. Mease PJ, Genovese MC, Greenwald MW et al. Efficacy of brodalumab, an anti-IL-17R antibody, in subjects with psoriatic arthritis. EULAR 2013 : OP0103. 2. Ritchlin C, McInnes I, Kavanaugh A et al. Maintenance of efficacy and safety of ustekinumab in patients with active psoriatic arthritis despite prior conventional nonbiologic and anti-TNF biologic therapy: 1 yr results of the PSUMMIT 2 trial. EULAR 2013 : OP0001.
3. Edwards CJ, Birbara C, Blanco FJ et al. Apremilast, an oral phosphodiesterase 4 inhibitor, in patients with psoriatic arthritis including current skin involvement: results of a phase 3, randomized, controlled trial. EULAR 2013 : OP0104. 4. Kavanaugh A, Mease PJ, Adebajo AO et al. Long-term (52-week) results of a phase 3, randomized, controlled trial of apremilast, an oral phosphodiesterase 4 inhibitor, in patients with psoriatic arthritis. EULAR 2013 : LB0001.
ÉCHO DES SYMPOSIUMS - EULAR 2013 Thérapeutique
Optimisation du traitement en fonction de l’affection
L’
efficacité du traitement de la PR peut se résumer ainsi : “frapper tôt, frapper fort”. Selon le Pr M. DOUGADOS (Paris, France), la diminution d’activité de l’affection durant les 3 premiers mois de traitement est prédictive de la rémission à un an. Si le traitement mis en place n’est pas efficace à 3 mois, il doit être modifié, et plusieurs fois si nécessaire. Traditionnellement, on inaugure le traitement par un DMARD synthétique, en général le MTX. Si celui-ci est insuffisamment efficace, il faut savoir très tôt y associer une biothérapie, comme le stipulent les recommandations EULAR de 2010. Il est nécessaire que les rhumatologues soient conscients de cet impératif. Considéré comme “le” traitement de première ligne de la PR, le MTX est abandonné après un an chez 30 % des malades, en raison d’une mauvaise tolérance ou d’une efficacité insuffisante (réponse ACR 20 entre 46 et 65 %). Pour le Pr P. NASH (Queensland, Australie), on envisage alors le recours à d’autres DMARDS synthétiques (leflunomide, sulfasalazine, sels d’or),
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ou à des biothérapies telles l’ETN ou l’adalimumab, chez les patients dont le pronostic est médiocre. Des biothérapies à mode d’action différent (certolizumab, tocilizumab), considérées comme actives, peuvent également être prescrites, en accord avec les recommandations, en évaluant les possibilités de survenue de phénomènes d’immunogénicité. Les biothérapies sont très souvent abandonnées par les patients dans un délai de 3 ans, en raison d’efficacité insuffisante, de non-réponse, de réponse partielle ou tardivement défaillante, ou d’effets secondaires. Le Pr B. COMBE (Montpellier, France) estime que ces insuffisances de réponse peuvent être dues à un schéma d’évolution de la maladie éloigné du mode d‘action du produit. Le développement d’anticorps anti-médicament est aussi une cause d’échec désormais reconnue, pouvant de plus induire certains événements indésirables. Changer de traitement biologique pour un produit à mode d’action différent, ou revenir à un DMARD synthétique peuvent constituer des alternatives que l’on peut proposer au patient. n Dr Michel Bodin
Rhumatos • Juin 2013 • vol. 10 • numéro 89