La famille
un roman de Paul Beaupère illustrÊ par serge Bloch
Direction : Guillaume Arnaud, Guillaume Pô Direction éditoriale : Sarah Malherbe Édition : Claire Renaud Conception graphique : Cédric Ramadier Direction de la fabrication : Thierry Dubus Fabrication : Audrey Bord Composition : Text’Oh! © Fleurus, Paris, 2019. www.fleuruseditions.com ISBN : 978-2-2151-6715-0 MDS : 592 855 Tous droits réservés pour tous les pays. « Loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse. »
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La famille
un roman de Paul Beaupère illustrÊ par serge Bloch
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Chapitre 0 résumé de l’épisode précédent
Liste de ce qu’il vaudrait mieux ne jamais oublier : – Son sac de cailloux, si on est le Petit Poucet ; – Sa lampe de poche, quand on est perdu la nuit dans une forêt toute noire ; – Son sens de l’humour, quand les choses tournent mal ; – Des baskets toutes neuves, si on croise un loup, un tigre, ou pire, un T-Rex ; – Son goûter, car c’est hyper-important et que non, il ne faut jamais, jamais, jamais oublier son goûter ;
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maman a disparu !
– D’avoir un livre dans sa poche, car il aura toujours de la batterie, il y aura toujours un moment pour le lire, et c’est définitivement la chose la plus chouette au monde. Pour ceux qui, comme les poissons rouges, ont la mémoire qui flanche, qui ne sont plus très sûrs de savoir où en sont nos héros, les lignes qui suivent peuvent être utiles. (Pour les autres aussi, mais ils peuvent faire semblant de les lire.) À la fin de l’épisode précédent, la famille Potofeu, contre toute attente et grâce à quelques miracles, réussit de justesse à ne pas être chassée de la Confrérie, cet ordre qui, depuis la nuit des temps, aide ceux qui font des listes à terminer ce qu’ils ont inscrit dessus. Alors c’est la fête ce dimanche soir à la Truffe-desVosges, ce restaurant qui est aussi le quartier général de la famille Potofeu. Pourtant, au moment d’aller se coucher, c’est le drame ! Karine, Mme Potofeu, femme de Matthieu, mère de Clémence, Pia, Douce et Yvan (au passage, il faut que je vous dise que Yvan, c’est moi, moi qui vous parle, moi qui écris, moi qui raconte). Karine, la seule de la famille à ne pas faire partie de la
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résumé de l’épisode précédent
Confrérie et qui en ignore l’existence, Karine donc, qui est l’âme de la maison, son cœur, ses bras ; Karine, sans qui rien n’est possible, Karine a disparu ! Pire, Karine a été enlevée par l’oncle Vladimir. Avant de filer, l’oncle félon a laissé un mot. « Vous ne deviez pas réussir ! Vous auriez dû échouer ! Je refuse que vous restiez dans la Confrérie, vous n’en êtes pas dignes. Si vous voulez retrouver votre mère et épouse, si Karine a de la valeur à vos yeux, je vous lance un défi ! Regardez bien le tableau dans les jours qui viennent ! Une liste de listes apparaîtra ! Si vous réussissez à les finir avant moi, vous aurez gagné, mais si c’est moi qui finis le premier, alors vous devrez quitter la Confrérie, et pour toujours ! Vous retrouverez Karine à la fin du match ! Que les meilleurs gagnent ! Je vais gagner ! Quant à toi, ma sœur, il est bien fini le temps où tu pouvais me mépriser ; l’heure de la revanche a sonné !
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Tu peux bien t’accrocher à ton fauteuil, je vais te le prendre ! Tu ne pourras rien faire pour m’en empêcher, sache que je serai bientôt le grand maître de la Confrérie ! Signé, Vlad, futur grand maître de la Confrérie des listes. » Minuit a sonné depuis déjà un moment ; les Potofeu sont effondrés dans le restaurant vidé de ses clients. Vidé ? Pas tout à fait. Dans un coin, un homme somnole sur une banquette. C’est Raoul Amédée de SainteMoustache, le tueur à gages qui n’a jamais tué personne et qui ce soir a pris sa retraite. Mais dort-il vraiment ? Et si, par le plus grand des hasards, il avait vu quelque chose ? Et c’est là que tout commence…
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Chapitre I Suivez la piste !
Liste des disparitions inexpliquées : – Les couvercles de Tupperware ; – La moitié des chaussettes ; – Le temps ; – Les dinosaures ; – Le fromage dans le réfrigérateur ; – La zappette de la télé ; – Le chocolat dans le placard.
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Encore un peu endormi, ses rares cheveux en bataille, son éternelle cravate de travers, M. de SainteMoustache raconte ce qu’il a pu observer. – Je somnolais, je croyais rêver, mais désormais je sais que ce n’était pas le cas. J’ai donc bien vu votre oncle Vladimir quitter le restaurant. Il poussait Karine devant lui. Elle ne se laissait pas faire et l’a même giflé, mais comme il la menaçait d’une arme, elle a dû obéir. – Comment se fait-il que nous n’ayons rien vu ? demande papa. – Il a fait ça juste au moment où vous avez tous filé dans la cuisine, avant de hurler de joie. Je crois que j’ai entendu « On a réussi, on a réussi », suivi de grands éclats de rire. – Il a raison, papa, dit Clémence, au moment où tu nous as montré l’écran avec la dernière liste complétée, maman est restée dans la salle seule avec oncle Vlad. Pourquoi se serait-elle méfiée de lui ? Qui pourrait imaginer, en voyant ce débris, qu’il puisse être dangereux ? Mais surtout, pourquoi a-t-il fait ça ? – Ton grand-oncle n’a jamais supporté que je sois l’aînée, que je sois le grand maître ; il rêve de prendre
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ma place depuis qu’il a cinq ans, dit Babouchka. En fait je crois que j’ai toujours su qu’un jour il ferait une ânerie de ce genre. Maintenant, la question c’est surtout : comment les retrouver ? Ils sont partis depuis peu, et comme mon frère ne conduit pas, ils sont à pied. Ils ne doivent donc pas être très loin. Partons à leur recherche ! Et moi qui l’ai connu tout petit, je peux vous assurer que Vlad peut être dangereux, très dangereux, et méchant en plus. Il faut faire vite. – Seulement ils ne sont pas partis à pied, dit Raoul Amédée qui s’est recoiffé et a remis sa cravate en place. (Avoir quatre-vingt-deux ans n’est certainement pas une bonne raison pour se laisser aller.) Ils ont filé dans une grosse voiture noire, une sorte de corbillard américain des années cinquante. Je l’avais remarquée en arrivant, garée au coin de la rue. Elle était curieusement immatriculée TB 007 VLAD, je me suis même demandé d’où elle pouvait bien venir. – De Vladland, un pays imaginaire où mon frère est roi, dit Babouchka, mais excusez-moi, je vous ai interrompu.
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– J’aime bien les vieilles carrosseries, alors, comme je me penchais pour l’admirer, un curieux individu, sorte de géant qui tenait à peine dans la voiture, a baissé sa vitre et m’a demandé d’aller voir ailleurs ! Il a fait cela en des termes que je n’ose répéter devant les enfants. Il mâchouillait un oignon cru. Personne de sensé ne ferait ça ! – Oh ! non, reprit Babouchka, le cousin Ulrich fait ça ! Mais vous avez raison, il n’est pas sensé. Il est haltérophile et assez débile, même si les deux ne vont pas toujours ensemble. Vous pouvez répéter ce qu’il a dit ? – Je n’ose pas. – Je vous le demande ! – Il a dit que je pouvais me faire voir du… Non, madame, je ne peux pas dire ces horreurs devant des enfants. Alors Sainte-Moustache se penche et chuchote quelques mots à l’oreille de Babouchka qui devient toute rouge. – Il a dit ça ? – Oui, madame. Et sans honte aucune ! Je vous prie de croire que je suis gêné d’avoir dû vous le répéter.
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– Une chose est sûre, c’est bien le cousin Ulrich, et si Vlad s’est acoquiné avec celui-là, il faut s’attendre au pire. Chaque famille a ses brebis galeuses, nous avons Ulrich. Cette voiture tombe bien mal. Comment les rattraper ? Alors j’ai eu une idée. – Et si on lâchait Alfred ? – C’est sûr que ça peut être une idée… dit papa en regardant Babouchka. – Pour une idée, c’est une idée, mais est-ce une bonne idée ? dit ma grand-mère en regardant Clémence. – Faut reconnaître que c’est plutôt une idée brutale… – Peut y avoir des dégâts ! murmure Pia. – Peut-être pas des morts, mais des blessés, ça… chuchote Douce. – Mais qui est Alfred ? demande Sainte-Moustache. – Vous aimez la chasse ? répond papa. – Non ! Pas du tout ! Ma famille a très longtemps pratiqué cette chose. Mais, non, je serais bien incapable de… Mais vous ne m’avez pas répondu. Qui est Alfred ? – Vous allez voir. Yvan, file chercher Alfred !
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Quand j’arrive dans son cagibi, le sanglier m’attend, impatient de sortir. Il hume l’air printanier du soir, avec la mine joyeuse de celui qui sait que son heure est venue. Il frotte sa grosse tête contre moi et pousse un terrible grognement de bonheur. La porte à peine ouverte, il se faufile et fonce vers la salle du restaurant où il fait une entrée fracassante : depuis la cour de l’immeuble, j’entends un cri. Quand j’ai rejoint tout le monde, je découvre Sainte-Moustache réfugié sur les épaules de papa. Pour un homme de son âge, il est capable de bonds prodigieux. – On lâche Alfred et on le suit ! dit papa en présentant au sanglier un foulard de maman. Alfred ferme les yeux ; il se concentre, respire à grands coups de « chniourf, chniourf ». Si jamais il devient célèbre et doit dîner à l’Élysée, il faudra penser à lui apprendre à ne pas renifler comme ça. C’est assez gênant. – Vous aimez courir, monsieur de SainteMoustache ? Mais le vieux tueur à gages n’a pas le temps de répondre. La porte du restaurant s’ouvre sur la place
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des Vosges déserte à cette heure de la nuit et Alfred se rue dehors. Groin au sol, il fonce retrouver maman, et gare à celui qui aurait l’idée ou l’audace de se mettre entre lui et Karine ! Le monstre est sur sa piste comme un train sur ses rails, mais sans freins. – Et on le suit comment ? demande Clémence. – Pia, tu restes là, tu allumes l’écran de la cuisine, répond papa. Alfred porte une balise dans son collier, tu nous diras où il est. Tu branches la radio sur la fréquence de la police et tu nous tiens au courant. Babouchka reste avec toi. Les autres, suivez-moi. Papa nous entraîne dans le garage, ce fameux garage où est rangé notre matériel super-sophistiqué. Derrière nous, obligée de rester à la Truffe, Pia râle comme un putois le jour de son bain : elle aurait bien aimé partir avec nous. Clémence s’est mise au volant de la « Labionnette », mélange de camionnette et de laboratoire, véritable couteau suisse de l’espion. De l’extérieur, on dirait un fleuriste qui va livrer ses bouquets, à l’intérieur, il y a tout ce que James Bond rêve d’emporter avec lui. Sur la banquette à côté d’elle sont assis Douce et Sainte-
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Moustache ; papa et moi sommes derrière, dans la partie laboratoire. En route. Nous surgissons de notre garage comme un boulet quitte son canon. – Allô ici Liste 1 ; je répète, Liste 1. Écran, tu nous entends ? Peux-tu nous donner des nouvelles du chercheur ? – Allô, ici Pia. C’est quoi ces noms débiles ? – Pas de commentaires ni de noms sur les ondes ! On pourrait nous écouter. Tu es Écran, nous sommes Liste 1 ! Compris ? – Compris… Le chercheur fonce vers la Seine. Quai des Célestins. Clémence a son permis de conduire depuis très peu de temps, et à l’arrière de la camionnette on s’en rend très vite compte. J’ai plus l’impression d’être dans un lave-linge pendant l’essorage que dans une voiture. Premier virage à gauche. Accélération, coup de frein. Petit crochet à droite puis à gauche et réaccélération.
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– Mademoiselle, je crois que nous sommes en sens interdit ! murmure Sainte-Moustache qui, imperturbable, tente de garder sa cravate et ses cheveux en ordre. – On est surtout pressés. Et puis il n’y a personne, alors… Violent coup de volant à droite… Nous roulons à nouveau dans le bon sens. Une petite goutte de sueur perle au front de Sainte-Moustache tandis que Douce, blanche comme un fantôme, enfonce ses doigts dans la banquette et ses dents dans le tableau de bord. Papa se concentre sur un tas d’écrans qui sont devant lui, mais il a un peu de mal. – Liste 1, c’est idiot comme nom, ici Écran, et celui-là c’est pas mieux, votre objectif est droit devant vous, il longe l’hôtel de ville. – Et flûte ! dit alors Clémence en appuyant à fond sur l’accélérateur. Notre véhicule fait un bond et s’envole littéralement. Papa, qui s’était levé pour appuyer sur un bouton, se retrouve collé au fond de la Labionnette, comme un moustique sur un pare-brise ; il est incapable de bouger, les bras en croix, les yeux et la bouche grands ouverts.
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– Liste 1, Liste 1, ici Écran. Attention, chercheur devant vous ! – Et crotte ! dit Clémence en appuyant à fond sur le frein. Le nez de notre véhicule vient toucher l’asphalte tandis que son gros derrière se soulève dans un crissement de pneus et une odeur de caoutchouc brûlé. Juste devant nous, Alfred passe comme une fusée, pendant que, dans la Labionnette, papa est propulsé du fond et vient s’écraser sur le tableau de bord, pile-poil entre Sainte-Moustache, qui hausse à peine un sourcil, et Douce, qui pousse un grand cri. – Si vous pouviez cesser de vous accrocher à mon bras, dit alors Sainte-Moustache, j’en serais fort heureux et quelque peu soulagé. Ce n’était donc pas la banquette que Douce labourait de ses griffes. – Et flûte de chez re-flûte ! dit Clémence en redémarrant comme une folle pour suivre Alfred. Nouvelle accélération ; papa refait le trajet dans l’autre sens pour s’écraser de nouveau sur les portes
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arrière de la camionnette avant de glisser au sol, comme une crêpe. Il ne bouge plus, assommé net ! – Liste 1, ici Écran. Vous allez avoir de la visite dans, 5, 4, 3, 2, 1 ! Vous devriez les voir, maintenant ! En effet, sur notre gauche arrive une voiture de police. Puis une autre, une troisième, et bientôt la moitié des policiers de Paris est à nos trousses. Soudain, une délicieuse petite musique se fait entendre. Au milieu des crissements de pneus, des bruits de moteur, des sirènes de police, le téléphone de papa sonne au fond d’une de ses poches. Et cette sonnerie, c’est maman ! – Quelqu’un répond ? hurle Clémence. J’aimerais bien t’y voir ! Pendant que la course continue et que je suis secoué comme une banane dans un mixeur, je tente de déplacer les cent kilos de papa, tout mou, tout avachi, pour accéder à la poche où se trouve le téléphone. Papa est lourd, mais papa assommé est très lourd ; fouiller les poches de papa inconscient dans une voiture folle furieuse est aussi facile à faire que de déplacer un éléphant endormi avec un cure-dent.
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Mais la chance est avec moi, un petit virage sec fait rouler papa et me permet enfin d’attraper le téléphone. – Allô ! C’est Yvan. – C’est maman. Écoute-moi bien ! Je suis allongée à l’arrière d’un vieux corbillard noir, je viens de voir Henri IV à cheval. Trouvez-moi… – Allô, allô maman ? Allô, tu es toujours là ? – Lâchez-moi ! Rendez-moi ce téléphone ! Venez vite, sauvez-moi ! Sauvez-moi ! Et puis plus rien, le silence d’une ligne coupée. – Alors ? me demandent Douce, Clémence et Sainte-Moustache d’une seule voix. – Ils lui ont repris son téléphone. Elle a dit qu’elle avait croisé Henri IV à cheval… Je ne suis pas sûr que tout aille très bien. – Je sais où elle est ! Tout droit ! Foncez ! Sainte-Moustache s’est redressé, on le dirait rajeuni de vingt ans. – Mais je ne peux pas, c’est un sens interdit ! – Mademoiselle, il y a cinq minutes, cela ne vous dérangeait guère !
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– Oui, mais il y a cinq minutes, je n’avais pas la moitié de la police de Paris aux trousses. – Foncez, oubliez la police, pensez à votre mère ! Alors Clémence obéit ; elle accélère, laissant derrière elle un petit nuage de fumée et des policiers incapables de suivre. Les voitures qui arrivent en face sont un peu surprises, mais en général assez gentilles pour se pousser et nous laisser passer. Et c’est tant mieux, car Clémence a tellement peur qu’elle conduit les yeux fermés. – Gauche, prenez le pont, mademoiselle ! Ils sont là, je les vois ! Le virage est pris sur deux roues. Quand la Labionnette retombe sur ses pattes, devant nous, un peu plus loin sur le pont, arrêté, il y a le corbillard. Mais il n’est pas tout seul. La nuit de Paris est illuminée par des milliers de gyrophares ; des dizaines de voitures bloquent le passage. Si la moitié des policiers de la capitale était derrière nous, l’autre moitié est maintenant devant nous et nous attend. Il y en a partout, casque sur la tête, gilet pare-balles, bouclier antiémeutes, arme au poing, et projecteurs braqués sur nous.
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– Qu’est-ce que je fais ? demande Clémence qui, par réflexe, a déjà les bras en l’air. – On réfléchit… On réfléchit et on ne panique pas, répond Sainte-Moustache. – On peut paniquer maintenant ? demande Douce. Moi j’en ai très envie. – Pas encore… Il faut trouver une solution ; il doit y avoir une solution. C’est obligatoire… il y a toujours une solution, murmure Raoul Amédée en tortillant sa cravate. À ce moment-là, la voix de Pia sort des haut-parleurs. – Liste 1, Liste 1, ici Écran. Faites bien attention, vous risquez de tomber sur des policiers. – Merci du conseil. Je crois qu’on les a trouvés ! répond Clémence. – Liste 1, ici Écran. Vous avez trouvé qui, maman ou les policiers ? – Les deux, ma grande. Enfin, je dis les deux, mais en vrai je devrais dire les mille. Ils sont partout autour de nous. Pia, je t’en supplie, ajoute Clémence, aidenous.
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De mon côté, à l’arrière, je tente de réveiller papa. Je lui ai parlé, je lui ai tapoté la joue, donné des gifles, tiré les oreilles, soulevé les paupières. Rien ; un caillou. – Regardez le corbillard, il avance ! En effet, la voiture d’oncle Vlad manœuvre, on dirait qu’elle tente de faire demi-tour. – Ne bougez pas ou nous allons être obligés de faire usage de nos armes ! crient les policiers dans leurs haut-parleurs. Imperturbable, la voiture continue. Quand elle est face à la Seine, elle accélère, et dans un bruit de moteur qui s’emballe, de pneus qui crissent, de tôle froissée et de pierres qui roulent, elle défonce le parapet et, dans un plouf sonore, disparaît dans l’eau noire du fleuve. – Maman ! hurlent Douce et Clémence. – C’est insensé ! commente Sainte-Moustache. – Qu’est-ce qui se passe ? demande Pia à la radio. De mon côté, je ne peux plus rien dire, je suis muet ! Nous venons de voir notre mère se noyer en direct, sans rien pouvoir faire.
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La famille
vous allez continuer à l’adorer : • Parce que cette fois, on a enlevé leur maman et qu’ils vont tout faire pour la retrouver. • Parce que même Alfred le sanglier va être de la partie, et il ne va pas faire dans la dentelle. • Parce que ce sont toujours de vrais-faux agents secrets. • Parce que la police est à leurs trousses et les traque sans relâche. • Parce qu’il faut continuer à servir des pâtés lorrains, des tartares et des tartes normandes à la Truffe-des-Vosges pour ne pas éveiller l’attention. • Parce qu’ils vont résoudre la liste la plus difficile de leur vie pour satisfaire une milliardaire qui a déjà tout. • Parce qu’avec eux, on ne s’ennuie jamais !
12,90 € TTC France
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