9782728936809 Un mystérieux visiteur

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Anne-Sophie Chauvet un mystérieux visiteur

EULALIE HERMANCE

EUDES

OLIVIER

Cher lecteur, chère lectrice,

Peut-être découvres-tu ici les aventures d’Hermance ? Non ? Je te laisse alors commencer le livre sans plus tarder !

Mais si tu as peur de ne pas tout comprendre, laisse-moi te présenter les personnages qui peuplent notre histoire…

Hermance est la fille du baron de Sezay. Ses parents, Béranger et Jehanne de Sezay, ont eu de nombreux enfants : leur fils aîné de 25 ans, Jean, habite avec sa femme et ses enfants dans le château familial. Roland, 22 ans, est devenu le baron de Massac. Les jumeaux de 20 ans, Blanche et Hugues, sont respectivement religieuse et moine, tandis que la sœur la plus proche d’Hermance, Anne, 16 ans, vit avec son mari à la cour du roi des Francs (les jeunes filles se mariaient très jeunes au Moyen Âge).

Au début du premier tome, Hermance a été appelée à la cour d’Aquitaine pour devenir une des suivantes de la future duchesse, Aliénor. Mais, sur la route, Hermance, accompagnée de sa sœur de lait – et servante – Eulalie, est victime d’un accident.

Blessée, elle trouve refuge chez le puissant comte des Marais dont les fils, Olivier (16 ans) et Eudes (12 ans), sont également attendus à la cour. Il ne faudra que quelques jours à nos héros pour devenir les meilleurs amis du monde : si Eudes et Hermance s’enthousiasment facilement et se laissent souvent emporter par leurs grands rêves et idéaux, Olivier et Eulalie, plus raisonnables, sont là pour tempérer leurs ardeurs.

À Poitiers, Hermance retrouve son frère Roland et commence son service auprès d’Aliénor. En 1133, à l’époque de notre histoire, elle a entre 9 et 11 ans. Héritière du très puissant duc d’Aquitaine et comte de Poitiers, elle est destinée à lui succéder à la tête d’un vaste domaine qui recouvre quasiment la moitié de la France actuelle. Elle est entourée de nombreux jeunes gens et jeunes filles, avec lesquels Hermance va se lier d’amitié, Isolde d’Aujours exceptée… Cette dernière est une autre damoiselle de compagnie d’Aliénor, elle a un an de plus qu’Hermance et tire beaucoup de fierté de sa position « d’ancienne » à la cour et du prestige de sa famille. Elle n’est pas méchante, mais laisse trop souvent sa jalousie envers

Hermance dicter sa conduite. D’autant plus qu’elle aime beaucoup Olivier des Marais et cherche à attirer son attention !

Mais maintenant, sans plus attendre, je te laisse découvrir la suite des aventures d’Hermance, Eulalie, Olivier et Eudes. Une chose est sûre : où qu’ils aillent, l’aventure les suit !

Bonne lecture !

Anne-Sophie

ermance se promenait dans la campagne autour du château de Bouteville. Après les nombreuses péripéties des dernières semaines1, une immense fatigue lui était tombée sur les épaules.

Le matin même, en plaisantant, elle avait avoué à Eulalie qu’elle avait l’impression d’avoir été passée au battoir des laveuses !

— Impossible, avait plaisanté sa sœur de lait, la grande lessive annuelle n’a pas encore eu lieu ! Mais je te trouve en effet un peu pâle : tu devrais aller te reposer.

1. Hermance a en effet vécu de nombreuses aventures depuis le départ du château de son père, trois mois plus tôt. Tu les retrouveras dans les trois premiers tomes : Le Serf disparu, Le Chevalier empoisonné et Une amie en détresse.

Hermance, damoiselle d’Aliénor

Hermance avait hésité un temps : allait-elle rejoindre les autres suivantes dans la grande salle et broder en parlant de choses diverses et variées ? Ou plutôt sortir et profiter du soleil qui avait fait son apparition ce matin-là ?

Aliénor étant partie chasser, les damoiselles de compagnie restées au château étaient libres de faire ce qu’elles voulaient. Hermance s’était rendue auprès de ses amies mais, au moment de s’asseoir, elle s’était rendu compte qu’Isolde d’Aujours cancanait à tout va, répétant les potins qu’elle avait entendus de-ci, de-là. Ce genre de discussion déplaisait fortement à Hermance : elle était loin d’être parfaite, mais elle détestait parler des gens dans leur dos !

Sa franchise lui avait d’ailleurs valu des ennuis à plusieurs reprises. Sans mot dire, avec un simple sourire à Jehanne, sa chère amie qui allait bientôt devenir sa belle-sœur, Hermance avait tourné les talons et était repartie dans sa chambre pour mettre son surcot. Ainsi chaudement vêtue, elle était sortie dans la cour.

Une activité intense y régnait : même si une grande partie de la famille du comte d’Angoulême et de la

Un mystérieux visiteur suite d’Aliénor était partie à la chasse, restaient tout de même au château les nombreux soldats du comte, les palefreniers, les forgerons, les cuisiniers… Tout ce petit monde s’affairait en échangeant force plaisanteries et rires : le beau temps donnait à tous du cœur à l’ouvrage !

Avisant un marmiton qui passait, les bras chargés de pâtés encore fumants, Hermance en prit un. Elle le fit sauter d’une main à l’autre pour le refroidir, et sortit de l’enceinte du château. Au pied de la colline s’étendait un village où les familles étaient occupées à tondre les moutons des différents troupeaux. Là encore, ce n’était qu’éclats de joie et bavardages, seulement interrompus par les salutations lancées à ceux qui passaient.

Le printemps était bien arrivé et l’air était doux.

Dans les champs en contrebas du château, Hermance voyait les paysans labourer la terre. Dans les potagers qui entouraient le village, des femmes étaient occupées aux semailles : haricots, concombres, citrouilles... qui garniraient les tables plus tard dans l’année. Les enfants non plus ne chômaient pas : ils

Hermance, damoiselle d’Aliénor étaient chargés de protéger les petits arbres des bêtes et tressaient des barrières avec de fines branches, tandis que les plus grands les installaient autour des troncs fins.

Hermance laissa derrière elle toute cette activité et s’éloigna. À l’époque où elle vivait encore dans le château de son père, le baron de Sezay, elle rechignait toujours un peu à aller se promener, même si le temps le permettait : les terres autour de chez elle avaient beau être sûres, elle préférait rester au chaud devant la cheminée, à broder ou jouer avec les pages, plutôt que de passer des heures dehors dans l’espoir d’apercevoir un lièvre ou un chevreuil. C’était en partie Eulalie qui lui avait appris à aimer la nature : sa sœur de lait avait été formée à la connaissance des plantes, et elle partait souvent cueillir celles qui lui permettraient ensuite de soigner tous les membres de la maisonnée. Elle n’avait jamais réussi à intéresser Hermance à l’herboristerie, mais elle forçait son amie à arpenter les bois et prairies autour du château de Sezay. C’était toutefois un paysage différent qui s’étendait sous les yeux d’Hermance, ce jour-là : pas

Un mystérieux visiteur de forêts, mais des vignes et des champs dans lesquels elle voyait des paysans travailler.

Malgré le vêtement épais qu’elle portait, malgré la chaleur du soleil qui brillait sans aucun nuage au-dessus d’elle, Hermance fut soudain prise d’un frisson. Elle avait pourtant l’impression d’avoir chaud. Pourquoi cette sensation de froid, soudain ? Elle croqua dans le petit pâté, mais la première bouchée lui fit tellement mal à la gorge qu’elle jeta à regret le reste dans un buisson. Resserrant le surcot sur elle, elle reprit sa marche, grimpant vaillamment une des collines qui entouraient le château. Arrivée à son sommet, elle admira la vue : d’un côté la demeure seigneuriale des comtes d’Angoulême, avec le village et la jolie petite église en contrebas, et, de l’autre, la plaine immense qui s’étendait, elle le savait, jusqu’à Angoulême. Et puis, enfin, vers le sud, beaucoup plus loin, Bordeaux, où ils se rendraient en fin de semaine. Il y avait encore trois jours de voyage pour y arriver, et Aliénor avait dit à ses suivantes qu’elle voulait y être pour la fête de sa sœur Pétronille. Hermance aimait beaucoup cette dernière : âgée de 7 ans, elle avait

Hermance, damoiselle d’Aliénor les cheveux blonds comme les blés, de grands yeux bleus espiègles et un rire qu’on entendait résonner où qu’elle se trouve.

Hermance revoyait la scène qui s’était déroulée à Poitiers, trois semaines plus tôt, lorsque le duc Guillaume avait annoncé son départ pour Bordeaux. La fillette s’était juchée sur les genoux de son père, et, le câlinant, avait demandé à voyager avec sa sœur.

Elle n’avait pas renoncé tant que son père n’avait pas cédé et, triomphante, s’était précipitée vers Aliénor pour lui annoncer qu’elles resteraient ensemble !

Hermance, qui était la dernière d’une famille nombreuse, avait immédiatement adopté cette petite damoiselle si gaie et, contrairement à d’autres jeunes filles de la suite d’Aliénor, ne la traitait pas comme un bébé.

Le bruit d’une cavalcade et de hurlements joyeux tira Hermance de ses pensées. Devant elle, dans la plaine, apparaissait la chasse : les chevaux poursuivaient un renard qu’Hermance voyait détaler, loin devant la meute. La jeune fille retint son souffle : pourvu que l’animal arrive à s’échapper ! Elle croisa

Un mystérieux visiteur les doigts, le regardant zigzaguer, essayer de semer chiens et cavaliers. De son promontoire, elle le vit traverser un ruisseau et s’engouffrer dans un fourré. Les chiens, ayant momentanément perdu sa trace dans l’eau, tournèrent en rond quelques précieuses minutes, et lorsqu’ils retrouvèrent la piste, de l’autre côté du gué, le renard avait eu le temps de disparaître. Hermance effectua quelques pas de danse pour célébrer cette victoire du renard, malgré un nouveau frisson qui venait de lui traverser le corps.

Elle mit sa main en visière sur son front : oui, parmi les chasseurs, c’était bien Aliénor qu’elle venait de reconnaître, ainsi que son propre frère Roland, à ses côtés. Non loin d’eux chevauchaient Foulques, le fils du comte d’Angoulême, ainsi qu’Olivier et Eudes des Marais, les deux frères qui étaient devenus ses proches amis. Hermance leur fit un grand signe du bras, sans savoir s’ils la verraient. C’est un des pages qui l’aperçut et prévint Eudes. Sans attendre, ce dernier répondit au signe d’Hermance et, lançant son cheval au galop, entreprit de la rejoindre, immédiatement suivi d’Olivier.

Hermance, damoiselle d’Aliénor

Hermance s’engagea sur un petit sentier de terre qui serpentait sur le flanc de la colline. Mais à mi-chemin, essoufflée, elle s’arrêta et s’assit sur un tronc d’arbre renversé.

« Mais que m’arrive-t-il ? D’habitude, je suis capable de marcher sans problème ! Je dois décidément être bien fatiguée », songea-t-elle. Elle se releva en voyant apparaître Eudes.

Alors, cette chasse ? J’ai l’impression que vous n’avez pas attrapé grand-chose ! le taquina-t-elle d’une voix rendue un peu croassante par son mal de gorge.

— Tu as vu ce coquin de goupil filer ? Nous étions pourtant tellement sûrs de le tenir !

Oui, je l’ai vu s’échapper et j’en étais bien heureuse ! Il était si beau, filant comme ça dans le pré.

Heureusement, nous ne revenons pas les mains complètement vides, intervint Olivier qui venait d’arriver à son tour.

Le jeune homme salua son amie d’un geste de la main amical, mais s’interrompit en la voyant frissonner.

Un mystérieux visiteur

— Hermance ? Vous allez bien ? Je pensais que vos joues rouges étaient dues à votre promenade, mais vous avez les yeux brillants et vous frissonnez.

Je ne me sens pas très bien, en effet, mais je pense que je suis juste épuisée par les événements des derniers jours. Cette marche va me faire du bien.

— Je ne suis pas médecin et je n’ai pas les compétences d’Eulalie, mais je ne suis pas vraiment d’accord, la contredit Olivier. Allez, venez, nous allons rentrer au château avec vous.

Sur ces mots, le trio d’amis prit le chemin du retour. Les deux frères étaient descendus de cheval et marchaient à côté d’Hermance. Cette dernière

les écoutait raconter leurs prises de la matinée, mais leurs paroles lui parvenaient comme dans un brouillard de plus en plus épais. Sa gorge la brûlait, chaque déglutition lui semblait plus difficile que la précédente. Elle finit par se tourner vers Olivier et, portant la main à sa tête, réussit à peine à balbutier :

Olivier… Je crois que je vais m’évanou…

Hermance, damoiselle d’Aliénor

Tout devint noir autour d’elle. Olivier eut juste le temps de la rattraper dans ses bras. Il avait lâché la bride de son cheval et lança à Eudes : Tiens-le, pour qu’il ne s’enfuie pas ! J’avais raison, elle est malade. Je vais essayer de la hisser sur mon cheval, mais je ne suis pas sûr d’y arriver seul.

Attends, proposa Eudes, allons attacher les chevaux à l’arbre là-bas, comme ça, j’aurai les mains libres pour t’aider.

Il fallut plusieurs tentatives aux garçons pour réussir à installer Hermance. Finalement, Olivier parvint à monter sur son cheval et à la récupérer dans ses bras. Elle avait un peu repris ses esprits et les aida comme elle put, avant de reperdre connaissance contre l’épaule de son ami.

Olivier avançait doucement, mais il suggéra à Eudes de prendre de l’avance pour prévenir Eulalie. Même à travers ses vêtements, il sentait qu’Hermance était brûlante contre lui. Sans se le faire dire deux fois, Eudes partit au trot. Arrivé au château, il laissa son cheval à un palefrenier, et grimpa quatre à quatre les marches qui menaient aux chambrées des

Un mystérieux visiteur suivantes. Il tambourina à la porte et demanda à une servante de chercher Eulalie.

La jeune fille arriva quelques instants plus tard, les cheveux en bataille, et l’air affairé.

Qu’y a-t-il, Eudes ? Nous sommes occup…

C’est Hermance, l’interrompit Eudes. Nous l’avons rencontrée en revenant de la chasse et elle s’est évanouie en marchant. Elle n’a pas l’air bien du tout. Olivier est en train de la ramener.

Elle aussi ? s’exclama Eulalie. Mais c’est une hécatombe ! Depuis ce matin, quatre des suivantes d’Aliénor ont été frappées du même mal, elles se plaignent d’une forte chaleur, puis de froid intense. Elles ont mal à la gorge, ont des plaques écarlates sur la peau et sont brûlantes2.

Que devons-nous faire d’Hermance ?

Apportez-la ici, il faut la coucher et la couvrir chaudement.

2. Les symptômes que décrit Eulalie sont ceux de la scarlatine. C’est une maladie que les médecins ne commenceront à comprendre qu’au xvie siècle (un médecin de Naples en parle pour la première fois dans un livre en 1553), même si elle a toujours existé. À l’époque d’Hermance, on ne savait pas ce que c’était et on pensait à un mauvais sort. Depuis le xixe siècle, il existe des médicaments pour soigner la scarlatine.

Hermance, damoiselle d’Aliénor

Hochant la tête, Eudes rebroussa chemin et repartit en courant à la rencontre d’Olivier. En chemin, il entendit des cris provenant de la chambre de Pétronille, mais n’y prêta pas attention. Il arriva dans la cour du château au moment où Olivier y entrait. Eudes, tiens, attrape-la pour que je descende, lança son aîné.

Eudes récupéra Hermance, chancela sous son poids avant d’aider Olivier à la reprendre dans ses bras. Tandis qu’ils se dirigeaient vers l’étage, Eudes mit rapidement Olivier au courant de l’épidémie qui semblait frapper le château.

— Penses-tu que ce soit une malédiction ? s’inquiéta Eudes, qui avait déjà entendu des colporteurs parler de ces maux qui frappaient tout un château ou un village sans raison.

Je ne sais pas, répondit Olivier en serrant les dents sous le poids de sa charge. Mais je serai rassuré quand Eulalie et le médecin du duc auront pris Hermance en charge.

L’atmosphère dans la chambre des suivantes était survoltée : les servantes passaient d’un lit à l’autre

Un mystérieux visiteur pour remettre en place la couverture de l’une qui avait glissé, donner un verre de vin à l’autre, passer un linge mouillé sur le visage d’une troisième…

Eulalie dirigeait tout ce petit monde telle une cheffe de guerre, donnant des ordres brefs et efficaces.

Eulalie, que pouvons-nous faire ? demanda Olivier, après avoir posé Hermance sur son lit.

— Il faudrait aller récupérer des herbes dans ma malle. En l’ouvrant, vous trouverez un sac assez épais dans lequel il y a de la lavande et du romarin séchés.

Saurez-vous en reconnaître l’odeur ?

Bien sûr, affirma Olivier sans hésiter. Je vais te chercher ça pendant qu’Eudes t’aide ici !

Les heures qui suivirent furent éprouvantes.

Pétronille était atteinte du même mal, mais son état était beaucoup plus grave. Deux de ses suivantes, Brunehilde de Grande et Yseult de Rosde, qui partageaient sa chambre, étaient au plus mal également.

Pétronille délirait et Eulalie, qui avait accompagné le médecin dans sa chambre, murmura :

On pourrait croire qu’un esprit a pris possession de son corps, tant ce qu’elle dit est désordonné.

Hermance, damoiselle d’Aliénor

— C’est en effet le sentiment que j’ai, acquiesça le vieux médecin, impuissant face à ce mal mystérieux.

Je vais faire dire des prières pour chasser ces mauvais esprits ! s’écria Aliénor lorsqu’elle eut le compte rendu du médecin, le soir.

Elle-même se portait comme un charme, mais on ne comptait plus, dans le château, ceux qui avaient été terrassés. Nobles ou paysans étaient touchés sans distinction, et des chaumières jusqu’aux cuisines seigneuriales, on se demandait pourquoi ce mauvais sort s’abattait sur Bouteville.

Tard dans la soirée, alors qu’il ne tenait plus sur ses jambes, Eudes finit par être renvoyé par Eulalie, qui lui conseilla d’aller prendre quelques heures de repos. Nous aurons fort à faire demain, allez vous coucher, tous les deux ! avait-elle ordonné aux deux frères.

Éreintés, ils regagnèrent leur chambre et se couchèrent sans mot dire. Eudes se glissa sous l’édredon et eut juste le temps de se dire, avant de sombrer dans un profond sommeil, que sa gorge le grattait et qu’il avait un peu froid.

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