Guide d'olfactothérapie

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Guide d ’ OLFACTOTHÉRAPIE

Le pouvoir des parfums sur nos émotions

Préface de Jean-Charles Sommerard, écoparfumeur

sont

 Comment utiliser les huiles essentielles pour se sentir mieux ?

Dès la plus haute Antiquité, les matières premières odorantes, qui s’utilisent sous forme de matières brutes (résines, fleurs, plantes aromatiques), occupent une place de choix dans la vie des hommes. Bien avant de soigner ou de séduire, le parfum avait une vocation sacrée et religieuse. Issu du latin « per fumum », qui signifie « à l’aide de la fumée », il était en effet utilisé à l’origine pour communiquer avec les dieux.

Antiquité : les parfums du sacré

Prenant la forme d’huiles parfumées, les premières recettes de parfums sont recensées en Égypte, environ 5 000 ans avant JésusChrist. Ces parfums étaient utilisés pour induire certains états de conscience modifiée ou comme éléments de soin. Ils étaient considérés comme sacrés, comme une source de connaissance et de pouvoir entre les mains des prêtres. Dans les temples égyptiens, on trouvait une chambre aux parfums dans laquelle ils étaient entreposés et sortis tous les matins pour oindre les statues des dieux. Ils étaient utilisés lors des différentes étapes de la momification pour préparer les corps à passer dans le royaume des morts.

Puis peu à peu, l’usage profane du parfum se développe : les Égyptiens utilisent au quotidien des fragrances naturelles, notamment l’encens, ainsi que des onguents aux vertus thérapeutiques, tout en continuant à honorer leurs dieux par des offrandes parfumées.

Le parfum deux fois bon

Les Égyptiens utilisent notamment un parfum appelé kyphi, surnommé « deux fois bon », car utilisé à la fois pour ses vertus curatives et pour vénérer les divinités. Il se compose notamment de myrrhe, de raisin, de vin, de safran, de genièvre et de miel.

Dans la Grèce antique, les femmes et les hommes utilisent largement le parfum dans leur vie quotidienne, aussi bien civile que religieuse, tant pour l’hygiène du corps et la beauté que pour la célébration du culte. Ils lui confèrent un pouvoir religieux, mais aussi érotique.

Pour les Grecs, l’ambroisie est le parfum des dieux et leur confère leur immortalité.

Peu à peu, l’usage religieux des parfums s’étend vers une utilisation médicinale grâce aux prescriptions des médecins grecs. Hippocrate recommande, par exemple, des fumigations de sauge dans le traitement de certaines maladies. Il atteste également que les effluves de safran offrent un sommeil réparateur et permettent de faire de beaux rêves.

Les Romains, quant à eux, font un usage profane excessif du parfum, par exemple lors des banquets, nombreux à l’époque. Sous César, le culte du corps atteint son apogée, grâce notamment à la multiplication des thermes. Le bain, symbole de propreté corporelle, devient un rite essentiel associé au bien-être et au plaisir. Les Romaines utilisent des essences très variées pour leur chevelure ainsi que des masques de beauté à base d’onguents et de farine. Elles se parfument et se vêtissent de toilettes safranées.

Les civilisations chrétienne, musulmane et hébraïque manifestent elles aussi un vif intérêt et une grande sensibilité pour le parfum, bien souvent utilisé dans un espoir d’immortalité.

Moyen Âge : des parfums protecteurs et purifiants

Au Moyen Âge, on assiste avec la montée du christianisme à une régression de l’emploi profane des parfums au profit d’un usage purement religieux. Il faudra attendre les croisades, notamment en France, pour observer un regain d’intérêt pour les aromates et les senteurs.

L’époque médiévale est aussi marquée par la peur des épidémies, notamment la peste. Les parfums jouent alors un rôle de protection et ce, jusqu’à la fin du xixe siècle. Pour désinfecter les maisons, la population procède à des fumigations de bois odorants.

Au xiiie siècle, le bain devient un moment de bien-être, les parfums s’associent au plaisir charnel et les plantes protègent des épidémies.

Le thym, le serpolet et le fenouil sont utilisés pour chasser les mauvaises odeurs, notamment en période de peste.

En 1348, la grande peste noire frappe l’Europe et décime la population. Le risque de contagion par les mauvaises odeurs est désormais établi. Dès lors, l’odeur devient une menace : « Po osoient à l’air aler, ne de près ensemble parler, car leurs corrompues alaines, corrompoient les autres saines », nous dit à cet égard Guillaume de Machaut2.

2. Extrait de L. A. J. Michon, Documents inédits sur la grande peste de 1348.

Le parfum de l’éternelle jeunesse

En 1370, l’Eau de la Reine de Hongrie fait son apparition. Ce parfum à base de romarin, d’esprit de rose, de fleur d’oranger, d’extraits de citron et de menthe sert de remède contre les maladies. C’est d’ailleurs le plus ancien parfum à base d’alcool que l’on connaisse. Une légende raconte que cette eau, très prisée, aurait permis à Donna Isabella, reine de Hongrie, alors septuagénaire, de retrouver la jeunesse et la beauté de ses vingt ans pour séduire un jeune roi de Pologne.

Du xve au xviiie siècle, l’usage des bains se raréfie, à cause de la peur de l’eau liée aux épidémies. À la Renaissance, les parfums pallient souvent le manque d’hygiène corporelle. Les eaux aromatiques, telles que l’eau de romarin, de lavande ou de fleur d’oranger, sont très appréciées. Les parfums demeurent réputés pour leurs vertus purificatrices.

Du parfum voluptueux des Lumières au parfum soin d’aujourd’hui

Dès le début du xviiie siècle, le parfum occupe une place importante à la cour de Louis XV mais aussi dans la vie quotidienne. Un nouveau savoir-faire émerge avec la technique de l’enfleurage et le travail de l’écorce de bergamote. L’Eau de la Reine de Hongrie continue à faire des émules. « Elle est divine… Je m’en enivre tous les jours. Quand on y est accoutumé, on ne peut plus s’en passer. Je la trouve bonne contre la tristesse », dit alors à son sujet Mme de Sévigné3.

3. Lettres, 1726.

Les parfums deviennent des symboles de sensualité et de volupté. C’est à cette époque qu’apparaît l’eau de Cologne, dont la formule reste inchangée de nos jours. Cette eau, à base de bergamote, d’orange, de citron, de romarin, de néroli et de bigarade, aurait été créée par un certain Giovani Paolo Féminis, qui l’avait proposée avec succès à la faculté de médecine de Cologne. Appelée « eau admirable », elle était reconnue pour ses propriétés thérapeutiques.

Le vinaigre des quatre voleurs

Une légende raconte qu’en 1720, lors de la grande peste de Marseille, quatre voleurs détroussaient les cadres et pillaient leurs maisons. Ils se consacraient à leur sale besogne sans jamais contracter la maladie. À leur arrestation, l’heure du jugement venue, les quatre compères sont priés de dévoiler leur secret. Espérant échapper à la peine de mort, les bandits avouent se frictionner le corps d’un mélange à base de vinaigre et livrent leur recette. Baptisé dès lors « vinaigre des quatre voleurs », le mélange s’utilise depuis pour désinfecter.

À l’époque moderne, le parfum se démocratise pour devenir un objet social, une représentation de la mode et de l’identité. Il perd peu à peu son usage thérapeutique.

Aujourd’hui, alors que nous avions pratiquement oublié qu’un parfum est constitué de composants actifs, qui ont une influence concrète et vérifiée sur le métabolisme humain et sa chimie organique, le parfum soin revient sur le devant de la scène, grâce notamment à l’engouement pour l’aromathérapie. Véritable infirmier de l’âme, le parfum soin n’a maintenant pas fini de nous surprendre en touchant des cordes très sensibles de notre être.

Chemin de croix

Il y a quelques années, j’ai senti le parfum Relique d’Amour, de la maison Oriza L. Legrand, et j’ai eu un terrible choc émotionnel. Lorsque j’avais 5-6 ans, je vivais au Portugal avec ma grandmère maternelle qui m’aspergeait d’eau de Cologne à la rose tous les dimanches, comme ma petite sœur, avant d’aller à la messe. Le cloché le plus proche était à une demi-heure de marche. C’était alors mon chemin de croix : sentant la rose comme ma petite sœur, je me sentais très mal à l’aise face à ces hommes machistes qui faisaient le chemin à nos côtés.

Mais, dès lors que je rentrais dans l’église, j’étais sauvé par le doux parfum de la cire, de l’encens et par l’odeur du lys qui embaumait l’édifice. Ces notes m’apaisaient, me réconfortaient et m’enveloppaient. En quelques minutes, j’oubliais le parfum de la rose et reprenais confiance en moi.

En découvrant Relique d’Amour, je retournais – comme si c’était hier – dans cette église de ma toute petite enfance avec beaucoup de bonheur.

Antonio de Figueiredo, chasseur d’odeurs et créateur de la boutique Marie-Antoinette, 5 rue d’Ormesson, 75004 Paris.

De tout temps, l’odorat a été considéré comme un sens mystérieux. Aujourd’hui encore, on parle du pouvoir des odeurs, probablement parce que les connaissances scientifiques concernant l’olfaction sont récentes. Elles sont apparues progressivement au cours des soixante dernières années, grâce aux progrès de la recherche et notamment à l’avènement de l’électrophysiologie, de la biologie moléculaire, de la génétique, de l’imagerie cérébrale ou encore des neurosciences.

Qu’est-ce qu’une odeur ?

Avant même de s’intéresser aux mécanismes de l’odorat, il apparaît important de définir le mot odeur.

C’est une émanation de molécules volatiles odorantes produites par certains corps et perçue par notre système olfactif. Mais ce n’est pas tout… Le mot « odeur » désigne également la sensation que ces molécules créent. Bien évidemment, cette sensation varie d’un individu à l’autre, selon l’histoire personnelle et le souvenir lié à l’odeur, mais aussi selon le fonctionnement et l’état des organes olfactifs. À cet égard, il est intéressant de noter que la langue anglaise est plus précise : en effet, elle distingue la source de l’odeur, « odorant », de la sensation qu’elle provoque en nous, « odour ».

Les fabuleux mécanismes de l’odorat

Les femmes sont-elles plus sensibles aux odeurs que les hommes ?

Les travaux en olfaction humaine s’accordent souvent à rapporter que les femmes ont des capacités olfactives différentes de celles des hommes. Mais ce n’est pas tant sur la sensibilité olfactive (seuil de détection) que sur les traitements informatifs (reconnaissance, discrimination, dénomination) et affectifs (évaluation) des odeurs que les deux genres se distinguent.

Les femmes sont plus réactives que les hommes aux caractéristiques hédoniques des odeurs. Elles sont plus affirmées et extrêmes dans leurs jugements des odeurs désagréables4, en particulier en ce qui concerne les odeurs corporelles. Elles sont par ailleurs plus nombreuses à répondre (dans des questionnaires) que les odeurs leur évoquent des souvenirs émotionnels et provoquent des sentiments tels que le bien-être, la tristesse ou l’énergie5

Dans le cadre des interactions homme-femme, qu’il s’agisse ou non d’un rapport de séduction, les femmes attribuent un poids plus important aux odeurs de l’autre que les hommes, qui eux se déclarent plus visuels6

L’incroyable voyage des odeurs

Débute alors un processus complexe et fascinant… Les molécules odorantes présentes dans l’air ambiant arrivent dans notre nez. Ces dernières doivent être suffisamment volatiles pour pénétrer dans les profondeurs des fosses nasales (on parle de voie orthonasale).

4. Broman et Nordin, 2000 ; Olofsson et Nordin, 2004 ; Doty et al., 1981 ; Navarrete-Palacios et al., 2003 ; Ferdenzi, Schaal et Roberts, 2009.

5. Martin et al., 2001.

6. Herz et Inzlicht, 2002 ; Havlicek et al., 2008.

Les émotions entretiennent un dialogue avec notre corps, notre cerveau, notre environnement. Elles tissent la toile de nos états d’âme. Puissant magicien du souvenir, le parfum effectue un travail particulièrement intéressant sur nos émotions, car les odeurs nous permettent de changer de « fréquence » pour recréer une harmonie intérieure, de favoriser notre bien-être et même de nous rendre plus beaux.

Dans cet ouvrage, Sophie Macheteau vous propose de partir à la découverte de l’olfactothérapie :

Découvrir les 1 001 vies du parfum

Comprendre les fabuleux mécanismes de l’odorat

Identifier et comprendre nos émotions

Saisir le lien intime entre émotions et olfaction

Se sentir mieux grâce aux huiles essentielles

Se sentir mieux avec la beauté émotionnelle et les parfums de couleurs

Grâce aux recherches de l’auteur et aux interventions d’experts en aromathérapie, parfumerie ou psychiatrie, cet ouvrage offre au parfum de retrouver toute sa grandeur et sa vocation première : soigner le corps, l’esprit et l’âme !

« L’intérêt de cet ouvrage est de mettre en lumière l’impact du parfum "naturel" et "vivant" sur nos états d’être et états d’âme. C’est ce que Sophie Macheteau nous offre de réaliser et de comprendre avec cet ouvrage pratique, clair, précis et remarquablement documenté. »

MDS : RU0013

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