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Vendredi 24 octobre Respire Anatole, respire.

J’ai une boule de colère coincée dans la poitrine.

Demain, papa, maman et moi partons en Mongolie, un grand pays situé entre la Chine et la Russie sur la carte du monde accrochée dans nos toilettes. Et contrairement à ce que croit tout le monde, ce grand voyage ne me réjouit pas. J’aurais préféré aller aux États-Unis pour rencontrer des cow-boys en chair et en os.

Je me souviens bien du jour où mes parents m’ont annoncé cette mauvaise nouvelle. C’était un mardi, il y a cinq mois, le soir sacré où j’ai le droit de regarder un DVD de western avec mon papa, car il n’y a pas école le lendemain. Mais ce soir-là, maman, après avoir couché ma petite sœur Lucille, a éteint la télévision et s’est glissée entre papa et moi dans le sofa. Elle a posé une boîte métallique un peu rouillée devant nous, qu’elle a ouverte avec des gestes précautionneux, comme s’il s’agissait d’un trésor.

— Regarde Anatole, ce sont les photos de mon

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voyage en Mongolie. C’était il y a douze ans, j’étais partie avec deux amies étudiantes pour vivre pendant un mois avec des nomades.

Tu sais, je t’ai déjà parlé de ces éleveurs mongols qui se déplacent avec leur troupeau et leur famille, a-t-elle raconté en faisant défiler les images sous nos yeux.

Elle a ajouté avec les yeux brillants et de la joie dans la voix : — À l’époque, c’est un jeune Mongol étudiant en français qui nous avait accompagnées dans les steppes de son pays. Chaga, avec qui nous sommes restées en contact, mes copines et moi, est depuis devenu guide professionnel. Et figure-toi qu’il m’a invitée à revenir pendant les vacances de Toussaint. Il sait que je travaille dans une association de promotion du tourisme équitable et solidaire, et il a justement besoin de mes conseils pour monter sa propre agence de tourisme en collaboration avec des nomades.

Ton père et moi avons décidé d’y aller. Et comme tu as dix ans, tu es assez grand maintenant pour que nous t’emmenions.

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Ils ont précisé que ni ma petite sœur Lucille ni Max le chat ne feront partie de l’aventure : ils resteront chez papi et mamie. Et je n’aurai pas le droit d’emporter ma console de jeux portative. J’ai aussitôt compris que ce serait le total ennui !

Respire Anatole, respire.

Plus rien ne peut empêcher le départ. C’est le branle-bas de combat dans notre appartement.

Maman s’agite dans tous les sens pour préparer les affaires. Il ne faut rien oublier car il paraît que là-bas il n’y a pas d’hypermarché et il risque de faire froid, alors je me suis finalement décidé à remplir mon sac à dos tout neuf. Ma veste polaire, mon nouveau sous-pull, mon super blouson d’hiver et mon chapeau de cow-boy en cuir !

Je n’oublie pas non plus d’emballer ma console portative avec ma serviette de bain et glisse ce paquet au fond de mon sac à dos. Une fois sous ma couette, j’ai bien du mal à m’endormir. Ça va barder si les parents découvrent que je leur ai désobéi.

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Dimanche 26 octobre Nous sommes en transit à l’aéroport de Pékin.

Le premier vol de nuit a duré dix heures. Depuis que nous avons quitté notre immeuble, maman est excitée comme une puce, je crois qu’elle n’a pas réussi à fermer l’œil. Papa, lui, ne cesse de prendre des photos : c’est sa passion. Et moi, je fais bien attention à faire la moue devant eux.

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Même s’il faut bien avouer que c’était plutôt rigolo de regarder des films dans l’avion et à présent d’observer la foule dans le hall de l’aéroport. La plupart des voyageurs ont les yeux bridés car nous sommes en Asie.

Dans la queue pour le vol à destination d’Oulan-Bator, la capitale de la Mongolie, les gens sont habillés chaudement, ce qui laisse présager le pire, et certains ont le visage encore plus rond que les autres. « Ce sont des Mongols », me révèle papa. À peine installé dans l’avion, mon voisin situé de l’autre côté de l’allée, un jeune homme occidental à l’air sportif, me sourit et me dit en français :