Sommaire 6 La Terre, cette inconnue 8 Les premières découvertes 10 La conquête du Pacifique 12 L’Odyssée d’Ulysse 14 Les explorateurs de l’Antiquité 16 Les Vikings, écumeurs d’océan 18 Les explorateurs chinois 20 Marco Polo sur la route de la Soie 22 Ibn Battuta, le voyageur de l’Islam 24 Savoir lire le ciel, la terre et l’océan 26 La route des Indes 28 Cap sur le Nouveau Monde 30 Le tour du monde de Magellan 32 Exploration, colonisation, esclavage 34 L’or des Amériques 36 Dans l’enfer de la jungle amazonienne 38 L’Amérique du Nord, 40 Les scientifiques navigateurs 42 Les voyages du Beagle
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44 Arpenteurs du désert 46 Aux sources du Nil 48 Les explorateurs de l’Arctique 50 La course au pôle Sud 52 L’incroyable expédition de l’Endurance 54 Explorateurs du XXe siècle 56 À l’assaut des cimes 58 Voyage au centre de la Terre 60 Les mystères des profondeurs 62 Cousteau explore les océans 64 L’univers secret des abysses 66 La conquête du ciel 68 Cap sur les étoiles 70 De l’exploration à l’écologie 72 Territoires inconnus 74 Demain, la Terre 76 Nausicaá, le Centre national de la mer 77 Lexique 77 Index 80 Crédits photographiques
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La conquête du Pacifique Les ancêtres des Polynésiens, qui peuplent aujourd’hui les centaines d’îles éparpillées dans le Pacifique, vivaient en Asie du Sud-Est il y a environ 5 000 ans. Ils sont partis en pirogue vers l’est jusqu’aux terres les plus lointaines. Mais comment ont-ils surmonté tous les périls de la navigation dans le plus grand océan du monde ?
D’île en île Le peuplement du Pacifique a débuté aux environs de 3000 av. J.-C. Quittant l’archipel de Bismarck, près de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, les Polynésiens se sont dirigés vers l’est. Ils ont accosté les îles Salomon en 1500 av. J.-C., les Fidji vers 1240 av. J.-C, Tonga 100 ans plus tard, les Marquises en 200 av. J.-C, les îles de la Société (Polynésie) au début de notre ère et enfin l’île de Pâques vers 500 ap. J.-C. Puis ces explorateurs ont gagné Hawaï et probablement approché les côtes américaines. D’autres expéditions, parties des îles de la Société ont rejoint la Nouvelle-Zélande. Vers l’an 1000, tout le Pacifique était conquis. Ces premiers navigateurs n’avaient ni cartes, ni prévisions météorologiques, ni aucun moyen d’estimer leur vitesse ou leur cap si ce n’est leur connaissance des éléments naturels. Pour trouver leur route, ils se repéraient aux étoiles et au Soleil. Mais les risques étaient immenses de se perdre, de dériver avec les courants, de sombrer dans les tempêtes ou de ne pas rencontrer de terre où s’approvisionner en eau et en nourriture.
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600 av. J.-C. Selon l’historien grec Hérodote, le pharaon égyptien Nékao fait partir une flotte phénicienne de mer Rouge pour contourner la pointe de l’Afrique. Il faut trois ans aux navires pour regagner la Méditerranée en passant par le détroit de Gibraltar.
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Les ancêtres des Polynésiens ont navigué de Papouasie-NouvelleGuinée jusqu’à l’île de Pâques, colonisant en plusieurs siècles toutes les îles du Pacifique. Cette progression s’est effectuée d’ouest en est contrairement à ce pensait Thor Heyerdahl (voir encadré).
600 av. J.-C. Le philosophe grec Anaximandre aurait été le premier à tracer une carte représentant la totalité du monde de son temps. Cette carte figure une vaste terre entourée d’eau.
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Le génie maritime des Polynésiens La reconnaissance de terres nouvelles était le fait de quelques hommes, embarqués sur des navires légers et rapides. Puis le reste de la communauté suivait sur des bateaux plus grands. Les archéologues ont découvert des éléments en bois fossilisés qui leur ont permis d’imaginer à quoi ressemblaient ces navires construits avec de simples outils en os, en pierre ou en nacre. Ces larges embarcations, de style catamaran, étaient constituées de deux coques reliées par une plateforme sur laquelle se dressait une cabine. Elles étaient propulsées par des pagaies et une voile triangulaire en feuilles de palmier. Cent à deux cents personnes embarquaient sur ces navires perfectionnés qui transportaient également les plantes et les animaux domestiques nécessaires pour nourrir la communauté lors de son installation sur une nouvelle île.
La culture Lapita Apparue 2 000 ans av. J.-C., la culture Lapita (du nom d’un site archéologique découvert en NouvelleCalédonie) est caractérisée par des poteries décorées de motifs géométriques, de lignes en pointillés ou de représentations de visages humains. Les archéologues ont mis au jour des restes d’ustensiles dans toutes les îles de l’ouest du Pacifique jusqu’aux Samoa. Ils ont pu ainsi reconstituer le mode de vie d’alors. Ces peuples anciens habitaient dans des maisons sur pilotis. Ils pêchaient, cultivaient des fruits et des racines, élevaient des cochons et des volailles et possédaient des chiens.
L’EXPÉDITION DU KON-TIKI En avril 1947, le Norvégien Thor Heyerdahl embarque avec cinq amis et un perroquet sur le Kon-Tiki, un radeau en balsa. L’expédition quitte la côte péruvienne pour rejoindre les îles du Pacifique en se laissant porter par les courants et le vent. Thor Heyerdahl est en effet convaincu que le peuplement du Pacifique s’est fait à partir de l’Amérique. Mais au départ, le radeau doit se faire tracter sur 100 km au large avant d’atteindre des courants qui le poussent enfin vers l’ouest. Il est donc très impropable que le peuplement du Pacifique ait pu se faire dans ce sens. Le Kon-Tiki s’échouera finalement aux Tuamotu, après 101 journées de navigation.
340 av. J.-C. Pythéas de Marseille franchit le détroit de Gibraltar et découvre l’Irlande, l’Islande et les côtes de Norvège. Il y voit une mer “figée”, c’est-à-dire gelée, qu’il décrit dans De l’océan.
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331 av J.C. Alexandre le Grand, roi de Macédoine (nord-est de la Grèce actuelle), fonde à l’embouchure du Nil, en Égypte, la ville d’Alexandrie. Le phare, une tour de 135 m de haut, est édifié à l’entrée du port pour guider les marins. Il sera détruit en 1308 par un tremblement de terre.
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Savoir lire le ciel, la Terre et l’océan Pour se repérer, trouver leur route ou encore représenter leurs voyages sur une carte, les explorateurs ont utilisé des techniques de plus en plus perfectionnées. Elles ont été mises au point au cours des siècles par les Grecs, Romains, Arabes, Chinois, Indiens… Ces inventions, de la boussole à la carte de navigation, reflètent le génie humain !
LA BOUSSOLE Inventée au Ier siècle par les Chinois, la première boussole était constituée d’une cuillère en magnétite (roche aimantée) que l’on posait sur une plaque de bronze et qui tournait jusqu’à ce que le manche indique le nord magnétique*. Cet instrument a été perfectionné dix siècles plus tard pour être utilisé par les navigateurs.
LE COMPAS Les Vikings se guidaient sur la position des étoiles et du Soleil. Ils auraient été les premiers à concevoir un compas solaire, comme en témoigneraient les découvertes archéologiques au Groenland (voir p. 17). Ressemblant un peu à un cadran solaire, ce compas, utilisé le jour, consistait en un simple disque en bois gradué sur lequel on situait le nord en fonction de la direction des rayons du Soleil. La nuit, les Vikings se repéraient en suivant les étoiles.
LE KAMAL Cet instrument, inventé au Xe siècle par les Arabes pour se repérer dans le désert et en mer, a été par la suite adopté par les voyageurs indiens. C’était une planchette de bois, percée en son centre d’un trou dans lequel on passait une cordelette à nœuds. L’explorateur tenait la cordelette entre les dents et la planchette à bout de bras, en alignant ses deux bords entre l’horizon et l’étoile Polaire. Chaque nœud correspondait à un angle précis par rapport aux étoiles et permettait de déterminer la latitude*.
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1507 Tristan da Cunha commande une flotte chargée d’assurer la présence portugaise et de répandre la foi chrétienne en Afrique et en Asie. Il découvre dans l’Atlantique Sud l’archipel qui porte son nom.
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1511 Envoyé par Alfonso de Albuquerque pour découvrir l’Indonésie au bénéfice des Portugais, Antonio de Abreu accoste dans l’archipel des Moluques, les fameuses “Îles aux épices” où se cultive la noix de muscade. Il explore ensuite l’île de Timor.
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L’ASTROLABE Inventé par le Grec Hipparque au IIe siècle av. J.-C, cet instrument mesurait le mouvement du Soleil, de la Lune et des étoiles dans le ciel. Il était constitué d’un disque de laiton ou de bronze gradué sur lequel pivotait un bras appelé alidade. Le navigateur pointait l’alidade sur une étoile et lisait l’angle qu’elle formait avec l’horizon pour déterminer la latitude (voir DVD, chap. 1). Les Arabes l’ont manié dès le VIIe siècle, les navigateurs européens seulement à partir du XVIe siècle et l’ont abandonné deux siècles plus tard au profit du sextant.
LE PORTULAN Apparues au XIIIe siècle en Italie, ces cartes marines, dessinées à la main par les navigateurs, étaient des représentations sur un plan de zones marines où étaient notés le tracé des côtes et l’emplacement des ports. Les cartes étaient ensuite mises bout à bout et les explorateurs y indiquaient les trajets effectués. Les portulans ne prenaient pas en compte la déformation due à la forme sphérique de la Terre et donnaient donc une vision très approximative des océans et des continents.
LE BÂTON DE JACOB OU ARBALÈTE Inventé en 1342 par Levy ben Gerson, astronome et philosophe français, cet instrument fut utilisé par les navigateurs dès le XVe siècle pour mesurer la hauteur de l’étoile Polaire ou du Soleil au-dessus de l’horizon. On connaissait ainsi la latitude du point où l’on se trouvait. Il s’agissait d’une règle graduée sur laquelle coulissaient des repères appelés marteaux. Dos au Soleil, le navigateur alignait les marteaux avec l’astre et l’horizon, puis lisait sur la règle l’ombre portée.
L’OCTANT ET LE SEXTANT En 1594, l’Anglais John Davis invente l’octant, appelé aussi quartier de Davis, pour mesurer la latitude. Ce long bâton était équipé de miroirs qui concentraient les rayons du Soleil et d’une barre mobile qui mesurait l’angle de l’astre solaire avec l’horizon. Vers 1760, l’octant, comme l’arbalète, a été remplacé par le sextant. Cet instrument fonctionnait sur le même principe, mais par le jeu des miroirs, les image du Soleil et de l’horizon se superposaient, permettant ainsi un calcul plus précis.
1511 Le père franciscain espagnol Jeronimo de Aguilar fait naufrage au large du Yucatán, alors qu’il est en route vers Saint-Domingue. Avec un autre rescapé, il devient esclave d’un chef maya et Aguilar apprend la langue. Retrouvé par Cortés en 1519, il lui servira d’interprète.
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1513 L’Espagnol Ponce de Léon, gouverneur de Porto Rico, explore la mer des Caraïbes. Il atteint la Floride, une terre magnifique peuplée d’Indiens. En 1521, Ponce revient pour la coloniser, mais il meurt sous les flèches empoisonnées des Amérindiens hostiles.
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La course au pôle Sud
L’approche du Grand Sud Dès 1773, James Cook fait une première tentative d’approche des terres australes, mais il ne peut atteindre le continent. En 1840, Dumont d’Urville débarque sur un îlot au large de la terre Adélie (voir p. 41) et l’Américain Charles Wilkes repère de son bateau la côte qu’il nomme terre de Wilkes. Mais c’est James Clark Ross (voir p. 48), qui lance véritablement l’exploration antarctique. En 1841, il longe la banquise* avec l’Erebus et le Terror, conçus pour affronter les glaces. Il découvre une terre qu’il nomme Victoria en hommage à la reine d’Angleterre. Il poursuit sa route dans la mer de Ross et atteint une île sur laquelle se dressent deux volcans aussitôt nommé Erebus et Terror. Les navires sont par la suite bloqués par une immense barrière de glace, la barrière de Ross, et sont contraints de faire demi-tour. Jusqu’en 1843, Ross dirigera encore deux expéditions australes au cours desquelles il déterminera l’emplacement du pôle Sud magnétique*.
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1866 Le Britannique John Speke publie son Journal de la découverte de la source du Nil. Il y relate sa version du voyage, son refus d’adopter les coutumes locales, et sa vision de l’Afrique qui reflète la mentalité de la plupart des explorateurs anglais de l’époque.
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AMÉRIQUE DU SUD ANTARCTIQUE
PÔLE SUD
Erebus ETERR LIE ADÉ
océan Indien
océan Pacifique
NOUVELLEZÉLANDE
J. Cook, 1773 Dumont d’Urville, 1840 J. C. Ross, 1840 R. Scott et E. Shackleton, 1902
AUSTRALIE
« L’exploration polaire est la façon la plus pure et la plus solitaire de passer un mauvais moment », écrit Apsley Cherry Garrard, membre de la première expédition de Robert Scott. La conquête du pôle Sud a été une aventure semée de drames et de souffrance. Pourtant, pendant plus de deux siècles, des hommes ont tout tenté pour réaliser cet exploit.
océan Atlantique
E. Shackleton, 1908 R. Scott, 1911 R. Amundsen, 1911
Le premier hivernage En 1898, le lieutenant de marine belge Adrien de Gerlache embarque sur le trois-mâts Belgica avec le Norvégien Roald Amundsen et l’Américain Frederick Cook, deux futurs pionniers de l’Arctique (voir p. 49), le Roumain Racovitza (voir p. 58), ainsi qu’un équipage composé de Norvégiens, Belges, Polonais, et un Français. La Belgica atteint l’Antarctique en juillet 1898. Les hommes cartographient les terres et observent les baleines et les manchots. En mars, le navire est immobilisé dans le pack* et doit passer l’hiver dans la nuit polaire. Les marins survivent grâce aux phoques et aux manchots que Cook les oblige à manger pour éviter le scorbut*. Quand le printemps arrive, ils parviennent à dégager un canal jusqu’aux eaux libres et rentrent en Europe. Deux hommes sont morts dans l’aventure et deux autres sont devenus fous…
1873 La chasse à la baleine se développe. Pour repérer les mammifères marins, la première expédition allemande en Antarctique est confiée à Edward Dallman à bord du Grönland. Il découvre le détroit de Bismarck et longe la péninsule Antarctique.
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La recherche du pôle Ces explorations prouvent qu’une grande terre couvre la région antarctique et qu’il faudra atteindre le pôle Sud géographique* à pied ! Les Américains Robert Scott et Ernest Shackleton partent en 1902 sur le Discovery et passent l’hiver près de la plateforme de Ross. Les deux hommes la survolent dans un ballon à hydrogène embarqué à bord. En novembre, accompagnés d’Edward Wilson, ils partent deux mois en traîneaux vers le pôle, mais affamés, doivent renoncer. Le Discovery rentre en 1904. Quatre ans plus tard, Shackleton dirige une autre expédition à bord du Nimrod emmenant des poneys pour tirer les traîneaux. Il parvient à environ 180 km du pôle. Les vivres manquent, les poneys meurent d’épuisement et de froid, le blizzard fait rage et la température corporelle des hommes descend à 34 °C ! « La fin est proche. Nous ne tiendrons que trois jours tout au plus », écrit Shackleton qui fait demi-tour pour rejoindre le Nimrod.
Les difficultés sont immenses. Il faut se protéger du froid extrême, se déplacer sur la glace, porter sa nourriture, et s’orienter dans la tempête.
1873 Envoyé par la Société royale de géographie pour porter secours à Livingstone, le militaire de la marine anglaise Cameron arrive après la mort du célèbre explorateur. Il explore les rives du lac Tanganyika, les affluents du fleuve Congo et traverse toute l’Afrique équatoriale.
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Arrivé au pôle Sud, Admundsen plante le drapeau norvégien. Il laisse aussi du matériel et une lettre pour Scott : « Avec mes meilleurs vœux, je vous souhaite un bon retour » !
Tragédie sur la glace Scott, accompagné de Wilson, veut être le premier à planter son drapeau au pôle Sud et part sur le Terra Nova. Le 4 janvier 1911, il installe son campement, une simple cabane de bois, au cap Evans. Mais un autre concurrent entre dans la course : Roald Amundsen avec le Fram, navire utilisé par Nansen en Arctique (voir p. 49). Le Norvégien débarque dans la baie des Baleines le 14 janvier 1911. Les équipes rivales hivernent dans leurs camps respectifs. En juin 1911, Wilson et trois hommes sortent étudier les manchots par – 60 °C. Lorsqu’ils rentrent au bout de quarante-six jours, il faut découper leurs vêtements gelés sur eux ! Amundsen et quatre compagnons se lancent vers le pôle le 20 octobre 1911. Ils franchissent une montagne et un glacier plein de crevasses. Le 14 décembre, ils atteignent enfin l’extrémité sud du monde… Mais Scott, qui a entamé son périple début décembre, vit sa dernière aventure. Le 16 janvier 1912, il arrive avec quatre hommes au pôle. La déception est immense en voyant qu’Amundsen l’a précédé. Le retour sera terrible. Deux hommes succombent en route. Le 21 mars, les trois rescapés sont immobilisés par le blizzard et meurent sous leur tente. On ne retrouvera leurs corps et les notes de Scott qu’en novembre…
1874 L’officier de marine français Félix du Temple construit un aéroplane alimenté par une chaudière à vapeur miniature. Il serait parvenu à le faire décoller en le faisant glisser sur un plan incliné pour prendre son envol.
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L’univers secret des abysses Les abysses représentent plus de 60 % de la surface des océans. Pourtant, aujourd’hui encore, à peine 2 % des grands fonds océaniques ont été explorés et moins de 10 % cartographiés… On en sait moins sur les abîmes sous-marins que sur la surface de la Lune !
PREMIÈRES PLONGÉES PROFONDES Les Américains William Beebe et Otis Barton construisent une bathysphère de 1,34 m de diamètre dans laquelle ils embarquent le 15 août 1934. L’engin est descendu dans l’eau accroché à un câble jusqu’à 904 m de fond au large des Bermudes. C’est un record ! En 1948, la bathysphère FNRS 2 conçue par Auguste Piccard (voir encadré) est testée à vide à 1 380 m au large de Dakar ; mais le submersible est accidenté au cours du remorquage. Le FNRS 3 est plus résistant et plonge avec deux passagers à 4 000 m en 1954. Piccard a également commencé en 1953 la construction du Trieste avec le Musée maritime de Trieste, en Italie. À son bord, le père et le fils, Jacques, plongent à 3 000 m de fond.
UN RECORD INÉGALÉ
LA SAGA DES PICCARD Avec ses petites lunettes rondes et sa chevelure ébouriffée, Auguste Piccard inspire le personnage du professeur Tournesol, héros des aventures de Tintin dessinées par Hergé ! Ce physicien suisse né en 1884 est à la fois un savant, un inventeur et un explorateur. Il construit le FNRS 1, un ballon avec lequel il vole en 1932 à 16 201 m d’altitude, devenant ainsi le premier homme dans la stratosphère ! Il se penche ensuite sur la fabrication de bathyscaphes, concevant successivement le FNRS 2, puis le Trieste. Son fils, Jacques, pilote le Trieste en 1960 lors de la plongée la plus profonde du monde. Il travaille à la construction d’engins d’exploration sous-marine. En 1969, il est à bord du sous-marin Ben Franklin qui suit le trajet du Gulf Stream, un courant qui traverse l’Atlantique Nord. Bertrand, son fils, poursuit la tradition familiale : ce médecin effectue le premier tour du monde en ballon sans escale en 1999 !
16 novembre 1928 L’Australien Sir Hubert Wilkins décolle à bord de son avion Lockheed Vega de l’île Deception. Il parcourt 1 000 km vers le sud et devient le premier homme à survoler le continent antarctique.
Le Trieste, acheté en 1957 par la Marine américaine, est modifié pour être envoyé à 11 000 m. Le 22 janvier 1960, Jacques Piccard et l’Américain Don Walsh plongent dans la fosse des Mariannes, à l’est des Philippines. Après quatre heures de descente, ils atteignent le point le plus profond du globe, à 10 916 m de fond ! Cet exploit n’a pas été renouvelé depuis… À travers les hublots, les deux hommes aperçoivent un poisson, apportant la preuve que la vie existe au plus profond des abysses. La même année, le sous-marin français Archimède atteint 9 500 m au fond de la fosse des Kouriles, au large du Japon. Jusqu’en 1985, il effectuera une centaine de plongées et permettra l’étude scientifique des océans entre 5 000 et 8 000 m.
29 novembre 1929 L’aviateur américain Richard Byrd parvient à survoler le pôle Sud. Au cours de sa vie, il participera à onze expéditions en Antarctique dont certaines pour la Marine américaine.
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LES GRANDES EXPÉDITIONS SCIENTIFIQUES L’expédition FAMOUS (French American Mid Ocean Undersea Survey), qui se déroule entre 1971 et 1974, permet aux scientifiques d’étudier le fond de l’Atlantique avec l’Alvin et le Nautile. En 1977, près des Galápagos, l’équipage de l’Alvin repère à 2 500 m de fond des sources d’eau chaude, dites hydrothermales, autour desquelles se développe une vie sous-marine foisonnante. En 1985, la mission franco-japonaise KAIKO étudie les failles et les volcans abyssaux au large du Japon. Mais ces campagnes océanographiques coûtent cher. En 2008, le MBARI, institut américain, installe une station d’observation à 900 m de fond. Non habitée, elle est alimentée en énergie et pilotée depuis la surface. Les chercheurs peuvent actionner ses caméras et enregistrer de nombreuses données pour mieux connaître le milieu abyssal.
LES SOUS-MARINS D’EXPLORATION MODERNES À partir des années 1960, les gros bathyscaphes sont abandonnés pour des submersibles plus petits, faciles à transporter sur un bateau. L’Alvin, sous-marin américain construit en 1964, descend à 4 500 m avec trois personnes à bord. Depuis 1984, l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) utilise le Nautile qui atteint 6 000 m. Les autres sous-marins d’exploration profonde appartiennent à la Russie et au Japon. Ils sont utilisés ainsi que des robots télécommandés depuis la surface pour des expéditions scientifiques ou pour le repérage d’épaves de bateaux ou d’avions. Enfin, ils peuvent effectuer des réparations sur les installations profondes, comme en 2010, lors de la marée noire provoquée par un incendie sur une plateforme pétrolière dans le Golfe du Mexique.
L’EXPLORATION DU TITANIC Dans la nuit du 14 avril 1912, le paquebot Titanic avec 3 500 passagers à bord heurte un iceberg au large de Terre-Neuve, dans l’Atlantique nord. Il sombre en moins de trois heures. Le naufrage fait 1 500 victimes. Soixante-treize ans plus tard, en 1985, l’épave est retrouvée à 3 780 m de fond par une équipe dirigée par l’archéologue américain Robert Ballard. Les années suivantes, l’Alvin puis le Nautile effectuent des repérages sur le site. Plusieurs expéditions sont organisées pour fouiller l’épave et 10 000 objets environ (vaisselle, bijoux…) sont remontés. En 2001 et en 2005, le réalisateur du film Titanic, James Cameron, plonge sur l’épave pour produire deux documentaires, Les Fantômes du Titanic et Les derniers Mystères du Titanic.
21 mai 1932 Cinq ans après Charles Lindbergh, l’Américaine Amelia Earhart est la première femme à exécuter un vol transatlantique en solitaire sans escale. Elle décolle de Terre-Neuve et atterrit en Irlande après 15 heures de vol. Elle disparaît en mer à bord de son avion en 1937.
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1934 Le mystère des sources du Nil est enfin résolu lorsque l’explorateur allemand Burckhart Waldecker découvre, au Burundi, à 2 145 m d’altitude un mince filet d’eau qui serait la source la plus lointaine du Nil Blanc, principal affluent du fleuve mythique.
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Territoires inconnus Il reste sur notre planète des déserts, des forêts et des grottes à explorer, des sommets vierges à escalader. Le monde des abysses conserve son mystère et la conquête de l’espace vient à peine de commencer. La science aussi, de la recherche sur les espèces aux mystères de l’univers, sera riche en découvertes au cours du XXIe siècle.
La fin de la Terra incognita ? Toutes les terres émergées du globe sont maintenant cartographiées et en permanence sous l’œil des satellites. Mais il reste des lieux qui échappent encore à l’observation humaine. Depuis une dizaine d’années, des équipes russes et ukrainiennes rivalisent pour atteindre le point le plus profond sous la surface de la Terre dans le gouffre de Voronja (État de Géorgie, Caucase). Le 26 août 2007, une expédition est parvenue à - 2 190 m ! Les spéléologues avaient passé près de 2 semaines dans la grotte, par une température n’excédant pas 3 °C, dans la boue et l’humidité pour chercher des puits leur permettant de descendre toujours plus loin.
Les Indiens d’Amazonie, comme ces Yanomami, vivent des ressources de la forêt. La déforestation menace leur mode de vie et leur culture.
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1986 L’Américain Georges Steinmetz survole pendant dix ans l’Afrique en parapente motorisé pour prendre des photos, entre 100 et 1 000 m d’altitude, des lieux les plus sauvages et inaccessibles du continent. Aujourd’hui, il survole tous les déserts du monde.
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De nombreuses cavernes restent encore inexplorées. Elles racontent l’histoire géologique de notre planète et abritent souvent des espèces inconnues, des vestiges archéologiques ou des fossiles d’animaux disparus.
Tribus inconnues Aujourd’hui encore, en Amazonie, la plus grande forêt du monde, vivent des peuples qui n’ont jamais rencontré le monde extérieur, sauf lors d’altercations violentes avec les chercheurs d’or ou les exploitants forestiers, les Indiens les recevant par des volées de flèches et ceux-ci rétorquant avec leurs fusils… L’ethnologue brésilien Sidney Possuelo, qui est entré en 1972 à la Fondation brésilienne pour les Indiens (FUNAI), a patiemment suivi la trace de ces tribus isolées. Il a mené des dizaines d’expéditions à leur recherche afin d’établir un premier contact pacifique et gagner leur confiance en leur garantissant l’usage de leurs terres. Son engagement lui a valu de perdre son travail en 2006, mais il continue à mener son action. Il a reçu de nombreuses récompenses dont celle du “héros de la planète” en 1998 (prix des enfants du journal américain Times) et celle du “héros de l’année” en 2001 par les Nations unies.
Juillet 1989-mars 1990 L’expédition Transantarctica est la première traversée du continent austral sans assistance mécanique. L’Américain Will Steger, le Français Jean-Louis Étienne et quatre explorateurs venant de Chine, du Japon, d’URSS et de Grande-Bretagne ont marché 6 300 km avec des traîneaux.
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Le monde du vivant Les scientifiques tentent de répertorier de nouvelles espèces, redoutant qu’elles ne disparaissent avant même d’être identifiées. En 2009, une équipe anglo-américaine a exploré le cratère du volcan Bosavi, en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Ce lieu a évolué isolé du reste du monde depuis la dernière éruption il y a 200 000 ans. Dans ce “monde perdu”, large de 3 km et envahi par la jungle, on a trouvé de nombreuses espèces inconnues, dont un rat géant de 80 cm de long ! Les formes de vie découvertes près des sources d’eau chaudes abyssales supportent des températures de plus de 80 °C alors que des espèces vivant aux pôles survivent malgré un gel permanent. Quant à l’étude des micro-organismes, elle en est encore à ses balbutiements. On a observé jusqu’à 20 000 microbes différents dans un seul litre d’eau de mer ! Les caractéristiques extraordinaires de ces êtres vivants pourraient faire penser que la vie extraterrestre dans des conditions extrêmes est possible… Les chercheurs explorent les montagnes et les volcans dans les régions isolées, comme ici, le mont Roraima au Venezuela. Ils y découvrent de nombreuses espèces d’animaux et de plantes totalement nouvelles pour la science.
Ultime frontière : l’espace Le 3 juin 2010, dans une base installée en Russie, six hommes s’apprêtent à vivre une expérience exceptionnelle. Ils disent au revoir à leurs proches avant de pénétrer dans un module spatial dont la porte est aussitôt scellée. Ils vont y séjourner 520 jours, le temps pour une navette d’atteindre la planète Mars, d’y séjourner un mois et de regagner la Terre. Mais ils resteront au sol ! En effet, ce projet des agences spatiales européenne et russe appelé “Mars 500” doit simuler les conditions d’un vol sur Mars. Les astronautes (trois Russes, un Chinois, un Italien et un Français) vont devoir supporter l’isolement, la vie en communauté et accomplir les tâches prévues lors d’une mission sur Mars. Leur habitacle est entièrement autonome en nourriture et en équipement. Seule une urgence médicale vitale pourrait les obliger à sortir avant la date prévue du 5 novembre 2011. Le véritable vol vers Mars, lui, devrait avoir lieu vers 2030…
EXPLORATION DE L’UNIVERS Si, depuis l’Antiquité, la conception que l’homme a du monde a profondément changé, il s’interroge aujourd’hui sur son origine. Pour parvenir à explorer l’Univers, il faut comprendre quelles sont les forces qui l’animent. Le 29 avril 2010, à Genève, les chercheurs du Centre européen pour la recherche nucléaire ont recréé dans le plus grand accélérateur de particules du monde les conditions qui régnaient quelques micros secondes après le Big Bang, au moment de l’expansion de l’Univers il y a 13,7 milliards d’années ! Ensuite sont apparus les étoiles, les galaxies, le Soleil, la Terre et la vie… Ces avancées de l’exploration aux confins de la matière et des origines ouvrent de nouveaux horizons à l’humanité.
1995 L’anthropologue américain Johan Reinhard découvre une momie à 6 310 m d’altitude sur le mont Ampato, au Pérou. Ce montagnard a déjà passé quinze ans à escalader les plus hauts sommets des Andes à la recherche de site sacrés incas afin d’étudier et préserver ce patrimoine culturel exceptionnel.
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2001 - 2008 Le programme européen MAR-ECO étudie la faune profonde dans l’Atlantique Nord, entre l’Islande et les Açores (îles au large du Portugal) avec des robots sous-marins. Plus de 80 000 spécimens sont récoltés et plusieurs nouvelles espèces marines sont identifiées.
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