L'Europe, oui ! Mais sociale

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L’Europe, oui! Mais sociale


■ Sommaire ■ Le 1er mai 2004, 10 nouveaux Etats rejoindront l’Europe des 15

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■ L’Europe: entre désintérêt croissant et grande attente

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■ Le big bang

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■ Ni excès d’optimisme, ni exacerbation des craintes

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■ Un élargissement mal préparé

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■ Un projet de Constitution bien mal connu

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■ De la Convention à l’échec de la Conférence intergouvernementale

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■ La Convention, un minimum minimorum

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■ L’Europe doit se doter d’un gouvernement économique

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■ Quelle Europe sociale après l’élargissement?

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■ Des nouveaux Etats membres qu’il faut convaincre

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■ Un dialogue social qui cherche un second souffle

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HOMMES / FEMMES Les références aux personnes et fonctions au masculin visent naturellement aussi bien les hommes que les femmes.


■ L’Europe, oui! Mais sociale ■ Le 1er mai 2004, 10 nouveaux Etats rejoindront l’Europe des 15 L’espace de paix, dont la construction européenne a été la garante, couvrira alors la majeure partie du continent. Ce n’est pas rien! La guerre est source de misère, de destruction et de mort. Ici, seuls les plus âgés d’entre nous l’ont vécu dans leur chair. Mais elle reste le lot quotidien de millions d’hommes de par le monde. Y échapper reste une chance dont il faut savoir mesurer le prix. Face à la mondialisation de l’économie, l’élargissement va de surcroît donner à l’Europe la dimension qui devrait lui permettre de redevenir un acteur politique majeur sur la scène mondiale. Si rien ne peut être bâti sans la paix et une dimension qui dépasse celle des Etats nationaux, celles-ci ne sont toutefois pas suffisantes pour construire l’Europe que nous voulons: démocratique, où l’économique est au service du social, avec une sécurité sociale et des services publics forts, sans chômage et sans pauvreté. Cette Europe là reste à construire. Nous pouvons y contribuer. En envoyant le 13 juin au Parlement Européen – dont les pouvoirs devraient être élargis – des candidats partisans de l’Europe sociale. En renforçant la Confédération Européenne des Syndicats et en participant à toutes ses actions. En sensibilisant travailleurs et décideurs sur les enjeux du moment. Ils sont nombreux, dont un au moins dépend des autorités nationales: nous entendons que la libre-circulation des travailleurs de l’Europe élargie soit organisée de manière telle qu’elle évite un double écueil, détérioration des conditions générales de travail d’une part, absence de prise en compte des besoins humains et sociaux des nouveaux arrivants d’autre part. Les dix nouveaux adhérents ont un revenu par habitant inférieur aux quinze Etats de l’Europe actuelle. Ces pays doivent évidemment être aidés mais sans qu’il soit mis brutalement fin aux subventions accordées aux régions des Quinze, sous-développées ou confrontées à la désindustrialisation. L’Europe doit être dotée des moyens financiers nécessaires à cette fin.

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Pour tout ce qui concerne «le marché», les libéralisations, les privatisations, l’Europe décide à la majorité. Mais le moindre progrès social, la moindre mesure d’harmonisation fiscale exigent un vote unanime de tous les Etats membres. A 15, c’était déjà difficile. A 25, le blocage est assuré. C’est inadmissible. Faire changer cette règle déraisonnable reste pour nous une priorité. Sous la pression du mouvement syndical et de la gauche politique, le projet de Constitution issu de la Convention – qui n’a toujours pas été approuvé – a reconnu que le social fait partie intégrante du modèle européen. C’est bien, mais ça ne suffit pas En effet, les textes les plus généreux restent inopérants s’ils ne sont pas assortis d’objectifs clairs et d’instruments pour les atteindre. Un exemple: plutôt que d’affirmer le droit à un revenu décent, la pension et le salaire minimum devraient représenter un pourcentage déterminé du P.I.B. (le produit intérieur brut c’est-à-dire la richesse) de chaque Etat. Avec des millions d’alter-mondialistes, nous nous sommes opposés à l’A.G.C.S., l’Accord Général sur le Commerce des Services que voulait nous imposer l’Organisation Mondiale du Commerce. C’est avec la même détermination que nous nous opposerons au jumeau européen de l’A.G.C.S., le projet de directive Bolkestein. Ce projet menace les services publics (exemple parmi bien d’autres: l’Etat ne pourrait plus mener une politique de santé avec encadrement des honoraires, normes de personnel dans les hôpitaux, planification de l’appareillage médical lourd…). Il serait tout aussi dramatique pour les conditions de travail dans le privé, des entreprises établies dans (ou délocalisées vers) un pays à bas salaires pouvant étant autorisée à faire travailler dans un pays plus avancé aux conditions du pays d’origine. «Négocier quand c’est possible, se battre quand c’est nécessaire» est, depuis toujours la règle d’or de la FGTB Conquis de haute lutte, les droits de négociation et de grève sont à la base des modèles sociaux mis en place dans les différents Etats. Ces droits doivent être reconnus et développés de manière transnationale sur la totalité du territoire de l’Union. L’Europe sociale est à ce prix!

Rudy DE LEEUW Secrétaire Fédéral

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André MORDANT Président a.i.


■ L’Europe: entre désintérêt croissant et grande attente En juin 2004, auront lieu les 6èmes élections pour le Parlement européen. Mais le moins que l’on puisse dire, c’est que ces élections ne suscitent pas l’enthousiasme. Selon une enquête d’opinion commandée par la Commission européenne elle-même, moins d’un tiers des personnes interrogées sont dès à présent certaines de se rendre aux urnes pour les élections en juin prochain au sein des 15 Etats membres actuels. Plus de deux européens sur trois envisagent donc la possibilité de s’abstenir. Aux dernières élections de juin 1999 déjà, le taux d’abstention avait franchi la barre des 50%. Ils étaient moins de un sur trois aux premières élections de 1979. Les risques d’abstention touchent de manière encore plus aiguë les citoyens des 10 pays qui vont entrer dans l’UE en mai prochain. Alors que les élections de juin 2004 seront l’occasion d’envoyer pour la première fois des représentants nationaux au Parlement européen, ils ne sont que un sur quatre à être sûr d’aller voter! Bien sûr, il ne s’agit que de sondages, mais quand les résultats présentés sont si nets, il y a matière à réfléchir. Comment expliquer ce désintérêt pour la seule institution de l’Union élue au suffrage universel, alors que dans le même temps, l’enquête d’opinion montre que les personnes interrogées continuent à juger positivement la construction européenne, qu’elles souhaiteraient être mieux informées sur l’Europe et qu’elles en attendent des réponses concrètes à des problèmes graves? Quand on demande aux citoyens européens qu’elles doivent être les actions prioritaires de l’Union européenne, c’est la lutte contre le chômage qui vient en premier suivi en quatrième place par la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Le Parlement européen, une instance sans pouvoir? Deux exemples récents prouvent tout le contraire. L’un positif, l’autre négatif. Deux exemples en tout cas qui montrent toute l’importance d’aller voter en juin prochain. La Commission européenne a proposé début mars d’ouvrir à la concurrence d’ici le 1er janvier 2010 le transport ferroviaire des passagers international. Cette proposition qui rencontre l’opposition syndicale mais aussi l’opposition du Conseil des Ministres du transport et en particulier de trois Etats membres – Belgique, France, Luxembourg – a pu malheureusement se faire grâce à la pression exercée par le Parlement européen qui réclame quant à lui une libéralisation pour… 2008! Le 20 novembre 2003, le Parlement européen a rejeté la directive sur la libéralisation des ports. Ainsi s’achevait victorieusement le combat des dockers européens. Les dockers belges, à la pointe des actions, vont pouvoir maintenir leur statut social issu de la loi Major. Ainsi, la preuve était faite qu’une action concertée et déterminée des forces progressistes, syndicales et politiques, peut s’opposer aux mesures anti-sociales. La vigilance reste de mise. Ce qui est sorti par la porte peut rentrer par la fenêtre. La proposition de directive Bolkestein sur les services dans le marché intérieur mise actuellement sur la table par la Commission pourrait bien, si on n’y prend garde, aboutir par une autre voie à ce que le Parlement et le mouvement syndical avaient pourtant réussi à écarter.

■ Le big bang L’Union européenne est confrontée au défi de l’élargissement dont les conséquences apparaissent à maints égards sans commune mesure avec les étapes précédentes. Aucun élargissement n’a jusqu’à présent signifié un quasidoublement du nombre des Etats membres. Jamais un élargissement n’a impliqué une mise en présence de pays aux structures politiques, économiques et sociales si différentes, aux écarts de richesses si importants.

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Avec l’entrée de la Pologne, la Slovénie, la Tchéquie, la Hongrie, l’Estonie, la Slovaquie, la Lituanie, la Lettonie, Malte et Chypre, l’Europe comptera à partir du 1er mai 2004 une population de 454 millions qui passera à 485 millions avec l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie au 1er janvier 2007. Par contre, la richesse globale de l’Union européenne ne progressera que d’un vingtième. Statistiquement, l’adhésion des 10 pays provoquera une baisse de plus de 12% de la richesse par habitant. Pour donner une idée, il suffit de songer que le poids économique des 10 nouveaux Etats membres qui regroupent près de 75 millions de personnes équivaut au poids économique des Pays-Bas qui comptent cinq fois moins d’habitants. Impact des élargissements successifs 1958 1973 1981 1986 1995 2004

6 pays 9 pays 10 pays 12 pays 15 pays 10 pays

Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, France, Allemagne, Italie Danemark, Irlande et Royaume-Uni Grèce Espagne, Portugal Autriche, Suède, Finlande 10 nouveaux pays entreront officiellement dans l’Union européenne: la Pologne, la Slovénie, la Tchéquie, la Hongrie, l’Estonie, la Slovaquie, la Lituanie, la Lettonie, Malte et Chypre.

Des négociations sont encore en cours pour intégrer la Roumanie et la Bulgarie au 1er janvier 2007. Enfin, l’Union européenne devrait décider à la fin de l’année 2004 d’ouvrir des négociations d’adhésion avec la Turquie.

Elargissements successifs

UE 9

UE 12

■ PIB/hab ■ PIB ■ superficie ■ population

UE 15

UE 25

-20%

6

-10%

0%

10%

20%

30%

40%

50%


Poids respectif des 15 anciens et des 10 nouveaux Etats membres dans l’economie européenne

■ N 10 ■ UE 15

Tous les pays candidats ont actuellement un revenu par habitant inférieur à 75% de la moyenne actuelle de l’Europe des 15, à l’exception de Chypre, et sept d’entre eux n’atteignent pas 50%. Cette Europe élargie présentera une répartition des richesses nouvelle. Un premier groupe de pays composé des 15 Etats membres actuels constituera le club des prospères, à l’exception de l’Espagne, du Portugal et de la Grèce. Ces trois pays feront partie du groupe intermédiaire avec Chypre, Malte, la Slovénie et la République tchèque dont le revenu par habitant tourne autour des 75% de la moyenne de l’Europe à 25. Pologne, Estonie, Lituanie, Lettonie, Slovaquie, et Hongrie formeront le troisième groupe avec un revenu par habitant qui tourne autour des 45% de la moyenne de l’Europe des 25. Un quatrième groupe composé des deux pays dont la candidature a été retardée – Roumanie et Bulgarie – possèdera un revenu par habitant inférieur à 30% de la moyenne de l’Europe des 25.

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PIB/hab - UE 25 = 100 200

150

100

50

0 L

IE

DK

NL

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Impôt des sociétés: en route vers un taux zéro? En 2003, l’impôt des sociétés se situait en moyenne en dessous de la barre des 30%, il était encore de 32,4% en 1999. Depuis l’unification du marché intérieur au 1er janvier 1993, l’impôt des sociétés n’a pas arrêté de diminuer sous l’effet de la concurrence fiscale que se sont fait les Etats membres pour attirer les entreprises ou pour éviter les délocalisations. L’arrivée des 10 nouveaux Etats membres va amplifier inévitablement le phénomène. Plusieurs pays sont déjà sous la barre des 20% et le «record» irlandais avec un taux de 12,5% risque d’être largement dépassé. L’Estonie pratique déjà le taux 0%. Une grande partie du problème réside dans le maintien de la règle de l’unanimité pour les matières fiscales. Elle conduit inévitablement à un processus de décision extrêmement lent et difficile et à des marchandages qui peuvent carrément tourner au chantage. Pour atteindre le dernier accord sur la fiscalité de l’épargne, 14 Etats membres ont dû accepter la revendication de Silvio Berlusconi de revoir à la baisse les amendes que l’Italie s’était vue infliger pour dépassement des quotas laitiers. Ne cherchez pas le lien entre la fiscalité de l’épargne et les quotas laitiers: il n’y en a pas!

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■ Ni excès d’optimisme, ni exacerbation des craintes Trois risques majeurs sont couramment évoqués: des distorsions de concurrence, des menaces de délocalisation d’entreprises de l’Ouest vers l’Est et des vagues d’immigration dans le sens inverse. Ces risques seront d’autant plus grands que certains nouveaux Etats membres pourront chercher à pratiquer le dumping fiscal, social et environnemental. En pratiquant une forte concurrence fiscale sur l’impôt de sociétés, en jouant sur les faibles coûts de main-d’œuvre et des normes environnementales minimales, ces pays pourraient bénéficier des effets d’une politique agressive de dumping tous azimuts. Les coûts de la main-d’œuvre dans les futurs Etats membres représentent en moyenne un sixième de ceux que l’Europe des 15. Cependant, le fait que la productivité soit déjà à la moitié permet d’espérer un phénomène de rattrapage salarial rapide. Des gains de productivité importants devraient rapidement se traduire par des revendications salariales permettant de combler à terme le retard en matière de salaire. Il existe une crainte d’une immigration massive en provenance de l’Est. Des mesures transitoires pouvant aller jusqu’à 7 ans ont été prises pour l’application de la libre circulation des travailleurs. La composante «illégale» de l’immigration pourrait également jouer un rôle important. Certains évoquent aussi une crainte d’une fuite des cerveaux pour les nouveaux Etats membres. On verrait ainsi la main-d’œuvre hautement qualifiée, les gens diplômés des pays en voie d’adhésion partir vers l’Europe «occidentale». Lors des adhésions précédentes, comme celles de l’Espagne et du Portugal, on a pu constater non pas une augmentation mais une diminution de l’immigration de la part des nouveaux Etats membres vers les anciens. Ce phénomène va-t-il se reproduire ou bien les différences de système de protection sociale plus fortes entre les anciens Etats membres et les nouveaux lors de ce nouvel élargissement par rapport aux autres élargissement va-t-il modifier la donne? Selon la Commission européenne, l’immigration devrait se limiter à 200.000 personnes par an pour les cinq années à venir. Pour certains, ce chiffre est sous-estimé. Ce qui est certain, c’est qu’il ne faut verser ni dans le scénario catastrophe ni la jouer sur l’air de «tout «L’entreprise va très bien madame la marquise». La vérité, c’est que nombre de Depoortere à Mouscron est paramètres sont inconnus. L’adoption par exemple de la directive compétitive sur le marché chinois Bolkestein pourrait très bien provoquer une hausse considérable du phénomène des travailleurs intérimaires, des faux indépendants du textile, parce qu’elle a augmenté et des détachés en provenance des nouveaux Etats membres. fortement sa productivité grâce à l’innovation. Jouer toujours sur les coûts salariaux c’est un mécanisme infernal. Il faut jouer sur la technologie et l’augmentation de la productivité».

Enfin, la crainte demeure quant au coût de l’élargissement et du financement nécessaire pour assurer le rattrapage des nouveaux Etats membres. L’élargissement aura un coût. C’est évident. Mais celui-ci sera limité. Le problème actuel réside plutôt dans le refus de plusieurs pays d’assumer les conséquences financières de leurs actes politiques. Actuellement, le débat Philippe Busquin, Commissaire européen budgétaire ne porte pas sur l’augmentation des ressources à la recherche, dans financières de l’Union européenne mais sur sa diminution. Or, vouloir La Libre Belgique du réduire le budget européen à la veille de l’élargissement, comme l’ont 16 octobre 2003. demandé dernièrement l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Suède et l’Autriche, c’est tout simplement se lancer dans un immense défi en se coupant d’emblée tout moyen pour y arriver.

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Une solidarité syndicale difficile mais réelle La solidarité syndicale se construit tous les jours. Deux exemples récents tirés de l’industrie automobile nous montrent toute l'importance de tisser des liens forts qui puissent dépasser les simples slogans. En décembre 2000, la General Motors annonce sa volonté de supprimer 6.000 emplois et de fermer l'usine de Lutton (Royaume-Uni). L'usine Opel à Anvers est menacée de perdre 1.500 emplois. Directement, les syndicalistes des différentes implantations européennes qui siègent au Comité d’entreprise européen se réunissent et ensemble, avec la Fédération Européenne des Métallurgistes, établissent une stratégie commune appuyée par un jour d'action à travers l'Europe dans toutes les installations de GM en Europe. Face à cette détermination collective, GM accepte de négocier un plan qui maintient toutes les implantations, réduit les pertes d'emplois et les accompagne de mesures sociales. En octobre 2003, Ford annonce 3.000 licenciements dans son usine de Genk. La solidarité avec les syndicats des autres implantations du groupe en Europe se fait plus difficilement. Des raison technologiques expliquent en partie la difficulté à répartir les efforts sur l'ensemble des sites de Ford - la production de certains modèles n'est pas transférable d'un site à l'autre. Mais ces difficultés techniques ne sont malheureusement qu'une partie de la réponse. La solidarité a également moins bien jouée que dans le cas d'Opel. Cette solidarité s'est limitée à un accord indiquant que les autres syndicats refusaient d'augmenter leur production en cas d'action menée à Genk. Pas question donc d'affaiblir une action des travailleurs de Ford Genk. On aurait pu espérer une solidarité plus forte mais ce n'était déjà pas si mal. Ces deux exemples montrent en tout cas que la solidarité syndicale, aussi difficile soit-elle dans les cas d'urgence, produit des résultats concrets pour les travailleurs.

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■ Un élargissement mal préparé Le soutien de la population à l’élargissement est loin d’être massif. Au sein de l’Europe des 15, on constate à peine une majorité relative en faveur (47% pour, 36% contre et 18% sans opinion). En Belgique, par contre les tenants et opposants de l’élargissement se tiennent au coude à coude avec un légère avance pour les opposants (45% contre et 43% pour). Le tableau n’est pas plus enthousiaste du côté des populations des pays en voie d’adhésion. Les opinions publiques des pays candidats manifestent un désenchantement, voire une méfiance grandissante, à l’égard de l’adhésion. Les populations de ces pays craignent les effets d’une modernisation accélérée qui entraînerait une dégradation des conditions de vie et de travail. De même, les prolongations des périodes transitoires décidées dernièrement par plusieurs Etats membres actuels donnent une image négative. Ces citoyens ont l’impression d’être des citoyens de seconde Environnement et Protection des zone. consommateurs Les habitants de ces pays ne sont que 4 sur 10 à penser L’Union européenne est fort active dans le domaine de que leurs conditions de vie vont s’améliorer dans les cinq l’environnement: normes minimales de pollution, prochaines années. Seule une faible majorité (52%) de création d’un label écologique… citoyens des 10 pays en voie d’adhésion soutiennent l’entrée de leurs pays dans l’UE! C’est également l’Europe qui dans le monde industriel défend le plus le concept de développement durable et cherche à le traduire concrètement dans des accords comme le protocole de Kyoto qui vise à réduire les gaz à effets de serre.

Pour regagner la confiance des citoyens et des travailleurs, il faut développer un projet crédible. L’Europe doit combler son déficit démocratique et social si elle veut stopper le scepticisme croissant à son égard.

La crise de la dioxine a montré, si besoin en était encore, toute l’importance de la sécurité alimentaire en particulier et de la protection des consommateurs en général. L’Europe est relativement active dans ce domaine avec par exemple la sécurité des jouets, les clauses abusives dans les contrats, les virements transfrontaliers… Un exemple: une directive européenne de 1999 relative à certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation accorde aux consommateurs de l’UE les mêmes droits minimaux en cas de non-conformité d’un produit (ex. réparation, remplacement, remboursement). Ce texte constituait en soit déjà une amélioration par rapport à la situation existante. En effet, jusqu’à présent chaque fabricant déterminait lui-même la garantie qu’il comptait appliquer à ses articles. Désormais, le consommateur qui achètera, par exemple, un appareil électroménager disposera, conformément au texte européen, au moins d’une garantie de 2 ans. Toutefois, le gouvernement belge a décidé de façon tout à fait opportune d’aller un peu plus loin: le consommateur pourra introduire une action en garantie pour vices cachés même quand ce délai de 2 ans sera écoulé.

Avec six pays dans les années soixante, l’unanimité au sein de l’UE n’était pas toujours aisée à obtenir. Avec 15 Etats membres aujourd’hui, la décision est souvent difficile à prendre. Avec 25 pays demain, en attendant 27, 28 et plus… le moteur européen se grippera définitivement. L’élargissement de l’UE à 25 Etats membres pourrait se transformer en rêve pour ceux qui conçoivent l’Europe comme une simple zone de libre échange mais en cauchemar pour les autres. L’élargissement signifie-t-il le deuil d’une certaine idée de l’Europe? Beaucoup, dont la FGTB, avait soutenu l’idée de la nécessité de l’approfondissement, en préalable ou à la limite en parallèle avec l’élargissement. Cet approfondissement ne s’est pas produit.

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L’Europe, laboratoire pour une mondialisation maîtrisée Il y a souvent matière à critiquer l’Europe pour ses propositions de dérégulation et de libéralisation qui se font sans évaluation de l’impact sur l’emploi, sur l’environnement, sur la croissance économique, sur le social. De même, la position de l’Europe dans les négociations du GATS au sein de l’OMC appelle à de nombreuses critiques. Pourtant parfois, l’Europe montre aussi un autre visage et nous rappelle que même imparfaite, elle représente à l’échelle planétaire la seule force capable d’assurer une mondialisation maîtrisée. Quelques exemples. En 1998, l’OIT a établi une déclaration sur les normes fondamentales du travail: liberté d’association et droit de négociation; élimination du travail forcé; abolition effective du travail des enfants; élimination des discrimination en matière d’emploi. La mise en application de cette déclaration peut compter sur le mécanisme de contrôle qui existe dans la Charte de l’OIT. Même si l’on ne peut que déplorer le fait que la Commission européenne n’ait pas jusqu’à présent, concrétisé certains de ses engagements en intégrant systématiquement des clauses relatives aux normes fondamentales du travail dans tous les accords bilatéraux, elle a cependant pris quelques initiatives en se basant sur ces normes: • L’UE signe en 2000 avec 77 pays d’Afrique, Caraïbes et Pacifique (ACP) la Convention de Cotonou qui instaure une relation entre commerce et normes de travail. Les Pays ACP sont incités à élaborer un droit national du travail, à renforcer la législation existante, à montrer des programmes scolaires et de sensibilisation. • Le Système des Préférences Généralisées (SPG) permet à l’Union européenne d’accorder certains avantages spécifiques aux pays en développement pour leur permettre d’accéder plus facilement à son marché et accroître ainsi leurs exportations. En 2002, le système a été revu pour y inclure les normes fondamentales de l’OIT. Autrement dit, un pays s’engageant à respecter les droits fondamentaux du travail se voit accorder des avantages supplémentaires en termes de réduction des droits de douanes. • L’UE a décidé en 2001 d’ouvrir son marché – avec les exceptions du riz, des bananes et du sucre - aux exportations aux pays les plus pauvres sans droits de douanes ni quotas. C’est l’accord «Tout sauf les armes» qui concerne les pays les moins avancés (PMA).

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■ Un projet de Constitution mal connu Si plus de 3 citoyens sur 4 dans les 25 Etats membres disent soutenir l’idée d’une Constitution, rares sont les citoyens capables d’expliquer ce qu’il s’est passé entre février 2002 et décembre 2003 avec d’abord les travaux de la Convention pour l’avenir de l’Europe et ensuite la Conférence intergouvernementale. Et pourtant, durant tous ces mois, l’Europe a tenté de se doter d’une Constitution. C’est pour préparer les institutions européennes à l’élargissement que l’Union décida, en décembre 2001, de lancer une nouvelle procédure de révision de ses traités. C’est qu’aujourd’hui, l’Europe est régie par une multitude de traités successifs, depuis le texte fondateur signé à Rome en 1957, jusqu’au dernier texte signé à Nice, en passant par Luxembourg, Maastricht, Amsterdam et bien d’autres. Ces textes se sont empilés. Ils sont souvent incompréhensibles. Mais pas question cette fois de se lancer tout de suite dans une nouvelle négociation entre gouvernements. Le Traité de Nice, finalisé en décembre 2000, avait démontré avec tant de clarté l’impasse de la méthode intergouvernementale à répétition pour réformer valablement l’Union européenne (Maastricht en 1992, Amsterdam en 1997, Nice en 2000), que les gouvernements eux-mêmes décidèrent d’appliquer une autre méthode de travail. S’inspirant de l’expérience suivie pour la rédaction de la Charte des Droits Fondamentaux, ils décidèrent de reproduire le même schéma. La Convention était née, composée majoritairement de parlementaires. La Convention sur l’avenir de l’Union européenne a ainsi regroupé, entre février 2002 et juillet 2003, des représentants des gouvernements des Etats membres, des membres de la Commission européenne et du Parlement européen, des représentants des parlements nationaux, ainsi que des représentants des gouvernements et parlements des pays candidats. Le Comité économique et social européen ainsi que les partenaires sociaux, dont évidemment la Confédération Européenne des Syndicats, ont reçu un statut d’observateur avec droit de parole. Travaillant sur base du consensus, la Convention sur l’avenir de l’Europe a remis son projet d’un Traité instituant une Constitution pour l’Europe le18 juillet 2003.


■ De la Convention à l’échec de la Conférence intergouvernementale Une conférence intergouvernementale (CIG) a ensuite pris le relais avec comme mission de finaliser ce projet. Les diplomates ont repris les discussions à huis clos. Le temps de la transparence était bel et bien fini. Le Sommet européen de Bruxelles des 12-13 décembre 2003 devait finaliser la conférence intergouvernementale chargée d’approuver un projet de traité constitutionnel pour l’Europe. Les négociations ont échoué. L’échec du Sommet de Bruxelles n’est pas forcément mauvais en soi. Il valait mieux éviter la stratégie de l’accord à n’importe quel prix. Mais la conséquence, c’est que l’Europe s’élargira officiellement à 10 nouveaux Etats-membres le 1er mai 2004 avec les règles de fonctionnement du Traité de Nice, qui est une véritable usine à gaz institutionnelle. L’échec du Sommet ne signifie pas la fin des négociations. La santé et la sécurité des travailleurs Celles-ci vont devoir reprendre mais la situation est fort Depuis 1989, l'Europe a pris une série d'initiatives très importantes dans le confuse. Il n’y a aucune visibilité domaine de la protection et de la promotion du bien-être des travailleurs sur sur l’état de la discussion et sur le lieu de travail. un calendrier précis. L’Irlande En 1989, une première directive - peut-être la plus importante – a été approuvée: qui préside l’Union européenne elle concernait les prescriptions minimales à respecter en matière de santé au 1er semestre 2004 cherche et de sécurité au travail. à présenter un état des lieux qui puisse recueillir un consensus Cette directive cadre constitue la base de la stratégie de la Commission parmi tous les participants. Pour européenne concernant les orientations à suivre dans le domaine du bien-être. certains pays, la discussion doit Son approbation a nécessité l'extension du champ d'application de notre repartir des textes existants, législation en matière de santé et de sécurité au bien-être au travail, extension c’est-à-dire le texte de la qui a donné lieu à son tour à l'élaboration de la réglementation en matière Convention européenne et le d'ergonomie, de charge psychosociale due au travail et d'hygiène industrielle. texte proposé par la présidence Des services de prévention multidisciplinaires ont été créés, également dans italienne avant le Sommet le prolongement des dispositions de cette directive cadre. européen de Bruxelles. En effet, Celle-ci impose d'autre part aux Etats membres de garantir le droit à la pour ces pays, les discussions participation des travailleurs en ce qui concerne toute mesure relative au bien–souvent bilatérales et sans être au travail et ce dans toutes les entreprises, quelle qu'en soit la taille et la traces écrites– de Bruxelles ne nature. peuvent être considérés comme ayant donné un quelconque Cette directive cadre a été suivie par d'autres directives notamment concernant résultat. Pour d’autres pays, la protection des travailleurs contre les machines dangereuses, le travail sur comme le Royaume-Uni, les écran et la protection contre le bruit, les vibrations et les produits chimiques. discussions de Bruxelles lui ont L'une des directives les plus récentes règle la protection des travailleurs contre permis d’engranger certains l'amiante. acquis, dont le retour au vote à Cependant, nous devons rester critiques. l’unanimité dans certains domaines, et c’est sur cette Sous la pression d'une volonté croissante de libéralisation, les directives base qu’il faut reprendre les existantes sont de plus en plus rapidement soumises à révision et leurs négociations. dispositions deviennent de plus en plus vagues.

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■ La Convention, un minimum minimorum La FGTB s’est exprimée à plusieurs reprises sur les débats en cours, que cela soit pour les travaux de la Convention ou lors des négociations entre gouvernements en insistant sur les manquements graves des textes proposés. L’échec actuel de la CIG et l’incapacité des chefs d’Etat et de Gouvernement des 25 est principalement dû aux désaccords entre pays sur certaines réformes institutionnelles comme le mode de calcul ou la composition de la Commission. Tous les autres points sont relégués au second plan. Cette incertitude sur les négociations renforce cependant la FGTB dans sa conviction qu’il faut poursuivre nos revendications pour améliorer le projet de traité Constitutionnel tel qu’il résulte de la Convention sur d’autres points. Ceux qui veulent plus d’Europe ne peuvent rester les bras croisés dans une position passive espérant que la Convention ne sera pas détricotée. Il y a suffisamment de points qui ne nous plaisent pas pour réclamer des améliorations. Le contenu du projet de Constitution en matière de politique sociale est un catalogue de bonnes intentions sans capacité réelle d’action sur le plan européen. Il existe un écart manifeste entre l’ambition affichée dans le projet en ce qui concerne d’une part les valeurs et les objectifs de l’Union européenne (solidarité, justice et protection sociale, cohésion économique et sociale, lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale…) et d’autre part les instruments qu’elle se donne pour les atteindre. Le verrou de l’unanimité reste d’application pour le fiscal et certaines matières du social, les droits syndicaux transnationaux ne sont pas reconnus et aucune clause ne garantit la prise en compte obligatoire de la dimension sociale dans les décisions prises par l’Union, comme c’est par contre le cas en matière d’égalité entre les hommes et les femmes ou de respect de l’environnement. Les services d’intérêt général ont obtenu une base juridique mais cela n’équivaut pas d’emblée à un rééquilibrage entre la concurrence et l’intérêt général. Il n’y a pas de sécurité juridique pour le financement des services publics et il n’existe pas de volonté de développer le concept de service public mis en réseau transeuropéen. L’Europe n’a toujours pas de gouvernement économique. L’amélioration de la coordination économique au sein des douze pays de la zone Euro est très faible et ne permet pas de compenser le déficit actuel de coordination économique.

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Pendant 10 ans, la Commission européen laquelle seule la libéralisation du marché do et industrielle compétitive. La Commission nouvelle économie l’industrie des technolog pour compenser les pertes d’emplois da «dépassés»: construction navale, métallurg

Et pendant 10 ans, le mouvement syndi réclamant une «nouvelle» politique indust permettant entre autres de tenir compte d

L’adoption par la Commission d’une Commu dans une Europe élargie» a été le premier s face à une désindustrialisation réelle de l’habillement et du cuir se sont réjouis, un nouvelle politique à travers une autre Co même si leur fédération syndicale européen européens dégagés pour cette nouvelle emploie encore 3 millions de travailleurs Etats membres.

La mise en place début 2004 d’un «grou notamment les représentant des institutions sectoriels européens - chargé de discuter d de faciliter l’adaptation du secteur aux d décembre 2004, devrait permettre au mo série de décisions. Il s’agit non seulement d de la Communication de la Commission nécessaires à l'amélioration de la comp habillement – cuir et au renforcement de s

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Dans les points positifs, on détachera par contre les avancées dans une vision politique plus commune aux Etats membres de la politique extérieure, de la défense, de la politique d’immigration et d’asile. Ce qui ne signifie pas que le contenu des orientations décidées en commun nous agrée toujours pour autant. Même si ces thèmes «vivent» moins dans le monde syndical que les thèmes sociaux ou économiques, il n’y a pas besoin d’indiquer leur importance, un an après l’aveu d’impuissance de l’Europe a parlé d’une seule voix avant, pendant et après la guerre en Irak. Positives aussi les simplifications apportées au fonctionnement institutionnel… mais on peut aussi légitimement se demander si les réformes apportées seront suffisantes pour faire fonctionner l’Europe à 25. La question mérite d’autant plus d’être posée que les réformes n’interviendront qu’en 2009. En entendant cette date et à partir du 1er mai 2004, l’Europe devra fonctionner à 25 avec les règles actuelles qui démontrent déjà leurs difficultés à faire avancer la machine européenne avec 15 Etats membres! de) politique industrielle européenne?

nne a défendu la vision "idéologique" selon onnerait à l’Union une structure économique n comptait d’autre part sur le miracle de la gies de l’information et de la communication ans les «vieux» secteurs industriels jugés gie, textile, habillement, cuir, chaussure, etc.

cal européen a combattu cette vision en trielle européenne, cohérente et articulée, des spécificités sectorielles.

unication en 2002 sur la «Politique industrielle signe d’une nouvelle approche européenne e l’Union. Et les travailleurs du textile, de an plus tard, de la concrétisation de cette ommunication plus spécifique à leur filière nne a regretté l’absence de moyens concrets politique industrielle dans un secteur qui dans l’Union européenne élargie aux 25

Le constat étant posé, nous savons aussi qu’un texte est toujours le résultat d’un compromis. C’est vrai pour toute négociation. C’est peut-être encore plus vrai sur le plan européen où les divergences de vision sur l’avenir de l’Europe sont criantes. C’est pourquoi souvent les points négatifs, comme les points positifs, sont la plupart du temps accompagnés de sérieux bémols. C’est pourquoi aussi le texte que l’on nous promettait court et aisément lisible ne respecte pas ces principes. Dès le départ, la FGTB avait indiqué que l’élargissement de l’Europe devait s’accompagner d’un approfondissement de son projet politique si nous voulions éviter que l’Europe ne se transforme en un grand marché sans encadrement social et politique et environnemental. L’Europe risque sinon de se diluer dans un ensemble mou, sans cohésion, sans ambition politique. Un groupe de pays doit prendre des initiatives pour aller de l’avant. Ces initiatives seraient bien entendu ouvertes à tous les Etats membres, anciens et nouveaux, qui voudraient y participer. Il ne s’agit pas de créer une Europe à plusieurs vitesses mais bien de permettre à l’Europe d’avancer en laissant à chacun le choix de sa vitesse.

pe sectoriel de haut niveau» - réunissant s européennes et les interlocuteurs sociaux des initiatives prioritaires à formuler en vue défis de la fin des accords multi-fibres en ouvement syndical de peser sur toute une de mettre en œuvre les principaux éléments n, mais également d’autres dispositions pétitivité structurelle de la filière textile – son emploi.

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■ L’Europe doit se doter d’un gouvernement économique Sans nier l’importance d’une politique de défense européenne, domaine le plus avancé à l’heure actuelle en matière d’ «avant-garde» européenne autour de quelques pays (dont la Belgique), nous voulons aussi privilégier d’éventuels coopérations renforcées dans «nos» domaines sociaux, économiques et fiscaux. Dans ce cadre, les discussions ont également été relancées sur l’idée d’avancer plus vite à plusieurs Etats membres de l’Union européenne selon la philosophie «aucun Etat membre ne peut être obligé à aller plus loin qu’il ne le souhaite, mais à l’inverse, celui qui ne veut pas aller plus loin, ne doit pas être en mesure d’empêcher les autres de le faire». C’est en respectant ce principe que l’Europe a pu avancer. Que l’on pense seulement à l’euro. S’il avait fallu attendre l’unanimité de tous les Etats membres, nous en serions encore à compter en francs belges. L’Europe a créé une Union monétaire avec l’euro mais ne l’a pas contrebalancée par une Union économique. L’Europe a une monnaie commune mais n’a pas de politique économique commune. Chaque Etat membre prend ses décisions sans s’inquiéter des conséquences pour les autres. Il n’y a, en dehors des discours, aucune volonté réelle de coordonner les politiques économiques nationales. Résultat: avec un marché qui comprend plus de consommateurs que les Etats-Unis, l’Europe en est réduite à attendre une reprise de la croissance américaine pour relancer sa propre économie, incapable qu’elle est de compter sur ses propres forces pour relancer la machine.

Le groupe de Doorn Les différences de coûts salariaux qui variaient déjà dans l’Europe à 15 dans un rapport de 1 à 3 vont s’accroître pour atteindre un rapport de 1 à 10 après l’élargissement et même un rapport de 1 à… 20 après l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie. Cependant les coûts de la main-d’œuvre sont fortement liés à la productivité du travail. De faibles coûts de la main-d’œuvre par salarié sont associés à des niveaux moins élevés de productivité du travail. Et vice versa. Ce qui réduit fortement les écarts. De toute manière, c’est pour répondre à ses pressions sur les salaires que le mouvement syndical construit des réseaux de coordination qui vise à éviter le dumping salarial en respectant un ligne d’orientation salariale basée sur la formule «inflation + productivité». A cet égard, les syndicats belges FGTB et CSC ont fait œuvre pionnière en créant dès 1997 un groupe de travail avec nos collègues hollandais, allemands et luxembourgeois qui a donné naissance à la déclaration de Doorn en 1998. Ce groupe vise à suivre une politique salariale commune pour éviter toute concurrence salariale entre les travailleurs des différents pays, à échanger les informations et s’expliquer mutuellement les évolutions conventionnelles. Ce groupe de Doorn travaille en toute transparence avec la CES qui possède également son comité de coordination regroupant l’ensemble des confédérations de la CES. D’autres initiatives existent aussi, notamment au sein des fédérations européennes sectorielles pour coordonner les négociations collectives.

La zone euro pourrait constituer un bon exemple pour renforcer la gouvernance économique, l’harmonisation fiscale, le budget. Si on veut que les 12 pays de la zone euro serve d’antichambre de l’Europe politique et non le simple aboutissement du marché unique, il faut que cette zone institue un véritable gouvernement économique avant que l’élargissement de ce groupe aux nouveaux Etats membres d’ici deux ans ne provoque la même paralysie que celle que nous connaissions aujourd’hui au niveau de l’ensemble de l’UE. L’approfondissement de la zone euro doit se faire avant son élargissement!

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Pour nous, l'Union européenne ne peut – dans sa version actuelle – être l'objectif à atteindre. En effet, l'Europe demeure incapable de donner une réponse rapide et cohérente au ralentissement de la croissance économique et reste sans pilote pour la mettre sur la voie de la croissance durable, du plein l'emploi et d'un emploi de qualité. L'Union monétaire se caractérise par l'absence d'un socle économique et, a fortiori, d'un socle social suffisant. Il n'y a pas de réponse européenne aux nombreuses restructurations, même d'entreprises performantes qui licencient des milliers de travailleurs. Il n'y a toujours pas de progrès satisfaisant dans le domaine de l'harmonisation fiscale. Certains voudraient faire de l’Union une vaste zone de libre-échange avec un maximum de dérégulation, le moins de solidarité possible, le maximum de concurrence fiscale et de contraintes souples.

Les Services publics Quand on parle de services publics en Europe, c’est trop souvent pour parler de libéralisation, dérégulation, pertes d’emplois. Pourtant, l’Europe commence aussi à reconnaître les services publics – appelés services d’intérêt général dans le langage européen – comme un élément essentiel du modèle social européen. Les missions des services publics sont aujourd’hui admises et un cadre juridique pourrait bientôt être reconnu. Ce cadre obligerait les Etats membres à garantir l’existence, l’accès et le financement des services publics. Il ne faut cependant pas crier victoire trop vite. Beaucoup de divergences subsistent sur les notions d’aides d’Etat licites et l’instauration d’un cadre juridique ne dit encore rien sur la façon dont on va l’utiliser. Beaucoup dépendra du contenu qui sera injecté dans ce cadre. L’évolution actuelle, bien que trop frileuse et insuffisante, est donc globalement positive pour les services publics mais la partie est loin d’être gagnée. Les forces politiques et syndicales qui ont uni leurs efforts pour arriver à ces résultats ne peuvent pas baisser les bras comme le démontre la proposition de directive européenne relative aux services dans le marché intérieur.

Les marchés publics respecteront des critères sociaux et environnementaux

Le 29 janvier 2004, le Parlement européen a approuvé les directives «marchés publics» qui permettent de tenir compte des critères environnementaux et sociaux lors d’une adjudication, à condition que ces critères soient directement liés à la nature du marché. On peut regretter que les critères ne soient pas suffisamment clairs et que la conditionnalité posée amènera inévitablement à des interprétations divergentes. Il va donc falloir se battre pour clarifier ces points mais c’est néanmoins une avancée pour laquelle les forces progressistes ont dû se battre longuement.

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■ Quelle Europe sociale après l’élargissement? L’Europe sociale patiemment construite depuis quelques années et qui fait figure de petit poucet à côté de l’Europe politique, économique… va-t-elle résister à l’élargissement? Pourra-t-on assister, avec les 10 nouveaux pays, au relatif processus de convergence sociale constaté lors de l’adhésion de la Grèce, de l’Espagne et du Portugal? L’Union européenne a construit à petit pas une ébauche d’Europe sociale à travers différents processus, comme la stratégie européenne pour l’emploi, la méthode ouverte de coordination en matière de pauvreté et d’inclusion, d’une part, et des pensions de l’autre, début de coordination en matière de soins de santé… Ces nouvelles méthodes de travail ont l’avantage d’aborder au niveau européen des questions autrefois taboues comme l’emploi ou certains pans de la sécurité sociale. Mais elles ont également un revers de la médaille. Elles risquent de supplanter progressivement la méthode législative, voire conventionnelle. Elle pourrait réduire l’Europe sociale à un processus mené à la discrétion des Gouvernements sans caractère juridiquement contraignant, sans contrôle et sans implication des interlocuteurs sociaux. Si ces nouvelles méthodes s’ajoutent aux autres instruments pour faire progresser l’Europe sociale, tant mieux. Mais, là encore, le rôle du mouvement syndical sera essentiel pour assurer que ces processus iront dans la bonne direction. Pour cela, il faudra mieux les structurer et mieux les encadrer démocratiquement. Bien sûr, les systèmes de protection sociale sont d’abord et avant tout des problématiques nationales mais il n’en reste pas moins “Je m’inquiète du glissement vrai que l’Europe bouscule ces systèmes et que la meilleure du niveau de décision. Les grandes manière d’assurer leurs fonctions d’assurance et de décisions politiques sont prises au plus haut solidarité sur le plan national est de ne pas en rejeter niveau, à l’occasion des grands sommets. toute tentative de transfert vers le niveau européen. L’Europe n’est pas destinée à se substituer aux Etats Par contre, la préparation de ces sommets et leur membres en matière de protection sociale mais traduction en des décisions concrètes et réelles sont elle doit fournir un cadre qui permette à ces laissées à des groupes de travail anonymes, systèmes de fonctionner. Ce cadre doit permettre sans responsabilité politique. Il n’y a donc plus de d’assurer les développements nécessaires sans justification, ni de débat politique. (…) De nos jours, devoir s’en remettre aux lois du marché. on travaille de plus en plus sur la base de ‘best practices’ et de L’approbation de normes sociales minimales en constitue une pierre angulaire. En définissant modèles de convergence. C’est positif, car de cette façon, ces normes en un certain pourcentage de la tout le monde regarde dans la même direction. Mais cette façon richesse nationale, on permettrait aux pays avec de travailler pose aussi des problèmes de légitimité. une faible protection sociale d’améliorer leur Plus personne ne sait vers qui se tourner au niveau situation tout en consolidant celle des pays européen. Pour les partenaires sociaux, bénéficiant déjà d’un système de protection sociale c’est mortel". élevée. Ce débat est d’autant plus difficile qu’il n’oppose pas Paul Windey, Président du Conseil National tant les conservateurs et les progressistes mais bien les du Travail, dans le journal «De Tijd» progressistes entre eux. Certains veulent protéger le social du 2 mars 2004 au niveau européen, d’autres au niveau national. La difficulté à promouvoir l’Europe sociale de manière plus marquée durera autant que cette scission durera.

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■ Des nouveaux Etats membres qu’il faut convaincre Sur les 10 nouveaux Etats membres, huit sont d’anciens satellites de l’Union soviétique. Leur transition d’une économie planifiée vers une économie de marché s’est accompagnée d’une longue période de difficultés. La plupart de économies ont dû attendre la fin des années 90 pour retrouver leur niveau de 1989. Les inégalités, le chômage et la pauvreté se sont fortement accrus. A partir de la chute du mur de Berlin, ces pays ont reformé leur système de protection sociale en même temps qu’ils libéralisaient l’économie. Ces réformes se sont fait pour la plupart de ces 8 pays, sur base des modèles prônés par la Banque Mondiale, le FMI et l’OCDE. L’Union européenne a joué malheureusement en retrait dans cette transition et l’on se retrouve maintenant avec des systèmes parfois éloignés de ce que l’on peut nommer le modèle social européen. Les systèmes de retraite se sont organisés sur base d’un régime public de base par répartition de faibles montants ouverts à tous et des deux régimes prônés par capitalisation, l’un obligatoire, l’autre laissé à l’initiative personnelle. Les soins de santé ont été partiellement privatisés et les coûts ont sensiblement augmenté. Responsabilité sociale des entreprises: Défis, limites, mais aussi… opportunités pour les syndicats Dans les débats européens actuels sur «la responsabilité sociale des entreprises», le mouvement syndical a clairement fait savoir qu’en aucun cas, ce nouveau «concept» à la mode ne pouvait se substituer à la négociation collective ni à la législation sociale - en d’autres termes, pas question de privatisation des droits sociaux – ni, enfin, à l’inclusion d’une dimension sociale forte dans le commerce mondial. Cela étant, les codes de conduite et plus encore les accords-cadres signés entre interlocuteurs sociaux, les lignes directrices de l’OCDE, la déclaration de l’OIT, etc, peuvent constituer un «levier» pour obtenir la présence de l’organisation syndicale dans l’entreprise. Un exemple concret: à Paris, il y a trois ans, en réunion du Comité d’entreprise européen (CoEE) de la division vêtements de Sara Lee, les représentants syndicaux, avec la Fédération Syndicale Européenne du Textile, de l’Habillement et du Cuir, ont interpellé le groupe sur sa politique sociale et environnementale, en demandant une copie du code de conduite. Bien entendu, s’agissant d’un group américain (125.000 emplois dans le monde), il n’y avait aucune référence aux droits syndicaux ou à la liberté de négociation. Le CoEE a donc réagi une première fois pour que ces préoccupations soient intégrées. Un an plus tard, en nouvelle réunion du CoEE, nouvelle interpellation syndicale. Mais cette fois sur la vérification de la mise en œuvre dudit code. Et, face aux premiers problèmes relevés par les représentants syndicaux dans un pays du Maghreb, la direction européenne de Sara Lee a proposé qu’une délégation conjointe du CoEE se rende dans ce pays où le management local avait une attitude «antisyndicale». La force de la chaîne de solidarité syndicale se mesure au maillon le plus faible. En s’appuyant sur la notion de responsabilité sociale des entreprises, l'un de ces maillons a pu être renforcé, avec résultats concrets pour les travailleurs de ce pays.

Au total, l’UE à 25 va connaître une diversité accrue des systèmes de protection sociale telle que les fondements du modèle social européen risquent d’être ébranlés. En effet, malgré les différences nationales, on reconnaît dans l’Union européenne actuelle à 15, plusieurs caractéristiques comme le rôle des interlocuteurs sociaux, le rôle de régulation sociale de l’Etat et un système de protection sociale important. Or, dans les critères d’adhésion, l’acquis commu-nautaire relatif aux matières sociales était fort limité: égalité de traitement entre les hommes et les femmes, non-discrimination en matière de sécurité sociale à l’égard des migrants, santésécurité au travail, dialogue social… Ce qui est en deçà de ce qui avait été demandé à la Grèce, à l’Espagne et au Portugal. L’accès à un niveau satisfaisant de protection sociale avait été, à l’époque, considéré comme un moyen de stabiliser la démocratie.

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■ Un dialogue social qui cherche un second souffle Outre les systèmes de protection sociale, l’élargissement va également avoir de fortes conséquences sur le dialogue social européen. Dans les nouveaux Etats membres, priorité a été donné au dialogue tripartite entre les syndicats, les employeurs et le Gouvernement. Le dialogue social bipartite autonome demeure quasi inexistant. Le dialogue social manque d’assise au niveau des secteurs et des entreprises. Contrairement à la plupart de 15 pays actuels, la majorité des salariés ne sont pas couverts par la négociation collective dans les futurs Etats membres où 4 salariés sur 10 sont aux mieux concernés par une convention collective. Et souvent le taux est inférieur comme en Lituanie où il atteint à peine 10%. En outre, les interlocuteurs sociaux souffrent encore d’un manque de représentativité. Malgré l’appui important de leurs homologues des 15 Etats membres actuels, tant les organisations syndicales que patronales connaissent des problèmes. Le taux moyen de syndicalisation étant en 2001, de 26% en moyenne (non pondérée) pour les 8 futurs Etats membres d’Europe centrale et orientale contre 44% dans les 15 Etats membres actuels. Dans des pays comme la Hongrie, la Lituanie, l’Estonie et la Pologne on est en dessous de la barre des 20%. L’implantation syndicale s’avère particulièrement difficile dans les nouvelles entreprises, notamment dans les filiales d’entreprises-mère situées dans l’Union européenne des 15. Malgré ces difficultés, le problème du dialogue social dans les nouvelles entreprises ne réside pas tant dans les syndicats que dans les organisations des employeurs. Ceux-ci constituent le maillon faible du dialogue social. Le taux d’affiliation moyen auprès de ces organisations se situe autour des 30 à 40%. Pour compliquer le tout, la représentation patronale est souvent morcelée avec des cas extrêmes comme la Hongrie qui compte 9 organisations nationales. Cette situation conduit ces organisations à privilégier le rôle de représentation et de lobbying par rapport au rôle de législateur social à travers la négociation collective. La faiblesse du dialogue social entraîne des pratiques en matière de conditions de travail (temps de travail, santé, sécurité, travail intérimaire, travail temporaire, faux indépendants) qui conduisent, faute de réactions, à des situations de dumping qui pourraient même s’aggraver si l’Europe devait accepter les propositions faites par la Commission en matière de services au sein du marché intérieur (voir encadré). Tout cela aura également des conséquences sur un dialogue social européen déjà mis en difficulté ces dernières années. Après la conclusion de trois accords-cadre (congé parental en 1996, temps partiel en 1997 et contrat à durée déterminée en 1999), le dialogue social s’est grippé. Les négociations sur le travail intérimaire ont échoué en 2000 et depuis lors le lobbying puissant de certaines confédérations nationales d’employeurs, comme le CBI britannique, menace de créer des brèches importantes sur le principe d’égalité de traitement. En 2002, les interlocuteurs sociaux ont passé un accord-cadre «volontaire» sur le télétravail, c’est-à-dire sans pression d’une initiative de la Commission. Mais le caractère volontaire a vite été traduit par les employeurs comme synonyme d’absence de toute transposition via une convention collective. Ce qui fait planer un doute sur la portée des accords dits «volontaires», doute qui hypothèque la négociation engagée sur cette base depuis 2003 sur le stress. De même, l’accord sur un cadre d’action en matière de formation et d’apprentissage tout au long de la vie adopté en 2002 et qui introduit un concept de «dialogue social soft» a été de faible portée.

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L’exemple le plus clair sur cette dérive du dialogue social est certainement le texte de compromis atteint lorsqu’il s’est agi d’aborder le problème des restructurations. La faiblesse du cadre d’orientation auquel les interlocuteurs sociaux européens sont parvenus était telle que les instances de la Confédération Européenne des Syndicats se sont contentées d’en prendre acte sans l’avaliser et ont demandé de poursuivre les travaux dans la perspective de l’élargissement. Comme on le voit la tâche sera difficile et l’élargissement, s’il ne viendra pas modifier fondamentalement une situation déjà difficile, ne fera rien non plus pour la faciliter. C’est donc au renforcement de ce modèle social que nous devons continuer à œuvrer par tous les moyens. A tous les niveaux. Comme citoyen, en votant aux élections pour le Parlement européen pour apporter un maximum de voix au camp des partisans d’une Europe sociale forte. Comme syndicaliste, en travaillant à la consolidation et au renforcement de ce modèle social européen en devenir.

Le Commissaire Bolkestein propose une Europe à 25 néo-libérale La Commission européenne a présenté, à l’initiative de Frits Bolkestein, le 13 janvier 2004, une proposition de directive relative aux services dans le marché intérieur. Pour le Commissaire libéral Bolkestein, il s’agit de supprimer les obstacles administratifs qui entravent le développement des activités de services et l’achèvement du marché intérieur. Cela se traduit en pratique par une dérégulation généralisée de toutes les activités de services! Les conséquences seront catastrophiques pour chacun d’entre nous: • Mise en cause la sécurité sociale dans de nombreux Etats membres; • Incitation à mettre en place des pratiques de dumping social, fiscal et environnemental à grande échelle; • Pressions sur les acquis sociaux: rémunération, durée du travail, flexibilité accrue; • Transformation de la santé, l’éducation, la culture et l’audiovisuel en de simples marchandises soumises aux lois du marché; • Menaces contre la qualité des services publics. Ce projet de directive n’est donc ni plus ni moins qu’une remise en cause fondamentale du modèle social européen. Pour mettre en place le marché intérieur des services, la directive pose deux principes: d’une part, la suppression des autorisations et exigences jugées inutiles et, d’autre part, le principe du pays d’origine. Premièrement, la directive veut interdire tous les obstacles en tout genre (agrément, enregistrement, garantie financière) qui ne sont pas justifiés par une raison impérieuse d’intérêt général et qui constitueraient un frein à l’établissement d’une entreprise sur le territoire d’un Etat membre. Les pouvoirs publics se trouvent ainsi dépossédés des moyens d’action leur permettant d’assurer un équilibre nécessaire entre développement économique et progrès social. Deuxièmement, le principe du pays d’origine signifie qu’un prestataire de service est exclusivement soumis à la loi du pays où il s’établit et non à la loi du pays où il fournit le service. On se trouve ainsi en présence d’une incitation légale à délocaliser vers le pays où les exigences fiscales, sociales et environnementales sont les plus faibles et d’y créer des entreprises «boites aux lettres» qui, à partir de leur siège social, pourront essaimer sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne en toute légalité. Il en résultera une pression terrible sur les pays dont les standards sociaux, fiscaux et environnementaux protègent davantage l’intérêt général.

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Le détachement représente un cas exemplaire. Il s’agit de la possibilité pour les entreprises de services de détacher des travailleurs dans un pays de l’Union pour y travailler temporairement. Par exemple, une entreprise de construction polonaise qui vient construire le gros œuvre d’un immeuble à Bruxelles avec ses ouvriers polonais. Une directive réglemente déjà cette pratique et impose, dans notre exemple, que l’entreprise polonaise fasse une déclaration auprès des services d’inspection belges, qu’elle ait un représentant en Belgique et que les travailleurs polonais soient soumis aux conditions de travail en vigueur en Belgique: salaire horaire, durée du travail, documents sociaux… Dans la pratique, les services d’inspection sont déjà dépassés par l’ampleur du phénomène et par la diversité des situations rencontrées. Or le projet de directive entend supprimer ces démarches administratives au nom de la libre circulation des services. Il est clair que dans ces conditions tout contrôle efficace devient impossible. Le même problème se pose pour le travail intérimaire. Actuellement les entreprises d’intérim doivent être agréées pour pouvoir fournir leurs services en Belgique. La directive risque de mettre un terme à cette procédure d’agrément. C’est alors la porte ouverte à l’arrivée sur le marché d’entreprises peu fiables qui, par des pratiques déloyales, risqueraient de déstabiliser le fonctionnement du secteur. Une société d’intérim implantée en Lituanie peut envoyer en Belgique, dans le cadre du détachement, pour une durée d’un mois, une centaine de femmes d’ouvrages. Les services d’inspection ne sont pas en mesure de vérifier à chaque fois si le barème salarial est respecté et si les heures supplémentaires sont effectivement payées. A supposer que les conditions salariales aient été respectées, rien ne garantit que l’intégralité de la rémunération ait été versée aux ouvrières. Il est fréquent que les frais d’hébergement aient été déduits! La seule manière d’empêcher une complète déstructuration du marché du travail en Europe serait de déterminer des règles obligatoires de collaboration entre les services nationaux de contrôle? Bref de créer au niveau européen un véritable réseau de services d’inspection, une sorte d’Europol social! Cependant une coordination des services d’inspection des 25 membres de l’Union est difficile à envisager dans l’état actuel des choses, à supposer qu’ils soient existants et efficaces partout! Cela participe plutôt à un vœu pieux. En attendant, la porte est ouverte à toutes les mafias déjà bien actives dans différents secteurs et qui profiteront de l’absence de contrôles et de politique coordonnée pour exploiter des travailleurs précarisés. Ce projet de directive risque à terme d’avoir également des conséquences désastreuses pour les soins de santé. En effet, la directive prône la suppression d’un grand nombre de procédure d’autorisations et d’exigences qui constituent pourtant les piliers fondamentaux de la plupart des systèmes nationaux de santé en vue de garantir la qualité, l’accessibilité et l’équilibre financier du système. Ainsi si on suit les principes de la directive Bolkestein, il ne sera plus possible d’impose à un prestataire de services de santé: • des tarifs obligatoires minimum et/ou maximum pour les médicaments, pour les honoraires; • des normes d’encadrement minimales en termes de personnel dans les maisons de repos et dans les hôpitaux; • des conditions de subsidiation tenant compte du mode de financement spécifique des soins de santé; • des normes de qualité des soins prodigués.

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La directive Bolkestein représente également une menace pour les services publics. Quelles conséquences pourrait avoir l'application des principes de cette directive pour la qualité des services publics? Cette proposition de directive ressemble à maints égards à l'AGCS dans le cadre duquel on négocie au niveau international de la libéralisation de tous les services dans tous les secteurs sur base de l'offre et de la demande. En fait, elle tend à transposer dans le droit européen, les règles de l’accord général sur le commerce des services. Il va de soi que l'UE utilisera cette directive comme catalyseur pour les négociations de l'AGCS: une fois les services libéralisés au sein de l'UE, on pourra proposer de les ouvrir aux autres membres de l'OMC en échange de concessions importantes de la part de ceux-ci. Le Sommet de printemps des Chefs d’Etat et de Gouvernement a confirmé la volonté d’arriver à une ratification de la directive Bolkestein avant la fin 2005. Ce point devient donc une priorité absolue pour les trois prochaines présidences hollandaise, luxembourgeoise et britannique. Comment penser dès lors que les élections du Parlement européen n’ont pas d’enjeu pour les citoyens? Sur le plan institutionnel, seul un Parlement européen plus progressiste pourra stopper ou amender une telle initiative!

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Campagne CES 2004 Notre Europe – L’Europe c’est nous! Lettre ouverte aux candidats aux élections européennes Renforcer les droits des travailleurs Des droits solides pour les travailleurs forment la base de la paix industrielle, et constituent la pierre d'angle d'une Europe sociale. La CES appelle tous les candidats aux élections européennes à soutenir la mise en oeuvre effective de la directive de l'Union européenne relative à l'information et à la consultation des travailleurs, à rechercher son application adéquate dans des domaines qui en sont exclus, et à protéger la sécurité de l'emploi pour les représentants des travailleurs. La CES plaide également en faveur d'une révision de la directive sur les comités d'entreprise européens, ainsi que de la création de comités d'entreprise européens dans les entreprises couvertes par la directive et qui ne l'ont pas encore fait. Afin de garantir une forte représentation des travailleurs en Europe, il convient de s'opposer aux tentatives visant à affaiblir les syndicats en les remplaçant par des organes chapeautés par la direction. Plein emploi et croissance durable L'avenir de l'Europe repose sur l'élaboration de stratégies visant à s'attaquer aux dangereuses menaces que comporte la persistance du chômage. Avec la “Stratégie de Lisbonne”, les gouvernements européens ont défini une combinaison d'éléments qui vise à créer une société fondée sur la connaissance et caractérisée par le plein-emploi. La CES apporte son soutien à ces efforts, et appelle à leur mise en oeuvre. En ce sens, nous devons faire en sorte que les Grandes orientations de politique économique de l'Union contribuent également à l'objectif du plein-emploi, et que la participation et la consultation des partenaires sociaux soient améliorées à tous les niveaux. La CES appelle instamment à avoir pour objectif d'effectuer des investissements accrus dans les domaines de l'éducation, de la recherche et du développement. Nous appelons tous les candidats aux élections européennes à encourager et à soutenir une réforme du cadre des politiques économiques, monétaires et fiscales, afin que la notion de ‘croissance' acquière le même statut que la notion de ‘stabilité'. Plus d'emplois et de meilleurs emplois Nous demandons aux futurs parlementaires européens de promouvoir des emplois stables et de haute qualité du point de vue des horaires de travail, des salaires et des conditions de travail, de la santé et de la sécurité, et de l'accès à la formation, contribuant ainsi à une vie professionnelle durable et à une Union européenne plus compétitive. La CES appelle également au développement d'un secteur des services de haute qualité, afin de tirer le meilleur parti possible des possibilités de création d'emplois qui résulteraient d'un tel développement. Nous devons en outre faire en sorte que les politiques d'activation de l'emploi se concentrent sur les indications positives en ce qui concerne la formation, le soutien et le conseil en matière de carrière, et sur l'amélioration des conditions de travail ainsi que de santé et de sécurité sur le lieu de travail.

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Pour une constitution sociale Le projet de Traité constitutionnel pour l'Europe marque un nouveau jalon dans le processus d'intégration européenne. Afin que l'Europe travaille pour les peuples, la CES se fait l'avocate d'une Constitution combinant des dimensions à la fois économiques et sociales, et allant au-delà du marché intérieur et de la monnaie unique, pour se diriger vers une Union sociale et politique, gouvernée par des institutions efficaces, transparentes et démocratiques. L'égalité des chances pour tous Avec ses 25 futurs États membres, l'Union européenne constitue un espace de diversité et de pluralité. Cette diversité est à l'origine d'un énorme potentiel d'innovation pour nous tous. La CES prie instamment les candidats aux élections européennes de lutter en faveur de l'égalité des chances pour tous. Nous devons lutter contre les discriminations sous toutes leurs formes, qu'il s'agisse du sexe, de la nationalité, de la race, de l'ethnie, du handicap, de l'orientation ou de l'identité sexuelles, de l'âge, de la religion ou de l'origine sociale, au sein de l'Union européenne. La CES se félicite de l'inclusion de l'égalité entre hommes et femmes dans les valeurs fondamentales de l'Union européenne et dans les campagnes visant à garantir que l'acquis communautaire concernant l'égalité salariale et l'intégration de l'égalité entre hommes et femmes dans les différentes politiques (“gender mainstreaming”) soit respecté dans l'ensemble des domaines politiques. La sécurité sociale pour demain Des systèmes de sécurité sociale solides constituent les pierres d'angle fondamentales sur lesquelles il conviendra d'édifier l'Europe sociale. Nous appelons par conséquent tous les candidats aux élections européennes à lutter pour garantir le caractère durable des systèmes de sécurité sociale, et à faire campagne en vue d'élargir la base financière de la protection sociale ainsi qu'en faveur de l'élaboration de financements complémentaires et alternatifs qui auraient pour effet de déplacer du travail vers d'autres facteurs de production les incidences de la taxation, dans le but de garantir un financement plus favorable à l'emploi et des systèmes de sécurité sociale durables, ainsi que créer des emplois nouveaux. La CES appelle également à une sauvegarde des systèmes de retraite garantissant un niveau de vie décent ainsi que des services de soins de santé, de prise en charge des personnes âgées et de garde d'enfants qui soient à la fois abordables, d'accès universel et de très bonne qualité. Pour un développement durable et un environnement sain La CES appelle les candidats aux élections européennes à insister auprès de l'Union européenne pour qu'elle parle d'une seule voix en faveur d'une réforme démocratique des institutions financières internationales, qu'elle encourage la cohérence dans la gouvernance économique au niveau international en renforçant, via les Nations unies, le rôle du multilatéralisme, et qu'elle favorise une stratégie de développement durable fondée sur les trois piliers que sont la durabilité économique, sociale e environnementale. A cet égard, des efforts devraient être consentis pour promouvoir la mise en oeuvre pleine et entière des objectifs de Kyoto ainsi que de la stratégie de développement durable de l'Union européenne telle qu'approuvée à Göteborg en 2004.

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Des services d'intérêt général solides Des services d'intérêt général solides sont un élément-clé de l'Europe sociale dont nous avons besoin. Les citoyens européens veulent un meilleur équilibre entre les règles régissant la concurrence et celles régissant les services d'intérêt général au niveau européen. La CES soutient le droit des gouvernements nationaux à faire passer la garantie des droits civiques fondamentaux avant celle des règles du marché libre et de la libre concurrence. Les États membres doivent être en mesure de décider ce qui doit rester du domaine public et ce qui va être privatisé, tout en assurant la qualité élevée de services publics d'accès à la fois universel et égal pour tous. Pour la mobilité, l'immigration et l'intégration sociale La CES considère l'Europe comme un espace ouvert et tolérant. Nous devons donc reconnaître pleinement le droit à la libre circulation des travailleurs et appliquer le principe de libre circulation de la main-d'oeuvre pour les résidents légaux ressortissants de pays tiers, en promouvant leur intégration sociale et politique. Nous prions instamment les candidats aux élections européennes de faire campagne en faveur des mêmes droits pour les ressortissants de pays tiers résidant depuis longtemps en toute légalité dans nos pays, en les autorisant à voter aux élections locales et européennes, tout comme le font les citoyens européens. La CES apporte son soutien à l'élaboration d'une politique européenne commune en matière d'immigration qui vise à favoriser l'intégration des ressortissants de pays tiers, à gérer les flux migratoires et à pénaliser aussi bien les trafiquants d'êtres humaines que les employeurs dénués de scrupules. Pour un renforcement des droits syndicaux transnationaux La CES appelle les candidats aux élections européennes à faire campagne en faveur de l'application pleine et entière des droits syndicaux et des droits des travailleurs dans une perspective transnationale, incluant en particulier des actions de solidarité transfrontalières, y compris des mouvements de grève, dans le respect total de systèmes nationaux de négociations et d'actions collectives. Des efforts devraient également être accomplis en vue d'une reconnaissance pleine et entière du dialogue social au niveau transsectoriel et dans tous les secteurs, tout en témoignant un grand respect vis-à-vis de l'autonomie des partenaires sociaux et de leur rôle de corégulateurs à l'échelle européenne.

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Cette brochure a été réalisée avec le soutien de l’Union Européene

Pour plus d’info:

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