Sommaire 7 Avant-propos henri loyrette
17 C HAM P DE BATAI LLE, H I STOI RE D’U N RÊVE 38 L’entrée d’honneur et le grand escalier 46 Le vestibule bas
8 Préface béatrix saule
52 Le grand vestibule 65 Le salon de compagnie 106 Le billard
13 Introduction LE S EC RET DE C ET HOM M E franck ferrand
120 Le salon d’Apollon 151 Le salon d’Aurore et Céphale 164 Le cabinet des porcelaines 168 La chambre de parade 188 La bibliothèque 200 Les cabinets de curiosités 207 La chapelle 212 La salle à manger 216 Les chambres 242 La salle d’armes 248 Les cuisines 261 Les jardins 278 Le jardin d’hiver 290 Le temple de Léda 308 Le théâtre antique 324 Jeux d’eau 340 Le pavillon des rêves et ses jardins 390 Vivre le rêve 396 Remerciements
L
La vie et l’œuvre de Jacques Garcia : Champ de Bataille – restauré, aménagé, décoré – les raconte et les unit. Car Champ de Bataille, le château comme les jardins, est l’œuvre d’une vie, démonstration virtuose du talent de son propriétaire, cheminement visible de toute une existence. L’histoire semble commencer en 1992 avec l’acquisition du domaine ruiné ; elle est de fait plus ancienne, remontant à la visite émerveillée que Jacques Garcia fit avec son père à l’âge de douze ans. Champ de Bataille est d’abord – ô saisons ! ô châteaux ! – un rêve d’enfant. Il est brillamment esquissé à l’hôtel de Sagonne, rue des Tournelles, et à Menou, dans la Nièvre, qui sont en quelque sorte les brouillons de ce qui allait suivre. Mais depuis vingt ans, même s’il y eut des moments de découragement et presque (après
la tempête) de renoncement, l’œuvre s’élabore résolument, véritable work in progress qui recrée un grand château français et repousse les frontières normandes à l’Italie et à l’Inde. Car Jacques Garcia restitue l’histoire – les fabriques à l’antique, Louis XV, Louis XVI, Marie-Antoinette –, apporte l’ambition encyclopédique – la bibliothèque, la galerie des animaux – et, avec le palais et le jardin moghols, nous ouvre les registres du monde. Nous sommes au cœur de la Normandie, nous sommes en Méditerranée, à Delhi et Agra ;
À l’aube, dans les jardins, la brume enveloppe une enfilade de statues, les dentelles de buis et les architectures de charme. PAGE 4 Fidèlement reconstitué d’après un dessin du temps, le bosquet de l’Éden paraît dans l’entrebâillement d’une porte. PAGE DE GAUCHE La grande vue perspective montre l’ensemble des jardins, leur mesure classique au centre et de part et d’autre leurs secrètes folies. PAGES 2-3
nous sommes au xviie siècle et pleinement à notre époque. Si divers et si profus, l’ensemble est pourtant juste et accordé. Il est l’expression d’un goût, la sûreté d’un talent, un manifeste assurément fait pour être vu et pour être transmis, mais aussi, porté par une histoire personnelle et le récit d’une vie, mêlant des passions nombreuses, le plus subtil et le plus parlant des autoportraits. HENRI LOYRETTE
LA BIBLIOTHÈQUE
par un petit escalier et où des colonnes de stuc la soutiennent. À ce niveau, outre des rayonnages de livres, se trouvent de grandes tables de lecture, un beau mobilier estampillé Jacob Desmalter ayant appartenu au maréchal Soult et toute une collection de portraits et de bustes des Orléans et des Bourbons – dont, bien entendu, un buste du duc d’Aumale. Une table réunit un bon nombre d’enfants royaux et impériaux, dont l’Aiglon, également représenté par un très beau portrait signé Prud’hon. Ici ou là, disséminés, quelques chefs-d’œuvre, comme le plâtre original du buste du neuvième et dernier prince de Condé par Grégoire Joseph Adam, CI-DESSUS Quelques médailles en stuc dur représentant les rois de France, carolingiens et capétiens, datant des années 1830. PAGE DE DROITE Un mobilier signé Jacob Desmalter ayant appartenu au maréchal Soult, lui-même grand amateur de livres, occupe l’ensemble du rez-de-chaussée.
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ou un impressionnant médaillier cylindrique de Thomire, composé de camées du xviie siècle représentant les rois et reines de France jusqu’à Louis XIV, qui fut l’une des curiosités de la première Exposition des produits de l’industrie, en 1819. Enfin, la bibliothèque conserve de nombreux objets scientifiques, tels un planétaire et trois des plus anciens moteurs électriques de l’Histoire – dont une roue de Barlow (première démonstration de machine électrique mise au point par le physicien anglais Peter Barlow en 1822) – datant des années 1830 à 1850. •
LES CABINETS
DE CURIOSITÉS Avec mon grand-père, nous partions chasser les insectes et les papillons. Nous passions des après-midi à coller des branches et des feuilles dans des herbiers. Pour moi, ici, ce n’est pas tant une collection de pièces rares, à nulle autre pareille en France : c’est plus simplement, et viscéralement, une évocation de mon enfance. Bibliothèque, cabinet d’amateur, ce petit temple du savoir et du goût se devait de comporter son muséum d’histoire naturelle. Jacques Garcia y tenait pour évoquer ce temps, qu’on devine pour lui béni, où les enfants n’allaient pas à l’école et où les privilégiés apprenaient l’essentiel du savoir chez eux, dans ce genre de cabinets où aux livres s’ajoutaient des herbiers, des collections d’insectes, des animaux empaillés, des squelettes… Beaucoup de ces cabinets ont été conservés dans les châteaux anglais, italiens, espagnols, allemands, alors que la plupart ont été détruits en France à la Révolution. Celui qu’a reconstitué Jacques Garcia dans une sorte de labyrinthe de galeries et de couloirs, sans doute unique en France dans une demeure privée, enchante ou épouvante enfants petits et grands, selon leur nature, avec ses milliers de coléoptères épinglés, ses divers mammifères en squelette ou empaillés et, selon la tradition Ce petit musée privé d’histoire naturelle, probablement unique en France, est investi d’une grande part de l’enfance de Jacques Garcia. Le souvenir d’un grand-père maternel, surtout, guidant le jeune garçon qu’il était dans la campagne à la recherche de papillons, de divers insectes, de fleurs et de feuilles, pour les étudier et les naturaliser. Cet apprentissage de la nature lui a permis d’approcher l’esprit, curieux de tout savoir, des xvii e et xviii e siècles. Cet esprit court à travers ces différentes pièces, galeries, salons, escalier, emplis après des décennies à courir les brocantes, les foires et même parfois, confie-t-il, les poubelles… PAGE DE DROITE
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d’autrefois, ses crocodiles au plafond… Sans doute faut-il deviner chez Jacques Garcia, dans cette reconstitution d’un cabinet d’histoire naturelle, autre chose qu’une fidélité à l’esprit du xviiie siècle : une nostalgie de son enfance, du temps où il parcourait la campagne bourbonnaise avec son grand-père, Joseph, boulanger de son état, chassant les papillons et divers insectes, recueillant des feuilles et des fleurs pour les coller, des heures durant, dans des herbiers. Cette enfance campagnarde, qui a tant compté pour lui, l’emplit encore avec bonheur de sensations, de parfums, de bruits jamais oubliés. Cette enfance d’où lui vient son profond amour de la nature, cette part essentielle de lui-même qui peut-être serait restée secrète s’il ne l’avait magnifiée, pour lui-même et pour un public nombreux, dans l’enchanteur jardin de Champ de Bataille. •
LE TEMPLE
DE LEDA Il convient de contourner à nouveau des murs de charmille pour entrer dans un autre univers antique, celui qu’ont inspiré au paysagiste les jardins d’Hadrien à Rome. Un ensemble de colonnes romaines que possédait Jacques Garcia, ajoutées à des piles de briques, ont permis de créer quatre cloîtres ornés de guirlandes de lierre, de vigne grimpante, de pins, abritant chacun un tombeau romain. « Ces jardins en ruine sont néanmoins assez évocateurs pour nous laisser imaginer les splendeurs, la fantaisie, le caractère ludique et exubérant de ces grandes maisons romaines », dit à juste titre Patrick Pottier. Au centre de cet ensemble trône une fabrique exceptionnelle : un temple de Léda et son canal de près de cent mètres, bordé d’arbres fruitiers en pots, où se prélassent quatre indispensables cygnes noirs. La fantaisie gouverne les jardins latéraux de Champ de Bataille, certes, mais jamais le hasard : tout comme les potagers et les serres côtoient le degré végétal de l’axe central, le temple de Léda et ses cygnes se trouvent quant à eux au niveau du degré animal que délimitent la fontaine aux dauphins, la fourmilière et la salamandre. L’ordre symbolique s’impose en réalité à l’ensemble du jardin dans un jeu de correspondances, d’échos à peine perceptibles, qui ajoutent à l’émotion esthétique le plaisir ludique d’un rébus, d’une énigme révélée. C’est après avoir reconstitué ce canal qui existait dès le xviie siècle que Jacques Garcia, inspiré par le degré du monde animal qu’il devait illustrer, a eu l’idée de construire à son extrémité ce temple qui, par sa forme et toutes proportions gardées, peut rappeler le Panthéon de Rome. Exceptionnelle, cette fabrique l’est, car, à la différence de nombreuses copies de temples grecs ou romains reconstitués au xviiie siècle, surtout dans les parcs anglais ou Reflété dans son canal, le temple de Léda est plus qu’une fabrique comme on en voit dans les grands jardins du xviii e siècle : la résurrection, grâce à des éléments tous antiques, d’un monument idéalisé. DOUBLE PAGE SUIVANTE Le temple domine un canal entouré de talus de vignes, elles-mêmes surmontées d’une enfilade de colonnes romaines. PAGE DE DROITE
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allemands, le temple de Léda n’est constitué que d’éléments d’époque : les colonnes et leurs chapiteaux byzantins en marbre blanc, la corniche romaine et les grosses pierres taillées des murs, romaines elles aussi, qui avaient été remployées pour une construction médiévale à Rouen… La façade derrière la colonnade, byzantine, provient quant à elle d’Orient. La décoration intérieure est elle aussi pour l’essentiel authentiquement romaine : la mosaïque au sol, l’autel, la corniche en pierres noires et blanches, la mosaïque aux cygnes placée derrière l’autel,
LE PAVILLON
DES RÊVES ET SES JARDINS
CI-DESSUS Un mur de plâtre peint et sculpté provenant d’un palais du Rajasthan et placé à l’identique dans le salon. PAGE DE DROITE Au niveau supérieur, une galerie percée de moucharabiehs permet, selon la délicieuse coutume orientale, de voir sans être vu… DOUBLE PAGE SUIVANTE ET PAGES 370-371 Devant la splendide boiserie encadrant un trône princier, une paire de grands vases turcs en cristal du xviii e siècle.
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VIVRE LE RÊVE
L’ultime chantier du jardin aurait dû logiquement être le premier. Mais il touchait à l’esprit même du bâtisseur de Champ de Bataille, et Jacques Garcia y a réfléchi durant quinze ans avant de le lancer : il s’agissait de rétablir en majesté la véritable entrée du château. Ce que l’on considérait jusqu’alors comme l’entrée, l’arc de triomphe au nord, était précédé à l’origine, comme le montrent les documents d’époque, par un jardin potager. Or, au xviie siècle, on n’entrait pas dans un château en traversant des carrés de légumes. Pour Jacques Garcia, l’entrée du domaine devait se situer face à l’arc de triomphe méridional, dans un axe parallèle aux deux ailes et perpendiculaire à celui du jardin. Quelques sondages ont confirmé cette intuition : à une trentaine de mètres de l’arc de triomphe, enterré sous ce qui était alors un practice – et au xixe siècle un jardin potager –, se trouvait un mur, intact, qui ne demandait qu’une simple restauration. Il confirmait en fait l’existence d’une « avant-cour d’honneur », assez classique au xviie siècle, mentionnée sans autre précision dans un inventaire du début du siècle suivant. Une fois dégagé et restauré, il a permis de retrouver le dessin initial de l’entrée du château : un jardin à la française en contrebas d’une avant-cour que l’on gagnait par une série de marches. Le même inventaire évoque à cet endroit des boulingrins. Jacques Garcia et Patrick Pottier ont choisi de dessiner deux longs boulingrins séparés par une grande allée de gravier ponctuée par des bornes. De part et d’autre des marches, le décorateur a fait reconstruire deux orangeries : les mêmes fouilles ont en effet dégagé des fondations de bâtiments qui devaient avoir cet usage. Elles s’inscrivent naturellement dans l’architecture de l’ensemble. À l’extrémité du jardin, long de soixante mètres environ, donc à une centaine de mètres de la cour intérieure, les deux niveaux de cette entrée retrouvée offrent une perspective inédite et saisissante de beauté sur le château de Champ de Bataille. L’axe parallèle aux deux Vue aérienne de la colonne de Zéphyr, la grande perspective de Champ de Bataille. DOUBLE PAGE SUIVANTE Une autre vue aérienne de Champ de Bataille, qui dévoile toute la majesté du domaine, quelques-uns de ses secrets et surtout l’invincible passion d’un homme. PAGE DE DROITE
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ailes, en allégeant leurs volumes et en valorisant la fluidité et la transparence, annule toute ostentation. Il souligne également l’aspect à la fois hiératique et ludique d’une demeure toute en symétries, conçue pour un militaire, certes, mais un militaire prêt à quelques audacieuses fantaisies. S’il en était encore besoin, cette prouesse, marquée par une élégante touche italienne, signe l’œuvre d’un très grand architecte.
Le château du Champ de Bataille
JACQUES GARCIA est un grand collectionneur et un décorateur extrêmement sollicité en France et à l’étranger. Il a décoré les lieux les plus prisés comme l’hôtel Costes et la maison Ladurée à Paris, et a travaillé au Musée du Louvre et au château de Versailles. Il s’est aussi attaché une clientèle privée prestigieuse et internationale, de François Pinault à l’émir du Qatar. Sa vie entièrement consacrée à la défense du patrimoine français lui a valu de nombreuses distinctions. Il est fait Officier de la Légion d’honneur en 1997 et Commandeur de l’ordre des Arts et des Lettres en 2002.
ALAIN STELLA est écrivain et grand voyageur. Il est l’auteur de nombreux ouvrages, notamment Demeures historiques, les résidences d’ambassadeurs à Paris (2010) et L’Esprit des vignobles (2012) publiés chez Flammarion. Les photographies d’ERIC SANDER ont été publiées dans de nombreux magazines internationaux comme Time, Geo, Smithsonian et Figaro Magazine et dans plus de vingt ouvrages, dont plusieurs consacrés aux jardins. Il a récemment participé à de nombreux ouvrages à édition limitée sur des propriétés d’exception et collabore régulièrement avec le paysagiste
Jacques Garcia SURPLOMBANT MAJESTUEUSEMENT LES RICHES TERRES
de Normandie, le château du Champ de Bataille, propriété de Jacques Garcia, constitue un véritable fleuron de l’architecture, du mobilier et du jardin à la française des
XVIIe
et
XVIIIe
siècles. Construit par
le comte Alexandre de Créqui entre 1653 et 1665, ce somptueux château a été acheté par Jacques Garcia il y a vingt ans en bien mauvais état. C’est avec passion
Le château du Champ de Bataille
qu’il a entrepris la restauration du château pour lui rendre sa splendeur passée et en faire sa demeure. Les élégantes pièces du château sont pourvues d’une collection admirable de peintures, de sculptures, de porcelaine, d’argenterie et de meubles dont beaucoup de pièces proviennent des collections royales avant la Révolution.
Textes
ALAIN STELLA
Photographies
ERIC SANDER
De vastes et somptueux jardins, probablement dessinés par Le Nôtre et élaborés depuis vingt ans par Jacques Garcia et son ami Patrick Pottier, s’étendent sur plus de trente-huit hectares. Un prodigieux système hydraulique égalant celui du château de Versailles alimente de magnifiques fontaines et bassins d’ornement. Des temples classiques, un théâtre antique et des statues de marbre surprennent et émerveillent les visiteurs qui se promènent le long des allées. Non loin, en contrebas, à l’abri des regards, se dresse le très secret pavillon des rêves, imaginé et entièrement
de Chaumont-sur-Loire.
construit par Jacques Garcia à partir d’authentiques
Jacques Garcia
Louis Benech et le Festival international des jardins
« La vie et l’œuvre de Jacques Garcia : Champ de Bataille – restauré, aménagé, décoré – les raconte et les unit. Car Champ de Bataille, le château comme les jardins, est l’œuvre d’une vie, démonstration virtuose du talent de son propriétaire, cheminement visible de toute une existence. [...] Porté par une histoire personnelle et le récit d’une vie, mêlant des passions nombreuses, le plus subtil et le plus parlant des autoportraits. » —HENRI LOYRETTE
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Vue du salon d’Apollon. La grande vue perspective des jardins du château du Champ de Bataille.
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