Saint François

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J ac q u e s D u q u e s n e

Jacques Duquesne revient dans ce livre aux origines du personnage, en montre les diverses facettes qui ont pu motiver le choix du pape. François était un indigné, un combattant, qui a fait entendre une parole nouvelle, si neuve et dérangeante que, trois décennies après sa mort, ses écrits furent pratiquement censurés par les autorités de l’Ordre franciscain et de Rome. Un homme que Jacques Le Goff, dans sa préface, qualifie de « figure exceptionnelle. Un saint qui savait rire pour éclairer la tristesse de ses contemporains ».

Flammarion

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14-IV

Prix France : 22  ISBN : 978-2-0813-2989-8

Flammarion

Saint François

Pour la première fois, un pape a choisi le prénom symbolique de François. Faire référence à saint François d’Assise, pour le représentant de la plus haute fonction de l’Église catholique, est un message fort quant à l’orientation souhaitée pour son pontificat : celle d’un engagement envers les plus faibles. « Alors que l’humanité a un rapport tellement médiocre avec la création ! François est l’homme diffusant l’esprit de la paix, l’homme pauvre », explique le pape François.

J ac q u e s D u q u e s n e p r é fac e d e J ac q u e s L e G o f f

S a i nt

F rançois

Flammarion

30/01/14 12:44


S O M M A I R E

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P R ÉFACE D E JACQ U ES L E G O FF

8 AVAN T-P RO P O S

10 UNE J EUNESSE AGI TÉE 16

L E R ETO UR NEM ENT : P O UR L ES PAUVR ES !

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L ES PR EM I ER S CO M PAGNO NS

40 LA VIE D E S A INT F R A NÇO IS PAR G IOTTO 48 M I R AC L ES, SUC C ÈS ET CO M P L I C ATI O NS 5 6

DÉPART EN O R I ENT ET DI FFI C ULTÉS DE L A CO NFR ÉR I E

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UNE R ÈGL E Q UE FR ANÇ O I S N’AP PR ÉC I E GUÈR E

7 0

PR ÊC H ER J USQ U’ À L A M O RT

76 PO STÉR I TÉ 8 8

C A NT IQUE D E F R È R E S O LE IL ET AU T R ES P O ÉSIES

9 5 B IB L IO G R AP H IE


CIM A BUE, SAIN T FRAN ÇO IS D’ASSISE (DÉTAI L ), VERS 1280, FRESQUE, ASSI SE, B ASI L I QUE SAI NT-FRANÇ OI S, ÉGL I SE I NFÉRI EURE.

P R É FAC E J AC Q U E S L E G O F F

Le nouveau pape, élu en 2013, a pris pour la première fois le nom de Francesco (François), sans numéro d’ordre. Le monde, et plus particulièrement l’Occident, est en proie à une crise économique et sociale quasi générale qui engendre un élargissement de la pauvreté. C’est à la lumière de cette situation que Jacques Duquesne évoque la f igure exceptionnelle de saint François d’Assise. C’est le saint de la pauvreté par excellence. On pourrait ajouter le saint de la nature et de l’écologie, et comme l’a déf ini Chiara Frugoni, un saint qui savait rire pour éclairer la tristesse de ses contemporains. Se référant encore à l’actualité, Jacques Duquesne dit à juste titre que saint François était un indigné. C’est dire que c’est plus que jamais un saint d’aujourd’hui. Le Moyen Âge, tout en réservant des honneurs au corps mort, dédaignait ou condamnait le corps vivant, péjorativement appelé la chair. François, qui, quoique malade, s’adressait souvent à frère Corps, annonce cette promotion du corps par la fraternisation que nous vivons aujourd’hui où, de l’hôpital au stade, et de l’escalade à la natation, le corps est partout. C’est aussi le corps que réhabilite François au xiiie siècle quand il met en avant le travail manuel. Jacques Duquesne a aussi bien noté que François, dans les villes et sur les routes, comme les proches frères dominicains, fait entendre ce que nous avons appelé, Jean-Claude Schmitt et moi, une parole nouvelle. Aujourd’hui, où, de l’ordinateur à la télévision, de la radio à la réunion politique, une parole nouvelle aussi se fait entendre, la voix vient manifester cet instrument de communication et de conviction auquel François eut tellement recours d’une façon aussi nouvelle qu’il prêcha aux oiseaux. Jacques Duquesne a tenu compte de la multiplicité et de la diversité des interprétations du personnage à l’époque où il vivait et a su en faire ressortir ce saint exceptionnel qui éclaire aussi bien le xxie siècle que le xiiie. Il faut remercier et féliciter Jacques Duquesne d’avoir mis en valeur l’actualité de saint François et du franciscanisme en soulignant la fécondité du Moyen Âge dans la longue durée. 6

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UNE JEUNESSE AGITÉE Assise n’avait pas de grande cathédrale quand François y naquit en 1181 (ou 1182), et ne projetait certes pas d’en bâtir une. Cette petite ville avait connu, paraît-il, des années heureuses aux temps de la splendeur de Rome, avant d’être disputée entre papes et empereurs, d’être rebâtie à l’époque de Charlemagne et de se réfugier derrière de hautes fortif ications, sur un éperon rocheux dominant deux aff luents du Tibre, le f leuve de Rome, la grande et orgueilleuse capitale, qui n’est pas si loin : 177 kilomètres, indiquent les guides touristiques d’aujourd’hui. Mais cette proximité a surtout prof ité à une cité voisine, Pérouse, où passe le grand f leuve justement, Pérouse qui fut fondée par les Étrusques, puis rasée, mais reconstruite et redressée jusqu’à devenir l’une des plus belles cités de la Botte italienne à cette époque. Assez pour rendre jaloux, très jaloux, les habitants d’Assise. Le jeune François participera aux conf lits entre les deux cités… Le plus intéressant en ce qui le concerne, c’est qu’au jour de sa naissance, son père est absent d’Assise. Parce que son travail, c’est-à-dire ses affaires, ont amené en France Pietro di Bernardone, important maître drapier, qui fait commerce de tissus achetés et vendus dans l’Europe de l’Ouest et du Sud. Le commerce s’est en effet beaucoup développé depuis le xiie siècle. Pour de multiples raisons : parce que cette période a connu une paix relative ; parce que les féodaux ont aménagé – un peu – les routes ; parce que les récoltes ont été bonnes. Les Allemands vendent des grains ; les Flamands tissent le lin et la laine ; les Italiens, en contact avec l’Empire byzantin, y achètent épices, soieries et tissus d’Orient. Tout ce monde échange surtout ses produits en France, plutôt épargnée par les guerres : les foires de Champagne sont très fréquentées. Une nouvelle « classe », pour employer le vocabulaire actuel, se développe donc : les marchands. On a retrouvé un Manuel de confession dû à Thomas de Chabban, un clerc d’origine anglaise, qui recommande aux prêtres la compréhension à l’égard de certains pénitents. Notamment 10

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LES PREMIERS C O M PA G N O N S Il surprend d’abord, puis intéresse. Ses prédications attirent un petit monde bigarré, celui de la rue, où les pauvres, les mendiants même, sont bien sûr plus nombreux que les riches. Il s’immerge dans le monde de la misère et de la faim, des guenilles et des petits voyous. À qui il recommande le partage et l’amour. Il choque, il entraîne, il heurte, il convainc. Il séduit. Bien peu d’abord. Il semble même avoir été accueilli encore par des jets de pierres. Comme un fou. Ou un révolutionnaire. Mais voilà qu’un, puis deux, puis trois compagnons le rejoignent. Le premier que l’on connaisse quelque peu se nomme Bernard di Quintavalle. C’est un homme riche lui aussi, qui ne s’est pas décidé sur un coup de tête, mais f init par vendre tous ses biens, court à la Portioncule, commente avec François quelques versets de l’Évangile. Ils ont le choix : « Ne prenez rien pour la route, ni bâton, ni besace, ni pain, ni argent ; n’ayez pas non plus chacun deux tuniques » (Lc 9, 3). Ou, plus encore : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix chaque jour, et qu’il me suive » (Lc 9, 23). Et bientôt, voici un autre habitant d’assise, Pietro Cattani, un juriste, qui est aussi chanoine (titre qui pouvait être porté par des laïcs), puis un certain Égide, qui rejoignent ce premier duo. Et le petit groupe grossit. Ce qui n’est pas tout à fait surprenant : François est doué d’un vrai charisme, comme on dit aujourd’hui ; la sincérité de sa foi, la qualité spirituelle de la vie qu’il mène, et sa joie, attirent. Et puis, à travers toute l’Europe, on voit alors se lever des « purs », des hommes et des femmes qui, de manières très diverses et parfois avec révolte, au nom de l’Évangile, de la f idélité à Jésus, remettent en cause l’Église établie, les formes qu’elle a prises, la manière dont elle traduit et applique l’enseignement du Galiléen. L’Église, il est vrai, n’a pas tout à fait pris conscience du développement, à la suite de l’essor urbain, de la nouvelle pauvreté. Bernard de Clairvaux, déjà, constatait : « L’Église resplendit d’or dans ses temples mais elle laisse ses pauvres aller nus. » Ce qui doit être nuancé. Dès le xe siècle, 27


LA VIE DE SAINT FRANÇOIS   PA R G I OTTO

À la f i n du xiii e siècle, Giotto di Bondone peint les représentations du saint, devenues les plus célèbres, dans l’église supérieure de la basilique Saint-François d’A ssise. Il s’appuie sur la Legenda Major, écrite par saint Bonaventure vers 1260, peu après la mort de François, pour faire le récit de sa vie et de ses miracles. Homme cultivé et raff i né, Giotto respecta cette biographie off i cielle qui louait le Poverello, à travers un cycle de vingt-cinq fresques réparties dans les travées de l’église et conçues pour s’intégrer parfaitement au décor. La perspective des bâtiments, les regards entrecroisés, l’illusion créée par le cadre architectural, l’innovation technique de la fresque ont entraîné dans les siècles l’image de saint François. Bien qu’aujourd’hui, cette vision paraisse assez éloignée de l’homme qu’a été François d’Assise, elle fait partie intégrante de sa légende ; et il semble impossible de ne pas faire de place à ces fresques, à leur apport à l’histoire de l’art et à ce maître pour qui Dante inventa le mot d’artista. L ’ H O M M AG E D ’ U N S I M P L E

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LE DON DU MANTEAU

L A V I S I O N D U PA L A I S

L ’ AV E RT I S S E M E N T D U C R U C I F I X

LE RENONCEMENT AUX BIENS DE CE MONDE

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J ac q u e s D u q u e s n e

Jacques Duquesne revient dans ce livre aux origines du personnage, en montre les diverses facettes qui ont pu motiver le choix du pape. François était un indigné, un combattant, qui a fait entendre une parole nouvelle, si neuve et dérangeante que, trois décennies après sa mort, ses écrits furent pratiquement censurés par les autorités de l’Ordre franciscain et de Rome. Un homme que Jacques Le Goff, dans sa préface, qualifie de « figure exceptionnelle. Un saint qui savait rire pour éclairer la tristesse de ses contemporains ».

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Pour la première fois, un pape a choisi le prénom symbolique de François. Faire référence à saint François d’Assise, pour le représentant de la plus haute fonction de l’Église catholique, est un message fort quant à l’orientation souhaitée pour son pontificat : celle d’un engagement envers les plus faibles. « Alors que l’humanité a un rapport tellement médiocre avec la création ! François est l’homme diffusant l’esprit de la paix, l’homme pauvre », explique le pape François.

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