Revue QDB #2

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SI LES DESSINATEURS ONT DONNÉ LA RÉPONSE, LEURS COMPLICES DE CRÉATION NE POUVAIENT RESTER SUR LA TOUCHE. SI LES CRAYONS ET L’ENCRE N’ONT PAS BEAUCOUP COULÉ, LE BRUIT CARACTÉRISTIQUE DU CLAVIER S’EST FAIT ENTENDRE DANS TOUT LE LABORATOIRE… APRÈS LE POÈME ÉNERGÉTIQUE DU PREMIER NUMÉRO, NE POUVAIT-ON CRAINDRE UN PAVÉ INDIGESTE FAIT UNIQUEMENT DE MOTS ? PICOREZ LES LONGUES PROSES OU LES COURTS RÉCITS. OUVREZ ET REFERMEZ. NOTEZ-Y DES IDÉES.

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Plus un débat est houleux, moins il y a de chances qu’on ait pris le temps d’en définir clairement l’objet. Il n’est même pas nécessaire d’armer des termes aussi clivants que « ultra gauche » ou « communautarisme » pour encourager les malentendus : le mot « science » suffit amplement à foutre toutes les cervelles en feu sur la place publique. Le point de départ viendra à causer de « la science » sans jamais avoir précisé de quoi on parlait, sans clarifier tel ou tel contexte... De la communauté scientifique internationale ? Des processus de recherche et de la méthode scientifique ? De la fonction symbolique de la science produite par les nations ? De la science fondamentale ? De la technologie ? Du désir anthropologique de connaissance ? D’un consortium secret d’extraterrestres vampires assistés par des industriels satanistes ? Il n’y a aucune raison de croire qu’il en va autrement quand on parle d’art, a fortiori parce que n’importe quel pékin, s’il peut être assez intimidé par la science pour calmer ses ardeurs, estime qu’il a son mot à dire sur le sujet : l’art, c’est bien connu, ça parle aux nerfs, et les nerfs, tout le monde en a. On est donc à peu près certains de jacasser longtemps, très longtemps, infructueusement, très infructueusement. Et de provoquer une insatisfaction générale. Selon le champ, le milieu social où elle éclot, la question semble aborder toutes sortes d’objets disparates : y parle-t-on des œuvres ? Des artistes eux-mêmes ? De vrais artistes en particulier ou bien de « l’artiste » comme image, comme représentation générale ? De l’histoire des œuvres et du patrimoine ? De la culture ? Du cadre social d’apparition des œuvres, qui semble englober de façon floue l’édition, les galeries, les théâtres, les musées ? De la capacité humaine à produire certaines catégories de formes ? De ces formes ellesmêmes ? Des techniques pour les produire ? Des règles qui en déterminent les usages ? De la circulation de ces formes sur un marché ? S’agit-il d’un trait anthropologique ou d’une déviance socio historique ? D’une forme du jugement ? À quel moment une question sur l’utilité de l’art est-elle — hors de la préface à mademoiselle de Maupin et des pensums qu’elle a fourni à des générations d’élèves — simplement pensable ? Posable ? Voyons si nous pouvons au minimum, faute d’y voir bien clair dans le second terme, penser le premier : qu’est-ce que l’utilité ? Hélas, de l’utilité, il apparaît assez vite qu’il va être difficile de faire consensus... Par exemple, les planches de Fred ont été utiles pour m’arracher à l’horizon prolétarien auquel me destinait ma classe sociale. Les planches de Van et Mutterer ont été utiles à ma formation intellectuelle et à mon émancipation culturelle. Les planches de Hergé sont utiles à l’Hôtel Drouot. Les planches de Blutch sont utiles aux innombrables plagiaires de Blutch. Les planches d’Hergé sont inutiles à ma formation

intellectuelle et à mon émancipation culturelle. Les planches de Van et Mutterer sont inutiles à l’Hôtel Drouot. Les planches de ces trois-là sont inutiles aux plagiaires de Blutch pour l’exercice de leur marotte. L’Hôtel Drouot est utile à une certaine catégorie d’imbéciles pour décider si oui ou non la bande dessinée est de l’art. Ces imbéciles me sont parfaitement inutiles pour décider que cette question est sans intérêt. Ces temps derniers, il a été signifié à une grande partie de la population — touchant plus ou moins à ce qu’on appelle la sphère culturelle et artistique — que la partie allait se jouer sans eux : une autorité pragmatique (et bienveillante, ça va de soi) allait remettre au goût du jour l’équation entre ce qui est utile à la vie

biologique et ce qui est utile à la construction commune. Quand s’est posée, dans de telles conditions, la question douloureuse, éminemment sociale, de l’utilité de l’art, de son articulation substantielle à la vie collective, on a choisi l’indéfinissable notion d’essentialité. Je vois bien toute la dramaturgie et les petits effets rhétoriques qui la charpentent : « essentiel à la vie », voilà une façon d’excéder de quelques crans la notion d’utilité, au cas où quelques pinailleurs auraient commencé à opposer leurs utilités à d’autres, leurs priorités à celles des autres. Devant l’essentiel, il n’y a pas de priorité. Il n’y a rien au-delà. De ces foutaises normatives, je m’épargnerai tout commentaire supplémentaire à ce qui a largement été dit. Notamment parce qu’à partir d’un certain seuil de singularité dans l’organisation de votre mode de vie, hé bien, plus personne ne vous comprend... Ajoutons qu’il n’est pas bon du tout d’inviter qui que ce soit à comparer ses urgences à celles des autres, surtout pas dans le but absurde d’en tirer une hiérarchie générale pour de quelconque règles sociales. L’autoritarisme sans nuance apparaîtra moins arbitraire que ce genre d’organisation du monde... Si on voulait déclencher une guerre civile, elle pourrait commencer par des choses aussi anodines que le choix des aliments les plus essentiels dans les rayons de votre supermarché. L’éjection de certaines activités hors du cours de la vie civile produit une sorte de front étrange, dans lequel se sont retrouvés, par la force des choses, toutes sortes d’acteurs de la vie culturelle et artistique ; en faisant une communauté bigarrée et improbable de productions et de territoires qui vivent pourtant toute l’année de leurs fractures mêmes, de leurs guerre de position et de la certitude de leurs importance, voilà que par le simple geste

radical de leur exclusion commune, ils doivent se reconnaître dans la peine et le rejet... Ils sont supposés abdiquer tout ce qui jusqu’ici les séparait, pour se concentrer sur une demande collective de crédit symbolique. J’ai tendance à imaginer que ceux qui l’auront le plus mal vécu seront ceux qui, toute l’année, sont déjà les inutiles de cette sphère elle-même, appelés d’un coup à calmer leur propre lutte pour une solidarité lumineuse, grande, évidente : défendre cette belle chose qu’est censée représenter, aux yeux de tous (et il est désormais bien évident que non, pas aux yeux de tous) la culture. Cette notion, pas tellement moins encombrante et floue que celle d’art, a au moins le mérite de se poser comme une préoccupation publique, dont l’art sera au mieux le réservoir de bidules destinés à décorer

les discours politiques et les parcs institutionnels, au pire l’argument mausoléifiant d’un mythe national ou régional. Mais être tous unis dans le désaveu de la marchandise ne suffit probablement pas à y voir plus clair dans l’idée d’une unité de l’art, ni à faire réellement communauté, qu’elle soit d’intérêts, de corps, de pratiques, ou de visions... On aura bien pigé que c’est une blessure narcissique, abandonnique, qui s’est exprimée par toutes les voix attendant que soit reconnue l’utilité, « l’essentialité » de l’art : ce n’est pas en tant que producteurs de choses inutiles mais bien en tant que pauvres créatures ontologiquement inutiles, que certains artistes ont visiblement compris cette mise à l’écart. Pourtant, si au lieu d’accepter l’idée saugrenue, purement culturelle, que l’art produit du lien social, ceux-ci avaient embrassé la puissance critique, destructrice des évidences, renversante des usages et des codes, de l’art, hé bien toute cette pitrerie gouvernementale leur aurait fait le même effet pénétrant qu’à moi-même : celui d’une feuille morte qui tombe ou d’un poil qui frise à mes narines. J’énonce quelques banalités : ce n’est pas en tant que créations artistiques mais bien en tant que rouages culturels d’une machine libérale que certains types d’œuvres humaines, quelles qu’elles soient, selon leur degré d’intégration à la circulation des marchandises et à leur


rentabilité, sont perçues comme dispensables ou non, utiles ou inutiles. La machine libérale passe pour être anidéologique (c’est le slogan qu’elle nous matraque le plus souvent), c’est un des moteurs de sa crédibilité. Son tour de force est de faire passer son prétendu pragmatisme pour un état de nature, état qui serait peu soucieux de l’identité politique, des caractères sociaux des marchandises et des productions dont elle valorise la circulation et régule le rythme. C’est en tant que rouages d’une industrie culturelle que telle ou telle production sera écartée ou assimilée, exaltée pour ses vertus ou dévaluée pour son inutilité. Ce n’est pas parce qu’elle est inutile qu’elle ne circule pas, mais c’est parce qu’elle ne circulait pas qu’elle a été déclarée inutile. Le front au nom duquel nous (artistes !) serions tous en lutte, unis pour défendre la même chose, l’art, la culture, est une illusion qui ne profite qu’à tous ceux qui, jusqu’ici, s’accommodaient très bien

des règles de discrimination hiérarchique entre les œuvres tant qu’elles leurs bénéficiaient. Gageons que si nous oublions un instant les lignes de séparation tracées entre les territoires au nom d’un front de lutte noble et commun, leur premier réflexe sera de retracer ces lignes dès que le cours des bénéfices aura retrouvé ses courbes habituelles. Tout discours commun se volatilisera au nom du pragmatisme marchand, celui-là même qui, pour un instant seulement, un petit tour d’épidémie, traçait d’autres lignes de démarcation utilitaristes. Il est toujours fascinant de voir les dominants réclamer l’abdication des différences sur lesquelles ils prospèrent depuis toujours, à la seconde même où l’abdication des différences devient une valeur rentable. Jusqu’au prochain retroussement moral. Ne pas être utile à un tel système de distribution est une sorte de garantie qu’on n’émet pas les signes nécessaires pour incorporer la rentabilité d’un modèle intégralement discriminant, repoussant, brutal, aberrant. Ce n’est pas suffisant pour faire du bon boulot, certes, mais c’est déjà un premier titre de fierté. La plainte qui s’est élevée depuis les classes culturelles disposant des moyens de l’émettre et de la faire entendre n’est que très apparemment commune, représentative d’une réalité sociale unie : elle est la crainte de quelques privilégiés de la classe bourgeoise de voir

disparaître leur part menue du marché. Ce fragile confort de l’organisation culturelle, il ne s’est jamais obtenu sans la lutte continue pour une hégémonie et sans l’écrasement d’un nombre effrayant de singularités. Tout ça vous semble abstrait, insaisissable ? Je m’approche des faits : On s’affole aujourd’hui de voir les librairies, les livres qu’elles vendent, considérés comme inutiles ? Sachez que la totalité des livres que j’aime et qui composent ma bibliothèque sont déjà considérés comme inutiles par les libraires eux-mêmes depuis des décennies ; inutiles à leurs clients (« On n’a pas la clientèle pour ça »), inutiles à leur économie de l’espace, du stock (« On n’a pas la place pour ça »), inutiles à leur représentation de la bande dessinée (« C’est pour des spécialistes, est-ce que c’est vraiment de la bande dessinée ? »). Approchons encore un peu de la matière dont est fait le vrai monde : Rennes est une ville de 215 000 habitants. On y trouve quatre librairies spécialisées en bandes dessinées, La nef des fous, M’enfin, Critic, Ty bull. Si vous cherchez dans cette ville un livre de Loïc Largier (Adverse), de Double Bob (FRMK), de Tommi Musturi (La Cinquième Couche) ou de EMG (Tanibis), vous en trouverez, selon les titres, entre 0 et 1. Le plus souvent 0. Sur toute la ville. Pour chaque sortie, pour chacun de leurs livres. Le cinquième volume de L’arabe du futur, vous n’aurez pas besoin de le chercher : vous buterez sur une pile d’exemplaires partout où se vendent des bandes dessinées, librairies spécialisées ou pas. Vous le connaîtrez. Vous le connaissez déjà. Des premiers on dira, pour expliquer qu’il est impossible d’en trouver une seule trace dans une ville de 215 000 habitants, que ça n’intéresse pas grand-monde. Comment « grandmonde » pourrait-il s’intéresser à quelque chose dont il ignorera à jamais l’existence ? Comment « grand-monde » pourrait-il juger de la pertinence de livres qu’il n’aura jamais sous les yeux ? Comment « grand-monde » pourrait aimer ou ne pas aimer un livre sur lequel aucun journaliste n’a écrit une ligne, dont aucun libraire ne lui présentera jamais d’exemplaire, ne lui parlera jamais ? Mystère... Dès que les librairies auront repris leur place dans l’économie brutale dont elles sont, elles-aussi, des rouages volontaires, elles ne se contenteront pas de reprendre leurs habitudes : elles les renforceront. Elles renforceront les hiérarchies discriminantes entre les livres (livres utiles, inutiles, essentiels, dispensables) en se justifiant de la dure période qu’elles viendront de traverser, des impératifs économiques supérieurs desquels elles dépendent. En trouvant là des raisons supplémentaires d’écarter de leurs rayons les livres « qui ne marchent pas », « qui n’intéressent pas le public ». En réduisant drastiquement la part déjà minuscule de créations un peu singulières qu’elles acceptaient parfois. À vrai

dire, elles ont déjà commencé : les petits éditeurs pour lesquels la librairie ne représentait déjà qu’un faible pourcentage de leur chiffre en regard des salons, ont déjà vu cette part de leur chiffre chuter de moitié cette année. Comment ces livres pourraient-ils intéresser le public un jour si aucune librairie ne les met en vente et si des règles sanitaires ont décimé les salons ? Une fois encore : mystère... C’est le mystère dans lequel je suis né, j’ai grandi, et je mourrai. Que « ça n’intéresse pas grand-monde », qu’il est inutile de produire ces choses, que c’est de la foutaise pour une élite d’intellos, c’est de cette façon dont on évoque tout ce que j’aime lire malgré les libraires, toute la musique que j’écoute malgré les salles de concerts, tous les films que je pourrai voir, durant une semaine, dans trois salles en France maximum, à la seule condition d’aller à Paris pour ça : ça n’intéresse pas grand monde. La disparition de la totalité des œuvres qui constituent ma bibliothèque ne provoquerait pas plus de désordre dans le monde, dans tous les mondes, dans celui du Marché comme dans celui des idées, qu’un battement de cil. Je suis aussi inutile que ces livres. Parce que j’en suis le lecteur et, accessoirement, de temps en temps, le producteur.

L.L. De Mars


La super cherie Une fois la supercherie révélée, une nécessaire réorganisation s’imposa. Les musées, d’abord, furent transformés en centres commerciaux pour marques de luxe. Les plus prestigieux firent la joie de ministères, après une sélection par une commission ad hoc des pièces de décoration compatibles avec les valeurs du pouvoir en place. Les écoles d’art fermèrent du jour au lendemain, obligeant sans plus attendre les étudiants à se réorienter vers des métiers authentiques. La décision provoqua des remous au sein d’un milieu traditionnellement sensible aux idées contre-productives de la contestation. Les individus les plus rétifs à l’autorité – une minorité - prirent le maquis. Désormais montrés du doigt en raison de la vanité de leur démarche, les anciens artistes durent se recycler. Ceux qui essayèrent de persévérer furent accueillis par des sourires navrés et des fous-rires nerveux. L’interdiction de toute monétisation de leur travail les empêcha de faire plus longtemps du prosélytisme. Galeries, librairies, ateliers, théâtres, cinémas n’avaient plus de raisons d’exister et l’ensemble de ces locaux rejoignit le parc immobilier privé. Cependant, certains esprits chagrins continueraient dans l’ombre à nourrir des ambitions artistiques sur un marché clandestin. Ce comportement rétrograde ne concernait, heureusement, qu’une minorité d’enragé.e.s. Les individus qui s’étaient précédemment fourvoyés eurent la lucidité de stopper les dégâts.

Certains, dont la fascination pour le pouvoir se reconnaissait à un goût pour les médailles, breloques et récompenses institutionnelles, intégrèrent les services de l’état en tant que conseillers spéciaux. Beaucoup furent embauchés par des entreprises privées pour contribuer au design de produits utiles. Ce mouvement de réinsertion bénéficia d’un soutien sans précédent du peuple qui, afin de condamner publiquement les errances passées, détruisit les preuves les plus criantes de cette déviance artistique dans des feux de joie allumés devant des hypermarchés. Malheureusement, on ne se débarrasse pas aussi vite d’une maladie qui a, pendant tant de décennies, empoisonné les esprits. Un phénomène inattendu et dangereux débuta de manière anodine. Les enfants se mirent à collectionner des boites de céréales dont l’emballage avait été rehaussé de dessins. Ce mouvement s’amplifia et la fabrication d’un papier toilette décoré de figurines en édition limitée provoqua une crise longue de plusieurs mois. A cause de ces incorrigibles anciens artistes, les objets vraiment utiles perdaient leur première utilité. Un scandale. Les emballages alimentaires furent un temps vierges de toute inscription ce qui se révéla terriblement contreproductif. Finalement, il fut décidé en haut lieu d’autoriser à nouveau les pratiques artistiques. « Mieux vaut dompter le tigre que de le laisser en liberté » , conclut un conseiller.

Vincent Brunner

« Mieux vaut dompter le tigre que de le laisser en liberté », conclut un conseiller.


Ne pas être utile à un tel système de distribution est une sorte de garantie qu’on n’émet pas les signes nécessaires pour incorporer la rentabilité d’un modèle intégralement discriminant, repoussant, brutal, aberrant. Ce n’est pas suffisant pour faire du bon boulot, certes, mais c’est déjà un premier titre de fierté.

La plainte qui s’est élevée depuis les classes culturelles disposant des moyens de l’émettre et de la faire entendre n’est que très apparemment commune, représentative d’une réalité sociale unie : elle est la crainte de quelques privilégiés de la classe bourgeoise de voir

J’énonce quelques banalités : ce n’est pas en tant que créations artistiques mais bien en tant que rouages culturels d’une machine libérale que certains types d’œuvres humaines, quelles qu’elles soient, selon leur degré d’intégration à la circulation des marchandises et à leur

toujours, à la seconde même où l’abdication des différences devient une valeur rentable. Jusqu’au prochain retroussement moral.

certains artistes ont visiblement compris cette mise à l’écart. Pourtant, si au lieu d’accepter l’idée saugrenue, purement culturelle, que l’art produit du lien social, ceux-ci avaient embrassé la puissance critique, destructrice des évidences, renversante des usages et des codes, de l’art, hé bien toute cette pitrerie gouvernementale leur aurait fait le même effet pénétrant qu’à moi-même : celui d’une feuille morte qui tombe ou d’un poil qui frise à mes narines.

L’éjection de certaines activités hors du cours de la vie civile produit une sorte de front étrange, dans lequel se sont retrouvés, par la force des choses, toutes sortes d’acteurs de la vie culturelle et artistique ; en faisant une communauté bigarrée et improbable de productions et de territoires qui vivent pourtant toute l’année de leurs fractures mêmes, de leurs guerre de position et de la certitude de leurs importance, voilà que par le simple geste

Hélas, de l’utilité, il apparaît assez vite qu’il va être difficile de faire consensus... Par exemple, les planches de Fred ont été utiles pour m’arracher à l’horizon prolétarien auquel me destinait ma classe sociale. Les planches de Van et Mutterer ont été utiles à ma formation intellectuelle et à mon émancipation culturelle. Les planches de Hergé sont utiles à l’Hôtel Drouot. Les planches de Blutch sont utiles aux innombrables plagiaires de Blutch. Les planches d’Hergé sont inutiles à ma formation

Voyons si nous pouvons au minimum, faute d’y voir bien clair dans le second terme, penser le premier : qu’est-ce que l’utilité ?

quelconque règles sociales. L’autoritarisme sans nuance apparaîtra moins arbitraire que ce genre d’organisation du monde... Si on voulait déclencher une guerre civile, elle pourrait commencer par des choses aussi anodines que le choix des aliments les plus essentiels dans les rayons de votre supermarché. à des générations d’élèves — simplement pensable ? Posable ?

Apparaissant au milieu du blanc, l’image se structure peu à peu. Mon œil note et multiplie les indications : telle branche qui coupe telle autre, celle-là qui se dresse, cette troisième qui disparaît derrière un buisson. J’évalue distances, proportions, volumes, parfois ça flotte un peu : j’essaie spontanément de rattraper l’équilibre d’une rature, ici, par un zigouigoui, là. Est-ce que tout tiendra debout dans mon format ? Je change de l’ocre au jaune pour aborder les zones chauffées par le soleil. Le bâton de pastel glisse sur la fibre de cellulose avec onctuosité, l’usure de sa pointe m’indique l’inclinaison idoine : selon l’angle, son biseau épaté peint un épais sillon tandis qu’à l’opposé, son arête aiguisée n’imprime qu’un fil ténu. En même temps que celle du paysage, je recense la palette chromatique de ma boîte. Je tâtonne, recherche les correspondances. Enfin, je démarre, alternant les masses colorées dans une gradation – du clair vers le foncé – encore approximative. J’accélère le rythme : les ombres tranchées du début changent en permanence ! La feuille se remplit de couleurs dont l’équilibre menace de basculer à chaque instant. Le plaisant moelleux

TEURS ONT DONNÉ URS COMPLICES DE OUVAIENT RESTER . SI LES CRAYONS ET PAS BEAUCOUP COULÉ, TÉRISTIQUE DU CLAVIER ENDRE DANS TOUT E… APRÈS LE POÈME U PREMIER NUMÉRO, CRAINDRE UN PAVÉ UNIQUEMENT DE MOTS ? NGUES PROSES RÉCITS. OUVREZ OTEZ-Y DES IDÉES.

Je suis assis sur un tabouret pliant de camping. Sur mes genoux croisés, un grand carnet, tenu dans le sens de la hauteur – son format de 60 par 42 centimètres cache presque entièrement mes jambes. J’ouvre et replie sa couverture souple sur son dos de carton rigide. Du sac en tissu posé dans l’herbe à ma droite, j’extrais une boîte de pastels à l’huile, achetée peu de temps avant l’interruption de mes courtes études d’art : vingt-cinq ans plus tard, à la faveur du confinement, j’ai décidé de m’essayer à la couleur, pour la première fois avec ces crayons. Tous deux, l’exercice et l’outil, m’attirent et m’intimident. Le temps est clair et piquant (je porte un bon pull sous mon manteau et mes chaussures isolantes de rando), de belles ombres se détachent sur les branches des arbres. L’éclat du soleil produit de nettes découpes qui s’arrondissent au contact des cylindres d’écorce, jouant de variations jaune pâle ou orangé. Le poste d’observation, dos au sud, se détermine en fonction du cadre de ma feuille et du sujet qui devrait y rentrer – un grand chêne dont le pied baigne dans le houx. Je ne sais pas exactement par où commencer mais je commence quand même. Je me lance et trace légèrement, en ocre clair, la silhouette de ce tronc qui monte et se sépare en plusieurs rameaux. Les traits courent de la partie basse vers le haut de la page, là où devraient à peu près se situer les nuages. J’esquisse les lignes plus ou moins parallèles des fûts, plus fins, du sous-bois qui strient l’arrière-plan. Le dessin commencé, je ne réfléchis plus trop. Mon attention est focalisée au présent sur les gestes d’interprétation en train de s’accomplir. Mon regard oscille, en va-et-vient rapides, des arbres au papier. À la pointe du mouvement, entre ce que je vois et ce que je dessine, le temps d’anticipation est très court, quasi-nul, tandis que simultanément, dans un autre tempo sous mon crâne, le cerveau embrasse le paysage autant que les détails. Ma main gauche tient fermement le coin du haut pour maîtriser la courbure de ce grand carnet. Ma main droite s’active prestement, échafaudant du tac au tac des réponses aux questions que lui posent les yeux. Posté à cinquante mètres de mon sujet, je perçois crûment la vitesse de la lumière fluctuant sur le motif. Un nuage qui passe, le vent dans les feuilles, le mouvement de la terre autour du soleil. Il faut sélectionner et mémoriser ces instants : les lignes tracées sont une traduction intensive des trois dimensions, appliquée au plan de la page, la formulation d’un langage en direct.

EZ !

UNE EXPÉRIENCE

son arête aiguisée n’imprime qu’un fil ténu. En même temps que celle du paysage, je recense la palette chromatique de ma boîte. Je tâtonne, recherche les correspondances. Enfin, je démarre, alternant les masses colorées dans une gradation – du clair vers le foncé – encore approximative. J’accélère le rythme : les ombres tranchées du début changent en permanence ! La feuille se remplit de couleurs dont l’équilibre menace de basculer à chaque instant. Le plaisant moelleux du pastel conduit parfois à s’égarer. « Less is more » me souffle à l’oreille ma pratique, plus assurée, du noir et blanc. Je relève le nez vers le paysage et rattrape un brun trop outré par un rehaut jaune d’œuf, une marque de vert-de-gris (les strates translucides du pastel se un par sanguine superposent, s’additionnent et parfois s’estompent, jusqu’à être saturées par trop d’épaisseur). Une partie des troncs se détache, leur relief gagnant avec l’ajout discret d’un bleu. Devant, c’est le houx qui s’effondre, aplati par trop de couleur sombre.

Comme en situation de danger ou d’urgence, mes sens sont désormais affutés au possible. Au-delà du sujet qui m’occupe, rien ne semble échapper à mon champ de vision. Un regard en arrière à la courbe de l’astre me confirme qu’il faut en finir. Une promeneuse s’approche – la clairière au centre de laquelle je suis à découvert a, jusqu’alors, découragé curieux et joggers du parc : « Ah, dit-elle en penchant la tête sur le côté, ça fait du bien de voir quelqu’un qui prend son temps. » Hochant du chef à mon tour, je la salue, elle repart en silence pour ne pas me gêner. Je reviens à l’image, la fatigue est là, il faut conclure. Réussie ou pas, c’est trop tôt pour le dire. Est-ce d’ailleurs vraiment la question ? Dans l’immédiat, je profite de l’élan. Où en étais-je ? J’attaque les blanc, gris, bleu du ciel entre les fines et hautes branches. Les volutes des nuages se dégradent au loin dans le tournant de l’après-midi, l’orée du bois plonge dans l’ombre. Une pointe de violet, quelques touches d’outremer qui se croisent en fond à nouveau du blanc sur l’écorce. C’est fini. Fourmillements dans les jambes, visage glacé sous le bonnet, main gauche tendue par l’immobilité et par le froid, doigts de la dextre pleins de couleurs qui poissent, je ramasse mon paquetage et pense au thé chaud et fumé qui conclura ma marche. Voilà passées deux heures à se laver les yeux.

Morvandia u

DANS UN CONTEXTE SOCIAL INÉDIT, L’ASSOCIATI ON QUAI DES BULLES, FIDÈLE À SON OBJECTIF PREMIER DE FAVORISER LA CRÉATION, A À CŒUR DE DÉVELOPPER DE NOUVEAUX PROJETS

RÉALISER UNE BD

Tournée de l’exposition en Bretagne L’exposition propose de découvrir étape par étape la réalisation d’une BD, de l’idée initiale à la sortie en librairie. Du 2 au 30 janvier Espace culturel de Malestroit (56)

Du 5 au 28 février


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L.L. De Mars

•91 400 000 000 €, chiffre d’affaires des industries culturelles en France, +6,7% entre 2013 et 2018 L’art est inutile.

•1 300 000, personnes ayant tiré un revenu direct ou indirect d’une activité culturelle en 2018 L’art est inutile.

•260 000 artistes et auteurs en France environ L’art est inutile.

•78 000 titres de livres déposés par an L’art est inutile.

•5000 BD en moyenne par an ?

RESPONSABLE DE LA PUBLICATION : Georges Coudray COMITÉ DE RÉDACTION Hervé Beilvaire Alexia Chaignon Joub Laurent Lefeuvre Anneclaire Macé Zanzim GRAPHISME Ateliers Beaux Diables TEXTES Vincent Brunner Marc-Antoine Boidin Gwen De Bonneval Olivier Jouvray Kris Le lièvre de Mars Lomig Morvandiau Annaïg Plassard Fabien Vehlmann PUBLICATION ÉDITÉE par l’association Quai des Bulles BP40652 35406 Saint-Malo Cedex Revue gratuite. Ne peut être vendue. IMPRESSION Media Graphic 2021 Photos © 2021 Adobe All rights reserved

LOMIG L’artiste, en tant que composante de la société, ne doit ni être avantagé ni être abandonné. Il représente néanmoins, de par sa place ambiguë et son statut bringuebalant, une sorte « d’avant-garde de la lose ». Il évolue dans un monde ultra-libéral où la devise « marche ou crève » lui est quasiment imposée. A l’exception des quelques heureux élus qui rencontrent le succès, l’artiste fait majoritairement partie d’une masse paupérisée de plus en plus importante qui a connu « l’Uberisation de la société » avant l’heure.

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Alors, soyons inutiles, n’ayons l’air de rien

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Parce qu’en situation de crise, manger est utile, dormir est utile, s’habiller aussi, se soigner sûrement. Mais l’art, pffff, allons donc. C’est un luxe qu’on ne peut s’offrir qu’à la condition d’avoir tout le reste. On veut un pays sain dans un corps sain. Relancez le marché, regonflez le PIB, et on verra ensuite comment décorer nos murs. » Bon ben je suis bien avancé moi. Je suis censé être un artiste et donc

Hélas, de l’utilité, il apparaît assez vite qu’il va être difficile de faire consensus... Par exemple, les planches de Fred ont été utiles pour m’arracher à l’horizon prolétarien auquel me destinait ma classe sociale. Les planches de Van et Mutterer ont été utiles à ma formation intellectuelle et à mon émancipation culturelle. Les planches de Hergé sont utiles à l’Hôtel Drouot. Les planches de Blutch sont utiles aux innombrables plagiaires de Blutch. Les planches d’Hergé sont inutiles à ma formation

Voyons si nous pouvons au minimum, faute d’y voir bien clair dans le second terme, penser le premier : qu’est-ce que l’utilité ?

Marc-Antoine Boidin

L’art, inutile ? Je pensais la question réglée depuis longtemps mais depuis quelque mois, on nous sert une nouvelle chanson : « Définissez vos priorités mesdames et messieurs, on passe en mode restreint et nous ne pourrons pas tout sauver. Pensez à bouffer, à vous vêtir, à vous loger, à vous soigner, à produire surtout, l’art passera en- dernier. Nous sommes en guerre, ressortons nos discours de circonstance, nos postures martiales, nos injonctions performatives, nos ordres de marche, il s’agit de survivre. On veut des « très bien monsieur le Président » et des « à vos ordres monsieur le chef militaire ».

Métro, boulot, dodo, j’ai peur de n’être plus qu’un robot. On me dit de penser productivité, rentabilité, travailler, encore, toujours, sans m’arrêter. Il s’agit de s’adapter au marché. Mais je n’y arrive plus, et surtout je ne comprends plus, il y a comme un truc qui vient de lâcher. Par moment, j’arrive pas à m’en empêcher, il faut que je trace de petits mots, de petits dessins dans un cahier. J’en ai besoin pour continuer à respirer, pour me sortir un peu la tête de l’eau. Dans ces pages griffonnées, mots et dessins m’ont alors révélé, la perspective d’une toute autre réalité. Il est peut-être temps de m’y aventurer, ainsi par le coeur, je me laisse guider. Avant de devenir tout à fait un robot, je décide de quitter mon boulot. Contrairement à l’image

l’art et le vivant

La revue QDB n°2 Février – Mai 2021 ISSN 2777-2438

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L’éjection de certaines activités hors du cours de la vie civile produit une sorte de front étrange, dans lequel se sont retrouvés, par la force des choses, toutes sortes d’acteurs de la vie culturelle et artistique ; en faisant une communauté bigarrée et improbable de productions et de territoires qui vivent pourtant toute l’année de leurs fractures mêmes, de leurs guerre de position et de la certitude de leurs importance, voilà que par le simple geste

L’art est inutile ! - ... L’art est inutile.... Lar ét inutil.. L.r e. .nut. _.. - \ -. -.

Selon le champ, le milieu social où elle éclot, la question semble aborder toutes sortes d’objets disparates : y parle-t-on des œuvres ? Des artistes eux-mêmes ? De vrais artistes en particulier ou bien de « l’artiste » comme image, comme représentation générale ? De l’histoire des œuvres et du patrimoine ? De la culture ? Du cadre social d’apparition des œuvres, qui semble englober de façon floue l’édition, les galeries, les théâtres, les musées ? De la capacité humaine à produire certaines catégories de formes ? De ces formes ellesmêmes ? Des techniques pour les produire ? Des règles qui en déterminent les usages ? De la circulation de ces formes sur un marché ? S’agit-il d’un trait anthropologique ou d’une déviance socio historique ? D’une forme du jugement ?

Annaïg Plassard

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romantique qu’on souhaite lui accoler, l’artiste n’est pas moins prisonnier que tout autre individu évoluant dans notre société de consommation, et n’est pas épargné par la compétition, fut-elle plus ou moins joliment camouflée. Pour subvenir à ses besoins par l’exercice de son art, il n’a que peu le choix. Dans le meilleur des cas, il peut espérer une amélioration de son quotidien -et un meilleur sort que son voisin de celluleen mettant sur le marché des « produits culturels » qui se vendront peut-être… S’il prend la bonne vague, s’il est en phase avec ses contemporains. On lui impose également de plus en plus souvent d’assurer sa propre promotion. Ainsi devient-t-il une « marque » sur laquelle plus ou moins miser.

Même lorsqu’il se pense libre, juste, rebelle, l’artiste est en position de se faire instrumentaliser. Et son éditeur de le féliciter :

« Bravo l’artiste ! Ton pamphlet contre la société capitaliste, croissantiste, productiviste, extractiviste, destructrice du vivant, est en tête des ventes ! »

Je change de l’ocre au jaune pour aborder les zones chauffées par le soleil. Le bâton de pastel glisse sur la fibre de cellulose avec onctuosité, l’usure de sa pointe m’indique l’inclinaison idoine : selon l’angle, son biseau épaté peint un épais sillon tandis qu’à l’opposé, son arête aiguisée n’imprime qu’un fil ténu. En même temps que celle du paysage, je recense la palette chromatique de ma boîte. Je tâtonne, recherche les correspondances. Enfin, je démarre, alternant les masses colorées dans une gradation – du clair vers le foncé – encore approximative. J’accélère le rythme : les ombres tranchées du début Retour couleurs dont se remplit devers changent en permanence ! La feuillela bayday inutile. l’équilibre menace de basculer à chaque instant. Le plaisant moelleux du pastel conduit parfois à s’égarer. « Less is more » me souffle à l’oreille ma pratique, plus assurée, du noir et blanc. Je relève le nez vers le paysage et rattrape un brun trop outré par un rehaut jaune d’œuf, une marque de sanguine par un vert-de-gris (les strates translucides du pastel se superposent, s’additionnent et parfois s’estompent, jusqu’à être saturées par trop d’épaisseur). Une partie des troncs se détache, leur relief gagnant avec l’ajout discret d’un bleu. Devant, c’est le houx qui s’effondre, aplati par trop de couleur sombre.

(nous serons tout).

La plainte qui s’est élevée depuis les classes culturelles disposant des moyens de l’émettre et de la faire entendre n’est que très apparemment commune, représentative d’une réalité sociale unie : elle est la crainte de quelques privilégiés de la classe bourgeoise de voir

L’art est inutile...

À quel moment une question sur l’utilité de l’art est-elle — hors de la préface à mademoiselle de Maupin et des pensums qu’elle a fourni à des générations d’élèves — simplement pensable ? Posable ?

Ne fuyons pas trop vite les coins sombres. Creusons des tunnels dans les idées prêtesà-penser, fabriquons des textes, des chansons, des films, des pièces de théâtre, des peintures, des dessins faits d’ombre et de lumière.

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De ces foutaises normatives, je m’épargnerai tout commentaire supplémentaire à ce qui a largement été dit. Notamment parce qu’à partir d’un certain seuil de singularité dans l’organisation de votre mode de vie, hé bien, plus personne ne vous comprend... Ajoutons qu’il n’est pas bon du tout d’inviter qui que ce soit à comparer ses urgences à celles des autres, surtout pas dans le but absurde d’en tirer une hiérarchie générale pour de quelconque règles sociales. L’autoritarisme sans nuance apparaîtra moins arbitraire que ce genre d’organisation du monde... Si on voulait déclencher une guerre civile, elle pourrait commencer par des choses aussi anodines que le choix des aliments les plus essentiels dans les rayons de votre supermarché.

On ne se souhaite pas de souffrance à soi-même ni aux êtres qu’on aime, et bien sûr quand la galère est longue il faut connaître autre chose. Mais lorsqu’on se berce de l’illusion qu’on pourrait n’avoir que la lumière, on prend le risque que ce désir finisse par tout brûler dans un ultime et écrasant éclat.

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L’art est-il utile?

éminemment sociale, de l’utilité de l’art, de son articulation substantielle à la vie collective, on a choisi l’indéfinissable notion d’essentialité. Je vois bien toute la dramaturgie et les petits effets rhétoriques qui la charpentent : « essentiel à la vie », voilà une façon d’excéder de quelques crans la notion d’utilité, au cas où quelques pinailleurs auraient commencé à opposer leurs utilités à d’autres, leurs priorités à celles des autres. Devant l’essentiel, il n’y a pas de priorité. Il n’y a rien au-delà.

La nuit, l’ombre, la chute, la dégénérescence, la vulnérabilité, les innombrables tunnels à traverser dans la peur sont une partie de nos existences.

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Mais être tous unis dans le désaveu de la marchandise ne suffit probablement pas à y voir plus clair dans l’idée d’une unité de l’art, ni à faire réellement communauté, qu’elle soit d’intérêts, de corps, de pratiques, ou de visions... On aura bien pigé que c’est une blessure narcissique, abandonnique, qui s’est exprimée par toutes les voix attendant que soit reconnue l’utilité, « l’essentialité » de l’art : ce n’est pas en tant que producteurs de choses inutiles mais bien en tant que pauvres créatures ontologiquement inutiles, que certains artistes ont visiblement compris cette mise à l’écart. Pourtant, si au lieu d’accepter l’idée saugrenue, purement culturelle, que l’art produit du lien social, ceux-ci avaient embrassé la puissance critique, destructrice des évidences, renversante des usages et des codes, de l’art, hé bien toute cette pitrerie gouvernementale leur aurait fait le même effet pénétrant qu’à moi-même : celui d’une feuille morte qui tombe ou d’un poil qui frise à mes narines.

les discours politiques et les parcs institutionnels, au pire l’argument mausoléifiant d’un mythe national ou régional.

On est dingues d’accorder tant de crédit à l’idée que seule la lumière est désirable, dingues de fabriquer des prêtsà-penser sur cette base. C’est aussi déséquilibré que de croire que seuls la croissance, l’élévation, le zénith ou la puissance sont bels et bons.

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La bande dessinée a longtemps été mon refuge. Mais un refuge sans la solitude. Depuis l’image de Gaston, roupillant bienheureusement au fond d’une caverne de livres, jusqu’à la maison bibliothèque de Pratt, j’avais le rêve d’une vie éternelle au fond d’un cocon formé de dessins, cases et bulles, assemblés en reliures fascinantes et où je pourrais à jamais rêver éveillé, aux côtés de myriades de personnages. Inutile d’aligner de longues listes de références bédéphiles, prenez tous les journaux Spirou, Tintin, Circus ou encore Gomme et vous aurez les murs fantasmés de ma caverne d’alors. Un jour, enfin un jour qui dura quand même au moins le temps de peu à peu, j’ai grandi et je suis sorti voir le monde. Mais il n’a jamais été question de laisser mon antre chaleureux derrière moi. Simplement, je l’ai transformé en mobil-home et je l’ai chargé de m’ouvrir la route, de me faire parcourir la planète telle qu’elle était et de me l’éclairer. Ça tombait bien. C’était l’un des virages que des auteurs et autrices de bande dessinée avaient décidé de prendre. Ma caravane désormais ambulante s’est couverte des dessins de Sacco et ses guerres, de Davodeau et ses paysans, de Satrapi et ses noirs et blancs, de Guibert et son photographe. J’étais devenu adulte et la bande dessinée, enfin une toute petite partie d’entre elle, devenait « réelle ». Le passage secret découvrait soudainement que ses torches ne servaient pas seulement à créer des ombres mystérieuses. La bande dessinée se réinventait en outil.

J’énonce quelques banalités : ce n’est pas en tant que créations artistiques mais bien en tant que rouages culturels d’une machine libérale que certains types d’œuvres humaines, quelles qu’elles soient, selon leur degré d’intégration à la circulation des marchandises et à leur

Et ça n’est pas si grave, c’est même sûrement nécessaire ! Des prêts-à-penser pour se comprendre plus vite, qui ont en outre l’avantage de laisser croire qu’on tombe d’accord sur des grands principes.

On tâtonne courageusement un peu plus loin, les yeux s’habituent à l’obscurité. Son épaisseur est enveloppante. Et c’est finalement cette lumière implacable tout au bout qui pourrait bien se mettre à nous fiche la trouille.

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Ne pas être utile à un tel système de distribution est une sorte de garantie qu’on n’émet pas les signes nécessaires pour incorporer la rentabilité d’un modèle intégralement discriminant, repoussant, brutal, aberrant. Ce n’est pas suffisant pour faire du bon boulot, certes, mais c’est déjà un premier titre de fierté.

des règles de discrimination hiérarchique entre les œuvres tant qu’elles leurs bénéficiaient. Gageons que si nous oublions un instant les lignes de séparation tracées entre les territoires au nom d’un front de lutte noble et commun, leur premier réflexe sera de retracer ces lignes dès que le cours des bénéfices aura retrouvé ses courbes habituelles. Tout discours commun se volatilisera au nom du pragmatisme marchand, celui-là même qui, pour un instant seulement, un petit tour d’épidémie, traçait d’autres lignes de démarcation utilitaristes. Il est toujours fascinant de voir les dominants réclamer l’abdication des différences sur lesquelles ils prospèrent depuis toujours, à la seconde même où l’abdication des différences devient une valeur rentable. Jusqu’au prochain retroussement moral.

Cette lumière après une année difficile est probablement une métaphore de l’espoir. Mais ces mots-là mis ensemble, “la lumière au bout du tunnel”, forment surtout un bon gros cliché. Une image toute faite se basant sur l’idée que la lumière est préférable à l’ombre.

Restons encore un peu dans ce tunnel et ouvrons grands les yeux. Dans le noir on distingue des formes, on ose avancer la main : on touche une matière à laquelle on ne s’attendait pas. On la retire vivement ! Qu’est-ce qu’on fout là déjà ? On explore la métaphore... C’est glauque là-dedans.

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carnet. Ma main droite s’active prestement, échafaudant du tac au tac des réponses aux questions que lui posent les yeux. Posté à cinquante mètres de mon sujet, je perçois crûment la vitesse de la lumière fluctuant sur le motif. Un nuage qui passe, le vent dans les feuilles, le mouvement de la terre autour du soleil. Il faut sélectionner et mémoriser ces instants : les lignes tracées sont une traduction intensive des trois dimensions, appliquée au plan de la page, la formulation d’un langage en direct. Apparaissant au milieu du blanc, l’image se structure peu à peu. Mon œil note et multiplie les indications : telle branche qui coupe telle autre, celle-là qui se dresse, cette troisième qui disparaît derrière un buisson. J’évalue distances, proportions, volumes, parfois ça flotte un peu : j’essaie spontanément de rattraper l’équilibre d’une rature, ici, par un zigouigoui, là. Est-ce que tout tiendra debout dans mon format ?

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2021. Ça y est, on aperçoit la lumière au bout du tunnel.

Mais si on aime les tunnels ? Si on est curieux de ce qui se cache dans l’ombre ? Ça peut faire un peu peur, mais on ne déteste pas toujours se faire peur. Et puis ce ne sont que des images fabriquées avec des mots. Que pourrait-il arriver de mal ?

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Dès que les librairies auront repris leur place dans l’économie brutale dont elles sont, elles-aussi, des rouages volontaires, elles ne se contenteront pas de reprendre leurs habitudes : elles les renforceront. Elles renforceront les hiérarchies discriminantes entre les livres (livres utiles, inutiles, essentiels, dispensables) st en se justifiant de la dure période qu’elles es viendront de traverser, des impératifs économiques supérieurs desquels elles dépendent. En trouvant là des raisons supplémentaires d’écarter de leurs rayons les livres « qui ne marchent pas », « qui n’intéressent pas le la public ». En réduisant drastiquement de créations un part déjà minuscule accepqu’elles peu singulières vrai À parfois. taient

Des premiers on dira, pour expliquer qu’il est impossible d’en trouver une seule trace dans une ville de 215 000 habitants, que ça n’intéresse pas grand-monde. Comment « grandmonde » pourrait-il s’intéresser à quelque chose dont il ignorera à jamais l’existence ? Comment « grand-monde » pourrait-il juger de la pertinence de livres qu’il n’aura jamais sous les yeux ? Comment « grand-monde » pourrait aimer ou ne pas aimer un livre sur lequel aucun journaliste n’a écrit une ligne, dont aucun libraire ne lui présentera jamais d’exemplaire, ne lui parlera jamais ? Mystère...

0. Sur toute la ville. Pour chaque sortie, pour chacun de leurs livres. Le cinquième volume de L’arabe du futur, vous n’aurez pas besoin de le chercher : vous buterez sur une pile d’exemplaires partout où se vendent des bandes dessinées, librairies spécialisées ou pas. Vous le connaîtrez. Vous le connaissez déjà.

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Si l’artiste contemporain semble donc utile, c’est d’abord pour la société marchande à laquelle il appartient. Tenu de produire de plus en plus, pour des revenus qui s’amaigrissent progressivement, au milieu d’un nombre grandissant de collègues, il est un des rouages parmi d’autres de la « méga-machine » qui impose l’aliénation des individus et étend la « mercantilisation totale » du Monde.

Comme en situation de danger ou d’urgence, mes sens sont désormais affutés au possible. Au-delà du sujet qui m’occupe, rien ne semble échapper à mon champ de vision. Un regard en arrière à la courbe de l’astre me confirme qu’il faut en finir. Une promeneuse s’approche – la clairière au centre de laquelle je suis à découvert a, jusqu’alors, découragé curieux et joggers du parc : « Ah, dit-elle en penchant la tête sur le côté, ça fait du bien de voir quelqu’un qui prend son temps. » Hochant du chef à mon tour, je la salue, elle repart en silence pour ne pas me gêner. Je m’en suis emparé comme un prisonnier avide de s’évader de l’évasion. Fini de rêver planqué au chaud, on allait agir, impacter, rendre compte, dénoncer, montrer, être… utile. Ça a pris un peu de temps pour faire son chemin mais, bientôt, cette bande dessinée qui avait jeté au feu ses oripeaux d’aventurier, est apparue partout en costard mondain, invitée sur les plateaux, placardée en couverture, érigée en modèle à suivre. Aujourd’hui, pas une semaine ne se passe sans que plusieurs albums, pardon des romans visuels, ne débarquent en librairie pour vous décortiquer le réel façon puzzle. J’y ai pris régulièrement ma part, pas question de la laisser à Milou. Et puis, d’un coup, l’année double 20, on s’est retrouvé non-essentiels. Inutiles.

Je reviens à l’image, la fatigue est là, il faut conclure. Réussie ou pas, c’est trop tôt pour le dire. Est-ce d’ailleurs vraiment la question ? Dans l’immédiat, je profite de l’élan. Où en étais-je ? J’attaque les blanc, gris, bleu du ciel entre les fines et hautes branches. Les volutes des nuages se dégradent au loin dans le tournant de l’après-midi, l’orée du bois plonge dans l’ombre. Une touches d’outremer qui se pointe de violet, quelques Kris sur l’écorce. C’est fini. blanc du nouveau à fond en croisent Fourmillements dans les jambes, visage glacé sous le bonnet, main gauche tendue par l’immobilité et par le froid, doigts de la dextre pleins mon paquetage et pense au thé de couleurs qui poissent, je ramasse Monsieur Voilà passées deux heures marche. ma chaud et fumé qui conclura le Président, puis-je contester ? à se laver les yeux. Alors même que le monde s’injectait de l’info continue en guise d’oxygène, on a décrété que, finalement, nos éclairages n’étaient pas franchement indispensables. Et putain, en vrai, ça tombe bien. Ça fait quelques années que ça mûrissait, lentement mais sûrement. De nouveau, je rêve de rêver. De lire juste pour lire. D’écrire simplement pour raconter. D’en revenir à la bande dessinée méprisée, qui ne fera jamais plus de 5% des médiatiques entrefilets. J’ai le désir, comme l’affirmait si bien le grand Hugo, d’être de nouveau inutile. Et je suis à peu près certain qu’en vrai, c’est ce dont nos contemporains ont le plus besoin. Alors, soyons inutiles, n’ayons l’air de rien (nous serons tout).

défendre l’art. Le problème c’est que l’art je m’en fous complètement. Parce que je ne sais pas ce que c’est. J’ai jamais compris. Chacun a sa définition, chacun s’en accommode, l’art un ventre mou qui absorbe tout. Perso, je préfère parler de culture. J’aime bien la culture. Alors oui, c’est plus vague, carrément imprécis même. Mais plus inclusif aussi alors ça

Hum, hum… (Raclement de gorge)

Oserais-je émettre un avis différent ?

Morvandiau

Allo ? Monsieur le Président ? me va. Si ça ne vous convient pas, remplacez le mot « culture » par le mot « art » dans la suite du texte et ça devrait bien se passer. Maintenant je peux reprendre. Hum, hum… (Raclement de gorge) Monsieur le Président, puis-je contester ? Oserais-je émettre un avis différent ?

Non parce que moi la culture, je l’ai régulièrement mise en haut de mes priorités, c’est peut-être un peu idiot non ? Éclairez-moi monsieur le chef militaire parce que bêtement, moi, je pense que la culture, c’est prendre le temps d’observer, le temps de penser, le temps de raconter, le temps du partage, le temps du « tous ensemble, tous ensemble, ouais ! ».

Comme ça, avant de manger, on se demande ce qu’on mange, comment on s’habille, avec qui on cohabite, avec quoi on se soigne. Vous comprenez Monsieur le Président ? C’est peut-être pas très clair alors je vais préciser : La culture sollicite notre raison et nos émotions pour penser, ressentir et donner du sens à tout le bazar qui nous entoure.

Si vous regardez bien, la culture fait surgir dans l’espace public une manifestation sensible de nos pensées communes, c’est une conscience du temps et de l’espace, des choses invisibles ou trop fugaces vous voyez ? C’est se regarder et se raconter ensemble, c’est apprendre et transmettre, c’est sentir et faire ressentir…

Allo ?… Allo ? Monsieur le Président ? Allo ?…

Olivier Jouvray

Allo ? Monsieur le Président ? Allo ?…

Pourtant l’art est nécessaire… L’art sous toutes ses formes est une activité sociale par excellence. Même si la raison d’être de l’art ne demeure jamais entièrement la même, quelque chose dans l’art exprime néanmoins une vérité immuable. Des traits constants se retrouvent, y compris dans un art déterminé par son époque. Les fonctions de créer du lien, du commun, de comprendre et donner du sens, de décrypter, d’accepter le monde dans lequel on évolue (avec le risque de se retrouver acteurs de la propagande de notre société), paraissent traverser les âges.

L’art a le pouvoir de renforcer le collectif. Selon Ersnt Fischer, l’art recèle en lui une dualité : « il est le moyen indispensable de la fusion del’individu et de la société »… Mais il permet également à l’individu de « prendre ses distances en trouvant dans l’art la liberté heureuse dont le privent les facteurs du quotidien. »

L’art est aussi capable d’exercer un pouvoir sur le monde. Bertold Brecht dit du théâtre qu’il « doit susciter le frémissement de la compréhension et exercer les hommes au plaisir de changer la réalité ». Mais les œuvres doivent rester vraies et ne pas être accommodées à des fins de propagande. « Une œuvre d’art est de bonne qualité quand elle est née d’une nécessité. C’est la nature de son origine qui la juge », semble répondre Rainer Maria Rilke.

Si une croissance est aujourd’hui souhaitable, c’est bien la présence de l’art dans nos vies, étendue au plus grand nombre, tant en création qu’en réception. En favorisant la capacité des humains d’être des artistes, nous faisons grandir notre capacité à changer notre regard sur le monde, à transformer notre rapport avec celui-ci, à faire évoluer nos identités et nos cultures.

Il parait plus évident aujourd’hui à plus de monde, que nos modes de vie ne peuvent perdurer. La pandémie du covid-19 nous a gentiment rappelé à la réalité et aux contraintes physiques de la biosphère… L’art sera-t-il capable d’aider les humains à relever les défis majeurs en cours ? À traverser l’accumulation des crises profondes et les bouleversements écologiques ? À trouver des nouvelles formes de relations vertueuses avec le vivant, de mutualisme, de co-évolution ?

Pour tout cela il faudra rompre avec les structures profondes de notre société. Profiter de son ralentissement actuel pour imaginer et frayer des voies possibles, inventer, raconter, se projeter et mettre en action.

Et d’abord freiner notre monde, le mettre à l’arrêt. L’arrêt utile. L’art est utile. Gwen de Bonneval


DANS UN CONTEXTE SOCIAL INÉDIT, L’ASSOCIATION QUAI DES BULLES, FIDÈLE À SON OBJECTIF PREMIER DE FAVORISER LA CRÉATION, A À CŒUR DE DÉVELOPPER DE NOUVEAUX PROJETS POUR CONTINUER À PROMOUVOIR ET VALORISER LE MÉTIER D’AUTEUR DE BANDE DESSINÉE. PROJET PARMI D’AUTRES, LA REVUE QDB EST CRÉÉE PAR DES AUTEURS POUR QUESTIONNER LES PRATIQUES ARTISTIQUES. ELLE EST DIFFUSÉE GRATUITEMENT DANS LE GRAND OUEST. Voici l’agenda prévisionnel des événements organisés cet hiver et ce printemps (modifications possibles selon l’évolution de la situation sanitaire).

EXPOSITIONS Jusqu’au 15 avril,

6 expositions urbaines, en extérieur, en accès libre à Saint-Malo.

The New Yorker

Adrian Tomine Place des Frères Lamennais

Peau d’Homme

Zanzim et Hubert Parcours Intra-Muros

Comics : dans la tête d’un auteur Laurent Lefeuvre Lycée Maupertuis

Théodore Poussin

Franck Le Gall Quartier de la découverte, 23 rue de l’Arabie

Les filles des Marins perdus Teresa Radice et Stefano Turconi. Gare Maritime de la bourse

Ar Men - L’enfer des enfers Emmanuel Lepage Lycée Maritime

RÉALISER UNE BD

Tournée de l’exposition en Bretagne L’exposition propose de découvrir étape par étape la réalisation d’une BD, de l’idée initiale à la sortie en librairie. Du 2 au 30 janvier Espace culturel de Malestroit (56)

Du 5 au 28 février Bibliothèque de Plouédern (29)

Du 2 au 31 mars

Médiathèque de Bourg-Blanc (29)

COULEURS

Du 9 février au 27 mars Médiathèque de Pontault-Combault (77)

LES SPÉCIFICITÉS DU COMICS

Du 6 janvier au 31 mars

Antenne de la Bibliothèque départementale du Finistère à Saint-Divy (29) (réservé au public pro)

JEUNES TALENTS

Du 11 février au 12 mars

Crédit Agricole d’Ille et Vilaine, La Courrouze, Rennes L’exposition des 16 lauréats du concours jeunes talents 2020.

AKISSI AMBIANCE LE MONDE

PRIX BD JEUNESSE VILLE DE ST MALO / QUAI DES BULLES

Encrage épisode #5

Qui sont les lecteurs de bande dessinée ? Avec Octavia Killian, Vincent Monadé et Thierry Groensteen. Disponible le 26 janvier.

Encrage épisode #6

Ce prix, créé dans le cadre de l’événement national BD2020, est porté par Quai des Bulles en partenariat avec la Ville de Saint-Malo. Décerné par un jury d’écoliers en classe de cm1/cm2, il est une opportunité de faire entrer la BD en classe et de favoriser la lecture.

Le métier de coloriste. Avec Laurence Croix & Isabelle Merlet. Disponible le 23 février.

Les 5 albums en compétition :

INTERVENTIONS AUTEURS

• Raowl t.1 de Tebo (Dupuis) • La tête dans les étoiles de Jen Wang (Akiléos) • Toni de Philip Waechter (Rue de sèvres) • Fils de sorcières de L’Hermenier / Stedho (Jungle) • Le roi des oiseaux de Alexander Utkin (Gallimard) Rendez-vous en avril pour l’annonce officielle du lauréat du prix !

PRIX JEUNES TALENTS 2020 Les planches des 16 lauréats sont disponibles à la lecture sur notre site internet, rubrique « prix ». Le jury, parrainé par Fabien Vehlmann a attribué 4 prix : Grand Prix Jeunes Talents : Jean CREMERS, 23 ans

Encrage épisode #7

Quand la BD raconte l’actualité. Disponible le 30 mars.

Encrage épisode #8

Disponible le 27 avril.

Dans le cadre de l’exposition « Réaliser une BD », les rencontres auteurs sont réservées au public scolaire. 1er février Médiathèque de Malestroit (56) Avec l’auteur Joub. 15 février Bibliothèque de Plouédern (29) Avec l’auteur Julien Weber. 30 mars Médiathèque de Bourg Blanc (29) Avec l’auteur Julien Weber.

ATELIERS BD Avec l’Académie Malouine d’Arts Plastiques de Saint-Malo. Ces ateliers BD sont animés par des auteurs et à destination des jeunes. Ils ont lieu les mercredis de 14h à 16h ou de 16h30 à 18h30. Il reste quelques places ! Infos et inscriptions auprès de l’AMAP : 02 99 56 22 30.

L’échangeur à Château-Thierry (02)

Prix Découverte (plus de 16 ans) : Elliot ROYER, 22 ans

MONSTROBULLES

Prix Jeune Espoir (12/16 ans) : Nelson TECHER, 13 ans

Avec Pascal Bresson

Prix moins de 12 ans : Eglantine HUCHET, 10 ans

Avec Zanzim

PODCASTS

Rendez-vous mi-mai pour le troisième et dernier numéro de la Revue QDB.

Du 22 Mars au 10 avril

Du 2 avril au 2 mai

Médiathèque de La Grande Passerelle, Saint-Malo Exposition jeune public autour des Monstres et les émotions, d’après l’univers de Marie Frisson de Olivier Supiot & Éric Baptizat.

BAS LES MASQUES ! Du 17 avril au 16 mai

Tour Bidouane, Saint-Malo

Disponibles sur Soundcloud, Deezer, Spotify, Apple podcast, Et sur notre site internet, www.quaidesbulles.com

Du 6 janvier au 7 avril Du 14 avril au 23 juin

Retrouvez l’intégralité des œuvres publiées ainsi que notre actualité sur : www.quaidesbulles.com


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