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L’architecture selon Manuelle Gautrand

''Impact minimum, L’ARCHITECTURE Gautrand Manuelle selon mise en scène maximum''

Invitée par la Maison de l’architecture et le Caue de Haute-Savoie lors d’une conférence à Annecy, l’architecte Manuelle Gautrand a présenté sa vision de l’architectureet les enjeux actuels. Elle nous dévoile les points communs de ses réalisations. Sans oublier d’évoquer l’agrandissement réalisé aux Galeries Lafayette d’Annecy dont les travaux se termineront au printemps. Autant de pistes de réflexion pour construire la ville de demain.

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Texte Patricia Parquet

JOËLLE DOLLÉ

Le Belaroia, rue Jules Ferry à Montpellier, regroupe des hôtels, des appartements, un restaurant, un spa et un parking.

LUC BOEGLY Immeuble de 21 logements, avenue Edison à Paris, réalisés en co-conception avec les acquéreurs. Très originale, la création d’un « paysage vertical » en façade. Au total, 290 grandes jardinières ont été installées en façade.

Le Belaroia à Montpellier, facilement identifiable avec sa façade blanche perforée.

LUC BOEGLY

Manuelle Gautrand habille ses façades comme un couturier ses mannequins

C’est une amoureuse de la ville et ses projets sont très urbains. Née en 1961 à Marseille, Manuelle Gautrand dirige une agence d’architecture à Paris, qui intervient pour de grands projets un peu partout en France et à l’étranger. Elle a été la première femme élue présidente de l’Académie d’architecture en 2016. La réalisation du showroom Citroën C42 sur les ChampsElysées la révèle au grand public. On dit de son architecture qu’elle est expressive. Elle part souvent d’une page blanche. Ses projets ne se ressemblent pas et elle le revendique. « On cherche à être contextuel dans chaque projet, à être ciselé par rapport à un site, un client par rapport à un programme et une époque », explique Manuelle Gautrand, lors de la conférence à Annecy, tenue dans la salle Pierre Lamy le 15 octobre dernier, organisée par la Maison de l’architecture et le Caue de Haute-Savoie.

CRÉER DES BALISES URBAINES

Quels sont les points communs entre la cité des affaires à Saint-Etienne, le Belaroïa à Montpellier, le musée d’Art moderne à Lille et ses réalisations emblématiques ?

Trois thèmes sont les fils conducteurs de son travail : • Le laboratoire programmatique. Pour chaque projet avant même de dessiner ou poser une idée architecturale, Manuelle

Gautrand et ses collaborateurs réfléchissent au programme, de manière presque scientifique en cherchant à trouver des usages non prévus par le maitre d’ouvrage. Ils anticipent les modes de vie, mélangent au gré des projets lieux d’habitations, espaces partagés, lieux culturels, commerces… Ils travaillent également sur la notion de réversibilité des bâtiments. À l’image du projet

Saint-Louis à Strasbourg, où la salle de sport se transforme en salle de concerts. • Le don d’espace public. Dans le cadre de la densification des villes, les projets cherchent à prendre un minium de surface au sol pour laisser le maximum d’espace au public ou pour un espace intermédiaire. « Il est important de travailler à un impact minimum de nos architectures et une mise en scène maximum. La notion d’espace public est notre socle.

Nous avons besoin de se voir, vivre et de s’y promener », souligne l’architecte. • La balise urbaine. Une architecture doit faire sens, d’où l’importance de réfléchir à sa fonction symbolique.

« On doit s’attacher à illustrer des programmes de manière puissante. Les citadins ont besoin de se reconnaître et être fiers de certaines nos architectures ».

CONCEVOIR UN VÊTEMENT POUR LA FAÇADE

L’architecte habille ses façades comme un couturier habille ses mannequins. Manuelle Gautrand confie aimer les tissus. Son audace se traduit par son dessin et en particulier celui des façades. L’enveloppe d’un bâtiment joue un rôle important car elle abrite le contenu, le programme et c’est ce que l’on voit depuis la ville. Elle constitue un filtre entre le dedans et le dehors. Manuelle Gautrand est particulièrement attachée à la lumière qui pénètre dans les bâtiments. Le « tissage » des matériaux en façade est aussi une manière de jouer, de fermer et d’ouvrir cette enveloppe à la lumière naturelle. « Je suis née à Marseille où j’ai vécu mes premières années. Je suis restée marquée par la lumière,

Projet de centre culturel pour la ville australienne de Parramatta. L’ensemble forme une imbrication de volumes cristallins.

La lumière est une vraie matérialité

LUC BOEGLY

Dans cet immeuble parisien, 20 % des espaces sont partagés dont 150 m2 de potager sur le toit. Le bâtiment abrite 13 logements en accession, 6 logements locatifs intermédiaires, 2 logements locatifs sociaux, une crèche et un commerce au rez-de-chaussée.

le côté très cru de la lumière méditerranéenne et par son jeu infini sur les surfaces. La lumière étant crue, elle marque profondément les couleurs. Il y a un jeu d’ombres et de lumières toujours très découpé et un jeu de contraste important. La lumière est pour moi une vraie matérialité. » Chaque bâtiment possède une enveloppe avec un matériau différent : béton, métal déployé… L’agence effectue également des recherches de matériaux et notamment de matériaux recyclés. L’écologie tient une part importante dans son travail en tant qu’urbaniste avant celui d’architecte. « Je me rends compte que travailler au sein d’une échelle urbaine permet de dresser un cadre à l’architecture qui peut être extrêmement écologique. Ensuite quand l’architecte vient, c’est beaucoup plus facile car le cadre est déjà là », précise-t-elle. Une première valeur de l’écologie, c’est le contexte et il est remis en cause pour chaque projet.

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