AĂŠrolithe Lucie Pichon
AĂŠrolithe Lucie Pichon
Ă€ Ambre
PrĂŠambule. Oui la vie est belle En chemin et au repos Je pense Ă la mort.
Partie 1 Par la fenĂŞtre, on voit
-Je -Fais Elle laisse tout autour d'elle. patients. Ses bras par la fraîcheur de la une veste noire simple de femme. toujours pas, comme si elle ne sentait pas L'infirmier lève les yeux vers une dame, en face d'eux. « Elle ne comprend plus rien. Elle ne voit rien, elle ne lèvera Elle n'entend rien, elle ne tournera pas la tête. Elle ne parle pas,
On entend un jeune garçon se frictionner les bras. Soudain, elle remue; place ses mains sur ses épaules, bras croisés, et reste à nouveau figée comme un sarcophage égyptien depuis le départ de sa mère. Enfermée.
On la regarde. « Que fait-elle ? -Avez-vous déjà vu quelqu’un comme ça ? comprends qu’elle soit ici, celle là. attention à ce que tu dis ! Tu parles fort. » ses bras tomber le long de son corps et promène son regard vide Il ne semble pas qu’elle entende les remarques des autres sont nus et l’on peut distinctement voir ses poils hérissés climatisation. L’infirmier qui l’accompagne tient dans ses mains Il ne semble pas décidé à la lui mettre. Elle ne bouge le froid engourdissant la pièce. Regards appuyés. pas les yeux. alors elle ne vous répondra pas. » Silence pesant.
et reste à nouveau figée comme .« Voilà. Elle est comme ça C’est presque vain, cette thérapie. »
Partie 2 Regardez-la penser
Elle chantonne une liste de mots. Table et bleu.
Perles en bois et une tige en fer. Porte close. Blanc. Magazines sur plateau transparent, et un homme qui grelotte. Lino bleu pailletĂŠ. C'est propre propre propre.
Le lino. Les chaises.
Monsieur Duval !
C'est propre. N'oubliez pas le dĂŠpistage du cancer du sein.
Madame Dormal ! Le distributeur de savon.
C'est propre ça.
Plante verte, Sida: protégez vous.
La dame dessinée sur la porte. Une dame va vers la porte.
Monsieur Malvu !
Chaussures vertes. Jambes croisées.
Vieux magazines. C'est à vous Madame.
Le cabinet. Un pied après l'autre. La porte. C'est propre ici. Encore lui ? La porte. C'est sombre. C'est propre. Moquette. La chaise. Dossier douloureux. Les yeux. Sourcils.
“Tu
veu
xp
arl
er
auj
ou
rd'
hu
i ?”
La bouche. Froid. Les accoudoirs, froids. Debout. La main. C'est propre ici. Dehors.
La terre.
Ă€ travers les volets
Tout noir.
Moquette.
C'est sombre. C'est propre ici.
La bouche. Les yeux. Un cadre.
Dedans une dame sourit.
Encore lui ?
C'était chaud. Le poêle crépitait.
Photo souvenir.
Caresse?
Sa main sur ma tête.
Où ?
Où ? La photo disparait.
Ici.
Debout. Dehors. “A la semaine prochaine”
Elle chantonne
Écho. C'est sombre. Encore lui ? Chair de poule. La voix grave. Monotone. Rivière de mots.
“Tu veux parler aujourd'hui ?”
Veste douce sur la peau.
Métal froid des accoudoirs.
Un magnétophone. La main. Clic. Play.
“Écoute.” La voix est tendre. Elle sort de la boite.
C'était chaud. Plage d'été. Un seau à la main. Boum, la mer ! Château de sable. Soleil salé.
Crissements sous les pieds.
Schhh, schhh, la mer... Vent frais. J'ai la chair de poule.
C'est moi ? Ce son pour moi. Moi, c'est qui ? Qui est le son ? Qui est la voix ? Clic. Debout. Dehors. Retour.
Vague Bonjour. Toujours sombre. Toujours propre. Carré de papier. La photo. Sous les doigts, papier glacé.
Clic.
La tendre voix. Papier glaçé, mélodie des mots.
La tête sur ses genoux.
Elle chantonnait une liste de mots. Caresse dans les cheveux. La brosse.
Clic.
Clic.
Clic. Clic.
Clic.
Clic.
Clic.
C'était calme. Une voix. Une image. Une photo ?
Schhh, schhh. Mots caresses. La mer.
Ensemble à la mer. Vacances, ensemble, à la mer. Schhh, schhh, Photo de famille. Voix de la famille ?
Non, non. C'est pour moi, cette voix. Pour moi. Moi, je suis qui ? La fille. Soir sombre. Il faisait chaud. La maison. Le poêle.
La mère.
C'est sombre ici, et c'est propre.
Sur le retour Bonjour. C'est diffĂŠrent.
Reviens, reviens, reviens. La voix.
Pleurs.
Le jour. Lumières. La voix.
Reviens, reviens, reviens. La voix.
Elle ne peut pas être si loin, ne peut pas être partie.
Je suis ici.
Pas de clic, cette fois ? La voix.
Je vois. Je la vois. Je l'entends. Je reconnais. Elle revient.
Pleurs.
Tout ce temps sans elle, endormie. Maman revient. Maman. Enfin.
Maintenant je suis revenue. Je suis reveillée. Alors, il suffisait de si peu ? Écroulée par son départ, il avait suffit d'un seul ouvrier pour reconstruire ce pont vers le réel, vers elle, vers les autres. Un ouvrier avec les bons outils et les bons matériaux, tellement bétons que je l'avais laissé construire sans permission.
Et maintenant je cours sur ce pont, et, enfin, je me vois atterrir sur l’autre rive. Une photo pour penser comme eux. Il faut se retourner pour se retrouver. Le sable frappe mes chevilles; il vient de l’autre quai. Beau retour à la vie.
Merci Ă Julia Billet
Cyril Dominger
Victor Saillard
Mathilde Borowiak
et ma maman
Thomas Carretero
Aérolithe - Lucie Pichon - DNAT2 Achevé d’imprimer en avril 2015 ÉSAL Épinal
Incompréhensible Elle a fermé ses pétales Comme on dort la nuit