L’architecture Biomimétique Durable

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École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris Val-de-Seine

L’architecture Biomimétique Durable Comment les architectes utilisent-ils le biomimétisme pour concevoir dans une démarche de transition durable?

Paccioni Gabriel Méthodologie et encadrement du rapport de fin d’études - Licence 3 M. Florian GUERIN, enseignant tuteur.


« Je n’invente rien, je copie le grand livre toujours ouvert de la nature. L’architecte du futur construira en imitant la nature, parce que c’est la plus rationnelle, durable et économique des méthodes …» Antonio GAUDI


REMERCIEMENTS Je tiens d’abord à remercier mon tuteur de rapport de licence M. Florian GUÉRIN, qui m’a suivi tout au long de cette période et a consacré beaucoup de son temps à la lecture de mon rapport et à la rédaction de commentaires constructifs. Par ailleurs, je remercie également David Serrero et Mario Poirier, tous deux enseignant à l’école nationale supérieure d’architecture de Paris Val-de-Seine, pour avoir pris le temps de répondre à mes questions. Merci à Mme Estelle Cruz, chercheuse au CEEBIOS, ainsi qu’à Patrica Ricard, présidente de l’Institut Océanographique Paul Ricard, d’avoir répondu présente afin de m’aider dans ma démarche de recherche


SOMMAIRE Introduction

I/ Contexte

II/ Applications en architecture par deux études de cas

III/ Le biomimétisme simple utopie ou réelle avancée future ?

Conclusion

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INTRODUCTION

« L’architecture est le grand livre de l’humanité, l’expression principale de l’homme à ses divers états de développement, soit comme force, soit comme intelligence » Victor HUGO

Comme tout ce qui émane de notre civilisation, l’architecture, elle aussi, est en perpétuelle évolution. En ce début de siècle, des enjeux menacent l’architecture comme elles menacent globalement toute notre société : le réchauffement de la planète, la croissance de la population, la diminution des ressources naturelles sont des problèmes que ni l’architecture ni l’urbanisme ne pourront régler seuls. D’après Lynelle Cameron, Vice-présidente de la durabilité chez Autodesk, « L'agence de protection pour l’environnement américain prédit qu’à mesure où les températures continueront d’augmenter, les coûts énergétiques en feront de même. Les architectes et les ingénieurs peuvent agir de façon significative en faveur du climat en concevant avec un objectif d’efficacité accrue. Celle-ci nécessite d’optimiser la valeur (la production) tout en minimisant les coûts (entrants, comme l'énergie et les matériaux). Dans le monde de l’architecture et du BTP, cela signifie construire des bâtiments qui utilisent moins d’énergie »1. Il s’agit donc de concevoir des édifices qui utilisent moins de matériaux vierges et qui durent plus longtemps non seulement sur le plan écologique, mais aussi sur le plan social et économique et, par conséquent, de s’inscrire dans une démarche durable. Selon une définition très largement acceptée, le développement durable est « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le concept de «besoins», et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient d'accorder la plus grande priorité ; l'idée des limitations que l'état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l'environnement à répondre aux besoins 2

actuels et à venir » (Rapport Brundtland ). Il peut être, dans certains cas, qualifié de « motvalise », dont le contenu est trop vague. Or, ce flou est explicable : il tient aux incertitudes sur les données et aux divergences en matière de priorités politiques. Le domaine du développement durable s’applique à plusieurs champs, notamment celui de l’architecture, où les enjeux seront déterminants quant à notre perception de l’avenir.

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« Design et réchauffement climatique », Lynelle CAMERON, Mars 2017 « Rapport Brundtland », Gro Harlem Brundtland, 1987, p.14

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Les enjeux futurs de notre planète et de ses habitants rendent ainsi capitale une remise en question de nos modes de vie. Elle passe entre autres par le développement d'une architecture écologique ou écoresponsable. Dominique Gauzin-Müller, architecte, enseignante, donne une définition de l’architecture écoresponsable : « Dans éco il y a à la fois économie et écologie, et dans responsable il y a le coté culturel et humain, c’est-à-dire qu’on retrouve là, les quatre piliers du développement durable : écologie, économie, social et culturel »3. Plusieurs critères rentrent en compte pour définir une architecture écoresponsable : - Site et territoire : réfléchir aux données physiques du site (topographie, microclimat, etc.) afin de choisir un principe bioclimatique. - Matériaux et techniques : regarder les matériaux disponibles sur le site : le but étant de limiter l’énergie grise, due à la fabrication des matériaux et leur transport. - Énergie et ambiance : utiliser les énergies renouvelables (soleil, vent) et utiliser des enveloppes de bâtiments qui isolent mieux et qui permettent de réduire la consommation d’énergie. Le résultat est une architecture confortable, fonctionnelle, économe en matières premières et respectueuses de l'environnement. Il est possible de conjecturer à partir de là que la conception écoresponsable conduirait à une transition durable.

En effet, d’après l’étude pour le Conseil National de l’Ordre des Architectes4 les nouveaux bâtiments devront répondre à un certain nombre de problématiques pour être qualifiés de durables telles que : la qualité esthétique et l’intégration dans le paysage, l’organisation et les aspects fonctionnels des bâtiments, le respect des normes et règlements qui s’appliquent à la construction, le respect des coûts et des délais de construction, la qualité environnementale et la consommation d’énergie, la solidité du bâtiment, sa capacité à résister au temps, la réduction des charges et coûts d’entretien, la prise en compte des désirs et modes de vie des habitants ou des usagers. Les enjeux auxquels nous sommes confrontés existaient auparavant, mais ils n’étaient pas pris en compte. Aujourd’hui de nouvelles législations en vigueur, obligent les architectes à penser leur bâtiment selon des normes bien plus spécifiques qu’auparavant, et à penser durablement, économe en matière d’énergie, moins polluant et le moins coûteux possible. Quels moyens permettraient de concevoir durablement ? Quelles alternatives ? « l'épuisement des ressources de qualité et faciles d'accès fait cependant consensus. Et l'on s'accorde à penser qu'en continuant de brûler les fossiles, nous encourons une élévation de température moyenne de 6°C ce qui entraînera un bouleversement climatique majeur (…) La diversité biologique, qu'elle soit sauvage ou domestique, recule à un rythme très rapide (…) les entreprises et autres acteurs doivent évoluer, prendre en compte des enjeux qui n'étaient pas les leurs, étendre leur responsabilité. »5 En cela, une nouvelle interrogation née, quoi de plus économe et durable que la nature elle-même ?

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Interview - Architecture éco-responsable - 2014 Etude pour l’université d’été du CNOA - Ifop - Juillet 2014 - N°112209 « Développement durable : état des lieux », Fabrice FILIPO, Octobre 2012, p.3

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La bio-inspiration ou biomimétisme est une démarche pouvant répondre à cette interrogation. Le biomimétisme consiste à s’inspirer des grandes stratégies du vivant pour innover durablement. Face à la crise, tant économique qu'écologique liée à la surexploitation des ressources naturelles, de nombreux chercheurs tels que Estelle Cruz ou encore Janine M. Benyus, estiment que le biomimétisme pourrait aussi être « un vecteur de mutation, d'une économie polluante et consommatrice d'énergie et de ressources naturelles vers une économie verte s'appuyant sur des technologies simples, propres, sûres et sobres »6. Celle-ci s’applique à plusieurs champs tels que les matériaux, l’architecture, la chimie verte, l’énergie, la médecine, etc. Pour citer un bon exemple d’application biomimétique, en 1941, Georges de Mestral crée un système de fixation réversible, le «Velcro» inspiré des propriétés des fleurs de bardane, difficile de retirer les chardons bleus des Alpes des vêtements ou animaux, où ils se sont accrochés. L’avant du Shinkansen 500, train à grande vitesse japonais, a été conçu en référence au bec et à la tête du martin-pêcheur. Les ingénieurs japonais se sont inspirés des propriétés de la rainure du bec, pour résoudre les problèmes posés par le passage des tunnels. Le biomimétisme pourrait être une démarche influençant les projets traitant les enjeux du développement durable. Celui-ci est de plus en plus utilisé dans le domaine de l’architecture. À l’appui, des exemples simples : Un système de régulation de la température (isolant thermique) complètement inspiré de la fourrure de l’ours polaire pour le Singapore Arts centre à Singapour. Cet édifice permet ainsi une économie d’énergie pour le bâtiment et pour la planète, car de nos jours les architectes doivent faire face à la surconsommation d’énergie. (voir partie 2.1) Autre exemple : Le terminal international de Waterloo : une gare sous carapace (figure 1). Le Terminal international de Waterloo est entièrement recouvert de panneaux de verre modulables. Le bâtiment doit sa flexibilité et sa résistance aux intempéries à un animal surprenant : le pangolin. Cet animal à la particularité d’être couvert d’écailles qui épousent les formes de son corps. Pour se mettre à l’abri de ses ennemis, il se met en boule. Cette inspiration permet une meilleure la solidité du bâtiment et une meilleure capacité à résister au temps.

Figure 1, à gauche le Terminal International de Waterloo et à droite le Pangolin

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« Étude sur la contribution du biomimétisme à la transition vers une économie verte en France », Catherine LARRIEU, Octobre 2012,


Ma connaissance sur le sujet commence alors en troisième année avec l’appui de M. David Serero, professeur de projet à l’école nationale supérieure d’architecture de Paris Val-de-Seine et chercheur dans le domaine. Il m’était demandé, au travers de l’exemple du mécanisme vivant du stomate, qui se trouve posséder un dispositif dynamique permettant de réguler la porosité de la paroi d’une feuille, de générer une façade dite « intelligente » d’un bâtiment donné. C’est principalement cet enseignement qui m’a orienté vers la réflexion du biomimétisme en architecture. Cependant je regrette le manque d’information et d’enseignement concernant l’architecture biomimétique dans les écoles, car, malgré un sujet très intéressant, nos enseignements sur la question furent limités à un semestre. Comme le souligne M. Serero, l’architecture biomimétique n’est pas beaucoup utilisée et enseignée en école d’architecture, car les écoles ont du mal à s’adapter rapidement à des nouveaux sujets. Néanmoins, étant depuis le début de mes études attiré par les questions d’écologie et de durabilité, je me suis renseigné davantage sur le biomimétisme ainsi que sur son potentiel exploitable en architecture et sa durabilité. Ainsi découle de cette réflexion une grande question :

Comment les architectes utilisent-ils le biomimétisme pour concevoir dans une démarche de transition durable?

La première partie traitera de comment les architectes inscrivent leurs bâtiments dans une démarche durable afin de répondre aux futurs enjeux (environnementaux, sociaux, culturels, économiques) et comment le biomimétisme est utilisé, notamment grâce aux différents travaux de chercheurs. En suite, la deuxième partie analysera, par des études de cas, les processus mis en place dans l’architecture biomimétique pour concevoir durablement, ce qu’elle permet à l’échelle du bâtiment et enfin nous en montrerons les limites notamment grâce à la conclusion des études de cas et aux différentes entrevues avec des professeurs de l’école nationale supérieure d’architecture de Paris Val-de-Seine ou encore des chercheurs sur la question d’architecture biomimétique qui partageront avec nous leurs connaissances sur le sujet.

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I/ Contexte Le développement durable est une manière avisée de concevoir le présent en tenant compte des effets à long terme, tant au niveau économique, environnemental et social. En architecture, cette manière de voir les choses prend de plus en plus de place et est reconnue comme étant un bon moyen pour améliorer le sort des futures générations. Il est primordial que les acteurs principaux, notamment les architectes, commencent à revoir leur manière de concevoir pour être plus respectueux de l’environnement et offrir de meilleures perspectives d’avenir. 1.1 / les enjeux du développement durable en architecture Le développement durable, la transition écologique, le respect de l’environnement sont autant de points sur lesquels les futurs architectes devront mettre l’accent. Pour les architectes, le développement durable prend appui sur quatre enjeux essentiels : - Environnement : L’architecte apporte son aide dans la détermination de caractéristiques architecturales qui contribuent notamment à des économies d’énergie, à la prise en compte des qualités environnementales du site dans lequel le projet s’inscrit. - Social : en favorisant l’équité sociale entre les individus, et en améliorant à la qualité de vie. Grâce notamment au PLH7 et à l’obligation des 20% de logements sociaux pour toutes nouvelles constructions. - Économique : Les bâtiments « verts » sont la voie de l’avenir, offrant des avantages directs aux propriétaires et à leurs occupants en termes de réduction des coûts (eaux et énergie), de confort, de santé et de style de vie, tout en limitant les impacts sur l’environnement. - Culturel : Avec des constructions où justement les logements sont liés à des espaces publics permettant d’accéder à la culture comme à la ZAC de saint Nazaire, ou vingt logements sociaux ont été groupés avec un équipement public. Cependant aujourd’hui, en termes écologiques, de nombreuses problématiques se posent quant à l’exploitation des ressources actuelles. En effet d’après le manifeste publié par le journal « Le Monde » signé par 15 364 scientifiques et spécialistes du climat de 184 pays, paru en novembre 2017 « la destruction rapide du monde naturel et le danger de voir l’humanité pousser les écosystèmes au-delà de leurs capacités à entretenir le tissu de la vie »8. Une réelle prise de conscience émerge dans l’esprit collectif. Le monde connaît une croissance démographique importante, les ressources naturelles doivent palier à cet élément, mais ne sont pas assez Figure 2, Epuisement matières premières – Panseo - 2011 conséquentes pour répondre à la demande humaine et s’épuisent (figure 2). Tout cela s’accentue par une modification du climat due à un rejet de CO2 plus important que jamais. Un réchauffement climatique sans précédent menace notre planète à grande vitesse. Comment faire pour inverser le processus ?

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Programme Local de l’Habitat, 2012 « BioScience » , Stéphane Foucart et Martine Valo, Novembre 2017


1.2 / nouvelles législations en architecture liées au développement durable La philosophie de l’architecture durable se concrétise « à travers différentes pratiques qui ont pour objectifs de réduire l’impact négatif d’un bâtiment sur son environnement et de prendre soin de la qualité de vie des utilisateurs et des communautés riveraines »9. La mise en œuvre d’une architecture durable se manifeste par des choix de techniques, des méthodes de gestion, la sélection des matériaux employés et l’organisation interne des fonctions et des espaces, afin de maîtriser, en particulier, la consommation d’énergie et l’aménagement du cadre de vie des utilisateurs. De plus, les autorités favorisent de plus en plus l’approche durable, grâce à des subventions et défiscalisations qui « accélèrent la période d’amortissement de ces investissements pour stimuler la construction de bâtiments basse-consommation (BBC) et améliorer le cadre de vie en commun »9. Maîtriser la consommation d’énergie d’un bâtiment est essentiel dans la mise en œuvre d’une architecture durable. Un ensemble de pratiques permettent de diminuer les pertes énergétiques, réduire les besoins et éventuellement produire de l’énergie. Voici quelques exemples de lois faites, à l’échelle du bâtiment et d’un quartier, qui visent à permettre à la France de contribuer plus efficacement à la lutte contre le dérèglement climatique et à la préservation de l’environnement : - Loi TECV10 - Article 5 : « Avant 2025, tous les bâtiments privés résidentiels dont la consommation en énergie primaire est supérieure à 330 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré et par an doivent avoir fait l'objet d'une rénovation énergétique » - La démarche haute Qualité Environnementale11 (HQE) appliquée aux bâtiments a pour but d’améliorer la conception ou la rénovation des bâtiments et des villes, en limitant le plus possible leur impact environnemental néfaste. - Loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture : « La création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant, le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que du patrimoine sont d'intérêt public. Les autorités habilitées à délivrer le permis de construire ainsi que les autorisations de lotir s'assurent, au cours de l'instruction des demandes, du respect de cet intérêt »12. D’autres enjeux sont également à prendre en compte : - Le cadre de vie et l’inscription paysagère par exemple : La loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture définit l’architecture « comme une expression de la culture. La création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant, le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que du patrimoine sont d’intérêt public. »12

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« Architecte de Bâtiments », Laurent Bansac, 2016 « La transition énergétique pour la croissance verte », Legifrance, 17 août 2015

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Haute Qualité Environnementale, Agence de l’environnement et de la maitrise d’énergie, 2004

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LOI 77-2 1977-01-03, Legifrance, 1977

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1.3 / une démarche prometteuse : le biomimétisme en architecture - comment est-il utilisé ? (Du grec bio, vie et mimesis, imitation) De fait, il s’agit d’entrer dans des écosystèmes, des circulations avec zéro perte, dans le sens où les énergies produites doivent être consommées tout en permettant leur renouvellement. La nature ne fait pas de déchets. Elle utilise et recycle tout. Pourquoi ne pas s’en inspirer ? Un des principaux préceptes du biomimétisme est Janine, M. Benyus, scientifique, et biologiste américaine, et consultante en innovation expliquent que « Le principe du biomimétisme est d’étudier les œuvres de la nature (photosynthèse, autoassemblage, sélection naturelle, écosystèmes, constitution et fonctionnement des yeux et des oreilles, de la peau et des carapaces, communication neuronale, remèdes naturels, etc.) puis de reproduire ces schémas et procédés de fabrication pour résoudre un certain nombre de nos problèmes quotidiens »13. L’objectif du concept est de nous faire comprendre qu’au lieu d’essayer de dompter la nature à notre guise, de vouloir à tout prix la dominer, nous devrions adopter une attitude plus humble, grâce à une observation et une étude constructive des éléments naturels. En effet, certains organismes vivants ont mis au point des systèmes et des techniques très développées, remarquablement ingénieuses conservées par la sélection naturelle. Il faut donc essayer, en analysant le fonctionnement de ces différentes espèces, plantes ou animaux, de mettre au point des méthodes de production en prise directe avec la nature. En utilisant l’étude des systèmes organiques pour développer une durabilité nécessaire à la survie de l’être humain, la biologiste américaine Janine M. Benyus « remet en cause la dichotomie ancestrale de la nature et de l’artifice »14. Pour elle, dès lors que la fabrication est faite pour répondre à un besoin particulier, elle peut être qualifiée de naturelle ; c’est pour cette raison que nous devons harmoniser nos productions en fonction des systèmes biologiques, afin de générer un environnement durable.

La nature a mis au point des « technologies » et des « stratagèmes » extrêmement ingénieux, des écosystèmes intelligents, sans rejets polluants ni déchets, mettant en exergue des systèmes sociaux hiérarchiques fonctionnels. Il apparaît particulièrement pertinent de chercher à mieux cerner et catégoriser les trois niveaux d’inspiration généralement attribués au biomimétisme et les domaines applications concrètes. Il est possible de s’inspirer :

- Des processus et des méthodes. À cause des fortes amplitudes thermiques entre le jour et la nuit, les termites ont dû trouver des solutions et des systèmes afin de conserver une température constante au sein de leur habitat. Au Zimbabwe, l’architecte Mick Pearce s’est inspiré de cette forme de ventilation naturelle : il a réduit la consommation d’énergie thermique de son bâtiment de 90 % ;

- des écosystèmes, de leur fonctionnement. Au Danemark, le complexe industriel de Kalundborg s’est développé selon un modèle économique « écosystémique » et circulaire : aucun déchet n’est rejeté : les déchets des uns devenant ressource pour les autres. 11 13 14

« Imiter la nature. Pourquoi le biomimétisme, aujourd’hui ? », 2011, p. 15. « La ville-paysage du xxi siècle : une symbiose de l’architecture et de la nature », Aurélie Michel, 2012, p. 121-139


- Des formes et des matières, comme les ailes d’avion conçues sur le modèle des ailes d’un rapace pour améliorer le vol et réduire la consommation de carburant ou bien encore le train à très grande vitesse japonais, pour lequel le bec du martin-pêcheur a servi de modèle. (figure 3)

Figure 3, Martin pêcheur et train Shinkansen 500

Autre précurseur du biomimétisme, Idriss Aberkane, enseignant, conférencier français. Reconnu mondialement pour ses écrits et ses conférences sur l'économie de la connaissance et les neurosciences. Dans une de ses conférences, Idriss Aberkane définit le biomimétisme comme «une science qui dit : la nature est une bibliothèque, lisez-là au lieu de la brûler »15. Il prend l’exemple de la crevette mante-religieuse (figue 4). Grâce à ses marteaux, elle peut casser des crabes pour se nourrir. Seulement, quand elle envoie son marteau, il se forme une bulle d’air autour d’elle, appelée : bulle de supercavitation. La supercavitation a été étudiée au départ par l’armée russe afin de concevoir des torpilles pouvant aller jusqu'à 150km/h sous l’eau et aujourd’hui beaucoup plus… De nos jours, cette crevette reste le meilleur modèle d’étude. De plus, cet animal si particulier possède seize cônes, afin de percevoir les couleurs. Nous, humains, en possédons trois : nous sommes donc un tiers d’un tiers daltonien par rapport à elle. Les Américains se sont inspirés de ses yeux pour concevoir des caméras permettant de détecter rapidement les cellules cancéreuses dans les biopsies.

Figure 4, La squille ou « crevette-mante » - crustacé

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Conférence ; "Le biomimétisme : s'inspirer de la nature pour innover durablement », Idriss ABERKANE, Février 2015


1.4 / différents types d’architectures biomimétiques L’architecture, plus généralement, puise, depuis au moins l’Antiquité, son inspiration dans la nature : pour les colonnes de ses temples, l’Égypte antique substitue la pierre au bois des origines en conservant la forme du palmier, ou choisit celles d’autres végétaux comme le lotus et le papyrus. Par le passé, de nombreux architectes se sont inspirés de la nature pour en reproduire les formes, comme Gaudi qui s’est inspiré des arbres pour construire la « Sagrada Familia » dont les piliers de la nef rappellent les ramifications d’un arbre. Aujourd’hui, les concepteurs et les architectes tels que Michael Pawlyn, vont plus loin et tentent de copier non seulement l’esthétique du monde biologique, mais également ses fonctionnalités et bien d’autres dimensions environnementales. Avec le biomimétisme, le regarde porté sur la nature évolue. Celle-ci n’apparaît plus comme « une simple pourvoyeuse de matières premières, mais comme plutôt comme une source d’inventivité »16. Son statut passe de ce que l’on peut extraire, exploiter d’elle à ce que l’on peut apprendre d’elle. Cependant, extraire les savoir-faire de la nature nécessite au préalable d’identifier les problématiques propres à chaque site, chaque projet, chaque époque, chaque enjeu pour pouvoir esquisser les qualités morphologiques recherchées, trouver les matériaux et systèmes adéquats : L’apparence esthétique : L’architecture exprime la morphologie d’un organisme vivant. « The yellow lost dog. » (figure 5) est un musée destiné à la ville perdue et aux cités englouties de Shanghai. Ce bâtiment conçu par l’architecte français François SCALI a une forme animale évidente : le chien . Cependant, ce bâtiment ne vise pas à résoudre des problématiques environnementales. Or le biomimétisme cherche, à travers les spécificités morphologiques de l’animal ou végétal, à résoudre un problème architectural lieu à l’environnement. En ce sens, la représentation formelle d’un organisme vivant n’induit pas un biomimétisme au sens propre du terme. Aujourd'hui, les architectes vont plus loin : s'ils imitent la nature, ce n'est plus seulement pour ses formes esthétiques, mais pour ses propriétés physiques.

Figure 5, The yellow lost dog - Shanghai

La structure : Si dans certains cas, la résolution d’une problématique architecturale par la forme liée à la nature n’est pas volontaire, pour plusieurs architectes, au contraire, la nature a été une source créative visant à résoudre des problèmes de structures. 13 16

« S’inspirer de la nature pour assurer le futur» , Coralie Schaub, 26 février 2015


Plusieurs architectes de références se sont inspirés de la nature pour développer leurs systèmes constructifs : L’architecte allemand Frei Otto était fasciné par la restante et la stabilité des structures tendues en tant « elles permettraient une stabilité maximale tout en offrant une structure légère.»17 Il s’est directement inspiré des toiles d’araignées, qui sont construites dans les prés, selon cette forme, pour concevoir le stade de Munich (figure 6). Il a construit son stade avec des fils verticaux qui agissent comme des portes-charges et répartissent le poids sur leurs points d'appui. Le marché de Royan de Louis Simon de 1955 (figure 7) s’est inspiré des coquilles de mer pour leur structure ultra résistante. D’autres grands ouvrages se sont inspirés de la forme, telle que le CNIT à la défense. L’intérêt de cette forme est de, malgré leur poids léger, supporter des pressions colossales. Certains architectes sont donc revenus aux formes élémentaires trouvées dans la nature, source d’inspiration en matière structurelle.

Figure 6, Stade olympique de Munich à Munich et Toile d’araignée

Figure 7, Marché Central de Royan

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« L’Olympia park de Munich orphelin », Catherine Sabbah, Octobre 2010


Les matériaux : Dans le domaine de l’architecture, les matériaux jouent un rôle décisif concernant l’apparence et l’expressivité d’une construction. Ils sont le lien, l’intermédiaire, entre l’homme et le bâtiment. La nature a mis au point des matériaux « ingénieux » faisant le lien entre propriétés physico-chimiques et fonctions (comportement mécanique, flexibilité, densité, etc.). Les créations de la nature garantissent la meilleure productivité en fournissant un moindre effort et en utilisant un minimum de matériel. Les termitières (figure 8) par exemple sont de véritable miracle architectural : elles peuvent atteindre jusqu’à trois mètres et sont aussi solides que du béton alors qu’elles sont faites d’un matériau produit à température ambiante, à base de terre, de poussières de bois et de salives d’insectes. La plupart des matériaux composites, matériaux solides résultants de la combinaison de deux substances ou plus qui vont former une nouvelle substance ayant des propriétés supérieures à celles de l’élément d’origine. Jusqu’à présent, les composites artificiels fabriqués par l’homme sont beaucoup plus sommaires et fragiles que ceux produits par la nature. Par exemple, la toile d’araignée a des caractéristiques incroyables de résistance face à la tension tout en conservant une très forte souplesse, propriété non égalisée par l’homme actuellement.

Figure 8, Termitière

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II/ Applications en architecture par deux études de cas L’utilisation du biomimétisme en architecture est une démarche de plus en plus mise en avant, mais elle reste néanmoins très limitée quant à son potentiel exploitable dans ce domaine. Certains architectes se sont inspirés de ce concept afin de réaliser des bâtiments qui traduisent une démarche de transition durable. En effet, il se trouve que l’architecte, pratiquant le biomimétisme, présente une volonté de répondre à un enjeu du développement durable. 2.1 / Le Singapore Arts Center, « une salle de concert au poil » « Tirant parti de nouvelles technologies, les ingénieurs développent des façades intelligentes qui réagissent automatiquement aux conditions météorologiques et permettent de mieux contrôler les échanges entre les bâtiments et leur environnement. La nature est, dans ce domaine, une source d’inspiration très riche, car les interfaces biologiques comme la peau et la fourrure possèdent des fonctionnalités très complexes: refroidissement par transpiration, réchauffement par chair de poule, échanges de fluides, détection de chaleur et de lumière… L’architecte moderne ne parle donc plus de l’enveloppe du bâtiment, mais de sa peau ».18 De nombreux architectes se sont inspirés de la nature, et plus précisément des caractères biologiques et spécifiques de certains êtres vivants, qui se protègent naturellement des conditions climatiques, pour concevoir des bâtiments qui interagissent avec l’environnement au niveau de leurs façades. Par exemple, les ours polaires sont constitués d’une épaisse fourrure afin lutter contre les températures négatives. Cette dernière à la capacité de réagir en fonction des besoins de l’ours due aux extrêmes températures extérieures. On pourrait comparer cela à la « chair de poule » chez l’homme : c’est-à-dire les poils se hérissent et laissent passer les rayons du soleil (en fonction de la météo) pour réchauffer la peau de l’animal. La fourrure de l’ours polaire et sa capacité à réguler les échanges de chaleur se retrouvent dans le Singapore Arts Centre : À première vue, le dôme du Singapore Arts Centre (figure 9) dessinés par Michaël Wilford, semble ressembler au pelage d’un hérisson à cause de sa forme dotée de piquants, c’est pourtant à l’ours polaire qu’il doit sa silhouette et plus particulièrement à sa fourrure thermorégulatrice. Des triangles d’aluminium, équipés de capteurs photosensibles, ont été disposés sur toute la surface du toit. Ils s’orientent en fonction de la météo pour laisser entrer la lumière du soleil lorsqu’il fait froid et se ferment pour réfléchir les rayons solaires lorsque les températures grimpent.

Figure 9, Dôme du Singapore Arts Centre à Singapour

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« Biomimétisme: la vie est un modèle », Daniel Saraga, Août 2008


Dans une interview19, Vikas GORE, architecte et directeur de projet, explique qu’il voulait beaucoup de verre pour son bâtiment afin obtenir des vues intéressantes dans toutes les directions et dans tout le bâtiment, car ce dernier dispose d’un emplacement stratégique, face à la mer. Cependant, étant donné que le projet se trouve à l’équateur, et il fallait trouver une alternative à la chaleur du soleil, et trouver un moyen de réguler la lumière. Il explique que les concepteurs ont tenté de s’assurer que lorsque l'on regarde en dehors du foyer, horizontale à travers la ville, on obtient des vues équitables dans tout le bâtiment. La raison pour laquelle les pare-soleil ont cette forme et sont orientés dans différentes directions est due à la façon dont les concepteurs ont voulu protéger leur bâtiment du soleil et exploiter les vues depuis l’intérieur. Sa surface, a été conçue par les ingénieurs d’Atelier One, et elle est tapissée de losanges en aluminium qui jouent le rôle des poils de la fourrure de l’ours. Des capteurs de lumière photoélectriques permettent de régler leurs orientations : par mauvais temps, les losanges s’ouvrent pour laisser passer la lumière directe du soleil et chauffer le bâtiment (figure 10). Au contraire, en cas de forte lumière, les losanges se referment : le but étant de réduire le rayonnement solaire direct tout en laissant passer suffisamment de lumière indirecte, qui arrive à l’intérieur en se réfléchissant sur la surface en aluminium des losanges. Les losanges en aluminium qui couvrent l’édifice sont munis de capteurs réagissant à la lumière. Par temps gris, les plaques se soulèvent pour laisser entrer la lumière et chauffer le bâtiment. Quand le soleil revient, celles-ci s’abaissent et laissent passer la lumière par réflexion, évitant l’éblouissement et favorisant une clarté naturelle. La conception biomimétique de ce bâtiment semble ainsi réguler la température intérieure du bâtiment. Le but de ce procéder n’est donc pas seulement de donner un aspect ludique au bâtiment, mais bien au contraire, il s’agit dans ce cas précis, de trouver des solutions afin de réduire l’énergie consommée par l’édifice. Un des enjeux du développement durable a été traité par l’architecte qui souhaite donc réduire l’impact environnemental de l’édifice dans un endroit ou la pollution et le rejet de CO2 est supérieur à la moyenne mondiale. Les deux enjeux du projet (façade intelligente et réduction de la consommation d’énergie du bâtiment) ont donc une double utilité : réduire l’impact environnemental et réguler la température intérieure. De plus, on pourrait penser que le mécanisme fonctionnel ne soit pas correctement mis au point, et que le système ne fonctionne que dans certaines périodes ou certains moments précis de la journée. Or « la conception biomimétique du Singapour Art Center à permis de réduire prés de 30% l’énergie totale consommée dans le bâtiment et de 55 % l’utilisation de l’éclairage artificiel. »20

Figure 10 - Toiture du Singapore art center

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Singapore's Iconic Buildings - Esplanade - 2004 « Les Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère », Natasha Chayaamor-Heil, 2018

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Le résultat final est un étonnant bâtiment à la forme arrondie qui ressemble davantage à la carapace du tatou qu’à un ours polaire. On retrouve ici une caractéristique des bâtiments intégrant des éléments de biomimétisme fonctionnel : d’un point de vue esthétique, il n’y a pas mesure à ce qu’ils ressemblent aux organismes dont les chercheurs se sont inspirés, le but n’est pas de reproduire à l’identique l’ours, mais simplement de reproduire le plus efficacement possible, son caractère inné, pour concevoir durablement. De plus, l’esplanade du musée est inspirée du « Durian », fruit local (figure 11). Les épis en triangle sur la partie extérieure du fruit remplissent plusieurs fonctions. D’abord, ils sont suffisamment résistants pour protéger la chair des impacts mécaniques, quand, par exemple, les fruits tombent sur le sol (certains durians peuvent peser jusqu'à 25 kilos). En suite, les pointes pointues ont pour but de dissuader les animaux et les oiseaux pendant la maturation des durians. Et enfin, la forme pyramidale permet au fruit d'accumuler de la chaleur tout en préservant les graines de la surchauffe. Ces caractéristiques ont servi de base à la conception de l’Esplanade : À Singapour, au mois de juillet, les températures peuvent atteindre 45 degrés Celsius et le toit «durians» était une bonne idée pour une ville aussi chaude.

Figure 11, Durian et enveloppe du dôme du Singapore Arts Centre à Singapour

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2.2 / L’Eastgate Building, le bâtiment termitière Un des meilleurs exemples de bâtiment biomimétique se trouve à Harare, au Zimbabwe. Dans un reportage, l’architecte Mick Pearce explique qu’en regardant un documentaire animalier sur les termites, il s’est rendu compte que ces dernières résolvent, d’une manière ingénieuse, le problème de refroidissement et de ventilation de leur habitation. En effet, comme il l’explique, les termitières ont la capacité à conserver une température presque constante de 31°C et cela malgré une température extérieure qui connaît des variations extrêmes, de 3°C la nuit contre des températures pouvant atteindre les 42°C la journée. De plus, les termites sont qualifiés d’insectes « sociaux », elles ont pour but de vivre en colonies organisées, comme d’autres insectes tels que les fourmis, les guêpes, ou encore les abeilles. Cette culture prend la forme d’un labyrinthe avec la « meule » qui constitue le coeur de la termitière.

La climatisation au sein de la termitière repose dans de hautes cheminées centrales qui sont au-dessus du nid. L’air chaud est attiré vers le haut de la termitière, puis il est évacué par ces cheminées. Ce phénomène a pour but de créer un courant d’air dans les parties basses de la structure : grâce des petits trous, situés tout autour du nid, l’air est aspiré par les parties inférieures. L’air capturé, passe sous terre et est rafraîchi au contact de puits très profonds (de 15 à 20 m en général, parfois jusqu’à 70 m) que les termites creusent pour atteindre les nappes phréatiques. En suite, ce nouvel air frais remonte dans la meule de la termitière qu’il vient rafraîchir. En chauffant, il suit le chemin inverse afin d’extraire cet air chaud, et ainsi de suite (figure 12). Les termites réalisent donc cet exploit remarquable en ouvrant et en fermant constamment une série d'évents de chauffage et de refroidissement à travers le monticule au cours de la journée. Les termites industrieux creusent constamment de nouveaux évents et bouchent les anciens pour réguler la température. Figure 12, Schéma du système de ventilation d’une termitière

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L’Eastgate Building a été construit en 1996 à Harare, par Mick Pearce qui utilise le même système de ventilation qu’une termitière. Ce complexe de bureaux et de commerces est connu sous le nom d'immeuble « termitière ». (figure 13). À Harare, le climat est chaud et sec presque toute l’année. Les autres bâtiments de la ville ne sont pas tous adaptés au climat local et nécessitent, pour leur fonctionnement, l’ajout de climatiseurs. Néanmoins, cet équipement représente 15 à 25% des coûts totaux de construction de ce type de bâtiment et nécessite un entretien régulier tout au long de sa vie. De plus, les systèmes de climatisation ne sont pas fabriqués localement. L’objectif du projet était de construire un bâtiment qui ne nécessite pas l'utilisation de l'air conditionné, mais qui se climatise lui-même, pour également le rendre indépendant des marchés étrangers. Cependant, vu le climat de la région, le projet fut un réel défi pour l'architecte qui s'est inspiré du fonctionnement des termitières et de leur système de ventilation qui permet de conserver un espace intérieur tempéré et un certain niveau confort malgré une forte chaleur extérieure.

Figure 13, L’Eastgate Building

« Le bâtiment est composé de deux entités de 150m de long reliés par une verrière sous laquelle se déploie une rue couverture dont les deux extrémités sont entièrement ouvertes pour laisser passer l’air. Les deux bâtiments sont orientés sur l’axe est-ouest en raison de la forme de la parcelle. Les rez-de-chaussée des deux édifices accueillent des commerces, le premier niveau de l’une des deux entités est réservé à une aire de restauration, et dans l’autre à un parking. Les six niveaux supérieurs abritent des bureaux. » 21

20 21

« Biomimétisme, la nécéssaire resynchronisation de l’économie avec le vivant », Tarik Chekchak, Karim Lapp, 2011, p.162


L’architecte a intégré dans son centre commercial des ventilateurs à la base des tours ainsi que des dizaines de cheminées permettant la circulation de l’air à travers l’édifice. Le bâtiment a été réalisé en utilisant la fraîcheur de la nuit pour climatiser le bâtiment. Pour cela, la structure du bâtiment a été fabriquée avec des briques et du béton qui permettent d’emmagasiner la chaleur du soleil, pour ensuite la libérer le soir. Pour que les espaces intérieurs ne reçoivent pas trop de soleil, « à peu près 25 % des vitres sont constituées de verre, et toutes les fenêtres ont été pensées afin de bloquer les rayons du soleil »22. L'air du bâtiment est renouvelé assez régulièrement : on compte à peu près dix fois par heure par nuit, et la journée, deux fois par heure. Le système fonctionne grâce à des filtres positionnés sur les façades du bâtiment et grâce à 48 cheminées d'aération situées sur le toit. (figure 14)

Figure 14, Principe de ventilation de L’Eastgate Building

En théorie, le concept de reproduction de la ventilation d’une termitière fonctionnerait, mais ce système est-il réellement efficace à l’usage ? A priori oui, d’après une étude menée dans le bâtiment biomimétique : « Le résultat est probant : le système de refroidissement passif d’Eastgate n’utilise que 10% de l’énergie utilisée par un bâtiment de taille comparable refroidi par air conditionné. Le système de ventilation passive très perfectionné permet de diminuer considérablement les consommations d'énergie : après étude comparative menée avec 6 autres bâtiments, Eastgate utilise 35% moins d'énergie qu'un bâtiment conventionnel avec air conditionné, soit une économie estimée à environ 3,5 millions de dollars sur cinq ans, pour un bâtiment ayant coûté 35 millions.»23 21 22 23

« Émuler le termite », Atkinson Jon, 1997 Prix Prince Claus, Architects for Peace, Décembre 2003


De plus, au Zimbabwe, les pannes d’électricité sont assez récurrentes. Elles n’ont pas de conséquences sur le fonctionnement direct et le confort d'utilisation de Eastgate, car le bâtiment peut continuer de fonctionner convenablement sans électricité majeure. Dans un contexte de réchauffement climatique global, la solution apportée par les termites est à même d’intéresser un grand nombre de décideurs et déjà plusieurs bâtiments, réalisés selon le même modèle, ont vu le jour.

Malgré cet exemple d’innovation, qui s’inscrit dans une démarche durable en utilisant l’architecture biomimétique, l’hypothèse qu’il en existe des limites est réelle. Effectivement, ce bâtiment ne pourrait pas être construit en Europe, car il ne respecte pas « les normes de sécurité en architecture »24 : ce système de ventilation permet des courants d’air à l’intérieur de la structure et il suffirait d’un début d’incendie pour que le bâtiment s’enflamme dans sa totalité. Du coup, malgré ce système ingénieux, qui permet d’obtenir une température ambiante toute l’année et ainsi un certain confort de vie pour ses habitants, il existe des failles et ici notamment une sécurité peu fiable du bâtiment ou encore le doute que génère l’organisation sociale des termites à l’échelle humaine.

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« Biomimétisme : des espaces d’expérimentation pour les bâtiments inspirés de la nature », Fabien RENOU, Octobre 2015

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III/ Le biomimétisme simple utopie ou réelle avancée future ? Le biomimétisme paraît donc être une technique assez ingénieuse de conception durable pour les futurs bâtiments. Cependant, s’il paraît tant ingénieux et révolutionnaire que ça, pourquoi n’est-il pas plus utilisé en France ? Pourquoi n’est il pas plus mis en avant ? De ces questions découlent déjà des hypothèses concernant les limites du concept qui ne semblent pas encore bien stabilisées.

3.1 / Développement en France En 2012 est lancée une recherche sur le biomimétisme en France qui mobilise près de quarante-cinq équipes. En 2015, le Centre européen d'Excellence en Biomimétisme de Senlis 25 en compte quatre-vingt-dix qui étudient les concepts biomimétiques, ce qui semble refléter l’élan de la démarche. Cependant, il y a une certaine insuffisance d’interdisciplinarité contrairement à d’autres pays d’Europe. En Allemagne, par exemple, des groupes de travail thématiques, réunissant des experts de plusieurs disciplines, sont mis en place sur de grands enjeux de recherche comme l’énergie, pour aborder les sujets sous l’angle du biomimétisme. Cependant en France « plusieurs tentatives avaient été conduites, sans succès, par plusieurs acteurs du biomimétisme et de la recherche, pour conduire des travaux sur la sociologie de l’innovation »26. La recherche française est de plus en plus entreprenante, mais elle reste encore insuffisamment organisée et structurée. Les échanges et collaborations ne sont pas assez nombreux entre les laboratoires, la transdisciplinarité27 doit être plus mise en avant afin d’exploiter au maximum le potentiel de ce concept. D’après M. Poirrier, enseignant à l’école nationale supérieure d’architecture de Paris Val-de-Seine, le biomimétisme manque d’exemple convaincant en architecture. D’après lui, la notion est beaucoup plus utilisée dans le monde industriel et du design. Le biomimétisme est déjà passé du stade de l’idée à celui de la recherche puis de la pratique. Pourtant, les acteurs publics et privés ne sont pas tous encore certains, à cent pour cent, de l’absence de risques à investir dans cette stratégie d’avenir ni des retombées économiques possibles. En effet, toutes ces innovations passent par le fruit d’années de recherches, qui ont quelquefois coûté très cher et qui au final n’aboutissent pas à de grandes innovations technologiques. Néanmoins, les stratégies d’optimisation de la matière, de l’énergie et de l’information sélectionnée au cours de l’évolution par les organismes vivants ont pourtant tout lieu d’apparaître comme des processus à appréhender, analyser et, éventuellement, imiter dans une optique de rentabilité et de durabilité. Un des enjeux contemporains en matière de biomimétisme est d’expliquer à l’ensemble des acteurs directs ou indirects qu’il est possible de s’inspirer de ces systèmes et de repenser la performance de façon écosystémique.

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CEEBIOS : Réseau national de compétences académiques et industrielles en biomimétisme, 2011 « Le biomimétisme : s’inspirer de la nature pour innover durablement », Patricia RICARD, Septembre 2015 Relatif à ce qui établit des relations entre plusieurs disciplines.


D’après le site officiel28 du CEEBIOS, les initiatives « mis en place devraient contribuer à répondre au besoin d’accompagnement des projets et des entreprises s’engageant dans la voie du biomimétisme ». Celui-ci passe, en autre et avant, tout par le rapprochement de disciplines et de partenaires qui n’ont pas l’habitude de travailler ensemble et n’en ont quelquefois jamais perçu l’intérêt. Par exemple dans le projet de Mick Pearce avec son projet « Eastgate Building ». L’architecte fait part de son expérience inédite au cours d’une interview : au lieu de travailler avec des corps de métier relatifs au bâtiment, il travaille sur ce projet avec des biologistes. L’interdisciplinarité permet de faire travailler des acteurs, qui, au départ, n’ont pas étudié l’architecture et ce qu’elle englobe, à savoir, de concevoir et de réfléchir à des dispositifs architecturaux. De fait, on fait travailler plus de personnes pour lier la connaissance de ces dispositifs architecturaux et celle de la nature. Il est possible de conjecturer que le développement du biomimétisme repose sur l’abandon du modèle traditionnel c’est-à-dire, l’organisation des savoirs indépendants les uns des autres, au profit de la structuration d’un système reposant sur la cohésion et la communication entre l’ingénieur, l’industriel, l’académique et le biologiste. C’est sur cette base nouvelle que pourront émerger des projets de recherche et développement et l’extension de filières d’avenir. D’après Mario Poirrier il s’agit du rôle de l’architecte de travailler avec d’autres disciplines. Du coup, c’est une bonne façon d’élargir le spectre des réflexions. Cependant, du point pragmatique, il faut s’assurer de la plus-value de la collaboration.

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https://ceebios.com/biomimetisme


3.2 / Un concept encore non stabilisé : les limites Il n’est pas possible d’appliquer le biomimétisme à toute l'économie et à toute forme d'activité humaine, le système ne peut pas être systématiquement positif. La volonté d'imiter la nature n'est pas faite que de succès. L'histoire nous le rappelle : les premières expériences de Clément Ader furent un échec suite à un mauvais rapport poidspuissance des engins réalisés, il élabora un objet imitant pourtant la forme des oiseaux. Ici Clément Ader s’était inspiré des « roussettes des Indes » gigantesque chauve-souris dépassant les 1,10 mètre d'envergure (figure15). Il les avait observées planer dans une volière construite dans son jardin, à Paris. C'est en s'inspirant des ailes de ces animaux qu'il conçut l'Éole. D'une longueur de 4,6 mètres et d'une envergure de 13,5 mètres, l'Éole est constitué d'une armature en bois recouverte de soie élastique. Il est équipé d'un moteur à vapeur à 4 cylindres avec un brûleur à alcool, fournissant une puissance totale de 20 chevaux. Son hélice en bambou est constituée de 4 pales de 2,6 mètres de diamètre. Il ne parvint pas à le faire voler à plus de 20cm de hauteur sur quelques mètres de distance seulement. L’appareil était trop lourd et pas suffisamment élaboré pour s’envoler.29. Quelques fois, il est préférable de ne pas seulement copier la nature, mais d'aller audelà, de l'adapter, de d é v e l o p p e r l’innovation à partir d'un de ses principes. Il ne suffit pas à Clément Ader d’observer les oiseaux et de proportionner sa machine à échelle humaine pour que cela fonctionne. Figure 15, Plans de Clément Ader pour la première machine volante

Confiant pour le recours au biomimétisme, le rapport de Patricia Ricard liste des propositions pour encourager cette démarche en France dans tous les secteurs. «Dans le domaine de l’architecture, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) préconise la création d’espaces d’expérimentation ou de démonstration, encadrés par des conventions appropriées, à l’image de ce qui se pratique dans un autre domaine pour les zones franches urbaines.»30 En résumé : assouplir le cadre réglementaire (urbanisme, technique…) pour autoriser de nouvelles manières de construire en dehors des contraintes actuelles par exemple pour l’Eastgate building au Zimbabwe. Par définition, le biomimétisme se base sur une imitation de la nature. Or la copie de la nature, aussi conforme et directe qu’elle soit supposée demande une compréhension profonde des principes régissant la vie, seule une inspiration partielle ne semble possible, mais en aucun cas une reproduction totale.

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« Clément Ader, entrepreneur d'invention », Guillaume Carnino, 2013, p.7 « le biomimétisme, s’inspirer de la nature pour innover durablement », Patricia Ricard, 2015


L’architecture et la manière dont les architectes la présentent sont un reflet des préoccupations de notre société. Aujourd’hui un retour en force du naturel se produit . Le biomimétisme permettrait ainsi aux architectes de concevoir un bâtiment par un rappel biologique, à travers la sagesse de la nature ou avec la présence de technologies vertes. Le risque du biomiméstime est de produire des projets qui, ressemblant trop fortement à l’élément naturel duquel ils s’inspirent, ne seraient en réalité pas irréprochable en ce qui concerne l’environnement. Plusieurs édifices architecturaux tels que le stade olympique de Pékin conçu par les architectes Suisses Herzog et De Meuron surnommé « le nid d’oiseau » (figure 16), la ressemblance de forme étant due à l’enchevêtrement de poutres faisant penser à des brindilles. En effet, le bâtiment donne une apparence organique et de ce fait Figure 16, Beijing Olympic Stadium l’observateur peut-être trompé sur les fins environnementales en pensant que le stade est un édifice respectueux de celui-ci alors qu'il n’a d’organique que sa forme. À l’inverse, il semblerait que certaines constructions ayant intégré des éléments biomimétiques ne satisfassent pas toujours aux critères du développement durable. Suivant le même raisonnement, la biomimétique exacerbe le principe selon lequel la forme suit la fonction. Tout est « utilitariste » dans la nature, cela veut dire que rien ne se perd. De plus, le biomiméstime en architecture pourrait se voir limité en raison de ses contraintes. Même si plusieurs réalisations démontrent l’efficacité et l'innovation du biomimétisme en architecture, elles demandent cependant certaines conditions, qu’il n’est pas toujours évident de réunir lorsque l’on souhaite respecter les principes biomimétiques. Par exemple, l’imitation des structures organiques vivantes nécessite de trouver les matériaux et les configurations adéquats, dont les réponses se trouvent souvent au-delà de l'imitation pure de la nature. Par conséquent, les coûts impliqués par la recherche supplémentaire que demande le biomimétisme ne sont pas supportables dans tous les cas, notamment dans les cas d’urgence sociale. Il se pourrait que les coûts d’importation et d’exploitation de certains matériaux et matières premières soient trop conséquents non seulement sur les frais totaux du projet, mais également sur l’impact environnemental important par exemple le transport de matériaux sur divers continents. En effet, « il existe des applications biomimétiques ne présentant aucun avantage environnemental par rapport aux produits qu’elles remplacent, voire créant de nouvelles difficultés d’ordre technique ou éthique »31, par exemple lorsque la consommation de ressources et de matières est toujours aussi hautes, ou dans certaines utilisations de la transgénèse, d’autres applications biomimétiques présentant un avantage en rapport direct avec l’environnement peuvent permettre une dérivation d’une fonction du vivant et non de son imitation pure. 26 31

https://ceebios.com/biomimetisme/


Enfin, si le biomimétisme peut permettre d’obtenir des innovations totalement novatrices et originales, l’impact d’une même innovation peut se révéler favorable au regard de certains objectifs, et moins favorable, ou neutre par rapport aux technologies existantes, au regard d’autres objectifs, comme l’amélioration du cycle de vie : c’est le cas par exemple d’une peinture « antifouling » (figure 17) imitant la texture de la peau de requin : même si elle permet de réduire de Figure 17, Peau de requin façon optimale les frottements au niveau de la coque du bateau, et donc de réduire d’autant la consommation de carburant, sa production industrielle nécessite toujours de fortes conditions de température et de pression. Par ailleurs, ce type d’innovations ne peuvent être caractérisées de durables que si elles se situent dans une démarche globale incluant, au-delà des aspects environnementaux, la dimension économique, les préoccupations sociales, sociétales… La transition écologique dans le domaine de l’architecture va être génératrice d’emploi. En effet, le biomimétisme comme la plupart des innovations liées au développement durable « constitue des opportunités de montées en gamme des produits et services des entreprises, d’acquisition de compétences, d’exportations et donc d’emplois. » 32 La mise en place de « boucles courtes » par les entreprises, optimisant la consommation de matières, valorisant les déchets pour les transformer en sous-produits et en produits dérivés, est ainsi créatrice d’emplois. Cela pourra justifier la durabilité au niveau économique et social générant un nouveau secteur d’activité entier. Cependant, il arrive qu’il manque des informations sur les produits, procédés techniques, matières imitant ou reproduisant la nature, il est difficile de confirmer que toutes les innovations décrites ou se revendiquant comme du biomimétisme le sont véritablement, au sens de la durabilité environnementale. Le manque de données fiables est donc un obstacle au développement du biomimétisme, notamment parce qu’il existe peu d’analyses du cycle de vie de ces produits. Par exemple, le « plastique » produit par les abeilles collètes33 durant la reproduction, les femelles creusent des galeries avant d'y déposer leurs œufs. Afin de maintenir les œufs à l'abri elles sécrètent un matériau ressemblant à de la cellophane. Elles utilisent ce composé pour entourer la chambre du nid d'une coque de protection dans laquelle les larves vont pouvoir grandir et se développer en toute sécurité. C'est sur ces coques qu'une équipe du Franklin W. Olin College of Engineering (États-Unis) base ses espoirs pour le développement d'un nouveau bioplastique.

32 33

«Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) « Le plastique du futur produit par des abeilles? », Quentin Mauguit, 2011

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Après s'être procuré des échantillons de ce biomatériau, les chercheurs ont pu se rendre compte de la résistance extrême des fibres composant la coque de protection : ils n'ont pas été capables de les rompre avec le matériel habituellement employé. C'est sur ce point que ce plastique se différencie de tous ceux qui ont été synthétisés par d'autres procédés. Les chercheurs ont néanmoins pu observer que le matériau produit ne se compose pas uniquement de plastique. La synthèse de la coque protectrice se ferait en deux étapes. Dans un premier temps, la chambre du nid est recouverte par des fibres de soies. Les molécules de plastique n'y sont ajoutées que dans un second temps. Le résultat donne un matériau ressemblant à de la fibre de verre. Le bioplastique produit est dur et sa structure ne s'altère pas dans le temps. De plus, il est parfaitement imperméable.Cependant dans l'état actuel des choses, aucun procédé connu ne permet de Figure 18 « Plastique » protection sécrété par décomposer ce bioplastique, il est uniquement possible de l’abeille autour de la chambre conjecturer son cycle de vie. (figure 18) Une démarche qui se revendique comme étant un avantage pour aider la société à avancer sur la voie de la transition énergétique et écologique doit bien évidemment être aussi vertueuse qu’il est possible de l’être, compte tenu de nos connaissances et des techniques actuelles, sur le plan environnemental et afin de pouvoir préserver l’organisation du système permettant l’assurance d’un développement économique et social.

Par définition le biomimétisme trouve son inspiration dans les schémas d’organisation du vivant pour tenter d’en appliquer le modèle aux activités humaines. Comme cela a été rappelé précédemment, des démarches qui paraissent positives pour l’avenir, comme l’économie circulaire ou encore l’écologie industrielle prennent pour partie leur source dans l’observation des schémas d’organisation du vivant. Elles tendent à appliquer ces modèles aux activités humaines pour résoudre des problèmes qui sont à la fois économiques, sociaux et environnementaux. Mais l’impact de la bio-inspiration sur nos sociétés humaines ne doit pas pour autant être systématiquement pensé comme durable et nécessairement positif. Pour exemple : l’organisation « sociale » d’une ruche et des abeilles qui la peuplent est perçu comme un modèle pertinent d’efficacité voire même d’ordre qu’il serait bon d’imiter, alors même qu’il s’apparenterait à une société de type totalitarisme s’il était exactement calqué à notre monde. Sous cet angle « sociétale », la démarche biomimétique n’est pas intrinsèquement durable. Une forme de veille ou de vigilance s’impose, ce qui n’exclut pas l’imitation de ce que ces organisations complexes ont de meilleur, comme leur capacité à optimiser les échanges d’informations.

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CONCLUSION

La nature a toujours constitué une base de réflexion en matière de conception et d’architecture en particulier. Si s’inspirer de la nature pour écoconcevoir des projets architecturaux n’est pas une nouveauté, le biomimétisme est l’un de ces nouveaux courants qui connaissent un fort engouement depuis quelques années. L’attrait pour le biomimétisme architectural réside sans doute de son inscription dans l’architecture durable d’une part, mais plus encore de sa considération pour les êtres vivants comme source d’enseignement (gestion durable des ressources naturelles, optimisation énergétique). Ces points sont la base du biomiméstime. L’attention portée aux formes, aux fonctionnements des relations entre les organismes vivants est la particularité du biomimétisme laquelle constitue un guide dans la démarche architecturale. Au-delà de cela, le biomimétisme rentre en écho avec les grands enjeux de la société actuelle intégrant désormais les problématiques environnementales. Il ne s’agit plus de considérer les ressources naturelles comme inépuisables, mais de changer le regard sur elles pour apprendre à concevoir autrement apprendre de la nature pour innover, réinventer nos systèmes de production et nos modes de vie. Autant de thèmes sur lesquels les architectes doivent se pencher ou sont confrontés de près ou de loin. Il est important d’inclure que la nature soit une source perpétuelle d’innovation et de la préserver : « Si l’abeille venait à disparaître, l’homme n’aurait plus que quelque année à vivre » Albert Einstein Si observer les lieux est un élément de matrice de l’architecte, décrypter la nature dans sa profondeur demande de faire appel à des spécialistes. Les biologistes, écologistes ou naturalistes joueront un rôle à côté des architectes dans la conception des bâtiments. Il apparaîtra des limites dans le biomimétisme et le concept reste à délimiter, malgré une technologie avancée et performante qui imite les systèmes intelligents de la nature il subsiste des incertitudes quant à sa véritable inscription dans la démarche de transition durable. La nature est d’une immense richesse, mais n’est pas toujours applicable aux systèmes humains, il faudra élaborer ces modèles, et trouver des alternatives pour faire en sorte que le biomimétisme soit non seulement respectueux de l’environnement en termes de matérialité, permette une révolution de l’organisation sociétale ainsi que des économies à l’échelle du bâtiment tout entier. D’après M. Serero , enseignant de l’école nationale supérieure d’architecture Paris Val-de-Seine et chercheur sur le sujet, le biomimétisme n’est pas une alternative aux constructions actuelles, mais une démarche qui influence la conception de projet d’architecture. Comment pourrait-on élargir la connaissance du biomimétisme? Se pourrait-il qu’il se développe bien plus au cours des années à venir? Pourrait-on arriver à un concept entièrement durable, à l’échelle écologique, économique et sociale?

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Je souhaiterai pouvoir continuer mes études dans le domaine d’étude « écologie », car je pourrai y développer, de manière plus approfondie, cette articulation entre architecture et écologie. Une thèse pourrait me permettre d’approfondir ce sujet, car je pense que la recherche active de connaissances est la meilleure manière d’apprendre. Ce travail, bien qu’intéressant, mériterait à mon goût d’y passer plus de temps afin d’approfondir mon sujet. La principale difficulté que j’ai rencontrée durant mes recherches était l’incapacité de trouver des éléments de recherche concernant les études de cas, ces derniers se trouvant sur d’autres continents. En effet, l’aspect écologique est beaucoup développé au travers de ces édifices, cependant peu de bâtiments reprennent par exemple des organisations sociales d’organismes animaux, il a donc été difficile pour moi de prouver la durabilité du biomimétisme en architecture d’un point de vue social par exemple.

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- Les Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère, 1 | 2018 - Natasha Chayaamor-Heil , François Guéna et Nazila Hannachi-Belkadi

- « L’Olympia park de Munich orphelin », Catherine Sabbah, Octobre 2010, LE MONITEUR HEBDO - Rapport Brundtland, Notre avenir à tous [Our Common Futur]. Rapport rédigé en 1987 par la Commission mondiale sur l’environnement et le développement de l’Organisation des Nations Unies, présidée par Gro Harlem Brundtland

- « S’inspirer de la nature pour assurer le futur » , Coralie Schaub, 26 février 2015, Apprendre du vivant pour vivre mieux et plus respectueusement, c’est la mission du Centre européen d’excellence en biomimétisme et de son président, Gilles Bœuf

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Liste des figures - Figure 1, à gauche le Terminal International de Waterloo et à droite le Pangolin, Cedric et Eliane Jacquet www.nationalgeographic.fr -

- Figure 2, Epuisement matières premières – Panseo - Etude ministère industrie - 2011 - encyclo-ecolo.com - Figure 3, Martin pêcheur et train Shinkansen 500 - http://www.linternaute.com - Figure 4, La squille ou « crevette-mante » - crustacé - Stomatopoda/animaux-cie.com - Figure 5, The yellow lost dog - Shanghai - https://chine.in/actualite/gratte-ciel-forme-chien-shanghai_11631.html - Figure 6, Stade olympique de Munich à Munich et Toile d’araignée, http://www.biomimesis.fr - Figure 7, Marché Central de Royan - Photo_france.pagesperso-orange.fr/ - Figure 8, Termitière, Mathieu ROUX, http://www.supagro.fr/ - Figure 9, Dôme du Singapore Arts Centre à Singapour - Blog Pages-Energie - Figure 10 - Toiture du Singapore art center - Blog Pages-Energie - Figure 11, Durian et enveloppe du dôme du Singapore Arts Centre à Singapour - http://homeklondike.site/ 2017/02/28/biomimicry-design-spiky-durian-roof-of-singaporean-theatre/

- Figure 12, Schéma du système de ventilation d’une termitière - http://biomimetisme.eklablog.com/ - Figure 13, L’Eastgate Building - http://biomimetisme.eklablog.com/ - Figure 14, Principe de ventilation de L’Eastgate Building - https://ehp.niehs.nih.gov/ - Figure 15, Plans de Clément Ader pour la première machine volante, ladressemuseedelaposte.fr - Figure 16, Beijing Olympic Stadium, Jun Wei Fan, https://www.thousandwonders.net/ - Figure 17, peau de requin - http://mak3r.com/peau-requin-imprimante-3d/

32


TABLE DES MATIERES

Remerciements

3

Sommaire

4

Introduction

5

I/ Contexte

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1.1 Les enjeux du développement durable en architecture

9

1.2 Nouvelles législations en architecture liées au développement durable

10

1.3 Une démarche prometteuse : le biomimétisme en architecture - comment est-il utilisé ? 1.4 Différents types d’architectures biomimétiques

II/ Applications en architecture par deux études de cas

11 13

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2.1 Le Singapore Arts Centre, « une salle de concerts au poil »

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2.2 L’Eastgate Building, « le bâtiment termitière »

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III/ Le biomimétisme simple utopie ou réelle avancée future ?

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3.1 Développement en France

23

3.2 Un concept encore non stabilisé : les limites

25

Conclusion

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Bibliographie

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Liste des figures

32

Table des matières

33

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Résumé Ce rapport de licence s’interroge sur la capacité de l’architecture biomimétique à s’inscrire dans une démarche de transition durable. « Le biomimétisme consiste à , non pas copier, mais bien s'inspirer des solutions inventées par la nature et sélectionnées au cours de milliards d'années d'évolution, pour répondre à une problématique qui se pose à notre société humaine. Le tout avec des coûts environnementaux et énergétiques bien moindres que ceux proposés par d'autres types de biotechnologies. » Au fil des siècles, les enjeux planétaires ont évolué et les besoins architecturaux également. L’architecture se trouvant être le miroir de l’évolution sociétale, nous la voyons aujourd’hui prendre un tournant décisif concernant ces nouveaux enjeux, le XXIe siècle étant un siècle de rupture. Il faudra passer par une remise en question de nos modes de vie et donc s’interroger sur des alternatives possibles pour une intégration durable. L’idée de s’inspirer du biomimétisme pour concevoir de l’architecture émerge dans l’esprit des architectes et se développe aux quatre coins du monde avec des propositions aussi nombreuses que la nature est vaste et riche. Cependant ce concept aboutira sur une certaine vigilance de la part des différents acteurs, car encore méconnu et peu étudié.

Mots clés Architecture - Biomimétisme - Développement Durable Transition Ecologique - Bio-technologie - Innovation


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