Galerie Laurent Strouk - Exposition Philippe Pasqua

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Offices du mal, fils de malices,

Seigneur à moteur, Pasqua rejoint ses terres. Nerveusement propulsé sur l’asphalte, JP aux commandes, son bolide trace la route. Il ne parle pas, migraine et reggae cohabitent, fredonnent obsessionnellement en rythme lancinant. Bouteille d’eau à la main, fièvre et effervescence, il rêve pourtant de bassin tranquille, d’esturgeons gigantesques et carpes monstrueuses, d’irréel crâne flottant géant, blanc de pureté, reflété au gré du vent et des remous silencieux translucides, trois tonnes de dynamites qui pètent la forme, explosent la tête, ravagent les sens. Il invente un univers créé de toute pièce au sein duquel son travail, ses personnages, ses passions, ses répulsions et ses fantasmes trouveraient leurs marques, se révèleraient au monde avec puissance et générosité. Halluciné d’aluminium, épris de série et plan B, il rejoue le film en silence, décor identique et colossale tête de fer, mortelle réflexion en noir


et blanc, emploi en proie aux éléments. Les bambous grincent en bouquets rebelles, accueil rageur d’une nature forte, debout devant les cieux et les saisons. L e s m u r s , l e s s o l s , l e s t o i t s , l e s r e m pa r t s s’accommodent des hommes, de leurs travers, de leurs exigences, de leur maitrise et de leur soif de domination à l’abri des regards inconvenants et des oreilles affutées. Repaire, espace, liberté, atmo sphère, cruel imaginaire brut aux sensations pimentées montant au cerveau, mélange radical pigmenté des genres et géométrie variable de cul, partie carrée privée, triangle rose vasodilaté sniffeur de poppers ou pudique rectangle blanc immaculé, exposition scandaleuse osée d’hérétiques fesses offertes, d’anatomies écartées, d’hermétiques humains désaxés sur orbite tournant mal.

Orifices et maléfices

Pasqua connait la route et l’emprunte avec conviction. Déterminé, il la décrit à sa façon et comme toujours n’y va pas par quatre chemins. Comment nier que la vie s’installe, se gagne à coup de bistouris, de chairs pourries, de comas artificiels, de pilules, de piqures, de goutte à goutte, poches à merde et sondes à pisse. Comment ignorer que la mort se prend, se donne, se cache, se sent, s’observe, se transporte … Vice après le vide, basses contingences, les salissures s’insinuent, douteuses. Elles se répandent aléatoirement, s’infiltrent amèrement dans la délicatesse poilue des sinus protecteurs, se meuvent en saloperies incontrôlées et puantes, transformées en fragrances liquides de fin de vie d’ange. Les huiles de Pasqua s’affichent d’une vie éternelle, fraîcheur rétinienne, tics et gestes frénétiques, visages du voyage, modèles émus d’elles, froideur de regards frondeurs et révélateur d’heures rêvées.


Philippine, Lila, Stella, Sylvia…, belles rebelles poseuses de bombes, anatomies atomiques. Il cadre, façonne, pétrit l’instant sur la toile dans l’urgence de sa fulgurance, avant la suite, l’irrémédiable… Un jour, les vanités s’imprègnent, se nourrissent, se déversent et crachent de leurs trous inutiles les restes vains de l’existence, s’emplissent de substrats agglutinés au fond des mâchoires closes décomposées en un vague sourire carnassier. Sourire est le sale des morts. Les petites charognes grignoteuses le savent bien et s’activent goulûment en une insalubre, sacrilège et délectable ronde malsaine à la beauté sadique.

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On the road again

Le feu rouge chauffe le bolide. Tenir en place et résister, sécurité ceinturée à boucler devant les flics de la censure, trois points d’exclamation sur le permis de construire, suspension d’administration, neuroleptiques de boutique et somnifères de salon. Pour avancer, bâtir, offrir, Pasqua prend tous les risques et flingue le temps à bout portant. Les femmes matrices, organiquement encastrables, interchangeables vulves et femelles intégrales, se tortillent d’excitation et promettent, orifices et saint esprit, sans frein ni loi. La messe est dite, « prenez ceci car ceci est mon corps, buvez ceci car ceci est mon sang », réjouissances au programme de la nuit des sens, délices de lie et fin de calice. Victimes repentantes d’un sacrifice consenti, la sentence régalienne plane sur le lit de justice du seigneur viveur en proie à l’appel des seins, à la moiteur chaude du moteur charnel, à la pénétration sans limite des voies du mystère de la vie et du plaisir aguicheur supposé voué à l’irréfléchi, l’inné, le prude et légitime intérêt général pour des siècles et des sexes. Gesticulation de testicules, d’ovulation en

gestation, reproduction et tribulations de cycles à con s’activent pour le bien commun sous couvert d’anonymat. Les nouveaux nés passent salement le cap. Animaux de compagnie, les chiens fidèles remuent la queue, se frottent, se lèchent et s’accouplent bruyamment, impudiques bêtes de sexe surexcitées, truffes irréfléchies aux crocs plantés de désir, serrées, collées. En dérapages contrôlés, avisé nocturne, évitant autant que flair se peut les sens interdits, Pasqua frôle les lignes blanches et repart à vue de nez. Il voit grand, se paye irrationnellement du luxe, sur dimensionne une gueule de trois mètres. Prenant du recul, il déchire par son talent extraordinaire la pièce désormais habitée d’une présence surnaturelle, envoutante et furieusement réaliste. Héroïne trisomique radieuse, mongolien plastique aux traits apaisés, aveugle au regard perdu fixant son horizon de mystère, soldat inconnu à la tête de l’art, armée de tronches en bataille rangée, travelo dépravé aux minauderies salaces, salopes prometteuses et graciles ingénues lippues, tous s’abandonnent, s’offrent à l’inquisition du voyeurisme de l’humanité. Ces visages se répondent, accusent malgré eux la cruauté du monde de leur sincérité, regardent


crûment la place qui leur appartient d’occuper malgré tout, poignardent la normalité au cœur du jugement. Le respect est affaire d’honnêteté. La peau sublimée de tatouages vifs hante le cortex des crânes exhibitionnistes, embellie le bolide emballé, couvre les os de l’éternité d’une vie à la respiration sourde et délicate. Le choc des photos capturées, le geste affolé des palimpsestes, la pâture des peintures, les sculptures en factures de fractures, l’interprétation insoutenable des non-dits, les déclinaisons magistrales de subconscientes préoccupations, tout concourt à l’irrémédiable, à l’incontournable, à l’insatiable vérité prise à la gorge. La tombe monumentale, capitale épitaphe, annonce la couleur des projets à tenir. Les cendriers surdimensionnés trahissent un avenir pipé, consumé à petit feu, grillé d’abus de tabou. Tôt ou tard, la nuit sera blanche comme une bière raffinée et longue à l’instar d’une heureuse veillée de soir d’été, funèbre requiem sourd au DJ, sampler et sans reproche. La route défile sur les tableaux de bord et les virages aguicheurs se négocient pour ne pas tomber dans les panneaux arnaqueurs,

enliseur pognon de goudron, amnésique fric de trafic, infortune thune de bitume, compteurs à fond la caisse, nerf de la paix et transport blindé. Turbocompresseur de l’art, Pasqua produit comme il respire, nuit et jour, inspiré, interné, conditionné et concentré, défiant l’espace et le temps. Il enflamme les passions de son intrigante démence taiseuse acclimatée au mieux dans la fougue incroyable et possiblement curative de ses œuvres. Il calcine les sentiments secrets, ravive les pires folies enfouies à coup de coulures, tâches, emplâtres, souillures évolutives et matières en progression. Il pose le sujet et l’impose dans sa marginalité, par la force, la violence, la barbarie de l’état humain. Seigneur rasta et voiture de place, affrètement et jet privé, réaction et propulsion, Pasqua le débridé met les gaz pour rapprocher les continents de ses jardins secrets maléfiques. Sa course éperdue contre la montre continue à plein régime, vitesse et confrontations, turbulences de navigation, pots brûlants d’échappements libres.


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Tortures de peinture, Morsures de soudure

Il châtie volontiers, supplicie à souhait, violente par le menu et fait pleurer ses corps de substances éparses, de consistances originelles, de cris, rituels et mutilations. Il fait baver des orbites et dégouliner les faces grimaçantes des restes noircis, macérés liquéfiés et assortis d’instables grumeaux conglomérés. Zélées ciselées, les ailes de Bocquel d’une précision hallucinante strient de vérité en oraison de papillons choisis. D’exceptionnelles patines élaborées colorent les crânes précieux, d’une incroyable qualité rêvée, contrôlée et maîtrisée. Pasqua décore d’uniques bronzes médailles, enrichit ses élégants d’argent comptant leurs dents, dore et redore de noirs désirs chromés

cramés à blanc, incisives incisives… Pasqua capture étrangement son monde évolutif post mortem, cerné, mis en boite, figé, aseptisé, givré de plexiglas. Il sublime ses créatures, ses victoires, ses trophées tribaux et les livre définitivement possédés à la lumière révélatrice, à l’apprivoisement de la possession. Carburer et démolir pour mieux vivre, bâtir, fortifier, ériger partout où le jeu en vaut la torche, où les femmes assassinées en grand format se glacent sur papier, où la pierre s’épouvante d’une fin certaine, burinée à coups de grâce, où la terre se délite du mystère de ses hommes insatiables, agonise de ses morts désagrégés aux dents longues pour renaître de vagues cendres anonymes, fumantes d’espérance perpétuelle et dérisoire. Sujets à vif, Pasqua a du sang sur les mains et plaide coupable, réacteur à pression, à gravité, à propulsion, saigneur à moteur. Jean CORBU


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Vanité I bronze argenté I Fondeur Bocquel I H : 25 cm L : 48 cm P : 48 cm I 8 exemplaires I 2011 Philippine I huile sur toile I 220 x 200 cm I 2010 Étude I huile sur toile I 150 x 140 cm I 2010 Philippine - étude I huile sur toile I 150 x 140 cm I 2011 Philippine - étude I huile sur toile I 150 x 140 cm I 2011 Philippine - étude I huile sur toile I 150 x 140 cm I 2011 Silvia - étude I huile sur toile I 150x 140 cm I 2011 Étude I huile sur toile I 73 x 60 cm I 2010 Étude I huile sur toile I 73 x 60 cm I 2010 Étude I huile sur toile I 140 x 140 cm I 2011 Philippine - étude I huile sur toile I 150 x 140 cm I 2011

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Philippine - étude I huile sur toile I 150 x 140 cm I 2011 Vanité I bronze à patine noire I Fondeur Bocquel I H : 41 cm L : 39 cm P : 45 cm I 8 exemplaires I 2011 Vanité I bronze à patine noire I Fondeur Bocquel I H : 22 cm L : 48 cm P : 48 cm I 8 exemplaires I 2011

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Étude I huile sur toile I 73 x 60 cm I 2010 Lila - étude I huile sur toile I 150 x 140 cm I 2011 Philippine - étude I huile sur toile I 150 x 140 cm I 2011

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Étude I huile sur toile I 73 x 54 cm I 2011 Étude I huile sur toile I 73 x 54 cm I 2011 Étude I huile sur toile I 73 x 54 cm I 2010 Étude I huile sur toile I 73 x 54 cm I 2011 Vanité I bronze à patine bruneI Fondeur Bocquel I H : 22 cm L : 48 cm P : 48 cm I 8 exemplaires I 2011 Étude I huile sur toile I 73 x 54 cm I 2011 Étude I huile sur toile I 73 x 54 cm I 2011 Étude I huile sur toile I 73 x 54 cm I 2011 Étude I huile sur toile I 73 x 54 cm I 2010 Étude I huile sur toile I 73 x 60 cm I 2010 Vanité I bronze black chrome I Fondeur Bocquel I H : 23 cm L : 48 cm P : 48 cm I 8 exemplaires I 2011 Étude I huile sur toile I 73 x 60 cm I 2011 Étude I huile sur toile I 73 x 54 cm I 2011 Étude I huile sur toile I 73 x 60 cm I 2011 Vanité I bronze argenté I Fondeur Bocquel I H : 50 cm L : 53 cm P : 54 cm I 8 exemplaires I 2011 Vanité I bronze à patine griseI Fondeur Bocquel I H : 25 cm L : 48 cm P : 48 cm I 8 exemplaires I 2011


8bis - 16, rue Jacques Callot 75006 Paris - France tél : + 33 (0) 1 40 46 89 06 galerie@laurentstrouk.com www.laurentstrouk.com

exposition du 18 novembre 2011 au 17 janvier 2012 photos Jean-Louis BELLURGET Xavier GRANDSART conception graphique : Antje WELDE / www.voiture14.com impression : Agpograf - Barcelone ISBN : 9782953540505 Imprimé en Europe Achevé d’imprimer novembre 2011 Dépôt légal, novembre 2011 © droits réservés


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