Un ĂŠtĂŠ en librairies carnet de voyage
Ce Carnet de voyage en librairies a été publié pour le compte des Librairies Initiales et avec le soutien de la région Île-de-France, la région Rhône-Alpes, et la DRAC Poitou-Charente
Introduction. Qu’est-ce qu’une librairie indépendante ? Quand je pose la question autour de moi, plutôt à des lecteurs, le terme de « librairie indépendante » est parfois encore nimbé d’un voile de mystère. Après quelques secondes de réflexion, on se doute que je parle de petites librairies, de librairies de quartier. Sans être faux, ces deux éléments, taille et rayonnement géographique, ne sont pas les critères fondamentaux qui caractérisent la librairie indépendante. La librairie indépendante est une création idéologique née bien après la naissance de la librairie, avec l’apparition des chaînes de commerce spécialisé et pour s’en distinguer. Voilà en tout cas ce qu’il en est dit sur le site des libraires Initiales1 : « Une librairie indépendante est une librairie n’appartenant ni à un groupe industriel ou commercial, ni à une chaîne. C’est un lieu où œuvrent des libraires qui ont à cœur de diffuser les livres qu’ils aiment, et non pas ceux que d’autres auront choisis pour eux et le public. C’est un espace à taille humaine où les mots proximité, diversité et service prennent tout leur sens. C’est le carrefour de la création littéraire, le garant de la liberté de toutes les lectures. » 1. www.initiales.org
Pour le Syndicat de la librairie française2 (SLF), « l’indépendance est la liberté que possède le dirigeant de consacrer une partie raisonnable de ce qui pourrait être la marge bénéficiaire nette de son entreprise à financer : la part de rotation lente du stock qui constitue son fonds de référence 3, et du personnel en nombre suffisant capable de choisir et de conseiller ». Résumons : des livres qui restent, le fonds, et des employés qualifiés. Ces librairies sont aujourd’hui au nombre de 2 000 en France, et selon Laure Adler : « L’existence d’un réseau de libraires indépendants constitue une sorte d’exception dans le monde, grâce à laquelle peut être maintenue la création littéraire. Il faut tout faire pour défendre la diversité des écritures et des talents, pour éviter que la best‑sellerisation n’étouffe les autres livres de qualité. » Cette année, le socle de ce réseau de libraires indépendants, le prix unique du livre, a été ébranlé4 et certains ont attaqué ce qu’ils considèrent comme une institution poussiéreuse et sans avenir5. Mais face à ces menaces, « les professionnels 2. www.syndicat-librairie.fr — 3. Fonds constitué de livres publiés depuis plus d’un an, date de première édition. — 4. Dans le cadre de l’adoption de la loi de modernisation de l’économie (LME) en juin 2008, le député Dionis du Séjour a déposé un amendement visant à ramener de deux ans à un an la durée durant laquelle tout solde sur le livre est interdit. — 5. Thierry Wolton, Le Monde, 18 janvier 2008 : « Le combat du Syndicat de la librairie française est non seulement d’arrière-garde car Internet est devenu un vecteur culturel essentiel, y compris pour le livre, mais surtout il sent son poujadisme en pratiquant un corporatisme qui n’a rien à voir avec la défense du livre. »
et les lecteurs se mobilisent6». Et le danger est, pour l’instant, écarté. Parmi ces 2 000 libraires, j’en connais surtout trente-quatre, les adhérents de l’association Initiales… Alors, pourquoi ne pas aller voir de plus près comment vivent et travaillent ceux qui se sont lancés dans cette folle aventure : vendre des livres et vouloir en vivre ? Ainsi est née l’idée d’un autre tour de France : du 7 au 28 juillet 2008, j’ai franchi la porte de dix-neuf librairies indépendantes appartenant à l’association de libraires Initiales, j’ai regardé, écouté et tenté d’apprécier un métier, une passion, une cause. Consciente de la subjectivité de mon regard, je vous propose un panorama estival et fugace de quelques librairies aux quatre coins de France.
6. Appel pour le livre, juillet 2008. Voir le site : pourlelivre.wordpress.com.
Lundi 7 juillet, Obliques, Auxerre. La gare de Paris Bercy dessert les villes
de Bourgogne, dont Auxerre, première étape de mon périple, ou Venise, en train couchette… et si finalement je me trompais de train et filais vers la lagune magique ? Restons sérieux, ce sera la Bourgogne, Auxerre et la librairie Obliques dirigée par George Bassan. Le ciel se couvre sévèrement sur la banlieue, le train passe par Maisons-Alfort, devant des pavillons et des maisons de ville… puis c’est la forêt, les maisons disparaissent, aspirées une à une par la terre, y poussent de grands arbres centenaires, des broussailles colorées, des prairies entourées de bosquets. Puis des serres, des usines, des entrepôts. De petits nuages gris et légers courent au ralenti au-dessus des cimes comme des touffes de fumée. Plus haut, les nuages blancs immaculés et majestueux enveloppent le ciel de rubans de laine. De petites centrales électriques, de grands parkings, des amoncellements de cageots et de palettes vides sur des plates-formes d’usines vétustes. Au-dessus d’une cimenterie d’un autre âge, d’étranges nuages si bas, si gros, si épais, semblent se pencher vers la vitre pour observer les passagers du train. La lumière perce derrière la rangée d’arbres qui borde les rails, et après une colline dorée et humide comme le dos d’un chien après l’effort, c’est Auxerre, et j’oublie doucement l’Italie. George m’accueille à la gare d’Auxerre, déjà sous la pluie. À la terrasse couverte d’un café, George connaît tout le monde, tout le monde connaît George. Ils seront d’ailleurs tous là pour fêter les trente ans de la librairie, le 30 novembre prochain. Alain Kewes des éditions Rhubarbe, JeanClaude Peyrard, retraité, fidèle client de la librairie que nous invitons à notre table, François Bodaert, éditeur à Sens (Obsidiane)… La librairie est un ancien magasin de chaussures, le bouton de porte d’entrée en forme de pied chaussé est resté. 10
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La large vitrine fait face au portique Renaissance ouvrant sur l’église Saint-Pierre, l’église préférée de George. Son bureau est à l’étage. Elle s’y installe et, comme tous les matins, ouvre sa boîte mail, trie les messages, lit les plus importants. La cigarette distinguée à la main, George me raconte comment être libraire indépendant dans une ville comme Auxerre l’a amenée à devenir peu à peu un acteur majeur de la vie culturelle, associative de la ville et de la région.
pour proposer aux participants des ouvrages en regard du programme de conférences. Mais le quotidien de George, c’est d’abord et avant tout un énorme travail de gestion et d’administration… et la lecture ? D’abord le matin, entre 7 h et 10 h 30. George est une vraie passionnée, assume ses mille et une fonctions, elle est lucide sur ses limites concernant notamment l’Internet, largement laissé de côté, et la décoration !
Elle se bat pour sa librairie, et la librairie – surtout depuis la gratuité du livre scolaire en Bourgogne7 – auprès de ses clients, mais aussi au sein d’instances régionales (elle est présidente des associations des libraires de Bourgogne et vice-présidente du Centre régional du livre, CRL) ; elle milite aussi pour la culture et sa diffusion (en tant que présidente de l’association du théâtre municipal et trésorière de l’association Mouv’art qui promeut l’art contemporain de l’Yonne). Et si la librairie est presque devenue « un lieu collectif », ce que retiennent surtout les clients et amis de George, c’est bien sa faculté à sortir de sa librairie et à participer à bon nombre d’événements. Pas une manifestation culturelle sans que George n’apporte un bout de sa librairie au cœur de l’action, le livre va à la rencontre du lecteur. George est aussi aux manettes du prix des Lycéens et Apprentis en Bourgogne. Et quand une classe d’apprenties esthéticiennes récompense Virginie Ollagnier pour son roman Toutes ces vies qu’on abandonne (Liana Levi, 2007) devant l’auditorium complet et attentif de Dijon, « ça fait sacrément plaisir ». Autre événement important : Les entretiens d’Auxerre8 où Obliques et Ruc, librairie traditionnelle d’Auxerre, s’associent
George a eu une vie bien remplie avant la librairie, elle pourrait déjà être à la retraite… Elle attend le bon repreneur pour profiter de sa nouvelle maison, au milieu des champs de blé.
7. Votée en 2004, la belle idée de la gratuité du livre scolaire s’est transformée en handicap pour les libraires indépendants : en effet, ce sont les établissements, et non les parents, qui ont reçu les subventions. Et le système d’appels d’offre des marchés publics a finalement, favorisé les grossistes régionaux et nationaux. — 8. condorcet.lyonne-blog.com
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Concrètement La librairie aura trente ans en novembre 2008, George en est responsable depuis douze ans. Responsable George Bassan Équipe un libraire, un metteur à part9, un apprenti. Superficie 100 m2 Nombre de références 30 000 Le contexte local Auxerre, préfecture de 40 000 habitants Un IUT, un IUFM, un BTS. Les librairies à Auxerre : Ruc et Odyssée, librairies générales, La Pieuvre, librairie spécialisée bande dessinée Les librairies en Bourgogne 120 « points de vente », 30 à 40 librairies 9. Le metteur à part ou réceptionnaire/iste est chargé de la réception des colis, de sa distribution par rayon. Il est aussi en charge des retours des livres invendus.
Une librairie, un livre Nancy Huston, Instrument des ténèbres, Actes Sud, 1996. Pour moi, Instrument des ténèbres est un livre fétiche parce qu’il est paru juste après que j’ai repris la librairie ; ce fut mon premier « coup de cœur de libraire » et ma première recommandation de lecture, ce qui en fait aussi le symbole de la rencontre avec les lecteurs auxerrois car ils nous ont suivis avec enthousiasme sur cette lecture.
Mardi 8 juillet, Le Cadran lunaire, Mâcon. Je quitte Auxerre déjà
fatiguée, le coq des voisins a chanté à peu près tous les quarts d’heure à partir du milieu de la nuit. Mais je compte sur ce voyage pour lutter contre ma tendance naturelle à la fatigue et je rêve de me réveiller un matin, après trois heures de sommeil, fraîche et souple comme un roseau de printemps… C’est Noémie qui vient me chercher à la gare, elle est jolie et gaie, nous marchons jusqu’à la librairie Le Cadran lunaire10 en centre-ville. Noémie est l’employée de Jean-Marc Brunier qui a longtemps travaillé seul, avant d’embaucher Antoinette, puis Noémie.
La librairie est divisée en deux espaces de taille égale : une première salle réservée à l’adulte et une seconde en contrebas pour les enfants et la bande dessinée. Au fond, le bureau de réception des offices11, des réassortiments12, des commandes et des retours13. « Le jour où je renvoie plus de cartons que j’en reçois, j’arrête. » Ce paradoxe exprime bien un aspect problématique de la situation de la librairie aujourd’hui face à l’offre éditoriale, chaque année plus importante14. Noémie a un master de philosophie et a suivi une formation de librairie à l’Institut de promotion commerciale de Lyon15 (IPC). Mâcon n’est pas un choix, c’est la seule place en librairie (telle qu’elle l’imagine) qu’elle a trouvée. Elle aime beaucoup son métier, la librairie où elle travaille, Jean-Marc et Antoinette, mais Lyon lui manque et elle aimerait un jour ouvrir sa propre librairie. 10. Le Cadran lunaire est le titre d’un roman d’André Pieyre de Mandiargues (Gallimard, 1972). — 11. Les offices sont les commandes de nouveautés, choisies avec le représentant plusieurs semaines avant leur sortie. — 12. Le libraire recommande un livre dont il n’a plus ou pas suffisamment d’exemplaires.—13. Les libraires retournent aux éditeurs les livres invendus. — 14. Tant de livres paraissent tous les mois que, parfois (souvent ?), les libraires submergés, ont l’impression de renvoyer autant d’invendus que de recevoir de nouveautés, et le temps imparti à la réception et aux retours de colis prend de plus en plus de place dans l’emploi du temps du libraire. —15. www.ipc-ecd.cci.fr.
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Au-dessus de la librairie, une grande salle accueille les rencontres qu’organise régulièrement Jean-Marc. La prochaine rencontre sera le 12 septembre avec Jeanne Benameur16. Il y a aussi une cuisine et un bureau côté façade, je descends du café pour tout le monde. Jean-Marc nous rejoint à la librairie après l’heure du déjeuner. Il est maintenant à la caisse et, entre deux clients, il prépare la rentrée avec un représentant17. La librairie et la rue étaient bien calmes jusque-là, mais à 15 h, les cafés ouvrent leurs portes, les clients sortent d’on ne sait trop où et passent... notamment devant la vitrine de la librairie : à gauche, elle est consacrée à Tomi Ungerer, illustrateur, dessinateur et auteur pour enfants et adultes, à droite, à la belle collection « Le nom de l’arbre » (Actes Sud). L’après-midi passe vite, l’ambiance est douce et légère dans la librairie. J’ai de la chance, Pascal, cadre infirmier et lecteur curieux, passe rendre des services de presse qu’on lui a prêtés… il n’est plus un simple client, mais un lecteur dont on attend des critiques et des conseils de lecture. Jean-Marc parle d’ailleurs de ses clients comme des lecteurs assidus, exigeants qui achètent le plus souvent leurs livres en grand format18. C’est très surprenant, et cela se confirme dans l’aménagement de la librairie : l’interclassement19 n’est pas passé par là. Les poches sont un peu relégués à côté de l’escalier, les tables sont exclusivement réservées aux livres brochés. Jean-Marc et Noémie travaillent beaucoup, encore plus depuis qu’Antoinette attend un enfant. Nous dînons tous les quatre et, le lendemain matin, Jean-Marc m’accompagne à la gare après une photo avec le chat de la librairie…
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16. Dernier roman, Laver les ombres, Actes Sud, 2008. — 17. Les représentants informent les libraires des nouveautés et interviennent dans la relation commerciale avec les diffuseurs. — 18. Édition brochée, souvent la première édition d’un ouvrage. Celui-ci peut ensuite reparaître en format de poche. — 19. Mode de classement par auteur sans distinction de format (poche ou grand format). La littérature est ainsi regroupée dans un seul et même rayon. Ce mode de classement, qui date d’une vingtaine d’années, a succédé au classement poche/grand format, qui succédait lui-même au classement par éditeur.
Concrètement La librairie a été créée en 1977 par Sylvie Boinvilié, libraire militante. Jean-Marc Brunier la rachète en 1995 au propriétaire suivant, bien décidé à redonner une âme littéraire et engagée à la librairie. Responsable Jean-Marc Brunier Équipe deux libraires Superficie 80 m2 Références 9 500
Une librairie, un livre Pascal Mercier, Train de nuit pour Lisbonne, Maren Sell, 2006. Existentiel, essentiel, voilà un livre majeur. Toutes les questions sont posées, amour, amitié, fidélité, responsabilité, engagement. Et même la question de la littérature, de son pouvoir, de son devoir. Alors chaque lecteur, à sa mesure, trouve les réponses qui lui sont propres. N’est-ce pas là le miracle des grands livres, des très grands livres ? En tous les cas, 20 celui-ci est le plus « recommandé » de toute l’histoire du Cadran lunaire.
Le contexte local La librairie Renaudier, librairie traditionnelle de Mâcon, ferme ses portes après l’arrivée d’un magasin de la chaîne de librairies L’univers du livre. Cette dernière est par la suite rachetée par le groupe Gibert Joseph20 qui développe le livre d’occasion. La librairie régionaliste Barting a fermé sans trouver de repreneur. Un Cultura21 a ouvert en périphérie. Il n’y a plus de salon du livre à Mâcon. Le plus proche a lieu tous les deux ans à Saint-Laurens-sur-Saône. L’association Atout Sens22 dont JeanMarc a assuré la présidence pendant plusieurs années a pour but de promouvoir la culture en milieu rural. Chaque année est invité un écrivain dont on découvre l’univers, à travers un spectacle associant musiciens, comédiens, plasticiens… Citons quelques-uns des auteurs invités : Philippe Claudel, Eric Holder, Véronique Ovaldé, Michèle Lesbre… 20. Librairie historique spécialisée en livres d’occasion, acquéreur de l’Univers du Livre en 2001. — 21. Chaîne de magasins de produits culturels appartenant au groupe Carrefour. —22. www.atoutsens.free.fr 21
Mercredi 9 juillet, Lune et l’Autre, Saint-Étienne ... Et je rate mon
train. C’est un peu plus tôt que ne le laissait penser ma distraction, mais c’est sans conséquence grave, ici les liaisons en TER sont fréquentes. Je prends le train suivant et quitte la Bourgogne, direction la région Rhône-Alpes. Il fait beau et chaud, et malgré le doux bercement du train, je ne m’endors pas, je tiens résolument compagnie à ma fatigue.
Nous passons par tout un chapelet de villes « sur-Saône » et devant des serres, des centrales d’épuration, des grues, des collines boisées, des meules, beaucoup de meules. Changement à Lyon. La librairie Lune et l’Autre, anciennement Blandine Blanc, du nom de sa précédente propriétaire, a été reprise par Marie et Céline il y a un an. Elles ont toutes les deux à peine trente ans et étrangement se ressemblent. Elles se sont connues quand elles travaillaient à la Fnac de Lorient. Marie avait fait son premier stage chez Blandine Blanc. Quand elle a appris que Blandine souhaitait prendre sa retraite, très rapidement la reprise s’est organisée. Aujourd’hui, Marie et Céline sont ravies et fières de leur réussite. Elles ont transformé la librairie à leur image ; le rayon jeunesse, spécialité de Céline, a pris de l’ampleur et l’espace qui lui est dédié offre maintenant le confort et les couleurs qu’il mérite. Le rayon dédié à l’architecture, au design et à la création contemporaine est au diapason d’un public curieux, notamment celui de la Biennale internationale du design de Saint-Étienne23, dont la dixième édition a eu lieu en novembre 2008. Le rayon littérature reste le rayon principal de la librairie et c’est la 23. biennalesaint-etienne.citedudesign.com
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« lecture-plaisir » qui guide les choix de Marie. Dans l’avenir, elles aimeraient développer le rayon sciences humaines, un peu léger pour l’instant. Il y a plusieurs librairies à Saint-Étienne. Lune et L’Autre attire une clientèle de quartier et a gardé les fidèles de Blandine. Elle participe à la vie culturelle de la ville, propose des livres lors des conférences de philosophie, « Dehors », organisées en partenariat avec la villa Gillet24, pour certains spectacles du théâtre de la ville… Comme Auxerre et Mâcon, Saint-Étienne a ses rues piétonnes et ses enseignes franchisées. Les librairies indépendantes font figure d’exception et deviennent mes repaires dans des villes qui finissent par toutes se ressembler. Obliques, Le Cadran Lunaire et Lune et L’Autre, aussi différentes soient-elles, sont nées de la même envie d’assurer une certaine continuité, de reprendre et de faire vivre un lieu que ces « jeunes » libraires estiment essentiel à la vie de la ville, de la région.
la carte postale et les gentils messieurs un peu fous me saluent bien bas. Il fait doux, nous dînons en terrasse. Marie regarde sa montre, elle est attendue, son compagnon et elle partent dès ce soir passer quelques jours en Bretagne. Céline gèrera la librairie seule, elles sont habituées à ce fonctionnement. Mais elles avouent avoir énormément travaillé cette année, le métier de libraire est fantastique tant que l’enthousiasme est là ; elles pensent qu’un jour, elles vogueront vers de nouvelles aventures…
Je rencontre un client fidèle de la librairie, nous discutons un peu à l’arrière du magasin, puis il sort rejoindre un ami en face, dans la bouquinerie… Marie et Céline sont occupées avec des représentants et des clients, alors je l’y rejoins… et quelle ambiance ! Un ancien dermatologue et deux autres personnages comme tout droit sortis des livres poussiéreux de la boutique se donnent la réplique devant la libraire amusée – et un peu blasée aussi. En feuilletant un album de vieilles cartes postales, je tombe sur une carte de L’Œil de la Lettre, plus précisément sur un dossier consacré à la littérature allemande édité par ce groupement de libraires qui a, pendant d’assez longues années, tenu le haut du pavé dans la profession. En partant, la librairie m’offre 24
24. 720plan.ovh.net
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Une librairie, un livre Martine Sonnet, Atelier 62, Le temps qu’il fait, 2008. Atelier 62, c’est le récit que tous les fils et filles d’ouvriers auraient voulu écrire sur leur famille. Martine Sonnet raconte l’histoire de son père, ouvrier dans les forges des usines Renault-Billancourt. Ce n’est pas un récit larmoyant, ni accusateur, mais plutôt une chronique familiale extrêmement bien documentée (références nombreuses à la Gazette des métallos). Par le biais de son histoire familiale, l’auteur rend hommage à toute une génération d’ouvriers dont les conditions de travail ont été très dures (peu d’ouvriers atteignaient l’âge de la retraite). Un livre instructif et poignant qui nous oblige à nous retourner sur un passé pas si lointain qu’on ne le croit.
Concrètement Responsables Céline Guilbaud et Marie Marcon Superficie 80 m2 Références 10 000