Deux shillings

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DEUX SHILLINGS CORRESPONDANCE INÉDITE

par

É RIC R ICHARD G AILLET En souvenir de Buddy et de son entourage

L’histoire est à ceux qui l’écrivent. André Brochu, Adéodat

Copyright © 2016 geneastoria@gmail.com All rights reserved. ISBN-13: 978-1530863440

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AVERTISSEMENT

Ce texte est issu de dialogues ou de traductions, si les tournures de phrases ont subi certaines modifications, les informations qu’elles contiennent sont véridiques. Présentation de l’auteur : En 1943, Buddy est mobilisé dans la force aérienne. Il partira l’année suivante pour le front, très loin de son Illinois natal. Les lettres qu’il écrit à ses proches constituent un témoignage inédit sur le choix d’un jeune Américain : étudier pour servir son pays. À travers la correspondance familiale, se découvre la réalité d’une guerre vécue au quotidien ainsi que les difficultés de ceux qui sont restés à l’arrière. « Madame Doop m’a dit qu’elle avait reçu une lettre “destructrice”, il y a quelque temps de Russell, racontant qu’il était si las, qu’il avait du mal à écrire, cette nuit-là particulièrement, il était très déprimé et découragé. Il disait que des lits près des leurs étaient vides. » Une extraordinaire leçon de courage d’hommes et de femmes à travers de témoignages poignants, de photos, de lettres du passé et du présent. 3


Sommaire Avertissement ........................................................................................... 2 Rochester ................................................................................................... 4 Londres ...................................................................................................... 8 La guerre .................................................................................................. 12 Beloit ........................................................................................................ 15 Texas ........................................................................................................ 20 Belleville................................................................................................... 36 Chatham Field ........................................................................................ 42 Les courriers de la victoire.................................................................... 49 Un gâteau pour Podington ................................................................... 53 Les enfants du terril ............................................................................... 58 Chemnitz ................................................................................................. 80 Phi Kappa Psi ......................................................................................... 99 Guernica ................................................................................................ 115 Rockford................................................................................................ 124 Citation d’honneur ............................................................................... 146 X—22 .................................................................................................... 171 Wichita ................................................................................................... 182 Blacksburg ............................................................................................. 197 Maryland ................................................................................................ 206 Urbana ................................................................................................... 224 Références bibliographiques............................................................... 230 Remerciements ..................................................................................... 232 4


ROCHESTER

Que je crains plutôt que nous ne laissions cette guerre à nos enfants, comme un malheureux héritage ! Jean-Jacques Barthélemy Soudain, une explosion — L’avion s’écrase. Puis de la fumée. Beaucoup de témoins s’en souviennent. Pour ma mère, c’était une image gravée à jamais dans son esprit. Pour ne pas oublier, il était indispensable de transmettre à la postérité un travail de mémoire avant de voir disparaître les derniers observateurs. Il était aussi nécessaire de préserver le précieux souvenir d’un membre de cet équipage malheureux afin de laisser une trace de son histoire, tel qu’elle a été vécue. Cannock, Royaume-Uni « Cher Éric, Le 92nd Bomb Group Memorial Association a reçu un message de madame Lynette Thompson. Son oncle était le sergent Charles Augustus Ollman. Elle a hâte de prendre contact avec vous, car elle est à la recherche d’informations. Elle possède des lettres et des photographies. » 5


M. Robert Hutchings, historien au 92nd BGMA (R.-U.) Rochester dans l’Illinois, quelques jours plus tard… « Cher Éric, Ma famille possède les shillings ! Ma mère avait gardé dans une boite, les pièces de monnaie avec de vieux bijoux. Je suis certaine qu’elle ne savait pas ce qu’ils représentaient ou à qui ils appartenaient. Il y avait une note jointe avec une date et à qui elle appartenait. Il y a aussi la bague de mariage de Dollie, qui était la troisième femme de Gus. Ils étaient les parents de Charles Augustus Ollman surnommé Buddy parce qu’il était un garçon très jovial. C’est une histoire incroyable ! Cependant, il y a trois shillings et non deux. Cette boite se trouve à la maison de ma sœur. Je vais y aller et prendre des photos ce soir pour vous les envoyer. Je ne sais pas grandchose à propos de la mort de Gus, le père de Buddy. Une lettre expliquait qu’il était malade depuis un certain temps. Je sais que c’était son cœur. Il y avait aussi des explications sur la raison de sa mort, due au chagrin pour son fils. Sa mère lui écrivait qu’elle parlait de lui tout le temps, elle citait son prénom à tous ceux avec qui elle conversait, même à son travail. Je suis certaine que Gus a gardé pour lui son stress et son inquiétude. Ma maman me disait toujours que les hommes de sa famille ne communiquaient pas bien, ils gardaient leurs inquiétudes pour eux et ce n’était pas sain. Dollie lui disait “tu es comme moi”, tous les deux aimaient les gens en général. C’est une des raisons pour lesquelles ils 6


étaient si proches. J’enverrais une lettre que je viens de lire de Buddy où il lui explique qu’il a des choses en tête et il a envie de lui en parler, car ces discussions lui font toujours du bien. Il disait que juste le fait de lui écrire lui permettait de se sentir bien. Elle était sa “pierre”, la personne à qui il pouvait parler n’importe quand de n’importe quoi. Il y avait tant d’amour et de respect entre ces deux-là qu’ils étaient chanceux d’être dans la vie de l’un de l’autre et ils le savaient ! Je serais heureuse de vous envoyer les lettres que vous avez demandé. Aujourd’hui, c’est dimanche et la bibliothèque qui numérise les documents est fermée. Je vais y aller demain soir. Aujourd’hui, cependant, je vais vous adresser les petits messages du type V-mail1 via mon téléphone portable. Ceux de Dollie envoyé à Buddy, ces messages ont tous été retournés à sa mère après la mort de son fils sans lui être délivrés. Ce soir, j’ai trouvé son diplôme avec le carnet d’enfance ! Ils étaient rangés dans une autre boite, ils y avaient aussi deux brochures de son lycée, ils étaient glissés dans un jeu de cartes à jouer. Je vous remercie pour l’envoi de la liste de ses “effets personnels”. Il y a des choses qui sont reprises dans cette liste. Cette petite boite était avec les effets de mon oncle Jon et il y a des chances que certains objets se sont mélangés. Je vais vous envoyer une photo ce soir. Jon était dans la marine. 1

Victoire Mail, plus communément appelée V-mail, visait à

réduire l’encombrement et le poids des lettres. En les reproduisant sur microfilm et imprimées sur le lieu de destination, plusieurs lettres pouvaient atteindre le personnel militaire plus rapidement dans le monde entier.

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Je suis presque certaine qu’ils étaient très unis. Cette histoire devient passionnante chaque jour et c’est aussi une aventure enrichissante. Buddy (Charles Augustus Ollman Jr) était mon grand-oncle. Quand ma mère est décédée, j’ai hérité de nombreuses lettres et quelques photos de lui avec d’autres membres de l’équipage. Je voudrais vraiment apprendre autant que possible sur eux. J’ai appris que vous avez fait beaucoup de recherches là-dessus. Peut-être que nous pourrions partager nos informations. Merci beaucoup pour toute votre aide. Madame Lynette Thompson »

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LONDRES

La légende familiale raconte qu’elle ne tenait pas en place : il lui fallait tout voir, tout savoir. Roger Des Roches En 1923, Dollie épousa le veuf Gus Ollman et l’année suivante Buddy venait au monde. La famille habitait au 1019 Fulton avenue à Rockford, une ville de taille moyenne située sur les deux rives de la rivière Rock dans l’extrême nord de l’Illinois. Souvent désigné comme « La Ville des forêts2 », Rockford était le siège du comté de Winnebago County. En 1929, il avait 4 ans quand le pays connut une grave crise économique, « la grande dépression ». Puis dix ans plus tard, l’Europe entra en guerre, mais les États-Unis restèrent neutres. À l’âge de 15 ans, il fréquenta l’établissement flambant neuf de la Rockford West High School. La mascotte du collège est une tête de guerrier indien. Le 21 mai 1941, il avait perdu quelqu’un d’important, sa grand-mère, qui était âgée de 78 2

Lundin, Jon W. "Rockford, And Illustrated History, Windsor

Publications 1989.

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ans. Harriet Tappin venait d’une famille victorienne originaire de Bethnal Green à Londres. Elle avait épousé un Gallois de Bristol qui s’appelait Charles Perrett. Il était négociant en bois et fut engagé par le père d’Harriet. C’est à partir de là que leur histoire commence, ils se sont mariés, ensuite ils eurent les enfants : Leah, Lawrence, Charles, Amy, Sidney, Ivy et Dollie (la mère de Buddy). Le 25 mai 1907, la famille quitta Londres pour se rendre au port de Liverpool, pour s’embarquer à bord du navire le SS Kensington à destination d’Halifax au Canada. Une liste de passagers renseignait qu’ils avaient revêtu leur tenue de salutiste. Le père avait le grade de capitaine à l’armée du salut, son épouse Harriet était lieutenant et les enfants cadets. Une des filles, Leah3, âgé de 14 ans, préféra rester près de son grand-père Georges Tappin à Londres4, plus tard Leah épousera William Henry Manning5.L’entreprise familiale vendait du bois depuis le début du 19e siècle, l’immigration avait pour but de créer de nouveaux marchés dans les dominions6. Georges Tappin était non seulement un brillant homme d’affaires qui s’intéressait de près à la politique, mais 3

Leah Perrett « Dame » Manning a été nommé commandant de

l’ordre de l’Empire britannique en 1966, elle décéda le 15 septembre 1977. 4

A life for education an autobiography: Leah Manning page

12.- London Victor Gollancz LTD 1970. 5

William

Henry

Manning

(1883–1952),

un

astronome

travaillant pour le laboratoire de physique solaire de l’Université de Cambridge. 6

Nom donné aux États indépendants membres du Commonwealth

(Encyclopédie Larousse).

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c’était aussi un excellent conteur d’histoires. Sa préférée était celle d’une descendance royale : la fille du roi.

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