Le dictionnaire du diable

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LE DICTIONNAIRE DU DIABLE Ambrose Bierce













LE DICTIONNAIRE DU DIABLE Ambrose Bierce


ABDICATION

Acte par lequel un souverain atteste qu’il est sensible à la montée de température de son trône.

ABORIGENES

n. Personnes de moindre valeur qui encombrent le sol d’un pays récemment découvert. Elles cessent bientôt de l’encombrer pour le fertiliser.

ABRUPT

Adj. Soudain, sans cérémonie, comme l’arrivée d’un boulet de canon et le départ du soldat dont les intérêts s’en trouvent particulièrement affectés.

ABSENT

adj. Particulièrement exposé à la dent du dénigrement, diffamé, entièrement dans son tort, supplanté dans la considération et l’affection d’autrui.

ABSENT

n. Personne possédant un revenu qui a eu la prévoyance de se retirer de la sphère de l’exaction.

ABSOLU

Adj. Indépendant, irresponsable. Une monarchie absolue est une monarchie dans laquelle le souverain fait ce qui lui plaît aussi longtemps qu’il plaît aux assassins. Il reste peu de monarchies absolues, la plupart ayant été remplacées par des monarchies constitutionnelles, dans lesquelles le pouvoir du souverain de faire le mal (et le bien) est considérablement réduit, et par des républiques que gouverne le hasard.


ABSTINENT

n. Personne faible qui cède à la tentation de se refuser un plaisir. Un abstinent et quelqu’un qui s’abstient de tout sauf de l’abstinence, et notamment de toute intervention dans les affaires d’autrui.

ABSURDITE

n. Déclaration ou conviction manifestement incompatible avec notre propre opinion.

ACCORDEON

n. Instrument en harmonie avec les sentiments d’un assassin.

ACCUSER

Affirmer la culpabilité ou l’indignité d’autrui, le plus souvent pour se justifier de lui avoir fait du tort.

ACCUSER

n. En politique, ingénieuse abstraction conçue pour recevoir les claques et les coups de pied destinés au Premier ministre ou au Président.

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admiration

n. Façon polie que nous avons de reconnaître que quelqu’un nous ressemble.

affliction

n. Processus d’acclimatation qui prépare l’âme à un autre monde plus amer.

allah alliance

n. L’être Suprême des musulmans, à ne pas confondre avec celui des chrétiens, des juifs et ainsi de suite... n. En politique internationale, union de deux voleurs qui ont la main si profondément enfoncée dans la poche l’un de l’autre qu’ils ne peuvent s’en prendre séparément à un troisième.

ambidextre

adj. Qui peut prendre avec autant d’habileté dans une poche droite que dans une poche gauche.

ambition

n. Désir irrépressible d’être diffamé par ses ennemis de son vivant et d’être ridiculisé par ses amis une fois mort.

ame

n. Entité spirituelle à propos de laquelle ont eu lieu de fougueuses controverses. Platon prétendait que les âmes qui avaient aperçu le plus clairement la vie éternelle pénétraient dans les corps des personnes qui devenaient des philosophes.

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AMIRAL

n. Partie d’un navire de guerre qui se charge de discourir tandis que la figure de proue se charge de réfléchir.


amitie

n. Bateau assez grand pour transporter deux personnes par beau temps, mais une seule quand le temps se gâte.

amour

n. Folie temporaire qui peut se guérir par le mariage ou en soustrayant le patient aux influences qui sont à l’origine de son affection. Cette maladie, comme les caries ou nombre d’autres infections, n’est répendue que parmi les races civilisées qui vivent dans des conditions artificielles.

annee

n. Période de trois cent soixante-cinq déceptions.

apothicaire

n. Complice du médecin, bienfaiteur du croque-mort, fournisseur des vers de tombeau.

architecte

n. Celui qui exécute les dessins de votre maison et nourrit des desseins sur votre argent.

argent

n. Bienfait qui ne nous est d’aucun avantage, sauf quand nous nous en séparons. Preuve de culture et passeport pour la bonne société. En posséder est supportable.

arSENiC

n. Sorte de cosmétique qu’affactionnent considérablement les dames, et qui les afflige considérablement à son tour.

ARRETER

v. tr. Détenir officiellement un individu accusé de comportement insolite.

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BACCHUS

n. Divinité commode inventée par les anciens pour avoir un prétexte de s’enivrer.

BAIN

n. Sorte de cérémonie mystique remplaçant un culte religieux et dont l’efficacité spirituelle reste à prouver.

BAISER

n. Mot inventé par les poètes pour rimer avec «pâmer». Au sens large, il est censé correspondre à une sorte de rite ou cérémonie témoignant d’une bonne entente, mais la manière dont il se pratique demeure inconnue du lexicographe.

BAPTEME

BARBE BAROMETRE BATAILLE BELLADONNA

n. Rite sacré d’une telle efficacité que celui qui se retrouve au ciel sans l’avoir reçu sera malheureux à tout jamais. Administré avec de l’eau de deux manières - par immersion, ou plongeon, ou par aspersion. n. Poils que coupent souvent ceux qui exècrent, à juste titre, l’absurde coutume chinoise consistant à se raser la tête. n. Instrument ingénieux qui nous indique le temps qu’il fait. n. Méthode pour dénouer avec les dents un noeud politique qui résisterait à la langue. n. En italien, une belle femme. En anglais, un poison mortel. Un exemple frappant de l’identité essentielle des deux langues.

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Berenice bienfaiteur

bigamie

n. Constellation (Coma Berenices) désignée ainsi en l’honneur de celle qui sacrifia sa chevelure pour sauver son mari. n. Individu qui fait de gros achats d’ingratitude, sans pour autant en affecter matériellement le prix, qui reste à la portée de chacun. n. Faute de goût pour laquelle la sagesse future infligera un châtiment appelé trigamie.

bigot

n. Personne attachée avec obstination et zèle à une opinion que vous ne partagez pas.

ble

n. Cérérale dont on arrive non sans peine à fabriquer un assez bon whisky, et qui sert également à faire le pain. On dit des Français qu’ils mangent plus de pain per capita qu’aucun autre peuple, ce qui paraît naturel, car eux seuls savent rendre la chose savoureuse.

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bobard

bonheur bouche

n. Mensonge qui n’a pas encore fait ses dents. Ce qui se rapproche le plus de la vérité chez un menteur invétéré : le périgée de son orbite excentrique. n. Sensation agréable qu’éveille la contemplation des misères d’autrui. n. Chez l’homme, la porte de l’âme. Chez la femme, l’issue du coeur.


botanique

n. Science des végétaux - aussi bien ceux qui ne sont pas comestibles que ceux qui le sont. Traite largement des fleurs, qui sont en général mal dessinées, avec des couleurs de mauvais goût, et ne sentent rien.

bouffon

n. Autrefois, fonctionnaire attaché à la maison du roi, dont le travail consistait à amuser la cour par des actes et des propos saugenus, et dont le caractère absurde était attesté par son costume bariolé.

brahma

n. Celui qui créa les Hindous, qui sont protégés par Vishnou et détruits par Shiva - une division du travail beaucoup mieux répartie que parmi les divinités de certaines autres nations.

brandy

n. Cordial composé d’un volume de tonnerre-et-éclair, d’un volume de remords, de deux volumes de meurtre sanglant, d’un volume de mort-enfer-et-tombeau et de quatre volumes de Satan clarifié. Dose : toujours une pleine tête. D’après le Dr. Johnson, le brandy est la boisson des héros. Seul un héros s’aventurera à en boire.

bruit

n. Odeur nauséabonde à l’oreille. Musique non domestiquée. Principal produit et signe authentique de la civilisation.

brute

n. Voir Mari.

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CALAMITE

cannibale

n. Rappel le plus souvent clair et implacable que les évènements de ce monde ne sont pas de notre ressort. Les calamités sont de deux sortes : le malheur qui nous arrive et le bonheur qui arrive à autrui. n. Gastronome de l’ancienne école qui conserve des goûts simples et s’en tient à l’alimentation naturelle de l’époque pré-porcine.

canon

n. Instrument utilisé dans la rectification des frontières nationales.

caporal

n. Homme qui occupe le barreau le plus bas de l’échelle militaire.

carnivore

adj. Qui s’adonne à la cruauté en dévorant le végétatien craintif, ses héritiers et ses ayants droits.

carquois

n. Étui portatif dans lequel l’homme d’État d’autrefois et l’homme de loi aborigène transportaient leurs arguments les plus légers.

CASERNE

n. Bâtiment dans lequel les soldats profitent d’une partie des choses dont ils ont la tâche de priver les autres.

CERBeRE

n. Chien de garde des Enfers, qui avait pour charge de garder l’entrée - contre qui ou quoi, ce n’est pas très clair ; tout le monde, tôt ou tard, devait y aller.


CERVEAU

CHAIR CHANVRE

CHAT

n. Appareil avec lequel nous pensons que nous pensons. Ce qui distingue l’homme qui se contente d’être quelque chose de celui qui souhaite faire quelque chose. Un homme fortuné, ou qui a été propulsé à un poste important, a souvent un cerveau si plein que son entourage ne peut garder son chapeau sur la tête. n. Deuxième personne de la trinité personnelle. n. Plante avec les fibres de laquelle est fabriqué un article pour le tour de cou qui est souvent mis en place après une déclaration publique en plein air et évite à celui qui le porte de s’enrhumer. n. Automate moelleux et indestructible fourni par la nature pour recevoir des coups de pied quand les choses vont mal dans le cercle de la famille.

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CHOU

n. Légume du potager, à peu près aussi large et aussi sage qu’une tête d’homme.

CIEL

n. Lieu où les méchants cessent de vous importuner en parlant de leurs affaires personnelles, et où les bons vous écoutent avec attention pendant que vous exposez les vôtres.


COCHON

COMESITBLE

n. Animal (Porcus omnivorus) très proche de l’espèce humaine par la splendeur et la vivacité de sont appétit, lequel est néanmoins plus limité, puisqu’il recule devant le cochon. n. Bon à manger, et à même d’être digéré, comme un ver par un crapaud, un crapaud par un serpent, un serpent par un cochon, un cochon par un homme, un homme par un ver.

COMmerCe

n. Sorte de transaction au cours de laquelle A déleste B des marchandises de C et que B compense en prenant dans la poche de D l’argent qui appartient à E.

COMPLICE

n. Individu qui s’associe à un autre dans un crime en pleine connaissance de cause, tel un avocat qui défent un criminel en le sachant coupable. Ce point de vue sur la positon des avocats n’a pas encore reçu l’assentiment de ces derniers, personne ne leur ayant offert d’honoraires pour qu’ils le donnent.

COMPROMIS

n. Ajustement d’intérêts conflictuels donnant a chaque adversaire la satisfaction de penser qu’il a obtenu ce qu’il n’aurait pas dû obtenir et qu’il n’est privé de rien sinon de ce qui lui était justement dû.

CONFIDENT

n. Celui ou celle à qui A confie les secrets de B, lequel a fait des confidences à C.

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CONSEIL CONSERVATEUR

CONSOLATION CONSUL

CONSULTER CONTROVERSE 26

CONVERSATION

CORBILLARD CORSAIRE COUARD

n. La plus petite des pièces de monnaie. n. Politicien qui affectionne les maux existants, qu’il ne faut pas confondre avec le Libéral qui souhaite les remplacer par d’autres. n. Lorsque l’on constate qu’un homme meilleur est plus infortuné que soi. n. En politique américaine, fonctionnaire qui a failli dans l’exercice de sa charge et à qui l’Administration en attribue une autre à condition qu’il quitte le pays. v. Rechercher l’approbation d’autrui pour un projet déjà bien arrêté. n. Bataille dans laquelle la salive ou l’encre remplacent le boulet de canon préjudiciable et la baïonnette inconsidérée. n. Foire où chacun propose ses petits articles mentaux, chaque exposant étant trop préoccupé par l’arrangement de ses propres marchandises pour s’intéresser à celles de ses voisins. n. Landeau de la mort. n. Politicien des mers. adj. Celui qui, dans une situation périlleuse, pense à ses jambes.


COURONNEMENT

n. Cérémonie au cours de laquelle on investit un souverain des signes extérieurs et visibles de son droit divin à sauter sur une bombe.

COUVENT

n. Lieu où se retirent les femmes qui souhaitent méditer tout à loisir sur le vice de l’oisiveté.

CURIOSITE

n. Vilain défaut de l’esprit féminin. L’envie de savoir si oui ou non une femme se consume de curiosité est l’une des passions les plus actives et les plus insatiables de l’âme masculine.

CYNIQUE

n. Canaille dont la vision défectueuse voit les choses telles qu’elles sont, et non telles qu’elles devraient être. D’où là coutume chère aux Scythes d’arracher les yeux d’un cynique pour améliorer sa vision.

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DEBAUCHE

n. Celui qui a poursuivi le plaisir avec tant d’ardeur qu’il a eu le malheur de le dépasser.

DECIDER

Succuomber à la prédominance d’un groupe d’influences sur un autre groupe.

DEGRADATION

n. Sentiment d’un homme prudent envers un ennemi trop redoutable pour qu’on s’oppose à lui impunément.

DEDAIN

n. L’une des étapes du progrès moral et social losqu’on passe d’une situation privée à une promotion politique.

DELUGE

n. Première expérience remarquable de baptême qui lava tous les péchés (et les pécheurs) du monde entier.


DEMISSIONER

v. intr. Renoncer à un honneur pour un avantage. Renoncer à un avantage pour un avantage plus grand.

DENTISTE

n. Préstidigitateur qui, en vous mettant du métal dans la bouche, extrait des pièces de monnaie de votre poche.

DESABUSER

v.tr. Présenter à son voisin une erreur bien meilleure que celle qu’il a jugé avantageux d’embrasser.

DESTINEE DETRESSE DETTE DEUX FOIS DEVOIR DIAGNOSTIC DIAPHRAGME

n. Autorité du tyran sur ses crimes et excuse de l’imbécile. n. Maladie contractée par l’exposition à la prospérité d’un ami. n. Substitut ingénieux de la chaîne et du fouet du négrier. adv. Une fois de trop. v. tr. Ce qui nous pousse inexorablement dans la direction du profit, tout en suivant la ligne du désir. n. Pronostic d’une maladie établi par un médecin en fonction du pouls et du portemonnaie du patient. n. Cloison musculaire séparant les désordres de la poitrine de ceux des entrailles.

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DICTATEUR DICTIONNAIRE

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n. Chef d’une nation qui préfère la peste du despotisme au choléra de l’anarchie. n. Dispositif littéraire malveillant destiné à entraver l’évolution d’une langue et à la priver de souplesse. Le présent dictionnaire n’en est pas moins un ouvrage de la plus grande utilité.

DIFFAMER

v. tr. Mentir au sujet d’autrui. Dire la vérité au sujet d’autrui.

DIGEsTION

n. Transformation de victuailles en vertus. S’il est défectueux, le processus évolue au contraire en vices. Une circonstance dont le malicieux Dr Jeremiah Blenn a déduit que les dames souffraient plus fréquemment de dyspepsie que les hommes.

DINDE DISSIMULER

n. Gros oiseau dont la chair, quant on la mange à l’occasion de certains anniversaires religieux, a la propriété singulière d’attester la piété et la gratitude. v. tr. Enfiler une chemise propre sur le caractère.

DISTANCE

n. La seule chose que les riches veulent bien laisser les pauvres considérer comme leur, pourvu qu’ils la gardent.

DRAPEAU

n. Chiffon coloré brandi devant les troupes et hissé sur les forts et les navires.


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ECONOMIE ECREVISSE ECRIVAILLEUR

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n. Achat du tonneau de whisky dont vous n’avez pas besoin pour le prix de la vache dont vous n’avez pas les moyens. n. Petit crustacé qui ressemble beaucoup au homard, mais beaucoup moins indigeste. n. Ecrivain professionnel dont les vues sont opposées aux nôtres

ECRITURES

n. Livres sacrés de notre sainte religion, à ne pas confondre avec les écrits profanes et mensongers sur lesquels sont basées toutes les autres croyances.

EDUCATION

n. Ce qui révèle aux sages et dissimule aux sots leur manque de compréhension.

EFFET

n. Le second de deux phénomènes qui se produisent toujours ensemble dans le même ordre. Le premier, qu’on appelle cause, est censé engendrer l’autre.

EGOTISTE

n. Personne au goût médiocre, plus intéressée par elle-même que par moi.

ELECTEUR

n. Celui qui jouit du privilège sacré de voter pour l’homme qu’a choisi un autre homme.

ELECTRICITE

n. Force qui déclenche tous les phénomènes naturels auxquels on est dans l’incapacité d’attribuer une autre case.


ELEGIE

EMANCIPATION EMEUTE EMOTION

n. Composition en vers dans laquelle, sans recouvrir à aucune des méthodes de l’humour, l’auteur vise à produire dans l’esprit du lecteur le plus affligeant découragement. n. Transformation par laquelle un esclave passe de la tyrannie d’autrui à son propre despotisme. n. Divertissement populaire offert à l’armée par des spectateurs innocents. n. Maladie terrassante provoquée par une emprise du coeur sur la tête.

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ENFANCE

ENVELOPPE

n. Période de la vie humaine intermédiaire entre l’idiotie de la petite enfance et la folie de la jeunesse- à deux doigts du péché de l’âge mûr et à trois du remords de la vieillesse. n. Cercueil d’un document ; fourreau d’une facture ; cosse d’un versement ; chemise de nuit d’une de lettre d’amour.

ENVIE

n. Emulation adaptée à la capacité la plus médiocre.

EPAULETTE

n. Insigne servant à distinguer un officier militaire de son ennemi - c’est-à-dire de l’officier de grade inférieur auquel sa mort apporterait une promotion.

EPICURIEN 34

EPIGRAMME

EPITAPHE ERMITE

n. Adversaire d’Epicure, sobre philosophe qui, estimant que le plaisir devait être le but essentiel de l’homme, ne perdit pas son temps à satisfaire ses sens. n. Petite pièce mordante en prose ou en vers ,qui se caractérise souvent par son ton acide ou acerbe, et quelquefois par sa sagesse. n. Inscription sur une tombe, démontrant que les vertus acquises grâce à la mort ont un effet rétroactif. n. Personne dont les vices et les folies n’ont rien de sociable.


ESPRIT

n. Le sel avec lequel l’humoriste américain gâte sa cuisine intellectuelle en s’abstenant d’en mettre.

ETHNOLOGIE

n. Science qui traite des diverses tribus d’Hommes, tels que bandits, voleurs, escrocs, cancres, fous, crétins et ethnologues.

EVANGELISTE

n. Porteur de bonnes nouvelles, notamment (dans son sens religieux) de celles qui nous assurent de notre propre salut et de la damnation de nos voisins.

EXCENTRICITE

n. Manière de se faire remarquer d’une telle facilité que les imbéciles y ont recours pour faire ressortir leur incapacité.

EXCEPTION EXCES EXCUSER

n. Ce qui prend la liberté de se distinger du reste de sa catégorie, comme un honnête homme, une femme fidèle, etc. n. En morale, un plaisir que renforce, par des sanctions appropriées, la loi de la modération. v. pron. Poser les fondations d’une future offence.

EXPERIENCE

n. Sagesse qui nous permet de reconnaître comme une fâcheuse vieille connaissance la folie que nous avons déjà commise.

EXTINCTION

n. Matière brute à partir de laquelle la théologie a inventé l’état futur.

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FANTOME FELICITATIONS FELON FIDELITE

n. Signe extérieur visible d’une crainte intérieure. n. Politesse de la jalousie. n. Personne plus entreprenante que discrète qui, en s’engagent pour une cause, en a conçu un regrettable attachement. n. Du sexe opposé. n. Vertu particulière de ceux qui sont sur le point d’être trompés.

FINANCE FOI 36

FOLIE

FOURCHETTE

n. L’art de la science de gérer des revenus et des ressources pour le plus grand profit du gérant. n. Croyance sans preuve en ce que raconte quelqu’un qui parle sans savoir de choses sans équivalent. n. Ce «don et faculté divine» dont l’énergie créatrice et décisive inspire l’esprit de l’Homme, guide ses actions et enjolive son existence. n. Instrument utilisé essentiellement pour porter des animaux morts à la bouche. Auparavant, le couteau était employé à cet usage, et nombre de personnes respectables continuent de lui reconnaître de multiples avantages sur l’autre ustensile, qu’elles ne rejettent cependant pas, mais


dont elles se servent pour s’aider à charger le couteau. L’immunité dont bénéficient ces personnes face à une mort atroce et immédiate est l’une des preuves les plus éclatantes de la pitié de Dieu pour ceux qui Le haïssent.

FRONTIERE

n. En géographie politique, ligne imaginaire entre deux nations qui sépare les droits imaginaires de l’autre.

FUNERAILLES

n. Cortèges grâce auquel nous manifestons notre respect pour le mort en enrichissant l’entrepreneur de pompes funèbres et renforçons notre chagrin par une dépense qui accentue nos soupirs et dedouble nos larmes.

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GARGOUILLE

n. Gouttière en saillie sur l’avant-toit des édifices médiévaux, généralement sculptée en une caricature grotesque d’un ennemi personnel de l’architecte ou du propriétaire.

GENEALOGIE

n. Étude de la filiation de quelqu’un à partir d’un ancêtre qui ne s’est pas particulièrement soucié d’établir la sienne.

GENEREUX

adj. À l’origine, ce mot signifiait noble de naissance et s’appliquait à juste titre à d’innombrables personnes. Aujourd’hui, il signifie de nature noble et prend un peu de repos.

GENEROSITE

n. Libéralité de celui qui possède beaucoup en permettant à celui qui n’a rien de prendre tout ce qu’il peut.

GEOGRAPHE

n. Individu qui peut vous expliquer au pied levé la différence entre l’extérieur et l’intérieur du globe.

GEOLOGIE

GIBET

n. Science de la croûte terrestre - à laquelle s’ajoutera sans doute celle de son intérieur chaque fois qu’un bavard remontera d’un puits. n. Scène où se jouent des pièces miraculeuses, dans lesquelles l’acteur principal est transporté au ciel. Dans ce pays, le gibet est surtout remarquable par le nombre de personnes qui en réchappent.


GLOUTON

n. Personne qui échappe aux maux de la modération en s’adonnant à la dyspepsie.

GNOU

n. Animal d’Afrique du Sud qui, à l’état domestique, ressemble à un cheval, à un buffle et à un cerf. A l’état sauvage, il évoque une sorte d’éclair, de tremblement de terre et de cyclone.

GOUTTE

n. Nom donné par le médecin au rhumatisme d’un riche patient.

GRAMMAIRE

n. Système de pièges soigneusement préparé pour faire trébucher l’autodidacte, le long du chemin sur lequel il avance vers la distinction.

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HABEAS CORPUS HABILTE HABITUDE HACHIS HAINE HARANGUE HIER 40

HISTOIRE

HISTORIEN HOMEOPATHE

n. Assignation grâce à laquelle un homme peut être sorti de prison quand il est détenu pour un crime qui n’est pas le sien. n. Ce qui tient lieu de cervelle à un imbécile. n. Entrave à la liberté. n. Il n’existe pas de définition pour ce mot – personne ne sait ce qu’est le hachis. n. Sentiment approprié face à la supériorité d’autrui. n. Discours d’un opposant, que l’on qualifie de harangue-outang. n. Enfance de la jeunesse, jeunesse de la maturité, passé enfui de la vieillesse. n. Compte rendu généralement faux d’évenements généralement sans importance, rapportés par des dirigeants qui sont en général des coquins et des soldats qui sont en général des abrutis. n. Commère de grande envergure. n. Ecole de médecine à mi-chemin entre l’allopathie et la science chértienne. Pour cette dernière, les deux autres sont nettement inférieurs car la science chrétienne guérit des maladies imaginaires.


HOMICIDE

n. Élimination d’un être humain par un autre. Il existe quatre sortes d’homicides : félons, excusables, justifiables et louables, mais, pour la personne éliminée, cela ne fait pas de grande différence qu’elle l’ait été d’une manière ou d’une autre - la classification profite surtout aux juristes.

HOSPITALITE

n. Vertu qui nous incite à nourrir et loger certaines personnes qui n’ont besoin ni de nourriture ni de logement.

HOSTILITE

n. Sens particulièrement aiguisé et spécialement appliqué à la surpopulation de la terre. L’hospitalité peut être active ou passive ; comme (respectivement) le sentiment d’une femme pour ses propres amies et ce qu’elle épvrouve pour toutes les autres personnes de son sexe.

HUMANITE

n. L’espèce humaine dans son ensemble, à l’exception des poètes anthropoïdes.

HYENE

HYPOCONDRIE HYPOCRITE

n. Bête sauvage révérée par certaines nations orientales parce qu’elle à l’habitude de fréquenter de nuit les lieux où sont enterrés les morts. Mais les étudiants en médecine en font autant. n. Dépression de ses propres esprits. n. Celui qui, proffessant des vertus qu’ils ne repsecte pas, s’assure l’avantage d’avoir l’air d’être ce qu’il méprise.

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Idiot

n. Membre de nombreuses et puissantes tribus dont l’influence sur les affaires humaines a toujours été prépondérante. L’activité de l’idiot ne se limite pas à un domaine donné de la pensée ou de l’action, mais en «impègne l’ensemble».

ignare

n. Certaine personne qui ne possède pas certaines connaissances qui vous sont familières et qui en possèdent certaines autres dont vous ne savez rien.

illustion

illustre imbecilite immodeste impartial

n. Mère d’une famille fort respectable comprenant l’Enthousiasme, l’Affection, l’Esprit de Sacrifice, la Foi, l’Espérence, la Charité et de nombreux autres fils et filles honorables. adj. Bien placé pour recevoir des flèches de la méchanceté, de l’envie et du dénigrement. n. Sorte d’inspiration divine, ou de feu, affectant les détracteurs du présent dictionnaire. adj. Qui a un sens très développé de son propre mérite, doublé d’une piètre opinion de la valeur d’autrui. adj. Incapable de percevoir un avantage personnel en prenant parti dans une controverse ou en adoptant l’une ou l’autre de deux opinions contradictoires.


imposition

incompatibilite

indifferent

n. Action de bénir ou de consacrer par l’imposition des mains - une cérémonie commune à de nombreux systèmes écclésiastiques, mais pratiquée avec la plus franche sincérité par la secte connue sous le nom de Voleurs. n. Dans le domaine matrimonial, similarité de goûts, notamment celui de la domination. L’incompatibilité peut cependant prendre la forme d’une matrone aux yeux doux qui habite au coin de la rue. On a même connu des incompatibilités qui portaient de la moustache. adj. Imparfaitement sensible aux distinctions entres les choses.

influence

n. En politique, un quo chimérique donné en échange d’un quid substantiel.

injustice

n. Fardeau qui, de tous ceux que nous imposons à d’autres et portons nousmêmes, est le plus léger dans les mains et le plus lourd sur le dos.

insurrection

n. Révolution qui échoue. Echec du mécontentement à remplacer un mauvais gouvernement par le désordre.

interprete

n. Celui qui permet à deux personnes, de langues différentes, de se comprendre en répétant à chacune d’elles ce qu’il aurait été de l’avantage de l’interprète.

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Jaloux 44

jarretiere je

adj. Indûment soucieux de conserver ce qui ne peut être perdu que si cela ne vaut pas la peine d’être gardé. n. Bande élastique destinée à empêcher qu’une femme sorte de ses bas et désoler le pays. pron. Premier mot du langage, première pensée de l’esprit. En grammaire, c’est le pronom de la première personne du singulier. On prétend que nous en est le pluriel, mais qu’il puisse exister plus d’un moi-même paraît sans doute plus clair aux grammairiens qu’à l’auteur de cet incomparable dictionnaire. Concevoir deux moi-même est difficile quoique


merveilleux. L’usage franc et néanmoins gracieux du «je» distingue un bon écrivain d’un mauvais ; ce dernier le porte à la manière d’un voleur qui tente de dissimuler son butin.

JEUNESSE

n. L’Âge du possible. Quand Archimède trouvait un point d’appui, Cassandre avait un avenir et que sept cités se partageaient l’honeur d’avoir Homère à charge.

joug

n. Ustensile, Madame, dont le nom latin, jugum, a donné l’un des mots les plus éclairants de notre langue - un mot qui définit la situation matrimoniale avec une justesse et une précision poignantes. Mille excuses de ne pas en avoir voulu.

jour

n. Période de vingt-quatres heures, la plupart du temps mal employée. Elle se divise en deux parties, le jour proprement dit et la nuit, ou jour impropre la première consacrée aux péchés des affaires, la seconde à ceux d’une autre sorte.

JOURNAL

n. Rapport quotidien de cette part de son existence que l’on peut se raconter à soimême sans rougir.

justice

n. Denrée que, dans un état plus ou moins avarié, l’État vend au citoyen en récompense de son allégence, de ses impôts et de ses services personnels.

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