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Giovanni Ambrosio
Pictures editing : Roberto Di Mola
Palestine Ch. 2
ةيوضعلا ةدبابزلا ةعرزمAl Zababdeh Organic Model Farm + Canaan fair trade
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Chercher des remèdes L’agriculture bio en Palestine
Rencontre à Jénine, dans le centre de recherche CORE (Canaan Center for Organic Research & Extension) avec Layth Sbaihat. Ce chercheur de trente-trois ans qui s’est spécialisé dans l’agriculture biologique dans les territoires occupés. PAR SÉBASTIEN LOUIS
Le Jeudi: «Un de vos projets les plus importants concerne la production d’amandes.» L. S.: «Les fermiers sont grandement sollicités pour les amandes, mais ils ne peuvent pas les produire de manière organique en quantité importante. Notre rôle a été de chercher des remèdes à la guêpe des amandes qui détruit de 70 à 90% de la production. Avec des pesticides, ce taux peut être réduit à 40%. Mais cela reste encore très élevé. Nous avons donc trouvé une solution biologique, pour éliminer l’infection, après avoir fait des essais avec les agriculteurs, pour une perte de la production de 1 à 2% et ce pour un coût moins élevé que celui des pesticides. La récolte suivante, nous avons travaillé à une plus grande échelle avec soixante-quatre fermiers avec une infection de 1 à 3%. Grâce à notre intervention, les agriculteurs ont divisé leur coût et augmenté leur productivité. De plus, le prix des amandes a augmenté, car ils ont reçu la certification biologique.» Le Jeudi: «Pourquoi ce fruit est-il particulièrement difficile à cultiver en Palestine?»
Le Jeudi: «Le tissu associatif en Palestine est très dense, cependant Canaan est une compagnie commerciale et pas une ONG. Comment fonctionnent cette entreprise et votre centre de recherche?» Layth Sbaihat: «Nous sommes issus de la Palestine Fair Trade Association, une coopérative de fermiers qui désiraient vendre leurs produits à des prix équitables. Ils avaient besoin d’une compagnie, donc «Canaan Palestine» a été établi en 2004 pour fournir des labels et vendre la marque. Il y a aussi la fondation «Pays de Canaan», un groupe qui sert de lobby pour défendre les intérêts des agriculteurs palestiniens aux Etats-Unis. Ces trois organisations nécessitaient un centre de recherche, pour répondre aux standards de qualité qui sont très élevés. En tant que centre de recherche, nous sommes entre les fermiers et les produits, nous devons augmenter la quantité et la qualité des produits. S’il y a une demande pour une certaine denrée et si les fermiers palestiniens ne peuvent pas la réaliser d’une manière biologique, nous devons les y aider. »
L. S.: «La Palestine est un pays au climat semi-aride, nous avons des problèmes d’eau à cause des pluies limitées et de l’occupation. Pour les amandes, nous ne les irriguons pas, cela dépend uniquement de la pluie. En Californie, ils les irriguent et ils enchaînent les sécheresses depuis plusieurs années, donc ils disposent de moins d’eau. Nombre de fermiers américains ne peuvent plus produire, ils veulent convertir leurs champs d’amandes. Récemment, nous avons été invités par des centres de recherche et une université en Californie, pour partager notre expérience. » Le Jeudi: «L’occupation de la Palestine estelle un obstacle au développement agricole?» L. S.: «Une grande partie de l’économie palestinienne dépend de l’agriculture. Israël la rend très difficile à cause du mur et des check-points qui limitent l’accès des Palestiniens à leurs terres. Ensuite, des sangliers arrivent des colonies et détruisent les récoltes. Les ravages qu’ils causent affectent la biodiversité. Enfin, l’eau est le troisième problème, car Israël contrôle l’accès aux ressources aquatiques. Les
Palestiniens ne disposent pas d’assez d’eau pour irriguer leurs terres car ils ne sont pas autorisés à creuser de puits en Cisjordanie. Nous pouvons utiliser uniquement ceux qui datent d’avant l’occupation de 1967 et qui disposent d’une ancienne autorisation. Certains fermiers creusent tout de même des puits illégaux, mais c’est un grand risque, car cela coûte cher et ils peuvent être détruits. Les Israéliens donnent des autorisations aux municipalitéspour l’eau de consommation courante, mais il n’y en a pas assez pour satisfaire les besoins de la population. Nombre d’agriculteurs palestiniens doivent acheter de l’eau en citerne.»
ment. Certains pensent que l’agriculture biologique est destinée aux classes dominantes, mais je pense que nous devons investir davantage dans l’agriculture biologique pour l’améliorer, ainsi elle coûtera moins cher à long terme.» Le Jeudi: «Est-il facile de convaincre les fermiers et les consommateurs palestiniens d’adopter ces techniques organiques?»
L. S.: «Le fleuve est quasiment sec, car les Israéliens pompent de l’eau en amont avant qu’ils ne pénètrent en Cisjordanie. La vallée du Jourdain est une zone très fertile, et la première de la Palestine, mais elle est contrôlée à 85% par les Israéliens. Ils occupent des terres palestiniennes et leurs produits sont exportés en Europe voire dans le monde arabe et même si ce sont des colonies, ces biens sont référencés comme production israélienne, voire palestinienne. L’argent revient aux colons et des fermiers palestiniens, qui possédaient des terres à cet endroit, travaillent désormais pour les colons.»
L. S.: «Ce n’est pas facile et cela dépend des secteurs. Les producteurs d’olives sont faciles à convaincre, car quasiment personne n’utilise de pesticides dans ce domaine. Nous avons des milliers de champs d’oliviers convertis à la production biologique. Par contre, lorsqu’il s’agit de plantes plus difficiles, comme les légumes ou les amandes, c’est dur. C’est pourquoi nous faisons des démonstrations. Suite à nos résultats scientifiques, nous leur montrerons d’un point de vue pratique que c’est possible. La plupart des Palestiniens préfèrent les produits peu chers, plutôt que ceux qui sont bons pour la santé. Une très petite catégorie de consommateurs, issus des classes supérieures, achète des produits biologiques. Et nous contrôlons très mal nos exportations car tout passe par Israël, qui peut faire traîner en longueur les procédures. Nous ne pouvons donc exporter que des produits comme de l’huile d’olive, des amandes, des tomates séchées.»
Le Jeudi: «Pourquoi vous concentrer sur l’agriculture biologique?»
Le Jeudi: «Avez-vous des contacts en Israël dans le cadre de vos recherches?»
L. S.: «L’agriculture biologique palestinienne était à l’origine une production naturelle, sans pesticides. Désormais tout change, avec la modernisation de l’agriculture et la révolution verte, qui d’ailleurs n’est pas verte, nous dépendons de l’extérieur, car nous devons importer les semences, les pesticides. Cela coute très cher et demande beaucoup d’eau. En revenant à des principes biologiques, nous pouvons garantir l’indépendance des agriculteurs. C’est important dans le cas de la Palestine, car le marché est contrôlé par Israël. Le prix est donc plus cher, comme la disponibilité des pesticides. Nous apprenons au fermier à faire du compost, des insecticides sans coût et sans conséquence pour l’environne-
L. S.: «Non, pas avec des centres de recherches israéliens et cela pour des raisons politiques, car nous les boycottons. Nous ne voulons pas collaborer, car l’occupation dure depuis 49 ans! Nous ne voulons pas être exploités par des centres de recherche israéliens, qui disposent d’excellentes infrastructures. Mais, nous avons des contacts individuels avec des chercheurs israéliens qui supportent les droits des Palestiniens. Par exemple, un scientifique nous aide à développer les gènes des céréales. Un autre travaille avec nous sur les graines indigènes, des variétés palestiniennes qui ont disparu.»
Le Jeudi: «L’eau du Jourdain peut-elle être une solution alternative? Qu’en est-il de la production agricole de la vallée du Jourdain?»