Le #BouclierCanadien débute aux frontières Le gouvernement fédéral doit agir immédiatement pour protéger les Canadiens contre l’importation de variants inquiétants du virus de la COVID-19 Des variants hautement contagieux du SRAS-CoV-2, virus qui cause la COVID-19, circulent internationalement et sont qualifiés de « variants inquiétants ». On en a identifié plusieurs, notamment le B117 (identifié au Royaume-Uni) ainsi que le 501Y.V2 et le P.1 (identifiés respectivement en Afrique du Sud et au Brésil); la méthode pour leur attribuer des noms reste à établir. Il existe possiblement d’autres variants et il pourrait en apparaître de nouveaux. Les variants inquiétants constituent un danger clair et actuel pour la sécurité sanitaire et le bien-être économique du Canada. Par exemple, les données épidémiologiques actuelles indiquent que le variant B117 serait de 30 à 60 % plus transmissible que les souches actuellement en circulation, et est rapidement devenu la souche dominante au Royaume-Uni et en Irlande – provoquant une augmentation massive du nombre de cas de COVID-19, submergeant les hôpitaux et obligeant les deux pays à décréter de nouveaux confinements difficiles. Selon les modèles des Centers for Disease Control étatsuniens (CDC), le B117 pourrait devenir le variant dominant aux États-Unis dès le mois de mars.i Le Tableau scientifique de l’Ontario indique que le B117 « pourrait entraîner de fortes augmentations du nombre de cas, de l’occupation des unités de soins intensifs et de la mortalité si une transmission communautaire se produit » [trad.].ii Si le B117 ou un autre variant inquiétant fortement transmissible devient dominant au Canada, il pourrait entraîner des centaines de milliers de cas supplémentaires de COVID et des milliers de décès additionnels. Des mesures de confinement très strictes et de longue durée (au-delà de ce que connaissent déjà les Canadiens) pourraient être nécessaires pour le contrôler, causant des dizaines de milliards de dollars de dommages économiques supplémentaires. Même si le déploiement de vaccins renforcera éventuellement nos défenses contre les souches du SRAS-CoV-2 qui circulent actuellement et vraisemblablement contre les variants inquiétants, le taux de transmission accélérée du B117 combiné aux retards dans l’acquisition et la distribution du vaccin soulève d’importantes inquiétudes quant à la viabilité des contrôles actuels de la pandémie, au Canada, qui sont déjà précarisés. Les protocoles actuels relatifs aux voyages et aux frontières n’ont pas empêché l’importation de ces nouveaux variants au Canada. Des cas de variants B117 et 501Y.V2 sont à présent confirmés dans plusieurs provinces. Il est très préoccupant que, dans quelques cas, leur cheminement jusqu’au Canada reste inconnu. Peu de temps est à notre disposition pour éviter le scénario qui se déroule actuellement au Royaume-Uni. Sans une action supplémentaire immédiate de la part du gouvernement fédéral, le Canada sera confronté à un risque très important d’escalade d’une nouvelle vague de COVID
catalysée par des variants. Tout retard à réduire considérablement le risque d’importation pourrait être dévastateur. Plusieurs législatures dont le contrôle frontalier est plus rigoureux qu’au Canada ont réussi à limiter l’importation de variants inquiétants – notamment Taïwan, l’Australie, la NouvelleZélande et la Corée du Sud. Ces pays y sont arrivés grâce à des restrictions strictes des voyages, ajoutées aux mesures intérieures (notamment des exigences strictes de quarantaine) adoptées plus tôt et appliquées plus rigoureusement que les politiques canadiennes actuelles. En nous basant sur ces succès manifestes et en nous adaptant aux réalités canadiennes (considérant par exemple notre frontière terrestre avec les États-Unis), nous recommandons au gouvernement fédéral d’adopter les dix mesures immédiates suivantes : I. Réduire les possibilités d’entrée de variants, en limitant les déplacements internationaux à des voyages essentiels uniquement : 1. Réduire le nombre de personnes entrant au Canada et en sortant, par les airs et la terre – en définissant plus clairement et plus strictement ce qui est essentiel et en assurant l’application de ces critères. 2. En tant qu’aspect crucial de l’élimination des voyages non essentiels, annuler immédiatement tous les vols à destination et en provenance de destinations non essentielles (par exemple, les destinations de vacances saisonnières), sauf pour permettre le retour de Canadiens s’y trouvant déjà. II. Accroître le dépistage et la recherche des variants chez les voyageurs pour faire en sorte que tous les cas de variants inquiétants qui arrivent au Canada soient détectés et séquencés. En plus des tests préalables à l’embarquement : 3. Effectuer un dépistage validé de la COVID au point d’entrée pour tous les arrivants (air et terre). Personne ne peut être exempté du dépistage, pas même les travailleurs essentiels ou le personnel navigant. 4. Exiger deux tests supplémentaires pendant la quarantaine : un premier après quelques jours de quarantaine (p. ex., jour 4/5) et le second peu avant la fin de la quarantaine (p. ex., jour 10/11). 5. Veiller à ce que tous les tests positifs chez des voyageurs soient dépistés pour repérer les variants inquiétants. Les données de séquençage et les informations adéquates sur le contexte devraient être partagées ouvertement pour permettre la surveillance et le suivi des variants inquiétants aux paliers national et international. III. Renforcer la rigueur de la quarantaine et de l’isolement pour limiter les risques de propagation de cas de variants inquiétants. Afin de prévenir l’exposition de la communauté à des personnes possiblement contagieuses :
6. Accroître l’efficacité de la quarantaine actuelle de 14 jours au moyen de vérifications quotidiennes par des agents gouvernementaux, y compris en personne. 7. Fournir des établissements désignés, dotés de nourriture, de ressources et de télécommunications adéquates pour les personnes qui ne peuvent pas se mettre en quarantaine ou s’isoler chez elles en toute sécurité. 8. Envisager sérieusement la mise en quarantaine obligatoire de tous les voyageurs entrants dans des hôtels désignés. IV. S’il est démontré qu’un vaccin contre la COVID-19 réduit la transmissibilité (comme on s’y attend), le déployer de façon stratégique afin de limiter l’entrée de variants inquiétants en provenance des États-Unis : 9. Vacciner, en tant que responsabilité conjointe Canada/É.-U., les 200 000 à 300 000 camionneurs et les 25 000 à 50 000 travailleurs essentiels qui effectuent la majeure partie des passages transfrontaliers terrestres entre le Canada et les ÉtatsUnis. Compte tenu des enjeux très élevés, mieux vaut poser des actions très fortes dès maintenant et avoir la possibilité d’assouplir les contraintes par la suite, que de ne pas être assez vigoureux et de perdre à jamais la possibilité de protéger les Canadiens contre l’assaut de nouveaux variants à transmission accrue. Si le gouvernement fédéral n’est pas capable d’adopter immédiatement des mesures de protection, les gouvernements provinciaux devraient les mettre en œuvre sans délai. Une réponse prudente consisterait à mettre en œuvre des protections contre l’entrée de variants inquiétants au Canada d’ici la fin de cette semaine. En outre, les gouvernements provinciaux et fédéral devraient continuer à se coordonner en ce qui concerne les mesures nationales essentielles pour identifier et éliminer les variants inquiétants déjà présents au pays. Le séquençage génomique des cas de COVID non liés aux voyages devrait être étendu et des protocoles appropriés de surveillance du dépistage devraient être développés afin d’identifier les variants inquiétants déjà présents dans la communauté. Les déplacements interprovinciaux devraient être restreints aux activités essentielles afin de limiter la propagation géographique des variants inquiétants jusqu’à ce qu’une surveillance de base soit établie et que les données existantes aient été examinées. Les Canadiens appuieront une action décisive. Dans un récent sondage, 87 % des Canadiens ont indiqué être en faveur de l’interdiction des voyages internationaux jusqu’à ce que le nombre de cas de COVID soit réduit, avec de fortes majorités dans toutes les régions, tous les groupes d’âge et toutes les affiliations politiques.iii Dans un autre sondage, 65 % des Canadiens ont déclaré qu’ils interdiraient complètement les voyages internationaux.iv Ce ne sont pas des actions faciles. Mais elles sont loin d’être aussi difficiles que des restrictions déjà en vigueur dans plusieurs provinces. L’interruption des vols vers les destinations de
vacances et l’imposition de dépistages additionnels de la COVID à tous les passagers dès l’arrivée ne sont pas déraisonnables en comparaison avec des ordres de rester à la maison pour 15 millions de Canadiens et des couvre-feux nocturnes pour 8 millions d’autres, la tâche de répondre à des épidémies mortelles de COVID dans des centaines de foyers de soins de longue durée ou la mise en arrêt de secteurs complets d’activité commerciale. Ces restrictions ne sont certainement pas aussi sévères que les conséquences de leur non-utilisation, si le Canada connaissait conséquemment une forte intensification du nombre de cas de variants inquiétants. Ces actions seront difficiles pour nos compagnies aériennes déjà durement touchées, qui viennent d’annoncer une nouvelle série de coupes et qui s’efforcent d’assurer le contrôle des passagers avant l’embarquement. Il existe de solides arguments en faveur d’un soutien à ce secteur, comme cela a été fait dans d’autres pays. Toutefois, ces considérations ne devraient pas bloquer ou retarder des actions douloureuses mais nécessaires pour protéger la santé des Canadiens et la viabilité de nos fragiles systèmes de santé. L’application de ces recommandations protégera les Canadiens contre d’autres importations des variants inquiétants qui ont déjà été identifiés. Elle protégera également les Canadiens contre l’importation de variants futurs, dont nous ne sommes pas encore au courant. Le temps est un facteur déterminant. Chaque jour augmente le risque d’importations additionnelles de nouveaux variants et de leur implantation à grande échelle au Canada. L’hésitation pourrait être fatale pour des milliers de Canadiens, pour notre reprise économique et pour l’ensemble de la lutte du Canada contre la COVID. Nous exhortons le gouvernement fédéral, et en particulier • le premier ministre Justin Trudeau, • la vice-première ministre et ministre des Finances Chrystia Freeland, • le ministre des Affaires étrangères Marc Garneau, • le ministre des Transports Omar Alghabra, • la ministre de la Santé Patty Hajdu, • le ministre de la Sécurité publique Bill Blair • et l’administratrice en chef de la santé publique du Canada, Theresa Tam, à agir de manière décisive et à appliquer immédiatement ces recommandations urgentes. Respectueusement,
i
https://www.cdc.gov/mmwr/volumes/70/wr/pdfs/mm7003e2-H.pdf https://covid19-sciencetable.ca/wp-content/uploads/2021/01/Update-on-COVID-19-Projections_January-122021_Final_English-2.pdf, p. 2. ii
iii
Léger/Association d’études canadiennes, 4 janvier 2021 : « Êtes-vous d’avis que le gouvernement devrait interdire les voyages internationaux jusqu’à ce qu’aient été observés plusieurs jours consécutifs de nombres réduits de cas de COVID-19? » [trad.] iv http://angusreid.org/covid-international-travel/