Enquête Tendances : analyse 2012 des données Claire Debout, janvier 2013
Sommaire Enquête Tendances : analyse pour les données 2011-2012 .................................................................................. 1 Sommaire ................................................................................................................................................................ 1 Résultats globaux ................................................................................................................................................... 2 Les espèces les plus communes .......................................................................................................................... 2 Les variations statistiquement significatives ...................................................................................................... 3 Analyses spécifiques ............................................................................................................................................... 5 Grive draine, mésange bleue et tarin des aulnes................................................................................................ 5 Espèces qui progressent ..................................................................................................................................... 6
Nicheurs ............................................................................................................................. 6 Période internuptiale .......................................................................................................... 8 Espèces qui régressent ....................................................................................................................................... 9
Nicheurs ............................................................................................................................. 9 Période internuptiale ........................................................................................................ 11 Interprétation ....................................................................................................................................................... 11 Sédentaires vs migrateurs ................................................................................................................................ 12 Période de reproduction vs période internuptiale ............................................................................................ 12 Influence du statut trophique ............................................................................................................................ 12 Vers un indice intégrateur ................................................................................................................................... 13 Remerciements ..................................................................................................................................................... 13 Annexe : tableau récapitulatif des variations spécifiques entre 1996 et 2012 .................................................... 14
Pigeon ramier - Photo Gérard Debout
Résultats globaux Les adhérents participant à l’enquête Tendances en 2011-2012 ont été très actifs et les résultats sont encourageants puisqu’un plus grand nombre de parcours a été effectué cette année. Bravo à tous et continuons à nous impliquer encore plus pour connaître notre patrimoine d’oiseaux communs en Normandie. J’ai analysé vos fiches après saisie par Vottana Tep sur TRIM, et vous présente quelques résultats en continuité avec l’analyse parue l’année dernière (publiée dans le PC n° 191 de juillet-août 2012 et celle de 2009-2010, toujours consultable sur le site du GONm : http://www.gonm.org/etudes-et-enquetes/enquete-tendances-analyse-des-resultats-sur-laperiode-1996-2010 Les 133 parcours réalisés six fois dans l’année 2011-2012 ont permis de contacter 169 espèces d’oiseaux différents, soit 13 277 contacts. Parmi les espèces les plus rarement contactées on peut citer l’autour des palombes (1 contact), la huppe faciée (1) et des espèces maritimes ou des limicoles ce qui montre que peu de parcours sont faits à proximité immédiate de la mer. Le bec-croisé n’est contacté que 2 fois, le loriot 3, le faucon hobereau 4, le bruant proyer 5 fois (peu de parcours en plaine), l’alouette lulu 7 fois, et la chouette chevêche 8 fois. Le serin cini n’a été contacté que 23 fois ; oiseau du sud il devrait pourtant être de plus en plus présent dans nos contrées, cette relative rareté traduirait-elle un déclin plus général des granivores ? Le bruant zizi et le tarin des aulnes semblent suivre la même évolution avec seulement 33 contacts. Notons aussi 33 contacts pour la tourterelle des bois. Avec 329 contacts, le moineau domestique se situe juste sous le seuil des 65 contacts par session ; connaissant sa situation en déclin chez nos voisins anglais, il faudrait encore plus de parcours pour obtenir des variations significatives pour confirmer son statut chez nous.
Les espèces les plus communes Pour analyser le nombre de données pour chaque espèce et pour chaque session depuis 1996, nous avions fixé précédemment un seuil arbitraire de 1000 contacts correspondant au nombre de parcours où une espèce donnée avait été rencontrée. Pour des raisons évidentes un nombre croissant d’espèces va, avec l’allongement de la durée de l’enquête, dépasser ce seuil et s’ajouter année après année. C’est pourquoi nous retiendrons comme espèces communes celles qui dépassent le seuil moyen de 65 contacts. Pourquoi ? parce que 133 parcours ayant été réalisés cette année, nous considérons qu’une espèce est commune si on l’a contactée en moyenne au moins une fois sur deux, soit environ 65 fois (un contact = un parcours où l’espèce a été contactée lors d’une session). Février-Mars Merle noir Pinson des arbres Troglodyte mignon Rouge-gorge Mésange charbonnière Pigeon ramier Corneille noire Mésange bleue Grive musicienne Accenteur mouchet Etourneau sansonnet
11 espèces Contacts/espèce
Nbre de contacts 109 106 100 99 97 97 96 93 83 80 72
99,6
Avril-Mai Merle noir Pigeon ramier Pinson des arbres Troglodyte Fvette à tête noire Corneille noire Pouillot véloce Msge charbonnière Rouge-gorge Mésange bleue Grive musicienne Etourneau sansonnet Accenteur mouchet 13 espèces
Nbre de contacts 108 108 107 105 105 102 98 95 89 89 77 73 62
Juin-Juillet Pigeon ramier Merle noir Fauvette tête noire Pinson des arbres Corneille noire Pouillot véloce Troglodyte Grive musicienne Rouge-gorge Msge charbonnière Mésange bleue
Nbre de contacts 103 101 98 96 95 92 91 71 68 64 61
11 espèces 100,4
84,9
Tableau 1a : Résultats pour l’enquête 2011-2012 : période de reproduction. Nombre de contacts supérieurs au seuil moyen de 65 par session ; pour chaque espèce (en gras, les migrateurs partiels inclus dans les 10 premières espèces contactées, en rouge les espèces communes aux six sessions).
Août-Septembre Pigeon ramier Rouge-gorge Mésange charbonnière Corneille noire Pinson des arbres Mésange bleue Merle noir Troglodyte mignon Pouillot véloce 9 espèces Contacts/espèce
Nbre de contacts 101 85 82 80 79 78 76 71 70
Octobre-Novembre Pinson des arbres Rouge-gorge Merle noir Corneille noire Pigeon ramier Troglodyte mignon Mésange bleue Mésange charbonnière Etourneau sansonnet 9 espèces
81,5
Nbre de contacts 103 100 100 93 88 84 83 82 81 91,6
Décembre-Janvier Merle noir Pinson des arbres Corneille noire Mésange bleue Mésange charbonnière Rouge-gorge Pigeon ramier Troglodyte mignon Etourneau sansonnet 9 espèces
Nbre de contacts 101 96 95 92 92 90 89 82 69 92,1
Tableau 1b : Résultats pour l’enquête 2011-2012 : période internuptiale. Nombre de contacts supérieurs au seuil moyen de 65 par session, pour chaque espèce (en gras, les migrateurs partiels inclus dans les 10 premières espèces contactées, en rouge les espèces communes aux six sessions).
Le merle et le pinson étaient les deux premières espèces contactées régulièrement depuis 1996 dans toutes les sessions sauf en fin d’été et en automne. Cela n’est pas vrai chaque année comme on peut le voir ici puisque, si le merle est classé dans les trois premiers toute l’année sauf en aoûtseptembre, le classement du pinson est plus fluctuant : quatrième et cinquième position en juin-juillet et août-septembre, cette année. Le ramier très présent d’avril à septembre se fait plus discret à l’automne jusqu’au début du printemps. L’année 2011-2012 est marquée par l’entrée de l’étourneau dans la session avril-mai et dans les deux sessions d’automne-hiver, alors qu’il n’était dans le groupe des oiseaux les plus communs qu’en février-mars sur les 15 premières années de l’enquête. En avril-mai, deux espèces migratrices partielles apparaissent, la fauvette à tête noire avec un score élevé de 105 et le pouillot véloce. Elles restent très présentes en juin-juillet puis disparaissent de notre liste dès août pour la fauvette et en octobre pour le pouillot. On remarquera qu’évidemment c’est lors de la session avril-mai que le nombre de contacts est le plus élevé pour les cinq espèces les plus communes avec des indices supérieurs à 100 contacts. La fauvette à tête noire s’insère dans ce groupe dès son arrivée et relègue même le pinson derrière elle. Aucun vrai migrateur transsaharien ne réussit à être suffisamment abondant pour apparaître dans ces listes, ce qui illustre leur relative rareté par rapport aux espèces sédentaires. Hormis l’étourneau, les huit espèces dépassant le seuil de 65 contacts en octobre-novembre et en décembre-janvier sont exactement les mêmes et sont présentes à toutes les sessions, elles représentent le socle des oiseaux communs de l’avifaune normande. Nous remarquons que ces espèces sont facilement contactées d’octobre à mai (seuil > 90 contacts) et qu’elles sont plus discrètes (seuil < 85) en plein été (juin-juillet, août-septembre), ce qui est attendu.
Les variations statistiquement significatives 25 des 52 espèces analysées présentent des variations statistiquement significatives, soit positives soit négatives à au moins une des sessions. Les 27 autres espèces analysées ne présentent pas de variations statistiquement significatives. Le tableau 2 récapitule ces variations statistiquement significatives pour chacune des espèces concernées et chacune des sessions. 35 variations significatives ont été déterminées pendant la période de reproduction (sessions de février à juillet), alors que seulement 16 (plus de deux fois moins) sont significatives en période internuptiale (sessions d’août à janvier). Il est très probable que les oiseaux nicheurs sont à la fois plus liés à un lieu (leur territoire) et plus facilement contactables car plus expansifs (comportements et chants) que ces mêmes oiseaux en période internuptiale, évidemment moins démonstratifs et plus mobiles. Une fois de plus, ceci met en évidence la nécessité d’un nombre plus important de parcours afin de mettre en évidence un plus grand nombre de variations statistiquement significatives.
Variation 1996-2012 Pigeon ramier Tourterelle des bois Pic épeiche Alouette des champs Pipit farlouse Grive litorne Grive musicienne Fauvette des jardins Fauvette à tête noire Fauvette grisette Pouillot fitis Pouillot véloce Mésange nonnette Mésange huppée Grimpereau des jardins Bruant jaune Pinson des arbres Verdier d’Europe Chardonneret élégant Linotte mélodieuse Bouvreuil pivoine Moineau domestique Etourneau sansonnet Geai des chênes Choucas des tours
Fev-Mars
-
Avr-Mai +
Juin-Juil + -
+ -
Août-Sept + +
Oct-Nov +
Dec-Janv +
+ + +
+ + -
+ + + + -
+
-
-
-
+ +
-
-
+
+ +
+ +
+ +
+
Tableau 2 : Liste des 25 espèces avec des variations d’indice significativement positives (+) ou négatives (-) depuis 1996, pour chacune des sessions.
Trois espèces ont disparu de cette liste par rapport au précédent bilan : la grive draine dont la variation était significativement négative en décembre-janvier et ne l’est plus cette année ce qui tendrait à montrer qu’elle se porterait un peu mieux ? Le tarin des aulnes et la mésange bleue, qui montraient des variations significativement positives surtout en automne, quittent aussi la liste par diminution des contacts cette année. Par contre, trois espèces entrent dans cette liste : le pipit farlouse (en avril-mai) et la mésange nonnette (en juin-juillet) avec une variation significativement négative. Le grimpereau des jardins, lui, augmente de façon significative en février-mars. Parmi les espèces en augmentation notable (variation positive et significative dans au moins quatre des six sessions) le pigeon ramier rejoint, cette année, le duo [geai des chênes - choucas] qui confortent leur bonne présence. Le ramier passe de deux à cinq sessions à variation positive, on peut dire qu’il est en bonne santé ! Le pinson, lui, aussi voit ses indices de présence en forte augmentation puisque de 2 sessions positives il passe à 3 recouvrant maintenant toute la période de nidification (février-mars et avril-mai). Le pic épeiche est encore une espèce qui confirme son dynamisme puisqu’il passe à 2 sessions à variation positive avec avril-mai, montrant qu’il est un nicheur en expansion. Le cas du bruant jaune est, par contre, toujours inquiétant : espèce qui décline significativement aussi bien en hiver qu’en saison de nidification. Il présente un déclin significatif pour quatre sessions sur six avec une légère modification apportée par les contacts de cette année puisqu’on voit que sa situation est moins mauvaise en août-septembre, mais la situation des nicheurs semble empirer. Le chardonneret bien présent en hiver a des indices en baisse significative d’avril à juillet. Le cas du bouvreuil pivoine reste inchangé avec, lui aussi, quatre sessions sur six en variation négative.
Analyses spécifiques1 Grive draine, mésange bleue et tarin des aulnes La grive draine (Q18) montrait un déclin significatif pendant l’hiver en décembre-janvier (S5) sur les 15 premières années de l’analyse. Mais, depuis 2009, le nombre de contacts augmente (valeur > à la base de 1996) ce qui diminue sensiblement la pente de la tendance (courbe rouge) et donne une variation qui n’est plus significative.
La mésange bleue. En augmentation significative en octobre-novembre pendant 15 ans, elle a connu en 2011 une forte baisse de l’indice qui retombe à son niveau de 1996, ce qui réduit, là aussi, la pente de la courbe de tendance (rouge) : mauvaise reproduction ? réduction de la nourriture disponible pour les jeunes ? déclin notable des migrateurs ?
Le tarin des aulnes a un indice de présence significativement positif en octobre-novembre et févriermars jusqu’aux analyses de 2010-2011. Cette année, la tendance reste positive mais n’est plus significative, on pourrait l’attribuer à une relative diminution des effectifs de migrateurs à ces deux périodes. En décembre-janvier, bien que non significative, la tendance est toujours négative ce qui pourrait traduire cette fois le déclin des vrais hivernants. Tarin des aulnes - Photo Xavier Corteel
1 Un graphe représente la variation des indices pour une espèce et pour une session. La courbe noire, continue et en gras, est le résultat brut, c’est-à-dire la variation interannuelle du pourcentage de parcours où l’espèce est contactée, la valeur de référence étant la première année : 1996. Les deux courbes en noir pointillé maigre, représentent les valeurs encadrant la précédente +/- l’écart-type. La courbe rouge est une droite de régression représentant la tendance linéaire. Les pourcentages annoncés dans les analyses spécifiques correspondent donc à la différence illustrée, par la courbe rouge, entre la valeur de l’indice de 2012 et celle de 1996. Ce pourcentage divisé par le nombre d’années , i. e. le rythme annuel de variation, est donc la pente de la courbe rouge.
Cet exemple montre que l’enquête Tendances permet de distinguer, ce qui n’est pas évident a priori par la simple collecte des contacts visuels et auditifs, l’évolution de deux populations différentes, non identifiables visuellement, l’une de vrais hivernants et l’autre qui passe à l’automne et au printemps et qui traverse la Normandie sans y rester.
Espèces qui progressent2 Choucas des tours et pinson des arbres présentent des variations positives de plus en plus significatives : ces deux espèces ont une santé remarquable, tout comme la fauvette à tête noire dont toutes les sessions présentent une variation positive, qui plus est significatives d’avril à juillet, donc en période de nidification (annexe 1). Sur la période 1996-2012, 27 espèces ont plus d’augmentations que de diminutions presque comme en 1996-2010. Parmi ces espèces, neuf ont une variation positive à toutes leurs sessions (il y en avait treize en 2010). Six de ces espèces ont des variations significatives, leur dynamisme est confirmé. En Belgique, les espèces dont les indices sont en forte hausse sont le pic mar avec +4,6 % et le traquet pâtre avec +12 %. Il est évident que ces espèces sont encore trop rares dans la liste de nos relevés pour les inclure dans nos évaluations statistiques.
Nicheurs Fauvette à tête noire
Session juin-juillet : +27,5% (+1,6 %/an)
2
Tous les cas présentés sont statistiquement significatifs
Pour les trois sessions couvrant la période de reproduction, l’indice a augmenté de +26,8 % en Normandie pour la période 1996-2012. En France3, l’indice a augmenté de +36 % (période 19892005). En Europe, l’EBCC4 considère cette espèce comme en augmentation modérée. Outre-Manche5, stable jusqu’à la fin des années 1970, l’indice a presque triplé puis l’augmentation s’est un peu ralentie. Le nombre de jeunes à l’envol est stable sur la durée du suivi (depuis 1965) et le calendrier de la nidification est avancé d’une semaine depuis le début de la collecte des données dans les années 1960. En Wallonie6, pour la période 1990-2009, on note une augmentation significative de 0,6 % en rythme annuel. Pinson des arbres
Session février-mars : +9,4 % (+0,6 % par an) Pour les trois sessions couvrant la période de reproduction, l’indice normand a augmenté de +8,8 %, celui de la France de 11 %. L’Union européenne considère l’espèce comme stable tout comme nos voisins wallons. L’indice britannique a augmenté d’un tiers depuis la fin des années 1960. Nous noterons que, en 45 ans, les dates de nidification au Royaume-Uni sont avancées d’une dizaine de jours. Choucas des tours
Session juin-juillet : +49,5 % (+2,9 %/an) 3
Les données françaises proviennent du site : www.vigienature.mnhn.fr/page/oiseaux EBCC : European Bird Census Council 5 Les données britaniques proviennent du BTO : www.bto.org/about-birds/birdfacts 6 Les données de Wallonie proviennent de : www.aves.be/ 4
Pour les trois sessions couvrant la période de reproduction, l’indice normand a augmenté de +49,0 %, celui de la France a été divisé par 4 depuis 1989 et fluctue assez peu depuis 1996. À l’échelle européenne, l’espèce est considérée comme stable. L’indice britannique a doublé depuis la fin des années 1970. Nous noterons que les dates de nidification ont avancé d’une dizaine de jours en 45 ans. Au Royaume-Uni, la production de jeunes par nid augmente régulièrement depuis 1965 et la reproduction y est de plus en plus précoce puisque la date moyenne de ponte passe de fin avril à mi avril.
Période internuptiale7 Pic épeiche
Session août-septembre : +53,3 % (+3,3 %/an) Pour les trois sessions couvrant la période internuptiale, l’indice normand augmente de +40,6 %. Notons que cette espèce est maintenant installée en Irlande depuis 2008, elle montre donc un dynamisme certain. Geai des chênes
Session décembre-janvier : +67,5% (+4,2 %/an) Pour les trois sessions couvrant la période période internuptiale, en Normandie, l’indice est de +56,1 %. 7
Nous ne pouvons pas comparer nos données à celles de la France ou d’ailleurs, car il n’existe pas à notre connaissance d’enquêtes équivalentes qui permettraient d’avoir des données extra-régionales.
Espèces qui régressent8 Plusieurs espèces voient leur statut empirer : verdier, rouge-gorge, rougequeue noir, grive litorne et bruant proyer présentent plus de diminutions qu’en 2010. Globalement, on voit un léger glissement de toutes les catégories vers un statut moins favorable. Sur la période 1996-2012 (annexe 1), douze espèces ont une variation négative à toutes les sessions (il y en avait huit en 2010). On remarquera le cas du pipit farlouse qui intègre la catégorie « six sessions à variation négative » (il en avait encore trois positives dans le bilan précédent). Huit de ces espèces ont des variations significatives. On peut noter qu’en Belgique, les espèces dont les indices baissent le plus fortement sont la tourterelle des bois avec -8,3 %, le loriot avec -10 % et le bruant proyer avec -15,5 %. Il est évident que nous n’avons pas encore suffisamment de parcours où ces espèces sont contactées pour qu’elles puissent être intégrées dans nos évaluations statistiques.
Nicheurs Pouillot véloce
Session février-mars : - 50,0 % (- 3,1 %/an) Pour les trois sessions couvrant la période de reproduction, l’indice a diminué de -21,3 % en Normandie pour la période 1996-2012, mais cette baisse est essentiellement due à la période févriermars, elle est de l’ordre de 8 % pour les deux autres sessions. Pour cette espèce, cette session de fin d’hiver devrait donc être considérée réellement comme la fin de l’hiver, plutôt que comme le début de la reproduction. En France, une baisse du même ordre est enregistrée : -23 % (période 2001-2011). En Europe, l’EBCC considère cette espèce comme en déclin modéré. En Wallonie (période 1990-2009), on note aussi une diminution significative de -2,1 %/an. A contrario, outre-Manche, il augmente : depuis 1996, l’indice a presque doublé. Le calendrier de la nidification est avancé d’une quinzaine de jours depuis le début des années 1960. Pouillot véloce - Photo Jacques Rivière
8
Tous les cas présentés sont statistiquement significatifs.
Bouvreuil
Session février-mars : - 55,4 % (- 3,3 %/an) Pour les trois sessions couvrant la période de reproduction, l’indice normand a baissé de -52 %, celui de la France de -63 % depuis 1989 et -39 % depuis 2001. L’Union européenne considère l’espèce comme étant en déclin modéré et les wallons la considèrent comme stable. L’indice britannique a connu deux phases : déclin entre 1975 et 2000, stabilisation à un faible niveau, voire légère reprise depuis. Le fichier de nids du BTO permet de mettre une évidence une diminution du nombre de jeunes à l’envol en moyenne par nid (information que nous ne pouvons pas avoir en Normandie compte tenu de la faible participation au fichier nids) et, contrairement à beaucoup d’autres espèces, des pontes de plus en plus tardives puisque la date moyenne de ponte du premier œuf qui avait lieu fin mai dans les années 1960 a désormais lieu début juin. Étourneau sansonnet
Session juin-juillet : - 18,5 % (- 2,6 %/an) Pour les trois sessions couvrant la période de reproduction, l’indice recueilli en Normandie diminue de - 15,7 %, celui de la France fluctue, mais est globalement stable depuis 2001. En Belgique, l’espèce baisse au rythme moyen de -1,3 %/an. Il connaît un déclin modéré à l’échelle de l’Europe. Au Royaume-Uni, une chute extraordinaire a eu lieu entre les milieux des années 1960 et maintenant puisque l’indice a été divisé par plus de 7. Le fichier de nids permet au BTO de montrer que, puisque le nombre de jeunes à l’envol a nettement augmenté9, le problème est lié à la survie hivernale de cet oiseau, en particulier à la survie des jeunes. 9
Il passe d’une moyenne de 2,8 jeunes par nid dans les années 1960 à 4,2 par nid maintenant.
Période internuptiale10 Mésange huppée
Session octobre-novembre : - 41,5 % (- 1,1 %/an) Pour les trois sessions couvrant la période internuptiale, l’indice normand a chuté de -39,9 %. Moineau domestique
Session août-septembre : - 32,5 % (- 2,0 %/an) Pour les trois sessions couvrant la période internuptiale, l’indice normand a baissé de -16,4 %.
Moineau domestique - Photo Gérard Debout
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Nous ne pouvons pas comparer nos données à celles de la France ou d’ailleurs, car il n’existe pas à notre connaissance d’enquêtes équivalentes qui permettraient d’avoir des données extra-régionales.
Interprétation Sédentaires versus migrateurs Nous avons repris, comme pour l’analyse des années 1996-2010, la comptabilisation des variations d’indices positifs et négatifs qui permet de distinguer les tendances pour les sédentaires et pour les différentes catégories de migrateurs (tableau 3). Statut et nombre d’espèces 35 sédentaires 4 migratrices partielles 10 grandes migratrices estivantes 3 grandes migratrices hivernantes
Nombre de sessions à variation + (A) 1996-2012 106 8 9 6
Nombre de sessions à variation – (B) 1996-2012 97 9 14 3
R = A/B 1996-2010 1996-2012 1,47 1,09 0,9 0,88 0,65 0,64 3,5 2
Tableau 3 : Rapport R (= A/B) sur la période 1996 -2012 et comparaison avec le R de la période 1996-2010. Pour connaître les espèces rentrant dans chacune des catégories, voir annexe 2.
Quelle que soit la catégorie, R est plus faible sur la période 1996-2012 que sur la période 19962010. Les sédentaires montrent un indice R à peine supérieur à 1, donc une tendance légèrement positive, mais bien moins affirmée que lors de l’analyse précédente. Le statut des espèces migratrices décline par rapport à la période 1996-2010.
Période de reproduction versus période internuptiale L’étude des espèces en fonction de la saison amène à distinguer la période de nidification (de février à juillet) de la période internuptiale (août à janvier). Espèces nicheuses : nous considérons les espèces qui présentent la même variation aux sessions de la période de reproduction, dont au moins une variation significative : - Catégorie A/ 8 espèces à variation positive : ramier, pic épeiche, fauvette à tête noire, grimpereau des jardins, pinson, verdier, geai, choucas ; - Catégorie B/ 10 espèces à variation négative : alouette des champs, pipit farlouse, pouillot fitis, pouillot véloce, mésange nonnette, mésange huppée, bruant jaune, linotte, bouvreuil, étourneau. Espèces en période internuptiale : nous considérons les espèces qui présentent la même variation aux sessions de la période internuptiale, dont au moins une variation significative : - Catégorie C/ 6 espèces à variation positive en période internuptiale : ramier, pic épeiche, grive litorne, pinson, geai, choucas ; - Catégorie D/ 6 espèces à variation négative en période internuptiale : tourterelle des bois, alouette des champs, fauvette des jardins, mésange huppée, bruant jaune, bouvreuil. Pour la tourterelle et la fauvette, cette diminution pourrait n’être qu’apparente et s’interpréter par un départ plus précoce de ces migrateurs. Soit 8 augmentations contre 10 diminutions en nidification ; Soit 6 augmentations et 6 diminutions en période internuptiale.
Influence du statut trophique On peut noter aussi très grossièrement le régime alimentaire de ces espèces en individualisant les mangeurs de végétaux/graines (G), les insectivores (I) et les omnivores (O) (annexe 2). Si nous reprenons les quatre catégories précédentes et si on dénombre, dans chacun des cas, le nombre d’espèces de chacune des catégories trophiques, on obtient la répartition présentée dans le tableau 4. Catégorie trophique
Granivores G Insectivores I Omnivores O Total
Période de reproduction Catégorie A Catégorie B En progression En régression 3 4 3 5 2 1 8 10
Période internuptiale Catégorie C Catégorie D En progression En régression 2 4 1 2 3 0 6 6
Tableau 4 : Répartition des espèces en fonction de leurs variations selon les deux grandes périodes de l’année et de leur régime alimentaire.
Les trois espèces mangeuses de graines dans la catégorie A mangent plutôt des grosses graines contrairement aux quatre de la catégorie B qui mangent plutôt des petites graines. Les deux espèces mangeuses de graines dans la catégorie C mangent des grosses graines comparativement aux quatre de la catégorie D qui mangent plutôt des petites graines. Autrement dit, tant en nidification que pendant le reste de l’année, les granivores qui progressent consomment des grosses graines ; ceux qui régressent en consomment des petites. On voit ici l’importance considérable des petites graines issues des « mauvaises herbes » ou de fleurs « insignifiantes » pour la survie de ces espèces. On peut conseiller utilement aux personnes qui nourrissent les oiseaux de mettre dans les mangeoires de préférence des petites graines plutôt que des grosses : concrètement, de favoriser le millet et les graines de myosotis (on peut en semer aussi dans son jardin et les laisser grainer) plutôt que du tournesol. Il serait utile que des études (éventuellement en ayant recours au baguage) concernent certains passereaux sédentaires qui diminuent de façon catastrophique comme le bouvreuil ou le bruant jaune, pour essayer d’expliquer la mortalité en hiver.
Vers un indice intégrateur Grâce à ses nombreux bénévoles, le GONm peut désormais, grâce au recul acquis après 17 années d’enquête, établir un indice régional intégrateur mesurant la biodiversité ornithologique. Nous appellerons dorénavant cet indice : l’indice BON (= biodiversité ornithologique normande). Calculé à partir des indices R (tableau 3), nous obtenons : - Pour la période 1996-2010, BON = 1,63 - Pour la période 1996-2012 BON = 1,15. Cet indice BON intègre pour toutes les espèces communes analysées, toutes les variations d’indice positives et négatives sur toutes les saisons. On peut remarquer que la situation des oiseaux communs s’est globalement aggravée. Les espèces qui présentent les tendances les plus négatives sont essentiellement certains insectivores et les mangeurs de petites graines. Claire Debout claire.debout@gmail.com
Remerciements Merci aux adhérents qui ont participé et qui sont en train de poursuivre cette enquête du 15 août 2012 au 15 juillet 2013 ; merci aussi aux nouveaux participants pour la réalisation de nouveaux parcours. Ces quelques exemples démontrent qu’il est important d’être encore plus nombreux pour avoir encore plus de parcours permettant de dégager des tendances de variation plus fiables et plus significatives.
Linotte mélodieuse - Photo Alain Barrier
Annexe 1 : tableau récapitulatif des variations spécifiques entre 1996 et 2012 Variation 1996-2012
Fév-Mar Avr-Mai Jui-Juil Aoû-Sep Oct-Nov 9 espèces dont l’indice de variation augmente à toutes les sessions L04-Pigeon ramier + +* +* +* +* L06-Tourterelle turque + + + + + M12-Pic épeiche + +* + +* + S03-Fauvette tête noire +* +* + + + S15-Pouillot siffleur + T12- Mésange charbonnière + + + + + U08-Pinson des arbres +* +* + + + V13-Choucas des tours +* +* +* +* + V08-Geai chênes + + +* +* +* 10 espèces dont l’indice de variation augmente à toutes les sessions sauf une N10-Hirondelle de cheminée + + Q08-Rougequeue noir + + Q10- Rouge-gorge familier + + + + Q13-Grive litorne +* Q16- Grive mauvis + S05-Fauvette grisette +* + T11-Mésange bleue + + + + T17-Grimpereau des jardins +* + + + + U12-Tarin des aulnes + + U10-Verdier d’Europe +* + + + 8 espèces dont l’indice de variation augmente à toutes les sessions sauf deux M09-Pic vert + + + + Q15-Merle noir + + + Q17-Grive musicienne + +* + + T05- Mésange longue queue + + + + T14-Sittelle torchepot + + U03-Bruant zizi + + + V09-Pie bavarde + + + V15-Corneille noire + + + 4 espèces à variation globale équilibrée M02-Martinet noir + P02-Pipit arbres + P13-Troglodyte mignon + + + P15-Accenteur mouchet + + + 3 espèces dont l’indice de variation diminue à toutes les sessions sauf deux Q18-Grive draine + + S16-Roitelet huppé + + U11-Chardonneret élégant +* -* -* 6 espèces dont l’indice de variation diminue à toutes les sessions sauf une L05-Tourterelle des bois + -* -* N06-Alouette des champs -* -* T03-Gobemouche gris + U17-Serin cini V01-Moineau domestique + -* V05-Etourneau sansonnet -* + 12 espèces dont l’indice de variation diminue à toutes les sessions L07-Coucou gris P03-Pipit farlouse -* P07-Bergeronnette grise S02-Fauvette des jardins -* S12-Pouillot fitis -* S13-Pouillot véloce -* U01-Bruant proyer U02-Bruant jaune -* -* -* U14-Linotte mélodieuse -* T07-Mésange nonnette -* T09-Mésange huppée -* -* U19-Bouvreuil pivoine -* -* -* + = variation positive ; - = variation négative ; * = variation statistiquement significative (seuil 1 ou 5 %)
Déc-Jan +* + + + + +* + +*
+ + + + +* + + + +
+
-*
-
-
-* -*
Annexe 2 : statuts phénologique et trophique des espèces étudiées Variation 1996-2012
Statut phénologique Statut trophique
L04-Ramier S G L05-Tourterelle des bois Me G L06-Tourterelle turque S G L07-Coucou Me I M02-Martinet Me I M09-Pic vert S I M12-Pic épeiche S I N06-Alouette S G N10-Hirondelle de cheminée Me I P02-Pipit arbres Me I P03-Pipit farlouse S I P07-Bergeronnette grise S I P13-Troglodyte S I P15-Accenteur S I Q08-Rougequeue noir Mp I Q10- Rouge-gorge S O Q13-Grive litorne Mh O Q15-Merle noir S O Q16- Grive mauvis Mh O Q17-Grive musicienne S O Q18-Grive draine S O S02-Fauvette des jardins Me I S03-Fauvette tête noire Mp I S05-Fauvette grisette Me I S12-Pouillot fitis Me I S13-Pouillot véloce Mp I S15-Pouillot siffleur Me I S16-Roitelet huppé S I T03-Gobemouche gris Me I T05- Mésange longue queue S I T07-Mésange nonnette S I T09-Mésange huppée S I T11-Mésange bleue S I T12- Mésange charbonnière S I T14-Sittelle torchepot S 0 T17-Grimpereau des jardins S I U01-Bruant proyer S G U02-Bruant jaune S G U03-Bruant zizi S G U08-Pinson S G U10-Verdier S G U11-Chardonneret S G U12-Tarin aulnes Mh G U14-Linotte mélodieuse S G U17-Serin cini Mp G U19-Bouvreuil S G V01-Moineau domestique S G V05-Etourneau sansonnet S O V08-Geai chênes S O V09-Pie bavarde S O V13-Choucas S O V15-Corneille S O S = sédentaire ; Mp = migrateur partiel ; Me = grand migrateur estivant ; Mh = grand migrateur hivernant G = mangeur de graines, végétaux ; I = insectivore ; O = omnivore