Présentation de la réserve GOnm des îles Chausey

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R Y EY USSE AU HA CH ESS C LE ESS ÎÎL DE mD Nm ON GO EG VE RV ER ÉSSE RÉ Conservateur : Gérard Debout Garde : Fabrice Gallien Présentation générale L’archipel de Chausey est situé dans le département de la Manche (commune de Granville), au nord de la baie du Mont-Saint-Michel. L’archipel se situe à environ 10 milles nautiques au nord-ouest de Granville (environ 20 Km). Propriété privée pour la majeure partie de sa superficie, en particulier tous les îlots, Chausey est surtout connu pour ses colonies d’oiseaux de mer. Avec la création, en 1987, de la réserve par convention entre la SCI des îles Chausey, propriétaire des îles, et le GONm, un suivi ornithologique au long terme a pu être engagé et les oiseaux protégés. Archipel d'îlots de superficie variée, environné d'un vaste estran vaseux surtout au sudouest du Sund et sableux au nord-est de ce chenal. Signalons l'existence d'un schorre assez développé en bordure de certains îlots. Les îlots sont recouverts d'une végétation variée lichénique, herbacée et arbustive (fourrés de lierre, troène, petit houx, ronce et beaucoup plus rarement ajoncs). On y rencontre des restes d'habitats et de carrières de granit. La Grande Île est habitée, très anciennement puisque deux chambres funéraires probablement néolithiques y sont encore visibles, que des silex taillés et des fragments de poteries y ont été découverts. Des restes mégalithiques sont visibles sur la Gênetaie. L'ancienne exploitation du varech pour en extraire la soude est attestée depuis le XVII° siècle : elle a cessé au XIX° siècle. L'exploitation du granit est encore plus ancienne puisqu'elle remonte au XI° siècle et n'a cessé qu'après la Seconde Guerre Mondiale. Très fréquentée touristiquement, la Grande Île était partiellement cultivée au moins jusqu'en 1990, dernière année où la ferme a été exploitée. À noter la présence d'arbres, mais la graphiose de l'orme et les tempêtes (en particulier celle d'Octobre 1987) en a fait disparaître beaucoup. Il faut tout de suite mentionner l'ancienneté des recherches scientifiques menées à Chausey depuis le milieu du XIX° siècle mais concernant surtout la faune invertébrée et la flore marines. Toutes les îles sont granitiques et sont des affleurements d'un massif intrusif pointant au sein de roches encaissantes briovériennes. Deux types de roches grenues ont été reconnues essentiellement : une granodiorite et un granit porphyroïde. Naturellement, les filons sont nombreux (pegmatite) ainsi que les enclaves : cornéennes, enclaves surmicacées et de roches éruptives. La granodiorite de Chausey a été exploitée depuis le XI° siècle et a servi, entre autres, à la construction du Mont-Saint-Michel, des quais de Londres, des trottoirs parisiens ou à la reconstruction de Saint-Malo. De Février 1847 à Août 1848, 672 chargements de bateaux à voile transportèrent 6637 m3 de pierres. En 1860, 500 ouvriers


extrayaient le granit de 37 îles, ce qui laisse supposer que bien peu d'oiseaux devaient fréquenter ces îles, il y a un siècle. Six espèces de mammifères terrestres dont quatre qui ne sont que sur la Grande Île, se rencontrent dans l'archipel : hérisson, taupe, musaraigne des jardins (seul site normand), pipistrelle commune, lapin de garenne, surmulot. Les mammifères marins sont remarquables : cachalot, grand dauphin, dauphin de Risso, globicéphale noir, phoque gris, phoque veaumarin. Aucun serpent ne se trouve sur Chausey, par contre l'archipel est le royaume des lézards : outre les oiseaux, ce sont certainement les animaux que les visiteurs remarquent le plus. Trois espèces de lézards s'y trouvent : le lézard des murailles (le plus commun), le lézard vert (qu'aucun des auteurs anciens ne signale) et l'orvet. Le lézard vert exige des milieux secs qu'il trouve paradoxalement en milieu océanique sur des secteurs sableux, à drainage important. Il lui faut un milieu suffisamment ouvert puisqu'il recherche des sites d'insolation et, à proximité, des sites suffisamment couverts pour se soustraire aux prédateurs et trouver de la nourriture. Le lézard des murailles, particulièrement abondant sur la Grande Île de Chausey, est une espèce subméditerranéenne d'origine orientale. D'importantes colonies d'oiseaux marins se trouvent à Chausey et la réserve est un des hauts lieux ornithologiques européens. Il faut tout particulièrement noter la nidification du grand cormoran, seconde colonie française, celles du cormoran huppé, première colonie française (plus de 1 % de la population mondiale), du harle huppé (toute la population française nicheuse se trouve dans la réserve), de l'huîtrier-pie, première population française, du goéland marin, première colonie française. Mais aussi goéland brun et goéland argenté, sterne pierregarin et, irrégulièrement, sterne caugek (occasionnellement sternes de Dougall et arctique). Notons aussi la nidification tadorne de Belon et de plusieurs espèces terrestres dont le pipit maritime et la fauvette pitchou. Site d'escale migratoire et site d'hivernage des faucons émerillon et hobereau, du hibou des marais, du héron cendré, de nombreux passereaux dont gobe-mouches gris et noir, bruant des neiges, traquet motteux, traquet tarier, fauvette babillarde, fauvettes aquatiques, pouillots (dont le pouillot à grands sourcils), ... Les oiseaux d'eau exploitant le domaine maritime sont nombreux : bernache cravant, harle huppé, plongeons, alcidés, limicoles (en particulier : chevalier gambette, courlis cendré, tournepierre, bécasseau violet). Bilan des actions 2011 menées par le GONm sur la réserve Neuf animations gratuites grand public ont eu lieu les samedis de mai à juillet, ainsi que trois visites en doris en mai. L’observation de 2 familles de harle huppé dans l’archipel au printemps 2011 a été l’occasion de la publication d’un article le 4 juillet dans le journal Ouest France.


La réglementation concernant l’accès aux îlots est aujourd’hui bien connue et globalement respectée par une part de plus en plus importante de plaisanciers qui font circuler l’information. Quatre panneaux, posés à proximité des points de débarquement sur quelques îlots, informent des plaisanciers de l'interdiction d'accès aux îlots. Trois bouées de signalisation de la colonie de sternes ont été mouillées aux abords de l’îlot des Guernesiais. La SCI et le GONm ont convenu de l’installation de nouveaux panneaux de signalisation sur les îlots. La maquette a été réalisée par Guillaume Debout, pour le GONm, la SCI de l’impression des panneaux. Ceux-ci sont réalisés et seront posés au printemps 2012 par le GONm. Globalement, la fréquentation touristique a encore été relativement faible ce printemps, mais les pics de fréquentation à l’occasion des weekends ensoleillés suffisent pour provoquer un dérangement parfois dommageable. Plusieurs infractions ont toutefois été constatées au printemps 2011 et, quand cela était possible, certaines ont fait l’objet d’interventions de la part de nos gardes. Concernant le camping sur le DPM, le GONm a relevé les numéros d’immatriculation des quelques bateaux contrevenants et les a transmis. Une affiche et un prospectus, rappelant les risques d’incendie engendrés par le tir de fusées et leurs conséquences sur l’archipel ont été distribués les 13 et 14 juillet par notre gardeanimateur, les pompiers et les gardes du SyMEL à une cinquantaine de bateaux mouillés dans le Sund et autour de la Grande Île. Une veille a également été mise en place depuis le sémaphore et le fort. Aucun tir de fusée n’a été observé. Le stage de février a permis de nettoyer les plages de la grande île qui ont été parcourues permettant le ramassage de huit sacs-poubelles de 100 litres. La fauche de l’Île Plate, visant à attirer les goélands bruns nicheurs, a de nouveau été réalisée cette année en partenariat avec la SCI et l’entreprise Antoine Paysage. En 2010, la perte de l’un des corps morts nous avait contraints à n’installer que deux bouées de signalisation du périmètre de protection du rocher des Guernesiais. Au printemps 2011, nous avons réinstallé ces deux bouées de signalisation. Les gardes du SyMEL ont installé la troisième bouée. Leur retrait a été réalisé en août par le SyMEL. Les micro-barrages permettant d’aider à la reproduction des sternes, ont à nouveau été remplis de sable à début mai. En 2011, ces micro-barrages se sont avérés très efficaces puisque 97 % des sternes qui se sont installés sur les Guernesiais l’ont fait sur le sable.


Bilan ornithologique 2011 de la réserve du GONm Grand cormoran (B02) Le recensement de l’Ascension a permis de constater un « plus bas » historique depuis 1984. Trois îlots ont été occupés cette année selon la stratégie habituelle des grands cormorans qui changent partiellement de sites de nidification d’une année à l’autre. 5 00 4 50 4 00 3 50 3 00 2 50 2 00 1 50 1 00 50 0 1 95 0 1 96 0 1 97 0 1 98 0 1 99 0 2 00 0 2 01 0 2 02 0

La courbe d’évolution des effectifs depuis la découverte de la colonie à la fin des années 1950 montre que le déclin observé depuis le tournant de 1990 se fait au même rythme que la progression avait eu lieu de 1960 à 1990. La disparition de cette espèce en tant que nicheuse dans l’archipel est désormais à envisager. Les causes de ce déclin ne sont pas claires, mais pourraient être liées aux tirs des grands cormorans sur leurs lieux d’hivernage, tirs autorisés par le ministère alors que cette sous-espèce est protégée !, au dérangement sur les îlots où nichent les grands cormorans, à une éventuelle diminution des ressources alimentaires ou à une concurrence avec le cormoran huppé ? Le baguage coloré a permis, à ce jour, de baguer 629 oiseaux depuis 1992. Compte non tenu de la cohorte née en 2011, ces oiseaux ont fait l’objet de 39 reprises (oiseaux retrouvés morts : 6,9 %) et 274 contrôles (oiseaux observés vivants et reconnus individuellement : 48,5 %).

Mesure du bec d’un poussin de cormoran

Poussin de cormoran bagué


L’aire de dispersion postnuptiale des jeunes grands cormorans nés à Chausey est vaste, puisqu’elle s’étend de la Galice aux Pays-Bas et à l’Angleterre. Le cœur de l’aire de dispersion demeure le golfe « normand-breton » ; cette population, autrefois réputée strictement littorale, ne l’est pas, ce qui confirme les observations comportementales effectuées à Chausey (nidification sur des branches, par exemple) et à Saint-Marcouf (pêche en eau douce). À l’évidence, un certain nombre remonte le cours des grands fleuves comme la Seine et la Loire. Cormoran huppé (B03) 1 20 0

1 00 0 8 00 6 00

4 00

2 00 0 1 95 0 1 96 0

1 97 0 1 98 0

1 99 0 2 00 0

2 01 0 2 02 0

La baisse enregistrée cette année est à considérer avec précaution car la date du décompte a été particulièrement tardive (du 1er au 5 juin), soit en fin de période de reproduction des cormorans huppés. Le recul observé depuis 2007 et dont les raisons sont clairement établies (Debout, à paraître) ne modifie pas les tendances à très long terme telles qu’une droite de régression établie sur un très long pas de temps permet de l’illustrer. En 2011, le GONm a lancé un projet d’étude de la population normande de cormoran huppé. Première colonie française, Chausey figure au premier plan de ce travail qui porte également sur la colonie des îles Saint-Marcouf dont la récente croissance a fait suite à l’effondrement des populations chausiaises. Harle huppé Au cours de l’hiver, la population hivernante maximale recensée s’est élevée à 120 oiseaux. Au printemps, deux ou trois couples ont niché. Famille de harle huppé en 2011

Huîtrier-pie Population globalement stable, mais une légère tendance à la baisse sur le long terme. La première ponte complète a été découverte le 4 mai, la date la plus précoce notée à Chausey. Une étude de la colonie d’huîtrier-pie par


le marquage coloré a débuté au printemps 2011. Trente oiseaux adultes ont été capturés et marqués par une combinaison de bagues couleurs.

Pose d’un piège

Baguage et prise de note

Les goélands 3 5 00 3 2 50 3 0 00 2 7 50 2 5 00 2 2 50 2 0 00 1 7 50 1 5 00 1 2 50 1 0 00 1 9 80

1 9 85

1 9 90

1 9 95

2 0 00

2 0 05

2 0 10

2 0 15

Les trois espèces connaissent des destins divers. Le premier point marquant est le déclin des goélands brun et argenté, le second étant la grande importance patrimoniale de la colonie de goéland marin (16 % de l’effectif national nicheur français). La courbe ci-dessus montre que, globalement, le nombre de goélands dans l’archipel diminue considérablement puisqu’en 30 ans, il a été divisé par trois. La progression du goéland marin ne compense pas, évidemment, la chute des effectifs des deux autres espèces. Sternes Les premières sternes pierregarin ont été observées dans l’archipel le 4 mai et les premières pontes ont été notées le 27 mai. Le comptage du 24 juin a permis de dénombrer un effectif global de 31 couples nicheurs. Notons que le 9 juin, une colonie de plus de 60 couples avait été repérée, colonie qui sera entièrement détruite par les rats la semaine suivante. Sept îlots ont été occupés cette année, deux d’entre eux accueillant 80 % de l’effectif total. Nous avons pu mettre en place une étude de la productivité des sternes par un suivi photographique en 2011. Nous disposons ainsi d’un suivi de 3 000 clichés qui nous apporte des informations intéressantes sur les dates d’arrivée et sur les dérangements. Ainsi, sur 252 heures de suivis,


aucun épisode de dérangement n’a été observé, ceci n’excluant pas que des épisodes de dérangement aient eu lieu entre les périodes de prises de clichés. À ce suivi, nous pouvons ajouter deux évènements observés à l’occasion de nos sorties dans l’archipel : -

09/06/11 : Passage d’1 héron au-dessus de la colonie des Guernesiais provoquant l’envol des sternes qui se reposent sur l’îlot après environ 2 minutes. 26/06/11 : Passage à deux reprises d’un ULM au-dessus de la colonie des Guernesiais provoquant à 2 reprises l’envol des sternes qui se reposent sur l’îlot après environ 3 minutes.

Présente en très faible effectif dans l’archipel au cours du mois de mai, nous avons assisté à une arrivée massive de sterne caugek début juin. Rapidement ces oiseaux ont adopté des comportements d’oiseaux nicheurs avec des offrandes et des adultes en position de couveur. Mais le 13 juin, la colonie a été détruite par les rats. Le comptage du 24 juin permettra de recenser un effectif-record pour l’archipel.

Les nids de sterne caugek

Le 9 juin, à l’occasion d’un suivi des nombreux reposoirs et colonies de sternes de l’archipel, une sterne est repérée, isolée entre une colonie de sterne pierregarin et une colonie de sterne caugek. Son observation détaillée montrera qu’il s’agit d’une sterne de Dougall, qui n’avait jusqu’alors jamais été observée à Chausey. Au total, 6 à 7 couples ont niché à Chausey. Cette nidification est une première dans l’archipel, mais aussi en Normandie. Cette année, les sternes se sont installées sur plusieurs îlots, mais sur la plupart d’entre eux, les rats ont détruit les colonies. En 2011, nous estimons la prédation due aux rats à au moins 110 nids, toutes espèces confondues.

1ère visite de la sterne de Dougall

Sterne de Dougall


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