Le courage civique G REEN PEACE MEMBER 20 17, N O 4
ARTICLE DE FOND POINT DE VUE À LA UNE
Imaginer la grande transformation Quand églises et ONG font cause commune Trois portraits de personnalités engagées
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Dossier: Engageons-nous! SOMMAIRE
Imaginer la grande transformation 8 POINT DE VUE Quand églises et ONG font cause commune 11 À LA UNE Trois portraits de personnalités engagées 14 REPORTAGE PHOTOGRAPHIQUE Lu Guang, photographe pour Greenpeace, estime que témoigner est son devoir 21 ARRIÈRE-PLAN En Colombie, la politique passe par la danse et la musique 26 TÉMOIGNAGES Les raisons de notre engagement pour l’environnement 28 ARTICLE DE FOND
Actualités internes 1 En action 2 Campagnes 30 Mots fléchés écolos et mentions légales 32
Décès Carolina Nyberg-Steiser, notre collègue de Greenpeace Suède, a tragiquement perdu la vie le 17 octobre lors d’un accident d’avion au Brésil. Elle avait 29 ans. C’est avec désarroi et tristesse que nous adressons nos plus chaleureuses pensées à sa famille et à ses amis. L’engagement de Carolina portait en particulier sur la préserva tion des forêts. Au Brésil, Carolina venait soutenir le bureau local de Greenpeace dans son travail en faveur de la forêt amazonienne. Un fonds de protection de l’environnement a été créé à la mémoire de Carolina. Il est destiné à encourager spécifiquement les jeunes femmes qui s’engagent en faveur de la planète et de ses habitants. À l’image de notre amie et collègue disparue. Carolina, nous ne t’oublions pas.
DOSSIER EN LIGNE
Essai par une journaliste: La bonne volonté, cette chose fragile Entretien: L’e-militantisme, est-ce vraiment de l’engagement? Tribune: Les ignorants font le bonheur des grands Plus d’excuses: Astuces pour s’engager au quotidien Explication de terme: La bien-pensance Reportage: Le peuple des Samis face au changement climatique Contribution multimédia: Vivre et mourir en Amazonie
Pour faire un don au nom de Carolina: www.greenpeace.se/carolina
ÉDITORIAL: ACTUALITÉS INTERNES
Greenpeace sur la voie du changement
Notre bateau «Greenpeace Suisse» redimensionné et le courage de son équipage nous permettront de travailler de manière plus rapide et agile. Engager moins de moyens tout en devenant plus réactifs, voilà l’engagement auquel nous consacrons aussi cette édition du magazine. C’est une sorte de potion magique, que nous souhaitons continuer de partager avec vous, dans des actions sans cesse renouvelées. Nous ne baissons pas les bras, et nous comptons sur votre soutien!
Au moment où vous lisez ces lignes, notre bateau «Greenpeace Suisse» et son équipage naviguent en mer houleuse. Du fait d’un recul inattendu des dons, surtout dans le domaine des legs, nous devons réduire le nombre de postes de travail au sein de notre organisation. Conscients de nos responsabilités envers notre personnel, nous avons prévu une démarche transparente et un plan social. En nous donnant des structures organisationnelles allégées, nous voulons accroître l’effectivité de notre travail. L’objectif: un navire «Greenpeace Suisse» plus petit, mais qui continue, avec son équipage actif et courageux, à protéger la planète, ici comme ailleurs. Agir en coopération avec nos collègues, que ce soit dans la Russie de Poutine, la Turquie d’Erdogan ou l’Amérique de Trump, est, plus qu’une simple promesse, une conviction qui nous anime. Pour faire avancer la paix et les solutions non violentes, pour promouvoir une gestion respectueuse des ressources de la Terre, il faut construire des liens, entre ici et ailleurs, entre ce qui nous est familier et ce que nous ne connaissons pas. Aucun des grands problèmes actuels ne peut se résoudre dans un cadre étroitement national: ni les guerres lointaines, ni les conflits européens, ni l’exode des personnes en fuite, ni les flux de réfugiés dans les pays d’accueil, et encore moins les catastrophes naturelles qui se multiplient sous l’effet de la crise climatique. Pour que la planète reste habitable, il faut agir de manière concertée. Les deux guerres mondiales ont apporté une démonstration tragique de l’importance de l’esprit de communauté. Ne vous laissez pas intimider! Devant ceux qui braillent, qui tissent des intrigues, qui font obstruction et qui polémiquent, l’action courageuse persiste et signe. Greenpeace continuera sur sa voie. Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
© NI COL A S FOJTU
Avec tous mes remerciements, Kaspar Schuler, directeur par intérim
P.-S. Victoire dans les urnes en septembre Grâce à vous, nous avons gagné une étape importante en matière de sécurité alimentaire. Avec les organisations BirdLife, Pro Natura et WWF, nous avons pointé les déficits environnementaux dans l’agriculture. Après la victoire dans les urnes, notre tâche est maintenant de demander une production alimentaire suisse respectueuse de l’environnement.
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Madhya Pradesh, Inde, 13 mars 2017
Célébrer la protection des forêts de Mahan En 2015, Greenpeace obtenait, en coopération avec la population locale, la protection des forêts de Mahan. Ces forêts indiennes comptent parmi les plus anciennes d’Asie. Le gouvernement indien voulait ouvrir, avec l’entreprise Essar Energy, une nouvelle mine de charbon au milieu d’une région forestière intacte. Le projet minier de ce groupe indien actif dans l’acier, l’énergie et les infrastructures impliquait la destruction d’environ 500 000 arbres. Or les forêts abritent des espèces menacées comme le léopard, le tigre et l’éléphant, et fournissent les moyens de subsistance d’un grand nombre de personnes.
© G R EENPE ACE /S U D HA NS HU M A L HOT R A
Les pêcheurs protestent Greenpeace soutient les protestations des pêcheurs indonésiens qui luttent contre la construction de la centrale à charbon Labuan II, dans la province de Banten. Leur crainte est que ce projet ruine l’écosystème côtier et menace les zones de pêche. D’autant que l’on observe déjà des cas de maladies des voies respiratoires dues aux cendres volantes qui s’échappent d’une centrale existante. Java, Indonésie, 7 août 2017
© D HEM A S RE V I YA NTO/GRE E NPE ACE
Västernorrland, Suède, 5 octobre 2017
Portraits de protecteurs des forêts Greenpeace présente les portraits des trois cents personnes qui ont soutenu la campagne de protection des forêts boréales dans la ville d’Ånge, en Suède. Menacées de déboisement, les forêts sont convoitées par Svenska Cellulosa Aktiebolaget (SCA), le plus grand propriétaire de forêt privé en Europe. Ce groupe est aussi un des fournisseurs de l’entreprise Essity, qui est elle-même le deuxième plus grand producteur de produits d’hygiène en papier du monde. Essity fabrique notamment les mouchoirs et le papier hygiénique de la marque Tempo. Greenpeace demande un moratoire immédiat sur le déboisement. © EDWAR D B E S KOW/GRE E NPE ACE
ARTICLE DE FOND
PAR STEFAN INDERMÜHLE
Imaginer la grande transformation Nous allons au-devant d’une transformation majeure. La sortie de l’ère des énergies fossiles est d’ores et déjà décidée. Notre société et notre mode de vie vont profondément changer. Retour sur l’histoire, pour mieux comprendre les erreurs, et ouvrir la voie à une transition pacifique et écologique.
«Sur nos monts, quand le soleil / Annonce un brillant réveil, (…) Les beautés de la patrie / Parlent à l’âme attendrie.» L’hymne national suisse incite à la contemplation de la nature, en particulier des Alpes. Que Dieu sauve la patrie… et soutienne l’équipe suisse au prochain match! Or des décennies de dévastation de la nature par l’être humain font que même les montagnes les plus solides s’effondrent: le 23 août 2017, trois millions de mètres cubes de roche ont ravagé le val Bregaglia à une vitesse de plus de 200 km/h. Un éboulement qui coûtera malheureusement la vie à huit randonneurs, et détruira plusieurs maisons.
Märjelen pour se rendre compte des dégâts: le glacier devient plus mince, car il n’est plus suffisamment alimenté par le massif de la Jungfrau. Cette perte de masse entraîne aussi un glissement du versant de Moosfluh, appuyé sur la rive du glacier d’Aletsch: une masse de 160 millions de mètres cubes glisse actuellement d’environ 80 centimètres par jour. Plus de six kilomètres de sentiers de randonnée sont interdits de passage. Ces exemples illustrent que les Alpes, et donc la Suisse, sont directement concernées par le changement climatique. À Bondo, l’éboulement du val Bregaglia a forcé les habitants à quitter leur domicile d’un jour à l’autre. Le dégel du permafrost et la déstabilisation du payLe changement climatique s’attaque sage alpestre menacent des zones habitées, qui aux Alpes Le flanc du Piz Cengalo ne s’est pas effondevront être protégées par des constructions dré sans raison dans la vallée. Autre phénomène coûteuses. Ce sont des symptômes du changement inquiétant, le recul du grand glacier d’Aletsch en Valais, qui risque, d’ici quelques décennies, climatique, dont la cause première réside dans les gaz d’échappement des combustibles fosd’être réduit à un squelette d’éboulis dans la cuvette du glacier. S’il n’a pas encore beaucoup siles. Or la consommation d’énergie augmente perdu en longueur, son épaisseur a netteet les ressources minières sont gaspillées, ment diminué. Le glacier fait fait encore plus de comme si l’ère fossile n’était pas ce qu’elle est: 20 kilomètres de long, mais il suffit de faire la une exception historique de courte durée. randonnée depuis Riederfurka jusqu’au lac de Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
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L’ère fossile entame son déclin On peut dire pour simplifier que jusqu’au milieu du XXe siècle, les êtres humains comptaient sur l’énergie solaire. La consommation de ressources était alors à peu près compensée par la régénération de la nature à travers les rayons du soleil. La quantité de charbon consommée depuis le début de la révolution industrielle était encore négligeable. À l’inverse, la croissance exponentielle du pétrole consommé à partir de 1950 est une situation sans précédent historique. Cet envol du recours aux matières premières fossiles, avec l’augmentation massive du carbone dans l’atmosphère, constitue une intervention inédite de l’être humain dans le régime énergétique de la planète. Statistiquement, l’ère du pétrole coïncide avec la hausse des températures. C’est l’élément le plus concluant pour établir un lien de cause à effet entre les énergies fossiles et le réchauffement climatique. Mais l’ère fossile a déjà entamé son déclin. Et cette seconde phase pourrait être nettement plus courte que la première, elle-même relativement brève, puisqu’elle n’a duré qu’une soixantaine d’années. La sortie du fossile pourrait se concrétiser beaucoup plus rapidement que l’on pense. Au Sommet de 2015 sur le climat, la communauté internationale réunie à Paris a décidé la fin des émissions de carbone d’ici au tournant du siècle. Cette décision implique l’abandon du pétrole, du gaz et du charbon. La production des énergies fossiles devient d’ailleurs de plus en plus ardue, un élément qui ne manquera pas d’accélérer la transition énergétique. Nous allons au-devant d’une grande transformation. Une sortie rapide des énergies fossiles permettra de réduire les coûts du changement climatique. C’est l’objectif de l’accord de Paris. La rapidité de réaction des États sera la clé du succès dans leur effort de reconfiguration de leur économie et de leurs infrastructures. C’est en tout cas la leçon qu’on peut tirer du passé.
Une sortie rapide des énergies fossiles permettra de réduire les coûts du changement climatique. C’est l’objectif de l’accord de Paris.
de cet auteur décrit comment ce modèle de société déclenche des dynamiques forcenées et parfois destructrices. Pour les peuples colonisés, l’impérialisme du XIXe siècle est synonyme d’oppression, tandis que les ouvriers des métropoles se trouvent paupérisés malgré le progrès technique et scientifique. Karl Polanyi montre comment les sociétés peuvent magistralement échouer, et comment les États peuvent fatalement buter sur leurs propres difficultés. Ce constat est toujours d’actualité. La main qui dirige le marché est non seulement invisible, mais aussi aveugle, et parfois de manière tragique. Le choc pétrolier des années 1970 a entraîné une récession mondiale, et certains pays ont connu de graves crises de pauvreté et d’endettement. Les crises de l’époque moderne se soldent souvent par des guerres et des conflits, aux effets dévastateurs pour les êtres humains et l’environnement : du gaz moutarde de la Première Guerre mondiale à l’épandage aérien de pesticides en Amérique latine pour lutter contre la drogue, en passant par la bombe atomique de la Seconde Guerre mondiale et les champs de pétrole en feu de la guerre du Golfe…
Leçons de La Grande Transformation Karl Polanyi (1886-1964), spécialiste d’histoire économique, utilisait déjà l’idée de «Grande Transformation» pour qualifier les bouleversements intervenus au XIXe siècle. Ce concept s’appliquait, selon lui, à l’émergence de l’État-nation moderne, fondé sur l’économie de marché. Paru en 1944, l’ouvrage principal Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
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ARTICLE DE FOND
La réaction positive des politiciens et diplomates Selon Polanyi, les crises et les catastrophes pétrolières induites par la «Grande Transformation» se prolongent jusqu’à ce qu’un élément correcteur vienne apaiser la situation. Ainsi, il aura fallu un nouveau contrat social pour que la modernisation retrouve un visage humain. Les sociétés européennes et nord-américaines ont réussi à se délivrer du joug du féodalisme et à reconnaître les droits humains. De même, il aura fallu attendre les lois de protection sociale et un droit du travail modernisé pour enrayer la pauvreté du prolétariat industriel. D’autres exemples illustrent que la politique peut changer le cours des choses. En 1978, peu après la découverte du trou dans la couche d’ozone, le protocole de Montréal mettra fin à l’usage du CFC. Grâce à l’interdiction de cette substance, la couche d’ozone est aujourd’hui en voie de reconstitution. Mais il ne suffit pas de se reposer sur la politique, les lois, les accords internationaux. La prochaine «Grande Transformation» ne sera possible que grâce aux initiatives décentralisées d’innombrables personnes. C’est d’ailleurs une campagne Greenpeace qui a mis en évidence le problème du CFC et ouvert la voie à la solution. Si le réfrigérateur sans CFC s’est imposé contre la résistance des industriels, c’est en raison de la coopération avec des ingénieurs expérimentés (Greenfreeze) qui ont fourni la technologie appropriée. Le courage civique, la clé du changement Imaginer le changement, c’est comprendre que les mutations commencent souvent par une nouvelle histoire, qui induit une évolution dans la société. Un tournant interprétatif commence souvent d’en bas, de manière décentralisée. Défiant la morale hypocrite des années 1960, les hippies ont fini par voir leur mode des cheveux longs reprise même par les présentateurs de télévision. Le slogan Make love, not war, inventé en réponse à la guerre du Vietnam, contribuera à y mettre fin. C’est aussi à cette époque que sont apparus une nouvelle conscience environnementale et un esprit critique rompant avec le conformisme permettant l’émancipation de nombreuses femmes. À l’inverse, les interdictions qui frappent les initiatives citoyennes en Russie, en Inde ou en Hongrie témoignent aujourd’hui des barMagazine Greenpeace N0 4 — 2017
rières érigées par les systèmes répressifs contre le nécessaire changement. Pour surmonter cette répression, la politique climatique doit se focaliser sur la dignité humaine et sur une adaptation ciblée au changement climatique. C’est par l’imagination et des initiatives réunissant de nombreux militants que la transformation numérique pourra, elle aussi, être mise à profit pour un changement durable et socialement responsable. Pour une transformation écologique et pacifique Prendre soin de l’environnement et de la société, tels sont les défis de la transformation à venir: Green + Peace. Cette approche dépasse la politique environnementale et la démocratie électorale au sens strict. Elle suppose l’engagement civique, l’empathie et la capacité d’un grand nombre de pionniers à sortir des sentiers battus. Cette édition du magazine présente quelques figures porteuses d’un tel changement.
Historien et spécialiste de sciences politiques, Stefan Indermühle travaille depuis une vingtaine d’années dans le domaine du développement et de la politique de paix, en Suisse comme à l’étranger. Il était notamment chargé de la campagne Clean Clothes de Public Eye (anciennement Déclaration de Berne). Il est aujourd’hui actif dans la promotion de la paix et des droits humains.
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PAR BERNHARD PÖTTER
© CRI STOBAL OLI VARE S/G RE E N P E ACE
POINT DE VUE
Greenpeace et l’action sociale Les organisations non gouvernementales pourraientelles s’impliquer dans le travail social des églises? Arguments en faveur d’une idée bénéfique pour tous. Greenpeace et la foi. Au premier abord, le lien entre les deux n’est pas évident. Mais sans la dimension religieuse, l’organisation environnementale la plus connue du monde ne serait pas ce qu’elle est. Dorothy et Irving Stowe, deux adeptes du quakerisme, furent parmi les principaux acteurs de Greenpeace lors de sa fon dation à Vancouver, en 1972. La forme religieuse du témoignage (bearing witness) est ainsi devenue le signe distinctif des combattants de l’arc-en-ciel: protester, par sa présence, contre la destruction environnementale, et documenter les injustices. La non-violence du Mahatma Gandhi sera une source d’inspiration majeure pour le mouvement, baptisé Greenpeace à la suite d’une réunion dans une église. Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
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POINT DE VUE
Quarante-cinq ans plus tard, le monde a changé. Tandis que les ONG jouissent d’un soutien financier stable ou croissant de la part de leurs donateurs, les communautés religieuses des pays industrialisés sont en perte d’effectifs, d’influence et d’argent. Il leur est souvent difficile de trouver des bénévoles prêts à s’engager dans le travail social. Il y a un siècle, la population suisse était presque entièrement de confession catholique ou protestante, une proportion aujourd’hui réduite à 62%. Les paroisses chrétiennes peinent à se renouveler, n’ont plus assez de bénévoles et leurs structures sont vieillissantes. D’où la question de savoir si les organisations séculières devraient ou pourraient reprendre le travail social des églises. Est-ce le rôle de Greenpeace de gérer un centre social? Le WWF pourrait-il assurer un service de consultation en cas d’endettement? Amnesty International devrait-elle proposer une permanence pour personnes toxicomanes? La réponse est: oui, si cela est souhaité. Le travail social changerait évidemment de nature, et les organisations environnementales devraient elles aussi évoluer. Mais pourquoi ne pas aller dans ce sens, dans l’intérêt d’un avenir viable pour toutes et pour tous? N’oublions pas que les églises chrétiennes ont fortement marqué notre vie et notre perception de la société. Le christianisme a été la première grande religion mondiale à proclamer l’amour et le souci du prochain, quelle que soit son origine. Certes, les croyants n’ont pas toujours vécu en accord avec ce principe. Il suffit de rappeler la chasse aux sorcières ou l’inquisition. Toujours est-il que les églises ont mis en place un travail social très présent dans la société, et créé plusieurs ordres religieux consacrés aux problèmes sociaux les plus graves: soins aux malades, encadrement des détenus, aide aux familles pauvres, éducation scolaire et universitaire, peuplement et défrichage de terres reculées. Tandis que les Salésiens se tournaient vers les enfants négligés, les Hospitaliers, Franciscains et Dominicains s’attachaient à soigner les malades. C’est ainsi que les ordres religieux de l’Europe du MoyenÂge ont jeté les bases de l’État social moderne. Dans le contexte des dispositifs de protection sociale et de participation politique mis en place au fil du temps, le monde a continué de voir émerger des associations qui se penchent sur des aspects particuliers du vivre ensemble, Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
S’engager pour les autres, le monde et l’environnement est quelque chose de gratifiant. C’est une source de plénitude, de fierté, de satisfaction, de contacts stimulants, de reconnaissance et, parfois même, de succès.
comblant des lacunes que l’État ne prend pas suffisamment en charge. C’est là l’expression d’une société civile forte, fondée sur la conviction que la démo cratie est la meilleure forme d’organisation sociale et que les mécanismes démocratiques fonctionnent d’autant mieux s’ils permettent à un maximum de personnes de participer au processus de décision. Il est vrai que les églises ont passé des siècles à combattre l’esprit des Lumières, les sciences et la démocratie, une lutte qu’elles ont heureusement perdue. Dans les démocraties libérales, que ce soit en Europe ou ailleurs, la foi ou le dogme de tel ou tel groupe religieux ne pèse plus sur les décisions politiques. Les choix de société font désormais l’objet d’un débat public et les États garantissent la liberté de conscience à chaque individu. La démocratie pose ses propres exigences aux citoyens. Mais au-delà de la nécessité élémentaire d’aller voter, ne faudrait-il pas aussi un engagement dans les domaines auparavant assumés par les communautés religieuses? Une vision ambitieuse, qui signifie que les églises et les organisations de la société civile devraient se rapprocher les unes des autres.
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L’idée peut surprendre, mais les motivations des bénévoles de tous bords se ressemblent: empathie, besoin d’aider, sachant que l’on risque soi-même d’avoir besoin d’aide un jour ou l’autre, dans la joie partagée du soutien donné et reçu. Les personnes qui s’engagent dans les églises et les combattants de l’arc-en-ciel partagent des valeurs similaires, même s’ils ne s’en rendent pas toujours compte. Elles ont plus de choses en commun entre elles qu’avec les membres de leur groupe social qui ne s’engagent pas. La personne dont les considérations religieuses l’amènent à soutenir les ré fugiés est ainsi plus proche d’un membre athée d’Amnesty International que d’un membre xénophobe de sa propre paroisse. Une dimension importante de l’engagement est le bien-être que l’on en retire soimême: s’engager pour les autres, le monde et l’environnement est quelque chose de gratifiant. C’est une source de plénitude, de fierté, de satisfaction, de contacts stimulants, de reconnaissance et, parfois même, de succès. C’est un point sur lequel les protecteurs de l’environnement ont beaucoup à gagner en s’inspirant un peu plus de l’attitude des bénévoles des églises. Une coopération renforcée entre les organisations environnementales et les mouvements d’inspiration religieuse serait bénéfique pour tous. L’expérience des premières en matière de protestation, de lobbying politique et de sensibilisation du public serait bien utile aux secondes dans leurs actions en soutien aux personnes défavorisées. Inversement, les associations de protection de l’environnement pourraient s’inspirer des églises pour mieux convaincre les personnes de s’engager à long terme, et donner un sens plus profond à leur action. Pour travailler ensemble au service d’une vie meilleure ici-bas, il n’est pas nécessaire d’être d’accord sur l’au-delà. Le rassemblement des «hommes de bonne volonté» est déjà une réalité sur de nombreux plans. Les militants des organisations environnementales appuient souvent leur engagement sur une dimension spirituelle. De leur côté, les grandes religions mondiales ont compris que le pillage de l’environnement est source de détresse et de pauvreté. Sur le plan théologique, elles voient dans la destruction de la Création un péché, comme le dit l’encyclique Laudato si’ du pape François en 2015. Si l’on défend que l’homme est créé à l’image de Dieu, alors le Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
racisme, l’exploitation et l’oppression sont inacceptables. Les églises ont toujours fondé des ordres religieux pour répondre aux problèmes sociaux les plus urgents: la détresse des malades, la famine, l’ignorance. Aujourd’hui, il faudrait de nouvelles communautés qui luttent pour l’environnement, la paix, la justice. Les habitants d’Europe occidentale ont tendance à croire que la religion perd en influence. À l’échelle mondiale se dessine au contraire une forte montée des groupes religieux, que ce soit en Amérique latine, aux États-Unis, en Afrique ou en Europe de l’Est. Ce n’est pas toujours une bonne nouvelle pour la lutte en faveur d’un monde meilleur. Islamistes militants, chrétiens ou juifs fondamentalistes constituent une menace pour la paix, mais aussi pour l’environnement, donc pour les deux éléments fondateurs de Greenpeace. Ils sèment les conflits et les violences qui détruisent les conditions d’existence des plus vulnérables, des personnes défavorisées, des enfants, des animaux et des plantes. Pour sauver le paradis qu’est la planète Terre, il n’est pas nécessaire de croire au paradis dans les cieux. Il suffit d’agir ensemble pour empêcher l’enfer ici-bas. Bernhard Pötter, 52 ans, travaille comme rédacteur pour les questions environnementales au quotidien allemand Tageszeitung (taz), à Berlin. Également auteur indépendant, il a publié des textes sur l’énergie, le climat et la politique environnementale internationale. Scolarisé dans une école jésuite, il a suivi sa formation de journaliste dans une école catholique et se considère comme catholique pratiquant. •
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En Suisse, une personne sur cinq de 15 ans et plus exerce une activité non rémunérée au sein d’une organisation ou d’une institution. Cela représente environ 1,4 million de personnes (20% de la population résidente permanente). Près de 3% de la population, soit environ 200 000 personnes, sont engagées dans des institutions religieuses et y font du bénévolat. Le volume de travail annuel de tous les bénévoles engagés au sein des organisations religieuses est estimé à 28 millions d’heures. Sources: ESPA/SSUP/OFS
À LA UNE
PAR SAMUEL SCHLAEFLI
De la parole aux actes! Ouragans, incendies de forêt, inondations, effondrement des stocks halieutiques, mort des coraux, microplastiques et antibiotiques dans nos aliments… Les raisons d’être pessimistes ne manquent pas. Les températures ne cessent d’augmenter et la banquise se morcelle peu à peu dans l’Arctique. Qui ne serait tenté de faire l’autruche et de rester tranquillement dans sa petite bulle ou, au contraire, d’appuyer sur l’accélérateur? Nous avons discuté avec des femmes et des hommes qui s’engagent pour l’environnement, précisément parce qu’ils ont conscience des énormes défis que notre société va devoir relever. Leurs motivations et leurs méthodes diffèrent, mais ils ont en commun de vivre le changement qu’ils voudraient voir se réaliser dans le monde. Et ils inspirent d’autres à suivre leur exemple.
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Raphael Fellmer: le glaneur de poubelles fauché devenu entrepreneur social La chasse au gaspi sans un euro en poche L’engagement médiatisé de Fellmer contre le gaspillage des ressources et en faveur de modes de vie alternatifs a commencé en 2010: après avoir obtenu un diplôme universitaire d’études européennes, il part pour les Pays-Bas et ira jusqu’au Mexique, sans le moindre sou. Ce qui était au début une expérience allait devenir un projet de vie. C’est à bord d’un voilier sur lequel il a été embauché qu’il décide, au beau milieu de l’Atlantique, de vivre désormais sans argent. «Pendant le Sommet de l’ONU sur le climat, qui avait lieu à Cancún cette année-là, j’ai réalisé que nous devions vivre le changement que nous souhaitons voir se concrétiser dans le monde, se souvient-il. Nous n’avons pas le temps d’attendre les politiciens.» Fellmer considérera dès lors son boycott de l’argent comme un message politique et une expérience vécue du changement. En même temps, au Mexique, il réalise avec consternation que des millions de gens ont faim alors que des tonnes de produits alimentaires en excédent sont détruites chaque jour.
© LUKA S KAR L
Lorsque j’ai contacté Raphael Fellmer début septembre, il était complètement absorbé par l’ouverture de son premier magasin d’alimen tation à Berlin Charlottenburg. Nommé SirPlus, ce magasin a pour objectif de transformer le food sharing, le partage de la nourriture, en véritable mode. Cette entreprise à vocation sociale récupère des aliments qui, normalement, atterriraient dans la benne à ordures: des produits irréprochables, qui ont bientôt atteint la date de péremption ou l’ont déjà dépassée. Fellmer et son équipe vont les chercher dans des supermarchés, chez des commerçants ou des producteurs, moyennant un petit dé dommagement. Les entreprises partenaires économisent ainsi les frais d’élimination des invendus et améliorent leur image. Les clients qui achètent auprès de SirPlus en profitent à leur tour, car, pour ces tomates, ces céréales ou ces jus de fruits mis au rebut, ils paient 30 à 70% de moins que dans les magasins conventionnels.
Les trois jeunes entrepreneurs (Alexander Piutti, Raphael Fellmer et Martin Schott) qui luttent contre le gaspillage alimentaire. Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
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À LA UNE
Pour l’avenir, Fellmer rêve d’une chaîne de magasins d’aliments récupérés en franchise, avec des filiales dans toute l’Allemagne, en Autriche et en Suisse.
De retour à Berlin, Fellmer emménage dans un logement gratuit avec sa femme et leur fille qui vient de naître. Là, il est à nouveau confronté à la surconsommation. Chaque jour, il se procure des aliments et des objets d’usage courant dans les bennes à ordures des supermarchés du voisinage – en toute illégalité naturellement. Lui et sa famille vivent bien des «déchets» glanés dans leur quartier. En mars 2012, Fellmer lance le mouvement «Sauver les denrées alimentaires». Des gens qui partagent ses idées l’aident à récupérer désormais légalement des produits auprès de supermarchés, de boulangeries ou restaurants coopératifs et les distribuent gratuitement. En 2014, le réseau fusionne avec la plateforme Internet foodsharing.de. Faire partie de la solution Aujourd’hui, foodsharing.de compte plus de 300 000 utilisateurs et 30 000 food savers, qui récupèrent et distribuent régulièrement des denrées alimentaires auprès de plus de 3300 entreprises coopératrices. Fellmer Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
explique le succès de foodsharing.de: «Beaucoup de personnes ont vu dans notre projet une possibilité de s’engager et de faire quelque chose contre le gaspillage et la pollution de l’environnement. Et d’ajouter: Nombre d’entre elles se rendaient compte qu’aimer ces produits, c’est aussi aimer la Terre: l’eau utilisée, l’énergie nécessaire et le travail fourni.» Fellmer a écrit un livre sur son boycott de l’argent et sur son mouvement. Il a participé à des talk-shows et parlé devant des classes d’école. À l’été 2015, il a fini par accepter d’être payé, car il se sentait obligé de se libérer de «son dogme et de sa prison privée», comme il l’appelle aujourd’hui. Désormais père de deux enfants, il avait dû trouver un nouveau logis pour sa famille. Aujourd’hui, il est convaincu que l’argent peut être un vecteur de changement positif et qu’il lui permettra d’accroître l’efficacité de sa démarche. Pourquoi est-il passé du refus de l’argent au statut d’homme d’affaires? «Au fond, j’ai toujours été un entrepreneur», avoue-t-il, songeur. Mais ses motivations sont restées les mêmes: «Pouvoir réaliser avec d’autres des idées qui améliorent le monde, c’est très satisfaisant.» L’idée d’ouvrir un magasin d’aliments en surplus à Berlin a pu décoller grâce à un prêt de 100 000 euros et à une campagne de financement participatif. 1700 personnes ont fait don d’un montant total de 90 000 euros. «Le financement participatif est un formidable instrument pour faire connaître une idée par le biais des médias et des réseaux sociaux, et pour voir si elle est bien accueillie.» Il ne faut toutefois pas sous-estimer l’investissement en temps que cela implique, souligne-t-il. Rien que pour la vidéo de présentation, il a fallu plus de deux mois de travail. Pour l’avenir, Fellmer rêve d’une chaîne de magasins d’aliments récupérés en franchise, avec des filiales dans toute l’Allemagne, en Autriche et en Suisse. Une sorte de «McDo» pour les aliments récupérés en quelque sorte? «Nous le faisons pour la bonne cause, explique Fellmer. Nous avons la marque, les processus, une foule d’expériences et des contacts. Nous les mettons à la disposition des personnes intéressées et créons ainsi une base pour que cette démarche se généralise.»
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© FABI AN UN TE RN E H ME R/ 13 P H OTO
Franziska Herren: du studio de fitness au Palais fédéral, une femme en lutte contre les subventions allouées à une agriculture dévastatrice
Franziska Herren (à gauche) dialoguant dans la rue. «Nous pouvons aussi nous rencontrer dimanche après-midi», m’a-t-elle répondu lorsque je l’ai contactée pour obtenir un rendez-vous, ajoutant: «Je ne fais pas de différence entre le travail et les loisirs.» Depuis que cette Bernoise de 50 ans a commencé à récolter des voix pour sa nouvelle initiative, en mars dernier, elle travaille pratiquement jour et nuit. Son fils adolescent, qui, à la différence de sa sœur, vit encore chez ses parents, lui a récemment déclaré: «On voit que tu es en pleine campagne de vote: le frigo est presque vide...» Le studio de fitness que l’ancienne hôtesse de l’air gère depuis vingt-quatre ans dans la commune de Wiedlisbach, non loin de Soleure, est provisoirement dirigé par ses employés. Franziska Herren pose volontiers des questions de fond: «Pourquoi les consommateurs doivent-ils payer plus cher les produits issus de l’agriculture biologique que ceux de l’agriculture conventionnelle? Pourquoi ces produits sont-ils réservés aux milieux privilégiés?», se demande-t-elle de manière rhétoMagazine Greenpeace N0 4 — 2017
rique. Sa réponse est sans appel: «Parce que les paysans n’ont pas à payer pour les dommages que les pesticides et les antibiotiques causent à l’environnement. D’autant que ces dommages sont subventionnés par la Confédération.» Avec son initiative populaire «Pour une eau potable propre et une alimentation saine», elle a décidé de tout chambouler: au lieu d’accorder chaque année des milliards de francs de subventions aux exploitations conventionnelles, seules celles qui produisent sans utiliser de pesticides ni pratiquer l’élevage intensif seraient soutenues par la Confédération et les cantons. Le savoir responsabilise «Au fond, j’ai de la peine à intervenir en public; je préfère travailler en coulisses, reconnaît Franziska Herren. Mais, à partir du moment où l’on détient des informations, on a une responsabilité. On doit intervenir.» Son engagement politique a commencé il y a douze ans, par une initiative communale contre la coupe à blanc
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À LA UNE
d’un pan de la forêt et de l’aire de loisirs proche de sa maison. Elle a mobilisé ses voisins, négocié avec les autorités municipales et réussi en fin de compte à empêcher ce déboisement drastique. Pour la première fois, elle a réalisé ce qu’impliquait la défense d’une cause contre une majorité et contre les avis des experts. Certains voisins de cette commune de deux mille habitants l’évitaient soudain ou ne fréquentaient plus son studio de fitness. Le rejet a été encore plus sensible en 2011, lorsqu’elle s’est opposée au changement d’affectation de terres réservées à la rotation des cultures. De grosses sommes d’argent étaient en jeu; la lutte pour conquérir la faveur du public a été rude. Lors de la catastrophe nucléaire de Fukushima, en mars 2011, Franziska Herren s’est vue brusquement embarquée dans sa première intervention politique au niveau cantonal. Choquée par les images en provenance du Japon, elle avait imprimé des tracts et les avait distribués dans sa commune. Une Suisse avec 100% d’énergies renouvelables était possible, selon elle. Un de ces tracts retint l’attention de Walter Kummer, un ancien entrepreneur fortuné et doté d’un solide savoir-faire juridique. Celui-ci lui proposa de poursuivre l’un de ses objectifs à l’échelon cantonal: le débranchement de la centrale nucléaire de Mühleberg. Un comité d’initiative fut réuni, un site web mis en ligne, et des collecteurs de signatures furent recrutés. L’initiative Mühleberg vom Netz (Déconnecter Mühleberg) sera rejetée par le peuple bernois le 18 mai 2014. Franziska Herren évoque néanmoins un succès: «Compte tenu des débats sur la votation, les Forces motrices bernoises n’ont d’autre choix aujourd’hui que d’arrêter la centrale d’ici 2019.»
ment les consommateurs sont induits en erreur par une publicité pour la viande et le lait qui occulte les conditions de production effectives, à savoir l’élevage intensif. Elle est choquée que cette publicité, tout comme la production agricole polluante et contraire à toute éthique, soit subventionnée par les contribuables. Le groupe de lobbying Proviande reçoit près de six millions de francs par an de la Confédération. Avec son initiative actuelle, Franziska Herren entend mettre en évidence le lien entre l’agriculture intensive, basée sur des impor tations de fourrages et un usage massif de produits phytosanitaires, et la qualité de l’eau. Ce mode de production contamine les sols avec des nitrates et des pesticides. Des résidus médicamenteux, tels les antibiotiques souvent prescrits de manière préventive dans l’élevage intensif, sont également disséminés dans les champs par le fumier et le lisier, puis polluent la nappe phréatique pour finir dans notre eau courante. Ce qui préoccupe le plus Franziska Herren? «Les 42 tonnes d’antibiotiques utilisés chaque année pour notre élevage axé sur les hauts rendements, qui font que de plus en plus de bactéries multirésistantes se répandent dans les cours d’eau.» Une infection de cette sorte pourrait être fatale chez l’être humain. C’est pourquoi le comité d’initiative se réfère explicitement à la loi sur la protection des eaux, qui interdit de laisser s’infiltrer dans le sol des substances susceptibles de le polluer. L’initiative, selon Herren, rencontre un vif intérêt. «La plupart de nos donateurs et col lecteurs de signatures sont venus à nous de leur plein gré dès qu’ils en ont entendu parler.» C’était un signal positif. «Tant que l’on pourra toucher les gens avec de telles initiatives, le changement social aura des chances concrètes.» Franziska Herren table sur l’investisseLe gâchis agricole Franziska Herren a eu l’idée de sa première ment personnel pour y arriver. Elle inscrit son initiative à l’échelle fédérale lors d’une randon- numéro de téléphone et son adresse élec née. Elle avait croisé une jeune vache meuglant tronique sur chaque feuille de signatures, et répond pratiquement à toutes les demandes, seule dans un champ après qu’on lui ait retiré souvent jusque tard dans la nuit. Le jeu en vaut son veau juste après sa naissance. Elle commença alors à faire des recherches: «Plus je me apparemment la chandelle: au bout de six mois de collecte de signatures, tout semble inpréoccupais de la douleur de cet animal, plus je prenais conscience du gâchis de notre agri- diquer que l’initiative va aboutir. Pour vous engager, il vous suffit de téléculture intensive.» Le fait que l’on arrache le veau à sa mère afin d’augmenter la production charger les formulaires de l’initiative, de collecde lait n’était que la pointe de l’iceberg. Bienter des signatures dans votre entourage et de tôt, Franziska Herren renonça au fromage et au les envoyer, ou de signer directement en ligne lait; elle était déjà végétarienne depuis l’ensur wecollect.ch. fance. Aujourd’hui, elle s’indigne de voir comMagazine Greenpeace N0 4 — 2017
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© ME OPAR
Max Liboiron: chaussettes de bébé et science citoyenne contre le microplastique
Max Liboiron (deuxième en partant de la gauche) et son équipe manipulent le dispositif inventé spécialement pour la recherche sur les déchets plastiques dans la mer.
Biologiste, féministe, artiste et militante, Max Liboiron a un profil singulier, dont les facettes lui sont bien utiles pour son travail de professeure assistante au Civic Laboratory for Environmental Action Research (CLEAR), un laboratoire participatif dédié à la recherche militante: «Science et engagement n’ont toujours fait qu’un pour moi», dit-elle avec conviction. Après des études de biologie à New York, cette chercheuse originaire du nord du Canada a fait un master en sciences culturelles sur la question de la pollution plastique. Il y a deux ans, elle s’est établie sur l’île de Terre-Neuve pour créer son laboratoire au sein de l’Université Memorial. Les travaux scientifiques menés par le CLEAR portent presque exclusivement sur la pollution des océans par les déchets plastiques, en particulier les microplastiques. Ces particules, d’une taille inférieure à 5 mm, ont la propriété d’accumuler les substances chimiques déversées dans la mer. Elles sont ensuite ingurgitées par les organismes marins, avec des conséquences fatales. Il arrive ainsi que des Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
dépouilles d’ours polaires découvertes au Canada doivent être éliminées avec les déchets spéciaux, tellement elles sont chargées de substances toxiques du fait de la position de cet animal au bout de la chaîne alimentaire arctique. À Terre-Neuve, des milliers de personnes vivent de la pêche. Le cabillaud et les autres poissons comestibles sont une composante importante de l’alimentation de la population. Les microplastiques représentent donc une réelle menace pour la santé humaine. L’industrie de la pêche porte une part de responsabilité dans cette situation catastrophique, explique Max Liboiron. La pêche commerciale est une des principales sources de déchets synthétiques dans la mer, avec ses filets généralement fabriqués en nylon. À la différence des filets traditionnels en fibres végétales, les matières synthétiques des filets modernes ne se dégradent pas rapidement et restent présentes dans les eaux pendant des siècles. Max Liboiron estime qu’il faudrait de nouvelles lois pour imposer des pratiques plus
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À LA UNE
ne souhaite pas reproduire. Au contraire, les militants-chercheurs du CLEAR collaborent avec les pêcheurs locaux. Les analyses de micro plastiques se font donc sur les poissons capturés pour la consommation. «Nos travaux ne portent pas sur un échantillon aléatoire, mais bien sur le poisson consommé par la population de la région.» Une autre particularité du travail de l’équipe de Max Liboiron est de former des personnes extérieures au monde de la re«Ce type de science cherche à prélever des échantillons de micro citoyenne est très bien acplastiques dans les viscères des poissons. Ces personnes acquièrent ainsi la capacité à cueilli, y compris par les déterminer par elles-mêmes le degré de contacommunautés de pêcheurs mination du poisson par les microplastiques. Autre exemple de recherche militante, les plutôt conservatrices de instruments d’analyses à construire soi-même, Terre-Neuve.» développés par le CLEAR. «Les appareils classiques coûtent 35 000 dollars canadiens, et il faut un bateau spécial pour les utiliser», commente Max Liboiron. Avec son équipe, elle a développé un appareil fait de bouteilles en plastique, de chaussettes pour bébés et de pinces de métal, qui permet de prélever des échan tillons de microplastique mais ne coûte que 12 dollars canadiens (9 francs suisses). Les consignes de fabrication et la méthodologie de durables à l’industrie: «Nous devons complète- prélèvement sont partagées sur Internet: «Nous voulons que chacun puisse contrôler la ment reconsidérer notre manière de gérer les pollution environnementale. Le diplôme univerressources.» sitaire n’est pas une nécessité.» La chercheuse constate que ce type de «science citoyenne» Pour une science féministe et est très bien accueilli, y compris par les compostcoloniale munautés de pêcheurs plutôt conservatrices: Le laboratoire CLEAR occupe aujourd’hui vingt-cinq personnes: doctorants, étudiants, «Les pêcheurs apprécient notre présence, la experts, citoyens sans formation particulière… collaboration est bonne, et nous ne sommes pas «Classiquement, les équipes de recherche perçus comme des gens qui ne s’intéressent sont marquées par des hiérarchies fortes et di- qu’à leur propre projet de recherche.» La militante constate aussi que «les pêcheurs ne se rigées par un homme blanc d’un certain âge. soucient pas de savoir si notre travail est fémiAlors que chez nous, chaque personne a le même droit à la parole.» Pour Max Liboiron, ce niste, postcolonial ou n’importe quoi d’autre…» Samuel Schlaefli a fait des études de journamode d’organisation participe d’une «science lisme, de sociologie et de sciences culturelles. féministe et postcoloniale», qui interpelle les structures traditionnelles du pouvoir. «La visée Il travaille aujourd’hui comme journaliste indépendant et rédacteur pour divers magazines. du changement social est inhérente à notre Il écrit sur la durabilité, le changement climadémarche, déclare la chercheuse. Davantage que les résultats scientifiques en tant que tels, tique et les conséquences de la mondialisation, de préférence sous la forme de reportages c’est notre manière de faire de la recherche qui compte pour faire avancer le changement.» lors de voyages. www.samuelschlaefli.ch L’analyse classique des microplastiques dans les poissons implique en général que Sur www.greenpeace.ch/fr/greenpeacemagazine, vous trouverez deux autres portraits l’animal soit capturé, puis tué en vue du projet de personnes engagées qui donnent corps de recherche. Pour Max Liboiron, il s’agit là au changement. d’une pratique colonialiste que son laboratoire Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
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REPORTAGE PHOTOGRAPHIQUE
PAR INGA LAAS
Un des leurs Des enfants chinois couverts de charbon; un travailleur tenant dans ses mains des fruits contaminés; des cratères qui, telles les cicatrices de la petite vérole, défigurent une plaine jadis fertile; le ciel de la Chine obscurci par les fumées des usines. Nous connaissons tous ces images. Mais Lu Guang est le seul à nous faire voir cette réalité de si près.
Chaque année, quelque 260 millions de jeans quittent les usines pour les États-Unis, la Russie et l’Union européenne. Des pierres et des produits chimiques dangereux sont utilisés pour le délavage. Un ouvrier récupère les pierres dans les eaux usées pour les réutiliser. Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
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REPORTAGE PHOTOGRAPHIQUE
Lu Guang, photographe de Greenpeace, a remporté en 2015 le troisième World Press Photo Award avec son projet de longue haleine intitulé «Développement et pollution». Ce projet illustre, mieux que des chiffres ne sauraient le faire, comment la Chine est en train de devenir la deuxième plus grande puissance économique mondiale. Ses photos montrent un pays qui produit 67% de son énergie à partir du charbon. Ce dernier est responsable de plus de la moitié des émissions de CO2 enregistrées ces dix dernières années dans le monde, et il n’est pas rare que les concentrations de particules fines dans les villes soient seize fois supérieures aux valeurs limites autorisées par l’Organisation mondiale de la santé. Souvent, on n’y voit pas à 500 mètres, Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
un phénomène que la presse a surnommé l’«Airmageddon». Dans un pays où le contrôle politique est omniprésent, il faut des êtres comme Lu Guang pour témoigner de la réalité et l’immortaliser, afin que personne ne puisse la contester. Lu Guang est né en pleine Révolution culturelle, dans la Chine totalitaire et inflexible de Mao, où nul n’osait jeter un regard hors des frontières. À 19 ans, il tient pour la première fois un appareil photo dans ses mains. Sa grande passion était née. Il faudra encore plus de dix ans pour que cet ouvrier réussisse à se mettre à son compte et puisse, à côté de son travail, fréquenter l’Académie des beaux-arts de l’Université Tsinghua, à Pékin.
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Depuis, Lu Guang conçoit l’appareil photo comme le passeport qui lui permet d’accéder à la réalité. Il considère qu’il est de son devoir de «photographier la vérité et de la rendre publique, afin de transformer les conditions de vie des gens ». C’est une des choses les plus audacieuses que l’on puisse faire en Chine. «Ils voudraient m’arrêter et m’empêcher de publier mes photos, poursuit Lu Guang, mais jusqu’à présent, il ne m’est encore rien arrivé. Alors je continue.» Nul autre que Lu Guang, l’ancien ouvrier d’usine – l’un des leurs – n’aurait pu documenter avec une telle force la souffrance, le dé sespoir insondable de ces femmes et de ces hommes devant la destruction de leur pays. Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
La Chine a pris un certain nombre de mesures pour atteindre ses objectifs. «Parmi les plus efficaces, il y a les normes contraignantes pour les émissions des centrales au charbon et la réduction du volume de charbon consommé. C’est quelque chose que l’on peut vérifier par satellite: les améliorations de la qualité de l’air les plus notables ont eu lieu dans les régions qui concentrent un grand nombre de centrales au charbon. En Inde, on constate la tendance inverse: les émissions augmentent dans les zones qui comptent un grand nombre de centrales.» (Lauri Myllyvirta, qui travaille à Pékin pour la campagne de Greenpeace en faveur de la protection de l’air et des énergies renouvelables, cité par The Times of India, 13.11.2017)
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REPORTAGE PHOTOGRAPHIQUE
En haut: Mongolie-Intérieure, 2012. Pour maintenir l’illusion de pâturages, le gouvernement local a fait installer ces sculptures d’animaux. En réalité, les prairies de Huolinguole City ont été tellement polluées par l’exploitation du charbon et l’industrie chimique qu’aucune vache ou aucun mouton ne peut plus y paître.
Le nouveau projet de Lu Guang traite de la destruction de l’environnement et de la sécurité alimentaire. Dès 2010, Lu Guang s’était rendu dans la province du Hunan, documentant les conséquences de la dégradation générale due à l’exploitation minière et aux conglomérats industriels. Depuis, le niveau de pollution n’a cessé d’augmenter. Lu Guang aimerait retourner dans cette région pour réaliser une nouvelle série de photos. Il compte ainsi démontrer la relation directe entre les sols pollués et un approvisionnement alimentaire toujours plus précaire en Chine. Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
Ci-contre: le petit Wang Haoxuan, âgé de 2 ans, et sa mère vivent à environ 70 mètres d’une aciérie. Le bruit, la fumée et la poussière ont fortement altéré leur qualité de vie. L’enfant a déjà attrapé deux fois la bronchite et une pneumonie. Pour rester en bonne santé, la famille est obligée de maintenir fermées toutes les portes et les fenêtres de la maison.
Lu Guang, né en 1961, a grandi à Yongkang, dans la province du Zhejiang. Il est connu pour les vastes projets documentaires qu’il réalise dans son pays. Ses photos ont été publiées dans le National Geographic, le Guardian et par Greenpeace. Aujourd’hui, il vit et travaille à Pékin.
© ZVG
P. 22/23: Mongolie-Intérieure, 2012. Des centaines de cratères béants, d’un à trois mètres de profondeur, parsèment la prairie de Hulunbuir. Le drainage de l’eau nécessaire à l’extraction du charbon entraîne des effondrements de terrain. C’est l’une des régions les plus fortement touchées de toute la Chine.
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ARRIÈRE-PLAN
PAR ROMANO PAGANINI
© CAMI LO TO RO
Célébrer, danser, et au diable les idéologies! Comment une nouvelle forme de participation politique fait bouger les choses en Colombie
Les Colombiens luttent contre le pillage de leurs ressources: une participante à la Marcha Carnaval de cet été à Ibagué, qui a réuni un cinquième de la population.
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Personne ne les attendait et, soudain, ils étaient là, battant du tambour au milieu de la fête folklorique annuelle. Avec leurs vingt tambores de resistencia, les étudiants et les militants d’Ibagué, une ville moyenne située au sud-ouest de Bogotá, se sont frayé un passage jusqu’au premier rang du cortège. Il faut dire que le char no 1 n’appartenait pas à n’importe quel club de gymnastique; il était financé par Anglogold Ashanti. Cette société minière sud-africaine, une des plus grandes de la planète, s’est installée dans la région à la fin de l’an 2000, lorsqu’elle a découvert que le sol aux alentours d’Ibagué recelait les plus importantes réserves d’or d’Amérique latine. Tandis que retentissaient les roulements de tambours, Jaime Tocora et ses compañeros du comité de l’environnement distribuaient des prospectus et expliquaient au public ébahi le contexte dans lequel le char no 1 avait été créé. «À la fin, les gens ont fait la fête avec nous et copieusement hué le char d’Ashanti.» C’était le début de la Marcha Carnaval.
de la droite se sont mis au tambour. Plus de 100 000 personnes ont participé à la dernière Marcha Carnaval, en juin dernier, soit un cinquième de la population d’Ibagué!
«La politique peut procurer du plaisir» Ce mouvement qui a commencé à Ibagué, il y a dix ans, s’est répandu dans toute la Colombie. Dans trente-cinq villes et villages, la Marcha Carnaval montre à quoi peut ressembler une participation citoyenne. «Nous voulons toucher les gens qui ne font plus confiance depuis longtemps au processus politique», déclare Paula de las Estrellas, qui participe à la Marcha dans la ville voisine d’Armenia. C’est notamment le cas des jeunes générations qui, aujourd’hui, sont confrontées à une réalité souvent sans issue. «Nous voulons leur montrer que, vécue autrement, la politique peut aussi procurer du plaisir et motiver.» Les groupes de la Marcha s’entraident dans tout le pays. Il y a quelques mois, alors qu’une votation populaire sur l’exploitation minière avait lieu à Pijao, petit village proche d’Armenia, le groupe a non seulement informé des conséquences de l’industrie miDanser au lieu de se révolter En Colombie, les gens manifestent souvent: nière dans les écoles et chez les habitants, mais contre des réformes de santé injustes, contre il a aussi proposé pour la Marcha qu’il avait organisée des dizaines de tambours qui ont défilé des conditions de travail inhumaines, contre l’exploitation de la nature, etc. Compte tenu de dans les ruelles étroites. «L’exploitation minière nous a socialement soudés, déclare son histoire, la resistencia fait partie de la vie Angélica Gomez, originaire d’Armenia. La Marquotidienne en Amérique latine. «Or, bien que cha est un réseau humain qui répond à l’appel l’on ne puisse ignorer cette culture politique, explique Jaime Tocora, force est de reconnaître de la Terre mère et nous rassemble autour que les gens sont fatigués de résister.» Il fallait d’idées communes, même si nos modes de donc chercher une autre forme de participation pensée divergent.» politique. Les discussions menées avec des représentants syndicaux, des organisations Romano Paganini est journaliste indépendant, d’indigènes et de paysans, des étudiants – tous maçon spécialisé dans la construction en opposés au mégaprojet minier – ont fini par pisé et jardinier. Il vit quelque part entre l’Atdégager un dénominateur commun: la musique, lantique et le Pacifique, et tente d’offrir une plateforme à celles et ceux que les massla danse et la fête. «La Marcha ne se focalise pas sur la surexploitation des ressources médias dédaignent. naturelles, explique Tocora; elle symbolise la joie, le plaisir et la vie.» Les opposants à l’exploitation minière ne sortent plus dans la rue, comme autrefois, cagoulés et armés de pierres. Les Ibagueños se peignent désormais le visage et le corps de couleurs vives, apportent leurs instruments, se déguisent et chantent à gorge déployée. Ils transforment ainsi leur propre colère et leur sentiment d’impuissance en une expérience de solidarité qui fait fi des barrières idéologiques et partisanes. Même les représentants Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
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TÉMOIGNAGES
Un engagement passionné Des collaborateurs de Greenpeace expliquent ce qui les motive à s’engager pour l’environnement dans leur travail et leur temps libre.
«Greenpeace incite les gens, non seulement à parler davantage de la protection de l’environnement, mais aussi à agir. Quelle chance de pouvoir apporter sa contribution!» Hina Strüver, Visual Communication Manager, Greenpeace Suisse
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«Parce que je crois à l’avenir!» Pete Willcox, capitaine du Rainbow Warrior, Greenpeace International, Amsterdam
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«Militante des droits humains et employée d’une ONG, j’ai toujours admiré le travail de Greenpeace. Les opérations audacieuses de ses militants sont particu lièrement inspirantes. Collaborer au sein de cette or ganisation environnementale active à l’échelle mondiale est le meilleur moyen de concilier mon engagement de végétalienne et mon activité professionnelle, et de contribuer à un avenir plus vert.» M. Cecilia Calello, responsable de la campagne pour le climat et l’énergie, Greenpeace International, Amsterdam
«Pour donner, avec des gens qui partagent mes idées, un visage à Greenpeace, je n’ai pas peur de mouiller mes chaussures!» Gian-Marco, étudiant en électronique à l’EPFZ et dialogueur de Greenpeace Suisse
«Pourquoi je travaille chez Greenpeace? Pour moi, un proverbe y répond: ‹Trouve un travail que tu aimes, et tu ne travailleras jamais.› Greenpeace, c’est comme un grand huit: il y a des hauts et des bas. C’est à la fois du travail et du temps libre; une activité saine, mais aussi complètement dingue. Même si ça peut sembler banal, je suis ici parce que j’aimerais pouvoir dire plus tard à mes enfants que j’en ai fait partie pour leur permettre un avenir dans un monde meilleur.» «Je travaille chez GreenAbigail Lois P. Aguilar, peace parce que je veux par- responsable de campagne, ticiper au changement au Greenpeace Philippines lieu de rester à attendre que les choses changent d’ellesmêmes. J’ai deux enfants et, de plus en plus, je sens la nécessité de transformer durablement notre société.» Elvira Jiménez Navarro, responsable de la campagne pour les océans, Greenpeace Espagne
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«Avec ses campagnes absolument uniques, Greenpeace est capable de provoquer des changements radicaux.» Steff Kerkhof, New Media Fundraiser, Greenpeace Suisse
«Je suis chez Greenpeace parce que notre coopération internationale nous permet de transformer tant de choses! L’union fait la force.» Marco Pfister, chargé de campagne, Greenpeace Suisse
CAMPAGNES
© JOS U É BE RTO L INO/G R EENPEAC E
Forêts Un succès: la plainte contre Greenpeace rejetée Un tribunal américain a rejeté la plainte déposée par Resolute contre Greenpeace: «Les accusés ont exposé leurs opinions et leurs points de vue, exerçant ainsi leurs droits démocratiques.» C’est par cette justification que le tribunal fédéral de San Francisco a rejeté, le 17 octobre 2017, la plainte du grand groupe forestier canadien Resolute contre Greenpeace International, Greenpeace USA et l’ONG Stand.earth ainsi que cinq collaborateurs.
© KRI STI AN BUUS/G RE E N P E ACE
Pollution atmosphérique En finir avec le diesel L’oxyde d’azote et les poussières fines dans les gaz d’échappement des moteurs diesel restent un sérieux problème. Des tests commandés par Greenpeace montrent que la Golf de Volkswagen rejette presque trois fois plus de polluants que le prétend le constructeur. La banderole de protestation montre une fillette de 2 ans, symbolisant tous les enfants atteints par la pollution atmosphérique. Ce navire long de 148 mètres a pour cargaison des véhicules diesel de VW.
© TI NUS ME IE R
Projection En finir avec le charbon Devant la centrale au lignite de Neurath en Allemagne, des militants de Greenpeace ont manifesté, avec des personnes directement concernées de la zone Pacifique, pour une plus grande justice sociale dans la lutte contre le réchauffement planétaire. Ils ont projeté l’inscription lumineuse «Le charbon détruit notre avenir» sur les tours de refroidissement ainsi que des portraits de personnes exigeant des pays industriels comme l’Allemagne un engagement accru en matière de protection climatique.
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© N I CK COBBI NG /G R EENPEAC E
Justice climatique Aînées pour la protection du climat sur l’Arctic Sunrise Le navire de Greenpeace Arctic Sunrise a jeté l’ancre en Norvège au large des îles Lofoten. Les coprésidentes des Aînées pour la protection du climat, Anne Mahrer et Rosmarie Wydler-Wälti, se trouvaient à bord. Elles y ont rencontré des militants du monde entier qui s’engagent eux aussi pour une plus grande justice climatique. Greenpeace a porté plainte contre l’État norvégien, qui a octroyé de nouvelles licences d’exploitation du pétrole dans l’Arctique, ce qui est incompatible avec l’Accord de Paris sur le climat.
© BE N TE STACH OWSKE /G RE E N P E ACE
Plastique Conférence de l’ONU sur la protection des océans Les océans se transforment en de gigantesques décharges de plastique. Les Nations Unies ont donc invité les pays membres à une conférence à Malte. Quelque 900 organisations non gouvernementales, dont Greenpeace, se sont associées au mouvement Break Free From Plastic. Au moyen d’un dragon crachant du plastique devant le bâtiment de la conférence à Malte, elles ont exigé un avenir sans déchets plastiques.
© NI CO L A S FOJT U/GRE ENP EAC E
Forêt boréale Hodler, mouchoirs Tempo et protection climatique Des militants de Greenpeace ont réalisé sur la place de la Cathédrale à Bâle une gigantesque image en sciure de bois représentant le célèbre bûcheron de Ferdinand Hodler. Les protecteurs de l’environnement ont ensuite dévoilé leur message: Tempo: Stop wiping away forests. Avec cette action, ils exigent qu’Essity, le fabricant des produits Tempo, cesse d’utiliser des matières premières tirées des forêts boréales.
MOTS FLÉCHÉS ÉCOLOS
À gagner: cinq fois un mouchoir en tissu élégant
Espèce de bovin menacée d’extinction
Lac de Finlande Cri d’arène
En cet endroit précis
Séculier Région désertique d’Israël
Repas du soir
Bits par pouce
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Sigle informatique Organisme de l’ONU
Moi en latin
11 Ville de Pologne
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8 Objectif à focale variable
Unité monétaire du Japon
Agence de presse Préfixe: huit
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Au tennis Écrivant anglais Ville du Nevada
Écueil Ville du Canada (Québec)
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Symbole de l’erbium
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Ville dans le Hainaut
Symbole du césium Poutre Ancienne capitale du Brésil
22 Classement du courrier
Symbole chimque du tantale
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Suit l’énumération
Attirance passagère
Rivière allemande, affluent du Rhin
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Poil qui garnit les paupières Plomb
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Fleuve d’Irlande Financier écossais
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Fleuve d’Italie
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Entreprise Palmipède forestière Jeu de dont la cartes avec un joker plainte contre Greenpeace a été rejetée 2
Navire de Greenpeace Localité ayant effectué du une tournée contre Vaucluse le plastique 2017
21e lettre grecque
†
16 Prénom Point masculin de allemand broderie
Quel est le plus grand (95%) stock de carbone du monde?
Il sert à la préparation d’une teinture
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Pronom des deux genres
Lauréat du Prix Nobel 2017
Fabricant suédois de papier jetable
Figure libre du patinage
Serpent
Rire soudain
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Ville du Japon (Honshu) Chiffre
Organisme
© NICOLAS FOJTU
Ces cinq mouchoirs cousus main exclusifs symbolisent la protection des forêts boréales, qui sont aujourd’hui déboisées pour la production de mouchoirs en papier. Envoyez la solution jusqu’au 31.1.2018 par courriel à redaction@greenpeace.ch ou par voie postale à Greenpeace Suisse, rédaction magazine, mots fléchés écolos, case postale 9320, 8036 Zurich. La voie juridique est exclue.
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Cri poussé quand on se fait mal
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MENTIONS LÉGALES GREENPEACE MEMBER 4 / 2 017 Éditeur / adresse de la rédaction Greenpeace Suisse Badenerstrasse 171 Case postale 9320 8036 Zurich Téléphone 044 447 41 41 redaction@greenpeace.ch www.greenpeace.ch
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Équipe de rédaction: Tanja Keller (responsable), Hina Struever (rédaction photographique), Barbara Lukesch (rédaction) Correction / relecture: Text Control, Marc Rüegger Auteurs: Stefan Indermühle, Inga Laas, Romano Paganini, Bernhard Pötter, Samuel Schlaefli Photos: Lu Guang
Magazine Greenpeace N0 4 — 2017
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Maquette: Hubertus Design Impression: Stämpfli AG, Berne Papier couverture et intérieur: 100% recyclé Tirage: a 82’100, f 16’300 Parution: quatre fois par année Le magazine Greenpeace est adressé à tous les adhérents (cotisation an-
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nuelle à partir de 72 francs). Il peut refléter des opinions qui divergent des positions officielles de Greenpeace. Votre adresse est-elle encore correcte? Prévoyez-vous un déménagement? Prière d’annoncer les changements par courriel à suisse@greenpeace.org ou par téléphone au 044 447 41 71.
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Versamento Girata
Famille
Motif de paiement (merci de l’indiquer en cas de versement en ligne): Mag178
Oui, j’offre à Greenpeace un don de: CHF 50.− CHF 70.− CHF 100.−
Einzahlung Giro
ES-Grundfilm für Rotdruck, Querformat, Standardausführung POST mit erweitertem «Zahlungszweckfeld», Millimeter-Zuschnitt Film de base BV pour l’impression en rouge, format horizontal, modèle standard de LA POSTE avec le champ «Motif versement» agrandi, coupe en millimètres Film di base PV per la stampa in rosso, formato orizzontale, esecuzione standard POSTA con il campo «Motivo versamento» allargato, taglio in millimetri
Empfangsschein / Récépissé / Ricevuta
441.02 12.2007 PF
Schwarz PANTONE Warm red U
Stämpfli AG 12.2017 441.02
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AZB 8036 Zurich
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«En tant que militante de Greenpeace, je m’engage de manière non violente pour la protection de la nature et de l’environnement. Si mon engagement est possible, c’est grâce aux nombreuses personnes qui offrent un soutien financier régulier à Greenpeace.» Andrea Benner, militante S’engager tout au long de la vie, et même au-delà, pour un avenir éco logique, c’est possible en pensant à Greenpeace lorsque l’on rédige son testament. Pour commander le guide gratuit sur les testaments: claudia.steiger@greenpeace.org ou www.greenpeace.ch/legs.