Greenpeace Magazine 02/20

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Greenpeace Member no  02  / 20

Engagement

Contre les pratiques irresponsables p. 10

Debout!

Débat

Se donner les ­moyens d’agir p. 31

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La Suisse va probablement voter sur l’initiative «multinationales responsables» d’ici la fin de l’année. Chaque vote compte!

Scanner le code QR pour accéder à l’initiative

Éditorial

Il est vrai qu’à l’heure où un virus ­paralyse tout le pays, il n’est pas si facile de se dire: debout! Sauf bien sûr pour le travail, qui sera souvent du télétravail. Par contre, il n’est plus possible pour le moment de descendre dans la rue pour une cause. Si la situation actuelle nous montre une chose, c’est bien l’importance de la solidarité. Au lieu de sortir pour nous engager en faveur d’autrui, nous restons maintenant à la maison, dans l’intérêt de toutes et de tous. Il y a un aspect positif à cette pause forcée: elle est aussi l’occasion de reprendre des forces. Le jour où la situation se sera normalisée, il sera temps de nous lever tous ensemble pour protester: contre les entreprises irresponsables (p. 10), contre l’industrie du tabac qui ne se soucie pas de ses mégots (p. 8) ou encore contre les banques qui continuent d’attiser la crise climatique (p. 31). Il sera alors temps d’agir, avec plus de force et de dynamisme que jamais. Nous vous souhaitons une lecture stimulante. Votre rédaction

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Descendre dans la rue

Sommaire

Essai Mobilisations de populations en colère: quelles conséquences pour la protection du climat?

p. 12

Rétrospective

International

Le WEF pris en défaut

L’enfer du feu

p. 9

p. 26

IMPRESSUM GREENPEACE MEMBER 2/ 2020 Éditeur/adresse de la rédaction: Greenpeace Suisse Badenerstrasse 171 Case postale 9320, 8036 Zurich Téléphone 044 447 41 41 redaction@greenpeace.ch www.greenpeace.ch Équipe de rédaction: Danielle Müller (responsable), Manù Hophan (iconographie) Correction/relecture: Marc Rüegger, Danielle Lerch Süess Traduction en français: Karin Vogt Auteures et auteurs: Carlos Hanimann, Christian Schmidt, Danielle Müller Photos: Peter van Agtmael, Stephen Dupont, Nicola Marfisi, Cristina de Middel, Pablo E. Piovano, Isabel Truniger, Anja Wille Schori Illustrations: Andy Fischli, Jörn Kaspuhl Couverture: Raffinerie Graphisme: Raffinerie Lithographie: Marjeta Morinc Impression: Stämpfli AG, Berne

Papier couverture et intérieur: 100 % recyclé Tirage: 80 000 en allemand, 14 000 en français Parution: quatre fois par année Le magazine Greenpeace est adressé à tous les adhérents (cotisation annuelle à partir de 84 francs). Il peut refléter des opinions qui divergent des positions officielles de Greenpeace. Avez-vous changé d’adresse? Prévoyez-vous un déménagement? Prière de nous annoncer les changements: suisse@greenpeace.org ou 044 447 41 71. Dons: compte postal 80-6222-8 Dons en ligne: www.greenpeace.ch/dons Dons par SMS: envoyer GP et le montant en francs au 488 (par exemple, pour donner 10 francs: «GP 10»)

Action

p. 4

Progrès

p. 6

Des paroles aux actes

p. 7

Rétrospective

p. 9

Engagement

p. 10

Faits et chiffres

p. 11

Essai

p. 12

Décryptage

p. 25

International

p. 26

Recette

p. 30

Débat

p. 31

Mes volontés écologiques

p. 33

Énigme

p. 34

Le mot de la fin

p. 35


Action

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Recensement des manchots La plus grande colonie de manchots à jugulaire vit sur l’île de l’Éléphant, en Antarctique. Pour mieux comprendre l’impact du changement climatique sur la population de manchots, des chercheurs*euses de la Stony Brook University, de l’Université Northeastern et de Greenpeace ont effectué un comptage des manchots dans le cadre de l’expédition du pôle Nord au pôle Sud.

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Photo: © Christian Åslund / Greenpeace

Île de l’Éléphant, Antarctique, 14 janvier 2020.


Financements ­annulés

Progrès

En octobre dernier, la compagnie espagnole d’électricité ­Endesa annonçait la fermeture anticipée de ses deux dernières centrales au charbon. Le plan stratégique de la société précise maintenant que l’arrêt se fera en 2022. Une étape importante pour le climat, car Endesa était jusqu’à présent le plus grand émetteur de CO2 du pays. ¡Felicitaciones!

Deux bonnes nouvelles des Pays-Bas: premièrement, l’assureur néerlandais Aegon a décidé de réduire ses investissements dans le secteur du charbon. Les 104 entreprises dorénavant exclues bénéficiaient d’investissements à hauteur de 140 milliards d’euros. Deuxièmement, le Sénat néerlandais a adopté une loi interdisant le charbon pour la production d’électricité, malgré les menaces de poursuites judiciaires des compagnies énergétiques RWE et Uniper. Gefeliciteerd!

Photo: © Marten van Dijl / Greenpeace

Charbon banni

Gaz coupé La société Swedegas déboutée: pour des raisons de protection du climat, le Gouvernement suédois lui refuse l’autorisation d’élargir ses activités dans le domaine du gaz naturel liquéfié. Swedegas voulait connecter son terminal gazier de Göteborg au réseau de distribution principal. Un succès auquel la campagne de Greenpeace Suède a largement contribué. Grattis!

Photo: © Jana Eriksson / Greenpeace

Centrales ­ ébranchées d

Photo: © Pedro Armestre / Greenpeace

La Banque européenne d’investissement, qui est l’un des principaux fournisseurs de crédits au monde, cessera de financer les projets de combustibles fossiles d’ici la fin de 2021. Cette décision des gouvernements européens envoie un signal fort au secteur de l’énergie et à la communauté financière mondiale. L’ère des combustibles fossiles touche à sa fin. Gratulation!


«Le plastique, c’est comme une drogue d’entrée»

Des paroles aux actes

Judith Wernli, ­ nimatrice radio à a SRF 3 et membre du comité du Projet plastique de Baden

Texte: Danielle Müller, Greenpeace Suisse

Tout a commencé il y a deux ans. Dans un magasin, Judith Wernli découvre quatre carottes épluchées, emballées dans une barquette en carton elle-même en­ veloppée dans un film plastique. Au vu de cette surabondance d’emballages inutiles, elle pique une colère. Mais s’énerver sans rien faire, ce n’est pas son genre. C’est ainsi qu’elle décide d’agir. Depuis, Judith Wernli apporte ses propres récipients au comptoir à fromages de la Migros. Elle transporte les pommes qu’elle achète à la Coop dans son grand sac à dos et évite autant que possible le plastique jetable. Elle a également vendu sa voiture, acheté un abonnement général CFF, et ne part plus en vacances en avion avec sa famille. «Le plastique, c’est

comme une drogue d’entrée, dit cette animatrice radio de 46 ans. C’est un bon moyen pour commencer à sensibiliser les gens aux problèmes environnementaux.» C’est pourquoi elle était partante lorsque l’équipe du «Projet plastique Baden» lui a demandé l’automne dernier de rejoindre le ­projet. L’objectif déclaré était de convaincre la population de Baden de se passer de plastique pendant le mois de mars 2020. Mais le plus important pour le comité d’organisation est de sensibiliser le plus grand nombre de personnes au sujet des plastiques en organisant des soirées d’information, des tables rondes, des ateliers, des e ­ xpositions d’art et d’autres événements. «Il faut repenser notre quotidien», estime Judith Wernli en précisant que c’est particulièrement impor-

tant pour la jeune génération. Son fils Robin, 8 ans, partage d’ailleurs l’élan de sa maman: «Il fait remarquer à ses camarades de classe qu’il n’y a pas besoin de plastique pour emballer un dix-heures», ­dit-elle en riant. Sa classe aborde maintenant le sujet pendant l’enseignement. Et la vague de sensibilisation semble s’étendre au reste de la ville de Baden: «Le projet se propage comme une traînée de poudre. On voit une prise de conscience, qui peut véritablement faire évoluer les choses.»

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Des paroles aux actes

«Plus important que le théorème de Pythagore» Aidez à la collecte des mégots de ­cigarettes

Mevlan Ramadani, ­Sophie Heiniger et Maylynn Schmid (de gauche à droite), membres fondateurs de l’association Stop2drop

Texte: Danielle Müller, Greenpeace Suisse

À 9 heures du matin, les rues sont à moitié vides à Berthoud, dans l’Emmental. La petite ville de 16 500 habitants n’est pas encore très active. Sauf la classe de 10e année de l’école post-obligatoire BVS. Les quinze élèves ont enfilé leur ­gilet jaune néon et se mettent en route. Ils ont déclaré la guerre à l’industrie du tabac. Stop2drop est le nom de l’association que la classe a fondée avec son enseignant Manuel ­Hirschi. L’objectif est de collecter un million de mégots de cigarettes en Suisse et de les renvoyer aux fabricants de cigarettes. Pour chaque mégot collecté, Stop2drop prévoit de faire un don de 1 franc à une organisation environnementale qui œuvre pour la protection des eaux. «Nous avons actuellement plus de

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32 000 mégots, déclare Maylynn, vice-présidente de l’association. Pour arriver à un million, il nous faudra l’aide d’autres écoles en Suisse.» Tous les vendredis, c’est jour de collecte. Les leçons de français et de mathématiques sont remises à plus tard. «Grâce à ce projet, nous apprenons à prendre des responsabilités, explique Mevlan, lui aussi vice-président de Stop2drop. C’est beaucoup plus important que le théorème de Pythagore.» Pas besoin d’être fort en maths pour savoir pourquoi les gens jettent leurs mégots par terre, et non dans la poubelle la plus proche: «On est paresseux», estime Mevlan. Mais Stop2drop ne met pas toute la responsabilité sur le dos des fumeurs: «Les fabricants devraient indiquer sur les emballages que les mégots ne doivent pas

finir par terre», commente Sophie, responsable de la communication de l’association. «Mais je crains qu’ils ne veuillent pas faire figurer cette information sur les paquets, par crainte de diminuer leurs bénéfices, répond Maylynn. C’est toujours l’argent qui compte.» La classe a bien compris le calcul des fabricants, malgré les quelques ­leçons de mathématiques supprimées.

Illustrations pages 7 et 8: Jörn Kaspuhl travaille principalement au crayon sur papier et ne se sert de l’ordinateur que pour assembler les différents éléments. Il a terminé ses études d’illustrateur à l’Université de Hambourg en 2008. Aujourd’hui, il vit et travaille à Berlin.


Rétrospective

Le WEF pris en défaut

«Committed to improving the state of the world»

Photo: © Greenpeace / Ex-Press / Flurin Bertschinger

Telle est la mission que se donne le Forum économique mondial (WEF). Depuis près de cinquante ans, les leaders économiques et politiques du monde se réunissent chaque année à Davos pour discuter des problèmes de la planète. Alors qu’il se flatte d’être une fondation dédiée à l’amélioration du monde, le WEF est parrainé par de grandes banques comme UBS et Credit Suisse. Depuis la signature de l’accord de Paris sur le climat, ces deux banques et trente et une autres institutions financières ont investi 1,9 mille milliards de dollars dans le financement des combustibles fossiles. Ce n’est pas exactement une contribution à l’amélioration de la situation du monde!

Pour rappeler aux leaders la devise du WEF, des militantes et militants de Greenpeace étaient à nouveau sur place à Davos, pointant la responsabilité du secteur financier en matière de protection du ­climat. «Il faut changer de système. Et il faut prendre des mesures politiques urgentes sur le plan national et international pour rediriger les investissements vers une économie à faible émission de carbone», commente Asti Roesle, responsable de la campagne climat et finances de Greenpeace Suisse.

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Engagement

«Le contenu de l’initiative est une évidence»

Sven Staub est membre d’un comité local de l’initiative pour des multinationales responsables. Une initiative qui mérite notre ­engagement, selon cet étudiant de ­l’Université de Bâle. Entretien. Sven, pourquoi soutiens-tu l’initiative «multinationales responsables»?

On entend souvent parler d’agissements scandaleux de multinationales suisses à l’étranger. Comment peut-on utiliser des pesticides fortement toxiques ou piller les matières premières aux dépens de la population locale? En lisant des articles à ce sujet, je me sentais démuni, car je ne voyais aucun moyen de changer la situation. C’est là qu’intervient l’initiative pour des multinationales responsables.

contre-projet de Karin Keller-Sutter au Parlement réduit ces efforts à néant. La passivité du gouvernement frise le sabotage. C’est extrêmement frustrant. Penses-tu que l’initiative sera acceptée?

Je pense que l’initiative a de très bonnes chances d’être acceptée. D’abord, le contenu de l’initiative est une évidence. Jusqu’à présent, j’ai rencontré peu de personnes qui rejettent l’idée de multinationales responsables. Ensuite, nous avons construit un soutien très large avec nos comités locaux. Nos adversaires injectent beaucoup plus d’argent que nous dans la campagne de votation, mais nous avons un très grand nombre de personnes convaincues et motivées de notre côté. C’est une ressource précieuse, qui peut changer la donne.

Quelles sont les raisons de rejoindre un comité local?

En participant à un comité local, on a le sentiment de pouvoir faire bouger les choses en grand. J’ai rencontré des personnes qui partagent les mêmes idées que moi. Nous avons un objectif commun. Cela crée des liens. Quelle est l’importance de cette initiative pour la Suisse?

La place économique suisse a un passé problématique. La neutralité dont se targue la Suisse sert souvent à masquer une passivité politique. Nous pouvons aujourd’hui nous prononcer sur un choix de société: continuer à laisser les multinationales suisses s’enrichir au détriment des autres ou emprunter une autre voie.

L’opportunisme du Conseil fédéral me dérange beaucoup. Il demande simplement aux multi­ nationales de publier une brochure présentant leurs progrès selon leur bon gré. C’est loin d’être une solution constructive. Le comité d’initiative était prêt à faire certaines concessions pour ­accélérer l’entrée en vigueur de la loi. Le

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La ville minière de La Rinconada, au Pérou, où des milliers de petits prospecteurs creusent pour trouver de l’or dans des conditions déplorables.

Photo: © Maria Eugenia Robles / Greenpeace

À la fin de l’année dernière, le Conseil des États a adopté un contre-projet indirect à l’initiative, que le Conseil fédéral avait esquissé peu avant. Le comité d’initiative se montre très critique face à cette manœuvre. Qu’en penses-tu?


À vous de

Photo: © Jhunior Flores Contreras / Greenpeace

L’initiative pour des multinationales responsables demande que les entreprises suisses soient tenues ­responsables des dommages qu’elles causent à l­’étranger. Greenpeace soutient cette initiative qui devrait être soumise au vote vers la fin de l’année. De nombreuses multinationales ont leur siège en Suisse. Toutes ne respectent pas les droits humains et les normes environnementales dans leurs activités à l’étranger. Glencore contamine des rivières en Colombie et pollue gravement ­l’atmosphère en Zambie. Syngenta vend en Inde des pesticides mortels qui sont interdits depuis longtemps en Suisse. Le raffineur Metalor s’est fourni en or à la mine de La ­Rinconada au Pérou, où la population et l’environnement sont contaminés par le mercure utilisé lors de l’extraction. L’initiative pour des multinationales responsables veut mettre fin à ces pratiques et sanctionner les entreprises pour leurs agissements problématiques à l’étranger. Les multinationales ayant leur siège en Suisse seraient obligées d’examiner les risques de leurs activités sur le plan de l’environnement et des droits humains. Elles seraient aussi responsables des dégâts causés par leurs filiales à l’étranger. Toute entreprise qui cause un dommage aurait à rendre des comptes. Plus nous serons nombreux à soutenir l’initiative, plus elle aura de chances d’être acceptée. Rejoignez un ­comité local et participez à la campagne pour les droits ­humains et environnementaux! Commandez un drapeau à suspendre à la fenêtre! Ou visionnez le nouveau documentaire Multinationales: l’enquête, à commander en DVD. Le film rend compte des activités problématiques des multi­ nationales suisses à l’étranger. Pour en savoir plus: initiative-­ multinationales.ch

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Les sols et les eaux sont fortement contaminés par le mercure, comme le révèlent notamment les analyses de laboratoire de Greenpeace.

5 ans Une mine de Glencore est située au milieu de la ville péruvienne de Cerro de Pasco. Les dommages environnementaux sont considérables. Plomb, arsenic et autres métaux lourds polluent l’air, le sol et l’eau. Tout est contaminé. Les 70 000 habitantes et habitants perdent cinq ans d’espérance de vie par rapport aux autres villes péruviennes.

8 millions de francs Levée de boucliers chez le lobby des multinationales, qui débloque 8 millions de francs pour mener campagne contre l’initiative «multinationales responsables». Le comité d’initiative n’a pas ces moyens, mais il peut compter sur autre chose: des milliers de personnes qui luttent pour plus de justice.

30 000 drapeaux Les drapeaux orange de l’initiative pour la responsabilité des entreprises témoignent du large soutien de la population à cette initiative. On compte déjà plus de 30 000 drapeaux accrochés aux balcons, aux fenêtres et dans les jardins en Suisse!

350 comités locaux Des milliers de personnes s’engagent dans plus de 350 comités locaux à travers la Suisse. Ces comités organisent des événements et des stands pour informer la population locale sur les objectifs de l’initiative.

170 entrepreneurs*euses Le comité Économie pour des entreprises responsables réunit plus 170 entrepreneurs*euses qui soutiennent l’initiative «multinationales responsables». Leur objectif? Disposer de règles claires pour empêcher que des acteurs peu scrupuleux obtiennent des avantages concurrentiels grâce à leurs activités ­irresponsables.

Source: Initiative multinationales responsables


© Pablo E. Piovano

Le 22 novembre 2019, plus de cinquante femmes masquées défilent en silence sur la Plaza de la Dignidad, à Santiago du Chili, pour demander une enquête sur la mort de la photographe et militante Albertina Martínez Burgos, retrouvée assassinée chez elle la veille au soir.


DESCENDRE

© Keystone/Magnum Photos/Peter van Agtmael

Essai

Des manifestant*es devant l’entrée bloquée du périphérique de Beyrouth, l’un des points de rassemblement du soulèvement, Liban 2019.

DANS LA RUE


Que ce soit en France, au Brésil ou au Chili, des mesures politiques même ­limitées peuvent déclencher des ­explosions populaires. Quelles leçons en tirer pour la protection du climat? Texte: Carlos Hanimann

Lors d’une douce soirée de juin, sous un ciel gris et nuageux, nous n’avions pas de projets, à part sortir et nous laisser surprendre par ce qui pourrait nous arriver.

Nous n’avions aucune idée du soulèvement populaire qui se préparait. Ce vendredi soir de juin 2013, quelque deux mille personnes se ­réunissent sur une petite place de l’ouest de la métropole de São Paulo pour manifester contre la hausse des prix du bus. Le cortège bloque une des principales artères de circulation. Le rassemblement subit des violences policières. Quelques jours plus tard, des milliers de personnes protesteront, et seront à nouveau maltraitées par la police. Les manifestations se poursuivent, à chaque fois ­réprimées brutalement. Jusqu’au soir où nous nous retrouvons dans une foule immense. Des centaines de milliers de personnes descendent dans les rues de la ville, et des millions de personnes à travers le pays. Au début, les manifestants réclamaient la gratuité pour les transports publics (ou du moins un prix abordable). Mais les ­revendications se multiplient: contre la Coupe du monde et la FIFA, contre la corruption, pour une réduction de la majorité pénale, pour le retour de la dictature militaire … Les revendications de gauche, issues des classes populaires, sont rapidement supplantées par des visées de droite. Cinq ans plus tard, le Gouvernement brésilien de gauche est déposé, et son parti battu aux élections. Jair Bolsonaro, le nouveau président, est un misogyne d’extrême droite qui fait piller et détruire l’Amazonie, l’un des pires ennemis du climat de l’histoire de la planète. Alors que tout avait commencé par une légère augmen­ tation des prix de transport.

Les résistances ne sortent pas de nulle part et sont ­l’expression des inégalités sociales. 14

Lorsque des interdictions, des augmentations de prix ou des coupes budgétaires frappent les classes économiquement et socialement


© Pablo E. Piovano © Keystone/Magnum Photos/Peter van Agtmael

Slogans et actions spontanées du mouvement au Chili se reflètent sur les murs et les statues, par exemple sur le buste d’Abdón Cifuentes, l’un des principaux politiciens catholiques conservateurs du XIXe siècle.

Place des Martyrs à Beyrouth, 2019.

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© Pablo E. Piovano

Novembre 2019, Santiago du Chili: la rue débouche sur la Plaza Italia, rebaptisée Plaza de la Dignidad par les manifestant*es, un haut lieu des protestations.

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© Pablo E. Piovano

Lors d’une manifestation à Santiago du Chili, octobre 2019.

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défavorisées, il arrive que de petits événements soient à l’origine de grands mouvements. Au Brésil en 2013, et ailleurs aujourd’hui. Manifestations massives contre la hausse du prix de l’essence en France ou en Iran, luttes sociales au Chili et dans d’autres pays d’Amérique latine … Les soulèvements se déclinent en de multiples variantes, leurs motifs sont différents, leurs issues aussi. Le point commun de ces grands mouvements de masse est d’avoir été provoqués par des restrictions relativement modestes de la liberté individuelle. Des restrictions minimes si l’on pense aux mesures qui ­seront nécessaires pour résoudre le problème le plus important et le plus urgent de la planète: le réchauffement climatique et les catastrophes et bouleversements sociaux qu’il provoque. Les conflits sociaux se calquent en général sur les fractures sociales existantes: le petit nombre contre les masses, les nantis contre les pauvres. À quoi pourrait ressembler une protection du climat qui se soucie de sa dimension sociale? Qui n’exacerbe pas les inégalités, à petite et à grande échelle? Qui ne frappe pas démesurément la masse des défavorisés en épargnant les riches?

Les trois réponses qui fusent dans tout débat sur le climat: La solution, c’est le progrès technologique! La politique institutionnelle doit résoudre le problème! C’est une question de comportement individuel! Ces trois réponses contiennent toutes une part de vérité. Mais aucune ne suffit à elle seule. Il est vrai que les innovations technologiques apporteront des progrès et que des réformes doivent être lancées par les institutions. Et même si l’action individuelle ne sera pas suffisante pour enrayer le réchauffement climatique, il est certain que nous devons tous revoir radicalement notre mode de vie.

Par où commencer?

Il n’y aura pas de protection du climat sans abandon des énergies fossiles. Pour la Suisse, cela signifie aussi renoncer à financer les projets liés à ces sources d’énergie. Les investissements de la place financière suisse favorisent actuellement un réchauffement climatique de quatre à six degrés. Les banques suisses gèrent plus de 7000 mil­ liards de francs suisses, une énorme masse de capitaux en quête de rendements. Ou peut-être un gigantesque levier pour faire aboutir le change­ment et promouvoir de nouvelles industries? Impossible toutefois d’arrêter les énergies fossiles sans supprimer des emplois, par exemple dans le charbon. Peut-on ­affirmer que les bouleversements seront socialement gérables grâce aux postes créés par les nouvelles technologies? Réalistement, il faut admettre que cela sera insuffisant. Il faudra de vastes

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© Keystone/Magnum Photos/Cristina de Middel

Paris, décembre 2018: Adrien, 20 ans, au chômage, et Loïc, 18 ans, apprenti forgeron, viennent de Lyon. «Pour une fois que la France bouge, nous avons décidé de participer au mouvement.»

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© Keystone/Magnum Photos/Cristina de Middel

Toujours à Paris, en décembre 2018. S., une employée de commerce de 53 ans, et Christophe, un logisticien de 47 ans, viennent de Troyes. S.: «Je suis fatiguée de travailler sans savoir comment joindre les deux bouts. Trop, c’est trop.» Christophe: «Je me bats pour mes parents retraités, et pour mes enfants qui arrivent sur le marché du travail.»

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Š Nicola Marfisi

Le mouvement des sardines en Italie, dĂŠcembre 2019: des milliers de manifestant*es protestent contre la haine et le fascisme sur la place du DĂ´me Ă Milan.

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programmes de reconversion, voire des garanties d’emploi, comme le propose l’auteure ­Naomi Klein.

Mais qui financera les mesures nécessaires? Pour assurer une protection du climat socialement juste, la politique institutionnelle doit prendre les bonnes mesures. Pour les ­socialistes, le financement implique de taxer davantage les milliards gérés par la place financière suisse. Les Verts veulent encadrer la politique des transports et du logement par des taxes d’incitation, à redistribuer à la population pour favoriser les revenus faibles et moyens. Autre exemple plus concret: en Suisse, les transports sont responsables d’un tiers des gaz à effet de serre, dont les deux tiers sont dus au trafic individuel motorisé. La Suisse est à la tête des achats de véhicules tout terrain. Les modèles 4 × 4 représentent la moitié des véhicules de tourisme. Le parti des Verts propose ainsi des taxes plus élevées pour les SUV, aux dépens de gros importateurs et non des revenus des salariés. À l’échelle individuelle, il s’agit de transformer la consommation. Ce sont les riches qui gaspillent le plus de ressources. Leurs constructions sont spacieuses et inefficaces, leurs voitures sont lourdes, ils prennent souvent l’avion et consomment beaucoup.

La Suisse consomme en moyenne un kilo de viande par semaine et par personne Dans L’Avenir de la planète commence dans notre assiette, l’écrivain américain Jonathan Safran Foer analyse de façon lucide le lien entre le changement climatique et l’alimentation. Il ne suffit pas de manger autrement pour préserver la Terre, mais il est im­ possible de sauver la planète sans changer notre alimentation, constate-t-il. Il présente des pages et des pages de chiffres sur le rôle de la viande pour le climat. L’élevage est responsable de 91 % de la déforestation en Amazonie. 60  % des mammifères sont élevés pour être mangés. 59  % des terres disponibles servent à la culture de fourrages. Le bétail est la plus grande source de méthane. Et le méthane est un gaz à effet de serre trente-quatre fois plus puissant que le CO2. Autre aspect passionnant, le livre s’appuie sur des anecdotes historiques pour montrer que renoncer, ce n’est pas forcément se priver et qu’on peut éviter de fragiliser encore plus les plus pauvres. Jonathan Safran Foer estime au contraire que le fait de renoncer à quelque chose peut aussi être une source de libération et l’occasion de renforcer l’esprit de communauté. Son livre est également un guide pour une vie meilleure. L’auteur rappelle que pendant la Seconde Guerre mondiale, la population américaine éteignait les lumières le soir pour

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obscurcir les côtes et le pays afin de se protéger contre les attaques aériennes. Militairement, ce n’était pas très utile, et l’effort demandé était certainement assez lourd au début. Mais comme tout le monde faisait la même chose, l’extinction des lumières le soir est ­devenue un moment fort, symbolisant non pas le renoncement ou la contrainte, mais au contraire l’appartenance et la solidarité. Le sentiment de faire partie d’une communauté qui dépasse la dimension individuelle.

Mouvements

Photographes

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Liban

Italie

France

Chili

En octobre 2019, des manifestations ont lieu à Beyrouth contre des augmentations de taxes, notamment pour les appels téléphoniques WhatsApp ou dans le secteur de l’énergie. Depuis, le mouvement s’est transformé en une lutte contre la corruption de la classe politique.

«6000 sardines contre Salvini», c’est d’abord une flash mob à Bologne le 14 novembre 2019. Le but est de protester contre un rassemblement du parti de droite Lega en vue des élections régionales de 2020. Au lieu des 6000 per­­sonnes attendues, elles seront 15 000 à arborer des sardines bricolées avec tous les matériaux possibles et imaginables. Les semaines suivantes, de nouvelles flash mobs sont organisées à travers le pays.

Les protestations des «gilets jaunes» lancées en 2018 s’opposaient d’abord à la hausse des taxes sur le carburant. Par la suite, le mouvement a formulé plus de quarante revendications, dont l’augmentation du salaire minimum et des retraites ainsi que le rétablissement de l’impôt de solidarité sur la fortune, aboli l’année précédente. Les avis sur les «gilets jaunes» ne sont pas una­nimes, car le mouvement refuse de se distancier des idées de droite.

En réaction à l’augmentation des prix du métro à Santiago du Chili, des milliers de jeunes sautent les barrières dans les stations de métro et vont manifester dans la rue. La population soutient largement les protestations, qui se transforment en mouvement pour une nouvelle constitution et pour des réformes radicales du système économique.

Peter van Agtmael (1981)

Nicola Marfisi (1973)

Cristina de Middel (1975)

Pablo E. Piovano (1981)

Né à Washington, D.C. Son travail aborde notamment les conflits au Moyen-Orient. En 2016, il publie son ouvrage Buzzing at the Sill, qui revient sur ses années comme photographe de guerre en Irak et en Afghanistan, et sur l’expérience déconcertante du retour au pays.

Il se lance dans une carrière de photographe après des études d’ethnologie. Il vit à Milan depuis 2007 et coopère avec divers quotidiens nationaux et internationaux, ainsi qu’avec des agences.

Née à Alicante en Espagne, elle vit et travaille maintenant à Uruapan, au Mexique. Après dix ans de photojournalisme, elle réalise aujourd’hui des travaux conceptuels. Sa série The Afronauts a été exposée dans le monde entier. En 2016, elle remporte le Greenpeace Photo Award.

Après une enfance passée en Argentine, il travaille aujourd’hui à Buenos Aires en tant que photographe indépendant et s’intéresse principalement aux questions sociales et écologiques. En 2017, il publie l’ouvrage The Human Cost of Agrotoxins, qui rend compte de la souffrance humaine causée par les produits agrochimiques en Argentine. Lauréat du Greenpeace Photo Award en 2018.

Auteur: Carlos Hanimann est journaliste et écrivain. Il suit des affaires judiciaires et politiques pour le magazine électronique Republik. En 2019, il publie le livre Caroline H. Die gefährlichste Frau der Schweiz? qui réunit une série d’articles parus dans Republik sur le cas de la «meurtrière du parking» à Zurich.


Le mégaphone

Décryptage

120 décibels

100 % de tradition

Le mot vient du grec «mega-» (grand) et «-phone» (son, voix). Les mégaphones courants produisent une pression acoustique pouvant atteindre 120 décibels, ce qui correspond au bruit d’un marteau-­piqueur. Si les conditions sont bonnes, une voix amplifiée par méga­phone peut porter à plus d’un kilomètre.

C’est aussi une sorte de mégaphone qui sert à la «bénédiction de l’alpage», une tradition dans les régions alpines catholiques de Suisse centrale qui remonte au XVIe siècle. Aujourd’hui encore, l’appel à la prière se fait après la traite du soir, par un entonnoir à lait qui fait retentir cette formule sur les pâturages: «Que Dieu puisse protéger et préserver tout ce qui est sur cet alpage et qui y appartient.»

349 ans Le mégaphone fêtera son 350 e anniversaire l’année prochaine. En 1671, le savant et mathématicien anglais Samuel Morland décrit un précurseur du mégaphone. Il construit une «trompette parlante», d’abord en verre, puis en cuivre. Il fait la démonstration de son dispositif d’amplification au roi Charles II. Celui-ci s’y intéresse pour commander les ­armées et les flottes. À la même époque, le jésuite allemand Athanasius Kircher, lui aussi savant universel, revendique l’invention d’un porte-voix similaire qui lui permet de dire la messe du ­dimanche devant 2000 personnes.

Protester, c’est faire du bruit Le mégaphone est un élément important de l’histoire des mouvements de protestation. Il reste le moyen le plus simple pour amplifier un message et le faire passer au public. À Hong Kong, des étudiants l’utilisaient également pour se transmettre des informations sur la présence policière lors des manifestations.

En 2011, le mouvement Occupy Wall Street a inventé une autre manière de se faire entendre, l’utilisation du mégaphone électrique étant interdite à New York. Avec la méthode du «microphone humain», le groupe autour de l’orateur répète ses paroles, et ainsi de suite. Le message finit par se diffuser par vagues dans la foule entière. En 2013, Bimen Zartar est l’«homme au mégaphone» des manifestations de Gezi, en Turquie. Quelques mois plus tard, il

Sources: John Glassie, Der letzte Mann, der alles wusste, Berlin 2014; Computer-Bild; New York Times; TAZ; The Guardian; Dictionnaire historique de la Suisse

est condamné à une forte amende. Non pas pour avoir guidé les manifestations à Istanbul avec son mégaphone, mais pour un tweet jugé insultant à l’égard du Premier ministre Erdogan. Le téléphone portable de Bimen Zartar était apparemment surveillé. En septembre 2019, Greta Thunberg utilise elle aussi un mégaphone pour s’adresser aux centaines d’enfants et de jeunes qui manifestent devant la Maison Blanche en faveur de la protection du climat.

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Texte: Marco Morgenthaler; photo: Anja Wille Schori


International

L’ENFER DU

FEU

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Cet hiver, les images de l’Australie – pompiers en sueur sous un ciel rouge et cadavres de kangourous victimes des flammes – ont fait le tour du monde. Après l’écho médiatique, quelle est la situation sur place? Entretien avec Jonathan Moylan, responsable de campagne chez Greenpeace Australie. Entretien: Danielle Müller Photos: Stephen Dupont

Jonathan, l’Australie est-elle toujours la proie des flammes? Heureusement, de violentes pluies ont éteint les incendies, à l’exception de quelques feux de tourbe. Mais la pluie cause de nouveaux problèmes. Elle emporte d’épaisses couches de cendres dans les rivières et vers les barrages, provoquant des glissements de terrain et la p ­ rolifération des algues. Cela a provoqué une hécatombe de poissons et une éventuelle contamination de l’eau potable.

Quelle est l’origine des feux de forêt?

Comment as-tu vécu les incendies?

Chaque feu a son propre déclencheur, que ce soit la foudre, la négligence ou autre. Mais le facteur sousjacent de tous les incendies est le changement climatique. Le sud-est de l’Australie, particulièrement touché, est confronté à une grave sécheresse depuis 2017. Avec la chaleur record et la force du vent, le bois sec tombé à terre prend facilement feu et les incendies se propagent rapidement. Il y a même eu jonction de plusieurs brasiers pour former ce qu’on appelle des mégafeux, par exemple autour de ­Sydney, qui était presque totalement encerclé par les flammes.

En novembre, l’air était dangereusement chargé de fumée à Sydney, où travaillent la plupart des employés de Greenpeace Australia Pacific. C’est angoissant d’avoir la gorge emplie de fumée, de respirer avec difficulté pendant des semaines et des mois. Beaucoup se demandaient s’il ne fallait pas se réfugier en lieu sûr. Mais les données sur la qualité de l’air montraient qu’il était difficile de trouver un endroit plus sûr, même dans un rayon de centaines de kilomètres. Plusieurs de mes amis ont perdu leur maison dans les flammes. Certains ont vu les incendies s’approcher jusqu’au

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bord de leur propriété et ont passé des jours à combattre le feu, avant d’abandonner par épuisement. On ne savait jamais dans quelle direction les vents souffleraient le lendemain ni quels seraient les nouveaux endroits touchés.

Vous avez malgré tout continué à travailler? Oui, notre objectif était de faire entendre la voix des survivants et de continuer la lutte pour faire passer certaines lois. Et aussi de faire comprendre au grand public le lien entre le climat et les feux de brousse. On voit que les termes du débat sur la crise climatique ont complètement changé, grâce surtout au courage des personnes touchées. C’est un sentiment indescriptible de voir les choses avancer enfin.

Quelles sont les ­conséquences des ­incendies pour le pays et sa population? Les incendies ont été une descente aux enfers. Le feu a ravagé plus de 17 millions d’hectares de terres, soit plus de quatre fois la superficie de la Suisse. Plus d’un milliard d’animaux ont péri. Et plus de 2500 bâ­ timents ont été détruits. L’impact économique des feux de brousse est également considérable: le ­rendement des cultures estivales a chuté de 66 % par rapport à l’année précédente. Les ports étaient fermés en raison de la fumée, et le ­tourisme a été affecté. Sans compter l’impact psychique sur la population.

La couverture médiatique mondiale a-t-elle eu un effet ­positif? L’attention médiatique mondiale a fait comprendre au Gouvernement australien que la réputation du pays est en jeu. Que l’Australie doit

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prendre des mesures à la hauteur de sa responsabilité, car elle est l’un des plus grands émetteurs de gaz à effet de serre de l’OCDE par rapport à sa population. Depuis, le gouvernement a fait adopter des lois visant à promouvoir les énergies renouvelables en remplacement du charbon. Ces efforts restent toutefois relativement modestes. Et des figures publiques comme le Premier ministre continuent de nier ou de ­relativiser le rôle du changement ­climatique concernant la violence et la probabilité des feux de brousse. Mais on voit aussi que de nombreuses personnes dénoncent publiquement ce genre d’attitude. La parole des survivants des feux de brousse et des scientifiques est ­enfin entendue.

Que fait Greenpeace Australie pour lutter contre la crise climatique et prévenir les incendies? En septembre, nous avons déployé une banderole géante «Climate Emergency» dans le parc national de Lamington, dans le Queensland, lui aussi gravement touché par les incendies. Cette banderole a empêché l’atterrissage de l’hélicoptère du Premier ministre, qui a été redirigé vers une autre aire. Nous avons aussi aidé les survivants à apporter les cendres de leurs maisons au Parlement à Canberra pour faire reconnaître officiellement le rôle du changement climatique dans le déclenchement des feux. Nous avons par ailleurs lancé une pétition signée par plus de 100 000 personnes appelant le gouvernement à passer à 100 % d’énergies renouvelables en l’espace de dix ans. Nous avons d’autres activités en préparation pour renforcer ce message. En co­ opération avec Greenpeace dans le monde entier, nous voulons faire en sorte que la catastrophe en Australie stimule la lutte globale contre la crise climatique et fasse avancer les solutions.

Comment la population suisse peut-elle aider l’Australie? Il y a beaucoup de choses que la Suisse peut faire. À travers le consulat général d’Australie à Genève, on peut interpeller le Premier ministre et lui demander de respecter la volonté de l’opinion publique australienne en réduisant les émissions. Autre angle d’approche, on peut appeler les établissements financiers à cesser de faire des affaires avec le secteur des énergies fossiles. À l’échelle individuelle, on peut passer à l’énergie solaire dans son ménage. Changer son alimentation pour diminuer son empreinte écologique et acheter local est certainement une bonne chose. Enfin, nous devons tous exprimer notre volonté pour forcer les gouvernements et les entreprises à prendre les mesures urgentes qui s’imposent.

Photographe: Stephen Dupont (1967) est photographe et documentariste autodidacte. Il vit en Australie et travaille notamment pour Time, The New York Times Magazine et GEO. Son travail a été présenté dans des expositions mondiales et récompensé par le World Press Photo Award.


Photos prises entre novembre 2019 et janvier 2020 le long de la cĂ´te de la Nouvelle-Galles du Sud (Australie).

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la start-up entend continuer son expansion: «Nous sommes une entreprise en constante évolution. Se reposer sur ses acquis serait contraire à notre mission», déclare Pascal Bieri. Cette mission, c’est de contribuer à la protection du climat et de l’environnement en proposant un substitut de viande savoureux et durable: «Parce que la viande, c’est bon, mais pas pour l’environnement.»

bouillon de légumes

Pour accéder à la recette

ail en poudre

crème végétale

Prendre des protéines et des fibres de pois, de l’huile de colza et de l’eau. Bien mélanger pour obtenir quelque chose qui a l’aspect et le goût du poulet sans être passé par un abattoir. C’est là la recette du succès de la jeune entreprise suisse Planted, créée il y a environ deux ans par Lukas Böni et Eric ­Stirnemann, ingénieurs agroalimentaires, en collaboration avec l’économiste Pascal B ­ ieri et l’expert financier Christoph Jenny. Leur objectif était de trouver une alternative à la viande. Le résultat de leur travail à l’EPFZ s’appelle «planted.chicken», un «poulet» à base de plantes qui n’aurait rien à envier à l’original, selon les inventeurs. «Nous sommes convaincus qu’à l’avenir, les gens ­­mangeront davantage d’aliments à base de plantes, mais pas seulement du soja et du gluten. Nous travaillons sur la diversité extraordi­naire des protéines végétales», explique Pascal Bieri. Déjà disponible chez Coop, la volaille végétale de Planted est aussi au menu de plus de septante restaurants suisses. Mais

© Photo: Isabel Truniger

De gauche à droite: Lukas Böni, Pascal Bieri, Eric Stirnemann et Christoph Jenny

planted.chicken

pâte de miso huile de colza

vin blanc

champignons de Paris

oignons

Émincé de poulet végétal

jus de citron

Recette


Agir ou négocier?

Débat

Les actions non violentes menées dans des succursales d’UBS et de Credit Suisse ont suscité un vif débat sur la manière de persuader les grandes banques de respecter le climat. Réponses d’acteurs issus du secteur financier, de la politique fédérale et du mouvement pour le climat. Auteur: Christian Schmidt

David Hertig, partenaire fondateur de Globalance Bank

Solange «Soleil» Thiémard, militante

Diverse succursales d’UBS et de Credit Suisse ont été occupées par des militantes et militants qui dénonçaient les politiques d’investissement de ces banques au détriment du climat. Qu’en pensez-­vous?

Quel est le meilleur moyen de lutter contre les abus de la place financière suisse? Discuter, élaborer des lois, occuper des banques …?

Au Parlement, vous demandez régulièrement que la place financière suisse cesse ses investissements dans les énergies fossiles. Votre En discutant, on obtient, message est-il entendu?

dans le meilleur des cas, une pro De telles actions sont certai- messe qui ne sera pas tenue. Il faut nement le signe d’une frustration des années pour qu’une loi entre en croissante au sein de la population vigueur, et elle ne sera adoptée que générale. si elle est peu contraignante. En fin de compte, seule la désobéissance Mais les banques ne civile peut faire évoluer l’opinion sont pas les seules à être ­publique et le rapport de forces. En résumé, je dirais:

en cause.

Adèle Thorens Goumaz, conseillère aux États, Les Verts

Malheureusement, mes propositions ont souvent été rejetées. Mais nous avons maintenant une nouvelle composition du Parlement, plus favorable à l’écologie. J’espère que me idées pourront rassembler des majorités. Quels objets avez-vous réussi à faire passer?

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En tant que banquier, pensez-vous que ces actions sont utiles?

Aucune solution n’est suffisante en soi! Il faut les trois approches.

Ce qui serait vraiment utile, c’est de prendre des mesures concrètes pour décarboniser la soAprès l’occupation d’une succurciété.

Le secteur financier doit se rendre compte de l’importance de son rôle.

sale de Credit Suisse à Lausanne, le juge a acquitté les militantes et militants pour le climat, qui auraient agi dans le cadre d’un «état de nécessité licite». Un tournant, selon vous?

Le ministère public a déjà fait Les banques doivent-elles repen- appel de cette décision. Les banser leur politique de crédit? Oui, non seulement leur politique de crédit, mais aussi leur politique d’investissement. Même si le seul critère est la rentabilité financière, les banques doivent s’adapter. L’évolution des conditions-cadre affecte la valeur des prêts et des investissements.

Les banques sont à la traîne, tandis que les réassureurs ont déjà bien avancé dans ce domaine.

ques chercheront à l’avenir à con­ tourner la justice. Mais il est vrai que cet acquittement est une reconnaissance de notre engagement. Nos actions gagnent en légitimité aux yeux de la population. Et nous pouvons davantage impliquer le grand public, par exemple par des appels au boycott.

À la suite de mon intervention, le Conseil fédéral élabore un rapport concernant ses projets pour s’adapter au plan d’action de l’UE sur la finance durable. Ce plan d’action aura des répercussions sur la place financière suisse. Nous ne sommes pas une île! Par ailleurs, la FINMA et la Banque nationale suisse devront à l’avenir informer le Conseil fédéral de l’impact des crises climatiques sur la stabilité du marché financier.

Ce succès a été obtenu dans le cadre du débat parlementaire consacré à la loi sur le CO2. Une de mes revendications a donc abouti.

UBS et Credit Suisse prétendent Avons-nous le temps d’attendre les soutenir l’accord de Paris sur le cli- décisions politiques? Ne faudrait-il mat. Une contre-vérité? pas multiplier les actions comme Comme elles ne garantissent les occupations?

pas la transparence, les banques

Il est vrai que les processus

Au lieu d’occuper une banque, que peuvent dire ce qu’elles veulent. El- politiques sont lents. C’est frustrant les n’hésiteront pas à faire de belles et contrariant, même pour moi. Mais peut-on faire?

Il faut une information transparente sur les risques liés aux ­crédits et aux investissements des banques. Et les conditions juridiques doivent favoriser une économie à faible émission de carbone. C’est aussi un appel au grand public: à travers nos caisses de pension, nous sommes tous actionnaires et donc responsables.

promesses qui ne les engagent à rien dans l’immédiat. Pour ensuite trouver des manières de poursuivre leurs activités sans faire de bruit.

En 1995, nous avons créé la première société de gestion de fortune du monde axée sur les investissements durables. Puis nous avons développé le Dow Jones Sustainability Index en 1999. Contrairement à la plupart des autres banques, nous avons inscrit la durabilité dans nos statuts. Et notre calculateur d’empreinte informe notre clientèle sur l’impact réel de son portefeuille.

surtout par choix personnel. Mais il est vrai que la désobéissance civile et l’écho médiatique nous privent de l’accès à certains emplois dans certaines entreprises. C’est scandaleux!

je ne veux pas opposer politique institutionnelle et résistance civile. La démocratie est le meilleur des systèmes possibles lorsqu’il s’agit de faire des choix collectifs.

De plus, les exigences de l’accord de Paris ne sont Il faut à la fois manifester et aller voter. pas suffisantes.

Que diriez-vous aux dirigeants Vous êtes au chômage. Est-ce que de Credit Suisse et d’UBS si vous Que fait la Globalance Bank, dont la Suisse punit les personnes qui aviez un entretien avec eux? vous êtes cofondateur, pour atté- résistent à l’ordre dominant? Qu’il leur appartient de contri Si je ne travaille pas, c’est buer à résoudre les problèmes au nuer la crise climatique?

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lieu d’aggraver la situation. La bulle de carbone est sur le point d’éclater. Les grandes banques ont tout à gagner à jouer un rôle moteur dans la transition vers une économie éco­ logique. Je dirais aussi à ces dirigeants: nos enfants nous jugeront sur nos actes. Illustrations: Jörn Kaspuhl, www.kaspuhl.com Auteur: Christian Schmidt, journaliste, rédacteur pour des associations et auteur de livres. Freelance par conviction. A remporté divers prix, dont le Prix des journalistes de Zurich.


ontés écologiques – mes volontés écologiques – mes volontés écologiques – mes volontés écologiques – mes volontés écol

Photo: © Greenpeace /Anouk van Asperen

«La moindre des choses» Auteure: Mauricette Gollut

Mauricette Gollut, 77 ans, a travaillé pendant de nombreuses années comme journaliste à la Télé­ vision suisse romande (aujourd’hui Radio télévision suisse), à Genève et à Zurich. Aujourd’hui, elle pratique la sculpture avec du fil de métal, en compagnie de son chat de 22 ans.

J’ai beaucoup voyagé à une ­ certaine époque de ma vie, et pas trop comme une valise, vu que je me trouvais sous des cieux différents comme journaliste ou comme anthropologue. Et j’ai pu constater les atteintes portées à la nature sous toutes ses formes. J’ai vu l’enva­ hissement irrésistible du plastique dans des contrées du bout du monde, les paysages bousillés, la mer souillée. Bien que je n’aie pas de descendants, ce saccage m’épouvante. Comment ne pas être horripilée de voir la beauté détruite?

Tout au long de ces années, je n’ai guère eu le temps ni le courage de m’engager personnellement et activement. La moindre des choses me paraît donc de laisser une partie de ce que je possède pour servir cette cause. Je pense qu’on peut espérer que les ­générations à venir seront plus conscientes de la nécessité de ­redresser la barre. Les jeunes d’aujourd’hui nous montrent le chemin. J’ai choisi Greenpeace parce que c’est une organisation qui n’y va pas par quatre chemins, et pour le sérieux de ses analyses. Ce que je me propose de laisser à Greenpeace ne privera personne. Nul dans ma famille n’est dans le besoin, et je suis sûre qu’ils se réjouiront tous de cette affectation. Maintenant que je suis à la retraite, je peins et je sculpte. Ces occupations remplissent ma vie et j’ai cessé de courir le monde pour me régaler dans un petit périmètre des «petits riens ensoleillés».

S’engager tout au long de la vie pour un avenir écologique, et même au-delà, c’est possible en pensant à Greenpeace lorsque l’on rédige son testament. Pour commander le guide testamentaire gratuit: anouk.vanasperen@greenpeace.org, tél. 022 907 72 75, greenpeace.ch/legs


Énigme sur le magazine Greenpeace

Énigme

1

Quelle est la mission officielle du Forum ­économique mondial? F T O

2

Voir le monde brûler Améliorer le monde Vendre le monde

Protéine de pois Eau Soja

6

4

7

«protéger et préserver» «manger et savourer» «détruire avec des pesticides»

8

Vingt mille Cinq cent mille Un million

Quelle ville s’est lancée dans le Projet plastique? E U J

Quelle est la formule de la bénédiction de l’alpage? U D V

Combien de mégots l’association ­Stop2drop veut-elle récolter en une année? N W T

À quelle échéance la Banque européenne d’investissement cessera-t-elle de financer les combustibles fossiles? M 2021 C 2022 R 2023

Comment soutenir l’initiative ­«multinationales responsables»? A Pas nécessaire, il y a déjà assez de gens qui s’engagent. L Dans un comité local, avec un drapeau, en visionnant le DVD ou autre. G En récoltant des signatures. Quoi, c’est déjà fait?!

Quel ingrédient n’entre pas dans la ­composition du «planted.chicken»? S B U

3

5

Zurich Baden Lausanne

Que se passe-t-il le 31 mai? S I Z

Journée mondiale sans tabac Journée mondiale sans charbon Journée mondiale sans plastique

Solution: Parmi les solutions correctes, nous tirerons au sort cinq gagnants qui recevront le livre J’agis pour le climat. Cet ouvrage propose des réponses simples à des questions compliquées, des révélations utiles et des infor­ mations presque futiles. Mais aussi un quiz et des centaines de suggestions et de conseils pour agir! Le guide pour une vie quotidienne durable, pour toutes celles et tous ceux qui en ont marre de voir la planète saccagée. Envoyez la solution, avec votre adresse, d’ici au 14 juin 2020 à redaction@ greenpeace.ch ou par la poste à: Greenpeace Suisse, rédaction magazine, énigme écologique, case postale 8112, 8036 Zurich. La voie judiciaire est exclue. Aucun échange de courrier n’aura lieu concernant le tirage au sort.

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La solution de l’énigme du magazine 04/19 était: GRILLONS


Le mot de la fin

Indignez-vous!

Je vois encore mon professeur de biologie, assis sur le ­devant de son bureau, taper du poing sur la table, indigné contre le déversement d’acide dilué dans la mer du Nord. Il mentionnait déjà les actions de Greenpeace contre cette pratique, légale à l’époque, d’élimination d’acide ­sulfurique dans la mer. S’engager, protester, agir, c’est le message qu’il faisait passer à l’élève que j’étais, dans cette petite salle de classe d’une localité de Rhénanie-­ du-­Nord-Westphalie. C’est la même énergie qui me fait avancer, aujourd’hui ­encore. Le désir de porter témoignage, de défendre les ­poissons, les arbres et tous les autres organismes vivants. De lutter pour la planète, qui n’a pas voix au chapitre quand les milieux politiques et économiques décident de son sort. Je suis profondément convaincue que nous pouvons faire évoluer la société et créer de nouveaux horizons en choisissant de résister. Personnellement, je me régénère en me promenant dans une forêt verdissante, en jouissant de la vue depuis le sommet d’une montagne ou en ad­mirant une prairie de fleurs. Il n’est jamais trop tard pour s’indigner, pour résister, pour devenir un rêveur ou une visionnaire. Chacune et chacun a le choix. Si le changement est possible, c’est à travers nous, en tant qu’individus, petits groupes ou masses nombreuses. L’indignation des jeunes et des moins jeunes, les initiatives individuelles et les grands mouvements, tout ce qui se reflète dans ce magazine, est pour moi source d’inspiration. Luttons ensemble, car notre engagement est essentiel! Faisons reculer l’indifférence. Chaque geste compte pour la nature et l’humanité.

Photo: © Iris Menn

Iris Menn Directrice de Greenpeace Suisse


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Motif du paiement (merci de l’indiquer en cas de versement en ligne): Mag202

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Si les tortues le pouvaient, elles deviendraient certainement toutes des Tortues Ninja et se battraient pour leur espèce. D’ici là, elles comptent sur notre aide. Prenez donc le temps, le 23 mai, Journée mondiale de la tortue, de signer la pétition pour la protection des océans:

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Cowabunga!

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Le 31 mai est la Journée mondiale sans tabac. La cigarette nuit aux êtres humains, aux animaux et l’environnement. Pourquoi ne pas arrêter de fumer, à l’occasion de cette Journée mondiale?

Greenpeace Suisse Badenerstrasse 171 8036 Zurich

Il fumo uccide

CHF 50.–

Deux jours après la Journée mondiale des abeilles, nous célébrons la Journée de la biodiversité. Nos insectes ont besoin de biodiversité pour survivre. Il vaut la peine de cultiver son jardin ou son balcon de manière naturelle. On peut même gagner le concours «Jardins naturels – petits et grands paradis» de Pro Natura! Pour en savoir plus: pronatura.ch/fr/jardin-naturel.

Oui, je fais à Greenpeace un don de:

Pour la nature

Einzahlung Giro

Le 20 mai est la Journée mondiale des abeilles. Ces insectes travaillent infatigablement pour la nature. Pourquoi ne pas leur fabriquer un abri? Construisez votre propre hôtel à abeilles avec le tutoriel YouTube suivant:

Einzahlung für / Versement pour / Versamento per

Pour les abeilles

Empfangsschein / Récépissé / Ricevuta

Au joli mois de mai, on peut se mobiliser pour la fête du Travail, mais aussi pour d’autres journées d’actions dont les suivantes:

Versamento Girata

441.02

Et maintenant?


37


AZB CH-8036 Zürich PP/Journal Post CH AG

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En 2018, Steff la Cheffe, l’audacieuse rappeuse bernoise, publie un album plus nuancé, intitulé Härz Schritt Macherin. Dans ce numéro du magazine de Greenpeace, la jeune femme de 33 ans n’a pas peur des mots. Son nouvel album intitulé «PS:» sort le 15 mai.


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