Mémoire de Master 2019 - L'urgence d'habiter - Amand Grueber - Architecte D.E

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L’Urgence d’Habiter ANALYSE DU CENTRE D’HÉBERGEMENT DES GRANDS VOISINS

Grueber Amand Mémoire de Master Ecole Nationale Supérieure d’Architecture Paris Val de Seine Sous la direction de: Meigneux Guillaume Février 2019



PARTIE 2. Habiter aux Grands Voisins

TABLE DES MATIÈRES

A. Se protéger

INTRODUCTION

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PARTIE 1. LES MIGRANTS DANS LA VILLE

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1- Retour aux fondamentaux de l’architecture 2- Créer de l’intimité et se rassurer 3- Ornementer et retrouver sa fierté

1- La question de la migration 2- Les réponses de la ville

B. Définir l’accueil 1- Comprendre 2- Au delà de la simple tolérance 3- Éviter le triptyque : Exclusion, extraterritorialité et exception

C Définir l’habitabilité 1- Habiter vs résider 2- Définir un ancrage, mettre en mouvement et établir des connexions 3- Retour aux fondamentaux de l’architecture

7 7 9 13 13 14 15

35 35 39 41

B. Partager

A. Une réalité de plus en plus prise en compte

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1- Arpenter le site et prendre connaissance de l’autre 2- Faire ensemble 3- Projeter, retrouver une vocation

C. Ouvrir 1- Une spatialité qui invite 2- Une situation géographique vectrice d’échange

D. Discussion

43 43 48 49 53 53 54 58

18 18 18 21

D Présentation du terrain d’étude

22

1- Présentation des Grands voisins 2- Méthodologie 3- Description de l’étude de cas

22 23 24

CONCLUSION

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BIBLIOGRAPHIE

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2


Les politiques sont donc confrontées à ce fait et doivent repondre à cette problé-

INTRODUCTION

matique qui faisant en sorte de les héberger de manière provisoire. Les primo-ar-

Les personnes sinistrées quittent leur pays d’origine afin de trouver ailleurs une

rivants sont dans un premiers temps dirigés vers un centre de premier accueil

vie meilleure. La migration consiste à quitter un lieu d’origine dans lequel le

(CPA) le temps de trouver une place au sein d’un centre d’hébergement d’urgence

risque est important et où l’habitabilité est menacée par les crises économiques,

pour migrants (CHUM) dont la durée de séjour est comprise entre 1 et 12 mois

écologiques ou politiques. Cela devient ainsi un besoin vital. Le fait d’être mi-

en moyenLa question est de savoir comment accueillir ces populations. L’enjeu

grant signifie qui quitte ou fuit son lieu de résidence habituel pour une nouvelle

est donc de trouver des dispositifs architecturaux et spatiaux permettant à ces

destination, à l’étranger ou à l’intérieur de son propre pays, dans l’espoir d’y

populations dans un premier temps de retrouver une confiance en eux et des pers-

trouver la sécurité ou des conditions d’existence plus favorable. Le réfugié de son

pectives d’avenir et dans un second temps de s’ouvrir aux autres et de partager

côté est une personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa

des espaces et des moments avec les habitants.

race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appar-

J’ai choisi de m’intéresser aux centres d’hébergement d’urgence pour migrants

tenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité

(CHUM) que l’on peut définir comme une structure temporaire destinée à héber-

et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de

ger des populations sinistrées pendant une durée de un à plusieurs mois afin de

ce pays. Ces deux définitions sont issue du site internet de l’ONU.

leur permettre de se stabiliser et d’envisager un avenir. De plus en plus de centres

Les villes sont donc confrontées à cette réalité et se doivent donc de réagir. Les

d’hébergement d’urgence pour migrants se déploient sur le territoire d’Île de

migrants sont souvent perçus comme une masse, « un courant de personnes

France. Pour répondre à cette demande accru, la ville de Paris joue sur la tempo-

non responsables de leur propre devenir » Vollaire Christiane, philosophe, c’est

ralité, en utilisant des sites inoccupés en attentes de projets et de travaux ou tout

à dire des populations non individualisées dont leur destin les dépasse.

Les poli-

simplement en situation d’inconstructibilité. Les centres d’hébergement devient

tiques sont donc confrontées à ce fait et doivent repondre à cette problématique qui faisant en sorte

une étape de projet d’aménagement urbain. Cependant, la question de l’accueil

de les héberger de manière provisoire. Les primo-arrivants sont dans un premiers temps dirigés vers

paraît se poser ici. Ces populations sont-elle accueillis ou simplement « enfer-

un centre de premier accueil (CPA) le temps de trouver une place au sein d’un centre d’hébergement

mées »? (Michel Foucault) 5.

d’urgence pour migrants (CHUM) dont la durée de séjour est comprise entre 1 et 12 mois en moyen ne.

1.

)))

Vollaire, C. « Immobiliser les migrants : les enjeux d’un oxymore ». (En ligne). Non lieux de l’exil. 2016 https://nle.hypotheses.org/4021

2.

Gros, F. Humanité «Michel foucault, Les mots et les causes oubliées» (En ligne) 2015 https://www.humanite.fr/michel-foucault-les-mots-et-les-causes-oubliees-588851

3


Le caractère temporaire des structures d’hébergement renforce leur caractère pré-

Afin de donner des pistes de réponses, je vais dans une première partie la réalité

caire, et donc la précarité des publics hébergés et font l’objet de rejet de la part

de cette situation en définissant certaines notions et en évoquant ma position par

des popualtion environnante comme l’indique «urbanité» dans son article paru le

rapport au sujet et le courant dans lequel je me situe. Puis dans une deuxième

26 mars 2018. Le but de cette recherche est finalement de montrer en quoi l’archi-

partie, je vais évoquer le centre d’hébergement des Grands Voisins situé à Paris

tecture et la spatialité des CHUM déterminent l’appropriation de l’espace et les

en le confrontant à d’autres centres d’île de France et ainsi montrer la façon dont

interactions avec le contexte dans lequel ils s’inscrivent. Autrement dit : Quelles

il a évoluer du centre d’hébergement repoussant et rejeter vers un site attrayant

sont les dispositifs architecturaux qui permettent d’une part aux populations de

devenu l’identité d’un quartier. Cette exemple va me permettre de démontrer l’in-

s’approprier les lieux et de s’y identifier et d’autre part de participer au contexte

fluence de l’architecture et la spatialité sur le degré d’acceptation d’une tel struc-

urbain de sa localisation. Selon Perec, « habiter, c’est investir un lieu, le charger

ture et l’émancipation des population hébergées.

de projet et de subjectivité » c’est à dire s’approprier un espace et le façonner pour lui conférer son identité. Comme l’indique Cyrille Hanappe dans son oeuvre s’intitulant «La ville accueillante», beaucoup de ces structures sont mal perçues car peu rassurantes et fermées sur elles même. Cette méconnaissance de l’autre induit de la peur et de la méfiance. Au contraire, d’autres centres cherchent eux à s’ouvrir ce qui au fur et à mesure conduit à créer une vraie vie de quartier, des lieux d’interaction, de partage et de solidarité. Je me demande par conséquent quels dispositifs favorisent cela et en quoi cela permet aux migrants de ne plus simplement résider mais d’habiter selon la définition de Michel Lussault que nous aborderons au cours du développement Comment générer des espaces dans lesquels ils vont pouvoir dormir, se nourrir, se laver, s’identifier mais aussi développer des interactions, des relations de confiance et de solidarité facilitant ainsi leur reconstruction personnelle mais également une nouvelle manière de vivre la ville. 3.

Michel, L. (2017), Texte «que peut bien signifier habiter le monde» p398 extrait de Constellation,s, Face à

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5


PARTIE 1

LES MIGRANTS DANS LA VILLE

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REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT

A Une réalité de plus en plus prise en compte

REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT

1- La question de la migration Depuis de nombreuses années, la question de la migration se pose de plus en plus.

Schéma parours et aspirations migrant

Les différents événements dramatiques en mer méditerranée notamment en 2015 ont généré une plus grande prise de conscience de la part des Pays Européens.

REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT

Sur toute cette année 2015, on peut dénombrer pas moins de 1,2 millions de demandes d’asile au sein de l’union Européenne. Ces populations choisissent de quitter leur pays suite aux guerres, aux crises politiques, économiques et sociales

Pays d'origine Pays traversés

mais également à la suite de catastrophes naturelles. Ces personnes migrantes

Pays espérés

REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT

venants des pays du Golf , de l’Asie Occidentale, de Syrie, d’Irak, d’Afrique de

Mouvements

L’Est et Subsaharienne se dirigent vers l’Europe, traversent la Méditerranée au péril de leur vie. Ils arrivent souvent en masse mais malgré tout correspondent en une somme d’individualités ayant des parcours, des aspirations et des espoirs particulier à chacune. De ce fait, la notion d’accueil ne peut que revêtir un caractère multiple, s’ajustant plus ou moins aux différentes motivations des popula-

REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT

tions étrangères. Parmi ceux qui viennent pour des raisons économiques, fuyant parfois, voire souvent, la misère de leur pays d’origine, dans l’espoir de trouver un travail sur le sol Français, deux catégories sont à discerner : les migrants qui décident d’émigrer de leur propre chef, seuls ou avec leur famille, sans l’assurance d’obtenir un travail, et ceux que l’on fait venir par besoin de main d’œuvre. Dans ces deux cas, l’accueil s’avère radicalement différent Il ne faut pas oublier les réfugiés politiques ainsi que les prisonniers de guerre, très souvent présents sur le sol.

Mouvemen des population migrantes

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Fort de cette diversité, l’accueil se multiplie, s’adapte, se spécialise. Cette spé-

Il y a, à Paris, 3,94 places d’hébergement pour 1 000 habitants, contre 1,84 en

cialisation est également subordonnée aux diverses nationalités de ces individus.

moyenne en Île-de-France. Ce chiffre place la ville de Paris bien au-dessus des

Ce phénomène très contemporain marquent de plus en plus les villes Européenne

obligations instituées par la loi DALO (Droit Au Logement Opposable) du 5 mars

qui se doivent d’y répondre en trouvant des solutions. Les diffusions dans les

2007, qui demande une capacité minimale d’une place d’hébergement d’urgence

médias de vidéos et d’images notamment du petit Aylan échoué sur la plage de

pour 1 000 habitants dans les grandes agglomérations.

la côte méditerranéenne ont suscité l’émotion et une prise de conscience plus

Avec un nombre de plus en plus élevé dans Paris intra muros, il est peu probable

importante de la part des citoyens européens et différents élans de solidarité se

que la demande en places d’hébergement à Paris cesse de croître dans les pro-

sont développés.

chaines années. Cette demande accrue à Paris, avec en moyenne 4 798 appels au

L’immigration devient une réalité qui s’ordonne. Il serait du ressort de l’État d’en

115 par jour pour l’année 2016 (Samu Social de Paris, 2017), est marquée notam-

déterminer le volume, la nature et la temporalité.

ment par une part de plus en plus importante de familles (Guyavarch et Garcin,

Les migrations ne se décrètent pas. Elles sont un phénomène enraciné dans l’his-

2014) et de travailleurs pauvres (APUR, 2014)2. Si ce public tient souvent à rester

toire humaine dont les règles sociales sont exogènes à l’État, au même titre que

à Paris, c’est du fait notamment de la proximité des services administratifs et de

les dynamiques démographiques ou l’économie de marché. Les États européens

l’important tissu d’entraide, formel ou informel. Face à une situation qui semble

se trouvent aujourd’hui contraints de jouer un rôle dans cet accueil.

se pérenniser, les discours médiatiques et politiques utilisent le terme d’urgence,

L’arrivée massive des migrants dont les flux sont souvent considérables, pose la

alors que cette dernière semble s’être installée de façon structurelle sur l’agenda

question de la gestion mais aussi de contrôle et de l’accueil.

politique tant dans ses dimensions sociales qu’urbaines. ». On observe donc une

Diverses décisions sont prises par la ville dans le but de faire face à cette immi-

prise de conscience de plus en plus importante de la ville et des citoyens à cette

gration massive. Ces populations sont soit reconduites dans leur pays d’origine

cause, à ce fait incontournable.

ou dans un autre pays , soit tolérées au sein de camps à l’extérieur de la ville ou soit dans des centre d’hébergement d’urgence le temps de trouver une solution plus pérenne. Avec environ 10 000 places, Paris concentre 40 % des capacités d’hébergement d’urgence d’Île-de-France1.

4.

Urbanités. « Urbanisme temporaire, le centre d’hébergement du 16ème arrondissement de Paris : l’amé nagement temporaire comme nouveau modèle urbain pour l’hébergement d’urgence ? ». (En ligne). 2018.http://www.revue-urbanites.fr/chu-paris-amenagement-temporaire/

5.

APUR, (2010). Les structures d’hébergement d’urgence et de logement temporaire à Paris. Atelier Pari sien d’Urbanisme, 92p.

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2- Les réponses de la ville

Les aides financières de l’état pour l’hébergement d’urgence pour migrants sont relativement faible et ne permettent pas d’acquérir du foncier à Paris comme

En France, et notamment à Paris, la présence importante et pérenne de personnes

l’indique un membre de l’association Aurore « À Paris, nous n’avions jamais

migrantes sans domicile est devenue une question urbaine à part entière.

fait d’opération neuve pour de l’hébergement d’urgence, car le foncier dispo-

Ce mode d’aménagement a été influencé par la multiplication des initiatives

nible est beaucoup trop cher. Dès lors que nous sommes soumis à la concurrence

d’urbanisme temporaire, qui visent à occuper de façon provisoire les terrains

du marché classique, pour la construction de bureaux, de logements privés ou

et bâtiments inoccupés, lorsque l’usage du site n’est pas encore décidé, ou le

d’hôtels de luxe, nous ne pouvons gagner un appel d’offre, et dans le contexte de

temps qu’un projet se réalise . Par exemple nous pouvons évoquer le CHU si-

la pression foncière à Paris, il est impossible de faire une opération neuve sans

tué sur l’allée des fortifications dans le 16ème arrondissement de Paris qui pré-

concurrence » (entretien du 12 juin 2017).

sente également la singularité d’avoir été installé sur un site réglementairement

Il est donc indispensable de la part des politiques de s’adapter à cette situation.

non-constructible. Les Grands Voisins eux se sont installés dans un ancien hôpital

L’enjeu est donc de réfléchir autrement. Dans le but de pouvoir répondre à cette

Ces centres d’hébergement sont portés par l’innovation architecturale et spatiale

demande accrue, la politique parisienne d’hébergement d’urgence propose l’oc-

et représente une réponse aux contraintes foncière du territoire Parisien.

cupation de lieux hors marché, jouant sur la temporalité des lieux.

Les dispositifs d’hébergement Parisiens sont de plus en plus saturés au vu de la

Afin de réagir à cette situation « d’urgence » et faire avec la forte pression fon-

demande accru. D’après l’observatoire du Samu Social de Paris plus de 70% des

cière du territoire d’Île de France et surtout intra muros, la ville propose l’occupa-

demandes ne conduisent pas vers une mise à l’abri n’aboutissent pas sur une mise

tion d’espaces intercalaires, c’est-à-dire l’utilisation de lieux temporairement va-

à l’abri (Samu Social de Paris, 2017). La pénurie de places disponibles n’offre

cants que se soit les friches dépourvu de fonctions, les territoires inconstructibles

pas une continuité dans l’hébergement aux personnes hébergées et souffrent ainsi

ou encore les terrains laissés à l’abandon de part leur situation géographiques ou

du caractère temporaire et morcelé des habitats. Lorsque les places sont insuffi-

la présence d’une infrastructure bruyante ou polluante. Ces espaces sont donc

santes, les personnes sont éparpilléels dans des hôtels sociaux coûteux et n’of-

mobilisés comme une opportunité foncière pour l’hébergement d’urgence. Paris

frant en aucun cas une stabilité aux populations hébergées qui sont obligées très

joue donc sur la temporalité, en utilisant des sites inoccupés en attente de projet

peu de temps après de trouver une autre solution.

ou de travaux.

1 6.

Urbanités. « Urbanisme temporaire, le centre d’hébergement du 16ème arrondissement de Paris : l’amé nagement temporaire comme nouveau modèle urbain pour l’hébergement d’urgence ? ». (En ligne). 2018.http://www.revue-urbanites.fr/chu-paris-amenagement-temporaire/

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Malgré tout, il est parfois compliqué d’adapter la fonction d’hébergement à un bâtiment construit à l’origine pour une fonction totalement différente. La réhabilitation et l’occupation s’avère très coûteuses. Dans ce cas il est donc plus simple et efficace de créer des bâtiments modulaires comme c’est le cas du CHU du 16ème arrondissement sont conçus pour un usage d’hébergement, ce qui permet un meilleur confort pour les personnes hébergées. Les sites temporairement vacants ne représentant pas toujours la meilleure soluDans le cas des Grands Voisins et la réhabilitation de l’ancien hôpital Saint

tion, l’herbagement d’urgence peut se développer sur des terrains inconstructibles

Vincent de Paul, la fonction d’hôpital a été déplacée à cause de la remise au

que l’on peut très rapidement employer et mobiliser. L’intérêt de ces sites est de

norme trop coûteuse. Le site a donc été vendu et un éco quartier va voir le jour en

pouvoir agir et proposer un projet sans la pression de la concurrence du marché

2020. Or, dans cette période consacrée à l’étude de faisabilité, la ville de Paris à

et de la programmation. Pour illustrer cela, nous pouvons évoquer le centre hé-

permis à l’association Aurore d’y installer temporairement un centre d’héberge-

bergement du 16ème arrondissement de Paris construit dans une zone urbaine

ment d’urgence.

protégée. Pour cette situation il est possible de recourir à un permis de construire

C’est par exemple le cas Porte de la Chapelle, avec la transformation d’une an-

précaire autorisant l’occupation du sol si le projet répond à une problématique

cienne halle de la SNCF, la halle Dubois, en centre d’hébergement provisoire de

précise.

400 places, mis en fonction en novembre 2016 et qui devrait fermer en mars 2019,

Cependant le permis précaire impose que la construction soit temporaire et que

sur un site qui a vocation à accueillir en 2020 une antenne du campus Condorcet1.

celle-ci aie recours à une architecture démontable que l’on peut déplacer faci-

L’occupation temporaire de ces site permet sa gestion le temps des études et donc

lement et réutilisé ailleurs Cette typologie d’architecture permet de gagner du

d’éviter les en-campements ou autres formes d’occupations illégales susceptibles

temps et de l’argent du fait que la structure pourra avoir une seconde vie dans un

de détériorer le lieux.

autres lieux. Guillaume Hannoun, architecte du centre d’hébergement d’urgence du 16 ème arrondissement a déclaré : « Avec ce modèle,on arrive à retomber sur

En conséquence, l’hébergement d’urgence tend ainsi à devenir à Paris une étape

nos pattes financièrement car la deuxième vie de la structure, sur un autre terrain,

des projets d’aménagement urbain.

est beaucoup moins chère.

7.

Urbanités. « Urbanisme temporaire, le centre d’hébergement du 16ème arrondissement de Paris : l’amé nagement temporaire comme nouveau modèle urbain pour l’hébergement d’urgence ? ». (En ligne). 2018.http://www.revue-urbanites.fr/chu-paris-amenagement-temporaire/

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Si l’investissement au début est important, les coûts sont ensuite très réduits. On

Cependant, l’aspect temporaire des structures d’hébergement renforce leur ca-

a calculé que si le projet coûte 100 au départ, ça ne coûterait que 30, grand maxi-

ractère précaire, et donc la précarité des publics hébergés, en particulier dans

mum, pour le déplacer ailleurs, en prenant le pire scénario où il faudrait adapter

une ville dense dans laquelle il est difficile de trouver un terrain suffisamment

le terrain, etc. » (entretien du 5 mai 2017).

spacieux et disponible où ré-implanter la structure. De plus, l’obtention d’un site

Les règles d’urbanisme sont souvent un frein à la réalisation concrète et localisée

est rendue plus difficile par les réticences locales à l’installation de centres d’hé-

de nouvelles structures d’hébergement d’urgence dans les zones urbaines denses,

bergement dans un quartier.

dont les droits à construire sont souvent très limités.

Les obligations des normes d’urbanisme, ainsi que la programmation futur du site

On constate cependant une adaptation progressive du cadre réglementaire aux

contraigne certaine forme d’occupation. D’autre part, les propriétaires sont assez

besoins en hébergement d’urgence. Cela permet ainsi aux associations comme

rétissants quant à la mise en place d’un centre d’hébergement qu’ils trouvent

Aurore d’installer des centres d’hébergement rapidement L’État, via la préfecture

« dégradants » et préfère l’implantation d’activité économique et artistique afin

d’Île-de-France, est en charge du financement de l’hébergement d’urgence, ce

de donner une belle image de l’extérieur. La concurrence entre les usages tem-

sont les commune qui s’occupent de leur construction. On ne réagit plus à une

poraire est forte mais peuvent cohabiter comme c’est le cas aux Grands Voisins

crise urgente mais au contraire on intègre pleinement cette réalité très contempo-

où ce site, ouvert au public, accueille en plus du CHU un bar, un restaurant, des

raine entre aménagement urbain et gestions de l’arrivée massive des migrants.

bureaux et des ateliers d’artistes. L’étude de la construction des récents dispositifs

La mise en place de centre d’hébergement peut permettre à la ville d’agir assez

d’hébergement d’urgence à Paris nous permet donc de voir que l’hébergement

rapidement sur la ville. Mais la répartition des centres en Île de France restent

d’urgence devient une affaire municipale et un enjeu pleinement urbain et ter-

inégale.

ritorialisé. Impulsée par une politique municipale, la construction de structures

Il est nécessaire de mieux répartir afin que chaque arrondissement puissent deve-

d’hébergement d’urgence à Paris devient également un levier d’action sur la ville.

nir un lieu d’expérience de nouvelles manières de fabriquer la ville et de pris en compte des centre d’hébergements. Certains arrondissements sont beaucoup plus réfractaires comme le 16ème qui a lancé une pétition contre la mise en place du centre d’hébergement dénonçant la pobable destruction d’une partie du Bois de Boulogne et de la qualité de vie

C’est le signe d’une meilleure prise en compte dans l’aménagement urbain de la temporalité des lieux, et également un moyen pour la municipalité de poursuivre sa politique d’ouverture de nouvelles places d’hébergement d’urgence, et d’agir sur les quartiers, notamment par le traitement de l’informalité.

offerte.

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Cependant, on constate clairement les ambitions fonctionnalistes des villes dans leur façon de mettre en place les centres d’hébergement pour migrants. Pour autant ces derniers sont-ils réellement intégrés à la ville ? Et en quoi cela leur permet de se reconstruire ? Il s’avère nécessaire de faire en sorte que le processus de reconstruction de ces populations soit en marche et que leur intégration au sein du contexte d’implantation soit favorisée, Pour cela il faut dans un premier temps définir un accueil adapté. Quels sont les dispositifs mis en place et quels sont les réflexions quant au fait de permettre au populations d’une part de se reconstruire mais également de s’intégrer dans leur nouvel environnement.

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La population à accueillir est venu pour s’établir plus ou moins longtemps, elle n’est pas ici dans un but passager et touristique. Il est donc indispensable dans un premier temps de comprendre ces populations, de connaître les raison de la

B Définir l’accueil

migration pour permettre un accueil digne favorable à leur reconstruction. De nombreuses réflexions ont été apportées à ce sujet notamment par Michel

Dans cette volonté de favoriser cette intégration ainsi que cette émancipation de

Agier.

la part des migrants que l’on accueil, il est nécessaire de prendre connaissance de

Selon lui, les 3 notions 9 mobilisées afin de favoriser l’accueil et l’aide des réfu-

ceux-ci pour apporter la meilleure réponse possible.

giés sont la souffrance, l’identité et la différence :

Les événements dramatiques notamment en mer méditerranée ont fait franchir un

Les images diffusées par les médias participent à rendre visible la souffrance de

seuil à la conscience de l’Europe vis à vis des migrants et de leur accueil.

ces populations déshumanisées Cela montre l’incroyable courage et la détermination. Il s’agit donc d’établir un échange avec ces populations afin d’atténuer

1-Comprendre

leur souffrance De son côté, l’identification est un élément très important dans la compréhension

Les personnes qui migrent et qui affluent en Europe, traversant la Méditerranée

de l’autre. Il ne s’agit pas de le considérer comme nous mais au contraire d’ac-

au risque de leur vie venant de Syrie, d’Irak, d’Afrique de L’Est et Subsaharienne

cepter leur identité propre et la prendre en compte.

sont perçu comme un ensemble, une masse de gens réunis dans lieux alors que

Enfin, il faut cultiver cette différence, la comprendre et la prendre en compte.

justement nous a ccueillons au contraire des individualités épuisées et brisé par

Par conséquent lorsque l’on accueille des populations dans un centre d’héberge-

leur parcours 8. Les notions de souffrance, de malheur, de tristesse ainsi que

ment, ces trois critères doivent être pris en compte afin de les accueillir dignement

d’épuisement sont très présent lorsque l’on a l’occasion d’échanger avec eux.

et ainsi participer à la reconstruction de leur vie et leur intégration. D’autre part,

« Être « migrant » n’est pas une essence, mais caractérise le moment d’un par-

face à cette urgence de l’accueil, beaucoup de ces centres d’hébergement sont

cours, et, pour beaucoup, le désir d’un devenir sédentaire, d’un devenir citoyen »

traités comme quelque chose d’exclusivement fonctionnel comme cela à été le

(Cité de l’Architecture et du Patrimoine. Mardi 6 décembre 2016, table-ronde

cas à Calais en 2015 où la réponse de la ville a été d’enfermer les population dans

modérée par Saskia Cousin (Université Paris-Descartes) ).

des containers dans un lieu hors de la ville

8. Buyck, M et Curbelo-Fiorentino, D. « Foyers de travailleurs migrants : obstacle ou tremplin à l’intégration ? ». (En ligne). Hommes et migrations. N°1202. 1996 https://www.persee.fr/doc/homig_1142-852x_1996_num_1202_1_2756?q=Hebergement+migrants

9. Michel, A. (2016). «Les migrants et nous. Comprendre Babel», Chap:»La cause des migrants existe-telle» p15 Éditions CNRS, 57p

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Selon Cyrille Hanappe « La pensée dominante en France pense que l’héber-

port au lieu et le rapport aux cultures sont sans arrêt déconstruits par les pratiques

gement d’urgence doit avoir une réponse techniciste or la technique n’est pas

que nous employons en tant qu’individu ou comme groupe.

suffisante lorsque l’on élabore un projet d’hébergement d’urgence. Développer un nouveau projet, c’est le penser intégré dans son environnement, comme une partie de ville avec des échanges entre l’intérieur et l’extérieur qui créent une urbanité. Ce type de projet réclame une attention égale, et même supérieure, à celle d’un projet d’architecture classique. » 10. Cette réponse techniciste ne représente donc pas une solution satisfaisante lorsque l’on accueil ces populations. 2. Au delà de la simple tolérance Depuis de nombreuses années, la crises des migrants a incité les états et les villes à trouver des solutions pour faire face à cette réalité. Pour cela, les moyens employés sont divers. Par exemple à Calais, les migrants ont été regroupés en dehors de la ville, dans un lieu précis où ils étaient seulement « tolérés ». Mais comment aller au delà de la tolérance et au contraire prendre en compte ce fait contemporain que nous ne pouvons contourner pour ainsi l’inclure dans nos pensés et notre manière de faire la ville ? On observe une difficulté de penser la mobilité comme le déclare Michel Foucault. Celle-ci est souvent reconnue comme un désordre. Dans ce monde où tout va toujours plus vite, les lieux ne peuvent plus être identifiés seulement à une culture. A contraire on constate une multiplicité d’identités dans lesquelles le rapS 10 Urbanités. « Entretien : le centre d’hébergement provisoire du 16ème : comment les architectes défendent leur projet ? ». (En ligne). N°7. 2016.. http://www.revue-urbanites.fr/7-le-centre-dhe bergement-provisoire-du-16eme-comment-les-architectes-defendent-leur-projet/

Cette réalité nous incite donc à mettre la mobilité au centre de nos réflexions Il ne faut plus être dérangé par ce phénomène mais au contraire il est indispensable de la mettre au centre de notre questionnement sur l’accueil et l’hospitalité. Historiquement, l’origine de l’hospitalité date du moyen âge où, à travers l’action de l’église et des sœur. En effet, ce rôle est dédié à l’église. C’est à partir du 19ème siècle que l’hospitalité devient une affaire d’état. Si nous prenons l’exemple de Calais, le camp est situé à plusieurs kilomètres entouré de barbelés, bien délimité et contrôlé par la police, bordé également par une infrastructure imposante qu’est l’autoroute. Sur ce territoire, ils sont simplement tolérés. Suite à cela, de nouvelles solidarités se sont déployées. Le camps devient au fur et à mesure un espace de vie et une urbanité s’y opère 11. L’entraide et la solidarité y sont très présente. On observe donc une sorte d’hospitalité urbaine. C’est le point de départ pour certaines villes comme Paris pour repenser le manière d’accueillir des migrants comme précisé plus haut. Elle va finalement de plus en plus intégré cette réalité dans sa politique de fabrication de la ville. La volonté est d’intégré ces structures d’hébergement au sein même de Paris comme par exemple les grands voisins etc... L’hospitalité c’est bien accueillir, c’est à dire permettre à ces populations de ne plus être en marge mais au contraire d’être intégrée dans l’urbanité pour en devenir un élément constitutif de la ville. 11.

Hanppe Cyrille, « Vers la ville accueillante : un projet architectural et politique », Vidéo du séminaire Lieux et Enjeux du CRH-LAVUE le 15.03.18 « L’éphémère et le temporaire dans l’architecture et la ville contemporaine » https://www.youtube com/watch?v=8CaI4hBr2ss

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Selon Michel Agier : « L’hospitalité c’est faire preuve d’une certaine solidarité et en essayant de comprendre ces populations prendre conscience de ce qu’elles ont pu vivre et savoir comment faire en sorte quelles se reconstruisent » Schéma tryptique 3- Éviter le triptyque : Exclusion, extraterritorialité et exception Dans ce contexte où la présence de centre d’hébergement au sein de la ville est de plus en plus courante, il est indispensable selon moi de la penser comme une

La notion d’exclusion:

donnée de l’urbanité, un élément intégré à celle-ci. Aujourd’hui ces structures

Tout d’abord, l’exclusion signifie ne pas accepter, ne pas prendre en compte, lais-

sont stigmatisées et pour la majorité d’entre elle perçu comme un espace qui fait

ser de coté. Les migrants seraient une catégorie à part, une masse non pensante

peur, qui est dévalorisant, que l’on veut à tout pris éviter. Ceci provoque un rejet

représentant un fardeau. Le terme de réfugié ou de migrants insère dans des cases

de la part des populations aux alentours mais également un renfermement sur

bien spécifiques ces populations. Il y a d’un côté les migrants et de l’autre il y a

eux même de la part des personnes hébergées. Afin d’assurer cette intégration

nous. La médiatisation participe à cette stigmatisation. Cela fabrique une image

et une prise en compte de ces structures, il est important d’éviter les 3 notions

générale dévalorisante. On appelle migrants toute personnes d’origines étran-

suivantes : L’exclusion, l’exterritorialité et l’exception. Ces trois notions ont été

gères arrivant sur le territoire Français. Cette usage du terme « migrant » à une

développés par Michel Agier et Michel Foucault afin de démontrer que celles-ci

connotation négative et ne reflète pas la soufrance des ces Hommes ayant fuient

ne permettent en aucun cas la prise en compte de ces centres et leur intégration

des situations de crises, de guerre, de famines, de catastrophes naturelles de leur

dans la ville. Il s’avère donc indispensable de les éviter lors de la conception de

pays d’origine. Ces préjugés fabriquent une distance sociale, une méfiance réci-

ce type de structure. Je vais expliciter ces trois termes qui sont les principaux

proque, une peur qui au final divise et exclue. Dans la réflexion des centres d’hé-

facteurs plaçant certaines populations en dehors fabriquant une forme de négation

bergement de Paris, la volonté est de favoriser une certaine solidarité, une prise

de celles-ci.

en compte de l’autre et de ses difficultés. Les grands voisins sont un exemple de solidarité et d’inclusion comme on le verra plus tard, dans la deuxième partie.

12. 13

Le mot Perou «L’atelier public de paysage,n°9 (2015-2016). P.2 Stadelmann .L «Habiter l’inhabitable», PFE, ENSAPVS, 2018

Cependant, certaines structures restent stigmatisées comme c’est le cas du centre d’hébergement du 16ème arrondissement de Paris.

15


L’arrivé de ce centre a été très mal perçu et à fait l’objet de nombreuses pétitions

manière à ce qu’il ne génère pas d’influence importante sur la ville ou d’engage-

contre son ouverture. Ce quartier réputé comme chic ne voyait pas d’un bon œil

ment de dévalorisation. Beaucoup de Maire prennent cet hébergement de manière

l’arrivé de ces migrants, anticipant sans fondement la dévalorisation de leur quar-

purement fonctionnaliste et donc implante ces structures par obligation mais dans

tier. On en déduis que les centres d’hébergements monofonctionnels ont donc fait

des territoires éloignés. L’exterritorialité consiste en la création d’un lieu hors

et font toujours l’objet d’un rejet, d’une peur et finalement d’une exclusion sociale

des limites où les migrants seront simplement tolérés mais pas inclus dans l’ur-

au sein d’un territoire commun. Au contraire, il est important de faire de ce lieu

banité. C’est ce concept du hors lieux définit par Michel Foucault qui selon lui

un espace multifonctionnel dans lequel les rencontres et la mixité d’usage atténue

« est un territoire qui se situe à la bordure, non totalement à l’extérieur mais à la

cette peur et cette méfiance réciproques de la part des habitants du quartier et des

limite stricte entre le dedans et le dehors ». Lusseault déclare pour sa part : « Le

populations hébergées. « Développer un nouveau projet, c’est le penser intégré

pouvoir de spatialiser les activités humaines en construisant des espaces et des

dans son environnement, comme une partie de ville avec des échanges entre l’in-

territoires strictement fonctionnels » Le centre d’hébergement d’Ivry sur seine est

térieur et l’extérieur qui créent une urbanité » Cyrille Hanappe dans un entretiens

un exemple de ce symptôme et de cette volonté d’écarter les migrants pour éviter

pour le journal urbanité en 2016. Cependant, il ne faut pas perdre de vue le fait

les répercutions sur l’image de la ville et le bousculement des habitudes. Il est

que ces populations sont là pour se reconstruire et repartir sur de bonnes bases.

situé dans la zone industrielle , sur l’ancienne usine des eaux. Malgré la qualité de

Il est donc important de ne pas empiété sur leur mode de vie sous prétexte que la

l’architecture de ce lieu visant à permettre à ces populations de se stabiliser men-

volonté est d’ouvrir ces structures pour les intégrer plus facilement. Donc, tout

talement et physiquement de manière temporaire, il ne participe pas à l’inclusion

en prenant en compte ce fait, le centre d’hébergement doit donc s’intégrer au sein

dans l’espace urbain car il est trop en marge géographiquement. Cela a provoqué

d’une urbanité de façon subtile et hiérarchisée afin qu’il en devienne un maillon

donc des répercutions sociales et une mise à l’écart. Il semble donc important

de la chaîne urbaine, un espace qui puisse répondre à des enjeux urbains.

d’inclure ces structures au sein de la ville dans le but d’une part de permettre à ces populations de se mouvoir et de profiter des services que proposent la ville mais

La notion d’extraterritorialité

également de destigmatiser ces centres en ne les cachant pas mais au contraire en

Le deuxième terme est l’exterritorialité. Cette notion est représentative de nom-

les rendant visibles.

breux centres au vu de la pression foncière opérée dans la ville mais également par les communes devant créer des centres d’hébergements mais les situant de

16


La notion d’exception

Le droit à la mobilité est adossé au droit à la ville ». Il est donc nécessaire d’in-

Enfin le troisième terme développé pas Michel Foucault est l’exception. Cette no-

tégrer ce processus d’accueil dans notre manière de constituer la ville. Il ne faut

tion est représentative d’un espace « hors zone », une parenthèse dans la ville où

pas le considérer en marge et vecteur de désordre mais au contraire s’en servir

rien est habituel et qui par conséquent nous échappe. Cela donne lieu à une stig-

pour penser la ville autrement grâce à son caractère temporaire favorisant les

matisation et des préjugés constants. Nous avons peur de ce qui nous dépassent

expérimentations.

ou bouscule nos habitudes. Une situation comme l’accueil de migrants dans les centres d’hébergement deviens une exception car elle ne se constitue pas à la base de la fabrication de la ville mais constitue s’avère être une nouveauté vécu comme une contrainte. Les centres ne doivent donc pas demeurer une exception mais au contraire un constitutif de la ville. Comme un projet architectural classique, il doit être façonné en relation avec son environnement afin de se fondre dans la masse et ne pas apparaître comme un intrus. « C’est important de donner quelque chose au quartier, qu’il y ait des espaces en interface, ouverts aux habitants du quartier, qui ne créent pas une enclave qui fait peur. » Cyrille Hanappe. Par conséquent, ces trois notions importantes doivent être étudiées afin de les éviter dans le processus d’accueil des migrants. Il faut faire en sorte d’intégrer ces centres d’hébergement en milieu urbain en faisant en sorte de favoriser l’inclusion social, l’ouverture et enfin généraliser cette manière de faire afin d’intégrer cet accueil dans une nouvelle manière de fabriquer la ville. L’architecture et la spatialité jouent un rôle fondamental dans un processus d’inclusion. Selon Cyrille Hannape : « Penser l’accueil, c’est penser la forme de la ville de demain dans une approche qui intègre accompagnement de la mobilité, dignité, respect, émancipation des hommes, mais également écologie, rapidité d’installation, transformation et recyclage de l’acte constructif.

13

Stadelmann .L «Habiter l’inhabitable», PFE, ENSAPVS, 2018

17


Habiter, c’est s’établir. Michel Lusseault s’est beaucoup intéressé à la question de l’habiter et notamment à cette distinction entre « résider » et « habiter » Selon lui, « Habiter,ce n’est pas seulement un fait mais c’est plutôt une façon subjective de pratiquer un espace et de s’y projeter à court ou long terme » Puis il différencie

C Définir l’habitabilité

ces deux termes : « Et c’est là la différence avec le terme « résider ». Résider signifie loger dans un endroit, un lieu où l’on se trouve régulièrement. Que l’on

Après l’accueil, il est indispensable de permettre à ces populations de pouvoir ha-

soit nomade ou sédentaire, nous résidons, c’est un ancrage spatial, un endroit où

biter leur lieu d’accueil afin qu’il s’y sente le mieux possible et ainsi favoriser leur

l’on s’arrête. C’est aussi une étape pour aller résider dans un autre lieu ». Donc

émancipation personnelle et le retour à une vie plus stable. C’est ce que défend

habiter, c’est une manière d’investir, de demeurer, de donner du sens à ce lieu en

Cyrille Hanappe dans « Ville accueillante » ou encore Michel Lusseault.

le travaillant et le façonnant afin de se l’approprier. Mais habiter est une notion beaucoup plus large, Lorsque l’on décompose le mot,

1- Habiter vs résider

on y distingue « Habitat » c’est à dire un espace de vie d’une espèce particulière que se soit les animaux, les fleurs, les Hommes . Il défini donc un espace de vie

Au cours de leur périple, les migrants et réfugiés sont passés par différentes si-

bien plus vaste que la seule résidence.

tuations où ils ont fait preuve de courage et de force : Un migrant hébergé dans le centre d’hébergement d’Ivry sur Seine m’a déclaré : Je viens du Nigéria, j’ai traversé toute l’Europe pour venir ici, je suis passé par énormément de choses, notamment la mise dans des camps en Italie, où nous étions enfermés dans une zone , un terrains ou nous étions tolérer simplement et où nous ne pouvions rien faire, les baraques étaient figée, ils voulaient dicter nos vies ». Pour comprendre comment permettre à ces populations d’habiter, il me semble important de définir cette notion.

2- Définir un ancrage, mettre en mouvement et établir des connexions D’après Foucault, habiter se définît selon trois notions complémentaires « L’ancrage, la mobilité et les connexions » 14. D’une part, l’habitat correspond alors à l’ancrage c’est à dire vivre un ensemble d’espaces où l’on peut subvenir à ses besoins et à ses désirs c’est à dire travailler, jouer, manger, rencontrer, se cultiver, flâner.. 14.

Michel, L. (2017), «habiter vs résier» p 318 extrait de Constellation,s, Face à la terreur et à la folie, face à la peur et au repli. Coédition Actes Sud, 765p

18


L’habitat est aussi déterminé par la mobilité « En étant en mouvement, j’ai une

C’est un lieu où il peuvent subvenir à leur besoins que sont manger, boire, dor-

autre relation à l’espace que lorsque je réside dans mon lieu d’ancrage » (Fou-

mir, retrouver une certaine intimité mais aussi une fierté. Les logements doivent

cault). Le mouvement que se soit par le vélo, la marche ou la voiture nous permet

donc demeurer flexible, ouvert à divers modes de vie et non penser comme une

d’arpenter un espace et de quelque part de l’habiter

standardisation de l’habitat. Chacun habite à sa façon ce qui vise à ne pas désta-

Le troisième critère correspond à la connexion. L’habitat est déterminé par un

biliser une fois de plus ces populations en leur imposant des manières de faire et

ensemble de populations et d’espaces qui sont connectés les uns aux autres. Les

de vivre. Il n’y a donc pas de manière standardisée d’habiter, chacun habite de

connexions permettent d’accéder à un ailleurs dans mon habitat, d’ouvrir les

manière particulière en fonction de son caractère, de sa culture et de l’endroit où

portes grâce aux compétences des autres ou à la mobilité. Ces connexions faci-

il réside. Il s’agit de se protéger des éléments mais également de s’approprier un

litent l’accès à l’information et au savoir.

espace et le façonner à son image dans le but de s’y identifier.

Par conséquent Habiter selon Michel Lussault : « c’est vivre cet habitat, qui est

Une fois cette ancrage défini, il faut pouvoir permettre à ces populations de s’ou-

composé de subtils ancrages de mouvements et de connexions ». Nous habitons

vrir, de favoriser un arpentage du lieu où ils habitent, des mouvements en dé-

le monde avec une échelle de plus en plus vaste. Le migrants met en tension des

veloppant des services et usages qui leur sont accessibles. Enfin les connexions

lieux où il s’arrête, des mouvements et des connexions dépassant celle du logis

sont très importantes. En effet, afin de permettre une ouverture et ainsi favoriser

et de la résidence. »

une émancipation personnelle, il est nécessaire de pouvoir se connecter à l’en-

Dans cette logique d’accueil de migrants, la question est de savoir comment faire

vironnement dans lequel on est accueillis. En cela, les lieux ne doivent pas être

pour qu’il puisse habiter c’est à dire s’ancrer, se déplacer mais également établir

monofonctionnels mais au contraire ouvert à tout types d’usages permettant ainsi

du lien avec la société dans laquelle il se situe.

à ces populations d’établir des liens, de développer leur savoir et leur participa-

Habiter n’est pas seulement un titre, c’est une pratique « Que fait l’être humain ?

tion à une vie collective. Cyrille Hanappe dans son ouvrage La ville accueillante

Il habite, c’est à dire il organise ce subtil composé de matière et d’idée qu’est son

déclare « la cogestion doit être la règle pour reconnaître les habitants comme des

habitat. «L’espace est un doute, il me faut sans cesse le marquer, le désigner, il ne

acteurs à part entières et non comme des personnes assistées à charge pour la

m’est jamais donné, il faut que j’en fasse la conquête » Foucault.

société. Les lieux ne doivent pas être monofonctionnels mais, bien au contraire,

Dans la réalisation des centres d’hébergement, cette définition de l’habiter s’avère

ouverts à différents types d’habiter » 15.

fondamentale. Les migrants doivent pouvoir établir un ancrage, un lieu auquel ils s’identifient et où ils peuvent retrouver une stabilité et une confiance en eux.

15.

Hanppe Cyrille, « Vers la ville accueillante : un projet architectural et politique », Vidéo du séminaire Lieux et Enjeux du CRH-LAVUE le 15.03.18 « L’éphémère et le temporaire dans l’architecture et la ville contemporaine » https://www.youtube.com/watch?v=8CaI4hBr2ss

19


Madeleine Buyck « Le développement social désigne le processus permettant aux

imaginaires, chaque habitant organise au jour le jour son habitat. Plus exacte-

habitants d’acquérir de nouvelles capacités d’expression, d’initiatives et d’orga-

ment, il cohabite en permanence avec tous les autres êtres humains et se confronte

nisation et c’est à partir de ces conditions que qu’ils pourront modifier réellement

ainsi à l’enjeu de la mise en commun de l’espace habité.

leur attitude envers leur environnement et s’insérer dans la vie sociale et profes-

Les centres d’hébergement se doivent donc d’établir cela afin que les populations

sionnelle ». Par conséquent, il est important de ne pas générer un lieu exclusi-

puissent habiter dans un ensemble d’éléments ayant pour but qu’ils puissent se

vement dédié à l’hébergement mais plutôt un espace favorable aux rencontres,

sentir exister et envisager un projet. Cela permet d’atténuer la peur que peuvent

à l’expérimentation et au développement de nouveaux savoirs faire permettant

ressentir les populations hébergées mais également les habitants du quartier en-

ainsi le développement de compétences et de connaissances utiles dans cette vo-

vironnant en créant une véritable urbanité et un tremplin pour ces populations en

lonté de retrouver une vie normale et stable.

quête de renouveau et de stabilité. Certains centres sont élaborés pour cela, c’est le cas des Grands Voisins dont nous étudierons l’exemple plus tard, mais c’est

Le degré d’habitabilité et d’appropriation détermine les notions de « porter atten-

également le cas pour le centre d’hébergement d’Ivry sur seine 17. L’architecture

tion » et de « prendre soin » développées par Michel Lussault :«Prendre soins»16

déployé permet un ancrage, Le mouvement et les connexions sont aussi favori-

permet la stabilité d’un habitat et sa préservation lors de crises ou autres problé-

sées. Cependant, dans ce cas précis, le centre est situé en retrais de la ville, dans

matiques, c’est le maintien d’un espace de vie. « Porter attention c’est reconnaître

la zone industrielle ce qui limite fortement les mobilités et les relations avec le

cet habitat et le valoriser. Cet habitat est déterminer par les habitants eux mêmes.

quartier.

Le vécu, l’expérience individuelle à toujours raison ». Ces deux notions sont

L’architecture et la spatialité détermine l’habitabilité. Il est donc de primordiale

importantes car elles déterminent le vécu de certains espaces. Les populations mi-

de générer des espaces habitables vecteurs d’identification et d’émancipation de

grantes arrivent dans l’urgence et ont conscience que leur hébergement n’est que

la part des populations migrantes mais également favorable à une intégration et

temporaires. La temporalité est un facteur qui n’incite pas à l’appropriation et à

un participation à l’urbanité du territoire dans lequel il s’inscrit.

l’identification. Un habitat doit donc être généré afin que les populations habitent

Pour comprendre cela il faut revenir aux fondamentaux de l’architecture, ce pour

cet espace malgré le temps court et s’y établissent.

quoi elle s’est établit.

Par conséquent, Habiter ce n’est pas seulement résider quelque part ; c’est aussi se mouvoir et se connecter. Doté de compétences et mû par des valeurs et des 16.

Michel, L. (2017), «habiter vs résier» p 318 extrait de Constellation,s, Face à la terreur et à la folie, face à la peur et au repli. Coédition Actes Sud, 765p

17.

Gasquet Blanchard, C. « Le provisoire qui dure. Géographie comparée de deux centres humanitaires

20


3- Retour aux fondamentaux de l’architecture

Il poursuit en disant que ‘ C’est important de donner quelque chose au quartier, qu’il y ait des espaces en interface, ouverts aux habitants du quartier, qui ne

Dans ce contexte où il faut permettre à ces populations de retrouver une dignité,

créent pas une enclave qui fait peur »

une stabilité, il est nécessaire de générer des architectures qui vont dans ce sens

Le rôle et l’intervention de l’architecte semble donc indispensable dans la mise

et qui permet à ces personnes au final de subvenir à ses besoins que sont manger,,

en place de projet d’hébergement d’urgence. Olivier Leclerc, un membre de l’as-

dormir, se protéger. L’objectif est d’abord de protection, c’est à dire de générer

sociation PERROU évoque cet influence de l’architecte : « Nous les architectes

des espaces clos, non accessibles par autrui et dans lequel on se sent en sécurité.

pouvons apporter des solutions auxquelles les autres acteurs ne peuvent pas ré-

« Si nous essayons de classer les choses indispensables à notre existence en fonc-

pondre. Les autres n’ont que des leviers juridiques ou normatifs quand on a des

tion du temps pendant lequel nous pouvons vivre sans elles, nous obtiendrons

solutions qui s’adaptent à leurs contraintes »

l’ordre suivant : air, protection climatique, eau nourriture. Tous les autres besoins

Nous allons donc dans ce mémoire évoquer le cas du centre d’hébergement des

viennent loin derrière » 18.Une fois que cette sécurité est assuré, cette architecture

Grands Voisins à Paris afin de s’intéresser à l’influence de l’architecture et de la

se doit d’être flexible afin que les habitants puissent la façonner à leur image et

spatialité sur l’émancipation ainsi que l’intégration des population hébergées.

ainsi favoriser ne certaine fierté de leur part. Ces espaces se doivent d’être modulable, personnalisable afin que les populations puissent d’identifié et surtout s’approprier un espace même dans une temporalité très courte. « Il faut assurer une certaine évolutivité afin de favoriser les bonnes conditions d’accueil, le confort et l’identification» Agier. D’autre part, l’architecture ne doit pas être fermée sur elle même mais au contraire d’intégrer dans un contexte Pour cela il est indispensable de développer des architectures qui le permettent avec une certaine hiérarchie entre espace publics et espaces privés. « L’architecture permet de façonner un centre d’hébergement intégré dans son environnement, comme une partie de ville avec des échanges entre l’intérieur et l’extérieur qui créent une urbanité.» C. Hanappe. 18.

Friedmann.Y. (1978) L’architecture de survie, une philosophie de la pauvreté. L’éclat poche, 223p

21


Les espaces permettent aux entreprises, aux artistes etc de profiter d’espace de travail pas cher. Des relations sociales se mettent alors en place entre les résidents migrants et les entreprises. Le rôle de l’association Yes We camp est de se charger

D- Présentation des terrains d’études

de favoriser la cohabitation entre les résidents et les fonctions. Les associations interragissent entre elles. Sur le site cohabite 1000 personnes. 600 personnes y

1- Présentation des Grands Voisins

vivent, 300 personnes y travaillent et 80 étudiants étudient dans l’école de sage femme. A l’avenir, le projet de l’éco quartier proposera 48000 m2 de logements

L’histoire des Grands voisins est issuE de la réhabilitation de l’hôpital saint

dont 50% de logements sociaux, des equipements publics et activité, des espaces

Vincent de Paul. Une crise dans la structure de cette établissement a provoqué

verts et de l’agriculture urbaine en toiture. Certain bâtiments seront réhabilités.

sa fermeture. Les couts de remises aux normes étaient trop importants et les dé-

Cette études des grands voisins va nous permettre de montrer en quoi L’architet-

placement de l’hopital s’averait moins couteux. Un projet d’éco quarter est alors

cure et la spatialité des grands voisins permet l’appropriation et l’intégration des

décidé. Mais se pose alors la question de la transition. Que faire de ces bâtiment

migranst avec le quartier dans lequel il s’implanteCette étude mettra aussi en

lors des études. A la base, le site devait être clos cependant le coût du gardiennage

comparaison les Grands Voisins avec d’autres centres d’herbegement d’urgence

et de l’entretien était trop important. De là a émergé l’idée de donner une nouvelle

que se soit le centre d’ivry sur seine ou le centre situé dans le 16eme arrondisse-

valeur d’usage et ce lieu et a cette architetcure. L’ambition était d’expériementer

ment de Paris à la lisière du bois de boulogne.

la notion de bien commun et de vivre ensemble. L’association Aurore à jouer son

Les grands voisins accueil une centaines de migrants souhaitant s’insérer et ce qui

rôle d’insertion sociale et de favorisation de de l’insertion. L’association Aurore

‘m’interresse est de savoir comment les migrants vivent ces espaces, s’approprie,

investit l’ancien hôpital pour construire un centre d’hébergement d’urgence.

participe, s’intègre. Comment les espaces et l’architecture détermine leur senti-

Depuis 2014 et la fermeture de l’hôpital, l’association est le gestionnaire de ce

ment d’identification et l’intégration dans le quartier dans leuel ils vivent.

site de manière gratuite avec en contreparti un entretien. Cependant le site de 3 hectar est trop grands pour être exclusiement dédié à l’herbegement. De nombreux espaces restent vacants. L’arriver de ce centre d’herbegement est mal perçu pas les habitants du quartier. Un travail de mixité sociale est alors à effectuer. Au-

IMAGES GV

rore fait donc appel à l’association plateau urbain afin de faire venir de nouvelles strucutres d’occupation et de nouveaux locataires.

22


2- Métodologie

Puis, je met ma déambulation au service de la recherche. Les visites du site se s’effectue en 3 temps : la première est dédiée à la découverte, à comprendre où se

Afin de donner des pistes de réponses et ainsi déterminer les dispositifs qui fa-

situe chacun de espaces intérieurs et extérieurs et quels en sont les statuts. C’est

vorisent cette intégration dans le contexte d’implantation, je vais donc effectuer

donc à partir de cette visite que j’ai pu définir les moments contrastés et précis

une étude socio-spatiale des Grands Voisins, situé dans le 14 ème arrondissement.

où j’allais revenir et la façon dont j’allais progresser dans l’espace pour avoir

Cette étude permet une approche à la fois sur les populations, leur pratiques,

une vison générale et précises de la façon dont fonctionne les grands voisins.

leur mode de vie mais également sur le rapport à l’espace qu’ils entretiennent,

Je procède donc de manière progressive de la visite de logement vers l’étude des

l’appropriation. Au delà d’un travail de recherches documentaires et bibliogra-

espaces publics et de la relation au quartier, ce qui me permet de comprendre de

phiques, je propose donc de réaliser un travail de relevés, d’observation mais

manière ordonnée le processus de reconstruction et d’intégration des migrants

également d’entretiens.

dans le contexte d’implantation. Les deux visites suivantes sont semblables dans

Afin de réaliser une étude allant de l’appropriation de la chambre vers la relation

le processus mais à des moments de la journée différents (12h et 16h) permettant

entre la structure d’urgence et son contexte d’implantation, je m’appuie sur une

ainsi d’avoir une connaissance plus général du site, du fonctionnement et des

série d’entretiens de différentes personnes.

modes d’appropriations. Ces 3 visites dont l’objet et l’heure différent, permettent

J’interroge 3 personnes migrantes (Situation, mode de vie,appropriation, rela-

une compréhension asez fine et complète de la situation et ainsi percevoir.

tion à l’extérieur), 2 membres des associations (fonctionnement du site, service, interaction) ainsi que 2 habitants du quartier (Perception, usages, appropriation,

Afin d’étayer mon propos, cette étude est réaliser sous la forme de différents mé-

relation et interaction). Chacun des entretiens prend la forme d’une discussion

diums que sont les paroles captées, la cartographie, le plan et la photographies.

préalablement préparée. Cette façon de procéder s’avèrent appropriée dans cette

Ces moyens s’avèrent très important pour comprendre la spatialité du lieu et en

situation ainsi dans cette volonté de capter des informations et des données.

quoi l’architecture influence clairement la reconstruction des personnes et leur intégration dans le contexte.

- A cela s’ajoute un travail d’observation sur l’appropriation des espaces, retranscrit par un travail cartographique, de plan et de photographies permettant ainsi de révéler certaines choses qui paraissent parfois invisibles mais qui sont fondamentales pour comprendre le fonctionnement.

23


3- Description Les Grands voisins sont apparus suite à la réhabilitation de l’ancien hôpital Saint Vincent de Paul situé dans le 14ème arrondissement de Paris (Voir la carte ci-dessous), qui pour des raisons d’obsolescence et d’insalubrité à stoppé ses fonctions. Le coût de remise aux normes étant relativement important, le site à alors été déplacé vers d’autres structures hospitalières. Pour bien comprendre l’évolution du projet, je me réfère à une conférence de Pascale Dubois, membre de l’association Aurore et coordinatrice du projet « Les Grands Voisins » ayant eut lieu le 9 novembre 2017 à l’ENSAPM. Plan de masse

L’histoire du site est issue de transformations successives. Au départ, un couvent y était affecté en 1655 notamment dans le bâtiment de l’oratoire. Il est ensuite devenu un lieu d’accueil pour les enfants abandonnés, les filles mères. L’hôpital est créé en 1930, avec l’ajout peu à peu de nouveaux bâtiments. Le site fait environ 3,4 hectares avec des constructions d’époques (Voir le plan masse ci-dessus) En 2008, suite au déplacement des ses fonctions hospitalières, il a alors été question de réaliser un projet d’écoquartier dont les travaux commencerait début 2018. Cependant, c’est alors posé la question de la transition, ce moment d’une durée de 7 ans (entre 2011 et 2018), où ce site serait dépourvu de fonctions. Carte de situation 19.

Godweski.F «Faire la ville autrement, etat des lieu de nouvelles pratiques urbaines: les collectifs d’rchi tectes», Mémoite de fin d’étude, 2017

Au départ, le site est clôturé par de grandes palissades mais le coût de l’entretiens et de la surveillance contre tout type de squat et d’usage était beaucoup trop important.

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C’est pourquoi, il a été décidé de donner une nouvelle valeur d’usage pendant

En échange, les structures doivent participer à la vie du site et générer ainsi des

cette période de transition. C’est alors que l’association Aurore, une structure

liens avec les populations hébergées. En effet, cela doit favoriser l’intégration de ces

luttant contre l’exclusion depuis environ 50 ans, est intervenu et s’est entretenu

personnes dans un ensemble visant ainsi à leur reconstruction et leur ouverture mais

avec l’assistance publique des hôpitaux de France, le propriétaire du site, afin de

également pour agir sur la perception du quartier . C’est en 2015 que la mairie de

lui proposer un nouvel usage en attendant la construction du nouvel Eco-quartier,

Paris fait appel à l’association Yes We Camps de se charger de cette cohabitation et

lui évitant ainsi les coûts de maintenances mais aussi la bonne tenue du site.

de la spatialité des lieux. L’ambition est donc d’ouvrir le site au public pour d’une

Aurore a donc choisi de mettre en place un centre d’hébergement de popula-

part le faire vivre, fabriquer une nouvelle urbanité mais également afin de le rendre

tions défavorisées et de migrants en quête de stabilisation après le parcours et

visible pour ainsi atténuer la méfiance et la peur vis à vis des structures d’héberge-

les événements tragiques qu’ils ont pu connaître au cours de leur périple. Face à

ment en démontrant que l’on peut vivre avec. Ces trois associations travaillent alors

cette urgence on recherche l’efficacité en mettant à disposition ces locaux pour

en symbiose. De 2015 à 2018, 1000 personnes cohabitent ensemble sur le terrain.

agir rapidement. Depuis 2014, Aurore gère ce bout de territoire de 3,4 hectares

Sur ce total de 1000 personnes, 300 travaillaient, 600 étaient hébergés tandis qu’une

de superficie et dispose de la gratuité du site mais en contre parti, elle s’engage

centaine d’étudiants réalisaient leurs études dans l’école de Sage femme.

à l’entretenir et à favoriser l ‘unité sociale. Cependant, au vu de la surface très importantes de ce lieu, le simple hébergement d’urgence ne suffisait pas à investir l’intégralité des bâtiment et donc nombreux d’entre eux étaient vacants. D’autre part, l’installation d’un centre d’hébergement dans le 14 ème arrondissement de Paris à fait l’objet de nombreuses polémiques et des réticences de la part des habitants, percevant cet aménagement comme dégradant et nuisible à leur quartier. C’est ainsi que Aurore a fait appel à une nouvelle association s’intitulant Plateau Urbain afin de pouvoir ouvrir ce lieu à d’autres types d’occupation, tel que des associations, des entreprises etc. Cela a permis de réactiver des anciens bâtiments vacants. Mais également à des jeunes entreprises, des collectifs d’artistes ou des entrepreneurs de disposer de lieux de travail à moindre coût. Vue aérienne

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- Le bâtiment de l’oratoire et le bâtiment Robin

z

Le site est composé d’un ensemble de bâtiments d’architecture et d’époques différentes issues des nombreuses transformations au cours de son histoire comme nous pouvons le constater sur le document axonométrique ci-dessus. Le site se situe dans le 14ème arrondissement de Paris, Il est situé sur la rive gauche de la Seine, dans le sud de la ville. Il englobe des quartiers qui faisaient autrefois partie de Gentilly et de Montrouge. Les grands voisins sont localiséss le long de l’avenue Denfert Rochereau entre la place et port Royal. La situation du site est assez encloisonné avec en face le couvent de la visitation et de l’autre les œuvres des jeunes filles. Le site n’est pas traversable directement donc cela constitue une contrainte assez marquée dans son attractivité et sa capacité à être irrigué. Ce lieu a vu le jour en 1655 et a fait l’objet de nombreuses transformations architecturales dont il est important d’évoquer.

Le bâtiment de la cour de l’oratoire et de la cour Robin est le premier à avoir été construit sur le site de l’hôpital en 1650. Sa matérialité en pierre ainsi que sa hauteur composé de 4 niveaux lui confert une certaine monumentalité. Les hauteurs sous plafond son relativement importantes et de grande ouvertures viennent apportées de la lumière aux différents espaces intérieurs. Sa typologie en equerre à été complété au 19ème siècle par une extension générant une cour ouverte marquant l’entrée du site et une cours fermée plus privée. Pendant un temps attribué à la religion, il est ensuite dédié à un hôpital spécialisé dans la pédiatrie et une maternité. 26


- Le bâtiment de la lingerie

Les bâtiments Pinard et Lelong ont été construit plus tard au milieu du 20 ème siècle et étaient dédiés respectivement à la mternité pour l’un et aux études biochimiques pour l’autre. L’architecture employée contraste avec celle des autres de part la hauteur mais également la matérialité en brique. De l’inauguration des Grands voisins jusqu’au début 2018, ces bâtiment étaient dédiés exclusivement à l’hébergement d’urgence dont l’accès était très contrôlé. Ils se situent dans la profondeur de la parcelle, dans un endroit plus calme et privé qui leur ai exclusivement dédié Aujourd’hui, leur fonction n’est pas retenu et sera détruit pour

Le bâtiment de la lingerie construit au début du 19ème siècle est une extension de l’hôpital et a fait office de buanderie à l’époque. Il répond à la monumentalité du bâtiment de l’oratoire avec ces grande ouvertures. Il est devenu dans le

laisser place au nouveau quartier.

- Le bâtiment Pierre Petit

cadre des Grands Voisins une salle communale dans laquelle peut se dérouler des activités et des événements générant ainsi un nouvel espace partagé et de rencontres, des vocations en montrant ses compétences et ses talents. Il se situe derrière le bâtiment de l’oratoire et est accessible depuis la cours Robin

- Les bâtiments Pinard et Lelong

Le bâtiment Pierre Petit construit au 19ème siècle pour étendre l’hôpital à eu également la fonction exclusive d’hébergement et va être détruit d’ici quelques semaines.

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- Le bâtiment Colombani

Enfin, le bâtiment Colombani est construit également au milieu du 20 ème siècle et est aujourd’hui habiter pasr des entreprises et des associations Les Grands voisins saison 2:

En 2018, contrairement à ce qui était

prévu initialement, l’expérience des Grands Voisins est prolongée jusqu’à 2020 prolongeant l’investissement des bâtiments de l’oratoire et Robins, de la lingerie et le bâtiment Colombani. Nous pouvons observer sur le document axonométriques les bâtiments encore disponibles en 2018. Pour cette nouvelle saison, une partie des centres d’hébergement est maintenue représentant environ 150 personnes, un accueil de jour recevant des demandeurs d’asile récemment

A travers cette étude, nous allons tenter de montrer en quoi la spatialité et l’architecture des grands voisins déterminent l’appropriation des espaces et l’intégration de la part des population hébergé dans le contexte dans lequel ils sont installés. Nous verrons que ces organisations favorisent les interactions et la reconstruction de ces populations sinistrées mais également nous verrons que cette volonté

arrivés à Paris, une centaine d’associations, d’artistes, d’artisans, de jeunes

d’ouvrir et de rendre public ces espaces provoquent un certains renfermement

entreprises développant leurs activités et des équipements ouverts sur le quartier

des hébergés et finalement une ouverture plus difficile à mettre en place que l’on

sont expérimentés comme la conciergerie, l’espace bien-être, la ressourcerie, le

peut le penser.

restaurant solidaire d’insertion... Il y a toujours cette volonté de générer des espaces qui soient accessibles pour ces populations en difficulté afin de permettre leur réinsertion et leur reconstruction en se forgeant de nouvelles connaissances, se formant et en développant de nouvelles vocations

28


29


PARTIE 2

HABITER AUX GRANDS VOISINS

30


Analyse Etude de cas :

Ici dans l’organisation spatiale, il y a une véritable volonté d’inclure, de prendre

Après cette description spatiale et fonctionnelle du site des Grands Voisins,

delà du simple hébergement, une ferme intention de leur permettre de s’intégrer

je vais par la suite l’analyser en détail pour tenter d’en comprendre le fonc-

dans le territoire dans lequel ils arrivent.

en compte cette réalité de l’arrivée massive de populations migrantes avec au

tionnement et ainsi démontrer l’influence de l’architecture sur la reconstruction et le degré d’intégration de cette structure d’hébergement au sein

D ‘après l’architecte en chef Vincent Hannoun, quatre éléments fondamentaux

du contexte d’implantation. Pour cela et à travers une méthodologie assez

ont guidé la conception de ce projet comprenant pour trois d’entre eux des es-

précise énoncée dans la partie précédente, les diverses données recueillies

paces extérieurs et pour le dernier la manière d’occuper les bâtiments existants.

sont regroupées par thématique retranscrivant le processus de reconstruction

Les aménagements extérieurs sont évidemment très importants dans cette volon-

de ces populations que se soit dans un premier temps la protection, puis le

té d’interaction et de rassemblement :

partage et l’ouverture sur la ville. Ces différentes étapes sont conditionnées et nous le verrons comment par la manière dont la spatialité et l’architecture se déploie mais également par la localisation. Pour démarrer, il est important d’expliciter le projet de Yes We Camp Aménagement du site par Yes we camp Afin de comprendre ce qui en a découler et comment fonctionne le site au-

- Tout d’abord la signalétique qui permet une certaine compréhension du lieu et qui indique où se trouve les endroits, les espaces de vies collectives, les événements, les ateliers. On remarque que tout est visibles, il y a vraiment une volonté de transparence et de mise à disposition des lieux en faveur des résidents d’une part mais également en faveur des travailleurs ou du public..

jourd’hui, il me semble intéressant d’évoquer la manière dont a été pensé le projet et qu’elles étaient les intentions. La mission de Yes we camp a donc été de réorganiser le site afin de générer une nouvelle urbanité avec des espaces partagés mais aussi des espaces plus privés attribués aux personnes hébergés, aux entreprises et aux associations. L’objectif est donc cette intégration et cette remise en confiance pour ces populations sinistrées. Beaucoup de centres ne permettent pas cela car ils ont une approche techniciste et monofonctionnelle et occupe des lieux où les populations sont simplement tolérées.

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- Deuxièmement, les espaces extérieurs sont composés d’un mobilier très im-

Quant aux bâtiments, ils abritent les zones d’hébergement ainsi que des locaux

portant fabriqué par les résidents et qui permet un investissement de ces lieux

occupés par des entreprises. Au delà de cela, différents programmes culturels, de

pour tous et une homogénéité.

soin, de sport s’y développent également afin d’être mis au service des habitants mais également des populations extérieurs. Il ne suffit pas d’affirmer qu’un espace est “ouvert à tous” pour qu’il accueille de fait une mixité d’usagers. La présence de populations vulnérables a incité l’association à développer des programmes dédiés à ces personnes au cœur même du projet. La cohabitation qui résulte de ce choix devient une donnée structurante de l’intensité du projet. Ainsi l’accueil au centre de projets hybrides de personnes fragiles ou réputées dérangeantes, si souvent reléguées aux territoires en déprise, a la volonté de devenir la base d’une urbanité riche et dynamique.

- Pour finir avec les espaces extérieurs, il y a la notion d’investissement. En effet de nombreux espaces sont aménagés et aménageables par les résidents eux même favorisant d’une part, une participation à l’élaboration de leur lieu de résidence et un développement d’une certaine fierté et d’appropriation plus facile à atteindre

Axonométrie programmatique 32


Les espaces extérieurs et publics du site sont des constitutifs fondamentaux du projet car c’est eux qui vont permettre d’assurer des connexions, des liens entre les programmes et les usagers. La typologie architecturale de l’existant a favoriser cela. En effet, cette forme d’implantation éclatée génère des espaces de rassemblement et d’entre deux favorables aux rencontres, au flux, à l’organisation d’événements et d’activités visant à rassembler des populations diverses. La volonté était non pas de faire des espaces simplement de flux, de traversés etc mais au contraire de les mettre à nue en les rendant visibles grâce à la signalétique déployée mais également en les investissant d’une part par les activités de rez de chaussée dans les bâtiments, le mobilier favorisant l’appropriation ainsi que le développement de surface dédiée à diverses activités telles sque le jardinage,, la menuiserie... Les espaces intérieurs ont eux aussi été penser pour permettre des rencontres avec une mixité d’usages importante et la mutualisation de certains d’entre eux tel que les hall d’escalier, les salle communes. Plus précisément en rapport au domaine de l’hébergement d’urgence, on y accède par différentes entrées assez visibles et traversé par librement par d’autres usagers. Les logements sont associés à des espaces communs au même étage. Donc la volonté de l’association Yes we Camp était de faire en sorte que tout soit accessible facilement et efficacement, de mettre à disposition pour éviter de créer des frontières, des lisières difficilement franchissables. Nous verrons que ce modèle peut répondre d’une manière à cela, cependant, on peut voir clairement certaines limites se dessiner. Suite à cela je vais tenter d’expliciter les dessous de ce modèle à travers une étude partant de l’échelle de l’intimité à l’intégration dans la ville en passant par l’ouverture et le partage.

33


34


Pour bien comprendre, je me focalise sur l’hébergement dans un bâtiment dédié aux migrants dans lequel j’ai pu visité les logements des populations. Il s’agit du bâtiment de l’oratoire comme indiqué sur l’axonométrie ci-dessous.

AXONO

A. SE PROTEGER 1- Retour aux fondamentaux de l’architecture

L’entrée se fait de deux façons, soit par une soit par l’autre cour, dans l’angle Le premier objectif clair d’un centre d’hébergement d’urgence est de rassurer ,

de chacune d’elles comme nous pouvons le voir sur le plan de rez de chaussée

faire en sorte qu’ils se sentent protéger au delà d’un simple suivi personnel psy-

ci-dessus. D’autre part, le plan du premier étage et la photographie indiquent que

chologique et physique, Comme me la dit Karina de l’association Aurore, « la

les logements sont desservis par un double couloirs défini par les usages passés de

plupart ne parlent pas français, ce qui accentue leur peur car ils ne se font pas

l’hôpital. Au delà de cette double circulation, la fonction initiale déterminait des

comprendre et nous même ne pouvons pas les comprendre correctement ». La

chambres en enfilade conférant la possibilité de passer d’une chambre à l’autre

question de l’accueil et de l’hospitalité se pose ici. Il est donc nécessaire de reve-

sans avoir à passer par une circulation périphérique

nir aux fondamentaux de l’architecture c’est à dire permettre aux populations de s’abriter, se protéger du dehors et subvenir à ses besoins vitaux que sont manger, boire, dormir... Par conséquent, la protection de ces personnes passe d’abord par un espace qui va leur permettre cela si possible en leur attribuant un espace privé. Cependant, aux Grands Voisins, dans cet ancien hôpital, le nombre de places disponibles est limité et les logements sont souvent occupés par une, deux voir trois personnes d’origine et d’histoires différentes.

Carte de situation

Escalier «interdit au public»

La couble circulation menant aux logements

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Concernant l’organisation des logements ceux-ci sont composés de plusieurs

Les logements sont à la base dépourvu d’une certaine organisation laissant ainsi

portes car ils occupent pour certains d’entre eux une surface de 1, 2 ou 3 pièces

le soin aux populations de les arranger pour pouvoir construire l’espace dans le-

par rapport à l’hôpital d’origine.. Ces entrées ont une partie vitrée qui est souvent

quel ils vont vivre quelque temps. Les personnes hébergées ont à leur disposition

camouflée par des meubles du linge ou des dessins comme indiqué sur les deux

d’une part un lieu fermé ou ils vont pouvoir se reposer et se protéger, mais égale-

photographies. Yamina, 35 ans, Ivoirienne, aux Grands Voisins depuis 11 mois,

ment d’espaces où ils vont pouvoir se restaurer de manière privée ou partagée et

m’a avoué ceci : « Lorsque je suis arrivé, c’est la première chose que j’ai faite

de sanitaires et douches personnelles ou commune pour se laver et retrouver une

car j’avais besoin de me reposer et me retrouver seule avec moi même et que per-

dignité. On constate que le mobilier est également très présent, les populations

sonnes n’introduisent un regard dans mon intimité, je voulais me sentir comme

souhaitant disposer d’un maximum de services, d’objets sur place afin de limiter

dans une grotte à l’abri de l’extérieur qui fait peur». É­galement elle a disposer

les sorties à l’extérieur (voir les deux photographies). Les logements sont alors

des rideaux translucide afin de permettre ce repli sur soi. On remarque donc cette

très chargés par ces objets. On y met le maximum de choses afin d’avoir tout à

volonté de définir un espace de vie à l’abri d’un dehors menaçant ou intrusif.

sa disposition d’après Yamina « C’est un peu le bazard mais j’ai tout ce qu’il me faut et cela me rassure ».

Les espaces intérieurs sont très diversifiés. Certains disposent d’une douche , d’une cuisine, de chambres séparées au moins par une porte. D’autres au contraire ne profitent par de cela mais aménagent une cuisine eux même souhaitant avoir la possibilité de se restaurer de façon autonome et privée (voir le plan).

Plan de niveau courant 36


Plan de zonage et circulations Cependant, la protection de ces personnes est tout de même plus ou moins assurée et inhibé par le caractère très public des grands voisins . En effet, cette structure

On constate également que l’espace service du cinéma est accessible depuis

étant un lieu attractif, les flux de personnes sont très courant et les accès et cir-

le couloirs. Lors du troisième arpentage sur le site, les livreurs de décors fai-

culations verticales ne sont tout simplement pas contrôlés. En effet, on décompte pas moins de trois escaliers dont aucun n’est fermés. Les intrusions sont donc possibles et invisibles. Pascale Dubois, coordinatrice du projet et membre de Aurore déclare « Il y a parfois des intrusions comme des gens cherchant les toilettes et arrivant dans une chambre ar exemple, ce qui est problématique ». Moi même, j’ai pu rentrer, monter les escaliers sans obstacle sinon celui d’une simple indication sur les contremarches indiquant la phrase suivante : « Interdit au public » . L’accès est donc très facile aux visiteurs et aux curieux comme nous le montre bien le plan.

saient des allers et retours sans même se rendre comptent qu’ils se situaient dans un centre d’hébergement. Le contraste était assez saisissant lorsque j’ai aperçu une femme en peignoir traverser le couloir pour aller prendre sa douche dans les salles d’eau communes en même temps que deux livreurs et moi même réalisant mon étude et mes enquêtes Cette situation est réellement représentative de la situation. Les populations choisissent donc, en réaction à cette situation, de se renfermer sur elles mêmes et il a été difficile de pouvoir rentrer dans leur lieux de vie. Il a fallut s’y prendre à l’avance afin de pouvoir visiter certains logements.

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Des espaces communs à chaque niveaux sont développés afin de favoriser les

D’après Kolo Diomande, habitant ayant été relogé après la fermeture du bâti-

rencontres et les rassemblement autour de fêtes, d’événements, de jeux ou tout

ment « Le Long », les espaces communs attribués à chaque résidence étaient

simplement de repas commun (voir photographie et plan).

beaucoup plus investi et étaient le lieu de rassemblement, de découverte, de rencontre et de partage (voir les photographies ci dessus). C’est également ce dont à parler Pascale Dubois lors de sa conférence de 2016. « Une véritable vie communauté est permise par la situation à l’écart et sécurisé des espaces d’hébergement ». Des repas s’organisaient de manière informelles et chacun faisaient découvrir sa culture. Or, dans la configuration actuelle de la saison 2, tout cela à changé car la sécurité n’est pas assuré à l’entrée du centre générant ainsi de la peur et de la réticence quant au fait de laisser son appartement vide. Samira, 24 ans, Soudainaise hébergée aux grands voisins depuis 4 mois avoue

Des espaces collectifs peu appropriés

«J’ai du mal à sortir de mon logement aujourd’hui car une fois, il a été visité sans m’avoir au préalable consultée ». Les espaces sont peu utilisés et des acti-

Or, ces espaces sont très peu investis, les gens préfèrent rester chez eux. On peut

vités informelles ont du mal à se mettre en place. Stéphane, gestionnaire de la

observer le contraste saisissant avec la saison 1 des Grands Voisins (de 2015 à

résidence appartenant à l’association Albert 1er nous a avouer que ces espaces

2018) où la plupart des migrants étaient hébergés dans les bâtiments en fond de

communs ne le sont finalement pas et que c’est que lors d’événements organisés

parcelle et où les entrés étaient contrôlées comme nous pouvons le voir sur les

par ses soins que les gens viennent, et encore. Donc dans ce refus de prendre le

photographies ci-dessous.

moindre risque et de se mettre en danger, les populations préfèrent rester dans leur logement, l’investir et le munir d ‘éléments de cuisines et autres services afin d’être le plus possible autonomes.

Cela se justifie par le fait que la limite entre public et privée est facilement franchissable et donc les populations ne sont pas vraiment rassurées. Le fait qu’il n’y ai pas de contrôle ne rassure pas. Les migrants ont la sensation d’être trop exposés, visible et que l’on ne respecte pas leur intimité. Des espaces investis, personnalisés, multifonctionnels, décorés

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Le grand couloir menant aux logements est facilement traversable et non surveil-

L’intimité dans les centres d’hébergement est difficile à mettre en place. La

lé ce qui fait que les populations s’enferment chez eux et ne se sentent en sécurité

demande étant très forte, « ces structures sont souvent contraintes de générer des

qu’à l’intérieur de leur lieux de vie. Ces espaces trop poreux ne permettent pas de

logements collectifs pour deux voir trois personnes » (Stéphane, gérant rési-

réellement protéger ces populations, les impostes vitrées sont un frein également

dence Albert 1er) comme nous pouvons le constater sur les plans des logements

à cette sécurité dont ils ont réellement besoin. Le départ dans le processus de

ci-dessous. Stéphane poursuit en nous indiquant que ces populations changent

reconstruction correspond à cette protection en mettant à disposition des espaces

régulièrement. « Lorsque quelqu’un s’en va, une autre personne arrive et au dé-

pour se rassurer et subvenir à ses besoins.

but c’est difficile de partager un logement avec quelqu’un qu’on ne connais pas, il m’est déjà arrivé de tomber sur une femmes avec laquelle on ne s’entendait

2- Créer de l’intimité et se rassurer

pas du tout » nous indique Samira , une autre résidente. C’est ainsi très difficile car leur confiance en eux à été mis à mal par leur parcours et elles doivent parta-

Comme décrit dans le paragraphe précédent, ces populations cherchent à se pro-

gées leur habitation avec une personne qui leur est totalement étrangère. Comme

téger, à former dans un premier temps une carapace qui va leur permettre de se

précisé précédemment, les logements sont relativement flexibles de part le fait

stabiliser psychologiquement et physiquement ce qui correspond à une première

qu’il n’y a aucun porteur dans la chambre et donc les populations,disposent d’un

étape dans leur processus de reconstruction personnelle. Ces personnes vont par

plan libre qu’ils peuvent aménager suivant leur moyen et leur mode de vie. les

la suite chercher à retrouver une certaine intimité souvent perdue. Comme nous

grandes ouvertures favorisent l’entrée de la lumière. C’est là donc que les sub-

l’a indiqué Karina, membre de l’association Aurore « ces populations ont pour

tilités d’aménagement informels apparaissent. On voit clairement cette volonté

la plupart d’entre elles été contraintes de voyager par centaines, ont tout partagé,

de générer des espaces plutôt partagés d’un côté et des espaces plus privatisés

dévoiler, se montrer aux autres car il n’avaient pas le choix ». Ses propos sont

de l’autre. « On partage le salon mais apès chacun à une parti du logement pour

complétés par ceux de Yamina une des résidentes « lors du voyage, on ne se sent

lui et fermé grâce à des meubles» (Samira, résidente d’un logement pour trois

plus comme une personne mais un élément d’un groupe qui veut s’en sortir à tout

personnes).

prix » On observe donc une dépersonnification dû à des moments très difficiles

Suivant leurs ressources, ils aménagent afin de façonner un dispositif leur

où l’on doit seulement survivre .

permettant d’une part de partager des espaces de vie et surtout des espaces de tranquillité où ils peuvent se retrouver seul avec eux même.

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Les logements sont souvent délimités par du mobilier afin de créer des espaces

prennent pas forcément soin de leur espace de vie. La temporalité très courte

plus privés. On peut voir sur ces plans et photos comment un logement partagé

ainsi que le fait d’arriver dans un nouveau pays provoque un sentiment d’incon-

s’organise.

fort. D’autre part, le fait de devoir partager un espace avec une personne que l’on ne connaît pas altère cette intimité que l’on recherche à tout pris. L’imperméabilité qu’elle soit physique, visuelle et phonique est très difficile à mettre en place avec simplement des meubles ou des draps. En fin de compte, les populations n’ont pas vraiment d’espaces de repli sur soi. Dans le logement

Espace intimes/partagés logement 3 personnes (Yamina)

de Samira, qu’elle partage avec la même personne depuis son arrivée nous percevons une meilleure organisation « On arrive a s’organiser et vu que l’on a à peu près le même âge, on se comprend mieux ». Les espaces de vie et nuit sont hiérarchisés comme l’indique le plan. Cela dépend des populations, du lien qu’entretiennent les personnes partageant un même espace. D’autre part, le fait que dans cette saison 2 les populations soient concentrées autour des deux places, provoque des nuisances. En effet, les résidents sont parfois gênés par les nuisances induites par l’aspect très publics du site, les fêtes, les marchés, les repas et autres activités. Kolo Diomande, un résident m’a

Espace intimes/partagés logement 2 personnes (Samira)

Comme indiqué précédemment, il y a énormément de désordre, d’objets, de linge disposé sur le lit, de vaisselles laissées sur les tables et les meubles. « Vu que nous avons du mal à nous dire que ce logement nous appartient, au moins pendant un moment, c’est difficile de l’entretenir. En plus, on habite jamais avec les même personnes, c’est instable» (Samira). Cela renvoi au prendre soin et porter attention de Michel Foucault : Les populations ne se sentent pas complètement chez elles et par conséquent, ils ne

déclaré : « c’est très bien qu’il y ai des activités sur le site, cela donne de la vie mais parfois c’est trop, on ne peut pas être tranquille à cause du bruit, on ne peut pas dormir » Donc on voit clairement que le domaine public empiète sur la vie privé et l’intimité des résidents Par conséquent, on constate donc une difficulté de la part ces populations fragilisées à retrouver une certaine intimité. Ceci s’explique par le fait de devoir partager un logement avec des personnes que l’on ne connaît pas mais également du fait de leur exposition et les porosité entre les espaces publics et leurs espaces privés.

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3- Ornementer et retrouver sa fierté L’ornementation est significative de la manière dont les populations s’approprient un espace. On constate lorsque l’on déambule dans les couloirs menant aux différentes chambres, des décorations sur les portes marquant l’identité de chacun, ses origines... (voir photographies p35). En visitant les logements, on peut voir aussi la manière dont les espaces se façonnent et comment ils sont utilisés. On a une grande diversité en terme d’occupation de ces espaces, de décoration etc....(Photographie)

Photos ornementation

Logement 2 personnes (Samira)

Des ornementations et des décorations pour retrouver sa fierté et s’identifier

Ce que les populations nous révèlent à travers ces décorations, nous montre leur degré d’appropriation. Dès le départ, il y a eu la volonté de l’architecte de Yes we Camp de ne pas trop organiser les logements mais au contraire en laissant des volumes que chacun peut s’approprier. On observe des graffitis sur certaines portes montrant un degré de fierté. On constate également la présence de cadres, d’autocollants, de peintures sur les mobiliers et bles mûrs, nles tapuis sur le sol. La ressourcerie est également importante car elle est un lieu dédié à l’économie Logement 3 personnes (Yamina) Appropriation des unités de vie

sociale et solidaire, spécialisée dans le réemploi, la valorisation des déchets, le recyclage. Cela permet aux résidents de venir s’emparer de vêtements, de livres

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accessibles en terme de prix, pour se cultiver mais également acquérir de nou-

On remarque que les fenêtres donnant sur l’orientation Est sont plus opacifiées

veaux mobiliers pour améliorer leur habitation et leur fierté.

que celle donnant sur L’Ouest. Le plus évoquant est de retrouver plus de fenêtre

Yamina: «On essaye de mettre notre emprunte pour ne pas vivre dans un es-

opacifiées dans les logements donnant sur le Nord que sur l’Ouest.

paces qui nous est étranger. Les habitations qu’on nous attribut permet cela et

On remarque donc que l’orientation n’est pas la raison principale de l’occultation

cela aide à s’approprier et à se sentir mieux». Ces populations ont du mal à se

mais bien la volonté de se refermé sur soit même et de se protéger. Lorsque j’ai

sentir chez elles comme indiqué précédemment cependant elles cherchent par le décor et à l’ornementation à donner leur image aux lieu dans lequel elles habitent dans le but de se rassurer. Ce que ces populations nous donnent à voir est signifiant de ce qu’ils attendent, de leur état d’esprit et de leur volonté d’ouverture ou non. Par exemple, lorsque l’on regarde les fenêtres depuis la cours, on observe différentes choses qui contrastes les une avec les autres que se soient les fleurs posées sur le rebord des fenêtres, les rideaux colorés, les dessins sur les fenêtres ou au contraire des rideaux opaques et des volets fermés. (Voir photographie). On remarque également que le pourcentage de rideaux et d’opacité est plus important lorsque les logements donnent sur les cours publics que sur les espaces dit intermédiaires plus à l’abri du public. Or, on se demande si c’est l’orientation qui en ai la résultante.

demandé à Yamina pourquoi elle à mis des rideaux, elle m’a répondu «On est exposé de ce côté, j’avauis l’impression que tout le monde pouvais voir chez moi, donc jai acheter des rideaux à la ressourcerie», au conraire Samira qui habite dans un logement orienté Ouest à dchoisit de ne poas en mettre car elle n’est pas «rérangé par l’extérieur vu que la fenêtre donne sur un endroit à l’écart». On voit clairement le degré d’appropriation et le fait que la majorité des habitants souhaitent se retrouver dans un espace à l’abri par l’ornementation déployée par les populations. On constate que les logement les moins exposée et dans lequel les populations entretiennent de bonnes relation favorisent l’appropriation et la volonté de se sentir chez soi et cette envie de décorer et donner sa touche personnelle à son espace de vie. Pour résumer cette première partie, Nous pouvons ressortir que ces populations ne se sentent par forcément protéger car elles se sentent trop exposées et leur espaces de vie n’est en aucun cas sécurisé. Les porosité entre espace publics et privés ainsi que la contrainte d’habiter avec un inconnu provoque un repli sur soi et la mis ene place de dispositif pour tenter de se protéger et se retrouver seul, en sécurité.

Façade EST

Façade NORD

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Les deux autres petits espaces publics plus en retrait sont davantage appropriables. Dans cette histoire contemporaine où les populations migrantes sont souvent exclues, extra-territorialisées à la périphérie comme c’est le cas à Ivry sur seine (voir carte) où elles sont simplement tolérées, le modèle des Grands Voisins tente d’éviter l’exclusion de ces populations accueillies, en les incluant au sein d’un ensemble. L’hébergement est une donnée parmi d’autres et donc on ne se

B- PARTAGER

focalise pas dessus comme si ce lieu leur était dédiée entièrement. L’’exclusion comme le déclare Michel Agier (Les migrants et nous, comprendre Babel, 2016), c’est laisser de côté, ne pas prendre en compte, catégoriser « Il

1- Arpenter le site et prendre connaissance de l’autre

y aurait d’un côté les migrants et de l’autre il y a nous ». L’image générale est dévalorisante. Cela donne lieu à une stigmatisation et des préjugés constants car

Une des étapes de la reconstruction de ces populations correspond à leur inté-

nous avons peur de ce qui nous dépasse ou bouscule nos habitudes. Ces préjugés

gration au sein d’un habitat allant au dela de la chambre c’est à dire un espace

fabriquent une distance sociale, une méfiance réciproque, une peur qui au final

dans lequel on arpente, on se rencontre, on fait connaissance. La grande parti-

divise et exclue.

cularité est la mixité d’usages et fonctionnelle de l’espace des Grands Voisins.

On se demande alors quels sont les dispositifs qui permettent cette appropriation

Le centre d’hébergement est inclus dans un ensemble composé d’entreprises, de

de l’espace dans lequel ils sont hébergé.

restaurants, d’activités intérieures et extérieures. La typologie de cette structure

Dans la réflexion des Grands Voisins, il a été question d’inclure les populations

est particulièrement ouverte aux développement de différentes mixités. Elle s’or-

dans un système urbains, la volonté étant de favoriser une certaine solidarité, une

ganise en un ensemble bâtiments fabriquant ainsi un véritable petit village dans

prise en compte de l’autre et de ses difficultés. En ne le mettant pas de coté mais

lequel chaque fonction est mise en scène. Cette typologie particulière permet de

au contraire au centre, ces populations ne sont plus vue comme une contrainte,

générer des espaces extérieurs, des places dans lesquelles s’organisent les flux

mais un élément constitutif du système. Faire un pas vers l’autre c’est faire en

mais également les rassemblements et le appropriations. Les deux grandes places

sorte que celui-ci se sente à sa place , dans un environnement propice à sa recons-

marquent l’entrée dans laquelle les circulations se développent et où les usages en

truction et son bien être.

Rez de chaussée se déversent assurant un dynamisme à cette place.

43


On observe lorsque l’on étudie l’organisation générale, un foisonnement d’activités et d’espaces appropriables qu’ils soient intérieurs ou extérieurs (voir le plan de rdc). Les usages déployés dans les Grands Voisins sont fais pour favoriser les interactions entre les hébergés et les autres populations. La signalétique joue un rôle très important. En effet, elle est très présente et permet de localier chaque espace et d’assurer une transparence pour que tout les

2- Cours Pierre Robin

1- Cours de l’Oratoire

ceux-ci soient connus de tous et demeurent accessibles. Les services proposés leur permettent de profiter d’avantages. En effet une monnaie locale s’est mis en place afin de pouvoir échanger des services contre des biens rendant ces derniers d’autant plus accessibles. Ces espace concerné sont la lingerie, la ressourcerie, les ateliers comme indiqués sur le plan. L’argent ne représente plus un frein.

3- Cours de la Chapelle

4

4

Deriere cour

Des activités et du mobilier répartis sur le site

a

Une composition génératRICE d’espace ppropriable

5

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Des espaces de calmes et des lieux où ils pourront se connecter à internet, se res-

espaces plutôt interstitiels comme la cours de la Chapelle qui se trouve à l’écart

taurer pour peu cher, boire un café sont également disponibles et réparti dans le

de la foule ou la maisons des voisins. On remarque réellement ce contraste et

site (voir photographie 3). Tous ces espaces sont à la disposition de tous et acces-

donc un phénomène de gentrification .

sibles facilement ce qui incite les populations à s’ouvrir aux autres, à partager des

J’ai donc fait une étude à propos de cela afin de déterminer l’utilisation de ces

moments et prendre connaissance. Également, grâce à un travail d’observation et

places par les usagers en fonction de l’heure de la journée. Les cartes suivantes

de photographie, on relève de nombreux usages informels et formels sur le site

montrent la présence des résidents et des autres usagers (publics, entrepreneurs...)

actuel des Grands Voisins comme nous pouvons le voir sur ces images (Vente de

en fonction de l’heure et à des conditions météorologiques semblables.

maïs, football, danse, jeux...). Les caractéristiques de ce site notamment le fait qu’il soit piéton, clôturé amplifient ces usages extérieurs. On voit des usages relevant de la rencontre, du jeu, du divertissement, du temporaire, de l’informel, de la micro-architecture, de l’appropriation ou encore de la transposition. Par conséquent, au sein des Grands Voisins, des lieux sont pensés pour inciter ces populations à s’ouvrir et à acquérir une meilleure connaissance de l’autre et ainsi inhiber la méfiance et la peur réciproque. L’ouverture au public est un moyen de défaire la méfiance cependant, elle est parfois vécu comme une intrusion dans la vie des personnes hébergées qui se sentent épiés et non chez elles. Ce trop grand partage des espaces fabrique un sentiment d’insécurité et un repli sur soi. Certains usages tel que le restaurant sont devenus inaccessibles aux résidents qui n’ont pas les moyens. Au contraire cela attire de nombreuses populations extérieures ou faisant partie des entreprises locales. Les populations résidentes ne se sentent alors plus à leur place notamment au sein des grandes places de part le fait quelles soient trop accessibles d’une part mais aussi quelles soient le lieux d’usages plus adaptés à d’autres types de populations. Le choix des résidents est alors d’occuper les espaces de l’arrière c’est à dire les

Occupation des espaces extérieurs par les usagers à 12h

Résidants Autres usagers

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A 12h on constate clairement que les deux cours Anglaises sont peuplées d’usa-

Si on observe ce qu’il se passe à 15h, on remarque que les cours Anglaises sont

gers extérieurs. On y remarque très peu de résidents. En revanche lorsque l’on

très peu utilisées que se soient par les usagers publics ou les résidents. Par contre,

observe ce qu’il se passe dans les espaces intermédiaires un peu à l’écart, comme

ces derniers continuent de s‘approprier les espaces dits intermédiaires. On re-

par exemple la cours de la chapelle ou les entres deux des bâtiments, on remarque

marque donc qu’il y a une sorte d’attribution des espaces. Les résidents s’appro-

une inversion de l’occupation, avec une densité de migrants assez importantes

prient ces lieux intermédiaires dans lesquels ils sont plus à l’écart.

qui se restaurent ensemble à l’heure du déjeuner ou alors exercent d’autres types

A partir de ces observation on en déduis que la mixité sociale est relative. Au

d’activités, jouent au ping pong, pratiquent la danse, écoutent de la musique etc...

final, chacun des usagers extérieurs s’approprient les espaces les plus visibles et accessibles tandis que les migrants s’attribuent des lieux plus à l’écart dans lesquels ils peuvent se développer et pratiquer des activités sans être dérangé.

Cours Pierre Robin

Cours de la Chapelle

Mais d’un autre côté, cela permet aux populations de se retrouver ensemble, dans des endroits plus calmes et à l’abri. On distingue les jeux de babyfoot, les tables qui sont investis, les tables de tennis de table, le mobilier, la musique. Ce sont ces lieux en retrait qui sont importants car ce sont ceux où se développent des usages informels et où les résidents ont un dégré d’appropriation plus im-

Occupation des espaces extérieurs par les usagers à 15h

Résidants Autres usagers

portant.

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Par exemple, la cour de la Chapelle est composée de mobilier cependant elle fait l’objet de divers usages informel savec l’arrivé de tables de jeu, un espace vente de Maïs grillés etc. Les espaces entre les bâtiments de lingerie et Robin et Colombanie deviennent des terrains de football, de jeux de cartes etc. On peut en déduire que la trop grande ouverture peut avoir des effets nocifs et empiéter sur la vie des résidents. Cela provoque une sorte de regroupement entre les populations et au final, la mixité n’est pas garantie. Le développement des usages autour et sur les places principales se tourne davantage vers le public que pour les résidents. Cette surabondance d’événements a pour conséquence la difficulté à s’approprier l’espace. Il est donc important de réfléchir avantage aux usages en faisant en sorte qu’ils s’adressent en priorité aux résidents pour ainsi préserver un certain équilibre entre les usagers. Donc d’un côté les populations sont plus ouvertes que dans certains centres car des espaces sont développés leur permettant d’améliorer leur qualité de vie mais d’un autre côté, ils ont du mal à s’emparer de ces lieuc trop fréquentés. Cela provoque ainsi l’effet inverse c’est à dire une ségrégation spatiale. On n’ose pas traverser les espaces de l’autre, les visiteurs ne vont pas dans la cour de la chapelle et de leur coté, les résidents ne veulent pas trop se rendre dans les places principales sinon pour les traverser. Kolo Diomande, nous indique« On ne va pas là-bas, on les laisse tranquille » A vouloir trop ouvrir, nous pouvons facilement tomber dans un effet indésirable qui serait les conflits d’usage et la ségrégation.

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2- Faire ensemble

Un habitat doit donc être généré afin que les populations d’une part habitent cet espace malgré le temps court c’est à dire établissent tout d’abord un ancrage, une

Les Grands Voisins ont été pensés avec la volonté de créer une véritable urbani-

adresse où ils pourront se reposer, retrouver une certaine intimité, un replis sur

té dans laquelle sont inclus les populations résidentes. De nombreuses activités

sois, le calme pour réfléchir. Puis c’est permettre le mouvement, la déambula-

se développent dans différents lieux.. Il y a cette volonté de biens commun, de

tion, c’est à dire arpenter son nouvel habitat dans lequel il va pour subvenir à ces

façonner, de participer à la vie et au fonctionnement général. De nombreux élé-

besoins, s’identifier et enfin définir un espace où il pourra se connecter, établir

ments notamment le mobilier permettent une meilleure appropriation. Ce dernier

des relations avec les espaces qui l’entoure mais également avec les populations

est déployé dans l’intégralité du site et met en valeur le travail de ces populations

dans le but de s’ouvrir, d’avoir accès à de nouvelles possibilités, de nouveaux

les ayant confectionnés. Cela va du jeu, de la table et de la chaise, du gradin, des

savoirs. On observe que les résidents sont intégrés dans la vie des grands voisins,

bacs à fleurs, d’activités ludiques... Cela permet de préserver une homogénéité

Ils participent à différentes activités qui permettent de leur donner un intérêt. Il

dans ce site éclaté et aux diverses architectures.

Les ateliers de cuisines, de

y a la ressourcerie, la lingerie, le restaurant ainsi que tous les ateliers et activités

menuiserie et la participation active à la vie du site, permettent de créer du lien

temporaires. Cette dissémination dans le site permet une occupation induite de la

et de favoriser un vécu du site, un arpentage. D’autre part, il y a cette notion

part des résidents participant aussi à cette ouverture dont on a parlé auparavant.

d’habiter qui est importante aux grands voisins. Comme indiqué précédemment, habiter n’est pas synonyme de résider, c’est bien plus que cela. Ce n’est pas seulement un titre mais au contraire c’est une pratique. Habiter c’est porter attention et prendre soin. Le fait d’habiter, c’est aussi se mouvoir et se connecter. Doté de compétences et mû par des valeurs et des imaginaires, chaque habitant organise au jour le jour son habitat. Plus exactement, il cohabite en permanence avec tous les autres êtres humains et se confronte ainsi à l’enjeu politique de la mise en commun de l’espace habité. Habiter c’est développer un ancrage, se mouvoir et

Les résidents participent notamment dans le façonnage de leur espace de vie. On

établir des connexions. Les populations ont un ancrage qui correspond à leur lieu

observe de nombreuses activités valorisant le travail créatif et le travail tourner

de résidence et , malgré la temporalité, elles établissent aussi des connexions avec

vers les autres.

les autres usagers du site.

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Les habitants des grands voisins profitent de différentes formes d’activités, mobiles et autonomes , des formats de travail hybrides qui investissent et croisent des échelles temporelles et spatiales multiples. On observe une diversité d’expérimentations, les installations , les espaces de travail pour de jeunes créatifs et les ateliers partagés, créatrices de valeur. La fabrication manuelle et collective joue également un rôle central dans l’organisation des grands voisins. C’est un chantier continu , qu se prolonge tout au long de la durée d’occupation du site. Ils apprécient faire découvrir leur culture comme nous l’a Fadzine, vendant ces plats typiques d’Égypte. Nous pouvons citer différents espaces imaginés et réalisés par leur soin et les autres usagers favorisant ainsi l’appropriation de ces lieux et les relation : Les potagers( cultiver) , les mobiliers (univers, les ateliers (compétences), la ressourcerie (fabriquer, façonner) , la lingerie( cuisine, talent). Cela permet d’investir les espaces et le fait que les populations habitent au delà de simplement résider, car elles ont un certain ancrage, et établissent des connexions en investissant les espaces partagés. Ces lieux d’activités et de formation repré-

Occupation des espaces extérieurs par les usagers à 15h

sentent l’essentiel des liens entre les résidents (le vendeurs, le serveur, le cuisinier etc) et les autres usagers (l’acheteur) comme on peut le voir sur la carte. On y

3- Projeter, retrouver une vocation

voit que les populations ne mange en général pas ensemble mais les liens étroits sont tissés grâce à une relation liée au service et à la reconnaissance mais égale-

D’autre part, dans l’élaboration du projet des Grands Voisins, les entreprises s’y

ment par la participation commune à des activités. En cela, les relations ne sont

installent. C’est donc une formidable opportunité pour les populations résidentes

pas vraiment informelles mais plutôt prévue. Donc toutes ces activités favorisent

de travailler, participer, se former. La participation aux activités précédemment

ce partage d’espaces et cette conception continue d’un habitat partagé.

citées permet d’investir les espaces partagés du site et donc une intégration spatiale et sociale, mais cela permet également d’aller au delà de la simple échelle du site dans le sens où cela induit la professionnalisation des résidents visant à les ouvrir et à les préparer pour plus tard.

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Afin de déterminer les taux d’apprentissage et de travail au sein des structures professionnelles des Grands Voisin, j’ai réaliser une enquête auprès des associations et entreprises afin d’en savoir plus sur l’implication et la participation des migrants. On peut voir par exemple que le gérant du restaurant emploie une dizaine de résidents après les avoir former pour la plupart. L’entreprise de menuiserie organise des stages durant toute l’année pour former et d’impliquer les résidents. Les associations et ateliers, le jardinage leur permettent de retrouver une vocation et certaine responsabilité. D’autres profitent de cours de Français ou

Formation et ateliers menuiserie

toutes autres matières visant à faciliter l’accès à l’emploi. Malgré le fait que cela ne représente qu’une minorité, cela permet à ces populations de s’ouvrir plus facilement car ils acquiert des compétences et des savoirs faire. Aujourd’hui, sur un peu plus de 100 résidents 20 ont un travail sur le site des Grands Voisins et la majorité ont au moins participer à des cours ou à des ateliers.... Cela favorise les rencontres. Par conséquent, le centre d’hébergement se doit, au delà de proposer des espaces privés, de générer des lieux d’activités et

Le Kiosque situé dans la cours de l’oratoir

Le marché solidaire des Grands voisin

de formations dans la centralité du site facilitant ainsi l’intégration et la reprise

Donc pour résumer cette partie, on peut dire que les Grands Voisins ont réel-

de confiance. La regroupement d’activités diverses permettent de multiplier les

lement chercher à créer un lieu dont les espaces collectifs répartis dans le site

savoir faire. De nouveaux liens professionnels et d’amitiés se tissent peu à peu.

avec avec une accessibilité importante afin que le populations hébergée puissent

Le monnaie temps/service instaurée aux grands voisins permet l’accès à des biens

habiter c’est à dire trouver un certain ancrage dans lequel il peuvent s’attribuer,

incitant ainsi les habitants à s’impliquer davantage pour obtenir quelque chose

au delà de leur logement, le site et, définir des mouvements à l’intérieur de cet

en retour. Au delà de ce fait, cela développe de nouvelles relations et de la bonne

habitat avec l’accès assez facilité aux différents services. Enfin, ils peuvent

volonté. Faire comme chez soi mais avec les autres. Par exemple, les activités

également établir des connexions avec d’autres personnes car la répartition spa-

comme le jardinage ou l’entretiens du poulailler permet de donner une motivation

tiale comme nous pouvons le voir permet cela. La participation aux différentes

aux populations pour se lever le matin en apportant son implication.

activités ne peuvent s’établir que si elles sont diversifiées, accessibles (rôle de la signalétique notamment) et évolutive.

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Également, la monnaie d’échange temps/service favorise les interactions et l’implication. Les activités telles que le jardinage, le poulailler, la confection de mobiliers présent sur l’intégralité du site démontre cette volonté de faire en sorte que les résidents ne se renferment pas sur eux même mais au contraire viennent intervenir, apporter leur vision et leur savoir légitime et ainsi une fierté, une envie de s’ouvrir. Cependant, on voit bien que comme me le déclarait Kolo Diomande, l’espace des Grands Voisins est quelque peu saturé en terme d’activités et que par conséquent, il ne reste finalement plus énormément de places pour toute autre forme d’appropriation. En repérant les lieux privilégiés des résidents, on se rend compte que ce sont les espaces plutôt interstitiels qu’ils occupent car ils ont la particularité d’être l’abri du bruit, des regards etc.... Les cours anglaises ouvertes sur l’Avenue Denfert Rochereau sont des endroits qu’ils évitent finalement et leur environnement correspond plus à ce qui se situe en arrière. L’architecture permet cela c’est à dire générer des lieux où tout le monde y trouve son compte Donc d’un côté, le développement d’activités de services et de bien permet une intégration facilitée des populations qui peuvent évoluées dans l’espaces publics, mais d’un autre côté ces activités trop régulières et le caractère attractif attire beaucoup de monde et finalement les résidents ont du mal à y trouver leur place et une forme de ségrégation spatiale s’opère.

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C- OUVRIR 1-Une spatialité qui invite La spatialité du lieu est très particulière, le but de la démarche des grands voisins

La matérialité, ainsi que l’architecture du bâtiment donnant sur l’avenue Denfert

est de permettre aux populations d’une part de se stabiliser, participer au fonc-

Rochereau est en pierre, donc un matériaux qui demeure pérenne et qui contraste

tionnement du site. Cependant, l’objectif final est de favoriser une intégration

avec la temporalité assez courte des grands voisins. Cela donne une certaine cré-

au delà des grands voisins c’est à dire dans une spatialité plus large pour ainsi

dibilité et finalement incite les populations extérieurs à rentrer dans les cours an-

retrouver le plus rapidement possible une vie quotidienne stable et épanouissante.

glaises. Les hauteurs d’étage sont importantes et les grandes fenêtres éclaircissent

Les concepteurs de YES WE CAMP ont choisi de favoriser cet échange entre

l’intérieur des bâtiments. Donc on a une certaine porosité visuelle où l’on devine

ceux qui habitent le quartier et ceux résidant aux Grands Voisins par l’accès très

un espace bienveillant et rassurant.

public du site et les activités accessibles à tous qui s’y développent. Les activité

Marine me déclare : C’est vrai que voir toutes ces grandes fenêtres, cela fait un

sont développées dans le but de motiver ces échanges et une mixité sociale. Mais

peu palais, comme un monument, un musée». D’autre part, la vue sur les mobi-

on peut également se demander quel rôle l’architecture tient dans cette perception

liers et la vie qui s’y déroule à l’intérieur questionne et invite à aller voir ce qu’il

de la part des habitants du quartier.

se passe de plus près. Donc on se rend transparence. Marine poursuis, habitante

L’architecture au sein du site est assez hétérogène. On constate sur les photogra-

du 14ème arrondissement, m’a avoué « Il y a les beaux bâtiments mais le fait que

phies que les bâtiments sont d’époques différentes mais également d’états très

se soit ouvert qu’on aperçoivent les objets, les chaises, les jeux, qu’il n’y ai pas de

diversifiés.

barrière qui nous empêche de voir à l’intérieur m’a intrigué et aujourd’hui

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j’aime beaucoup venir manger ou m’y rendre lors d’événements tels que le mar-

2-Une situation géographique vectrice d’échange

ché, les fanfares ou tout simplement pour jouer au puissance 4 géant ». Par conséquent, on se rend compte que la transparence favorise ce processus d’intégration

La situation géographique est une donnée réellement importante dans cette vo-

au sein du contexte d’implantation. On donne à voir. En comparaison avec le

lonté d’intégration et de prise en compte d’un centre d’hébergement. Celui-ci

centre d’hébergement d’Ivry sur Seine, on peut observer que l’architecture même

s’implante dans un contexte qui a une histoire et des pratiques qui lui sont propre.

si elle est réalisée avec des matériaux démontables et déplaçables marquant sa

Les situations géographiques et sociales dans lesquelles se situent les centres

caractéristique temporaires, les couleurs, le bois ainsi que le métal employés

d’hébergement s’avère très diverses. A Ivry sur seine par exemple, le site de la

montrent une certaine pérennité rassurante pour les habitant. Cependant, cette

structure d’hébergement est localisé dans la zone industrielle. Or, dans ce cas pré-

structure d’hébergement d’urgence ne laisse rien transparaître depuis l’extérieur.

cis, la conséquence est qu’il est exterritorialisé selon la définition de Michel Agier

Des grilles marquent d’une part une frontière très difficilement franchissable tan-

(un dehors placé sur la limite de l’ordre normal des choses » 2013).

dis que les vues depuis la rue ne permettent pas de saisir ce qu’il peut se passer

Cela signifie qu’il est situé à un endroit où il ne dérange pas, où il est simplement

à l’intérieur. L’inconnu effraie. Les Grand Voisins ont clairement voulu aller à

toléré et n’exerce aucune influence sur l’urbanité et la manière de vivre la ville

l’encontre de ce phénomène. Cependant, cette transparence est parfois perçu de

et l’espace urbain « On vous tolère à part mais on ne vous accepte pas à l’inté-

la part des résidents comme une contemplation, une exposition. Yamina, nous a

rieur » Agier. D’un autre coté, l’implantation dans un tissus urbain, permet une

donc justifier l’utilisation de rideaux à cette fin. Le résident en réaction à cette

visibilité importante cependant si il se situe dans un environnement social hostile,

trop forte porosité se referme sur lui même afin de préserver son intimité.

cela fait de lui une exception, une dent creuse, un espace que l’on évite, que l’on méprise. Le centre d’hébergement à la lisière du Bois de Boulogne dans le 16ème arrondissement de Paris a fait l’objet de nombreuses critiques et manifestations à son encontre. Les habitants du quartier craignaient quant à la dévalorisation de leur arrondissement. Pour leur part, les Grands Voisins sont situés dans le 14ème arrondissement. Le site comme précisé précédemment est quelque peu enclavé du fait des occupations autour qui ne sont pas très attractives mais aussi par le fait qu’il n’y ai qu’une seul entrée comme nous pouvons le voir sur le plan.

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D’après une étude sur la fréquentation du site et sur les flux entre le quartier et les Grands Voisins, on observe à 12h, sur une période de 30 minutes, un taux de 72% d’entrées contre 28% de sortie. Par conséquent, on se demande pourquoi une telle différence. J’en ai déduis plusieurs éléments et facteurs qui justifierais cet écart. D’une part, le site es desservi a de nombreux transports en commun tel que le RER B, me métrop à Denfert Rochereau ou à port Royal ou encore l’arret de Bus situé juste e, face. Egalement, le site se situe dans un secteur essentiellement de logements ce qui constitue une formidable opportunité de générer des lieux que les gens vont pouvoir s’approprier et arpenter. La situation entre la place Denfert Rochereau et Port Royal en font un territoire très traversé comme on constate sur la carte 1. La distance par rapport aux rues les plus attractives au départ a été Polarité attractive (restaurant commerces ...) et multimodalité

Espaces d’exposition et de producion artistique

une contrainte de part sa position un peu à l’écart, au centre d’une zone presque exclusivement dédiée au logement. De plus, la carte indique que les premiers restaurants sont à 350 mètres du site. Or au sein des Grands Voisins, des espaces de restauration proposant diverses cuisines et services ont été développés. L’accessibilité financière est aussi une donnée importante dans le fait de venir aux grands Voisins. Marine nous informe : « Je préfère payer dix euros que vingt dans les restaurants du quartier, En plus c’est très bon et convivial. ». D’autre part, on distingue des lieux artistiques autour du site. Dans un rayon de 400 mètres on dénombre pas moins de 10 lieux dédiés aux ateliers d’artistes et 7 concernant les espaces d’exposition (voir carte). Or, dans la structure des grands voisins, on se sert de cette opportunité pour attirer des personnes en leur permettant de mettre en scène leur imagination dans le cadre de participation et de représentation.

Les Grands Voisins lors d’un marché hebdomadaire

De son côté, la ressourcerie est un moyen d’accéder à du mobiliers, des livres, des

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vêtements ou encore d’appareils numériques.

il n’avait jamais pris connaissance auparavant.

Le cinéma est aussi un élément très attractif. Il a la particularité d’accueillir des

Les ateliers de formations lui ont ainsi inculquer certaines compétences qui lui

représentation du 7ème art mais également des pièce de théâtre et des spectacles.

serve aujourd’hui dans son travail de mécanicien. D’unRejet, autre peur, côté, le fait que REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT

Étant donner que les premiers cinémas se situent comme l’indique la carte à au

tout soit à disposition n’encourage pas les résidents à sortir. Drozzy me dit « On

moins 1km et qu’ils soient monofonctionnels, celui des grands voisins est très

a tout ici, je sort juste pour aller travailler». Par conséquent, on sort que lorsque

attractifs vis à vis des gens du quartier. Alexis, étudiant au lycée Catherine La-

l’on a pas le choix. On a donc essentiellement un mouvement centripète avec un

bouré nous fait par de son intérêt pour le cinéma des Grands Voisins : « je me

système fonctionnant en autarcie.

Enfin, les événements organisés que se soit les marchés, les concerts redonne une certaine vie à cette zone exclusivement dédié à l’habitation. D’après une étude sur 30 personnes extérieurs aperçues sur le site à 12h un mardi sous un temps ensoleillé, 13 d’entre eux vivent à moins de 600 mètres des Grands Voisins, 6 autres sont étudiants dans le lycée le plus proche, Le reste sont de simple visiteurs qui prennent même le métro pour s’y rendre. Donc on voit une diversité de populations entre celles venu pour profiter des usages du quotidiens (manger, acheter...) et ceux qui se rendent au cinéma ou viennent assister et participer aux différentes activités et événements. Par conséquent, tous ces éléments expliquent le fait que le site soit très fréquenté. Les grands voisins ont su prendre partie de cette situation géographique en développant des activités et services de proximité dont cette zone ne bénéficie pas ce qui à favorisé une certaine attractivité. Cette fréquentation favorise les rencontres professionnelles. Droozy, un résident du centre Albert 1er m’a évoqué le fait que les Grands Voisins ont été un tremplin dans sa recherche de travail et qu’il s’intègre plus facilement à une société dont

Exception

REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT

je suis avec des amis de manger rapidement et pour peu cher après la séance. »

Fermeture, stigmatisation

Un site attractif

Grand public Travailleurs

Artistes

Hébergement Loisirs Restauration Commerces Travail

Habitants du quartier

Migrants

Un mouvement centripète

Pour résumer, nous pouvons dire que l’architecture de part la dualité entre un REALISE A L'AIDE D'UN PRODUIT AUTODESK VERSION ETUDIANT

rend souvent ici car mon lycée n’est pas très loin. Et puis, cela me permet lorsque

Extra-territorialité

bâtiment frontal monumental et les espaces vides visibles rend cette occupation légitime et incite les gens à parcourir le site. Cela permet aux résidents de faire connaissance avec les populations extérieurs. Ce qui finalement atténue cette peur de l’autre. La spatialité des Grands Voisins nous invite, nous englobe et nous rassure de part l’ouverture et la richesse des activités qui s’y développent. L’aménagement des espaces extérieurs leur confère un état chaleureux et les usages ouverts sur la place sont visibles. Nous ne sommes donc pas dans le rejet mais au contraire dans l’ouverture.

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L’hébergement n’est plus vu comme une donnée associé à la peur et à la méfiance

Cependant, cette volonté de trop ouvrir, comme indiqué précédemment pose des

mais au contraire, ce foisonnement d’activités et d’espaces ouverts ainsi que l’ar-

problèmes en terme de partage de l’espace. On observe une sorte de gentrification

chitecture qui se veut également rassurante permet de favoriser cet intégration

du fait de la surabondance des populations extérieurs dans le site incitant ainsi les

dans le contexte. Quelque part la transparence permet de dédramatiser, Toutes

résidents à s’approprier d’autres espaces plus en retraits et donc les interactions

ces fonctions rassemblées en un même lieu constitue une réelle opportunité pour

avec les usagers extérieurs sont relativement restreintes et limitées.

les habitants du quartier mais également pour les résidents qui peuvent facile-

D’autre part, ce système pose également question en terme de retour à la réalité

ment, sans avoir à sortir dehors, rencontrer des populations diverses leur ouvrant

de ces populations. En effet, actuellement ils vivent dans un endroit privilégié

des portes. Cette forme d’hospitalité est très recherchée et c’est une manière d’ac-

avec tout se dont ils ont besoins et donc ils ne sortent finalement que très peu du

cueillir ces populations dans le quartier et de les intégrer.

dite. Drozzy, m’a indiqué « On est bien ici car on a tout mais après on se sait pas

Cette intégration est donc facilité et bien acceptée grâce aux activités qui se dé-

comme cela va se passer pour nous ».

veloppe en parallèle­à

L’occupation étant temporaire, il est nécessaire pour ces populations de se

l’hébergement d’urgence. Lui seul ne peut pas permettre une bonne intégration

construire une force pour pouvoir affronter et vivre dans le monde extérieur. Ka-

car il est vu comme une contrainte, un hors lieu, une exception et est finalement

rina, membre de l’association Aurore m’a indiqué : « Ces populations ont beau-

exclu du système. C’est ce qui s’est passé au tout début où le centre d’héberge-

coup de choses à leur disposition aujourd’hui, ces même choses dont ils auront du

ment était l’unique usage du site et donc était complètement rejeté du fonctionnement urbain. Mais finalement avec l’arrivé des activités solidaires, des espaces de travail et l’accessibilité simplifiée, un lieu multifonctionnel et multi usage s’est développé avec en son centre l’hébergement. Dans cette configuration, de la saison 2, on peut voir les lieux d’hébergement donnent sur les places et qui est une façon mettre le mettre en scène, de montrer que c’est ici et qu’il n’y a rien à cacher ni à craindre. On observe un mouvement centripète avec de nombreuses occupations de la part des usagers

mal à se saisir lorsqu’il devront être autonome. Notre but est donc de les responsabiliser, par exemple, on incite les populations à trouver un travail en dehors du site des Grands Voisins afin qu’ils se prépare à affronter le monde extérieur et la réalité du monde du travail ». Par conséquent, la coquille formée par les Grands Voisins permet aux populations de se sentir mieux et de se reconstruire mais cela oriente leur développement dans un environnement bienveillant et le retour à, la réalité va être très compliqué.

extérieurs mais finalement très peu de sorties à l’extérieur du centre de la part des résidents.

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Donc l’intégration du centre d’hébergement dans le quartier est favorisée et c’est indéniable. L’architecture déployée est rassurante et donne une crédibilité certaine. Ce ne sont pas des préfabriqués. Au contraire, la présence de la pierre donne une impression de pérennité. D’autre part, les formations, les activités intérieures ainsi que les rencontres permettent de forger une confiance en soi et des compétences mais cela enferme les habitants dans un environnement trop bienveillant et incomparable avec le monde extérieur.

D. DISCUSSION Suite à cette visite, j’ai pu déterminer que l’architecture et la spatialité ont un grand rôle à jouer dans l’intégration des migrants au sein leur nouvel environnement d’accueil. Certains dispositifs favorisent plus cela, cependant, certaines situations peuvent altérer ce désir d’intégration. La structure des Grands Voisins se veut réellement ouverte à faire de l’hébergement d’urgence une donnée non stigmatisée et intégrée. Par la mixité, elle permet d’intégrer ce fait à un ensemble beaucoup plus large. L’hébergement fait partie de ce tout et en est un élément fondamental dans le fonctionnement général. On observe que la typologie éclatée du site permet de créer un genre de village dans lequel on remarque de nombreux espaces principaux, des espaces d’entre deux, et des interstices appropriables. Les cours Anglaises donnent sur l’avenue Denfert Rochereau et fabrique une ouverture autant vers l’intérieur que sur l’extérieur donnant ainsi à voir et gage d’une certaine transparence. Cela est rassurant. Les espaces extérieurs sont aménagés de mobiliers, de plantes et donc fabrique un espace chaleureux et bienveillants. La particularité correspond aux services proposés en rez de chaussée permettant de faire vivre les places (restaurant, ressourcerie, ateliers...) Donc à travers cela on peut dire qu’il y a une volonté de désacraliser l’hébergement d’urgence. Dans beaucoup de cas, cette fonction n’est pas accompagnée d’autres usages et par conséquent, ces centres sont stigmatisés et perçu négativement. C’est le cas dans le centre hébergement d’urgence du 16ème arrondissement de Paris où il fait l’objet depuis son ouverture et même auparavant d’un rejet des populations autour.

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De la même façon, le premier centre d’hébergement aux Grands Voisins a fait

Cependant ce n’est pas que cela. En effet, habiter viens du terme habitat et donc

l’objet d’une stigmatisation de la part des habitants du quartier. Le fait d’instau-

il est nécessaire de vivre et de participer à cet habitat. De nombreux espaces

rer une certaine mixité d’usages permet d’atténuer cette méfiance et cette peur.

d’activités de formation, de loisir, d’événements sont générés et permettent aux

C’est en cela que les grands voisins ont décidé en 2015 d’associer à ce centre des

population d’une part de bénéficier d’espaces dans lesquels ils vont pouvoir se

disciplines liés au travail, ) la restauration à la vente ainsi qu’à diverses activités

divertir, trouver cette notion de bien être et d’épanouissement qu’ils ont perdu ou

de loisirs et de formations. Ce monde intérieur génère des ondes positives et une

jamais connu mais également se sentir important et développer une certaine fierté

certaine transparence. L’architecture générale dotée d’une matérialité durable en

à travers leurs productions et leur participation à la vie du site. Chaque habitant

pierre est rassurante et met presque de côté la temporalité du lieu. Elle se veut

organise au jour le jour son habitat, cohabite en permanence avec tous les autres

rassurante autant pour les passants depuis la rue que pour les population hébergés.

et est sensibilisé à la mise en commun de l’espace habité. Il pratique l’espace et

Cela contraste avec la mise en place de préfabriqués souvent déployés dans ce

le charge de leur sensibilité, de leur compétences et leur connaissances. D’autre

genre de situation. Ici il s’agit de la réappropriation d’un bâtiment qui a une his-

part la dissémination de ces espaces permet d’arpenter l’intégralité du site et ain-

toire et qui s’intègre réellement dans le tissus urbain dans lequel il se situe. L’in-

si de favoriser les rencontres, la prise de connaissance de l’autre afin d’en faire

tégration architecturale est une première étape dans ce processus d’intégration du

quelque chose d’habituelle. Ce sont ces connexions qui vont permettre permettre

centre d’hébergement. Les cours anglaises sont situées en interface avec la rue et

une meilleure ouverture et une reprise de confiance dans le fait que l’on se sente

génèrent une réelles invitation à entrer et cette transparence dont j’ai parler.

au même niveau. Enfin, ces rencontres et ces espaces développés au sein des

Cela favorise une certaine hospitalité visant à bien accueillir, c’est à dire faire en

Grands Voisins favorisent au delà d’un lien avec les autres une reconstruction de

sorte que ces dispositifs spatiaux et architecturaux permettent à ces population de

soi et une confiance qui pourra leur permettre d’affronter le monde extérieur au

ne plus être en marge mais au contraire intégrée das l’urbanité pour en devenir

moment venu. De nombreux lieux de formation mais aussi d’ateliers permettent

un élément constitutif de la ville. L’hospitalité c’est faire preuve d’une certaine

de se former et de retrouver une vocation et par conséquent une perspective

solidarité en essayant de comprendre ces populations.

d’avenir. On apprend à se gérer, retrouver une vie normal avec la notion de tra-

Le terme habiter prend énormément de sens dans la structure des grands voisins.

vail pour pouvoir subvenir à ses besoins. Habiter n’est pas synonyme de résider,

Habiter c’est s’encrer dans un lieu de vie dans lequel on va pouvoir retrouver

c’est bien plus que cela. On observe donc une responsabilisation qui malgré tout

confiance et subvenir à ses besoins.

ne s’applique pas à la majorité des habitants.

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Cependant ce modèle a une certaine limite. Celui-ci ne fabrique-t-il pas une sorte

C’est en cela que les espaces communs situés aux différents étages ne sont pas

d’enfermement selon la définition de Michel Lusseault ? Ce village fonctionne

ou peu utilisés par les habitants comme ce fut le cas auparavant dans les bâti-

de manière autonome dans la ville et par conséquent les personnes hébergées bé-

ment du fond beaucoup plus sécurisés et donc une véritable vie et des rassemble-

néficient d’espaces dans lequel ils ont tout sous la main et de manière très aisées.

ments autour d’activités informelles, de jeux, d’échanges se mettaient en place.

En conséquence l’ouverture de leur part est assez limité dans le sens où ils ont ce

La proximité avec les deux grandes cours anglaises deviens une nuisance pour les

qu’il faut pour vivre au sein de leur village.

habitants qui ne bénéficient pas de la tranquillité nécessaire pour se reconstruire

Au contraire leurs lieux de vie est devenu au fil du temps très publics. Les acti-

et subvenir à leur besoin. Comme j’ai pu le démontrer dans mon développement,

vités développées sont très attractives de part leur offre mais également de part

on observe que les populations cherchent à se camoufler dans leur manière d’or-

leur accessibilité en terme de prix. L’emplacement dans un quartier dédié essen-

ganiser leur logement. Donc cela pose la question également de l’organisation

tiellement à du logement fait que les population voisines viennent aux Grands

spatiale et de la hiérarchie entre espaces privés et espaces publics dans le but

Voisins pour bénéficier de ces avantages. La finalité est que le lieu est devenu très

de ne pas générer des conflits d’usages et un renfermement total des population

fréquenté et les populations hébergées ont du mal à se faire une place. Les grands

hébergées. Dans le cas du centre d’hébergement à Ivry sur seine, le centre est

espaces notamment les cours anglaises sont très occupées et par conséquent les

fermé au public, des quartier bien différenciés sont mis en place ce qui permet de

habitants préfèrent

préserver une certaine intimité et une certaine confiance. Cependant, l’ouverture

se replier sur eux même dans des espaces beaucoup plus en retraits et moins ac-

sur la ville est inexistante et l’enfermement y est assez important.

cessible. Cela pose la question de cette mixité qui n’est finalement pas totalement

Donc on observe une ambivalence entre d’un coté désacraliser l’hébergement

opérée. Un phénomène de ghettoïsation se met alors en place. La forme urbaine

d’urgence par l’accueil du publics mais de l’autre faire en sorte que ces popu-

de la structure permet aux hébergés de bénéficier d’espaces en retrait cependant

lations ne soient pas épiées et surexposer provoquant ainsi l’effet inverse de la

cela ne favorise pas cette mixité sociale et de partage. Les résidents sont épiés et

volonté initiale qui était de favoriser l’intégration de ces personnes dans l’espace

ne peuvent pas profité pleinement des espaces autour desquels ils vivent. D’autre

dans lequel elles s’implantent.

part, on observe justement une peur et un repli sur soit de la part des hébergés

Au delà de cela, on peut requestionner le statut de l’hébergement d’urgence. Ne

du fait que leur accès au domaine privé n’est en aucun cas sécurisé et se situe

peut-il pas grâce la courte temporalité mais également grâce à l’architecture et

spatialement au centre des flux. Les populations ne se sentent plus réellement en

aux espaces déployés devenir un moyen d’habiter la ville autrement. Cela ques-

sécurité et la conséquence est qu’ils n’osent plus sortir de leur logement de peur

tionne la manière de penser le projet par l’architecte en générant des architectures

de se faire cambrioler.

stimulant l’intégration, les rassemblements, le partage

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d’espaces entre les usagers, et la mixité fonctionnelle et sociale.

en compte que les populations sont avant tout ici pour se reconstruire et reprendre

Beaucoup de centres aujourd’hui ne développent pas ces éléments. Ils sont extéri-

confiance en elles et que par conséquent il faut réfléchir d’avantage aux espaces

torialisés, mis à l’écart et où l’architecture mise en place marquent encore trop le

qui leur sont dédiés.

caractère temporaire et l’imperméabilité à la ville. Les écarts sociaux se creusent alors et la crainte s’installe. Pourquoi ne pas, dans la pensé du projet, générer des lieux aux services de la ville, qui permettent, au delà de répondre à cette demande accru de place d’hébergement d’urgence,de façonner une urbanité, un espace au service des habitants en le dotant d’une attractivité par les usages proposés dont le contexte ne dispose pas forcément. A la suite de cela, la question est de savoir comment percevoir cette limite entre privé et public afin de ne pas entraver la reconstruction des populations mais au contraire de la favoriser et de les intégrer dans l’espace urbain. Comment faire en sorte de rendre le centre d’hébergement attractifs sans pour autant provoquer le replis des populations migrantes logées ? Les grands voisins ont exposé un modèle favorable à cette intégration des populations de part les activités proposées, les services accessibles en terme de distance et de coût et la spatialité générant des lieux intérieurs et extérieurs, de statuts différents et aménagés pour certains, libres pour d’autres diversifiant ainsi les typologies d’appropriation qu’elles soient formelles ou informelles. D’un autre côté le caractère très public va dans le sens contraire comme on a pu le voir car la limite entre le domaine public et le domaine privé n’est pas clairement défini et les espaces ne sont pas suffisamment hiérarchisés et ne s’adressent pas de manière plus importantes aux résidents ce qui induit une forme de repli sur soi. Il est donc important de faire en sorte de changer l’image des ces centres d’hébergement aujourd’hui trop stigmatisés, grâce à une ouverture sur la ville, une transparence et une architecture qui le permet tout en préservant et en prenant

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CONCLUSION

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construit sur un terrain inconstructible et donc à du faire usage d’un permis précaire. On peut évoquer également les grands voisins pour l’exploitation d’un site en attente de projet ou le centre d’Ivry sur seine pour l’appropriation d’un espace interstitiel et inconstructible qu’est l’usine des eaux. Cependant ces centres ont souvent fait l’objet de stigmatisation et de rejet de la part des populations locales. Les migrants intègrent des structures temporaires

CONCLUSION

souvent en marge de la ville qui ne répondent souvent pas à leurs volonté de se reconstruire et de se stabiliser. Ces structures sont donc mises en dehors de l’urbanité et deviens un espace que l’on évite, dont on a peur. Une des conséquences correspond au fait que ces populations n’habitent pas l’espace car elle

Le déplacement de populations quittant leur pays d’origine afin de trouver ail-

n’établissent pas d’ancrage car elles ne se sentent pas chez elle. D’un autre côté,

leurs une vie meilleure s’avère de plus en plus fréquent Il se dirigent vers les pays

elles se renferment sur elles même et n’établissent aucunes connexions et aucun

occidentaux avec ce désir de se donner une nouvelle chance de réussir et de me-

mouvements favorisant les liens avec le contexte dans lequel elles sont hébergées.

ner une vie plus digne et propice au bonheur et à l’émancipation.. On peut définir

On se demande alors comment faire en sorte que ces structures soient plus inté-

cette notion de migration comme une action consistant à quitter un lieu d’origine

grées dans le système urbain pour ainsi éviter le triptyque Exclusion – Extra-terri-

dans lequel le risque est important et où l’habitabilité est menacée par les crises

torialité - Exception définit par Michel Lusseault et au contraire comment générer

économiques, écologiques ou politiques pour finalement s’établir, devenir séden-

un véritable urbain dans lequel le centre est entièrement inclus et où les popula-

taire, retrouver une stabilité et un avenir. Les villes sont donc confronté à ce fait

tions hébergées peuvent se reconstruire et habiter c’est à dire définir un ancrages,

très contemporain et doivent donc réagir en conséquence et ainsi réfléchir aux

se mouvoir et se connecter.

dispositifs d’accueil à mettre en place. Les migrants sont souvent perçus comme

Je suis donc partit de l’hypothèse que la spatialité et l’architecture générée pour

une masse . Différents centres d’accueil et d’hébergement se mettent en place et

ces structures influencent considérablement sur a perception du lieu et l’émanci-

font usage de la temporalité pour pouvoir s’établir dans des territoires intersti-

pation de la part des populations hébergées.

tiels, inconstructibles, vacants ou en attente de projet de la ville afin de faire face

Pour tenter de répondre à cela, je me suis intéressé à la structure d’hébergement

à la pression foncière. On peut prendre l’exemple du centre d’hébergement situé

des Grands Voisins. En 2011, l’association Aurore a choisi d’installer ce centre

sur l’allée des fortifications dans le 16ème arrondissement de Paris et qui est

sur le site de l’ancien hôpital Saint Vincent de Paul en attendant la construction

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du nouvel éco-quartier en 2020. Puis, au vu de la surface disponible, d’autres

sont partagées avec les populations locales qui participent. Au fur et à mesure,

activités et usages se sont greffées. On a donc constaté que la perception du site

une relation étroite et une confiance se façonne. Le migrant n’est plus vu comme

avait changer. Au départ la présence d’hébergement pour migrants étaient très

un indésirable mais comme un élément participant au fonctionnement de son en-

mal accueillis de la part des habitants du quartier, Puis l’arrivée d’activités plutôt

vironnement. Ces interactions favorisent l’ouverture vers les autres, la confiance

attractives et ouvertes au publics ont permis de « dédramatiser » et d’accepter le

en soi et l’envi de repartir de l’avant. Cela constitue une étape fondamental dans

centre. Celui-ci se situant en zone dédiée au logement et relativement éloignée de

ce processus de reconstruction.

services du quotidiens, la stratégie d’implanter ces services a sein de la strucutre

Cependant, on a remarquer que malgré tous les effets positifs de cette démarche,

des grands voisins incitant ainsi les populations à venir arpenter le site. D’autre

ce système avait une limite correspondant à la perméabilité trop importante entre

part, on a constater que les qualité architecturale, et la pérennité des bâtiments

espace privé et public. L’ouverture trop importante au publics et la faible hié-

employés donne une certaine crédibilité tandis que la transparence depuis la rue

rarchie entre les espace provoque un sentiment de promiscuité de la part des po-

et l’éparpillement des bâtiments générant ainsi des espaces de transitions et de

pulations hébergées et elles ne se sentent plus forcément à leur place. En réaction,

rassemblements favorisent les rencontres et le désir de d’arpenter et der entrer.

elle ont des attitudes de fermeture en appropriant des espaces à l’abri dans les

Donc on constate de cette manière que l’architecture et la situation joue un rôle

interstices, en camouflant leurs espaces de vie pour garantir une certaine inti-

dans un premier temps sur la perception du site de la part des personnes exté-

mité compromise par la situation et leur exposition. D’autre part, on observe un

rieurs. D’autre part, si on se concentre sur les population on a vu qu’elles étaient

mouvement essentiellement centripète au Grands voisins avec des population ex-

loger dans des logements flexibles favorisant l’identification et l’appropriation.

térieurs qui s’y rendent et les migrants qui demeurent, ceux-ci profitant de tout

Les services proposés et l’accessibilité au mobiliers et à la nourriture facilite leur

les services et activités variées dont ils disposent. En conséquence, on constate

bien être et la satisfaction de leur besoin. Les activités auxquelles ils sont conviés

qu’ils ne sortent que très peu de cet environnement bienveillant et au final ils ne

ainsi que les événements facilitent leur ouverture et l’arpentage du site. Donc

s’intègrent par forcement au quartier.

cet ensemble fabrique un véritable habitat dans lequel les populations peuvent

En conséquence, on constate que la structure d’urgence pour ne pas être stigma-

subvenir à leur besoins mais également faire connaissance de l’autre et profite de

tiser et pour permettre une bonne intégration dans le quartier doit répondre à

services et déveopper des compétences qui leur serviront lorsqu’ils devront être

ces critère d’ouverture par de l’architecture rassurante, de la transparence depuis

autonomes. Ces espaces permettent de retrouver un dialogue et surtout des projets

l’espace public, des activités partagée et utile pour les habitants autour. Cependant,

se mettent en place petit à petit. Les espaces extérieurs servent pour des marchés,

cette ouverture ne doit pas entraver l’émancipation des population logées. Les es-

des activités sportives, des ateliers de jardinage. Ces activités et ces productions

paces doivent donc être plus hiérarchisés et sécurisés afin de ne pas entraîner de

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conflit d’usages et un malaise de la part des migrants qui en réaction à celui ci vont se refermer sur eux même. Dans cette période où l’on a tendance à répondre à cette situation d’arrivée massive de migrants de manière plutôt fonctionnaliste basé sr la simple tolérance, il s’avère uimportant de réagir autrement et d’intégrer ce fait dans notre manière de constituer la ville. La courte temporalité est une opportunité formidable pour expérimenter de nouvelles façon d’occuper les espaces. L’hébergement d’urgence constitue donc un moyen de penser la ville différemment en intégrant cette donnée comme base de projet. Le réchauffement climatique, les ressources de plus en plus rare aisni que les conflicts amènent à penser que cette situation n’en est qu’à son début et qu’il est indispensable d’intégrer cette donnée. On peut imaginer que ces centres deviennent de véritable centralités et d’espaces de rassemblement faisant de l’accueil de migrants non pas une contrainte mais plutôt une opportunité et un élément constitutif de l’espace urbain. Cependant, la hiérarchisation des espaces publics et privés demeure une donnée déterminante dans le processus d’intégration des migrants recherchant avant tout à se reconstruction et à reprendre confiance en eux. On peut donc imaginer que les espaces interstitiels ou en attente d’un projet futur soient investit de cette façon c’est à dire un habitat, un lieu de vie partagée et hiérarchisé dans lequel s’inventerait une mixité fonctionnel et sociale.

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