Dossier presse Présences Eric Bourguignon

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Présences ERIC BOURGUIGNON


Pas de confrontation avec le travail d’Eric Bourguignon sans immersion.


Présences Des corps passent devant des toiles et voient, s’absorbent. Des corps, les mêmes, pourraient tout aussi bien passer d e v a n t l e s m ê m e s t o i l e s e t n ’ y r i e n v o i r. La rencontre dépend du sérieux du flâneur, de sa capacité à déposer son costume d’arpenteur, à oublier la mesure. La palette d’Eric Bourguignon flatte majoritairement l’œil de tons minéraux et sa gamme n’est pas sans rappeler la douceur des nymphéas ou l’odeur terrienne des arts premiers. Aplats évoquant la solidité du granit ou l’épaisseur de la mousse, tracés délicats convoquant feuilles, tiges ou nuques mélancoliques, les peintures se présentent souvent comme des univers oniriques nous invitant à nager dans un liquide dont on ne sait s’il est amniotique ou s’il s’agit du Styx. On se love, on se noie et, peu à peu, la pupille offerte voit s ’ a v a n c e r v e r s e l l e l e s f o r m e s q u ’ e l l e a t t e n d . Quand cela se passe, quand l’oeil habitué commence à voir, la question de savoir si l’on est dans un espace abstrait ou figuré disparaît. C’est qu’il s’agit d’un monde, avec ses temps, ses chaleurs et ses glaces, ses histoires.

Bodies go by paintings and are absorbed. The same bodies could go by the same paintings and see nothing. The meeting with Eric Bourguignon’s work depends upon how much one is ready to let go of all measures. A mainly mineral colour range strokes the eye in a soft remembrance of both M o n n e t ’s N y m p h e a s and moist fires of cave art. Rocks, moss, dark underwoods emerge from solid strokes while thin lines give birth to dreamy leaves, stems and necks. There is a l i q u i d n a t u r e t o these pictures that could be amniotic or even the Styx itself. Hypnotized, the spectator starts by swimming. When he drowns, his eye finally sees shapes come forth and the whole question of determining whether the space is of abstract or figurative nature disappears. We are not facing anything, we are in a world, with its times, its own heats and ice ages, its stories.



Eric Bourguignon, Ablution, huile sur toile 100x81cm, 2017 ©


On dit de la peinture qu’elle est née du geste d’une femme trop enamourée pour envisager l’absence de son amant, que l’excès d’émotion, ou la peur de sa disparition, mena la main à caresser non plus l’homme mais son contour qu’elle délimita en traçant au charbon sur un mur la ligne ceignant son ombre. Elle exhiba ainsi aux yeux de tous l’horreur de ce qui pour elle ne passait pas : un jour un homme fit, de son corps, obstacle à la lumière. Diffus, très doux, le travail d’Eric Bourguignon semble d’abord assez loin de l’histoire de cette jeune femme, fille du potier Dibutade, dont la colère et le désespoir sont tels qu’ils arrachent d’elle un geste arrêtant le temps. Rien de si vindicatif dans les masses qui n’ont de cesse de s’avancer, diffuses et sans motif, dans un suspens d’avant le temps. Le peintre nous promène en effet à l’orée du souvenir, sans jamais complètement nous en donner la forme accomplie, ayant intégré ce paradoxe du trait qui est de ne jamais représenter. N’opposant pas au présent un quelconque point d’achoppement, l’artiste travaille bien plus à élargir nos perceptions qu’à nourrir quelque vaine querelle. Et si ces ambiances dont on ne sait pas très bien si elles sont post-apocalyptiques ou d’avant l’âge d’or nous parlent, c’est qu’elles incarnent une question posée au temps. Qu’est-ce donc que vivre dans ce corps où les souvenirs s’accumulent sans jamais s’effacer, dans ce monde où les espaces se succèdent sans tout à fait se ressembler ? It is said of painting that it was born of the gesture a woman too in love to face the absence of her lover. That the excess of emotion brought the hand to stroke the outline instead of the man while drawing a coal line on the wall to capture his shadow. Thus forcing all eyes to see the horror she couldn’t bear : one day, a man stood in the way of light. Diffuse, delicate, Eric Bourguignon’s work seems quite distant from the anger and despair that brought Dibutades to stop time in a line. A peaceful ineluctability fuels the diffuse masses that timlessly inhabit each picture. The artist brings us only to the fringe of memory (to the lips of the mouth), to a place where shapes don’t cristalize, having perfectly understood that lines don’t ever represent. The result extends our perceptions. Yet, those post-apolyptical atmospheres touch us because they embody a question that adresses Time itself, that is as strong and urgent as Dibutade’s. How can we live in bodies where all our memories mingle without ever really disappearing ? And what is this world where spaces always lead to one another without ever really coinciding ?


Eric Bourguignon, Au pied de l’arbre , huile sur toile 146x114 cm, 2017 ©



Eric Bourguignon, Crépuscule, huile sur toile 114x146 cm, 2017 ©


Plus qu’aux arts premiers, c’est à la dignité de l’antique que les toiles d’ Eric Bourguignon semblent faire appel. L’enchevêtrement des figures et leurs postures si fières quand on les discerne nous renvoie à l’élégance du statuaire, au port de ces êtres nobles que l’on voit traverser des tragédies portées par des principes sans lesquels elles seraient sauvées. Carnage ou extase, les êtres qui s’avancent vers nos pupilles sont dans cette absence qu’ont seules les figures dont la destinée et le courage, au sens de cœur, se mêlent jusque dans la mort. Elles existent dans ce monde, hors de nous, qu’est la peinture, et elles y existent pleinement, c’est-à-dire pour une raison qui n’a rien à voir avec nous, avec le fait de nous plaire. C’est à la peinture seule qu’Eric Bourguignon rend des comptes pour qu’adviennent ces présences qui ne sont finalement ni plantes, ni figures, ni tâches, mais entités disponibles, prêtes à recevoir l’oeil et par lesquelles il nous est donné d’explorer des sensations nouvelles et de se rencontrer, humain.

There’s an antique dignity to the situations happening in Eric Bourguignon’s works. The figures’ entanglement and their proud postures adress the reign of scultpures, they remind us of those beings whose noble principles make the flesh of tragedies. Ghosts of a bloodshed or incarnations of pure rhapsody, the beings we see living within the layers of paint are as cold as those figures whose hearts and destiny lead only to death. They exist in this world that is not ours, on the canvas, where they belong for a reason that has nothing to do with us. They have no intent of satisfying any of our needs, they are. It is to painting alone that Eric Bourguignon answers, in order to bring those presences to us. And, neither plants nor figures, these entities receive the eye, offering new sensations, eventually enlarging perceptions in each nerve and bone.

Clare Mary Puyfoulhoux


Eric Bourguignon, Causerie, huile sur toile 65x54 cm, 2017 Š


GUIDO ROMERO PIERINI Commissaire d’exposition guidoromeropierini@gmail.com +33 6 89 08 91 66

SARA CHAMBARD Attachée de Presse - Curatrice sara.chambard@gmail.com +33 7 70 90 67 41


Vernissage le 14 décembre 2017 à partir de 18h Exposition du 15 au 22 décembre 2017 de 12h à 19h

6 rue de Braque 75003 Paris (intérieur cour)


GALERIE

GUIDO ROMERO PIERINI


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