HCFR l'Hebdo N°116

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Edition du 15 Mai 2015

Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence Avengers : L’ère d’Ultron Cogan : Killing Them Softly La Chienne Week-end à Zuydcoote Le Roi en jaune The Flying Club Cup Mellow Gold Night Call Drones [3D] Le Septième Fils [3D] X-Men : Days of Future Past


Edition du 15 Mai 2015 Numéro 116

REDAC' CHEF Fabi

REDACTEURS

Clode Djee Igor Le Loup Céleste Guyness Pphf Saint-John Poivrot d’Arvor Ze Big Nowhere

MISE EN PAGE Laric

CORRECTIONS Fabi

SOUTIEN ET PUBLICATION Laric - Syntaxeror

Edité par l’association HomeCinema FRancophone (HCFR) association loi 1901 (JO 13/04/2002) siège social : 21, rue de Fécamp 75012 PARIS SIREN : 444 601 892 00029

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SOMMAIRE A L’AFFICHE Clode - Roy Andersson

Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence 4 Le Loup Celeste - Joss Whedon - Avengers : L’ère d’Ultron 6 SORTIES CINEMA Naruto the Last - Le film, Une Femme Iranienne, Refugiado Particulier à Particulier, D’amour et de dettes, Mad Max: Fury Road La Loi du Marché, Goodnight Mommy, Girls Only

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7ème ART Djee - Andrew Dominik - Cogan : Killing Them Softly (2012) Pphf - Jean Renoir - La Chienne (1931) Guyness - Henri Verneuil - Week-end à Zuydcoote (1964)

A

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A LIRE Igor - Robert W. Chambers - Le Roi en jaune (1895)

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MUSIQUE Saint-John Poivrot d’Arvor - Beirut - The Flying Club Cup (2007) Ze Big Nowhere - Beck - Mellow Gold (1994)

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BLU-RAY Le Loup céleste - Dan Gilroy - Night Call

Le Loup céleste - Rick Rosenthal - Drones

Le Loup céleste - Sergey Bodrov - [3D] Le Septième Fils

Le Loup céleste - Bryan Singer - [3D] X-Men : Days of Future Past

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A l’affiche Clode

Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence Roy Andersson

S

am et Jonathan, deux marchands ambulants de farces et attrapes, nous entraînent dans une promenade kaléidoscopique à travers la destinée humaine. C’est un voyage qui révèle l’humour et la tragédie cachés en nous, la grandeur de la vie, ainsi que l’extrême fragilité de l’humanité…

Date de sortie : 29 avril 2015 (1h40min) Réalisé par : Roy Andersson Avec : Holger Andersson, Nils Westblom, Charlotta Larsson Genre : Comédie dramatique Nationalité : Suédois , norvégien , français , allemand

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Joyeusement dépressif

sonnages ne cessent de répéter ce refrain d’une humanité aliénée, reJe suis content de savoir que vous croquevillé sur elle-même, qui veut s’efforcer de croire que tout va bien. allez bien. Je suis content de savoir que vous Pour son cinquième film en 45 ans, allez bien. Je suis content de savoir que vous qui clôt sa trilogie des vivants, Roy Anderson revient avec sa vision allez bien. dépressive d’une humanité qui se Un pistolet dans la main, seul dans dirige droit vers l’apocalypse. Sucun bureau, en pleurs sur le sol car- cession de 39 scènes, de 39 plans relé d’un couloir, en pyjama rose séquences, de 39 plans fixes onidans la cuisine d’un appartement riques, à la recherche du plan pard’une grande tour de béton, je suis fait. content de savoir que vous allez 39 scènes complètement figées, bien. dans des lieux pâles, grisâtres, mornes, morts, dans lesquels évoLes personnages ne cessent de luent des personnages pâles, grirépéter ce refrain au téléphone sâtres, mornes, morts. Des morts-vicomme des robots préprogram- vant dans un monde mortuaire. 39 més. Les personnages ne cessent scènes sur la banalité et la trivialité de répéter ce refrain alors qu’ils de la vie quotidienne, entrecoufont tout sauf aller bien. Les per- pées de quelques scènes plus surprenantes, plus abstraites, plus extrêmes où l’exceptionnel surgit de manière inattendue de l’absurdité de la vie de tous les jours. 39 scènes drôles, 39 scènes tristes aussi. Les scènes comiques sont résolument tragiques et les scènes tragiques Numèro 116 - HCFR l’Hebdo

résolument comiques. Emouvant. 39 scènes indépendantes mais complémentaires où l’on retrouve le goût prononcé du réalisateur suédois pour les vendeurs. Après un vendeur de réfrigérateurs et un vendeur de Crucifix, «Un pigeon...» met en scène deux vendeurs de farces et attrapes dépressifs. Deux vendeurs qui veulent aider les gens à s’amuser, mais qui semblent porter toute la tristesse du monde sur leurs épaules. 39 scènes qui auraient pu être moins nombreuses. Le propos finit par s’épuiser, les scènes par se répéter, le film par s’essouffler. 38 scènes aux personnages fondamentalement tristes pour une scène spontanément joyeuse. Deux jeunes filles font des bulles sur un balcon, souriantes, rayonnantes de joie. Pures. L’innocence juvénile comme révélateur de la médiocrité des adultes. Encore. 45 ans après «A Swedish Love Story». Drôle à en pleurer de désespoir. 5


A l’affiche

Le Loup Celeste

Avengers : L’ère d’Ultron

Joss Whedon

A

lors que Tony Stark tente de relancer un programme de maintien de la paix jusque-là suspendu, les choses tournent mal et les super-héros Iron Man, Captain America, Thor, Hulk, Black Widow et Hawkeye vont devoir à nouveau unir leurs forces pour combattre le plus puissant de leurs adversaires : le terrible Ultron, un être technologique terrifiant qui s’est juré d’éradiquer l’espèce humaine... Titre original : «The Avengers : Age of Ultron» Nationalité : Américain Genre : Science-fiction, Action Durée : 142 min Réalisateur : Joss Whedon Acteurs : Robert Downey Jr., Chris Evans, Mark Ruffalo, Scarlett Johansson, Jeremy Renner, Chris Hemsworth, Elizabeth Olsen, Aaron Taylor-Johnson, James Spader Date de sortie : 22 avril 2015

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Objectivement meilleure que le premier «Avengers» même si moins efficace (fun en fait), cette suite plus sérieuse et plus profonde (l’exploration des peurs et de la part d’ombre des personnages) toujours orchestrée par Joss Whedon ne déçoit pas, et réserve son lot de punchlines bien senties, de séquences d’action surpuissantes (hulkbuster vs hulk) aux effets spéciaux étourdissants (en-dehors des toutes premières minutes aux CGI visibles) et de super-vilains charismatiques (Ultron, La Sorcière Rouge et Vif-Argent). Grisant !

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Naruto the Last - Le film Date de sortie :Mercredi 13 Mai 2015 (1h 52mn ) Réalisé par Tsuneo Kobayashi Avec Junko Takeuchi, Nana Mizuki, Jun Fukuyama, Nakamura Chie Film japonais Genre Animation Dans le village de Konoha, deux années après la 4ème grande guerre des ninjas, Naruto s’apprête à célébrer la fête de l’hiver entouré d’Hinata et de ses amis. Soudain, une météorite déchire la nuit de son intense lumière et voilà que la lune se rapproche anormalement de la Terre. Le Conseil des Kage se réunit en urgence face à cette menace de destruction de la planète ! Pour Naruto, Sakura, Shikamaru, Saï et Hinata le compte à rebours pour sauver la planète a commencé.

Une Femme Iranienne Date de sortie : Mercredi 13 Mai 2015 (1h 42mn ) Réalisé par Negar Azarbayjani Avec Ghazal Shakeri, Shayesteh Irani, Homayoun Ershadi, Maryam Boubani, Nima Shahrokh Shahi Film iranien Genre Drame Bien que Rana soit une femme traditionnelle, elle est forcée de conduire un taxi à l’insu de sa famille pour rembourser la dette qui empêche son mari de sortir de prison. Par chance, elle rencontre la riche et rebelle Adineh, désespérément en attente d’un passeport pour quitter le pays et ainsi échapper à un mariage forcé. Les deux femmes vont s’aider mutuellement, mais Rana ignore qu’Adineh cache un lourd secret…

Refugiado Date de sortie : Mercredi 13 Mai 2015 (1h 33mn ) Réalisé par Diego Lerman Avec Julieta Diaz, Sebastián Molinaro, Marta Lubos, Valentina Garcia Guerrero, Carlos Weber Film argentin Genre Drame Laura et son fils de 7 ans quittent précipitamment leur appartement de Buenos Aires pour échapper à l’emprise d’un père menaçant. Les deux fugitifs s’engagent alors dans une course contre la montre à la recherche d’un refuge et d’une nouvelle vie.

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Particulier à Particulier Date de sortie : Mercredi 13 Mai 2015 (1h 13mn ) Réalisé par George Varsimashvili Avec Madeleine Pougatch, Camille Coqueugniot, Gabriel Mireté, Elsa de Belilovsky, Rudolph Sumac Film français Genre Comédie Constance Mercier, une jeune fille de campagne se prépare à commencer ses études à Paris. Elle se lance à la recherche d’appartements dans Paris pendant un mois et croisera sur sa route des logements insalubres, des escrocs, de la concurrence déloyale et des propriétaires mal avisés.

D’amour et de dettes Date de sortie : Mercredi 13 Mai 2015 (1h 35mn ) Réalisé par Francisco Avizanda Avec Ariadna Cabrol, Alfonso Torregrosa, Mikel Losada, Jon Ariño, Julio Velez Film espagnol Genre Drame Le monde insouciant de la jeune Rebeca s’écroule après le désastre financier et la mort soudaine de son père. Cependant, avant de mourir celui-ci lui laisse un possible butin fruit de ses exactions, et que veut également récupérer la banque qu’il a escroquée. C’est le jeune Tino, une sorte de journaliste à tout faire dans une télévision locale, qui s’en charge. Il se présente à Rebeca comme ce qu’il n’est pas, pour la séduire, mais il ne peut éviter d’en tomber amoureux. Rebeca est seule et essaie de récupérer son ancienne condition de classe...

Mad Max: Fury Road Date de sortie : Jeudi 14 Mai 2015 (2h 0mn ) Réalisé par George Miller Avec Tom Hardy, Charlize Theron, Zoë Kravitz, Nicholas Hoult, Rosie Huntington-Whiteley Action Australien Le film est présenté hors-compétition au Festival de Cannes 2015 Hanté par un lourd passé, Mad Max estime que le meilleur moyen de survivre est de rester seul. Cependant, il se retrouve embarqué par une bande qui parcourt le désert à bord d’un véhicule militaire piloté par l’Impératrice Furiosa. Ils fuient la Citadelle où sévit le terrible Immortan Joe qui s’est fait voler un objet irremplaçable. Enragé, ce Seigneur de guerre envoie ses hommes pour traquer les rebelles impitoyablement… Numèro 116 - HCFR l’Hebdo

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La Loi du Marché Date de sortie : Mardi 19 Mai 2015 (1h 33mn ) Réalisé par Stéphane Brizé Avec Vincent Lindon, Yves Ory, Karine De Mirbeck, Matthieu Schaller, Xavier Mathieu Film français Genre Drame Le film est présenté en Compétition au Festival de Cannes 2015 À 51 ans, après 20 mois de chômage, Thierry commence un nouveau travail qui le met bientôt face à un dilemme moral. Pour garder son emploi, peut-il tout accepter ?

Goodnight Mommy Date de sortie : Mercredi 13 Mai 2015 (1h 40mn ) Réalisé par Veronika Franz, Severin Fiala Avec Susanne Wuest, Lukas Schwarz, Elias Schwarz, Hans Escher, Elfriede Schatz Film autrichien Genre Epouvante-horreur En plein été, dans une maison de campagne perdue au milieu des champs de maïs et des bois, des jumeaux de dix ans attendent le retour de leur mère. Lorsqu’elle revient à la maison, le visage entièrement bandé suite à une opération de chirurgie esthétique, les enfants mettent en doute son identité…

Girls Only Date de sortie : Mercredi 13 Mai 2015 (1h 41mn ) Réalisé par Lynn Shelton Avec Keira Knightley, Chloë Grace Moretz, Sam Rockwell, Mark Webber, Ellie Kemper Film américain Genre Comédie A l’aube de ses 30 ans, on ne peut pas dire que Megan soit fixée sur son avenir. Avec son groupe d’amies déjà bien installées dans la vie, le décalage se creuse de jour en jour. Et ce n’est pas le comportement des hommes qui va l’apaiser ! Au point qu’elle se réfugie chez Annika, une nouvelle amie... de 16 ans. Fuyant avec joie ses responsabilités, elle préfère partager le quotidien insouciant de l’adolescente et ses copines. Jusqu’à croiser le père d’Annika au petit-déjeuner...

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Les podcasts HCFR, A écouter ! Depuis octobre 2013, HCFR vous propose des émissions podcastées sur les thèmes du cinéma, du jeu-vidéo & des technologies du Home-cinéma et de la HiFi. C’est avec une grande joie que nous abordons cette seconde saison de podcasts, avec un beau programme à la clef. Si vous ne connaissiez pas l’existence de ces émissions audio web-diffusées, alors il faut absolument que vous y jetiez une oreille. Lancées il y a un an, nous cumulons plus de 21h de programmes et 10 000 écoutes. Avec Xavier, nous lançons donc la saison 2 d’HCFR le Podcast Cinéma, émission dédiée, comme son nom l’indique, au 7ème Art. Après six premiers épisodes, nous souhaitons vous proposer toujours plus de contenu avec cette année de nouveaux thèmes et plein d’invités. Le premier épisode de cette seconde saison était l’occasion de faire le bilan des films sortis au cinéma cet été. Nous vous proposerons en novembre prochain une émission spéciale films comics. Pour ce qui est du Podcast Jeux-vidéo, après deux premiers épisodes d’actualité dédiés à l’E3 et la gamescom, nous avons travaillé avec BennJ et JulianF le concept de l’émission et nous vous proposerons désormais un épisode tous les mois. Actualité, tests de matériels divers et de jeux, dossiers et débats seront de la partie. Enfin, dans la continuité du Podcast Tech, nous allons avec Patrice (Laric) vous proposer une émission sur les installations dédiées fin-novembre. Nous enchaînerons avec un épisode sur la HiFi avec Stéphane (StephHifi) où nous débattrons d’un sujet déterminé avec différents invités. Pour conclure cette fin d’année, nous vous proposerons une émission spéciale, hors-série, entièrement dédiée au dématérialisé, qui conclura l’année 2014 des Podcasts d’HCFR. Bref, un beau programme en perspective, que nous tenions à vous présenter. Merci pour votre fidélité et à très vite ! Pour écouter nos émissions, flashez le QR Code ci-dessus ou rendez-vous sur http://www. homecinema-fr.com/podcast/ SnipizZ


7eme Art Djee

Cogan : Killing Them Softly (2012) Andrew Dominik

L

orsqu’une partie de poker illégale est braquée, c’est tout le monde des bas-fonds de la pègre qui est menacé. Les caïds de la Mafia font appel à Jackie Cogan pour trouver les coupables. Mais entre des commanditaires indécis, des escrocs à la petite semaine, des assassins fatigués et ceux qui ont fomenté le coup, Cogan va avoir du mal à garder le contrôle d’une situation qui dégénère… Date de sortie : 5 décembre 2012 (1h37min) Réalisé par : Andrew Dominik Avec : Brad Pitt, Scoot McNairy, James Gandolfini Genre : Thriller , Policier Nationalité : Américain

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Snake Pitt Faut pas se leurrer, lorsque tu empruntes le tunnel Cogan, tu sais d’emblée et malgré les détours que le futur proche sera plus dégueulasse qu’une fin de saison de Marseillais. Même si, au bout, tu crois apercevoir la lumière, tu sais qu’il n’y aura pas d’embellie.

Que c’est mort. Faut dire la vérité, il y a des endroits où, même le jour, t’as l’impression que c’est la nuit. Et inversement. Comme si le soleil le sentait pas de traverser, comme s’il préservait ses rayons. Pourtant, tu vois bien qu’il y a crochent à la même mascarade de quelqu’un, ça bouge. poudre et de sang. Toujours les mêmes cafards qui s’ac- C’est pas comme si tu savais pas où tu mettais les pieds. Toujours les mêmes carcasses qui flottent dans l’atmosphère viciée pour finir abîmées, trouées, concassées sur le macadam. Une série B noire, maquillée à gros traits, travelo parabole de l’Amérique d’aujourd’hui. Parfois malhabile, boursouflé mais pas trop, le film est sauvé par des acteurs bien disposés et une faconde visuelle aux saillies fulgurantes.

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7eme Art Pphf

La Chienne (1931) Jean Renoir

M

arié à une veuve acariâtre, M. Legrand a un violon d’Ingres : la peinture. Il tombe sous le charme de Lulu, une jeune femme exploitée par un souteneur. Celle-ci va abuser de sa crédulité et provoquer sa déchéance.

Date de sortie : 19 novembre 1931 (1h40min) Réalisé par : Jean Renoir Avec : Michel Simon, Janie Mareze, Georges Flamant Genre : Drame Nationalité : Français

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Re-noir Ou l’idée d’une critique qui s’appuierait sur une imposture – un «à la manière de» Lacan postulant que l’identité d’un individu, et plus modestement l’œuvre d’un artiste est totalement déterminée par son nom. Ainsi de René CLAIR dont tous les films sont lumineux, enjoués, positifs – CLAIRS. Chez Jean Renoir, au contraire, l’univers est, souvent, très sombre. C’est particulièrement évident avec «la Chienne» : après un premier enchaînement d’événements, progressant vers le noir le plus noir, vol, déchéance, meurtre, Renoir n’hésite pas à passer par-dessus une nouvelle couche, assez horrible,

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de noir. Et on évitera le spoiler intégral, même s’il est impossible de résister au plaisir de citer les ultimes dialogues entre les deux clochards, d’abord dépressifs, puis vindicatifs, enfin enthousiastes et s’achevant dans un double éclat de rire tonitruant : «J’ai tout fait, c’est bien simple. J’ai été marchand d’habits, trimardeur, ivrogne, voleur et même pour commencer – assassin … Ben mon vieux, qu’est-ce tu veux, faut d’tout pour faire un monde!» Une seconde couche de noir. RENOIR. Outre-noir. La Chienne tient aussi de la tragédie antique, en jouant sur l’égarement des personnages (et sur leur bêtise aussi), un peu à la façon d’Andromaque : Hermione est amoureuse

de Pyrrhus, Pyrrhus est amoureux d’Andromaque, mais Andromaque est amoureuse d’un mort. Ici Maurice est amoureux de Lulu qui ne l’aime pas (et le méprise), Lulu est amoureuse de Dédé qui ne l’aime pas (mais la bat allègrement), et Dédé n’aime personne. On se doute que tout cela ne finira pas très bien. «La Chienne» est une tragédie, mais avec une bonne part de bouffonnerie. Dès l’ouverture du film, le spectateur est averti – et dans le plus déconcertant des cadres, un castelet où surgissent des marionnettes, et Guignol en personne : «La pièce que nous allons vous montrer n’est ni un drame ni une comédie. Elle ne comporte aucune intention morale et elle ne vous prouvera rien du tout».

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Tous les mots sont importants : l’histoire va se dérouler dans un espace insolite, entre drame et vaudeville, et il ne faudra en tirer aucune leçon. C’est l’anarchisme de Jean Renoir, celui qui explosera bientôt dans «Boudu», qui s’installe avec «la Chienne». Il n’y a pas de morale à attendre du film puisque tout y est mensonges, faux-semblants, dissimulation comme dans la vie, entre des pantins qui s’agitent en vain. La présentation de Lulu, toujours dans le prologue est d’ailleurs aussi joliment paradoxale qu’explicite : « elle est toujours sincère, elle ment tout le temps. » Et tous mentent effectivement aux autres et à euxmêmes, Maurice (Michel Simon), en trompant sa femme, en trompant son employeur, en se trompant luimême quand il se perd dans ses identités (comptable ou peintre ?), Lulu (Janie Marèse) trompe Maurice Legrand, avec Dédé évidemment, mais aussi en lui volant ses tableaux et sa signature, Dédé (Georges Flamant) trompe tout le monde (jusqu’à lui-même au moment de sa 16

«défense» suicidaire lors du procès), mensonges sociaux et des masques, l’adjudant trompe tout le monde, trouvera sa véritable identité … la société, sa femme, en changeant La scène, assez remarquable du d’identité meurtre de «la chienne», filmée Ainsi va le monde dans cet entre dans un magistral hors champ, perdeux guerres, incertain, assez mi- met d’éviter à la fois tout pathos, sérable, où des grandes crises s’an- toute perspective moralisante et noncent, où la France ne sait plus tout naturalisme sanglant et voyant se situer entre optimisme béat qui qui passerait à côté de l’essentiel commence à s’effondrer, angoisse : son rire à elle, bien au-delà de la liée à la crise, peur des extrémismes moquerie ou du mépris, un gros qui montent ou refuge dans des plan sur le coupe-papier sur le lit, un rêves utopiques ... C’est sur ce ter- changement de plan vers l’extérieur reau que s’exprime l’anarchisme de de l’immeuble, sur les chanteurs de Jean Renoir – avec par ailleurs une rue et la foule très populaire massée symbolisation très étrange, portée autour d’eux, un travelling sur la fapar les intellectuels de l’époque, çade lépreuse de l’immeuble et sur un étrange éloge de la clochardisa- ses fenêtres, un passage au noir, un tion (que l’on retrouvera dans des gros plan sur un chat de gouttière termes très voisins dans des films avant de revenir dans la chambre … importants et exactement contemporains, A nous la liberté ou Boudu Tout est dit sur l’état du monde en : par delà les identités sociales men- 1931. songères, l’expression sans limites de la «liberté» dans les errances du La réalisation est ainsi aussi sobre clochard ; c’est là que le comptable que signifiante. Peu avant la scène «modèle» ou l’artiste méconnu (de du meurtre, une autre scène eslui-même) et méprisé, au-delà des sentielle, celle où Maurice Legrand www.homecinema-fr.com - Mai 2015


entrant inopinément dans l’appartement y surprend les amants est tout aussi remarquablement réalisée. Après la découverte et la sidération qui en résulte, la caméra est placée à l’extérieur de l’immeuble, à hauteur de la fenêtre de la chambre, avec le bruissement de la ,pluie en son direct – et pour la première fois, la seule fois du film, le spectateur est objectivement confronté à la réalité et ne peut plus se dissimuler derrière le regard des protagonistes ni derrière leurs mensonges dans les successions de champ/contrechamp. C’est évidemment l’instant clé du film. On soulignera également une utilisation très intéressante du son – alors que Renoir vient tout juste de découvrir le cinéma parlant (il a tourné «On purge bébé» quelques

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mois auparavant) : la prise directe du son en extérieur, inédite à l’époque, avec tous les bruits de la ville, particulièrement forte lors de la scène du meurtre en hors champ (musique et chanson des chanteurs de rue, bruit des voitures, des pièces qui frappent le sol …), tout cela contribue à créer une atmosphère enveloppante, à la fois réaliste et poétique. Dans un contexte aussi puissant, Michel Simon, encore peu connu, était à l’évidence l’interprète idéal – tour à tour timide, effacé, passionné, abattu, violent, indigné, malin, cynique, vindicatif et finalement euphorique, il parvient à donner à son personnage pathétique une dimension à la fois humaine et paradoxalement emblématique. Quant à Janie Marèse, jeune actrice quasi débu-

tante (elle avait déjà eu quelques mois auparavant un rôle important dans «Mam’zelle Nitouche»), dans le rôle de la Chienne, elle ne joue sans doute pas très juste, mais dégage une vulgarité très physique et assez fascinante. Elle devait mourir peu après le tournage dans un accident de voiture (le véhicule étant d’ailleurs piloté par Georges Flamant, son amant du film). Outre-noir.

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7eme Art Guyness

Week-end à Zuydcoote (1964) Henri Verneuil

A

Dunkerque, en juin 1940, ses camarades et lui ayant raté l’embarquement pour l’Angleterre au plus fort de la Débâcle, le sergent Julien Maillat, dégoûté et las, rencontre Jeanne, une jeune femme qui refuse de quitter sa maison en ruines. Julien persuade Jeanne de fuir avec lui et dit adieu à ses amis. Une improbable idylle se noue bientôt entre eux. Date de sortie : 12 décembre 1964 (1h59min) Réalisé par : Henri Verneuil Avec : Jean-Paul Belmondo, Catherine Spaak, Georges Géret Genre : Guerre Nationalité : Français

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C’est la mort à la plage Autant dire que j’attaquais ce Verneuil-Belmondo sans appétit particulier. Cible floue passée sous les radars de la cinéphilie hexagonale, camouflée par un manque de réputation assez étrange, le film du cinéaste franco-arménien est parfaitement dissimulé dans sa filmographie entre «Un singe en hiver», «Mélodie en sous-sol», «Cent mille dollars au soleil» (avant lui), «La vingt-cinquième heure», «Le clan des siciliens» et «Le Casse» (après). Comme tant d’œuvres ambitieuses et parfaitement tendues par une volonté de renoncer au spectaculaire, ce «Week-end à Zuydcoote» s’est sans doute bâti sur un grand malentendu.

succession de vagues de plaisirs qui vinrent lécher ma plage cinéphilique, avec un plaisir en forme de sable fin venant se coller entre mes doigts de pied. Par sa fameuse troupe d’interprètes, avant tout: autour de Jean-Paul, le panard simple de retrouver Jean-Pierre Marielle (en curé) François Perrier, Pierre Mondy, Georges Géret ou même Paul Préboist. Et, à titre bien plus personnel, au moment où je m’aperçois que le film ne date pas du tout de l’année que j’avais distraitement cru lire sur la jaquette du DVD, le petit plaisir de pouvoir le dater dans une fourchette de cinq ans, grâce à une analyse rapide de l’image, sa couleur, son format, son ambiance. Plage arrière

L’œuvre s’inscrit dans cette longue tradition de films français décrivant le quotidien d’appelés lambda au contact de l’horreur la plus abjecte (tradition elle-même largement inspirée de la littérature), allant au moins des «Croix de bois» de Raymond Bernard jusqu’au «Capitaine Conan» de Tavernier, dont la réussite ne tient pas tant dans sa reconstitution spectaculaire des scènes Verneuil pour œil de combats (au demeurant impeccables) mais dans le portrait attachant Parce que les fausses pistes abondent : du type sans qualité particulière face à Verneuil s’appuie sur un livre goncouré la violence de l’histoire. (de Robert Merle qui assure aussi ici les dialogues), Bébel ne fait pas encore du Bébel, Maurice Jarre ne compose pas ici une de ses mélodies les plus inoubliables (mais elle reste néanmoins superbe) , et Pinoteau n’est encore qu’assistant réalisateur. Pourtant, dès la scène introductive et le générique qui le suit, ce ne fut qu’une

rien ne compte tant qu’un café entre copains, ou une clope autour du feu. Pourtant, aucun ennui ne transpire de cette tranche de vie (et de mort) de 48 heures, et autour de ces tronches de vie, les épisodes et les rencontres se succédant avec toute l’absurdité dont la vie est capable, comme si elle pouvait avoir besoin que la guerre s’en mêle. On y croise donc une jeune résidente inconsciente du danger qui l’entoure, des nonnes en goguette qui parlent allemand en se rasant, un adepte du fusil mitrailleur originaire de Voiron, un couple mixte qui éprouve (déjà !) des difficultés à traverser les frontières, ou encore un officier britannique pas farouche du tampon.

Un condensé de tendre irrationnel et de saugrenu chaleureux, un week-end suspendu pendant lequel Maillat et ses potes, abandonnés à eux-mêmes, n’oublient jamais qui ils sont, et continuent de développer leurs petits commerces et d’essayer à exercer leurs passe-droits, de se demander où est la place de Dieu dans tout ça, de relativiser la portée d’un double meurtre mais surtout, surLa plage de Zuydcoote est le théâtre du tout, de faire en sorte de pouvoir boire regroupement des armées françaises et et manger à heure fixe. anglaises, en pleine débâcle de Juin 40, évènement que Robert Merle a connu. Un portrait sans mépris ni glorification. Et pour le coup, la troupe, regroupée Un regard juste, au fond, porté sur au tour de la popote, respire un vécu quelques Français échoués en pleine brillamment observé, à travers un film débâcle, sur une plage du nord. sobre, grâce surtout à une absence Une justesse qui peut, sans doute, d’emphase, par la sobriété de ses dia- constituer un indice de son manque de logues, et au travers de personnages succès. mi-désabusés mi-résignés pour qui

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A LIRE Igor

Le Roi en jaune (1895)

Robert W. Chambers

CLAP de fin ? En plein cœur du drôle de recueil, déséquilibré, tarabiscoté, du Roi en Jaune, il y a un tableau obscur, inquiétant, cousin du surréalisme, de la réalité exacerbée. Il y a cette nouvelle à rallonge et Paris sous les obus prussiens. Il y a un récit immersif et finement ciselé, jeté là pêle-mêle comme un vulgaire riendu-tout. Pourtant ses traits sont maniaques, ses psychés brossées et tendues loin au-delà du cadre. Même s’il conclut hâtivement, d’une vaine morale, une épopée aussi minuscule qu’entraînante, il ne ternit qu’un peu l’éclat de ses formes troublantes, dignes du fantastique le et des plus sérieuses. Les bons moplus vil alors qu’il ancre son temps ments côtoient les traversées ennuyeuses et alanguissements sans dans un réalisme absolu. fin, les frétillements intenses et les A ses côtés font pâles figures les bâillements de défaille. L’étincelle tentatives éparses et égarements cependant tarde à se manifester. mal dirigés. Nulle vautre absolue, Elle qui, pourtant, est le propre de loin s’en faut, l’œuvre est honnête la nouvelle. Elle qui sera la marque, l’aura des glorieux successeurs de Chambers. L’ouvreur presque anonyme d’une génération de conteurs foldingues aux univers alambiqués peine à imposer une vision personnelle du monde du non-dit et de la suggestion. Il y a un temps ce Roi, son petit être théâtral aux multiples mystères. A peine esquissé, tout juste aperçu. De cette pièce maudite nous n’aurons que quelques tragiques conséquences, funestes célébrations d’un quelque chose dont on ne sait pas grand-chose. Vite oublié, balayé. 20

Sans autre forme de procès, sujet semble-t-il épuisé, le Roi quitte la scène vite foulée, cède la place au Paris réaliste d’un rêve habité des fantasmes de son auteur pour un second acte coloré. Le sens y est, une belle et inattendue cohérence et une certaine force de caractère. Une douce émotion retenue. Mais de caractère point. Chambers n’ose encore une fois livrer pleinement son âme à l’œuvre, planque son Lui derrière un formalisme facile. Qu’eut-été cette œuvre nimbée de la belle authenticité artistique, du cœur ouvert d’un artiste visiblement dissimulé ? Qu’eut-été le Roi en Jaune habité du supplément de vie qu’insuffle l’homme aux mots ?

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MUSIQUE Saint-John Poivrot d’Arvor

The Flying Club Cup (2007)

Beirut

L’invitation au voyage Le visage poupon de Zach Condon, la tête pensante du collectif Beirut, fait son apparition dans le paysage musical en 2006, date de la sortie de son premier effort artistique, «Gulag Orkestar», alors qu’il est tout juste âgé de vingt ans. Et déjà, le musicien y faisait parler son talent précoce, mais néanmoins éclatant, au travers d’une kyrielle de vignettes envoûtantes aux charmes exotiques, complètement à contre courant de la norme musicale du moment. Car très tôt, il se révèle en effet être un voyageur insatiable. Amoureux des cultures, de géographie et d’espaces infinis, celui-ci déserte les bancs de l’école et son Nouveau-Mexique natal à seulement dix sept ans, âge ou l’on est pas sérieux parait il, pour aller vivre sa bohème en Europe, suivant ainsi les traces laissées par l’homme aux semelles de vent et par les poètes du 19éme siècle qu’il admire tant. De ces pérégrinations, le juvénile troubadour ramène alors deux amours : la culture française (et la France en général), ainsi que la musique d’Europe de l’Est, qui deviendront ses principales

inspirations et formeront bientôt le son si particulier de sa musique. Fort de ses multiples influences, le petit prodige de Santa Fe ne met pas longtemps à se trouver un style très personnel et audacieux, reconnaissable entre tous, et dans lequel il fait rentrer tous ses fantasmes et tout son univers. Un univers charriant des cuivres Balkanisants omniprésents, donnant tour à tour une couleur festive ou bien mélancolique à ces chansons semblant avoir été imaginées dans le tumulte d’un jour de foire, totalement hors du temps, ou dans l’ivresse d’une fête sans fin, durant laquelle l’euphorie ferait rapidement place à la langueur, qui ferait rapidement place à l’euphorie de nouveau. Et ainsi de suite. Très francophile donc, son deuxième ouvrage se nomme «The Flying Club Cup», et fait la part belle à notre belle contrée, comme en hommage à Jacques Brel ou encore Serge Gainsbourg, autant d’idoles qu’affectionne tout particulièrement Zach. Et ce sont des fanfares déjantées et

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des accordéons mêlés d’éléctronica qui viennent cette fois ci déluger sur ces treize titres aux résonances très francophones (Nantes, Cherbourg, Cliquot, Un dernier Verre, La Fête), en ajout d’instruments plus communs tels que la guitare ou le piano. Le tout formant un cadre parfait et somptueux pour que s’exprime cette voix franche et profonde, immédiatement identifiable, propulsant ses arabesques élégiaques d’un air détaché et rêveur, comme un écho sanglotant ou rigolant dans le lointain. C’est qu’il est beau cet album, il vous invite au voyage, intérieur comme extérieur. Il navigue délicieusement entre la modernité et le rétro et propose probablement ce que Beirut a fait de mieux depuis sa création (avec le génial single «Elephant Gun», dont je vous conseille chaudement l’écoute). Un disque entre spleen et idéal comme aurait dit le grand Charles.

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MUSIQUE Ze Big Nowhere

Mellow Gold (1994) Beck

De l’or sous la poussière Je me rappelle la première fois que j’ai entendu Loser de Beck sur mon petit radio-réveil planté sur une étagère branlante au dessus de mon plumard. Une étagère poussiéreuse où trônait une merveilleuse collection de n’importe quoi. Une collec’ étrange, un merveilleux melting-pot de broutilles inutiles, comprenant notamment un vieux jack usé trouvé dans un quelconque concert de Punk régional, un coquillage bizarre qui ressemblait comme deux gouttes d’eau à Maître Capello ou même un prospectus de literie dont la gonzesse aux attributs mammaires hypertrophiés avait perturbé mon regard encore moyennement innocent. C’est au milieu de ce fatras, sortant de ce poste grésillant et cabossé, que je pris ce Loser en pleine poire. Ce morceau, à l’image de cette étagère, de cette chambre d’ado priapique qui était la mienne avait ce charme bordélique, ce côté bringuebalant qui sauta immédiatement à mon oreille ouverte aux quatre vents.

(Genre auquel Beck sera rattaché à ses débuts) que tombe lourdement le premier album du Californien sur le monde de la musique.

Beck n’est pas un débutant quand sort Mellow Gold. A dix-huit ans , il quitte l’école et part rejoindre son grand père en Allemagne ( Al Hansen personnage important et complètement déjanté du mouvement artistique Fluxus ) où C’est en 1994 que Loser déferle sur les il touche à des formes d’art insolites ondes du monde entier. et avant-gardistes ( Comme le lâC’est en pleine époque Grunge cher de piano du haut d’un pont par exemple). En rentrant au pays, Beck traîne les bars de la *Big Apple*et se fait la main sur différents groupes du mouvement anti-Folk et autres mouvements alternatifs. Au début des années 90, il rentre à Los Angeles vivant de petits boulots, continuant à grattouiller sa guitare baladeuse et finit par enregistrer ses morceaux étranges sur différents labels indépendants. C’est avec Geffen Records ( qui lui

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offre moins d’argent mais une liberté totale et un contrôle absolu sur la production de ses albums) que l’explosion aura lieu. Et cette explosion, c’est la mèche Loser qui viendra la déclencher. Blues dissonant et tordu dont le style parlé et sa Fuck Attitude assumée en font le fer de lance du mouvement «slacker». Mellow Gold vient de naître. Album foutraque, skeud fourre-tout où Beck balance à l’intérieur et à grands coups de pelle sa créativité qui semble sans limite. Le Californien investit les genres, s’immisce dans les différents styles musicaux de son pays, les ronge de l’intérieur et les détruit à grands coups de masse. Beck encore inspiré par le mouvement Fluxus auquel appartient son grand père, influencé par cet anti-Art faisant de la destruction, de la remise en cause et de l’abolition des frontières artistiques une nouvelle forme d’Art, transpose les grandes lignes du dogme Fluxien dans ce premier album insaisissable. Son court passage dans le mouvewww.homecinema-fr.com - Mai 2015


ment underground de l’Anti-Folk ser- La folk des ancêtres est enfournée vira également à peaufiner ce mer- dans la machine à laver Beckienne, veilleux bordel qu’est Mellow Gold. programme «Délavage» comme pour la merveilleuse Pay No Mind (SnooBeck pénètre les styles, les déforme, zer) ou la malicieuse Nitemare Hippy les déstructure avec l’assurance du Girl, d’où elles ressortent vidées, essogamin génial qu’il est. rées jusqu’à la dernière goutte mais Tout est malaxé, passé au robot d’une d’un blanc immaculé renouvelé. prod’ brillante et innovante. Le Blues du Delta est lavé par l’ange

blond dans les lavoirs du bord du Mississippi où l’eau lave plus Black que Black. La guitare électrique, l’harmonica, les oripeaux ancestraux du Blues aplatis, écrasés, désincrustés à coups de battoir. Ressortant, malgré le big bang mélodique improbable, aussi pur qu’aux premiers temps (Le bien nommé Fuckin With My Head ou ou le bancal Truckdrivin Neighbors Downstairs). Mellow Gold est l’album magique d’un môme sûr de son talent et de sa modernité ( et une influence flagrante pour les néo-Folkeux des 00’s tels Sufjan Stevens et autres). Un moment précis dans ces nineties «Nirvanaïsées», une bouffée d’air frais Rock hors de ce Grunge cannibale. Une galette comme cette étagère branlante au dessus de mon pieu: bordélique, tordue, grinçante et un peu cradingue mais diablement vintage et foutrement solide.

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Le Loup Celeste

Night Call Dan Gilroy

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ranché sur les fréquences radio de la police, Lou parcourt Los Angeles la nuit à la recherche d’images choc qu’il vend à prix d’or aux chaînes de TV locales. La course au spectaculaire n’aura aucune limite...

Titre original : “Nightcrawler” Nationalité : Américain Genre : Thriller, Drame Année : 2014 Durée : 117 min Réalisateur : Dan Gilroy Acteurs : Jake Gyllenhaal, Rene Russo, Riz Ahmed, Bill Paxton

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Inspiré par les polars urbains de Michael Mann, ce thriller cynique et dérangeant porté par la performance impériale de Jake Gyllenhaal dresse le portrait d’un fascinant anti-héros à l’amoralité glaçante (un modèle de réussite à l’américaine !), plonge le spec-

tateur dans l’atmosphère sordide de la vie nocturne à Los Angeles et pointe du doigt les dérives de la course à l’audience. Original car s’intéressant au métier des «stringer» (reporters freelance), “Night Call” dispose aussi d’un récit plein d’audace, d’une mise

Le Blu-ray Image

Un master immaculé, une définition rutilante, une précision au cordeau, des scènes diurnes lumineuses, des séquences nocturnes ténébreuses, des couleurs très contrastées, des contrastes stylisés et des noirs superbes, mais de fugaces plans granuleux empêchent ce master HD d’atteindre la perfection.

Audio

Des pistes sonores peu démonstratives mais pointilleuses et parfaitement équilibrées. La spatialisation est enveloppante, les dialogues sont loin d’être timides, la balance frontale est précise, les ambiances foisonnent à l’arrière, la musique est admirablement restituée et les basses se rappellent à notre bon souvenir lors des passages agités.

Numèro 116 - HCFR l’Hebdo

en scène magnétique et de coursespoursuites intenses. Engagée, cette œuvre sans concession est aussi déstabilisante que grisante !

Fiche technique Format vidéo 1080p24 (VC-1) / [2.40] Pistes sonores Anglais DTS-HD Master Audio 5.1 Anglais DTS-HD Master Audio 2.0 Français (VFF) DTS-HD Master Audio 5.1 Français (VFF) DTS-HD Master Audio 2.0 Sous-titres Français Français pour malentendants Région : B (France) Éditeur : Orange Studio Date de sortie : 7 avril 2015

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Blu-ray

Le Loup Celeste

Drones

Rick Rosenthal

A

u sein d’une base militaire du Nevada, Jack, pilote de drones expérimenté, et Sue, fille d’un général respecté, ont pour mission de tuer un terroriste avec leur drone. Mais plus le temps avance, plus ils s’interrogent sur les motivations cachées de cette mission et leurs conséquences... Nationalité : Américain Genre : Guerre, Thriller Année : 2013 Durée : 80 min Réalisateur : Rick Rosenthal Acteurs : Eloise Mumford, Matt O’Leary, Whip Hubley, William Russ

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Peut-on au nom de la défense nationale commettre des actes répréhensibles ? Les dommages collatéraux sont-ils acceptables pour supprimer une menace ? Où se trouve notre humanité lorsque l’on déclenche la mort en pressant un bouton à des milliers de kilomètres de la cible ?

Voilà les questions que soulèvent ce thriller de guerre sous haute tension, reposant moins sur l’action (aucun assaut guerrier ici) que sur la lutte psychologique et morale de deux pilotes de drones aux idées plus ou moins opposées (l’un est pour le principe de sûreté lorsque l’autre est pour

la présomption d’innocence). Ce huis clos prenant n’est donc rien de moins qu’un réquisitoire contre la guerre des drones n’hésitant pas à critiquer ouvertement la politique interventionniste des États-Unis sous l’administration Bush Jr.

Le Blu-ray Image

De la définition aux contrastes en passant par la palette colorimétrique et les noirs, tous les voyants sont au vert malgré quelques fourmillements sur les arrière-plans.

Audio

C’est par le mixage sonore que l’impression d’être au sein d’une base militaire se fait. Les voix sont solidement cramponnées à la centrale, la scène avant est dynamique, la spatialisation est précise (les nombreux survols des avions de chasse), les ambiances de la salle de pilotage sont bien captées (les ventilateurs et les bruits de la console de commande), la scène arrière est active, la musique emplie comme il se doit la pièce d’écoute et les basses sont très imposantes.

Numèro 116 - HCFR l’Hebdo

Fiche technique Format vidéo 1080p24 (AVC) / [2.35] Pistes sonores Anglais DTS-HD Master Audio 5.1 Français (VFF) DTS-HD MA 5.1 Sous-titres Français imposés sur la VO Région : B (France) Éditeur : Marco Polo Production Date de sortie : 29 avril 2015

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Blu-ray

Le Loup Celeste

[3D] Le Septième Fils

Sergey Bodrov

I

l y a bien longtemps, une force maléfique menaçait de se déchaîner et de raviver la guerre entre les puissances surnaturelles et l’humanité. Depuis plusieurs décennies, le chevalier Maître Gregory retenait prisonnière la redoutable et maléfique sorcière Mère Malkin. Mais elle s’est désormais échappée et cherche à se venger. Seul Maître Gregory peut encore s’y opposer mais il ne peut être seul pour le faire. Il doit initier un nouvel apprenti...

Titre original : “Seventh Son” Nationalité : Américain, Britannique, Canadien, Chinois Genre : Fantastique, Aventure Année : 2014 Durée : 102 min Réalisateur : Sergey Bodrov Acteurs : Jeff Bridges, Ben Barnes, Julianne Moore, Alicia Vikander, Olivia Williams, Kit Harington

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Cette adaptation peu fidèle mais pleine d’énergie de “L’apprenti épouvanteur” signé Joseph Delaney est une épopée d’héroic fantasy à grand spectacle, où tous les ingrédients du genre prennent vie sans toutefois passionner (la faute à des per-

sonnages trop peu dégrossis) ou même se démarquer de la concurrence. La mise en scène pêchue, l’univers peuplé de créatures fantastiques en tout genre (sorcières, spectres, fantômes, gobelin, dragons...), les décors massifs, les scènes d’action homér-

iques, les effets spéciaux impressionnants et le cabotinage des aînés (Jeff Bridges et Julianne Moore semblent beaucoup s’amuser) en font néanmoins un efficace divertissement d’aventure.

Image

Très voire trop brillante parfois, l’image voit son piqué et ses contrastes variés en fonction de la surexposition des séquences. Il ne s’agit pas d’un défaut lié au transfert mais de l’aspect propre à la photographie qui n’est pas sans évoquer celle de «Willow». Le rendu reste de toute façon assez féerique avec une précision positive, des couleurs chimériques et des noirs appréciables.

Audio

Des pistes sonores généreuses qui ne laissent aucun répit aux différentes enceintes. La spatialisation est immersive à souhait avec des ambiances et effets bien ciblés, les voix sont claires, la scène frontale est dynamique, les canaux surrounds sont très sollicités, les airs épiques du score de Marco Beltrami s’invitent avec fougue au sein de l’espace acoustique et les basses rugissent abondamment.

3D

Malgré quelques contours (moins de cinq plans) moyennement détourés, voici une conversion de qualité à la profondeur souvent très bonne et aux sorties d’écran frappantes. La fenêtre de profondeur impressionne dans 80% des cas (plusieurs plans rapprochés avec des arrière-plans flous) avec des plans aériens vertigineux, les détachements sont globalement saisissants mais faiblissent un peu lors des passages nocturnes, les débordements de personnages et/ou décors sont permanents, les jaillissements de longue durée qu’ils soient météorologiques (pluie et fumée) ou non (des spectres et des dragons) sont réalistes, et les projections lors des scènes d’action (magie, armes de jet et débris) sont nombreuses et poussées même s’il existe des problèmes de windows conflict. Numèro 116 - HCFR l’Hebdo

Fiche technique Format vidéo 1080p24 (MVC) / [2.40] Pistes sonores Anglais DTS-HD Master Audio 7.1 Français (VFF) DTS 5.1 Sous-titres Français Anglais pour malentendants Région : B (France) Éditeur : Universal Pictures Date de sortie : 28 avril 2015

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Le Loup Celeste

[3D] X-Men : Days of Future Past Bryan Singer

L

es X-Men envoient Wolverine dans le passé pour changer un événement historique majeur, qui pourrait impacter mondialement humains et mutants...

Nationalité : Américain, Britannique Genre : Science-fiction, Action Année : 2014 Durée : 132 min Réalisateur : Bryan Singer Acteurs : Hugh Jackman, James McAvoy, Michael Fassbender, Jennifer Lawrence, Patrick Stewart, Ian McKellen

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D’une profondeur étonnante, ce septième épisode de la franchise “X-Men” parvient à rebooter la saga avec beaucoup d’intelligence grâce à l’ingéniosité de son cinéaste qui nous livre un opus bien plus sombre que ses ainés (mais pas dénué

d’humour), où le scénario assez complexe (il y est question de voyages dans le temps) mais bien construit, les acteurs impliqués, la mise en scène savamment orchestrée, le montage fluide, les SFX épatants et les scènes d’action virtuoses (le

passage avec Quicksilver), en font l’un des meilleurs films de la série avec “X-Men : Le Commencement”.

Image

L’utilisation de plusieurs types de pellicules (35mm, 16mm et 8mm pour marquer le mélange des époques) lors du tournage n’est en rien masqué (et heureusement) par ce transfert HD sublime. Le piqué est proprement sidérant, les textures sont d’une belle finesse, les couleurs flashy (le futur post-apocalyptique) ou vintage (les années 70) sont magnifiques, les contrastes sont impeccables, les noirs sont impénétrables et le grain argentique des scènes se déroulant dans le passé est très séduisant. Un sans-faute !

Fiche technique

Des pistes sonores à la spatialisation redoutable dont le mixage est d’une subtilité bienvenue. La dynamique est délectable, les dialogues sont équilibrés, les détails acoustiques remplissent l’espace avec précision, la scène avant délivre une grande ouverture, les ambiances et autres effets diffusés sur les enceintes arrières sont agiles, le score de John Ottman est bien orchestré et les basses se montrent généreuses.

Pistes sonores Anglais DTS-HD Master Audio 7.1 Français (VFF) DTS 5.1

Audio

3D

Très satisfaisante sans être inoubliable à cause de l’intensité variable de la fenêtre de profondeur, tantôt très bonne tantôt moyenne avec du flou sur les arrière-plans lors des vues rapprochées. De nombreux plans comme les aériens ou ceux au ralenti sont néanmoins marquants et les sorties d’écran sont souvent très réussies. Les débordements d’objets de décors, de personnages (essentiellement des bustes) et d’armes saillantes sont bien dosés, les effets météorologiques (la neige dans le futur et l’eau du système anti-incendie lors de la fuite du Pentagone) sont ultra-réalistes et les effets projetés (morceaux de verre, débris multiples et pouvoirs de certains mutants) ne sont pas en reste. Numèro 116 - HCFR l’Hebdo

Format vidéo 1080p24 (MVC) / [2.40]

Sous-titres Anglais et Français Région : B (France) Éditeur : 20th Century Fox Date de sortie : 08 octobre 2014

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La Semaine Prochaine

L’Hebdo L’actualité des sorties cinéma ...

De nouvelles critiques sur le 7ème Art, la musique ou des livres... Mais aussi des surprises, des coups de coeur et encore plus d’articles divers. Rendez-vous le 22 mai 2015 pour...

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En plus du site web et surtout de ses forums, HCFR s’est diversifié grâce au travail de Fabi et son équipe avec la mise en place du magazine HCFR l’Hebdo Depuis 2013, SnipizZ, avec la participation de nombreux invités, vous propose des émissions audio podcastées sur les thèmes du cinéma, du jeu-vidéo & des technologies du Home-cinéma et de la HiFi.


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