Comment les États abolissent la peine de mort
Comment les États abolissent la peine de mort
Sommaire Avant-propos par le ministre des Affaires étrangères norvégien, Espen Barth Eide........................... 3 Message du Président de la Commission internationale contre la peine de mort.............................. 4 Introduction........................................................................................................................................ 6 L’expérience d’une sélection de pays.................................................................................................. 10 • Afrique du Sud......................................................................................................................... 11 • Argentine................................................................................................................................ 14 • Cambodge............................................................................................................................... 15 • Etats-Unis............................................................................................................................... 17 • Connecticut...................................................................................................................... 18 • Nouveau Mexique............................................................................................................ 19 • France..................................................................................................................................... 20 • Haïti........................................................................................................................................ 22 • Kirghizstan.............................................................................................................................. 23 • Mexique.................................................................................................................................. 24 • Mongolie................................................................................................................................ 27 • Philippines.............................................................................................................................. 29 • Rwanda................................................................................................................................... 31 • Sénégal..................................................................................................................................... 33 • Turquie..................................................................................................................................... 34 Enseignements tirés des expériences des Etats en matière d’abolition de la peine de mort.............. 37
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Avant-propos par le ministre des Affaires étrangères norvégien, Espen Barth Eide Pour la Norvège, l’abolition de la peine de mort est une question prioritaire : nous nous opposons par principe à la peine de mort en toutes les circonstances. La mise à mort avec la sanction de l’État déshumanise la société. Elle n’a pas d’effet dissuasif, et nous savons que nombre d’innocents ont été exécutés. La peine de mort est cruelle et inhumaine ; nous sommes convaincus que son abolition est essentielle pour préserver la dignité humaine. Nous ne sommes pas seuls dans ce combat. Actuellement, quelque 150 États membres des Nations Unies ont aboli la peine de mort ou institué un moratoire de fait. Les États qui soutiennent de l’abolition de la peine de mort sont dotés de systèmes juridiques et de traditions culturelles et religieuses différents. Le soutien du public en faveur de la peine de mort est en déclin. Cependant, les gouvernements doivent prendre l’initiative dans les débats nationaux sur des questions de cette nature. La plupart des pays qui ont aboli la peine de mort l’ont fait malgré l’opposition du public ; pourtant leur population a rapidement accepté cette réforme. Mieux le public est informé des conditions concrètes de la peine de mort, moins il est hostile à son abolition. Il est donc important que les États fassent preuve d’une plus grande transparence en ce qui concerne l’application de la peine de mort. À long terme, cette transparence peut favoriser un débat ouvert, basé sur des faits concrets. Le présent rapport a pour objet de montrer, à travers divers exemples, quelle a été la démarche d’un certain nombre de gouvernements pour abolir la peine de mort, et de faire partager ces expériences aux États qui envisagent une telle décision. L’objectif est de présenter des mesures sensées, pratiques et pertinentes dont pourront s’inspirer d’autres États pour abolir la peine de mort. Le mandat de la Commission internationale contre la peine de mort (CIPM) consiste à renforcer le combat contre la peine de mort dans toutes les régions du monde. La CIPM vise à compléter les actions en ce sens menées par les organisations internationales et régionales, la société civile et les représentants de la sphère politique. La Norvège a l’honneur de soutenir et aider la CIPM en exerçant la présidence actuelle de son groupe de soutien transrégional. Nous avons également le plaisir d’être l’un des principaux partenaires et parrains du Vè Congrès mondial contre la peine de mort, qui se tiendra à Madrid en juin 2013. La question n’est plus de savoir si nous parviendrons à une abolition universelle de la peine de mort, mais quand nous y parviendrons. La question qui en découle naturellement est la suivante : quels seront les derniers pays à franchir le pas ? Qui sera le dernier à se rallier à cette tendance mondiale ? J’ai l’espoir que le présent rapport contribuera à renforcer la dynamique internationale en faveur de l’abolition.
Espen Barth Eide Ministre des Affaires étrangères de la Norvège
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Message du Président de la Commission internationale contre la peine de mort La Commission internationale contre la peine de mort (CIPM ou la Commission) a été fondée en octobre 2010 pour promouvoir et soutenir l’abolition de la peine de mort. Créée à l’initiative du gouvernement espagnol, elle vise à faire campagne contre la peine capitale dans le monde entier. La CIPM est composée de 15 membres éminents, dont d’anciens Présidents, Premiers ministres, ministres, hauts fonctionnaires de l’ONU, un ancien Gouverneur américain, d’anciens juges, une ancien Présidente de la Cour internationale de justice et une universitaire de renom. Les membres de la Commission représentent toutes les régions du monde, montrant ainsi que l’abolition de la peine de mort est une cause mondiale et non limitée à une région particulière. Ils ne représentent pas leur propre pays et prennent leurs décisions en toute indépendance. Chacun d’entre eux possède une expertise en matière de droits de l’Homme et est engagé en faveur de l’abolition mondiale de la peine de mort. Leur expérience et leurs connaissances leur permettent de traiter de questions politiquement sensibles et de dialoguer avec de hauts fonctionnaires de pays qui appliquent encore la peine de mort. Du fait de leur savoir, de leur influence et de leur large représentativité géographique, la Commission bénéficie d’une forte visibilité sur la scène internationale. Grâce à l’engagement personnel des membres de la CIPM en faveur de l’abolition de la peine de mort, la Commission est bien placée pour dialoguer avec des hauts fonctionnaires de pays où la peine de mort n’est pas encore abolie. Ainsi, Robert Badinter, ancien ministre français de la Justice, a joué un rôle crucial dans la décision de la France d’abolir la peine de mort en 1981. Gloria Macapagal-Arroyo, ancienne Présidente des Philippines, a signé en juin 2006 la loi n° 9346 de la République, qui interdit la peine de mort aux Philippines. Bill Richardson, ancien Gouverneur du Nouveau-Mexique (2003-2011), a signé la loi sur l’abolition le 18 mars 2009. L’ancien ministre de la Justice Ibrahim Najjar a soumis un projet de loi sur l’abolition de la peine de mort au Liban. Le Liban applique un moratoire de facto sur les exécutions capitales depuis juillet 2008, date à laquelle M. Najjar a refusé de signer les mandats d’exécution. La CIPM est soutenue et financée par un groupe de 16 pays de toutes les régions du monde engagés contre la peine de mort : l’Afrique du Sud, l’Algérie, l’Argentine, l’Espagne, la France, l’Italie, le Kazakhstan, le Mexique, la Mongolie, la Norvège, les Philippines, le Portugal, la République dominicaine, la Suisse, le Togo et la Turquie. Les treize études de cas du présent rapport concernent sept de ces pays. Ces dernières décennies, un nombre croissant de pays ont reconnu que la mise à mort d’État constituait une atteinte la dignité humaine et aux droits de l’Homme. Cette dynamique en faveur de l’abolition est observée dans toutes les régions du monde, quels que soient le système politique, la religion, la culture
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ou les traditions des pays concernés. Selon les Nations Unies, quelque 150 États ont aboli la peine de mort ou ne l’appliquent pas. Le défi consiste aujourd’hui à encourager les États qui appliquent encore la peine de mort à l’abolir, pour toutes les infractions et quelles que soient les circonstances. Le présent rapport est issu d’une discussion d’experts organisée à New York par les Nations Unies en juillet 2012, dans laquelle des questions furent soulevées sur la démarche adoptée par les États pour abolir la peine de mort. Il examine le processus d’abolition de la peine de mort à travers l’expérience de treize États. À partir de ces enseignements et de ces expériences, il vise à fournir aux États des recommandations sur la voie à suivre pour abolir la peine de mort. En février 2013, la CIPM a organisé une réunion d’experts à Genève pour discuter des mesures que peuvent prendre les États vers une abolition de la peine de mort. Cette discussion entre des experts de la peine capitale issus du monde universitaire et d’organisations intergouvernementales et non gouvernementales a permis d’alimenter le présent rapport sur la voie empruntée par différents États pour abolir la peine de mort. Le résultat de ces discussions ainsi que les contributions de membres de la CIPM et de son groupe de soutien ont été intégrés au présent rapport. Le but de la CIPM est l’abolition universelle de la peine de mort. Pour y parvenir, les États peuvent prendre un certain nombre de mesures. Le présent rapport vise à faciliter la réalisation de cet objectif ultime – un monde libéré de la peine de mort.
Federico Mayor Président de la CIPM
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INTRODUCTION Les deux dernières décennies ont été marquées par l’accélération de la dynamique mondiale en faveur de l’abolition de la peine de mort. Les progrès vers l’abolition observés à la fin de la deuxième guerre mondiale ont été d’abord lents, avant de connaître une nette accélération à partir du début des années 1990. Lors de la fondation des Nations Unies en 1945, seuls huit États avaient aboli la peine de mort pour toutes les infractions. Vingt ans plus tard, en 1965, ils étaient vingt-cinq, dont onze pour l’ensemble des infractions et quatorze pour les infractions de droit commun commises en temps de paix. Le tournant a eu lieu en 1995, date à laquelle, pour la première fois dans l’histoire, une majorité d’États avaient aboli la peine de mort en droit ou en pratique. Selon les chiffres des Nations Unies, en février 2013, quelque 150 États membres des Nations Unies avaient aboli la peine capitale par la voie législative ou suspendu les exécutions. Parmi ces États, 105 avaient aboli la peine de mort en droit, dont 97 pour toutes les infractions en droit civil et militaire et 8 pour les infractions de droit commun, la peine de mort y étant encore possible, par exemple en droit militaire. Cette marche continue vers l’abolition est positive. Pourtant, il faut garder à l’esprit que des milliards de personnes vivent encore dans des pays qui ont conservé la peine capitale et que des milliers de détenus sont encore exécutés chaque année, ou restent sous le coup d’une condamnation à mort. L’opposition à la peine de mort n’est pas cantonnée à une région, à un système politique, à une religion, à une culture ou à une tradition spécifiques. La question de l’abolition est une préoccupation mondiale, qui a notamment conduit l’Assemblée générale des Nations Unies à appeler depuis 2007 à un moratoire mondial sur les exécutions en vue d’abolir la peine de mort. La quatrième résolution en la matière a été adoptée en décembre 2012, recueillant les suffrages de 111 pays. Soixante-quinze sont également parties au Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort, et sont légalement tenus de ne plus exécuter quiconque dans leur juridiction. Le présent rapport s’intéresse au processus qui a conduit 13 pays à abolir la peine de mort, et au rôle de différents acteurs en la matière, notamment les représentants des gouvernements, tribunaux, médias, organisations professionnelles, institutions religieuses et organisations non gouvernementales (ONG). Il se penche sur l’abolition dans différents pays du monde. Comme le montrent les 13 études de cas, il existe une multiplicité de manières d’abolir la peine de mort. Le chemin vers l’abolition a également évolué, un nombre croissant de pays adoptant un processus de transition plus rapide vers l’abolition totale. Certaines études de cas montrent que l’abolition est souvent associée à une rupture par rapport à un passé répressif, par exemple en Afrique du Sud après la fin de l’apartheid, en Haïti après la chute de Duvalier, après le génocide au Rwanda et après la signature d’un cessez-le-feu et d’un accord de paix faisant suite à des violations massives des droits de l’Homme au Cambodge. L’Argentine, le Mexique et la Turquie ont aboli la peine de mort après des périodes de loi martiale ou en supprimant les codes de justice militaire de leur législation. L’expérience personnelle de certains dirigeants a également joué un rôle, notamment en Afrique du Sud et en République de Corée, où les dirigeants avaient eux-mêmes été confrontés au risque d’une exécution.
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L’abolition de la peine de mort nécessite une volonté politique qui s’incarne dans un chef de file. Il peut s’agir d’un homme politique, d’un juge, d’une figure religieuse ou d’un membre de la société civile. Le rôle de ce chef de file est très important pour surmonter l’opposition nationale, comme dans le cas de la France, de la Mongolie, des Philippines, du Sénégal et des États-Unis, où le rôle moteur des gouverneurs des États du Connecticut, Maryland et Nouveau Mexique a été important dans l’abolition de la peine de mort. Les présidents ont également régulièrement usé de leurs prérogatives pour accorder la grâce ou imposer un moratoire sur les exécutions, notamment en France, au Mexique, en Mongolie et aux Philippines. Ces mesures ont ouvert la voie à l’abrogation législative ou constitutionnelle de la peine capitale. D’autres dirigeants politiques, notamment des députés, ont joué un rôle crucial dans l’abolition, en dépit d’une opinion publique favorable au maintien de la peine de mort. Le risque d’exécuter des innocents est également pris en compte par des dirigeants politiques dans la décision d’abolir la peine de mort. Lorsqu’il était Gouverneur de l’État du Nouveau-Mexique aux États-Unis, Bill Richardson, actuellement membre de la CIPM, a signé une loi d’abolition le 18 mars 2009. Dans une déclaration publiée le même jour il expliquait : « Dans notre société qui place la vie et la liberté des personnes au-dessus de tout, où la justice, et non la vengeance est le seul principe directeur de notre système pénal, la possibilité de la condamnation, et, Dieu nous en préserve, de l’exécution à tort d’un innocent est une abomination pour notre sensibilité d’être humain. » Une fois libérés de la colonisation, certains pays africains comme le Sénégal et l’Afrique du Sud ont évolué vers l’abolition, sous l’influence de valeurs traditionnelles conférant à la vie un caractère sacré. En Amérique latine, des traditions abolitionnistes anciennes, formées en réaction à l’exécution de figures politiques, ont alimenté le débat sur la peine de mort après l’indépendance acquise par ces pays au XIXè siècle. Les pays ont emprunté différents chemins vers l’abolition. Le Cambodge, Haïti, le Kirghizstan et la Turquie ont aboli la peine de mort en modifiant la constitution, essentiellement par des dispositions sur le droit à la vie, puis ont amendé leur code pénal et d’autres lois. D’autres pays comme la France et le Mexique, ont d’abord lancé une réforme législative avant d’inscrire l’abolition dans leur constitution. L’interdiction constitutionnelle de la peine de mort constitue une solide garantie de l’abolition. Des pays comme l’Argentine, les Philippines, le Rwanda et le Sénégal ont aboli la peine capitale par des amendements législatifs, mais n’ont pas encore inscrit de disposition à cet égard dans leur constitution. La Mongolie a annoncé qu’elle envisageait l’abolition en prenant l’engagement international d’abolir la peine de mort et de devenir partie au Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en attendant d’abroger la peine de mort dans sa législation. En Afrique du Sud, c’est la Cour constitutionnelle qui a joué un rôle décisif dans l’abolition, en déclarant que la peine de mort constituait une violation des droits de l’Homme, comme forme de peine cruelle, inhumaine ou dégradante. Aux ÉtatsUnis, des États individuels prennent des mesures en faveur d’une abolition de la peine capitale, même si elle demeure en vigueur au niveau fédéral. L’État du Maryland est récemment devenu le dix-huitième État à abroger la peine de mort. Les tribunaux nationaux peuvent également apporter une contribution importante et progressive en restreignant l’application de la peine de mort, comme ce fut le cas en Inde, au Kenya et aux États-Unis. 7
I Des études fiables menées à la demande des parlements, de l’exécutif de certains pays, d’organisations professionnelles ou d’ONG contiennent des informations sur l’application de la peine de mort, notamment sur les condamnations à mort et les exécutions. Ces études fournissent des arguments solides en faveur de l’abolition, car elles soulignent la nature discriminatoire et arbitraire de nombre de procédures judiciaires, qui, dans certains cas, ont conduit à l’exécution d’innocents. Des études officielles sur l’application de la peine capitale ont ainsi été menées en France, en Mongolie et dans l’État du Connecticut aux États-Unis. Des ONG nationales, parfois en partenariat avec des ONG internationales, des organisations professionnelles et des universitaires, fournissent des données détaillées et impartiales sur l’absence d’effet dissuasif de la peine de mort et sur son application arbitraire et discriminatoire. Ces informations et études ont contribué à l’abolition en Afrique du Sud, en Mongolie, aux Philippines et dans l’État américain du Nouveau-Mexique. Des organisations professionnelles, notamment des associations du barreau, des associations médicales et des organisations chargées de l’application de la loi, ont œuvré en faveur de l’abolition dans un certain nombre de pays, de même que des organisations de défense des droits de l’Homme. Le rôle d’organisations religieuses dans le combat contre la peine de mort a également été important, par exemple sur le continent américain, aux Philippines et en Afrique du Sud. La pression internationale joue également un rôle notable. Il existe une pression croissante en faveur de l’abolition du fait des résolutions adoptées par l’Assemblée générale des Nations Unies et l’ancienne Commission des droits de l’Homme. L’instance qui l’a remplacée, le Conseil des droits de l’Homme soulève régulièrement des questions sur la peine de mort dans ses examens par les pairs du respect des droits de l’Homme par les États, effectués dans le cadre de son examen périodique universel. Des déclarations officielles appelant à une abolition universelle, émanant notamment du Conseil de l’Europe, de l’Union européenne, des Nations Unies et de certains de leurs États membres, ont un poids important et un effet persuasif. Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires dénonce régulièrement les violations des normes et garanties internationales concernant la peine de mort ainsi que des restrictions concernant son application. Des ONG internationales militent en faveur de l’abolition et soutiennent les ONG nationales dans le travail de plaidoyer. La création d’une Journée mondiale contre la peine de mort, le 10 octobre, de la manifestation « Villes pour la vie » organisée le 30 novembre et du Congrès mondial contre la peine de mort qui se tient tous les trois ans sont autant d’exemples de la pression exercée par les organisations de la société civile. La création d’instruments internationaux sur les droits de l’Homme favorise également l’abolition de la peine de mort, et le rôle de la jurisprudence ne peut être sous-estimé à cet égard. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques comporte plusieurs dispositions, notamment des articles sur le droit à la vie, la privation de liberté et les garanties de jugement équitable, qui ont un effet sur l’application de la peine de mort. L’article 6 revêt notamment une importance particulière, puisqu’il énonce que le droit à la vie est inhérent à la personne humaine, qu’il doit être protégé par la loi et que « nul ne peut être arbitrairement privé de la vie ». L’article 6 encourage également les États à évoluer vers l’abolition : « Aucune disposition du présent article ne peut être invoquée pour retarder ou empêcher l’abolition de la peine capitale par un État partie au présent Pacte ». La jurisprudence du comité des droits de l’Homme, qui contrôle la mise en œuvre du Pacte, joue un rôle essentiel en assurant que les dispositions sont comprises et respectées ; le comité formule également des recommandations importantes après avoir examiné le 8
respect du Pacte par les États. Le comité a également publié l’observation générale n° 24, qui déclare que l’interdiction relative à la privation arbitraire de la vie est inscrite dans le droit international coutumier et constitue une norme impérative, à laquelle il ne peut être dérogé. Le Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort est également un texte essentiel dans le combat pour l’abolition. Les normes régionales relatives aux droits de l’Homme ont également une influence marquée sur l’abolition. Au sein de l’Organisation des États américains (OEA), 25 États ont ratifié la Convention américaine relative aux droits de l’Homme, qui interdit le rétablissement de la peine de mort dans les pays qui l’ont abolie. Plus récemment, en août 2012, la Commission interaméricaine des droits de l’Homme de l’OEA, à laquelle appartiennent les États-Unis, a appelé à un moratoire sur les exécutions dans la région. En Europe, le Protocole n° 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme abolit la peine de mort en temps de paix. Il a été ratifié par 46 États. Le protocole n° 13 de cette même Convention, qui exige l’abolition en toutes circonstances, sans réserve ni dérogation, a été ratifié par 43 États. L’ensemble des 47 membres du Conseil de l’Europe ont aboli la peine capitale ou institué un moratoire sur les exécutions. L’abolition de la peine de mort est désormais une condition préalable à l’adhésion au Conseil de l’Europe. L’Union européenne a également fait de l’abolition de la peine de mort une condition à l’adhésion. L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) n’exige pas que ses États membres abolissent la peine de mort, mais suit l’évolution de l’application de la peine de mort sur son territoire et établit un rapport annuel sur la question lors de la Réunion sur la mise en œuvre de la dimension humaine. La Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples a adopté deux résolutions, en 1999 et 2008, qui appellent les États parties à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples à respecter un moratoire sur la peine de mort (ACHPR/Res 42 (XXVI) et ACHPR/Res.136(XXXXIIII).08.). En 2011, les Présidents de la Commission africaine et de son groupe de travail sur la peine de mort en Afrique ont déclaré publiquement que la peine de mort constituait une violation de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples, et appelé à la signature d’un Protocole à la Charte relatif à l’abolition de la peine de mort en Afrique. Les tribunaux et cour pénales internationaux ont également une influence importante sur l’abolition de la peine de mort. Les cours et tribunaux internationaux soutenus par les Nations Unies interdisent la peine de mort, tout comme la Cour pénale internationale. La décision d’abolir la peine de mort au Rwanda vient en partie du fait que le Tribunal pénal international pour le Rwanda ne prévoit pas la peine capitale (voir étude de cas sur le Rwanda). Les processus et accords de paix peuvent également être un facteur important dans l’abolition. Au Cambodge par exemple, la détermination des Nations Unies à exclure la peine de mort a contribué in fine à l’abolition de la peine capitale par le pays (voir étude de cas sur le Cambodge).
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I Les États qui ont conservé la peine de mort avancent fréquemment l’argument que le public lui est favorable, ce qui rend très difficile son abolition. Ils se réfèrent à des valeurs sociétales traditionnelles favorables au châtiment, donc au maintien de la peine de mort. Il est donc essentiel que ces États veillent à ce que des informations et statistiques concernant la peine de mort soient mises à la disposition du public. Néanmoins, même lorsque le public dispose de telles informations, son opinion peut fortement fluctuer, notamment en réponse à des crimes graves et à la couverture médiatique qui en est faite. Les États où la position de la population peut peser sur la politique en matière pénale sont confrontés à des difficultés. L’opinion publique peut être difficile à jauger avec précision : sa réponse sur la peine de mort dépend autant de la manière sont formulées les questions et de l’existence d’alternatives proposées que de la compréhension et des connaissances des personnes sur la peine de mort. Si l’opinion publique sur la peine de mort est un facteur à prendre en compte, la décision finale sur l’abolition incombe à l’État. L’expérience montre que la peine capitale a déjà été abolie alors même que l’opinion publique y était favorable. Ce fut le cas notamment au Canada, en France, en Allemagne, au Royaume-Uni et dans les 18 États américains qui l’ont abolie. Une fois l’abolition mise en œuvre, la majorité de la population ne s’est pas opposée à cette décision. La CIPM œuvre en faveur de l’abolition de la peine de mort dans le monde entier. Elle a préparé le présent rapport, qui retrace l’expérience de 13 pays qui ont pris des mesures en faveur de l’abolition totale de la peine de mort. Ces 13 pays représentent toutes les régions du monde. Le récit de leur cheminement est suivi d’une brève description des leçons tirées de leur expérience. Le rapport se conclut par un chapitre sur la CIPM et ses membres.
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L’EXPÉRIENCE D’UNE SÉLECTION DE PAYS
AFRIQUE DU SUD En 1995, l’Afrique du Sud a aboli en droit la peine de mort pour les infractions de droit commun, et en 1997 pour toutes les autres infractions, après que la Cour constitutionnelle eut déclaré la peine capitale inconstitutionnelle en 1995. La dernière exécution a eu lieu en 1991. Durant l’époque de l’apartheid, la peine de mort était utilisée largement et de façon disproportionnée contre la population noire. En 1995, la Cour constitutionnelle, dans un jugement historique marquant une rupture entre l’Afrique du Sud postapartheid et l’ère répressive de l’apartheid, a déclaré la peine de mort inconstitutionnelle car elle violait la dignité humaine et l’interdiction de la torture ou des peines cruelles, inhumaines et dégradantes. En 1995, la peine capitale pour les infractions de droit commun a été abolie en Afrique du Sud. A l’époque de l’apartheid, il était largement reconnu que les tribunaux, composés presque exclusivement de juges blancs, pratiquaient une discrimination à l’encontre des Africains noirs et leur infligeaient de plus lourdes peines qu’aux défendeurs blancs. Les défendeurs noirs étaient presque toujours pauvres et ne pouvaient se permettre de recourir à un avocat. La peine de mort s’appliquait tant aux infractions pénales qu’aux infractions politiques. Ces dernières étaient couvertes par la Loi sur le terrorisme, la Loi sur la sécurité intérieure, et la « Loi sur le sabotage ». En vertu de la première et de la dernière de ces lois, la charge de la preuve incombait à l’accusé. Ces lois étaient de plus en plus utilisées pour infliger la peine de mort, et Amnesty International a signalé en 1979 que l’Afrique du Sud enregistrait l’un des taux d’exécutions judiciaires les plus élevés au monde. Entre 1978 et 1987, 1 593 personnes ont été condamnées à mort et le nombre d’exécutions annuel dépassait la centaine. Parmi les exécutés, on comptait des membres du Congrès national africain interdit. Au niveau international, un certain nombre de résolutions adoptées par le Conseil de Sécurité et l’Assemblée générale des Nations Unies en 1964, 1982, 1987 et 1989 exigeaient que l’Afrique du Sud cesse d’exécuter des personnes « condamnées aux termes de lois répressives arbitraires pour des actes motivés par leur opposition à l’apartheid. » En Afrique du Sud, la hausse du taux d’exécutions, en particulier pour les personnes reconnues coupables de protestations politiques contre l’apartheid, a suscité des débats intenses sur la peine de mort parmi les groupes religieux et politiques, les syndicats, les groupes de défense des droits de l’Homme et les membres des professions juridiques. L’opposition aux exécutions s’est traduite par la création de l’Association pour l’abolition de la peine capitale en Afrique du Sud, en 1971. Celle-ci a été rétablie en 1988, année où le Conseil des Eglises d’Afrique du Sud a proclamé son opposition totale à la peine de mort. En 1990, alors que le régime de l’apartheid dirigé par le président de Klerk vivait ses derniers instants, ce dernier a annoncé un moratoire sur les exécutions. En juillet 1990, une Loi portant amendement du Code pénal a supprimé la peine capitale obligatoire pour meurtre, l’a abolie pour les vols avec effraction, et prévu un droit de recours automatique.
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II 1990 fut une année mémorable : le dirigeant de la lutte contre l’apartheid, Nelson Mandela, qui avait été jugé pour des infractions passibles de la peine de mort et avait proclamé que cette dernière constituait une peine barbare fut libéré de prison et des négociations en vue d’un changement constitutionnel s’engagèrent. L’abolition de la peine de mort devint un test décisif pour la création d’un nouvel ordre social et un tribunal fut mis en place pour réexaminer toutes les sentences de mort infligées avant juillet 1990. Cela amena le ministre de la Justice à proclamer en 1992 un moratoire officiel sur les exécutions en attendant la présentation d’une Déclaration des droits. La dernière exécution avait eu lieu en 1991. La Constitution intérimaire de l’Afrique du Sud, adoptée en 1993, comportait une Déclaration des droits qui ne traitait pas de la peine de mort. Cette année-là, deux hommes condamnés à mort durant le moratoire contestèrent la peine de mort devant le tribunal, invoquant son incompatibilité avec les dispositions de la Déclaration des droits relatives aux droits de l’Homme, consignées au chapitre III de la nouvelle Constitution. Le ministre de la Justice intervint en faveur des requérants et le procureur général entama une procédure devant la Cour constitutionnelle afin que la peine de mort soit déclarée inconstitutionnelle. Ce fut le cas dans le jugement historique Etat contre T. Makwanyane et M. Mchunu, première affaire examinée par la nouvelle Cour constitutionnelle. Le 6 juin 1995, la Cour jugea que la peine de mort pour les infractions de droit commun était incompatible avec la “culture des droits de l’Homme” respectant le droit à la vie et à la dignité, en tant que pierre angulaire de la nouvelle Constitution intérimaire. La Cour, qui avait tenu des auditions sur la peine de mort en février 1995, rejeta fermement l’argument de la dissuasion et conclut que pour réduire la violence en Afrique du Sud, il fallait instaurer cette culture des droits de l’Homme respectant la vie humaine. Un juge fit valoir que la peine de mort faisait partie de l’héritage colonial de l’Afrique du Sud et que les procédures judiciaires de ses sociétés autochtones traditionnelles ne prévoyaient pas la peine de mort pour meurtre. Le tribunal jugea que la peine de mort serait incompatible avec l’esprit de réconciliation de la nouvelle ère postapartheid et souligna l’obligation spécifique de la Cour constitutionnelle d’adopter des décisions justes, et non pas des décisions populaires, même si l’opinion publique était ambivalente sur la peine de mort. Le président de la Cour, Arthur Chaskalson écrivit : Il est possible que l’opinion publique ait une certaine pertinence pour l’enquête, mais elle ne peut en soi remplacer l’obligation qui incombe aux tribunaux d’interpréter la Constitution et d’en faire respecter les dispositions sans craintes ni favoritisme [. . .] Si l’opinion publique devait être déterminante, aucune décision constitutionnelle ne serait nécessaire. […] La raison même pour laquelle on a établi un nouvel ordre juridique et investi les tribunaux du pouvoir de contrôler toute mesure législative était de protéger les droits des membres des minorités et des autres individus qui ne sont pas en mesure de protéger adéquatement leurs droits dans le cadre du processus démocratique. (Etat contre Makwanyane (1995) (3) SA 391, par. 88). Dans son arrêt, la Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud s’est largement inspirée du droit international et comparé. Elle a établi une distinction entre la disposition relative au droit à la vie figurant dans la Constitution sud-africaine, et la disposition figurant dans la Convention européenne relative aux droits de l’Homme, ainsi que la Constitution des Etats-Unis, qui n’interdisent pas explicitement la peine de mort. Toutefois, dans son avis majoritaire, la Cour a pris en compte les arrêts de la Cour suprême fédérale et des cours suprêmes des Etats des Etats-Unis, ainsi que des cours suprêmes et constitutionnelles de la Hongrie et du Canada pour sa conclusion selon laquelle la peine de mort constitue une forme de peine cruelle, inhumaine ou dégradante interdite par la Constitution intérimaire. 12
L’arrêt de la Cour suprême fut contesté dans la presse et par une majorité apparente de la population, exigeant le maintien de la peine de mort. Plusieurs sondages d’opinion effectués à l’époque indiquaient une majorité (entre 62 et 78 %) en faveur de la peine de mort. Toutefois, le Congrès national africain, favorable à l’abolition de la peine capitale, détenant une majorité de près des deux tiers à l’Assemblée constituante, cette dernière adopta le 8 mai 1996 la Constitution définitive d’Afrique du Sud qui conservait la formulation figurant dans la Constitution intérimaire de 1993 garantissant le droit à la vie comme un droit fondamental et abolissant la peine de mort. Elle fut promulguée en décembre 1996. En dépit d’intenses pressions exercées par certains partis politiques au parlement en vue de réinstaurer la peine de mort, le parlement sud-africain entérina l’avis de la Cour constitutionnelle. En 1997, le parlement abolit officiellement la peine de mort pour toutes les infractions en votant la Loi portant amendement du Code pénal, qui supprimait toute référence à la peine de mort figurant dans celui-ci. Elle entra en vigueur en 1998 et les détenus condamnés à mort virent leur condamnation commuée en peine d’emprisonnement. En novembre 2006, la Cour constitutionnelle jugea que le gouvernement s’était pleinement conformé à son arrêt de 1995 sur l’inconstitutionnalité de la peine de mort. Les appels en faveur du rétablissement de la peine de mort, perçu comme un moyen de lutter contre le taux élevé de criminalité en Afrique du Sud, notamment de la part de l’African National Party, se poursuivirent, mais furent rejetés par les dirigeants sud-africains Nelson Mandela et l’ancien archevêque Desmond Tutu. Ces appels restèrent sans suite, la Cour constitutionnelle ayant réussi à réfuter l’effet dissuasif supposé de la peine de mort. Le 15 décembre 2011, le président sud-africain Jacob Zuma réitéra l’attachement de son gouvernement à l’abolition de la peine de mort. La Cour constitutionnelle a également estimé que les obligations de l’Afrique du Sud s’appliquaient de manière extraterritoriale aux personnes relevant de sa juridiction qui devaient être extradées vers un pays où l’infraction prétendument commise était passible de la peine de mort. En 2001, elle a conclu que le gouvernement n’aurait pas dû expulser vers les Etats-Unis un immigrant illégal soupçonné d’avoir été impliqué dans l’attentat à la bombe contre l’ambassade des Etats-Unis à Dar es Salaam, sans avoir préalablement obtenu une assurance de non-exécution étant donné que cette mesure violait le droit de l’accusé à la vie, à la dignité, et à ne pas être soumis à des peines cruelles, inhumaines ou dégradantes prévu par la Constitution. De même, le 27 juillet 2012, la Cour constitutionnelle a défendu les valeurs consacrées par la Constitution en rejetant un recours gouvernemental contre un arrêt autorisant l’extradition de deux accusés vers le Botswana sans que le gouvernement ait préalablement reçu l’assurance qu’ils ne seraient pas passibles de la peine de mort. À l’Assemblée générale des Nations Unies en 2007, l’Afrique du Sud a voté en faveur de la résolution A/ RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier, en vue d’abolir la peine de mort, puis pour toutes les résolutions ultérieures concernant la peine de mort adoptées en 2008, 2010 et 2012. En 2002, l’Afrique du Sud est devenue partie au Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort
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II ARGENTINE L’Argentine a une longue tradition abolitionniste. La dernière exécution légale, qui a eu lieu en 1916, a été suivie par des périodes d’abolition complète à partir de 1921, puis par le rétablissement de la peine de mort par les régimes militaires dans les années 1970. En 1984, l’Argentine a aboli la peine de mort pour les infractions de droit commun par la voie législative, puis pour l’ensemble des infractions en 2008. En 1994, la peine de mort a été interdite dans la constitution pour les infractions politiques. L’Argentine avait déjà aboli la peine de mort pour les infractions de droit commun en 1921, mais les lois adoptées en 1950 et 1951 prévoyaient la peine de mort pour les infractions de nature politique : espionnage et sabotage, ainsi que pour les actes relevant des dispositions du Code de la justice militaire portant sur le jugement des meneurs de rebellions. Ces lois sont abrogées sous le premier gouvernement du Président Juan Perón. Toutefois, les régimes de facto (1966-1973) rétablissent la peine de mort pour les infractions politiques en 1970 et en vertu du droit pénal en 1971. Ces modifications de la législation suscitent une forte opposition, notamment des juristes, conduisant à une abolition de la peine de mort en 1972 sous le Général Lanusse, hormis en vertu du Code pénal militaire. Après le coup d’état militaire du 24 mars 1976 qui conduit à la destitution d’Isabel Martinez de Peron, la peine de mort est rétablie pour les infractions violentes et les attentats à l’encontre des services publics, constituant des infractions dites « commises à des fins de subversion ». Cette peine est applicable à toute personne âgée de plus de 16 ans. Au cours de la dernière dictature militaire, en place de 1976 à 1983, aucune peine de mort judiciaire n’est prononcée, mais la junte militaire recourt à grande échelle aux exécutions extrajudiciaires, aux actes de torture et aux disparitions forcées, entre autres violations des droits de l’Homme. En décembre 1983, le président démocratiquement élu Raúl Alfonsín rétablit l’état de droit en Argentine. Le gouvernement, déterminé à rompre avec la politique répressive de la junte militaire, prend des mesures pour établir les responsabilités concernant les violations des droits de l’Homme commises à grande échelle pendant la dictature. Le gouvernement Alfonsin adopte une réforme législative complète, incluant l’abrogation des lois adoptées par décret qui instituaient la peine de mort. En août 1984, le Congrès national adopte la loi n° 23077 qui supprime la peine de mort du Code pénal pour les infractions pénales de droit commun. En mars 1984, l’Argentine ratifie la Convention américaine relative aux droits de l’Homme, qui stipule que lorsqu’un État a aboli la peine de mort, celle-ci ne peut être rétablie. La peine de mort peut alors encore être imposée par une loi spéciale. Le Code de la justice militaire de 1951 demeure en vigueur, et les tribunaux militaires peuvent appliquer la peine de mort pendant un conflit armé ou en temps de paix pour les crimes de trahison, d’espionnage, de rébellion et de mutinerie (infractions réprimées par le Code pénal militaire). L’article 759 du Code de la justice militaire institue la peine de mort pour désertion en temps de guerre, tandis que les articles 131 et 132 prévoient que des civils comme des militaires puissent être exécutés sommairement en application de dispositions d’urgence. La loi adoptée en 1984 réduit la portée de la justice militaire, imposant l’intervention obligatoire de cours d’appel fédérales chargées d’examiner toutes les décisions des tribunaux militaires.
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En 1994, la constitution nationale est amendée. L’une des modifications les plus importantes porte sur l’intégration des traités internationaux relatifs aux droits de l’Homme dans la constitution, qui leur donne le même rang que la constitution. Une disposition spécifique est également introduite à l’article 18 : la peine de mort pour des motifs politiques est abolie définitivement. Enfin, en août 2008, sous la présidence de Christina Kirchner, le Code de la justice militaire est abrogé par texte législatif, les tribunaux militaires étant supprimés et la peine de mort abolie pour toutes les infractions. À l’assemblée générale des Nations Unies en 2007, l’Argentine a voté en faveur de la résolution A/ RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier, en vue d’abolir la peine de mort, puis pour toutes les résolutions ultérieures concernant la peine de mort adoptées en 2008, 2010 et 2012. Pour souligner son engagement international en faveur d’une abolition totale, l’Argentine a ratifié en mai 2008 le Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort, et, en juin 2008, le Protocole à la Convention américaine relative aux droits de l’Homme traitant de l’abolition de la peine de mort.
CAMBODGE Le Cambodge est le pays d’Asie qui a connu la plus longue période d’abolition de la peine capitale. Avec les Philippines, il est l’un des deux États membres de l’Association des Nations d’Asie du Sud-Est (ASEAN) à avoir aboli la peine de mort pour toutes les infractions. La date de la dernière exécution n’est pas connue. La peine de mort a été abolie pour toutes les infractions en 1989, par amendement de la Constitution de 1981. L’abolition de la peine de mort a ensuite été intégrée dans un texte de loi de transition adopté en 1992 sous la supervision des Nations Unies puis garantie dans la nouvelle constitution de 1993, s’appuyant sur un accord de règlement du conflit de longue date avec les Khmers rouges, conclu à Paris en 1991 sous l’égide de la communauté internationale. Entre 1975 et 1979, entre 1 et 2 millions de Cambodgiens sont arrêtés, torturés, exécutés, ou meurent de faim du fait d’une politique de déportation forcée à la campagne menée par le Gouvernement du Kampuchéa démocratique dirigé par Pol Pot. Ce dernier est également à la tête du Parti communiste du Kampuchéa, connu sous le nom de Khmer Rouge. Un décret de 1979 adopté après la chute du gouvernement de Pol Pot institue la peine de mort pour le crime de génocide ; son champ d’application est étendu en vertu du décret-loi n° 2 de 1980, notamment pour des crimes de trahison contre la révolution, de vol de biens publics, de meurtre et de viol. Toutefois, la peine de mort ne s’applique pas à toute personne qui, bien que reconnue coupable de génocide ou de trahison, fait allégeance au nouveau gouvernement de la République populaire du Kampuchéa. Au moins cinq hommes sont condamnés à mort en vertu de ce décret pour des crimes de génocide et de trahison sous le gouvernement de la République populaire du Kampuchéa. Trois d’entre eux, dont le chef des Khmers Rouges Pol Pot, sont condamnés par contumace.
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II En 1989, la peine de mort est abolie au Cambodge par amendement de la Constitution. Cet amendement adopté en avril 1989 modifie le nom du pays, lui donnant celui d’État du Cambodge, et ajoute l’article 35, qui abolit la peine de mort pour toutes les infractions. Il vise à marquer un changement de politique après le régime de Pol Pot auquel a succédé le conflit entre les forces gouvernementales de la République populaire du Kampuchéa, dirigée par Hun Sen, et les forces de l’opposition armée réunies au sein du Gouvernement de coalition du Kampuchéa démocratique, rebaptisé Gouvernement national du Cambodge par la suite. Cette coalition inclut les Khmers Rouges (alors appelés Parti du Kampuchéa démocratique) et le Front uni national pour un Cambodge indépendant, neutre, pacifique et coopératif (FUNCINPEC), dirigé par Norodom Sihanouk. La pression et l’aide de la communauté internationale jouent également un rôle substantiel dans l’abolition de la peine de mort. Les efforts internationaux s’intensifient pour mettre un terme au conflit prolongé au Cambodge. Un cessez-le-feu est finalement conclu en 1991, et les accords de paix de Paris sont signés en octobre 1991 entre le gouvernement de l’État du Cambodge, dirigé par Hun Sen, trois partis d’opposition (les Khmers Rouges, le FUNCINPEC et le Front national de libération du peuple khmer) ainsi que par l’ensemble des 5 membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies et 13 autres gouvernements. Conformément au paragraphe 2 de l’article 15 de l’Accord pour un règlement politique global du conflit au Cambodge, le Cambodge s’engage à « assurer le respect effectif des droits de l’Homme et des libertés fondamentales au Cambodge » et à « adhérer aux instruments internationaux pertinents relatifs aux droits de l’Homme ». L’annexe V de l’accord définit les Principes pour une nouvelle Constitution au Cambodge, qui doit inclure des mesures spéciales pour assurer la protection des droits de l’Homme et une déclaration des droits fondamentaux, notamment le droit à la vie. Cette déclaration doit être en accord avec la Déclaration universelle des droits de l’Homme des Nations Unies. L’accord crée également l’Autorité Provisoire des Nations Unies au Cambodge (APRONUC) chargée de superviser la mise en œuvre du cessez-le-feu, l’action de la police et les procédures judiciaires, notamment pour préparer le Cambodge à une nouvelle constitution et « favoriser un environnement où le respect des droits de l’Homme sera assuré ». Les ONG internationales avaient milité en faveur de dispositions fortes concernant les droits de l’Homme dans les accords de Paris et dans la nouvelle Constitution, notamment pour une exclusion de la peine de mort. Amnesty International, par exemple, avait écrit aux dirigeants de la République populaire du Kampuchéa en juillet et en septembre 1988 pour exprimer sa préoccupation face à l’application de la peine de mort et pour les exhorter à inclure dans tout règlement politique des garanties applicables sur le respect des normes internationales en matière de droits de l’Homme qui prévoiraient également l’abolition de la peine de mort. Amnesty International avait également mis en avant ces propositions dès les premiers stades de la négociation auprès des trois partis d’opposition qui participaient aux pourparlers. Le dirigeant de l’un d’entre eux, le Prince Norodom Sihanouk, avait répondu en septembre et octobre 1988, exprimant son soutien à l’abolition de la peine de mort au Cambodge. L’APRONUC est déployée en 1992, et des bureaux sont établis en mars 1992. L’APRONUC aide à la rédaction des textes portant sur le droit civil et pénal. En septembre de cette année-là, le Conseil national suprême, organe de transition officiel, adopte les Dispositions relatives à l’organisation judiciaire, au droit pénal et à la procédure pénale applicables au Cambodge durant la période de transition. Cette loi provisoire, préparée avec le concours de l’APRONUC, stipule dans son article 67 que la peine de mort est abolie au Cambodge. 16
Le 24 septembre 1993, le Cambodge adopte une nouvelle constitution fondée sur les dispositions relatives aux droits de l’Homme énoncées dans les accords de Paris. L’article 32, rédigé sous le mandat d’assistance juridique des Nations Unies au Cambodge, stipule : « Tout citoyen khmer dispose d’un droit à la vie, à la liberté individuelle et à la sécurité ». Il précise plus loin : « Il n’y a pas de peine capitale ». Cette constitution est cependant critiquée car elle exclut quiconque n’est pas « citoyen khmer » des dispositions concernant les droits de l’Homme. Le code pénal et de procédure pénale provisoire continue à s’appliquer pendant un certain temps jusqu’à l’entrée en vigueur d’un nouveau code pénal en décembre 2010, qui exclut lui aussi la peine de mort. En 2007, à l’Assemblée générale des Nations Unies, le Cambodge a voté en faveur de la résolution A/ RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier en vue de l’abolition de la peine de mort, et de toutes les résolutions ultérieures sur la peine de mort adoptées en 2008, en 2010 et en 2012. Le Cambodge n’est pas encore partie au Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort.
ETATS-UNIS La peine capitale a été suspendue aux Etats-Unis entre 1972 et 1976, après que la Cour suprême eut jugé, dans un certain nombre d’affaires jointes, qu’elle avait été appliquée de manière contraire à la Constitution. Les exécutions ont repris en 1977, lorsque Gary Gilmore a renoncé à son droit de faire appel et a été exécuté par un peloton d’exécution dans l’Utah. Aux Etats-Unis, bien que le gouvernement fédéral conserve la peine capitale, un nombre croissant d’Etats l’ont abrogée. C’est le cas de 18 Etats en avril 2013. Des exécutions sont régulièrement pratiquées dans un petit nombre d’Etats, principalement dans le sud, le taux le plus élevé se situant au Texas. De nombreuses études ont conclu qu’un préjugé d’ordre racial et géographique caractérisait l’application de la peine de mort aux Etats-Unis. C’est le seul pays démocratique développé à infliger la peine de mort à des personnes âgées de moins de 18 ans, en violation de ses obligations en vertu du droit international, bien que la Cour suprême ait conclu dans l’affaire Roper contre Simmons (Roper./. Simmons 543, US, 551, 2005) qu’il s’agissait d’une « peine cruelle et inhabituelle » interdite par la Constitution américaine. Jusqu’en 2002, les Etats-Unis exécutaient également des détenus atteints de graves handicaps mentaux ou intellectuels (Atkins contre Virginie, 536 U.S. 304, 2002). Toutefois, le nombre annuel d’exécutions a décliné durant la dernière décennie, de même que le soutien public à la peine capitale dans de nombreux Etats. Les initiatives en faveur de l’abolition se multiplient dans un certain nombre d’Etats américains. Les facteurs essentiels sont les suivants : une accumulation d’éléments indiquant qu’un certain nombre de condamnations injustifiées se sont traduites par la condamnation à mort, voire l’exécution, d’innocents ; des doutes grandissants quant à la valeur dissuasive de la peine capitale ; des considérations relatives aux dépenses très élevées entrainées par les exécutions, et qui devraient plutôt être consacrées à des fins d’application de la loi, ainsi qu’une multiplication des appels de familles de victimes hostiles à la peine de mort. En 2011 et en 2012, 43 exécutions ont été pratiquées aux Etats-Unis, une baisse de près de 60 % depuis 1999. Depuis 1973, plus de 140 condamnés à mort ont été disculpés après que leur condamnation injustifiée eut été prouvée. 17
II Des organisations religieuses, des représentants de groupes minoritaires, des personnalités de la société civile, des juristes, des associations du barreau de l’Etat, des municipalités et des associations psychiatriques ont mené de vigoureuses campagnes contre la peine de mort dans tout le pays et attiré l’attention sur les vices du système. Des groupes de la société civile soutenant l’abolition de la peine de mort, notamment le Death Penalty Information Center, basé à Washington, ont joué un rôle important en informant le public sur les condamnations injustifiées. La presse a également joué un rôle en s’opposant au rétablissement de la peine de mort, notamment en Iowa et en Virginie Occidentale, et de nombreux journaux ont plaidé de façon convaincante en faveur de l’abolition de la peine de mort. Au cours des six années passées, la peine de mort a été abolie dans six Etats des Etats-Unis : le Connecticut, l’Illinois, le Maryland, le New Jersey, le Nouveau-Mexique, et New York, et l’Oregon a instauré un moratoire sur les exécutions. Les processus d’abolition dans deux de ces Etats sont examinés ci-dessous. Aux Etats-Unis, le gouverneur d’un Etat peut aussi détenir le pouvoir de gracier des condamnés et de signer ou d’opposer son véto à une loi visant à abolir la peine de mort une fois qu’elle a été votée par le corps législatif. Les gouverneurs des Etats ont apporté une contribution non négligeable à ces processus. Les Etats-Unis ont voté contre la résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies A/RES/62/149 ainsi que les résolutions ultérieures appelant à un moratoire sur les exécutions dans le monde en vue d’une abolition.
Connecticut Le 25 avril 2012, l’Etat du Connecticut a aboli la peine de mort, devenant ainsi le dix-septième Etat des Etats-Unis à prendre cette mesure. Le gouverneur Dannel Malloy a signé la loi remplaçant la peine de mort par la prison à vie sans libération conditionnelle. Onze personnes se trouvaient à l’époque dans le couloir de la mort et l’abolition ne s’est pas appliquée à elles à titre rétroactif. Le Connecticut a rétabli la peine de mort en 1973. Conformément aux arrêts de la Cour suprême, le Connecticut a interdit la peine de mort si l’auteur de l’infraction était « retardé mentalement» (ibid Atkins. /. Virginie) ou âgé de moins de 18 ans au moment de l’infraction (ibid. Roper./.Simmons). Une personne a été exécutée dans l’Etat à la suite du rétablissement de la peine de mort. En 2009, une loi visant à abroger la peine de mort a été votée par les deux chambres législatives de l’Etat mais a fait l’objet d’un véto du gouverneur de l’époque. En 2011, une initiative analogue a échoué au Sénat, largement en raison de la publicité ayant entouré un procès médiatisé pouvant se solder par la peine de mort. Parmi les militants éminents contre la peine de mort dans l’Etat figuraient notamment l’église catholique, le Connecticut Network to Abolish the Death Penalty (CNADP) et d’anciens membres des organes chargés de l’application de la loi. De grands journaux de l’Etat ont publié des tribunes en faveur de l’abolition. En 2004, les villes de New Haven et Hartford ont voté des résolutions s’opposant à la peine de mort dans le Connecticut. En janvier 2003, la Commission du Connecticut sur la peine de mort créée en 2001 par l’Assemblée générale du Connecticut (l’assemblée de l’Etat) a publié une «Etude sur l’imposition de la peine de mort» constatant des disparités raciales et géographiques dans l’infliction de la peine de mort au Connecticut, ce qui a contribué à influer sur le débat. 18
En avril 2012, la loi a été votée par le Sénat et la Chambre des représentants et le gouverneur Dannel Malloy l’a promulguée. Ce dernier a déclaré : J’ai passé des années au poste de procureur […] J’y ai appris par moi-même que notre système judiciaire est […] soumis à la faillibilité de ceux qui y participent. J’ai vu des gens qui étaient mal assistés par leur avocat. J’ai vu des gens accusés à tort ou identifiés par erreur. J’ai vu de la discrimination. J’en suis venu à croire que supprimer la peine de mort était le seul moyen d’éviter qu’elle ne soit injustement infligée. Le gouverneur a également souligné le rôle important joué par les familles des victimes hostiles à la peine de mort qui ont exercé des pressions en ce sens sur le corps législatif de l’Etat. La peine de mort a été abolie, bien que 48 % des électeurs de l’Etat y soient favorables, contre 43 % de personnes opposées.
Nouveau-Mexique Le 18 mars 2009, le Nouveau-Mexique est devenu le quinzième Etat abolitionniste des Etats-Unis lorsque le gouverneur de l’Etat Bill Richardson a promulgué une loi abolissant la peine de mort, la remplaçant par une peine d’emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. La loi ne s’est pas appliquée rétroactivement aux deux détenus qui se trouvaient dans le couloir de la mort. Depuis la reprise des exécutions aux Etats-Unis, en 1977, le Nouveau-Mexique n’avait procédé qu’à une seule exécution, en 2001. Avant celle-ci, le gouverneur de l’époque, avait déclaré : « Supprimer la peine de mort à l’avenir peut se révéler être une meilleure politique publique, compte tenu de la réalité de cette peine de nos jours ». Quatre hommes avaient été condamnés à mort au Nouveau-Mexique en 1974, mais avaient été innocentés deux ans plus tard. Le 10 février 2001, une loi visant à abroger la peine capitale au Nouveau-Mexique avait été rejetée de justesse, à une voix près, au Sénat de l’Etat. Un sondage à l’échelle de l’Etat effectué en 2008 indiquait que 64 % des habitants du Nouveau-Mexique étaient favorables au remplacement de la peine de mort par la réclusion à perpétuité sans libération conditionnelle et par un dédommagement aux familles des victimes. Il existait dans l’Etat un groupe de pression engagé et persuasif contre la peine de mort, comprenant des personnalités éminentes de l’Eglise catholique — le Nouveau-Mexique est un Etat à dominante catholique — ainsi que des familles de victimes de meurtre. Certains législateurs invoquaient le coût élevé des exécutions comme motif pour soutenir la loi, d’autres la possibilité d’exécuter des innocents. En envisageant l’abolition de la peine de mort, les législateurs de l’Etat se sont également inspirés d’une étude de 2008 faisant autorité, publiée dans la New Mexico Law Review et portant sur l’application de la peine de mort entre juillet 1979 et décembre 2007, laquelle concluait que l’imposition de la peine de mort au NouveauMexique était influencée par des questions non pertinentes du point de vue juridique, notamment le lieu ou la date de commission du crime et la race ou l’origine ethnique de la victime et du défendeur.
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II La loi abolitionniste du Nouveau-Mexique de 2009 a été votée avec un soutien multipartite par le Sénat de l’Etat par un vote de 24 contre 18 voix, et par la Chambre basse des Représentants par 40 voix contre 28. Après l’adoption de la loi abolitionniste par le corps législatif, en mars 2009, le gouverneur de l’époque, Bill Richardson, a sollicité l’avis des citoyens et a été instamment invité par l’ex-président des Etats-Unis Jimmy Carter à soutenir la loi. L’éventualité d’une erreur judiciaire constituait une considération essentielle dans la décision du gouverneur qui était partisan de Mr. Bill Richardson la peine de mort lorsqu’il avait pris ses fonctions, mais a ensuite changé d’avis et signé la loi abolitionniste. Celui-ci a déclaré que le risque bien réel qu’un innocent puisse être exécuté lui posait des problèmes de conscience et a conclu qu’il était erroné de maintenir la peine de mort en courant le risque qu’une grave erreur judiciaire puisse être commise. Un autre facteur avait été la tendance mondiale en faveur de l’abolition. Il a déclaré : « Dans une optique internationale en matière de droits de l’homme, il n’y a aucune raison que les Etats-Unis soient à la traine par rapport au reste du monde sur cette question. » Toutefois, selon lui, la décision de signer cette loi avait été « la plus difficile de [sa] vie politique. »
FRANCE La France a aboli la peine de mort pour toutes les infractions par la voie législative en 1981, rejoignant ainsi les 13 autres pays européens qui avaient déjà décidé l’abolition. L’abolition a été l’aboutissement d’un long débat public, de grâces présidentielles, du travail d’un groupe d’étude interpartis, d’actions devant les tribunaux et d’une mesure décisive prise par le Président Mitterrand, qui s’était prononcé publiquement pour l’abolition, en dépit d’une opinion publique majoritairement favorable à la peine de mort. En 2007, l’abolition de la peine de mort a été inscrite dans la constitution. La dernière exécution a eu lieu en 1977. Le premier code pénal de la France, adopté en 1791 pendant la Révolution, prévoit la décapitation ; depuis lors, les exécutions ont toujours été effectuées en recourant à la guillotine. Un décret de 1848, confirmé en 1853, abolit la peine de mort pour les infractions de nature politique. Au cours du dix-neuvième siècle, la peine de mort fait l’objet de débats entre universitaires, juristes et figures politiques et littéraires, parmi lesquelles Victor Hugo qui écrit Le Dernier jour d’un condamné pour illustrer son opposition à la peine capitale. La dernière exécution publique a lieu à Versailles en 1939. Elle ravive le débat public sur la peine de mort, après que des photos de l’exécution, pratiquée avec une guillotine défectueuse, ont été largement distribuées à la presse. Le gouvernement interdit promptement toute publicité autour des exécutions, à l’exception d’annonces officielles succinctes. Depuis cette date, le secret a toujours entouré les exécutions.
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Les exécutions par la guillotine pour les peines de mort prononcées par des tribunaux spéciaux sont fréquentes sous l’occupation allemande, et l’immédiat après-guerre est marqué par un grand nombre d’exécutions. Cependant, elles deviennent moins courantes après les années 1950. Ainsi, entre 1959 et 1979, 51 personnes sont condamnées à mort pour des infractions de droit commun, dont 14 sont exécutées, ainsi que deux membres de l’organisation paramilitaire OAS (Organisation armée secrète). Une forte tradition abolitionniste apparaît dans la littérature et le cinéma français. En 1957, l’écrivain Albert Camus publie Réflexions sur la guillotine, et, en collaboration avec Arthur Koestler, Réflexions sur la peine capitale, où il plaide pour l’abolition. Des films français de cette période soulignent le caractère inhumain de la peine de mort. Après consultation de fonctionnaires du système judiciaire et administratif, les présidents français exercent plus fréquemment leur droit de grâce ; les juges se montrent également plus réticents à prononcer des peines de mort. Toutefois, un certain nombre de crimes concernant des enfants commis dans les années 1970 galvanisent l’opinion publique en faveur de la peine de mort. Le taux d’opinions favorables au maintien de la peine de mort atteint alors 65 %. Des exécutions effectuées en 1972, alors même que la plupart des pays européens sont en train d’abolir la peine de mort, suscitent des critiques sur la scène internationale. Cependant, le taux d’exécutions relativement faible dans les années 1960, les opinions exprimées et les mesures prises par les Présidents français concernant la peine de mort, si ambigües soient-elles, permettent d’ouvrir plus largement la porte au débat public sur la question. En avril 1974, le candidat à la présidence Valéry Giscard d’Estaing exprime « son aversion profonde » pour la peine de mort, ajoutant cependant qu’il n’ira pas à l’encontre des sentiments profonds des Français sur le sujet. Une fois élu, il autorise toutefois trois exécutions. Son refus d’accorder une grâce, qui conduit à une exécution en 1976, est critiqué dans la presse et relance le débat public sur la peine capitale. Giscard d’Estaing déclare alors qu’il souhaite que soit menée une analyse approfondie sur les exécutions. Différentes organisations professionnelles débattent alors de la peine de mort, et, en 1976, le Syndicat de la magistrature vote à une large majorité en faveur de l’abolition. L’Assemblée nationale crée alors un groupe d’étude interpartis sur la question, et la Commission de révision du Code pénal déclare son opposition à la peine de mort. Les églises protestantes et catholiques expriment également avec force leur position abolitionniste. La peine de mort est également remise en cause dans les tribunaux. De 1976 à 1980, Robert Badinter, avocat et homme politique socialiste, persuade à six reprises des juges d’épargner la vie d’un meurtrier, arguant que la peine de mort est cruelle et inhumaine et risque de causer la mort d’innocents. Le Président Mitterrand, qui avait exprimé son opposition à la peine de mort quelques semaines seulement avant les élections de 1981, le nomme ministre de la Justice de son nouveau gouvernement socialiste. Mr. Robert Badinter
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II L’une des premières mesures prises par ce gouvernement consiste à commuer trois peines de mort prononcées en mai 1981, et, pour le ministre de la Justice Badinter, à présenter un projet de loi sur l’abolition devant l’Assemblée nationale en septembre, dans le cadre d’une procédure de vote rapide. Le projet recueille l’appui des partis de centre-droit. Le 9 octobre 1981, la peine de mort est abolie pour toutes les infractions civiles et militaires conformément à l’article premier de la loi n° 81-809, après des votes favorables à l’Assemblée nationale (par 363 voix contre 117) et au Sénat (par 160 voix contre 126). L’opinion publique française est pourtant favorable à 60 à 65 % au maintien de la peine de mort. La dernière étape pour garantir l’abolition consiste à l’inscrire dans la Constitution. Cette mesure est prise à l’initiative de Jacques Chirac en 2007, par amendement constitutionnel adopté par le parlement. L’article 66-1 de la Constitution stipule : « Nul ne peut être condamné à la peine de mort ». La France confirme sa position contre la peine de mort en ratifiant en février 1986 le Protocole n° 6 à la Convention européenne des droits de l’Homme, portant sur l’abolition de la peine de mort en temps de paix. En octobre 2007, la France adhère également au Protocole 13 à la Convention, qui abolit la peine de mort en toutes circonstances. En 2007, à l’Assemblée générale des Nations Unies, la France a voté en faveur de la résolution A/RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier en vue de l’abolition de la peine de mort, et de toutes les résolutions ultérieures sur la peine de mort adoptées en 2008, en 2010 et en 2012. En octobre 2007, elle est devenue partie au Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort.
HAITI Haïti a aboli la peine de mort pour toutes les infractions par un amendement constitutionnel adopté en 1987. La dernière exécution judiciaire connue a eu lieu en 1972. La peine de mort a été maintenue dans le Code pénal haïtien de 1853 après la fin de la domination coloniale française, en 1804. Le Code pénal de 1953 prévoyait la peine de mort pour les infractions pénales et politiques. Durant la présidence du Dr. François Duvalier, entre 1957 et 1971, de nombreuses condamnations à mort furent infligées à la suite de procédures sommaires et les exécutions étaient fréquemment pratiquées en public. Des condamnations à mort étaient également prononcées par des cours martiales dans le cadre d’une loi spéciale contre le communisme de 1969. En 1985, un décret gouvernemental a aboli la peine de mort pour les infractions politiques à l’exception de la haute trahison. Après la chute du gouvernement de Jean-Claude Duvalier, en février 1986, lequel s’était rendu coupable de violations généralisées des droits de l’Homme, d’anciens responsables du gouvernement ont été condamnés à mort pour violations des droits de l’Homme, mais toutes les condamnations
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à mort pendantes ont été commuées en vertu de la nouvelle Constitution de 1987, prévoyant l’abolition de la peine capitale. Cela avait été approuvé dans le cadre d’un référendum national tenu le 29 mars 1987 sous la présidence d’Henri Namphy. L’article 20 de la Constitution prévoit que la peine capitale est abolie pour toutes les À l’assemblée générale des Nations Unies en 2007, Haïti a voté en faveur de la résolution A/RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier, en vue d’abolir la peine de mort, puis pour toutes les résolutions ultérieures concernant la peine de mort adoptées en 2008, 2010 et 2012. Haïti n’est pas partie au Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort, ni au Protocole à la Convention américaine relative aux droits de l’Homme traitant de l’abolition de la peine de mort.
KIRGHIZSTAN En 2006, le Kirghizstan a aboli la peine de mort pour toutes les infractions par un amendement à la Constitution suivi d’un amendement au Code pénal, en 2007. L’abolition faisait suite à une série de moratoires sur les exécutions établis depuis 1998, déclarés et renouvelés par décret présidentiel, ainsi que par un décret de politique générale datant de 2002 et des amendements au Code pénal effectués en 2004 réduisant le nombre d’infractions passibles de la peine de mort. La dernière exécution a eu lieu en 1998. Après l’indépendance vis-à-vis de l’Union soviétique, en 1991, dans son article 18, la Constitution prévoyait l’application de la peine de mort dans des cas exceptionnels. Dans son rapport initial à la Commission des droits de l’Homme (des Nations Unies), en juillet 2000, la délégation du Kirghizstan notait qu’il existait dans la société kirghize une tendance croissante en faveur de l’abolition de la peine de mort. Un projet de loi datant de 1997 a débouché sur l’abolition de la peine capitale pour certaines infractions, dont les infractions économiques, celle-ci étant toutefois maintenue pour les infractions ayant entraîné des pertes de vie humaine. Il était soutenu par le président, Askar Akaïev, qui promulgua un décret établissant un moratoire de deux ans en 1998. Ce moratoire fut prolongé quatre fois, jusqu’à ce que le président Kourmanbek Bakiev proclame un moratoire indéfini en 2005, en attendant l’abolition. Durant la période de moratoire sur les exécutions, des condamnations à mort ont continué à être prononcées par les tribunaux, et peut-être même après l’amendement abolitionniste à la Constitution. Le nombre d’exécutions effectuées avant le moratoire était considéré comme un secret d’Etat et les proches n’étaient pas informés des exécutions à venir. Des pressions en vue de l’abolition de la peine de mort ont été exercées sur le Kirghizstan par la communauté internationale ainsi que par des organisations de la société civile. L’UE a constamment exhorté le Kirghizstan à abolir la peine de mort et des appels analogues ont été lancés lors des réunions de l’OSCE sur la mise en oeuvre des engagements concernant la dimension humaine. En décembre 2002, une coalition d’organisations kirghizes et internationales de défense des droits de l’Homme, notamment le Bureau kirghize sur les droits de l’Homme et l’état de droit, et le Comité kirghize des droits de l’Homme, a salué le moratoire sur les exécutions et pressé le président Akaïev d’abolir la peine de mort.
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II En 2002, un décret stipulant que l’un des objectifs du Kirghizstan était la diminution graduelle de l’application de la peine de mort et son abolition finale a été promulgué. La deuxième étape a été l’introduction, en 2004, d’amendements au Code pénal réduisant de six à trois le nombre d’infractions passibles de la peine de mort. Toutefois, en 2005 et 2006, le parlement a rejeté des projets de loi et des amendements à la Constitution préparés par le ministère de la Justice et le Conseil constitutionnel, de même qu’un projet de loi en vue de l’adhésion au Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort. Le président Bakiev, arrivé au pouvoir en août 2005, avait annoncé avant de prendre ses fonctions qu’il souhaitait exclure la peine de mort de la Constitution. L’année suivante, en novembre 2006, le président Bakiev a signé une nouvelle Constitution stipulant que « toute personne, en République kirghize, a le droit inaliénable à la vie. Nul ne peut être privé de sa vie. » Le 27 juin 2007, il a signé une loi amendant le Code pénal et abolissant la peine de mort, la remplaçant par la détention à perpétuité. A la suite de l’abolition, la Cour suprême a réexaminé les cas de 133 détenus condamnés à mort et a automatiquement commué leur sentence en une peine de réclusion à perpétuité. La nouvelle Constitution, interdisant la peine de mort, a par la suite été approuvée par référendum public en juin 2010. À l’Assemblée générale des Nations Unies en 2007, le Kirghizstan a voté en faveur de la résolution A/ RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier, en vue d’abolir la peine de mort, puis pour toutes les résolutions ultérieures concernant la peine de mort adoptées en 2008, 2010 et 2012. En décembre 2010, il a adhéré au Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort.
MEXIQUE En 2005, le Mexique a aboli en droit la peine de mort pour toutes les infractions et plus tard dans la même année, par un amendement constitutionnel. La dernière exécution pour des infractions de droit commun a eu lieu dans l’Etat de Puebla en 1937. La dernière exécution d’un soldat en vertu du Code de justice militaire a eu lieu en 1961. Les mouvements visant à abolir la peine capitale au Mexique découlent des courants fortement abolitionnistes de la fin du dix-neuvième siècle en Amérique centrale et du Sud. La constitution de 1857 interdisait expressément la peine de mort pour les infractions politiques à une époque où elle faisait l’objet d’une condamnation généralisée par la presse. Cela marquait une rupture avec le passé où la peine de mort avait été utilisée pour éliminer des opposants politiques. Cependant la constitution mexicaine conserva pendant longtemps la peine de mort pour les infractions de droit commun. La Constitution politique des Etats-Unis du Mexique de 1917 interdisait, à l’article 22, la peine de mort pour les infractions politiques, mais la conservait pour les cas de meurtre et d’autres infractions pénales ainsi que pour certaines infractions militaires.
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La peine de mort prévue dans le Code pénal de 1871 a été retirée du Code pénal fédéral de 1930 et des Codes pénaux qui ont suivi. La plupart des Etats mexicains avaient aboli la peine de mort avant la fin du dix-neuvième siècle. Le Code de Justice militaire maintenait toutefois la peine de mort pour des infractions spécifiques et des personnes pouvaient être condamnées à mort en vertu de ses dispositions. Dans la pratique, les présidents avaient l’habitude d’user de leurs pouvoirs constitutionnels pour assurer la commutation de la peine de mort en emprisonnement à perpétuité. C’est ce qui s’est produit en novembre 2003 après qu’un tribunal militaire eut condamné un homme à mort pour meurtre. En avril 1988, un candidat à la présidence avait annoncé qu’il pourrait envisager d’organiser un référendum sur la réintroduction de la peine de mort mais cette idée se heurta à la résistance généralisée du public, d’évêques catholiques, de dirigeants politiques, de sénateurs et d’éminents avocats, de sorte que le référendum n’eut jamais lieu. Les organisations de défense des droits de l’Homme mexicaines et internationales ont continué à demander instamment au gouvernement mexicain d’abroger totalement la peine de mort en droit. L’année 2005 a été décisive pour l’abolition. Le 21 avril 2005, la seule disposition permettant la peine de mort qui demeurait dans le droit pénal mexicain a été abolie. La Chambre des députés mexicaine a voté à l’unanimité la réforme du code pénal militaire et a remplacé la peine de mort par des peines d’emprisonnement de 30 à 60 ans pour les infractions graves. Afin de renforcer l’abolition au niveau constitutionnel, la Chambre des représentants mexicaine a approuvé un projet de réforme constitutionnelle en juin 2005 par 412 voix pour et 2 abstentions, lequel a explicitement interdit la peine de mort pour toutes les infractions. Le président Vicente Fox a signé le projet de loi amendant les articles 14 et 22 de la Constitution des Etats-Unis du Mexique, qui est entré en vigueur le 9 décembre 2005. Le lendemain, le président Fox a qualifié d’“historique” la publication des changements constitutionnels au journal officiel, ajoutant les mots suivants : “Le Mexique partage l’opinion selon laquelle la peine capitale constitue une violation des droits de l’Homme ”. Il y a eu quelques tentatives visant réintroduire la peine de mort face à l’augmentation de la violence et des enlèvements. En décembre 2008, le gouverneur de l’Etat de Coahuila, au nord du Mexique, a présenté un projet de loi au Congrès mexicain visant à rétablir la peine de mort pour les ravisseurs recourant au meurtre. Un parti politique a défendu la peine de mort pour tous les cas d’homicides. Les tentatives de rétablissement de la peine de mort ont toutefois rencontré une forte opposition de la part des défenseurs des droits de l’Homme, de l’Eglise catholique romaine et de certains hommes politiques et elles n’ont pas abouti. Les organisations de défense des droits de l’Homme mexicaines et internationales ont continué à demander instamment au gouvernement mexicain d’abroger totalement la peine de mort en droit. L’année 2005 a été décisive pour l’abolition. Le 21 avril 2005, la seule disposition permettant la peine de mort qui demeurait dans le droit pénal mexicain a été abolie. La Chambre des députés mexicaine a voté à l’unanimité la réforme du code pénal militaire et a remplacé la peine de mort par des peines d’emprisonnement de 30 à 60 ans pour les infractions graves.
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II Afin de renforcer l’abolition au niveau constitutionnel, la Chambre des représentants mexicaine a approuvé un projet de réforme constitutionnelle en juin 2005 par 412 voix pour et 2 abstentions, lequel a explicitement interdit la peine de mort pour toutes les infractions. Le président Vicente Fox a signé le projet de loi amendant les articles 14 et 22 de la Constitution des Etats-Unis du Mexique, qui est entré en vigueur le 9 décembre 2005. Le lendemain, le président Fox a qualifié d’“historique” la publication des changements constitutionnels au journal officiel, ajoutant les mots suivants : “Le Mexique partage l’opinion selon laquelle la peine capitale constitue une violation des droits de l’Homme ”. Il y a eu quelques tentatives visant réintroduire la peine de mort face à l’augmentation de la violence et des enlèvements. En décembre 2008, le gouverneur de l’Etat de Coahuila, au nord du Mexique, a présenté un projet de loi au Congrès mexicain visant à rétablir la peine de mort pour les ravisseurs recourant au meurtre. Un parti politique a défendu la peine de mort pour tous les cas d’homicides. Les tentatives de rétablissement de la peine de mort ont toutefois rencontré une forte opposition de la part des défenseurs des droits de l’Homme, de l’Eglise catholique romaine et de certains hommes politiques et elles n’ont pas abouti. Depuis 2000, le gouvernement a essayé de fournir une assistance juridique aux centaines de Mexicains condamnés à mort aux Etats-Unis d’Amérique. En 2004, la Cour internationale de Justice a accueilli le recours adressé par le Mexique aux Etats-Unis d’Amérique demandant le réexamen des condamnations à mort de 51 ressortissants mexicains aux Etats-Unis d’Amérique, ces derniers n’ayant pas rempli leurs obligations aux termes de la Convention de Vienne de 1963 sur les relations consulaires en ne facilitant pas l’accès de ces personnes à des fonctionnaires consulaires mexicains. Le Mexique refuse également d’extrader vers les Etats-Unis les auteurs présumés d’infractions pénales si ce pays ne prend pas l’engagement que ces personnes ne risqueront pas la peine capitale ou une peine de réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. En 1981, le Mexique est devenu partie à la Convention interaméricaine des droits de l’Homme, qui interdit aux pays ayant aboli la peine de mort de la rétablir. En septembre 2007, le Mexique a adhéré au Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort et au Protocole à la Convention américaine relative aux droits de l’Homme traitant de l’abolition de la peine de mort. A l’Assemblée générale des Nations Unies en 2007, le Mexique a voté en faveur de la résolution A/ RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier, en vue d’abolir la peine de mort, puis pour toutes les autres résolutions ultérieures concernant la peine de mort adoptées en 2008, 2010 et 2012.
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MONGOLIE En janvier 2010, le président Tsakhia Elbegdorj a systématiquement commué les peines de mort et annoncé un moratoire sur les exécutions, soulignant la nécessité de suivre la tendance mondiale en faveur de l’abolition. La Mongolie s’est engagée sur le plan international à abolir la peine de mort lors de son adhésion, en mars 2012, au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils, et prend des mesures en vue d’abolir en droit la peine capitale. La dernière exécution a eu lieu en 2008. La peine de mort était inscrite dans le premier code pénal du pays, datant de 1926. Huit délits étaient punis de la peine capitale en vertu du code pénal de 1961, ce qui a autorisé la condamnation à mort de 171 personnes entre 1980 et 1990, dont 118 ont été exécutées. La chute de l’Union soviétique a marqué le lancement d’une réforme démocratique en 1990, avec la création d’un système multipartite. Il a été promulgué en 1992 une nouvelle constitution qui prévoyait, à l’article 16(1), la peine de mort pour les infractions graves. Un nouveau code pénal a été promulgué en 2002, qui maintenait la peine de mort pour une série de 59 délits, mais en excluait toutefois les femmes, les hommes de plus de 60 ans et les jeunes de moins de 18 ans. Après la promulgation de la nouvelle constitution, il a été enregistré une recrudescence du nombre des condamnations à mort. Des exécutions se sont succédées à intervalles réguliers jusqu’en 2008 où a eu lieu la dernière. Ces exécutions étaient entourées de secret – les familles ne recevant pas de notification avant l’exécution ni d’information sur le lieu où les personnes exécutées étaient enterrées. Le président Elbegdorj, élu en juin 2009, a commencé à commuer systématiquement les sentences de mort. Une étape cruciale vers l’abolition a été franchie le 14 janvier 2010 lorsque le président a annoncé l’entrée en vigueur d’un moratoire sur toutes les exécutions et a commué les peines de toutes les personnes condamnées à mort qui lui avaient adressé une demande de grâce à des peines d’emprisonnement de 30 ans. A propos de la tendance mondiale en faveur de l‘abolition, le président Elbegdorj a déclaré à la BBC: “La majorité des pays du monde ont choisi d’abolir la peine de mort. Nous devrions suivre cette voie.” Ces avancées vers l’abolition exigeaient d’être consolidées par des actions sur le plan législatif. Dans un discours historique devant le Grand Khural d’Etat (parlement), en janvier 2010, le président a énuméré huit raisons de rejeter la peine de mort en droit, notamment le caractère irréparable de l’erreur publique, l’utilisation historique de la peine de mort comme outil permettant d’exécuter des purges politiques, les appels de la communauté internationale en faveur de l’abolition universelle de la peine de mort et l’absence avérée d’effet dissuasif de celle-ci. Il a déclaré : “Il y a eu des cas où la peine de mort a été infligée à un innocent et non à l’auteur réel de l’infraction. Tant que la peine de mort n’est pas totalement abolie, il est impossible de mettre définitivement fin aux erreurs judiciaires concernant ce type de peine.” En signe de ce changement de politique, la Mongolie a voté pour la première fois, le 21 décembre 2010, à l’Assemblée générale des Nations Unies, en faveur d’une résolution demandant un moratoire sur les exécutions, alors qu’elle avait voté précédemment contre de telles résolutions.
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II La peine de mort a fait l’objet d’un large débat en Mongolie entre juges, juristes, parlementaires et ONG, notamment une association de victimes. La Commission nationale des droits de l’Homme de Mongolie a réalisé, de sa propre initiative et avec l’aide d’Amnesty International Mongolie, des études sur l’application de la peine de mort. La Commission nationale des droits de l’Homme n’a cessé de prôner l’abolition de la peine de mort, citant à l’appui les conclusions du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture à la suite de sa visite en 2005, ainsi que les organes conventionnels relatifs aux droits de l’Homme des Nations Unies qui demandent l’abolition de la peine de mort. En janvier 2011, le président de la CIPM a écrit aux membres de la Commission parlementaire de la Sécurité et des Affaires étrangères pour soutenir la ratification, par la Mongolie, du deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à l’abolition de la peine de mort Le président Elbegdorj a continué à jouer un rôle important dans le processus d’abolition de la peine capitale. Gungaa Bayasgalan, secrétaire d’Etat au ministère de la Justice et des Affaires intérieures a déclaré au Comité des droits de l’Homme des Nations Unies le 21 mars 2011 à New York, “Nous voulons instaurer une culture du soutien à l’abolition de la peine de mort ”, ajoutant que cela exigeait que le président joue un rôle essentiel étant donné que de telles questions demandaient du temps. Le 12 octobre 2012, le conseiller politique officiel du président a condamné la peine de mort et a appelé d’autres pays à la rejeter. Le 5 janvier 2012, surmontant une forte opposition de la part des législateurs, le Parlement mongol a voté un projet de loi visant à mettre fin à la peine de mort en approuvant la décision d’adhérer au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui interdit toute exécution et exige des Etats qu’ils prennent toutes les mesures nécessaires pour abolir la peine de mort. La Mongolie a adhéré sans réserve au deuxième Protocole facultatif le 13 mars 2012. Le gouvernement prend actuellement de mesures pour abolir la peine de mort en droit mais doit préalablement retirer cette peine du Code pénal et d’autres textes législatifs en vigueur, notamment la loi sur les Secrets d’Etat. À l’Assemblée générale des Nations Unies en 2007, puis en 2008, la Mongolie a voté contre la résolution A/RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier, en vue d’abolir la peine de mort mais a voté en 2010 et 2012 en faveur des résolutions des Nations Unies appelant à un moratoire mondial.
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PHILIPPINES Les Philippines ont été le premier pays d’Asie à abolir la peine de mort pour toutes les infractions par une disposition constitutionnelle de 1987 qui toutefois, à l’article III, § 9, autorisait le Congrès à réintroduire la peine capitale « pour des raisons impérieuses dictées par des crimes odieux. » La peine de mort a été rétablie en 1993 et les Philippines ont repris les exécutions en 1999, mais elles ont été suspendues l’année suivante. La peine capitale a finalement été abolie par le Congrès et par la présidente Gloria Macapagal Arroyo en 2006, après que cette dernière eut annoncé une politique de commutation des sentences de mort. Les ONG et l’église ont joué un rôle crucial dans ce processus complexe. La dernière exécution a eu lieu en 2000. Après le renversement du gouvernement Marcos en 1986, la nouvelle présidente, Corazon Aquino, a restauré officiellement la démocratie et il a été promulgué en 1987 une nouvelle constitution abolissant la peine de mort au motif qu’elle constituait une violation des droits de l’Homme. La présidente Aquino a annoncé en avril 1986 que toutes les condamnations à mort étaient commuées en peines d’emprisonnement à perpétuité, une avancée qui a bénéficié à plus de 500 prisonniers condamnés à mort par des tribunaux militaires, notamment ceux condamnés sous la loi martiale, pendant la période de répression de la présidence Marcos de 1972 à 1981. Cependant, les inquiétudes de la population face à la montée en flèche de la criminalité et une pression croissante, de la part de militaires de haut rang, en faveur du rétablissement de la peine de mort, ont incité le président Fidel Ramos et le Congrès philippin à réintroduire la peine de mort en décembre 1993, lorsque la « Republic Act 7659 » a été adoptée et est entrée en vigueur le 1er janvier 1994. Cette loi autorisait la condamnation à la peine de mort pour 46 infractions distinctes, y compris des infractions non violentes, 23 des infractions étaient systématiquement passibles de la peine de capitale. En 2002, 52 infractions étaient passibles de la peine de mort. De nombreuses condamnations à mort ont été prononcées par les tribunaux, surtout à l’encontre des accusés les plus pauvres ne pouvant payer des avocats pour se défendre, qui étaient souvent torturés pendant les gardes à vue et se trouvaient parfois dans l’incapacité de comprendre la langue dans laquelle se déroulaient les procédures. Les Philippines étaient devenues l’un des pays ayant un des taux de condamnations à mort les plus élevés du monde. Près de 900 prisonniers furent condamnés à mort en 1999, année où les exécutions reprirent après une pause de 23 ans. UN puissant groupe de travail a été constitué en 1997 pour faire campagne contre la peine de mort, dont faisaient partie le Free Legal Assistance Group (FLAG), la Coalition contre la peine de mort (CADP) ; la Conférence des évêques catholique et Amnesty International. L’Eglise catholique romaine a lancé un appel au président Joseph Estrada qui, bien qu’étant partisan de la peine de mort, a reconnu que de graves irrégularités entachaient les procès et que des innocents risquaient d’être condamnés à mort. La dernière exécution a eu lieu en 2000 et en décembre de la même année, le président a imposé un moratoire d’un an sur les exécutions, commuant toutes les condamnations à mort prononcées par les tribunaux inférieurs et demandant au Congrès d’examiner comment la peine de mort était appliquée.
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II En 1987, les Philippines ont adhéré au (premier) Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. En octobre 2000, le Comité des Droits de l’Homme de Nations Unies, qui entend les plaintes de requérants individuels concernant des violations alléguées de leurs droits au titre du Pacte, a exprimé ses inquiétudes concernant l’éventuelle exécution, aux Philippines, de deux hommes dont il étudiait les dossiers. Le Comité des Droits de l’Homme a conclu « que l’Etat avait commis un grave manquement à ses obligations au titre u Protocole en condamnant à mort les victimes présumées avant que le Comité ait terminé l’examen de leur communication » (Piandiong et al contre les Philippines, Communication N° 869/1999, 19 octobre 2000 ; CCPR/C/70/D/869/1999).
Ms. Gloria Macapagal-Arroyo
La présidente Gloria Macapagal-Arroyo avait annoncé en 2001 un nouveau moratoire sur les exécutions. Quelques mois plus tard, à la suite d’une vague d’enlèvements, elle menaçait de revenir sur la position, déclarant que les exécutions reprendraient. La peine capitale a fait l’objet d’un vaste débat, notamment au Congrès, mais aucune exécution n’a eu lieu. En 2001, les partisans de la peine capitale introduisirent un projet de loi visant à étendre encore son champ d’application, tandis que l’année suivante, en 2002, tant les sénateurs que les membres de la Chambre des Représentants rédigèrent des projets de loi visant à abolir la peine de mort.
Les ONG n’ont cessé de faire campagne et le FLAG s’est employé à représenter des particuliers accusés d’infractions passibles de la peine capitale. La Commission philippine des droits de l’Homme s’est énergiquement opposée au rétablissement de la peine de mort. Les communautés religieuses étaient divisées : les églises évangélistes philippines réaffirmaient leur soutien à la peine de mort, alors que la Conférence des évêques catholiques des Philippines renouvelait ses appels à l’abolition de la peine capitale. Le 15 avril 2006, à l’occasion de la fête de Pâques, la présidente Arroyo annonça une mesure de commutation des condamnations à mort en peines d’emprisonnement à perpétuité, ce qui concernait plus de 1 200 prisonniers condamnés à mort. Dans une lettre adressée au président du Sénat, M. Franklin M. Drilon, la présidente déclarait qu’il était urgent « d’abolir la peine de mort, celle-ci s’étant avérée impuissante à servir son objectif principal de dissuader la perpétration de crimes odieux » et que l’abolition remédierait aux conclusions selon lesquelles la peine de mort était une mesure dirigée contre les pauvres, étant donné que c’étaient les personnes défavorisées, n’ayant pas les moyens d’être représentées par un avocat, qui faisaient le plus souvent l’objet de condamnations à mort. Le Congrès philippin a agi rapidement en adoptant le 6 juin 2006 des propositions de loi abolissant la peine de mort : le Sénat s’est prononcé par 16 voix pour, aucune contre et une abstention et la Chambre des Représentants par 119 voix pour et 20 contre. La présidente Arroyo a déclaré : « Nous célébrons la victoire de la vie et je remercie le Congrès d’avoir agi aussi rapidement pour abolir la loi sur la peine de mort. Mais ne nous y trompons pas, l’abolition de la peine de mort ira de pair avec une mise en œuvre plus stricte et plus sévère de la législation sur tous les fronts.» La loi est entrée en vigueur le 24 juin 2006, avec la signature, par la présidente Gloria Macapagal-Arroyo, de la « Loi interdisant l’application de la peine de mort aux Philippines » (RA 9346).
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A l’Assemblée générale des Nations Unies en 2007 ; les Philippines ont voté en faveur de la résolution A/ RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier, en vue d’abolir la peine de mort, puis pour toutes les résolutions ultérieures concernant la peine de mort adoptées en 2008, 2012 et 2012. En novembre 2007, les Philippines ont ratifié le deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politique visant à abolir la peine de mort.
RWANDA En 2007, le Rwanda est devenu le premier pays de la région des Grands Lacs, en Afrique, à abolir la peine de mort pour toutes les infractions, au lendemain du génocide de 1994 lors duquel environ 800 000 Rwandais avaient été assassinés. La dernière exécution a eu lieu en 1998. La peine capitale était prévue par le Code pénal pour une série d’infractions pénales et la Cour de sécurité de l’Etat avait compétence pour les affaires à caractère politique, notamment les infractions passibles de la peine de mort. Des exécutions avaient lieu dans certains cas. Entre 1969 et 1974, 13 condamnés à mort sur 120 ont été exécutés. En 1982, le président Juvénal Habyarimana a commué deux sentences de mort infligées en 1981 par la Cour de sécurité de l’Etat qui avait refusé aux défendeurs l’accès à des avocats. Toutefois, deux mois plus tard, en septembre 1982, le gouvernement a fait part de son intention de conserver la peine de mort lorsque 43 détenus ont été exécutés, la plupart pour meurtre. En juillet 1987, le président Habyarimana a commué toutes les peines de mort confirmées en peines d’emprisonnement à vie, mesure qui a bénéficié à 537 détenus. Le président a ensuite régulièrement commué les condamnations à mort. A la suite du génocide de 1994, les autorités rwandaises ont traduit devant des tribunaux nationaux les personnes accusées d’y avoir été mêlées. En 1998, 22 personnes ont été exécutées pour avoir dirigé le génocide. Ce furent les dernières exécutions judiciaires pratiquées au Rwanda bien que des condamnations à mort aient continué à être infligées jusqu’en 2003. Par la suite, la participation de la communauté internationale à l’établissement des responsabilités dans le génocide a déclenché la démarche couronnée de succès du Rwanda en vue de l’abolition de la peine capitale. En novembre 1994, le Conseil de sécurité des Nations Unies a établi le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) afin de juger les auteurs du génocide ainsi que d’autres violations graves du droit humanitaire international. La peine de mort a été exclue, nonobstant une forte opposition du Rwanda qui disposait à l’époque d’un siège au Conseil de sécurité. Le représentant du Rwanda a fait valoir au Conseil de sécurité que le projet de clause excluant la peine de mort comme châtiment, figurant dans le projet de statut du tribunal n’était pas «propice à une réconciliation nationale au Rwanda».
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II La décision ultérieure du Conseil de sécurité des Nations Unies d’exclure du statut du TPIR la peine de mort comme châtiment représentait un dilemme pour le gouvernement : une injustice foncière serait commise si des suspects jugés par des tribunaux nationaux étaient condamnés à mort alors que les milliers de suspects de génocide vivant à l’étranger, certains détenus par le TPIR, y compris des meneurs présumés, se verraient infliger tout au plus une peine de réclusion à perpétuité. En effet, des gouvernements détenant des personnes soupçonnées d’avoir dirigé le génocide ou d’y avoir participé qui s’étaient enfuies à l’étranger, ainsi que le TPIR, refusaient d’extrader au Rwanda des suspects détenus par eux par crainte qu’ils ne soient exécutés. Ces gouvernements, de même que le TPIR, s’inquiétaient aussi de l’absence de garanties d’une procédure équitable qui constituait une préoccupation de longue date dans les affaires de condamnations à mort. Ces inquiétudes entraînèrent tout d’abord la promulgation, en 2007, d’une loi spéciale sur les transfèrements interdisant l’exécution de suspects devant être transférés du TPIR vers les tribunaux rwandais locaux. Des mesures visant à abolir la peine de mort pour toutes les infractions n’allaient pas tarder à suivre. En octobre 2006, le bureau politique du parti au pouvoir a recommandé fermement l’abolition, et le 19 janvier 2007, le gouvernement a approuvé des plans visant à abolir la peine capitale. Le ministre de la Justice, Tharcisse Karugama, a déclaré qu’une consultation publique prolongée avait fait ressortir que la plupart des Rwandais étaient hostiles à la peine de mort. Par la suite, la Chambre des députés, le 8 juin 2007, et le Sénat, le 25 juillet 2007, ont voté des lois abolissant la peine de mort. La Loi relative à l’abolition de la peine capitale est entrée en vigueur le 25 juillet 2007, date où elle a été ratifiée par le président Paul Kagame, et publiée au Journal officiel du Rwanda. Elle abolissait la peine de mort pour toutes les infractions et supprimait cette peine du Code pénal. Le président Kagame a fait observer que l’histoire violente du génocide dans son pays constituait un des facteurs principaux ayant motivé l’abolition de la peine de mort. Toutes les condamnations à mort — concernant quelque 600 détenus — ont été commuées en peines de réclusion à perpétuité. Louise Arbour, alors Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’Homme et ancien procureur du TPIR a salué cette décision, déclarant : « Un pays qui a subi le crime ultime et dont la population a une soif de justice qui est encore loin d’être étanchée a décidé de renoncer à une sanction qui n’aurait pas sa place dans toute société prétendant attacher du prix aux droits de l’Homme et à l’inviolabilité de la personne. Le Rwanda fait preuve d’initiative en agissant concrètement. » En novembre 1999, le gouvernement a accueilli une réunion de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples, qui a adopté sa première résolution sur la peine capitale, engageant vivement les Etats à envisager d’observer un moratoire sur les exécutions. En septembre 2009, la première Conférence régionale sur la peine de mort a été organisée à Kigali, au Rwanda, par le groupe de travail sur la peine de mort de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples en vue de soutenir l’abolition de la peine capitale en Afrique centrale, orientale et australe. De plus, en octobre 2011, le Rwanda a accueilli une conférence régionale sur l’abolition de la peine de mort à laquelle a assisté Mme Duvivier, Commissaire de l’ICDP. Dans le cadre des accords de paix d’Arusha de 1993, qui ont force constitutionnelle au Rwanda, le gouvernement a entrepris de ratifier le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui demande aux Etats d’abolir la peine de mort. Cet engagement à le ratifier a été concrétisé en décembre 1998. 32
À l’Assemblée générale des Nations Unies en 2007, le Rwanda a voté en faveur de la résolution A/ RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier, en vue d’abolir la peine de mort, puis pour toutes les résolutions ultérieures concernant la peine de mort adoptées en 2008, 2010 et 2012.
SENEGAL Depuis son accession à l’indépendance, en 1960, le Sénégal n’a procédé qu’à deux exécutions, en 1965 et en 1967, toutes deux pour le meurtre de dirigeants politiques. Le Code pénal du pays prévoyait la peine de mort pour des infractions incluant le meurtre et celle-ci était systématique pour l’espionnage et la trahison, entre autres. Les débats sur la réforme constitutionnelle de 2001 ont notamment été consacrés à une éventuelle abolition de la peine de mort. Cette mesure était combattue par le président de l’époque, Abdoulaye Wade, hostile à l’abolition, qui faisait valoir que cette question devait être traitée en adoptant une législation prévoyant l’abolition de la peine de mort. La Constitution de 2001, dans son article 7, stipule que « La personne humaine est sacrée. Elle est inviolable » et que tout individu a droit à la vie, à la liberté, à la sécurité, et « à l’intégrité corporelle notamment à la protection contre toutes mutilations » Aucune exception concernant la peine de mort n’y est mentionnée et celle-ci est demeurée dans les codes. Dans sa réponse de juillet 2001 à Amnesty International concernant des initiatives visant à abolir la peine de mort, le gouvernement déclarait : « Un processus impliquant tous les pans de la société est engagé pour débattre d’une éventuelle modification de la législation ». Lorsque des tribunaux ont prononcé des peines de mort dans plusieurs affaires, en 2003 et 2004, un vif débat a repris entre les abolitionnistes et leurs adversaires, notamment lorsqu’un projet de loi a été présenté au parlement en 2004 en vue d’abolir la peine de mort. Quatre détenus étaient alors condamnés à la peine capitale. Le Sénégal est majoritairement musulman. Les adversaires de l’abolition étaient notamment la Coalition des associations islamiques, favorable au maintien de la peine de mort, qui a également invoqué son effet dissuasif présumé. Toutefois, le ministre de la Justice, Sergine Diop, a indiqué que dans les pays où existait la peine de mort, les chiffres de la criminalité n’étaient pas moins élevés que dans les pays abolitionnistes. Les partisans du projet de loi étaient notamment des ONG comme African Encounter for Human Rights et la Commission sénégalaise des droits de l’Homme, qui se fondaient sur le principe du caractère sacré de la vie qui fait partie de la culture traditionnelle sénégalaise. Cette dernière organisation soulignait également que l’abolition de la peine de mort était en accord avec le mouvement international visant à abolir la peine de mort. Qui plus est, le président Wade a changé d’avis et est devenu un fervent partisan de la loi abolitionniste. Cette loi a été approuvée à l’unanimité par le gouvernement le 15 juillet 2004, et le 10 décembre 2004, le Parlement a aboli la peine de mort pour toutes les infractions, à une large majorité et avec le soutien d’une bonne partie de la société sénégalaise.
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II Le Sénégal est membre de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), dont les membres demeurent divisés sur la question de la peine de mort. Les débats au Sénégal ont été suivis de près par d’autres membres de la CEDEAO, dont six sont déjà considérés comme abolitionnistes dans la pratique et l’autre, le Togo a aboli la peine de mort pour toutes les infractions. Lors de l’Assemblée générale des Nations Unies de 2007, le Sénégal n’était pas présent lorsque l’Assemblée a adopté la résolution A/RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier, en vue d’abolir la peine de mort, et il s’est abstenu pour les votes sur les résolutions ultérieures adoptées en 2008, 2010 et 2012. Le Sénégal n’est pas partie au Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort.
TURQUIE La Turquie a aboli la peine de mort pour les infractions de droit commun en 2001 et 2002 par amendement constitutionnel, puis par amendement législatif. En 2004, la Turquie a interdit la peine de mort pour toutes les infractions par un nouvel amendement à la Constitution et un amendement ultérieur au Code pénal. La levée de la Loi martiale en 1987 a favorisé l’abolition de la peine de mort, qui est intervenue après un moratoire de facto et la réduction des délits passibles de la peine de mort. La dernière exécution a eu lieu en 1984. Seize articles du Code pénal turc de 1926, tels qu’amendé, prévoyaient la peine de mort obligatoire pour les crimes contre l’Etat, le gouvernement et la Constitution. En outre, huit articles prévoyaient la peine de mort obligatoire pour des infractions pénales de droit commun comme le meurtre. La peine de mort pouvait également être infligée en vertu du Code pénal militaire et de la Loi sur la trahison. Les détenus condamnés à mort qui avaient épuisé tous les recours légaux ne pouvaient plus être exécutés à moins que leurs condamnations ne soient approuvées par la Grande Assemblée nationale (Parlement) ainsi que l’exigeait l’article 87 de la Constitution. La Commission judiciaire du Parlement a effectivement suspendu des exécutions en ne réexaminant pas certains cas individuels. Depuis la fondation de la République moderne de Turquie, en 1923, 588 personnes avaient été exécutées pour des infractions pénales et politiques. Les exécutions ont été plus fréquentes à la suite des coups d’Etat militaires de 1960, 1971 et 1980, bien qu’un moratoire de facto sur les exécutions ait été en place de 1973 à 1980, période durant laquelle des condamnations à mort étaient encore prononcées, mais non confirmées par le Parlement. Le moratoire a expiré peu après le coup d’Etat militaire du 12 septembre 1980. Selon Amnesty International, 50 personnes ont été exécutées entre 1980 et 1984, dont 27 pour des infractions à caractère politique, en vertu des articles 125 et 146/1 du Code pénal. La plupart des condamnations à mort étaient infligées par des tribunaux militaires dans le cadre de la loi martiale entrée en vigueur en décembre 1978, lors de procès très éloignés des normes internationales. La dernière exécution a eu lieu en 1984 et a suscité un tollé international, mais des peines de mort ont continué à être infligées par les tribunaux. La loi martiale a été entièrement levée en juillet 1987, mesure qui a préparé la voie à l’abolition de la peine de mort.
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En novembre 1990, la Grande Assemblée nationale a ratifié des amendements au Code pénal réduisant le nombre d’infractions passibles de la peine de mort. Cette peine a cependant été conservée pour 13 infractions, notamment le meurtre et des infractions politiques comme le séparatisme. Franchissant une étape supplémentaire vers l’abolition, le Parlement a voté en avril 1991 la Loi contre le terrorisme qui commuait toutes les condamnations à mort pour des infractions commises avant le 8 avril 1991. Cela concernait les détenus condamnés à mort pour des infractions à caractère politique en vertu du Code pénal et ceux qui avaient été condamnés à mort pour viol et trafic de drogue — infractions réprimées par le Code militaire. Le Premier ministre a immédiatement retiré les dossiers de 276 détenus dont les condamnations à mort étaient en instance de ratification par la Grande Assemblée nationale. Bien que la Turquie ait maintenu un moratoire de facto sur les exécutions, la peine de mort est restée inscrite dans les codes, les tribunaux turcs ont continué à prononcer des condamnations à mort et les cours d’appel ont confirmé ces condamnations. La Turquie est membre du Conseil de l’Europe et partie à la Convention européenne des droits de l’Homme. Lors du sommet de Strasbourg, en 1997, le président de l’Etat turc, Süleyman Demirel, s’est engagé à abolir la peine de mort et à maintenir entretemps le moratoire existant sur les exécutions. Un projet de nouveau Code pénal abolissant la peine de mort et la remplaçant par une peine de réclusion à perpétuité a été proposé par une commission parlementaire en 1979, et au début 1999, le gouvernement a informé le Conseil de l’Europe que l’adoption du projet de loi constituait une priorité pour le gouvernement. En juin 1999, 47 condamnations à mort avaient été confirmées par la Cour d’appel. Les pressions en faveur d’une reprise des exécutions se sont intensifiées lorsque le dirigeant du PKK, Abdullah Öcalan, a été condamné à mort, le 29 juin 1999, pour « trahison et séparatisme », alors même que le juge président avait expressément fait état de son opposition générale à la peine de mort après la fin du procès. Des gouvernements européens et des organisations intergouvernementales ainsi que des ONG ont appelé la Turquie à commuer sa peine de mort et ont mis en garde contre une reprise des exécutions. Le Parlement européen a averti la Turquie en juin 1999 que l’exécution d’Öcalan « porterait préjudice au processus d’intégration de la Turquie dans l’UE ». En janvier 2000, sa peine de mort a été suspendue en attendant d’être examinée par la Cour européenne des droits de l’Homme, mais en octobre 2002, la Cour de sécurité de l’Etat l’a commuée avant l’arrêt de la Cour européenne. La Turquie est candidate à l’adhésion à l’UE, qui exige l’abolition de la peine de mort à titre de condition préalable. L’UE a appelé à maintenir un moratoire de facto sur les exécutions à court terme et à abolir la peine de mort à moyen terme, et notamment à ratifier les protocoles pertinents à la Convention européenne des droits de l’Homme. Conformément à cette demande, la Turquie a commencé à mettre en oeuvre les mesures prioritaires. Un amendement de l’article 38 de la Constitution a été voté en octobre 2001, interdisant la peine de mort pour les actes criminels mais la maintenant en temps de guerre et pour des «crimes terroristes». Le 3 août 2002, le Parlement turc a adopté un ensemble de réformes démocratiques comportant une loi abolissant la peine de mort en temps de paix et remplaçant la peine de mort pour «crimes terroristes» par une peine de prison à vie. En novembre 2002, 180 membres du PKK et d’autres personnes ont vu leur peine de mort commuée en une peine de prison à perpétuité. Un an plus tard, en novembre 2003, la Turquie a ratifié le Protocole n° 6 à la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales concernant l’abolition de la peine de mort en temps de paix. 35
Au bout de deux ans de mandat de l’actuel gouvernement dirigé par le Premier ministre Recep Tayyip Erdoğan, la Turquie a pris la dernière mesure, en 2004, en interdisant dans sa Constitution et son Code pénal la peine de mort pour toutes les infractions. Le 7 mai de cette année-là, le Parlement turc a adopté la Loi n°5170 supprimant la formulation de l’article 15 de la Constitution qui autorisait la peine de mort en temps de guerre et ajoutant à l’article 38 que «la peine de mort […] ne sera pas infligée». Puis le 14 juillet 2004, son parlement a adopté la Loi n°5218, «neuvième loi d’harmonisation” qui retire la peine de mort de tous les articles du Code pénal et la remplace par une peine d’emprisonnement à perpétuité. Soulignant encore son attachement abolitionniste au niveau international, la Turquie a adhéré en 2006 au Protocole n° 13 à la Convention européenne des droits de l’Homme abolissant la peine de mort et au Deuxième protocole facultatif à la CEDH visant à l’abolition de la peine de mort. À l’assemblée générale des Nations Unies en 2007, la Turquie a voté en faveur de la résolution A/RES/62/149 qui appelle à un moratoire sur les exécutions dans le monde entier, en vue d’abolir la peine de mort, puis pour toutes les résolutions ultérieures concernant la peine de mort adoptées en 2008, 2010 et 2012.
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III
ENSEIGNEMENTS TIRES DES EXPERIENCES DES ETATS EN MATIERE D’ABOLITION DE LA PEINE DE MORT
En 1971, l’Assemblée générale des Nations Unies a affirmé, dans sa résolution 2857(XXVI) qu’afin de garantir pleinement le droit à la vie, proclamé dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme, « il importe au premier chef de restreindre progressivement le nombre des crimes pour lesquels la peine capitale peut être imposée, l’objectif souhaitable étant l’abolition totale de cette peine dans tous les pays ». Depuis lors, d’énormes progrès ont été accomplis en matière d’abolition de la peine capitale dans toutes les régions du monde, quels que soient le système politique, la religion, la culture et la tradition. Le présent rapport décrit l’expérience de 13 Etats qui ont pris des mesures en vue d’abolir la peine capitale. On trouvera ci-dessous certains enseignements tirés de ces expériences.
LA MARCHE VERS L’ABOLITION Certains Etats sont passés directement à l’abolition totale de la peine de mort et ont veillé à ce que leur Constitution interdise la peine capitale à titre de garantie solide contre son rétablissement. Dans des cas où l’abolition n’était pas possible immédiatement, certains Etats ont pris des mesures intermédiaires, notamment: Des mesures internes : • Instauration d’un moratoire officiel sur les condamnations à mort et les exécutions, et commutation de toutes les condamnations à mort en peines d’emprisonnement. • Garanties que la peine de mort ne sera pas infligée à des personnes âgées de moins de 18 ans, et que des femmes enceintes ou allaitantes, des personnes âgées et des personnes souffrant de graves handicaps mentaux ou intellectuels ne seront pas exécutées. • Limitation du champ d’application de la peine de mort aux « crimes les plus graves ». • Suppression des peines de mort systématiques. • Abolition de la peine de mort pour les infractions de droit commun. • Garantie que les normes internationales en matière de droits de l’Homme liées à l’application de la peine de mort seront entièrement intégrées dans les dispositions juridiques et administratives. • Garantie que s’il existe un risque qu’une personne soit condamnée à mort ou exécutée, elle ne sera pas expulsée, renvoyée, extradée ou déplacée de force d’une quelconque autre manière.
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Autres mesures internes : • Publication d’informations concernant le recours à la peine de mort afin que le public soit pleinement informé, notamment sur le nombre de personnes condamnées à mort et exécutées, et sur les crimes pour lesquels elles ont été condamnées. • Moyens permettant aux institutions nationales et à la société civiles d’engager un débat libre et éclairé sur la peine de mort, et sollicitation de conseils auprès des organismes compétents, notamment les institutions nationales de défense des droits de l’Homme, les organisations professionnelles, les organes religieux et les organisations non gouvernementales nationales et internationales. • Promotion d’études empiriques sur le recours à la peine de mort, notamment sur le respect des normes internationales en matière de droits de l’Homme et sur le principe de non-discrimination, notamment la discrimination fondée sur l’origine ethnique, la pauvreté ou l’orientation sexuelle. Des études ont également éclairé le public sur les conséquences de la peine capitale et l’impact négatif de cette peine pour ceux qui sont concernés par son application. • Sollicitation de conseils auprès d’Etats abolitionnistes et d’organisations internationales, notamment d’une assistance pour adhérer à tous les instruments internationaux et régionaux sur l’abolition de la peine de mort.
ROLE D’IMPULSION : • Impulsion morale : Une impulsion des chefs d’Etat, des gouvernements et d’autres personnes en position de pouvoir est importante pour parvenir à l’abolition. L’encouragement et le soutien de dirigeants d’autres Etats a également joué un rôle notable à cet égard.
MESURES INTERNATIONALES : • Adhésion au Pacte international sur les droits civils et politiques et à son Deuxième protocole facultatif visant à l’abolition de la peine de mort et mise en œuvre de leurs dispositions. • A l’Organisation des Etats américains, adhésion à la Convention américaine des droits de l’Homme, qui interdit le rétablissement de la peine de mort ainsi qu’à son protocole visant à l’abolition de la peine de mort, et mise en œuvre de leurs dispositions. • Au Conseil de l’Europe, adhésion aux Protocoles 6 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme, qui interdit la peine de mort, en temps de paix et en toutes circonstances, y compris en temps de guerre, et application de leurs dispositions, dans les plus brefs délais. • Application de toutes les résolutions pertinentes des Nations Unies sur la peine de mort, notamment des résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies intitulées «Moratoire sur l’application de la peine de mort».
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La commission internationale contre la peine de mort La Commission internationale contre la peine de mort (CIPM) a été créée le 7 octobre 2010 à Madrid à la suite d’une initiative espagnole visant à renforcer la tendance mondiale en faveur de l’abolition de la peine de mort. La CIPM est opposée à la peine capitale en toutes circonstances et recommande vivement l’instauration immédiate d’un moratoire universel sur les exécutions en vue de l’abolition totale de la peine de mort. La Commission est composée de 15 personnalités éminentes et dirigée par son président, Federico Mayor. Ces commissaires représentent toutes les régions du monde — ce qui montre que l’abolition de la peine de mort constitue une préoccupation mondiale, et non pas une cause défendue par une région spécifique. Ils ne représentent pas leur pays et prennent leurs décisions en toute indépendance. Ces membres sont les suivants : Federico Mayor (Espagne). Président de la CIPM. Ancien directeur général de l’UNESCO et ancien ministre espagnol de l’Education et des Sciences. Giuliano Amato (Italie). Ancien président du Conseil italien. Louise Arbour (Canada). Ancien Haut commissaire des Nations Unies aux droits de l’Homme et ancien procureur général des Tribunaux pénaux internationaux pour l’Ex-Yougoslavie et le Rwanda. Robert Badinter (France). Ancien ministre de la justice français. Mohammed Bedjaoui (Algérie). Ancien ministre des Affaires étrangères algérien et ancien juge à la Cour internationale de justice. Ruth Dreifuss (Suisse). Ancienne présidente et ancienne ministre de l’Intérieur de la Confédération suisse. Michèle Duvivier Pierre-Louis (Haïti). Ancien premier ministre d’Haïti. Hanne Sophie Greve (Norvège). Elle est juge et vice-présidente de la Haute Cour de Norvège de l’Ouest et a été juge à la Cour européenne des droits de l’Homme. Asma Jilani Jahangir (Pakistan). Présidente de la Commission des droits de l’Homme du Pakistan. Ioanna Kuçuradi (Turquie). Titulaire de la Chaire UNESCO de philosophie et de droits de l’Homme, et Directrice du Centre de recherche et d’application des droits de l’Homme à l’université Maltepe. Gloria Macapagal-Arroyo (Philippines). Ancienne Présidente des Philippines. Rodolfo Mattarollo (Argentine). Ancien Secrétaire adjoint aux droits de l’Homme de l’Argentine. Ibrahim Najjar (Liban). Ancien ministre de la Justice. Bill Richardson (Etats-Unis) Ancien gouverneur du Nouveau-Mexique. Membre honoraire : José Luis Rodríguez Zapatero (Espagne). Ancien président du gouvernement de l’Espagne. Pour de plus amples informations sur la CIPM consultez : www.icomdp.org 39
Pour de plus amples informations sur la CIPM : Commission internationale contre la peine de mort Rue Rothschild 20, CH-1202 Genève Téléphone : + 41 (0) 22 908 4422 Fax : +41 (0) 22 908 62 62 www.icomdp.org ©copyright ICDP 2013