La Fille du bou t d’là rue par Vis9vies
La fille du bou t d’la rue, y’a longtemps que j’l’ai pas vue.
J’la voyais tous les matins empru claquaient l’pavé comme des doigts grisaille par-delà le
unter le même chemin. Ses talons s sur un djembÊ, faisant bondir la es pâles murailles.
La fille du bou t d’la rue, j’sais pas trop c’qu’elle est devenue. Elle allait toujours bosser dans l’bar de Chez Dédée.
C’était rempli d’paumés qui tou te la sainte journée s’me ttaient pas qu’des cafés derrière l’gile t taché.
Elle leur offrait gratos un sourire, une parole, un rien privé d’pathos, un lien dénué d’logos, un vœu que nul n’exauce… Et i’ r’partaient un peu moins tristes dans leurs proje ts de vie hors-piste.
La fille du bou t d’la rue était vach’ment bien fou tue. Tous ceux qui dans l’falzar en avaient deux bien pendues, bavaient devant ses yeux qui vous chantaient l’dahu t. Les clebs, sur son passage stoppaient tou t badinage pour s’faufiler dans son sillage. Parfois sa main s’tendait vers leur museau mouillé ; on les voyait trembler sous la caresse donnée.
La fille du bou t d’la rue, par la voisine j’l’ai su : paraît qu’certains ont cru qu’elle s’rait à eux tou te nue. Ses salauds, ils l’ont coincée, un soir quand elle rentrait. Ils l’ont salie e t pis violée, cassé l’ressort e t pis laissée.
Depuis, la fille du bou t d’la rue, chez nous, n’a pas reparu.
Elle est partie me tt’ du soleil sur un au t’ tas d’fumier, là où d’au tres, à nous pareils, sauront peu t-être, mieux qu’nous, l’aimer.
C’est dommage, parc’qu’ici, au bou t d’la rue, reste plus qu’des chiens perdus, à la queue basse, au nez sec, sur une voie qu’est sans issue…
Illustré par Laurence Deschênes-Tremblay Collège Jean-de-Brébeuf