Le voyage en architecture
DACA Ilan
Tuteur : Monsieur Hugues FONTENAS


REMERCIEMENTS

Avant tout, je tiens à exprimer ma profonde gratitude à toutes les personnes qui ont contribué à la réalisation de mes trois premières années de Licence en architecture, et de mon rapport qui en découle
Tout d'abord, je remercie vivement Monsieur FONTENAS pour son encadrement, ses conseils avisés, et sa patience tout au long de l’élaboration de ce projet. Son expertise et sa disponibilité ont été des facteurs clef pour l'avancement de ce travail.
Je souhaite remercier l'ensemble du corps enseignant de l’ENSA
Paris Val de Seine, notamment Madame ALLEGRET, Monsieur CORNAERT et Madame SARRAZIN, pour leurs enseignements de qualité, leur soutien constant et leurs encouragements.
Un grand merci à ma famille, en particulier à mes parents pour leur amour inconditionnel, leur soutien financier et émotionnel Merci à ma mère, hotesse de l’air, de m’avoir partagé son goût du voyage et de m’avoir permis de découvrir le monde à ses côtés.
Je suis également profondément reconnaissant envers mes amis : Johan, Lisa, Lou-Lynn et Maxence, pour leurs encouragements, leur aide précieuse et les moments de partage tout au long de cette aventure académique. Leur soutien moral a été crucial, dans les périodes de charrettes notamment.
Enfin, je remercie toutes les personnes qui ont contribué à l'élaboration de ce travail, de par leurs conseils, leurs critiques constructives, ou simplement par leur soutien moral.
Votre contribution a été précieuse. Merci à tous.
DACA Ilan, étudiant de 3e année à l’ENSA Paris Val de Seine
Toutes les photos, dessins et illustrations de ce document sont les miens, sauf mention contraire indiquée
En vous souhaitant une excellente lecture.
p.7 p.15
Le voyage en architecture
Le voyage comme une confrontation nécessaire pour un futur architecte
1) Le voyage comme outil pédagogique sensible dans les études d’architecture
Le voyage d’études comme une appréhension de l’architecture plus globale
Une complémentarité à l'enseignement, apportant une nouvelle perception
La nécessité d’aller sur le terrain pour comprendre le territoire
2) La confrontation à d’autres cultures comme mécanisme d’apprentissage
Un outil de contraste et d’ouverture sur le monde
La possibilité de dépasser ses propres limites mentales et culturelles
L’immersion contextuelle : des enjeux et des dynamiques de création unique
p.23
3) Mon ressenti et mes expériences personnelles du voyage
L’expérience du voyage pour se sensibiliser à des sujets impactants
Les destinations qui ont marqué sensiblement mon parcours architectural
Mon désir ancré d’étudier et de travailler à l’étranger
Le voyage comme outil pédagogique sensible
dans les études
d’architecture

TracédesVoyagesdeleCorbusier-Crédit:Wikipédia

CarnetdeCroquis-Crédit:FondationLeCorbusier

CarnetdeCroquis-Crédit:FondationLeCorbusier



CarnetdeCroquis-Crédit:FondationLeCorbusier



CitédesArtsetdelaCulturedeBesançon-Crédit:KengoKumaandassociates











Le voyage d’étude comme une appréhension de l’architecture plus globale
La pertinence du voyage d'études à l'étranger, semble traditionnellement indispensable dans la formation des architectes, au travers des parcours de plus grands architectes de notre génération, et même celle bien antérieure, on remarque que pour beaucoup le voyage est comme un rite de passage de l’architecte, un outil pour aiguiser son regard sur le monde
Aujourd’hui, il semblerait que l’on assiste en même temps à la démocratisation du voyage à l’étranger, cela s’oppose avec l’éveil croissant de la conscience écologique, qui semble privilégier l’expérience locale et restreindre les voyages de longue distance que certains jugent superflus
Pourtant, au fil de son histoire, et même des générations d’architectes, ce type de voyage a toujours révélé l'attrait et le besoin des architectes pour des destinations de plus en plus lointaines
Le tout influencé par cette même démocratisation des moyens de transport, l'attrait pour l'exotisme, et simplement la curiosité de découvrir et analyser de nouveaux territoires
Pour citer un des voyages d'étude d’architecte les plus célèbres : les voyages initiatiques de Le Corbusier de 1907 à 1911 où il griffonne et peint le monde dans son carnet, qui alimentera d’idée et de principes architecturaux les œuvres de sa vie
Egalement pour souligner la portée internationale de l’architecture d’aujourd’hui, avec des architectes comme Kengo Kuma qui sont amenés à voyager et construire partout dans le monde, on constate que leur cursus d’étude est avant tout tourné vers l’étranger Dans le cas de Kuma, enseignant à New York après ces études au Japon, puis enchainant les réalisations à l’étranger, comme la Cité des Arts et de la Culture de Besançon, quelques années après cela.
De toute évidence, il ne faut pas sous-estimer le rôle de ces voyages dans la diffusion des courants architecturaux, d’autant plus dans la mise en place des réseaux professionnels, de l’émergence de nouvelles idées et d’un constat global de la société et tous ses contrastes
C’est pour cette raison que je suis conscient et particulièrement reconnaissant du premier voyage d’études pendant la deuxième année de cursus, je reconnais que c’est une chance que l’école et les enseignants concernés nous permettent de réaliser un voyage consacré entièrement à l’architecture
Au cours de mon troisième semestre au côté de l’enseignant Monsieur Dominique Cornaert, notre classe du G9 a pu partir en voyage d’études à Cologne. Tout d’abord, nous avons tous étudié en amont les différents lieux d’architectures de notre parcours, compilant l’ensemble dans un petit carnet
Ainsi, nous pouvions découvrir l’aspect théorique de chaque bâtiment avant de pouvoir se rendre compte réellement de son impact, de sa présence dans l'environnement bâti, ce qui enrichissait notre compréhension globale de l'architecture et complétait l’expérience d’apprentissage de ces lieux
Amphi310,lieudecoursmagistraux-Crédit:ENSAPVS

Croquisdel’entresol


Vueextérieuredel’amphi310-Crédit:ENSAPVS
Croquisd’étudedeMaisonLaRochedeLeCorbusier


CinqphotosdemonstageouvrierchezDursunCharpente

Maquetted’étudesdeLaCaseStudyHousen°8d’Eames










Une complémentarité à l'enseignement, apportant une nouvelle perception
Après avoir passé bientôt trois ans à emmagasiner des connaissances et de l’expérience dans l'aspect théorique du projet, ayant parfois relevé le manque de considération des études d’architecture pour des aspects plus concret de la réalité de l’architecture. On ne fait que l’effleurer pendant le premier stage ouvrier, et on y consacre un petit peu plus de temps lors du stage en entreprise, mais au final l’ensemble du cursus de licence est principalement théorique
L’intégralité des savoirs accumulés lors des premières années permet évidemment de porter un regard plus pertinent et réfléchit sur le monde qui nous entoure, conscient désormais des principes d’architectures, des réalités constructives, des législations et des enjeux de chaque milieu
Personnellement, je pense que c’est surtout par l’intermédiaire des voyages, organisés par l’école ou non, que j’ai eu l’impression d'être le plus confronté à la réalité de l’architecture : le fait d’être pendant quelques jours plongé dans une nouvelle ville, un nouveau pays, est une façon de se confronter à un monde différent de notre quotidien, détaché de nos repères usuels et en proie à se poser des questions, de s’essayer à un raisonnement critique de futurs architectes.
De cette manière, j’aimerais faire part de l’évolution de mon regard sur la ville, l’espace et l’architecture que je portais au cours de mes voyages précédents à l’étranger, en contraste avec celui que j’ai après ces trois premières années d’études
En effet, durant les premiers voyages précédent mes études d’architecture, avec certaines capitales du monde comme par exemple Tokyo, où mon regard naïf ne faisait qu’effleurer les bâtiments remarquables des yeux, fantasmant sans me poser de question sur la forme des temples traditionnels japonais, ou même de l’architecture moderne
Ayant eu la chance de pouvoir y retourner il y a quelques mois, j’ai redécouvert d’un nouvel œil ces mêmes architectures, cherchant cette fois-ci à porter un regard critique, dépassant le rôle du simple touriste pour essayer de comprendre les principes fondamentaux constructifs, fonctionnels ou esthétiques et de m’en imprégner
C’est dans cette démarche au travers du voyage, face au réel de cette architecture que je pense avoir le mieux intégré ces éléments de réflexion, comprenant l’importance du bagage théorique et expérimental de mes trois années de licence dans l’analyse, ainsi que l’importance de la découverte de l’architecture en général et de l’évolution de mon regard sur le monde et de ma sensibilité












La nécessité d’aller sur le terrain pour comprendre le territoire
Les voyages nous permettent de comprendre le territoire sous un nouvel angle, d'apprécier la diversité architecturale et de développer un regard critique et informé sur notre environnement bâti.
Pendant mon quatrième semestre en L2, j’ai décidé de partir seul pendant une semaine pour visiter la ville de Montréal Je me suis rendu compte de l’importance encore aujourd’hui de l’exposition universelle de 1967 qui a laissé ses traces architecturales dans la ville, comme par l’intermédiaire de Habitat 67 de Moshe Safdie qui a beaucoup influencé la conception de mes logements en projet, cette année notamment.
Toujours au cours de ce même voyage, je me rappelle avoir étudié par la suite des bâtiments où j’avais eu l’occasion de me rendre, comme le Dôme Géodésique de Buckminster Fuller, qui avait été pris en exemple pendant le cours de théorie et que j’ai pu étudier en amont avant ça.
En plus des voyages personnels, ceux réalisés avec l’école m’ont donné une perspective unique sur le rapport entre l'architecture et le paysage C’est le cas du voyage en Allemagne aux côtés de Monsieur Dominique Cornaert, ou j’ai eu l’occasion de me plonger dans les territoires urbains ou plus ruraux, comme la région de la Rurh, les découvrant et m’imprégnant au fil du voyage des dynamiques qui leur étaient propre, comme le complexe industriel de Zollverein : véritable exemple de reconversion d’un ancien lieu industriel, que j’aurais l’occasion d’aborder à nouveau dans mon développement
Lors de notre voyage sur la côte belge, en second exemple, avec nos enseignantes de ce semestre : Madame Laurence Allegret et Madame Emmanuelle Sarrazin, nous devions d’abord choisir le site sur lequel nous allions implémenter un projet fictif, puis nous rendre sur le site pour en relever toutes les spécificités, par l’intermédiaire d’une analyse de sciences humaines et sociales, de topographie, du bâtis environnant et des contraintes du terrain
Dans mon cas, il s’est avéré que le terrain choisi était en lisière avec une base militaire et des zones de réserve naturelle, ce que j’ai dû prendre en compte dans ma réflexion après la visite de site, et qui fait la qualité et les contraintes du lieu que j’avais choisi en premier lieu
C’est alors l’une des premières fois à l’étranger où je faisais réellement attention à la manière dont l'architecture interagit avec le paysage environnant, comprenant depuis le site directement la potentialité de donner une harmonie ou un contraste saisissant avec mon futur projet qui allait s’inscrire dessus
Le fait d’avoir pu dégager les qualités et contraintes du site sur place en Belgique, m’a fait prendre conscience que l’analyse de la côte belge et de ses dynamiques de territoire différait sensiblement avec ce que j’aurais pu analyser en France.
Ces expériences ont enrichi ma vision de l'architecture, en me montrant comment à travers le projet et le voyage d’études, on peut s’inscrire dans un contexte étranger, utilisant le territoire singulier d’un autre pays pour en développer de nouvelles problématiques et enjeux.
La confrontation à d’autres cultures comme mécanisme d’apprentissage
CarteGuadeloupe-Crédit:Wikipédia

Photodemonécoleguadeloupéenne delaPointe desChâteaux

AquarelleduneKaz-Crédit: MartineMonchablon

VilledeSaint-François-Crédit:MairiedeSaint-François
Toîtarrachéaprèslepassaged’unetempêtetropicale Crédit:Outre-Merla1ère


Bâtianti-cyclonique-Crédit:Météo-FranceGuadeloupe
CarteCyclonique-Crédit:Météo-FranceGuadeloupe
ToursMarinaBaySandsetleLotus-Singapour



ToursMarinaBaySandsdeMosheSafdie




Un outils de contraste et d’ouverture sur le monde
La confrontation à d'autres cultures est bien plus qu'une simple exploration géographique À mon sens cela semble être un catalyseur puissant pour l'apprentissage et la compréhension de cette pluridisciplinarité de dynamiques dans un domaine aussi vaste que l'architecture.
J’ai été amené à vivre deux ans en Guadeloupe : habitant dans une case (“kaz”) et allant à l’école là-bas Même si ce territoire est français, il n’a absolument rien en commun avec la métropole Étant alors assez jeune et particulièrement soucieux de m’intégrer, ces deux années m’ont permis de mettre en contraste la vie en société que je connaissais et de m’ouvrir à d’autres dynamiques sociales.
Aujourd’hui lors de mes voyages, et lors de mes considérations architecturales : j’ai toujours le réflexe d’essayer de me projeter dans tous les paramètres du lieu où se trouve l’architecture, ou même les convictions de l’architecte pour en comprendre plus sur le caractère profond de leur œuvre.
Chaque culture semble offrir un ensemble unique de valeurs, de traditions et de défis qui influencent profondément la manière dont l'architecture est réfléchie, conçue et peut ou doit être perçue
La diversité des enjeux sociaux, économiques et environnementaux crée un terreau fertile pour des approches architecturales très variées Par exemple lors des deux années en Guadeloupe, les conditions climatiques dans cette région tropicale exigeaient des solutions architecturales différentes de celles nécessaires dans les régions tempérées : ma maison n’avait pas de fenêtre au vu de la température plutôt élevée et le toit était entièrement en tôle ondulée avec des sytèmes de fixations assez simples, de manière à ce qu’elle puisse être remplacée très facilement après le passage d’une tempête tropicale, ou d’un cyclone
Cependant, à l’inverse, il est essentiel de reconnaître aussi les pièges de la superficialité dans la conception architecturale : lors de ma très briève confrontation à des capitales plus ostentatoires comme la ville de Singapour : parfois, dans leur quête d'innovation, les architectes peuvent tomber dans le piège de la simplification excessive d’éléments culturels et la création par-dessus tout d’un bâtiment qui se veut maladroitement symbole plutôt que pertinent et en lien avec la ville, sa fonction et son environnement
C’est le cas à Singapour pour les tours Marina Bay Sands ou même le Lotus, critiqués à de maintes reprises pour une vision de l'architecture contemporaine qui aurait pu sacrifier l'authenticité culturelle au profit d’une esthétique moderne généraliste Il est possible que cette superficialité puisse conduire à une perte de connexion avec l'identité locale et contre l’homogénéisation de l'environnement bâti
En conclusion, la confrontation à d'autres cultures offre une multitude de perspectives stimulantes pour les architectes, mais nécessite une sensibilité et une compréhension approfondie des contextes culturels pour éviter les pièges de la superficialité et créer des espaces authentiques et significatifs











La possibilité de dépasser ses propres limites mentales et culturelles
J'ai eu la chance de bénéficier d'une exposition précoce à différentes cultures grâce à ma mère, qui est hôtesse de l'air. En la suivant lors de ses rotations de parfois seulement 36 heures, j'ai eu l'opportunité de voyager à travers le monde, de découvrir de nombreuses destinations et à chacune de me faire une briève idée de la ville et de son type d’architecture, ou bien même de prendre le temps de découvrir les bâtiments les plus remarquables Je pense honnêtement, sans vouloir tomber dans le cliché de “l’ouverture d’esprit”, que ses expériences m'ont permis de dépasser les frontières de ma propre culture et de développer une sensibilité contextuelle plus sincère et profonde
Dans le contexte de l'architecture, cette ouverture sur le monde m’est particulièrement précieuse, je l’ai constaté au fur et à mes années de licence, notamment en matière de projet, plus on a de références architecturales et expériences de différents territoires, plus on peut se projeter sur différents types de situations et pouvoir réfléchir. C’était le cas pour moi lors de la découverte de Sausalito, un village flottant sur la mer à quelques kilomètres de San Francisco, qui m’a fait m’intéresser au sujet de l’architecture flottante et de sa pertinence aujourd’hui par rapport au phénomène de la montée des eaux, dont j’ai fait ma préoccupation principale lors de mon quatrième semestre en L2.
Au fur et à mesure des très courts voyages, je m’efforçais de dépasser le piège de rester en surface dans les lieux touristiques et de découvrir la véritable essence des lieux que nous visitions Ainsi, en souhaitant explorer des quartiers authentiques et en étudiant l'architecture locale, je me faisais une nouvelle vision plus claire de la discipline architecturale, se voulant plus ancrée dans la vie réelle de l’habitant.
Selon moi, un exemple d'architecture à l'étranger peut parfois perdre de sa valeur si on ne le voit pas dans son contexte direct et historique La véritable essence d'un bâtiment réside souvent dans sa relation avec son environnement directe ce qu’il lui apporte. Par exemple, la Langen Fondation, bâtiment que j’ai pu découvrir par l’intermédiaire du voyage d’études en Allemagne, un musée créé sur le terrain d'une ancienne base de lancement de fusées de l’OTAN, conceptualisé par Tadao Ando comme un espace de tranquillité : en son sein comme pour ses espaces extérieurs Sa signification et son impact réel ne peuvent être pleinement appréciés que lorsque l'on comprend son contexte.
De même, certains bâtiments remarquables peuvent paraître spectaculaires dans les magazines d'architecture, mais leur véritable valeur ne peut être saisie que lorsqu'on les voit en leur cadre Je m’appuie maintenant sur la Bruder Klaus Field Chapel de Peter Zumthor, découverte au cours du même voyage, pour témoigner de ma visite de cette architecture, une fois rentré au cœur de la chapelle, la poésie de l’œuvre m’a sincèrement émerveillé. Le souvenir contemplateur que j’en garde est mêlé avec la réalisation soudaine que l’architecture pouvait être réellement un vecteur d’émotion, que l’on ne peut certainement pas retrouver à travers les pages d’un livre ou ses photos de bâtiment d’architecture
Plan daménagement paysager - Prulay n°40 - Crédit : Comptoir Immobilier





Etudecomparativedesoffresde travauxpourSous-SolCoursdeRive11
Passages des lions - Rhône 4 - Crédits : Comptoir Immobilier
Façade-ProjetlorsdustagedeComptoir Immobilier- Maisonneuven°7 Fiche cycle vie d’un bâtiment - Crédit : Comptoir Immobilier





Passages des lions - Rhône 4 - Crédits : Comptoir Immobilier
Bureau-PôleDurabilitéduComptoirimmobilier


Planappartement-Projetlorsdustagede ComptoirImmobilier- Maisonneuven°7

L’immersion contextuelle : des enjeux et des dynamiques de création uniques
Mon stage en architecture à Genève, en Suisse, a été une expérience significative qui m'a permis une véritable immersion contextuelle dans un environnement professionnel, à la fois architectural et constructif différent Même si Genève est une ville frontalière avec la France et partage la langue française, l'expérience d’y travailler a révélé des dynamiques de création uniques et de nombreuses différences quant à la manière d’aborder la construction et ses paramètres.
En Suisse, les normes et les réglementations sont plus strictes, notamment en ce qui concerne le bilan énergétique des bâtiments et la conservation du patrimoine architectural Les chantiers sont organisés avec une attention législative très (et peut-être même trop) regardantes sur les questions normatives et de sécurité, ce qui peut entraîner des coûts plus élevés, mais surtout des longueurs administratives qui bloquent énormément le chantier, et donc le travail de l’architecte
La Suisse s'est engagée à réduire ses émissions carbones conformément à l'Accord de Paris, à atteindre d'ici 2030 et 2050. Cette vision à long terme se traduit par des politiques et des pratiques qui profite de cet argument pour œuvrer dans le secteur de la construction.
Par exemple, lors de mon stage, j’ai constaté que dans le canton de Genève, sous prétexte de réduction de la consommation énergétique et des émissions de carbone de leur bâtiment, nombreux sont les propriétaires détenant des immeubles entiers qui décident, pour des motivations purement financières, de réaliser des travaux de rénovation extrême ou de surélévation à grande échelle, déformant et défigurant parfois la ville et son patrimoine au profit de construction lucrative, sans considération architecturale ou sociale
Découvrir l’envers du décor et les réalités du bâti d’un autre pays, cette expérience de stage à Genève m'a permis de comprendre la différence des enjeux et objectifs entre chaque pays. Par exemple, les enjeux environnementaux et la transition énergétique du bâti étaient particulièrement mis en avant en Suisse, au détriment souvent des créations de logements sociaux, de la considération architecturale, et de la prise en compte du ressenti des habitants au sein de la ville.
Travailler dans un contexte différent m'a également sensibilisé à de nouvelles approches et perspectives, ainsi qu’aux façons de penser divergentes d’architectes d’un autre pays, en proie à des dynamiques sociétales variant des nôtres Cette immersion contextuelle m'a enrichi en tant qu'étudiant en architecture, me donnant l’occasion de développer un esprit plus critique : sur les qualités, les discordances et les non-dits de ma future profession.
Mon ressenti et mes
expériences personnelles du voyage

AtolldeRangiroa-Crédit:PolynésieImages
ProjetsduL2-S4:“CommentgarderlaprésencehumainesurRangiroa,malgrélamontéedes eauxetsansendommagerl'écosystème?
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Chambreàlajaponaise VilledeKobe Villed’Okayama SanctuaireàUme RueàTokyoL’expérience du voyage pour se sensibiliser à des sujets impactants
Pendant ces années de licence, j’ai évidemment commencé à me façonner une identité architecturale, non pas simplement dans mes idées et mes goûts, mais surtout par le biais de mes convictions, ce qui me semble important, puis ce qui me touche tout particulièrement :
J’ai eu l’occasion de visiter l'atoll de Rangiroa en Polynésie Française, ancien lieu de vie de ma mère, et même si ce voyage n’avait au premier abord aucune vocation à réflexion architecturale. Au final, cela m’a conduit à me questionner sur l’avenir des constructions et du maintien de la population sur l’atoll, en vue d’une potentielle future montée des eaux qui ferait disparaître rapidement l’anneau corallien sous la surface de l’océan Pacifique
Sur place et en parlant avec les habitants, j'ai été confronté de manière très concrète à la gravité de la montée des eaux et à ses conséquences sur les populations insulaires. Ce voyage pourtant purement touristique au début a été une prise de conscience puissante de l'urgence climatique et de la fragilité de certains écosystèmes et modes de vie
Observer de mes propres yeux les défis auxquels sont confrontés les habitants de Rangiroa m'a profondément marqué : si bien que j’ai décidé que cela serait mon sujet pendant les cours de projets du L2-S4 : “Comment garder la présence humaine sur Rangiroa, malgré la montée des eaux et sans endommager l'écosystème ?” Je me suis essayé à donner des éléments de réponses à cette problématique durant ce semestre, abordant notamment l’architecture flottante dans le cadre de l’atoll
Mais le voyage ne se limite pas à la découverte de problématiques environnementales. Cette fois-ci durant mon premier voyage tout seul à l’étranger au Japon, j’ai pu constater de mes propres yeux les dynamiques actuelles dans les mégalopoles japonaises : notamment les enjeux de la transition urbaine en milieu urbain très dense J'ai ainsi pris conscience des défis et des opportunités uniques pour des villes comme Okayama ou Kobé qui incarnent des métropoles aux infrastructures et logements vieillissants alors que ses transports, ses afflux et son nombre d’habitants semblent continuer à se développer Je pense que ce type de problématique serait à terme une des dynamiques de développement essentielles du renouveau urbain au Japon
Au cours de mon voyage, j’ai exploré le territoire à la manière de ses habitants en empruntant les mêmes modes de transport, essentiellement ferroviaires, essayant de me rapprocher le plus du quotidien d’un Japonais pour explorer cette réalité à travers un nouveau prisme. Toutes ces réalisations et découvertes ont eu un impact significatif sur ma perception de la mégalopole japonaise, renforcé par le contraste immédiat avec l’île de Naoshima, à l’inverse très vide et contemplatif
Dans l'ensemble, ces expériences de voyage m'ont transformé en me permettant de voir le monde sous un angle différent : celui des habitants eux-mêmes, en essayant de comprendre la complexité de certaines problématiques de leur territoire et d’imaginer encore assez naïvement des perspectives d’évolution et des réponses à ces mêmes problématiques à travers mes trois années d’études en architecture.


LigneferroviaireversUno

Croquis,maquetteetaquarelleduprojetdeS5-Réhabilitation ancienneusinedetechno-chimieàIvry-sur-Seine

TrajetenbateauversNaoshima

IledeNaoshima


BenesseArtMuseum



ArrêtdetrainShinkansen-Okayama
RuhrMuseumàEssen-Crédit:RuhrMuseum
PaysagedepuislaligneferroviaireversUno



RockSculptureGarden

CroquisdeKabochadeYayoiKusama

RuinesdupasséindustrieldeNaoshima

CroquisdeTadaoAndo:relationentre sesbâtimentsetlatopographie


BenesseHouseMuseumValleyGallery



CroquisdeTadaoAndo:relationentresesbâtimentsetlereliefdelîle
Les destinations qui ont marqué sensiblement mon parcours architectural
En plus des cours et du projet, mon parcours d’étudiant en architecture a été profondément marqué par des destinations qui ont transcendé le simple cadre de lieu ou de bâtiment pour devenir des expériences sensorielles et émotionnelles enrichissantes à mes yeux
Je souhaite qualifier une des destinations qui a marqué sensiblement ma trajectoire, comme le témoigne par le nombre de fois qu’apparaît le voyage en Allemagne dans mon rapport. Je souhaite citer le Ruhr Museum à Essen, en Allemagne. La reconversion industrielle de ce musée, installé dans l'ancien puit de la mine de charbon de Zollverein, m'a profondément impressionné de par sa transformation réussie en lieu culturel et artistique.
J’ai compris à travers cet exemple les dynamiques de réhabilitation et de régénération urbaine qui m'ont inspiré à plus petite échelle pour mon propre projet de S5, portant sur une ancienne usine de techno-chimie à Ivry-sur-Seine De plus, j’ai compris l’importance dorénavant primordiale du réemploi et de la réhabilitation pour notre génération d’architectes, pour redynamiser les constructions et bâtiments en perte de leur fonction, le tout dans un monde marqué par les enjeux environnementaux
Si je m'étais précédemment attardé sur l'atoll de Rangiroa et ses enjeux environnementaux ou les thématiques du dynamisme urbain au Japon, je souhaite maintenant explorer un aspect plus intime et sensible de mon parcours architectural à travers deux exemples, dont l’île de Noashima au cœur de la mer de Seto au Japon.
Parmi toutes les destinations que j'ai eu la chance de visiter, c'est Naoshima qui a le plus profondément touché ma sensibilité architecturale Premièrement à travers tout le parcours pour y arriver en amont, par le contraste saisissant entre la ville d’Okayama et son agitation constante, puis l’arrivée sur la ville côtière d'Uno à la fois dense de bâtiment, mais aux rues désertes, avant d’embarquer en bateau vers Naoshima, découvrant une île peu urbanisée où l’on se déplace à pied sur des routes et infrastructures sans jamais croiser d’autres personnes ou véhicules
Seul face aux œuvres de nombreux artistes qui rythment le paysage et le parcourt, j’étais plongé sans cesse dans un état contemplatif : Chaque installation sur Naoshima semble être en parfaite harmonie avec son environnement, créant une atmosphère poétique et un certain dialogue avec sa végétation, ses reliefs et la mer comme ligne d’horizon.
Pour sublimer le tout, l’île isolée du tumulte des mégalopoles japonaises se munit parfois du béton brut de Tadao Ando, comme pour placer ici et là des rappels d’une urbanisation, qui cette fois laisse participer son environnement à son amplitude en tant qu’édifice, et ce jusqu’au point culminant de l’île : la Benesse house
Mon séjour sur cette île, jusqu’à l’hébergement traditionel japonais, m'a permis de me plonger pleinement dans l'essence de son l'architecture et de ressentir le lien et le dialogue avec son environnement. Naoshima représente pour moi bien plus qu'un simple lieu architectural ; c'est un espace où l'art, la nature et l'architecture se fondent harmonieusement pour créer une expérience immersive qui m’a marquée sensiblement.
Ainsi, ces destinations sont à mes yeux bien plus que des étapes sur une carte ; ce sont des moments de réflexion, d'inspiration et d'émerveillement qui ont façonné ma vision de l'architecture et nourri ma sensibilité créative

Mon désir ancré d’étudier et de travailler à l’étranger
Le voyage m’a donné comme conviction d'étudier et de travailler l’architecture à l'étranger, cela a été une motivation tout au long de mon parcours académique en architecture.
Ce besoin profond de m'immerger dans des cultures et dans des environnements différents a façonné mes expériences de voyage et a influencé mes choix éducatifs et professionnels, participant d’ailleurs à mon choix d’étudier à l’ENSA Paris Val de Seine, pour la possibilité du voyage d’études de deuxième année et dans l’espoir d’avoir éventuellement la chance de partir au Japon à travers leur partenariat en M1.
Ce même désir pour l'étranger a également été illustré par d’autres choix concrets, comme celui de réaliser mon stage en entreprise d'architecture à Genève, en Suisse Bien que Genève soit une ville frontalière avec la France, cette expérience m'a permis de découvrir de nouvelles approches et d’une vision différente de l'architecture. Cela a confirmé ma conviction que pour élargir mes horizons et enrichir ma future pratique professionnelle, je devais me confronter à des contextes culturels et professionnels variés
Cependant, ce désir n’a pas eu l’occasion de se concrétiser : cette année, j'ai dû faire face à la réalité du refus d’un départ en Erasmus à l'université de Nagoya. Malgré cette évidente déception que je porte toujours aujourd’hui, je reste évidemment conscient et compréhensif que l’ENSA attribue les places aux élèves que l’établissement juge les plus méritants
J’ai eu beaucoup de mal à accepter ce refus, car je pense que je me projetais peut-être un peu trop d’étudier à Nagoya, réfléchissant déjà aux solutions d’hébergements et à une liste de bâtiments remarquables à visiter une fois là-bas. J’ai dû faire un réel travail sur moi-même pour l’accepter et me remotiver pour aller de l’avant et rebondir à travers ce dernier semestre de licence
Malgré cet échec, ma motivation n’en reste pas moins importante, je me projette désormais dans l'idée de prendre une année sabbatique après l'obtention de mon master en architecture, pour voyager, en travaillant pour un salaire sur place Je suis aussi motivé par d’éventuels stages dans des cabinets d'architecture à l'étranger, et de continuer à apprendre et à me développer dans des futurs environnements stimulants et inspirants
En somme, la volonté d'étudier et de travailler à l'étranger est une force qui continuera de guider mes choix et mes aspirations professionnelles Je suis convaincu que cette ouverture sur le monde et cette volonté d'explorer de nouveaux horizons me seront bénéfiques pour mon développement personnel et professionnel de future architecte, peu importe si je choisis d’exercer ce métier en France ou ailleurs.
Bibliographie
Le Corbusier 2012, “Voyage d'Orient, 1910-1911 Le Corbusier”, Collection Textes Fondamentaux Modernes : La Villette.
Philippe Potié, 21 juin 2018, ”Le voyage de l'architecte – Illustré”, Editions Parenthèses.
Ed. Philip Jodidio, 16 octobre 2020, “Ando. Complete Works 1975–Today 40th”, TASCHEN
Iwanami Shoten et Kengo Kuma, 2008, “Kengo Kuma, Shizen na Kenchiku”, publication française Arléa
Tadao Ando et Tesuhiko Fukutake, 2010, “Naoshima Nature, Art, Architecture Foundation Museum” Publisher Tetsuhiko Fukutake, traduction Hatje Cantz
Élèves du groupes 7 & 9 de L2-S3 - Sous la supervision de Dominique CORNAERT et Dominique PINON, 2023, “Book de la Ruhr 2023 - Carnet de voyage : Cologne Neuss et Mechernich Essen Dusseldorf et Krefeld” .

Tuteur : Monsieur Hugues FONTENAS
Publié le 24/05/2024
Date de soutenance : 07/06/2024