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La Renaissance dans l’Italie Centrale et dans les Flandres
Salles
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La Renaissance dans l’Italie Centrale
Entre la Toscane et les Flandres Les Tarots
Au XVe siècle les villes de l’Italie Centrale se distinguent pour leur intense production artistique. Florence vantait une glorieuse tradition figurative et avait utilisé avec prudence le langage raffiné et aristocratique du dernier splendide éclat gothique. Au début du XVe siècle, avec l’ascension des Médicis, commence une extraordinaire saison de renouvellement et la ville devient le centre de rayonnement des nouveautés de la Renaissance. Une peinture d’intense luminosité s’affirme, l’espace est construit géométriquement selon les règles de la perspective et les couleurs deviennent nettes et brillantes. De nouveaux sujets et iconographies, tirés de la mythologie ou de l’histoire ancienne, enrichissent le répertoire des artistes. Cette saison exaltante atteint son apogée durant la période de Laurent le Magnifique, avec Sandro Botticelli.
Les formes et les thèmes de la Renaissance éclatent même à Sienne, mais dans la fière ville toscane le lien avec la tradition gothique, le goût pour une matière précieuse et un usage raffiné de la ligne persistent encore. Dans les Marques la cour des Montefeltro à Urbino représente l’avant-poste des recherches figuratives les plus développées, grâce au passage de Piero della Francesca : c’est le lien de contact et de confrontation entre la peinture italienne et la peinture transalpine. En Ombrie véritable carrefour de différents territoires de l’Italie Centrale, se distingue dans l’atelier de Pérugin la personnalité de Raffaello Sanzio.
Même dans les Flandres et aux Pays-Bas pendant le XVe siècle se développe une grande école de peinture, dont les principaux centres sont les florissantes villes de Bruges, de Gand, d’Anvers et de Bruxelles. Les peintres flamands se tournent vers une représentation plus proche de la réalité, car ils sont étrangers au charme pour l’antiquité classique qui séduisait cependant plusieurs artistes italiens. Grâce à l’utilisation de la nouvelle technique de la peinture à l’huile ils se montrent non seulement capables de surprenants détails optiques et d’un réalisme méticuleux, mais aussi d’une moderne iconographie sacrée, liée aux nécessités d’une nouvelle et complexe société bourgeoise.
1449-1450 environ tempera et or sur bois cm 34,7 × 29,5 collection Guglielmo Lochis, 1866
Florence 1420/1421 - Pistoia 1497
Benozzo Gozzoli (Benozzo di Lese) Vierge à l’Enfant et anges (Vierge de l’Humilité)
Benozzo Gozzoli travaille à Florence et dans plusieurs localités de l’Italie Centrale, en se distinguant surtout comme peintre de fresques. Cette œuvre appartient à la phase juvénile et elle est encore influencée des manières précieuses de Beato Angelico, son maître. L’iconographie utilisée est celle de la “Vierge de l’Humilité”, plutôt diffusée dans la peinture du XIVe et du XVe siècle. La Vierge, assise sur un coussin, serre dans ses bras l’Enfant, qui répond avec une caresse au regard affectueux de sa mère. Aux pieds de la Vierge siègent deux petits anges musiciens sur un sol de marbre, alors que derrière Elle, deux anges tiennent un rideau en brocart travaillé au fil d’or. À l’arrière-plan un jardin de lys et de roses fait allusion au thème de l’hortus conclusus, le jardin clôturé médiéval symbole de la virginité de Marie.
1470-1475 environ tempera et or sur bois cm 58,2 × 43,5 collection Giovanni Morelli, 1891

Sienne 1447 - avant 1500
Neroccio di Bartolomeo de’ Landi Vierge à l’Enfant
Élève du Vecchietta à Sienne et actif pour plusieurs années à côté de Francesco di Giorgio Martini, Neroccio De’ Landi a été un habile sculpteur sur bois et un peintre raffiné. La Vierge à l’Enfant est un témoignage exemplaire de la production de cet artiste et une image de beauté éthérée. La main de la Vierge effleure délicatement celle de l’Enfant, qui cherche sa mère du regard et les joues rougies indiquent l’émotion de la douce étreinte. Dans l’œuvre coexistent la tradition gothique de Sienne, avec sa préférence pour la couleur or, pour un dessin sinueux et pour de fines couches de couleur, à côté de la révision des nouveautés de la Renaissance florentine. La pose athlétique et l’anatomie classique de l’Enfant s’inspirent de Donatello, ainsi que le goût des détails réalistes, tels que l’ombre projetée par l’Enfant et les supports qui fixent les dalles du parapet.
1475-1480 environ tempera et or sur bois cm 52 × 39 collection Giovanni Morelli, 1891

Florence 1446-1498
Francesco Botticini Tobie et l’archange Rapha ёl
L’épisode représenté est tiré du Livre de Tobit, dans l’Ancien Testament, où l’on raconte les événements du juif Tobit et de son fils Tobie, en exil à Ninive. Sur le tableau on peut voir Tobie, accompagné de l’archange Rapha ёl, en voyage vers Ecbatane, ancienne capitale de la Média. Le jeune a dans ses mains le poisson miraculeux capturé dans le fleuve Tigre qui lui permettra, non seulement de battre le démon Asmodée et d’épouser l’aimée Sara, mais aussi de guérir son père Tobit de la cécité. À Florence l’histoire de Tobie était particulièrement populaire parmi les marchands et les voyageurs et Botticini, qui était inscrit à la Compagnie de l’Archange Rapha ёl dont le siège était dans la Basilique du Saint-Esprit, réalisa plusieurs versions de ce sujet parmi lesquelles celle-ci, destinée à la dévotion domestique. Grâce à la fluidité du dessin et à l’expression rêveuse des visages, le tableau se situe dans les années où l’artiste est influencé par la peinture de Sandro Botticelli, son camarade d’études dans l’atelier de Verrocchio.


1499-1500 environ tempera sur bois cm 83,5 × 166 collection Giovanni Morelli 1891

Florence 1445 - 1510
Sandro Botticelli (Alessandro di Mariano Filipepi) Histoire de Virginie romaine
À Florence, dans la deuxième moitié du XVe siècle, Botticelli incarne l’atmosphère très cultivée et très classique qu’on ressent autour de la famille des Médicis, surtout de Laurent le Magnifique. Le tableau de l’Académie Carrara se situe dans la dernière phase de son parcours. À l’origine, ce tableau était utilisé comme tête de lit et il était inséré dans un placage en bois ou en cuir qui recouvrait les murs d’une pièce privée. Ici le peintre représente un épisode de l’histoire romaine, narré par Tite-Live. Botticelli décide de peindre les différents moments des événements qui célèbrent les vertus féminines de l’honneur et de la chasteté défendues au prix de la vie. Le décemvir Appio Claudio, épris de la jeune Virginie, déjà promise au tribun Lucio Icilio, charge Marco Claudio de l’enlever, en simulant qu’il s’agisse d’une de ses esclaves enfuie. Défendue par les présents, Virginie est emmenée devant le tribunal, présidé par Appio, qui la déclare esclave de Marco. Le père, Lucio Virginio, la frappe à mort pour éviter que son honneur soit taché. La narration se termine par le chagrin de la famille et par l’expulsion des décemvirs de Rome.
1502-1503 environ tempera et huile sur bois cm 45,5 × 36 collection Guglielmo Lochis, 1866

Urbin 1483 - Rome 1520
Raffaello Sanzio (Raphaël) Saint Sébastien
Raphaël, nom francisé de Raffaello Sanzio, est originaire de Urbin et, à ses débuts, il est actif dans l’atelier du Pérugin, plus tard il travaille à Sienne, probablement comme collaborateur de Pinturicchio, et puis il s’affirme à Florence au tout début du XVIe siècle. Le Saint Sébastien a été peint quand Raphaël n’avait pas encore vingt ans. Le jeune peintre s’impose déjà grâce à une extraordinaire finesse exécutive et pour la capacité presque miraculeuse de nuancer la lumière qui enveloppe la figure dans une atmosphère douce et rêveuse. L’œuvre a été réalisée pour la dévotion personnelle d’un commettant raffiné et cela explique la raison pour laquelle un saint comme Sébastien, qui est généralement associé à la pitié populaire, soit représenté par le peintre en habits aristocratiques, alors qu’il tient dans sa main une flèche, symbole du martyre, au lieu d’être nu et transpercé par des flèches, comme l’iconographie traditionnelle le prévoyait.

1405 environ tempera et or sur bois cm 33 × 23 collection Giovanni Morelli 1891

Florence, documenté de 1391 à 1422
Lorenzo Monaco (Piero di Giovanni) Vir Dolorum (Christ aux plaies)
Lorenzo Monaco, moine du couvent de Sainte Marie des Anges, se situe parmi les principaux interprètes du style gothique international, à Florence, au début des premières années du XVe siècle. Le langage raffiné, fleuri dans les cours européennes, est développé par l’artiste dans un sens de dévotion par des formules d’une élégance abstraite. Le tableau de l’Académie Carrara représente le thème populaire de Christ aux plaies. Le Christ mort sort du sépulcre, la tête inclinée et les mains croisées sur sa poitrine, alors que au fond se dresse la Croix. L’image présente une radicale simplicité de structure et s’inspire encore des modèles iconographiques de la fin du XIIIe siècle. Cet archaïsme recherché émerge dans la simplification des anatomies et du visage, dans l’exécution calligraphique des cheveux, ce qui souligne l’aspect fortement dévot du tableau.
1480-1485 huile sur bois cm 40,2 × 33 collection Giacomo Carrara, 1796

Bruges, seconde moitié du XVe siècle
Maître de la Légende de Sainte Ursule Portrait d’un jeune homme
Ce portrait est attribué à un peintre anonyme actif à Bruges à la fin du XVe siècle, à qui on a donné le nom conventionnel de « maître de la légende de Sainte Ursule ». L’œuvre la plus importante de cet artiste est en effet un grand autel représentant des histoires de la Sainte conservé dans le Groeningemuseum de Bruges. Le jeune est représenté en demi-buste, la tête de troisquarts devant un paravent en velours foncé. Derrière lui on peut remarquer un paysage avec une ville s’ouvrant sur un plan d’eau et animée par des figures de chevaliers. L’organisation générale du tableau et le réalisme analytique avec lesquels sont rendus les détails du visage et du paysage s’inspirent des œuvres de Hans Memling, un grand artiste d’origine allemande qui avait un florissant atelier à Bruges.

1455-1460 environ ; 1485-1490 environ tempera sur papier avec de l’argent et de l’or cm 17,6 × 8,7 (chaque carte) don de Francesco Baglioni, 1900
Crémone, documenté de 1444 à 1477
Crémone, documenté de 1450 à 1482
Crémone, documenté de 1480 à 1516
Bonifacio Bembo et Ambrogio Bembo ; Antonio Cicognara Vingt-six cartes de tarot
Un jeu de cartes dont on ne connaît pas bien l’origine, les tarots sont diffusés dans les cours de l’Italie du Nord au XVe siècle. Un jeu est composé de 56 cartes divisées en 4 séries de couleurs (deniers, bâtons, coupes et épées) et de 22 cartes illustrées avec des images humaines et d’animaux appelées « Triomphes » ayant une signification symbolique. Le jeu Colleoni-Baglioni, aujourd’hui divisé entre l’Académie Carrara, qui a 26 cartes, le Pierpont Morgan Library de New York et une collection privée, c’est l’un des jeux les plus complets parvenus jusqu’à nos jours. Le commanditaire fut probablement Francesco Sforza, duc de Milan de 1450 jusqu’en 1466. L’exécution est principalement de Bonifacio Bembo, l’un des principaux représentants du gothique international en Lombardie, probablement avec la collaboration de son frère Ambrogio, alors que le peintre de Crémone Antonio Cicognara intervint dans un second temps pour intégrer l’ensemble avec les trois cartes perdues, car disparues ou abîmées.