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Guy Goffette ou l’appel des lisières
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D I T O R I A L Je dois l’avouer : je suis un nouveau lecteur de Guy Goffette. Je l’ai découvert avec Auden ou l’Œil de la baleine paru dans la si belle collection “L’Un L’Autre “(Gallimard) dirigée par J.B Pontalis. Depuis, ma lecture à rebours de son œuvre m’enchante et me touche. Le rôle que Guy Goffette confie à la poésie, les thèmes qu’il aborde, son travail d’écriture, ses “dilectures “ font de lui un poète contemporain majeur. Guy Goffette aborde dans son œuvre des thèmes aussi partagés que l’enfance et son image édénique, la nostalgie, la difficulté d’aimer, la poésie des lieux… autant de sillons que ce dossier creusera en invitant les lecteurs à s’interroger sur le rôle de l’écriture, de la poésie face à l’angoisse de l’enfance perdue, face à l’avancée inéluctable du temps, face à l’immensité des rêves… Mais parler d’un poète sans faire entendre son style (qu’aujourd’nui mon oreille peut désormais reconnaître entre mille) serait vain. Je souhaite que chaque lecteur de ce dossier rencontre intimement la parole de Guy Goffette. Et qu’il puisse à son tour entendre l’appel des lisières.
Sébastien Le Benoist
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O M M A I R E p. 1
: Éditorial
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: Ouverture poétique en forme d’hommage par Jacques Réda
p. p. p. p. p.
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Guy Goffette, un portrait sensible. Entretien intervew avec Sébastien Le Benoist. Autoportrait par Guy Goffette Poèmes inédits par Guy Goffette Frontières, lisières par Gilles Ortlieb
p. 18 à 23 : Guy Goffette et l’expression lyrique par Jean-Michel Maulpoix, Joël Bastard, Richard Blin. p. 24 à 27 : Guy Goffette, une déferlante poétique dans le roman, Le Haut-Mal, à propos d’Un été autour du cou par Caroline Lamarche p. 28 à 29: Textes inédits de Guy Goffette p. 30 à 33 : Bibliographie des auteurs p. 34 à 35 : Dossiers Initiales p. 36
: Remerciements, Ours
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UVERTURE POÉTIQUE EN FORME D’HOMMAGE
Ô Poètes, cessez de braire, De pleurnicher sur votre sort. Voici qu’en effet UN LIBRAIRE Veut favoriser votre essor, Offrez-vous en belle hécatombe Digne des dons des dieux distraits Puisque son choix inspiré tombe Sur celui dont les purs attraits Rendraient votre muse jalouse : Qu’elle reprenne le trimard Et cherche refuge à Mulhouse, Sélestat, Saverne, Colmar, Désormais qu’à Chicago faite*, Et sans trompette ni tambour, Ta gloire, mon ami GOFFETTE, Va rayonner jusqu’à Strasbourg !
Photo gracieusement transmise par Guy Goffette
Que du moins il nous reste celle D’avoir pu dérober ici A son soleil une étincelle Dissipant notre ombre. Merci. Jacques Réda
* Une traduction des poèmes de Goffette y est en effet annoncée. Biographie de Jacques Réda Naît à Lunéville en 1929. Il a dirigé la Nouvelle Revue Française de 1987 à 1996. Poète fameux, il est également l’auteur de récits en prose et grand amateur de musique, spécialement de jazz (Autobiographie du jazz, L'Improviste : une lecture du jazz). Jacques Réda, Lorrain de 70 ans, parcourt les lointains et les banlieues en train ou à pied. Éminemment sensible aux odeurs et aux ambiances, il décrit un monde de la petite vitesse, mû par les incidents les plus humbles. Il regarde Paris en ses recoins les plus secrets, les plus déserts (Les Ruines de Paris, Hors les murs, Châteaux des courants d'air...). Réda est l’inventeur du vers de quatorze pieds, qu’il faut, dit-il, lire à haute voix, qu’il faut parler.
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] Entretien avec Guy Goffette par Sébastien Le Benoist
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N PORTRAIT SENSIBLE Entretien avec Guy Goffette
par Sébastien Le Benoist
] Poèmes inédits de Guy Goffette
] Frontières, lisières de Gilles Ortlieb
] Un autoportrait
Guy Goffette, vous vous définissez volontiers comme “frontalier”. Comment une situation géographique peut-elle influencer un caractère ? L’importance des premières années sur la formation du caractère n’est plus à démontrer, celle du milieu de vie et de la géographie non plus. La ville n’est pas la campagne, ni la mer la montagne, et les opposés sont infinis. De même, on ne passe pas son enfance et son adolescence sur une frontière (et, dans mon cas, c’est presque sur deux frontières qu’il faudrait dire : la française et la luxembourgeoise) comme on les passe au centre d’un pays. C’est un peu comme vivre près d’une fenêtre plutôt qu’au milieu de la pièce. Le dehors dans les yeux prend tout de suite plus de place que le dedans. J’ai eu assez tôt le sentiment d’être en porte-à-faux, que l’extérieur me requérait comme l’appel du large, que “la vraie vie”, déjà, était “ailleurs”, et je n’ai plus eu de cesse que de sortir, de courir les bois et les prés. La frontière, dans mon enfance, était à portée de main, elle coïncidait avec l’orée du bois, sauvage et mystérieuse. J’ai donc su très tôt que, passé la lisière, j’étais de l’autre côté, ailleurs, en France. Par la route, la frontière perdait sa magie. Officielle, elle était gardée à cette époque. Le goût de la liberté, le plaisir de la transgression et toutes les sensations, toutes les images qui leur sont liées ont assurément agi sur mon caractère. Rien d’étonnant à ce que je sois de maraudeur devenu contrebandier, puis passeur jusque dans mes différents “métiers”: enseignant, libraire, écrivain, éditeur, avec le goût de l’autre, de l’inconnu, du défi, du risque, etc. Vous n'avez de cesse de prôner le déplacement, le nomadisme. Vous griffez, comme Rimbaud, les “assis “satisfaits. Et pourtant, vous n'êtes pas ce qu'on appelle aujourd'hui un “écrivainvoyageur”. Exposez-nous votre conception du nomadisme, du voyage. Nomadisme est un bien grand mot, mais que je prends à mon compte pour désigner cette facilité avec laquelle je change de lieu selon les exigences de ma vie professionnelle ou de ma vie amoureuse. À chaque fois, j’ai dû emporter ma “maison”sur le dos, c’est-à-dire quelques milliers de livres et mes manuscrits, sans idée de retour. Le nomadisme est pour moi un état d’esprit, avant tout, une manière de considérer l’existence. Étant de passage sur cette terre, il me semble qu’il n’est pas de meilleure façon de l’habiter que de passer, et, ce faisant, d’épouser son mouvement. De là ce sentiment d’immobilité, de détachement et de paix qu’on peut en retirer, un peu comme quand on lit, passant d’une ligne à l’autre, d’une page à l’autre, sans bouger. S’installer, au contraire, porte en soi l’idée d’arrêt, de fixation et de mort, et c’est le temps qui passe tout à coup, la terre qui tourne, l’attachement aux choses et la désespérance. Cette maladie-là, je l’ai appelée “nomadie”. Le nomadisme est un mouvement de la pensée qui n’implique pas nécessairement le déplacement physique. C’est en somme vivre le présent au présent avec passion, parce que le présent est la seule réalité vivante, la seule réalité à vivre pour être pleinement. Quant à voyager pour voyager, ça ne présente pour moi aucun intérêt. J’ai horreur du tourisme et de l’exotisme. Mais aller au gré du vent, flâner le nez en l’air, marcher sans but défini, tant pis pour les clichés, voilà ce que j’entends par voyager.
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“Être nomade pour moi, c'est vivre au présent”, dites-vous. Votre rapport au présent se rapproche-t-il du “carpe diem, carpe horam”d'Horace ? À vrai dire, je n’aime pas beaucoup cette maxime qui comporte une idée d’occasion à saisir, de profit à faire. Pour moi, être présent, c’est d’abord “être”plutôt qu’avoir. Par présent, j’entends aussi bien le don que l’ouverture et que l’attention. Être présent au présent, c’est donc être attentif à ce présent éphémère et continu à la fois, c’est être pleinement soi dans ce mouvement-là, être car exister ne suffit pas. Il y a tant de gens dans les rues qui existent, mais qui ne sont pas. Être présent au présent suffit, dites-vous, pour ÊTRE pleinement. Pourtant, le passé taraude le poète au travers du thème de l'enfance. Que signifie ce retour à l'enfance ? Le présent, comme je l’entends, n’est pas ce qui existe et meurt, mais ce qui est, passe et ne passe pas, et donne son mouvement à la vie, quand le mot “demain”n’est qu’un mot, et le futur n’est pas. Le passé, en revanche, est comme un présent au repos, ou qui dort. De temps à autre, dans mes traversées du désert, il se manifeste et je le reçois, je l’écoute. Il m’arrive même de le mettre dans un roman. Ce n’est donc pas de retour à l’enfance qu’il s’agit, mais d’un réveil soudain de l’enfance en moi. Je ne sais plus qui disait que chaque homme vit et meurt de son enfance. L’enfance est le fonds inépuisable de l’homme et les écrivains ne se font pas faute d’y puiser. Le thème de l'enfance est développé principalement dans Un été autour du cou, votre premier roman, et Une enfance lingère. Ce recours au roman est-il directement lié au sujet traité ?
Soyons un peu schizophrène. Que pense Guy Goffette-poète du Guy Goffette-romancier ? Premièrement, les choses ne sont pas comparables. La poésie est, pour moi, d’un ordre supérieur. Ses exigences ne sont pas celles du roman. Comme je n’ai déjà que trop tendance à me flageller et que peu de mes écrits trouvent grâce à mes yeux, j’essaierai donc d’être clément : je crois avoir fait ce que j’ai pu dans chaque “genre”. Disons quand même que je préfère, en gros, le poète Goffette dont j’ose espérer que quelques vers resteront, au romancier que je suis par intermittence et par défaut. Il est vrai que le public m’offre ce lot de consolation de trouver beaucoup de poésie dans l’écriture de ces essais romanesques. On ne se refait pas. Une place importante de votre œuvre poétique est réservée à vos “dilectures”. Éclairez-nous sur ce terme qui ne peut se résumer à un simple exercice d'admiration. J’ai créé ce mot à partir de “lecture”et de “dilection”. C’est un mot-valise en somme, que j’applique à tous les poèmes qui m’ont été plus ou moins inspirés par des artistes auxquels je rends hommage en quelque sorte. La composition d’un recueil de poèmes me prenant généralement plusieurs années, je me suis trouvé des compagnons de solitude parmi les poètes que je découvrais ou redécouvrais, des peintres ou des musiciens. Certaines œuvres ont eu, sur moi, un effet tellement stimulant qu’une réponse poétique personnelle et personnalisée ou “dilecture”s’est imposée en retour. Rimbaud et Verlaine planent au-dessus de votre œuvre. Que vous ont-ils respectivement apporté ? Que vous apportent-ils aujourd'hui ?
Je crois qu’à y bien regarder, l’enfance est partout dans mes poèmes, mais c’est vrai, j’ai connu de ces passages à vide assez longs où, comme frappé d’insensibilité, je me suis trouvé tout à fait incapable d’écrire un poème. Car je fais partie de ceux qui croient, avec Michaux, que “la poésie est un don de la nature, une grâce”, et qui professent comme lui que “le seul fait de se mettre à sa table avec la volonté d’écrire un poème suffit à le tuer”; que la poésie est “celle qui vient à pas légers”, comme dit Réda, qui vient quand elle veut et s’en va comme elle est venue. Tant pis pour le poète inattentif ou occupé à autre chose. J’ai besoin d’inspiration pour écrire, or mes “muses”sont souvent en vacances, trop souvent à mon gré. La fabrication m’apparaît comme une imposture. Je n’écris pas non plus à partir d’une idée, mais à partir d’un vers qui m’est donné, qui s’impose, et autour duquel le poème se fait, souvent malgré moi. Car j’écris ce que j’ignore, ce qui est au plus près de moi et qui m’échappe. Alors, quoi faire dans ce désert de la poésie, quand le besoin d’écrire reste pressant ? De la prose, comme monsieur Jourdain ! J’ai commencé par des sortes de biographies qui mettaient en relation un écrivain et son modèle. Il y a eu Verlaine, Bonnard, puis Auden. Au départ, Un été autour du cou rassemblait quelques souvenirs d’enfance plus ou moins réécrits, réinventés autour d’une phrase lancinante dont je ne parvenais pas à me soulager : “Si seulement, elle n’avait pas fait ça”. Tout l’imaginaire est sorti de ce “elle”que j’ai créé avec des pièces rapportées. Certains ayant trouvé à ce livre quelque chose de scandaleux, j’ai rempilé, par réaction, dans le roman, avec Une enfance lingère, en mettant l’accent sur le côté naïf de mon personnage et en soulignant, par un style épuré, la légèreté de cette enfance à demi fictive.
Dans mon adolescence passée dans plusieurs internats religieux, c’est Rimbaud, et non pas Verlaine, qui m’a bouleversé et qui est devenu ma référence, le Rimbaud du “Bateau ivre”d’abord, puis celui d’Une saison en enfer et des Illuminations. C’est encore Rimbaud que je place aujourd’hui au sommet, près d’Homère et presque en dehors de la littérature. Quant à Verlaine, je ne m’y suis pas intéressé avant l’âge de 45 ans. Ce fut pour moi une révélation. Aussi forte que l’avait été celle de Rimbaud dans ma jeunesse. J’imagine que chacun a pris sa place dans ma vie au bon moment, le révolté Rimbaud dans l’enfermement du collège et Verlaine dans l’exil et la mélancolie de l’âge mûr. Borgès considérait Verlaine comme “le poète français par excellence”, Bonnefoy lui préfère Rimbaud. Pour moi, le génie de l’un ne s’oppose pas au génie de l’autre, ils se complètent s’ils ne se répondent pas. La “musicalité”de Verlaine, je la compare à une ligne d’horizon en marche dans le brouillard, tandis que la “voix”de Rimbaud est une flèche, une lame, un couteau lancés à la face du soleil aveuglant. Le premier appartient à l’horizontale, le second à la verticale. Naturellement, il faudrait nuancer tout cela. Ce qu’ils m’apportent nous entraînerait trop loin. Disons que Rimbaud me soulève et que Verlaine m’entraîne. Avec mon Verlaine d’ardoise et de pluie et L’Autre Verlaine qui va paraître, j’ai voulu, en quelque sorte, redonner sa place au “Pauvre Lélian”, le sortir de l’ombre écrasante du “Passant considérable”auquel tant de livres sont consacrés.
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] Un autoportrait
Photo gracieusement transmise par Guy Goffette
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Le frontalier que je suis est un animal bizarre, du genre bipède à poil rare. Qu’il arpente ses collines ou le trottoir des villes, on le reconnaît à son allure : le front haut et tourné vers les nues, il marche à grandes enjambées sans jamais se retourner comme s’il lui fallait à tout prix passer la frontière avant la nuit. Quelle frontière ? Celle qui a tôt fait de s’installer en lui s’il s’arrête. Aussi ne tient-il pas en place. Toujours entre deux gares, deux fleuves, ne connaissant ni la satisfaction béate des “assis”, ni l’ennui des repus. Toujours de passage et ne s’attardant que pour le partage amoureux et l’amitié. Sans regret sinon sans remords quand il se remet en route, il est fidèle et revient sans cesse. Et puis il écrit beaucoup de cartes postales qu’il oublie d’envoyer et qui, rassemblées, finissent par faire des livres qui continueront peut-être après lui à passer les frontières. 2001 Guy Goffette
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La plage Tous ces corps lisses et fermes, ces seins de gloire, ces cuirasses de chair en montre sur l’horizon comme dans l’infâme boucherie.
] Textes inédits de Guy Goffette
du vieil Alep - et les mouches alentour bourdonnaient d’aise, allant, venant, portant le sel des marais, l’extrême onction du ciel - tous mourront, tous, et nous-mêmes, et nos regards affolés d’avoir perdu pour un peu de sable le fil de la mer comme cette étoile, enfants, qui nous tenait la main pour traverser la nuit.
Lettre à mon père Un jour mon père quand je serai grand je t’engendrerai Je t'offrirai des ailes une mémoire habitable avec tous les secrets de l’amour et comment vivre de nous je te donnerai la combinaison du coffre de l'enfance et le chiffre de la mer que tu n'as jamais traversée. Je te donnerai la barbe du bon Dieu et un grand tourbillon de voyelles pour effrayer tes anges casaniers
Les pavots
Photo gracieusement transmise par Guy Goffette
et te mériter un petit paradis perdu près de ma source
Poète avec ce cœur qui ne va pas à la ligne tu triches dans la grimpette et t’accroches les ailes aux lacets furieux des collines qui versent des poèmes de colza frappés à contre rime par d'ivres moissonneurs dansant le ciel à cru sur leurs machines. Puis tu rentres sans voix les yeux brûlants d’avoir pour rien perdu comme un touriste la promesse des pas. Poète, la belle jambe ! à présent que le cœur tire un trait sur le jour qui décroche ses lampes et livre au plâtre nu des cuisines refroidies l’âcre odeur des pavots jetés sous un livre en passant.
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Biographie de Guy Goffette Naît à Jamoigne en 1947. Guy Goffette est l'aîné de quatre enfants d'une famille ouvrière. Durant son enfance campagnarde, il a regardé, observé la nature et les gens qui composent le monde rural : tous ses recueils de poèmes l'attestent. À l'école normale libre d'Arlon, il est l'élève de Vital Lahaye (alors professeur dans cet établissement), remarquable poète luimême, esprit libre, nourri des penseurs marxistes et amoureux de littérature. Les paroles magistrales tombent sur un terrain particulièrement réceptif et le fécondent rapidement. Sa formation d'instituteur semble tracer devant lui une carrière professionnelle sans incidents. De fait, il enseigne à Harnoncourt (commune de Rouvroy), à la pointe méridionale de la Belgique, où il a construit sa maison aux marges du village, à flanc d'une colline à pente douce derrière laquelle se cache la France, tandis que devant lui se déploie un vaste paysage de bois et de verdure. Dès 1969, Guy Goffette écrit nombre de poèmes qui seront repris dans Quotidien rouge, son premier recueil. Guy Goffette continue d'écrire des vers, maintenant que l'impulsion est donnée, qu'il se voit publié dans de nombreuses revues et qu'il est entré en relation avec des “confrères “ de renom ou influents. Il se lance un temps dans l'édition. De 1980 à 1987, avec d'autres poètes, il publie la revue Triangle (12 numéros) dont il est la cheville ouvrière ; en outre, de 1983 à 1987, il dirige les éditions de l'Apprentypographe (mot forgé pour la circonstance), qui offrent, en un nombre réduit d'exemplaires et sur beau papier, de petits livres composés par lui à la main, sur la couverture desquels on trouve notamment les noms d'Umberto Saba et de Michel Butor. Un travail absorbant, tout de méticulosité et de passion, qui dit bien où sont ses amours. Néanmoins, le temps consacré à cette revue et à ces livres “ mange “ celui qu'il pourrait consacrer à écrire : la double expérience se termine en 1987. Il abandonne l'enseignement. Un temps libraire d'occasion, il finit par s'évader. Habitant tour à tour Charleville-Mézières (ô Rimbaud), Limoges, il est actuellement domicilié à Paris. Il voyage également : Yougoslavie, Québec, Roumanie, notamment. Il devient membre du comité de lecture des éditions Gallimard, où il dirige les collections ” Enfance en poésie” et ” Folio Junior en Poésie ” . Tout ce qui retient ou séduit Guy Goffette l'exalte et le met dans un grand enthousiasme : les poèmes qu'il écrit ou dont il rêve déjà, les poètes qu'il lit, les textes qu'il choisissait jadis d'imprimer, les voyages qu'il fait, les êtres, hommes ou femmes, qu'il rencontre. Car c'est assurément un passionné, un tourmenté aussi, qui vibre, crée, vit intensément et se donne à chaque fois tout entier à ce qu'il fait.
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] Frontières, lisières par Gilles Ortlieb Parmi les rencontres que l’on dirait bien, après coup, avoir été téléguidées, celle avec Guy Goffette le fut par l’entremise d’un ami commun au moins autant que par le jeu des circonstances géographiques, personnelles, pas toujours déchiffrables, qui amenèrent à partager le quotidien d’un pays-timbre collé entre la France, la Belgique et l’Allemagne, où les hivers se terminent à contrecœur, où le peuple des banques porte uniformément cravate, et les fonctionnaires européens le masque des inaccomplissements de jour en jour reconduits. Après l’équivalent, compté en mois, du quart d’heure de politesse laissé à l’hôte dont on a reçu l’invitation, il y eut soudain, de l’autre côté de la frontière – dans le monde réel, donc – la Gaume, région qui doit plus ou moins coïncider avec ce qu’on appelle la Lorraine belge, avec ses toponymes désarmants (Bleid, Moyen, Les Bulles ou, plus loin, Mon Idée, Petitvoir, Blanche Oreille, Lessive...), l’affairement discret de ses campagnes, ses tribus de corvidés assaillant les clochers, et, coincé entre une colline et les volutes prégnantes, au chou fermenté, d’une usine à papier, le village d’Harnoncourt. Celui qui en était alors le maître d’école habitait là, avec sa famille, une maison qu’il avait à peu construite de ses mains, sous le regard multiple et magnanime de troupeaux de vaches que leur désœuvrement semblait occuper à plein temps. Dans cette maison, une pièce murée par les livres (parmi lesquels nombre d’affections communes) et encombrée de brouillons, de paperolles, de brins de tabac et de pochettes de disques, d’amorces de poèmes et d’écrits en cours, à portée de voix des autres occupants – et à quel-
Et tu finis par ranger le livre, là-haut, À sa place exacte, ce petit creux d'ombre et d'oubli Comme le coin de terre qui te revient. Tu reviens toi aussi À ta place, devant la fenêtre, la table, ce carré de neige que nul n'a encore forcé et qui va dans tous les sens comme ta vie parmi les mots, les morts.
ques pas d’une cuisine dont l’éloge devait, déjà, être en chantier. Dans le garage, au soussol, une presse d’un modèle indémodablement ancien, flanquée de toute la mitraille des polices, bas de casse et cadratins, et d’où sortaient parfois, composés avec l’opiniâtreté qu’il faut pour inverser la déclivité naturelle des jours, quelques poèmes de Paul de Roux ou Umberto Saba. L'hiver peut bien bleuir jusqu'au marbre la chair des alphabets l'apprentypographe n'a pas peur l'apprentypographe n'a pas froid il tient l'été serré entre deux doigts
Puis l’homme a pris du champ avec ses champs, ses absences sont devenues plus longues, ses retours irréguliers, les livres et poèmes rapportés de ses voyages (Le pêcheur d’eau, Partance et autres lieux, Un manteau de fortune, et jusqu'à L’Adieu aux lisières, en 2007) venant chaque fois relancer, sur des tempos divers, la très ancienne oscillation : partir, revenir – comme l’une des façons de rester, au bout du compte, le moins infidèle à l’arythmie chronique, en soi, du monde. Défilent les paysages, les questionnements, les visages, un peu d’or et la boue, les certitudes et le doute, l’effroi parfois et même la rage, puis le retrait et le consentement, à défaut de contentement. Et l’on ne peut s’empêcher de penser que l’établi mental est demeuré là-bas, fiché, dans l’engrenage des collines et des ardoises, attendant son heure – et les visites du façonnier prodigue.
Les recueils de cette époque (Eloge pour une cuisine de province, La vie promise, entre autres) disent assez combien celle-ci, malgré des pesanteurs diverses – ou à cause d’elles : vouloir les alléger par un sonnet, n’était-ce pas, déjà, s’en affranchir ? – fut féconde, aux aguets, ouverte à autrui et accueillante, par là, à soi-même. Je songe aux « dilectures » scandant alors le sommaire des mois et des soirées – mot inventé (et pratique constante chez Guy) pour désigner les passerelles intimes ou points de passage obligés entre des aînés considérables (Auden, Hölderlin, Leopardi, Mandelstam, Pound, Frénaud, Cavafy), certaines compagnies fraternelles (Pavese, Cingria, Perros, Thomas, Pessoa) et le lecteur inconnu. Entre les uns et l’autre, l’auteur, à mi-chemin, aura aussi beaucoup appris de et sur lui. Avec le recul – de la frontière, toujours, mais aussi, entre-temps, des années – il apparaît que si la matrice, évidemment, préexistait, c’est à cette époque que son bon usage en aura, sans doute, été mis à l’épreuve.
Songer à partir, disait-il, et c'était encore sous les mots du poème comme une barque : que de si petites vagues – rêves, souvenirs – aient toujours raison de nos plus fiers élans, de nos désirs d'échapper au reflux. Personne, sinon celui qui parle de partir et cherche encore un endroit pour rester.
Biographie de Gilles Ortlieb Naît au Maroc en 1953, où il a passé une partie de son enfance. Ses premiers textes ont été publiés dans la NRF en 1977. Il a exercé des métiers divers et effectué de nombreux voyages avant de se fixer en 1986 à Luxembourg, où il travaille pour les services de traduction de l’Union européenne. Récits, poèmes, notes de carnets, études consacrées à des écrivains aimés ou traductions d’auteurs choisis : autant de façons de tourner ”autour du pot” – dans l’idée de parvenir peut-être, un jour, à préciser son contenu, de savoir ce qu’il y a dedans, au juste.
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] La vie commune
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UY GOFFETTE OU L’ E X P R E S S I O N L Y R I Q U E
] La vie commune
de Jean-Michel Maulpoix
] Ce qui reste en souffrance de Richard Blin
] Pour Guy Goffette de Joël Bastard
de Jean-Michel Maulpoix Il est peu d’œuvres poétiques contemporaines qui invitent autant que celle de Guy Goffette à poser radicalement la question de l’expression lyrique. Tous les ingrédients que la tradition répète à loisir, en effet, sont là : expression du sentiment, aspiration à l’idéal, mélancolie, déploration du temps passé ou perdu, primauté de la voix et valorisation des ressources musicales du langage… Or, nous sentons bien que chacun de ces motifs est trop stéréotypé ou trop vague pour rendre compte des subtils enjeux de cette écriture. Pour y voir un peu clair, il faut aller plus loin : chercher vraiment à entendre ce que la poésie réclame et ce pourquoi elle porte plainte. Il convient d’observer tout d’abord que la parole poétique de Goffette entre plus directement et vivement dans l’intime que toute autre. Elle ne l’exprime pas, elle le traque, le débusque, le poursuit parmi ses contradictions et ses jeux de masques, ses leurres, ses faux-semblants, ses bonnes et ses mauvaises consciences… Elle interpelle, questionne, insiste, malmène ; elle tutoie et rudoie, elle parle du ”je” comme d’un autre ; elle y met la plume comme on y met le fer, avec l’espoir qu’il accouche d’une vérité. Cette vérité concerne moins le poète que son lecteur dont la figure se trouve curieusement prise au beau milieu de cette espèce d’intime scène de ménage dont le sujet lyrique est le théâtre. C’est de la vie commune, dans les deux sens du terme, qu’il est ici question… Du sort de tous et de chacun tel qu’il se connaît décousu et tel qu’il aspire à s’ajointer. La poésie lyrique regarde l’existence dans l’angle du sentiment et demande : qu’est-ce que la vie d’un homme, avec ses ”amours de bric et de broc, toujours plus ou moins contrariées” ? Ainsi donne-t-elle à entendre de combien de lignes de fuite, de bosses et de creux, une existence humaine est faite, ce qu’elle suppose de prétentions éconduites et d’espérances déçues. Si le Temps ainsi presse sur l’âme et la fait gémir dans le noir, si l’avenir jamais ne tient ses promesses, c’est que nous sommes travaillés d’étranges désirs, peu cohérents, mal explicables, et qui nous conduisent si souvent à trahir l’amour même que nous aurions bien mauvaise grâce à déplorer qu’il nous manque ! À travers sa fièvre de comparaisons et de métaphores, l’écriture lyrique de Guy Goffette semble à la recherche d’une image, d’une formule ou d’une clé, qui la délivrerait enfin de son mal en le nommant une fois pour toutes… Mais un tel salut ne vient pas. Les mots ne sont que de l’herbe sèche que l’on arrache, ou des poignées de sable que l’on jette au vent. L’écriture ne peut que ”remâcher” indéfiniment ses larmes. En vers ou en prose, elle est contrainte de déchirer et repriser les mêmes phrases tristes et coupables. Telle est la punition du poète-Pénélope qui attend en vain le retour du sens et de la pureté perdue ! La poésie de Guy Goffette diagnostique cruellement l’incurable maladie dont souffre la vie commune. Nous autres, frères humains, sommes un bien curieux mélange de liens et de coupures ! Comme la poésie même en ses filages et ses césures... Tout poème est un ”manteau de fortune ”, un canevas de fuites et d’attaches. Partance : tel pourrait être, en définitive, sous la plume de Goffette, le mot-clé du mal-être. Comme on le dit d’une vieille barque accrochée à la rive, que le courant aspire, et qui tire en vain sur sa corde… Biographie de Jean-Michel Maulpoix (www.maulpoix.net) Naît à Montbéliard en 1952. Jean-Michel Maulpoix est l'auteur d'ouvrages poétiques. Il a également fait paraître des études critiques sur Henri Michaux, Jacques Réda et René Char, ainsi que des essais généraux de poétique. Son écriture, où dialoguent sans cesse prose et poésie, se réclame volontiers d'un ”lyrisme critique”. Jean-Michel Maulpoix dirige la revue trimestrielle de littérature et de critique Le Nouveau Recueil (Éd. Champ Vallon). Il enseigne la poésie moderne à l'université Paris X-Nanterre où il anime également une équipe de recherches intitulée ”Observatoire de la poésie contemporaine”.
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embarquer avec les compagnons du silence et les muses.
] Ce qui reste en
souffrance dans le silence des nues de Richard Blin Parce qu’elle suit nos chemins d’infortune sous la dictée fatale du temps, la poésie de Guy Goffette est de celles qui embrassent la nuit à pleine bouche, savent la soie changeante des sentiments et l’orfèvrerie rugueuse des imperfections du vivre. Une poésie flambée au blues et à savourer à l’heure la plus écarlate du soir, quand revient l’éternelle agonie du soleil et que la mélancolie se cherche visage. L’or du fado, la lente ivresse des chemins ”sous la paupière basse de l’horizon”, la rouille des jours perdus, ”les fabuleuses croupes/des collines fardées/de coquelicots”, l’infini tissage du vivant et de l’aboli – en vers boiteux, impairs ou blancs, Guy Goffette va chantant ou déchantant ce qui fait tanguer son âme. La mer longtemps promise, la mer qui va et vient comme la vie qui ne cesse de le ballotter d’un bord à l’autre de lui-même. Mer et vie promises dès l’enfance, ”au temps où le temps n’était pas”, où les possibles fendaient l’eau du fil bleu de l’avenir. Mais voilà, l’avenir n’a pas tenu ses promesses, l’anneau d’or s’est révélé ”trop étroit pour contenir l’amour/et les promesses des premiers temps”, et la perle au fond du coquillage de la chambre ”n’est plus qu’un grain de sable”. Reste la cuisine, sa fenêtre et son paysage, ses odeurs d’enfance, sa table ouverte et son buffet où dorment ”les rêves blanchis et pliés en quatre”. Une cuisine qui a fait de Guy Goffette, un homme qui sait ”l’art de faire l’amour dans une cuisine de province/avec des mots roulés/dans l’encre et la farine”. Parce que la cuisine a été cet endroit où il pouvait rester seul la nuit, ”quand tout s’est éteint/et que la lune seule/remplit l’assiette du voyageur oublié”. Une pièce qu’il faut imaginer ouvrant sur le jardin et son île au fond, au milieu du vert, Partance, la caravane égarée au fond du verger, l’abri de fortune où se réfugier pour
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Perros, Cingria, Jammes, Claudel… Autant de façons de transformer le vice impuni de la lecture en dialogue fraternel, tout en conjuguant les reflets de sa propre vie au miroir de leurs écrits. Une poésie qui dit combien on est nu face à ”l’histoire sans fin/recommencée de l’amour”, ses tempêtes d’éblouissements comme ses pauvres restes quand il n’est plus ”qu’une lampe/qui flanche, et le cœur une barque rejetée”. Combien on est pareillement nu face à l’Absente ou à la Désirée - celle dont le corps et la présence semblent seuls capables de ressusciter un peu du Jardin perdu. Nu encore, et si totalement désarmé, face à l’irréversible du temps et à la ruine des jours. Alors tantôt, c’est le grand oiseau mort de l’amour que le poète cloue au verso des images du bonheur, tantôt c’est le goût violent de la beauté fugitive des choses que sa voix enneigée de mélancolie poursuit. Acquiescer malgré tout, rendre grâce au présent, ”prendre encore/le parti de la chair/qui tant s’use et si vite”. Retrouver dans le silence, et le passage des nuages, des tendresses d’enfance inassouvie. Rester en partance, immobile peut-être, mais incendié d’innocence au cœur de la vrille où tournent le soleil fauve des désirs et la faim brute des chemins fruités de l’enfance. Ni grammaire du désenchantement ni sensiblerie, mais du vivant cristallisé en portées déchirées sur fond d’inconsolable et d’ensemencement d’azur, de nudité royale et de pluie longue sur l’herbe des vieux printemps. Ça chante et ça pleure, c’est bon et c’est beau comme la neige au soleil, l’eucharistique contenu du filet d’un pauvre pêcheur d’eau, ou une palpitation d’étoile sous la rosée du don. Un poète à lire, et vite, Ô vous qui ne tenez pas table ouverte aux folies de printemps, à la renverse des robes et des chairs qui s’ébrouent vous qui vivez reclus dans l’aveugle hiver des livres et ne touchez seins croupe toison que dans le foulage des lettres le velours des vélins hâtez-vous car bientôt ne toucherez plus que la nuit et la cendre des choses.
Seins de glace ou d’enfer, orage en plaine et la mer entre les collines agenouillant sans mot dire celui qui n’avait soif que de lui-même. Le tant présent à ses mots, le voici sans paroles jeté hors du poème, chair à nouveau et feu et eau, porte battue battant le cœur comme une grange dans l’été paille et poutre avec la mort petite mais sourde qui s’impatiente, voudrait parler, parle, de plus en plus haut, jusqu’à ne plus entendre qu’elle, dans leur bouche qui muse. Partance et désirance, c’est l’enfance jamais morte, le cœur toujours battant, les pensées toujours au large et l’envie incessante de clarté toujours plus haute. Une façon d’avancer de profil entre le rêve d’Icare et la retombée des songes, l’impossible envol et la chute dans la désillusion. C’est ainsi que tout Goffette s’inscrit dans le sillage du célèbre On ne part pas rimbaldien. ”Nous restons sur le seuil/sans savoir où aller, comme prisonniers/d’une route invisible et de la peur de perdre”. L’on ne part ni ne fait retour car il n’y a pas de fuite possible. Où fuir ? demandait Mallarmé. Ailleurs ? comme Rimbaud, ”pour revenir en raccourci et mourir près du quai, infiniment seul et sans nom parmi les badauds” ? Non, bien sûr, et pourtant reconnaît Goffette, ”partir reste en moi ce couteau à tourner dans la plaie/qui tourne et me fait ruer dans chacune de mes phrases à/jamais”. Alors, il part - Yougoslavie, Québec, Roumanie… - pour constater que le vrai voyage, c’est celui de l’écriture et celui qu’on effectue dans les livres aimés, et dont témoignent, dans chaque recueil, les Dilectures de Verlaine, le saint patron, à Leopardi en passant par W.H. Auden, Larbaud, Henri Thomas et Henri Droguet, Saba, Pavese, Borges, Cavafy,
Biographie de Richard Blin Richard Blin est professeur de Lettres par vocation. Les lecteurs assidus du Matricule des anges (que nous sommes) ont la chance de lire ses critiques. Nous le croisons aussi au fil d'autres revues : NRF, Nouveau Recueil, Mensuel littéraire et poétique (Bruxelles), Europe... Richard Blin est également l'auteur d'études parues dans des ouvrages collectifs (sur Pierre Michon, Jacques Réda, Gérard Macé, Pierre-Albert Jourdan, Jean Starobinski, Romain Graziani, Esther Tellermann, Ludovic Degroote...).
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barbe regarder l’homme en face et cette femme d’écorce, de sève et de bleus intimes en ses racines. …la beauté, c’est que tout va disparaître et que, le sachant, tout n’en continue pas moins de flâner. Je comprends tout cela comme la bouche comprend l’eau d’un ruisseau qui nous est commun. Il est bon de comprendre cette adresse au vivant avant de le quitter pour garder encore un peu le monde en sa poitrine. Je t’aime mon brin d’herbe comme joli brin de fille. Avant la sécheresse d’un hiver trop long. Voilà que ses mots me viennent en bouche, c’est que la simplicité est contagieuse et je préfère de beaucoup cette maladie. Celle de vivre avec les arbres, dans la pluie ou sous la statue incandescente du grand soleil. Celle de vivre près d’un amour mal fagoté qui se rhabille sans cesse, remonte sa bretelle au bord d’une planète un peu stupide en plein ciel. Les enfants qui traînent la mer au bout d’une ficelle, et les femmes dont le non est un oui. J’arrête là de vous écrire. C’est l’hiver, je relis Guy Goffette et j’écoute les dernières chansons de Tom Waits. C’est parfait. Va, passager, va comme l’eau et chante ce qui est, chante et ne te retourne pas.
] Pour Guy Goffette de Joël Bastard Il marche en lisant. Un verre de café à la main, qu’il vide un peu sur le quai mégoté à chaque pas de course dans les gares d’un pays pour toujours imaginaire. Il chante lorsqu’on lui demande de lire ou de dire un poème. Il roule une cigarette lorsqu’on lui pose une question sur la poésie. La grande, la petite, la belle affaire. Il court comme un enfant sait le faire pour traverser la vie à grande allure, une idée derrière la tête. Il va dans ses poèmes à bâtons rompus dans les hautes herbes du souvenir, de la douleur. De la beauté, du manque et du retour, et de ce chemin à faire pour là-bas le grand ciel où retrouver son souffle aux pieds de ce qui vit par-dessus tout, la vie. Humilité de la langue étonnée d’être au monde. De prendre le verger, ses branches, ses pommes trop vertes ou trop mûres. Il y a toujours quelque chose qui tombe de l’azur. Une blessure se fend d’un sourire, c’est lui, le bec dans la confiture du grand jardin. Même si, Il y a un arbre dans le matin tout à coup que je ne peux plus regarder. Tellement d’amour à ne plus pouvoir sous la
Les lettres italiques sont de Guy Goffette
Biographie de Joël Bastard (www.joelbastard.blogspot.com) Naît à Versailles en 1955. Vit aujourd'hui dans le Jura. Poète. Auteur de théâtre, de nouvelles et de chansons. Il réalise de nombreux livres d'artistes avec des peintres, des photographes... Pratique parfois l'écriture improvisée avec Érik Truffaz et Malcolm Braff.
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] Le Haut-Mal de Caroline Lamarche À propos de Un été autour du cou
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UY GOFFETTE, UNE DÉFERL ANTE POÊTIQUE DANS LE ROMAN
] Le Haut-Mal
de Caroline Lamarche
] Textes inédits de Guy Goffette
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Le titre le dit : c’est une voix qui s’étrangle, celle du narrateur pris dans le nœud coulant de son enfance, et qui vieillit, amer de n’avoir su aimer. Mais c’est aussi la voix affolée d’un enfant, qu’une femme de trente ans son aînée pervertit après lui avoir fait croire à l’amour. Simon, dit Simsi, a 12 ans à peine. Il vit dans un village perdu, entre son père, le ”roi-tabac”, propriétaire du bar-tabac-alimentation, sa mère qui économise pour acheter une baignoire de fer, et son petit frère qui dort la bouche ouverte dans le même lit que lui. Lit où Simon rêve aux filles, celles des magazines, Pauline – son âge – dont il a touché la fente, et la Monette. Autour de la Monette plane l’ombre du Haut-Mal et de l’interdiction paternelle : si Simon approche du lieu-dit, cette colline pelée où se dresse le chalet rose de la nouvelle venue, il valsera en pension. Mais le destin s’en mêle. On veut fuir des gamins furieux, on court droit devant soi, éperdument, et on se retrouve devant une femme éblouissante et peu vêtue qui pend son linge : la Monette. La fatalité, dès lors, enfile ses pièges comme les perles d’un collier. La Monette aperçoit l’enfant en sueur, lui ouvre sa porte, le fait monter à l’étage où se trouve une étincelante baignoire à pattes de lion. Un bain pour le jeune imprudent habitué aux débarbouillages sommaires. Beauté de cette femme. Trouble né de ses gestes ambigus. Magie, ensuite, des découpages qu’elle autorise l’enfant à pratiquer dans les Ciné Revue. En contrepartie, il faudra faire le guet. Car le docteur va venir. Et quand il sera là, elle et lui monteront à l’étage et personne ne pourra s’approcher du chalet. Si quelqu’un vient, Simon devra, comme un geai en alerte, crier dans la cage d’escalier. Mais pourquoi la Monette se met-elle sur son trente et un pour recevoir le docteur ? Pourquoi est-elle, ensuite, si fatiguée qu’elle chasse Simon comme un malpropre ? Pourquoi, quelques jours plus tard, descendelle au bar-tabac pour faire ses emplettes, circonvenir la maman de Simon et réclamer que l’enfant lui monte ses provisions ? Ogresse, exhibitionniste, initiatrice perverse, ou icône de la femme éternelle, Monette ? Tout cela. Car la déesse ne cesse de descendre du piédestal où la place, ”tremblant et curieux à la fois”, un Simon enchaîné. A-t-il atteint l’état dont il rêvait, celui d’élu, de chevalier servant, ”parce que la Monette m’avait pris contre elle, et que j’étais devenu un homme dans ses mains et qu’elle m’avait trouvé à son goût” ? Ou n’est-il, entre le mari et l’amant, qu’un ”cochonnet au
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milieu d’une pétanque démoniaque”, qui pleure et qui vomit d’être traité comme un chien, une mouche dans une toile d’araignée, un oiseau dont on commande le cri ? Pas d’alliés pour Simon, pas un seul qui devine, personne qui le sauve du Haut-Mal. L’abus de pouvoir est total, l’impunité sans faille. Un secret. Dont personne ne pourrait le délivrer, sinon une autre femme, cette ”jeune fille aux jambes nues” dont Simon adulte rêve sans la trouver jamais. Abîmé, perverti, il ne peut aimer qu’en utilisant les femmes, comme Monette l’a utilisé. Avec pour seul viatique, noué autour du cou, le bas qu’enfant il lui vola. Un été autour du cou est plus qu’un roman audacieux, compassionnel, cynique, drôle et cruel. C’est un secret partagé. On entre dans ce secret comme dans ce lieu clos et cependant ouvert – le Haut-Mal – où Simon se précipite, assailli par une ambivalence qui le
dévore. Autour de l’enfant, le monde se voudrait rangé comme un magasin de village, alors que s’y nouent de choquantes complicités (la mère et Monette) et que des alliances établies (le père et la mère, Monette et son mari – magnifique personnage du couvreur) s’y renversent brusquement. Le va-et-vient entre ce monde et l’autre, entre le narrateur adulte et l’enfant, le ”je” et le ”il”, cette schizophrénie rendue fluide, assumée par la narration, évoque une chorégraphie baroque qui aurait la cruauté des contes pour enfants, l’exemplarité du martyrologue chrétien et la terrible clarté d’un ”matin de mai sur l’échafaud”. Il semble que, risquant tout, le romancier-poète ait gagné sur le fil du rasoir, sur la couture du bas. Ce qui fait du lecteur ”la jeune fille aux jambes nues” désespérément attendue, avec qui tout partager.
Biographie de caroline Lamarche (www.carolinelamarche.net) Naît à Liège en 1995. Se met à écrire au début des années 1990. À partir de 1995, créations diverses : romans, nouvelles, poèmes, fictions radiophoniques.
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] Textes inédits
Petie éloge des vérités (extrait)
de Guy Goffette
L’ogre de Brangues (extrait) “ Le vieux qui fait Goliath “ pour amuser Abisag, la petite Sunamite qu’on lui a fourrée dans le lit afin de réchauffer sa vieille carcasse, ce n’est pas David seulement, ce n’est plus David, le roi d’Israël arrivé au bout du rouleau, non, mais à des siècles de distance et près du Rhône, ce gros bonhomme assis devant une bible d’autel, qui tient sur sa feuille de papier son stylo porte-plume aussi fermement que la grande épée antique. Car il lui faut suivre sans déraper, tel un sismographe, le mouvement qu’imprime à sa main le vent violent de l’inspiration. Il y a des heures qu’il n’a pas relevé la tête et qu’il se laisse ainsi porter pardessus le temps comme un enfant rêveur sur les épaules de son père. L’été a beau frapper à la fenêtre, glisser une jambe de lumière sur le parquet ciré, le gros monsieur n’entend ni ne voit rien d’autre que cette marée sans un son derrière l’oreille qui lui dicte les images et fait danser sa plume. Quand la porte du bureau soudain s’ouvre sur Madame, lasse de frapper pour des prunes, l’homme se redresse, et c’est comme s’il sortait d’un mauvais rêve. Comment ? Quoi ? Les Philistins ont gagné ? Vous divaguez, mon ami, le repas est servi. Nous n’attendons plus que vous. La porte se referme. Le stylo déposé sur la feuille, notre Goliath de théâtre s’aperçoit qu’il est midi passé de ce côté du monde. Cher David, voici Abisag, je vous la rends. Qu’elle vous garde bien au chaud en attendant mon retour, car nous n’en avons pas fini encore, nous deux ! Puis il range les pages qu’il vient de noircir d’une traite, sans une rature, se lève et d’un pas qui se rassure en marchant quitte le royaume d’Israël pour passer à table avec les siens et faire un sort aux nourritures terrestres.
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Elles sont quatre comme des saisons de la marchande de fruits et légumes, les cent coups de Truffaut et les sans cou de Desnos, les chevaliers de l’Apocalypse et les feuilles de trèfle pour amoureux transis. Quatre comme les jeudis de la semaine qui ne vient jamais, les marches de l’escalier qu’on grimpe en courant, comme les mains sur le clavier quand elles ne s’égarent pas dessous, comme les fers en l’air quand l’improviste nous entraîne, comme les yeux quand on est deux à se les dire, les vérités ; comme les veines qu’on se saigne la plupart du temps pour trois fois rien quand ce n’est pas en pure perte, comme les cheveux qu’on coupe avant de s’apercevoir que celui qu’on tond est chauve, quatre comme Henri, le Vert galant, toujours à quatre pattes de son vivant et qui monte pour l’éternité son dada de bronze sur l’île de la Cité, quatre comme les chemins par où l’on ne va jamais sans risque ni péril, comme les coins de l’horizon quand il est bien tendu pour une projection en plein air, et la famille peut enfin s’asseoir avec un bon verre à siroter paisible, mais voilà tout à coup que Georges, le mari de Suzanne, s’aperçoit qu’il a oublié ses lunettes, se lève et dérange ses voisins dans le noir et coupe l’horizon qui s’animait et marche sur les pieds de l’un et laisse traîner sa main sur les seins d’opéra de sa belle-sœur. Alors les cris fusent, le frère puîné se lève à son tour, plus rouge que tous les macon avalés, il attrape Georges par le bras Ah ! Mais ne te gêne pas toi, tu ne voudrais pas que je t’aide un peu. C’est parti, c’est l’empoignade. Le père veut s’interposer et prend un coup de coude dans les gencives et s’écroule au milieu des chaises. On l’entend crier Attention mon dentier, vous allez écraser mon dentier. Le pied qui tenait le petit projecteur 8 mm s’est effondré. L’horizon mélange ses coins, c’est la nuit tout d’un coup. Un chien se met à hurler à la lune. Ca pleure et ça renifle dans le silence revenu. On entend des portières qui claquent. La vérité dans son coin ramasse ses morceaux.
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Guy Goffette ] Poésie
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IBLIOGRAPHIES DES AUTEURS
Éloge pour une cuisine de Province (Éd. Champ Vallon, 1988. Rééd. Poésie/Gallimard, 2000, prix de la Communauté française de Belgique, 1988 et prix Mallarmé, 1989) La Vie promise (Éd. Gallimard, 1991. Rééd. Poésie/Gallimard, 2000). Le Pêcheur d’eau (Éd. Gallimard, 1995. Rééd. Poésie/Gallimard, 2007) Un manteau de fortune (Éd. Gallimard, 2001, grand prix de poésie de l’Académie française) Solo d’ombres précédé de Nomadie (Éd. Gallimard, 2003)
] Roman/récits/essais Mariana, Portugaise (Éd. Le temps qu’il fait, 1991) Verlaine d’ardoise et de pluie (Éd. Gallimard, 1996. Rééd. Folio, 1998). Elle, par bonheur et toujours nue (Éd. Gallimard, 1998. Rééd. Folio, 2002) Partance et autres lieux suivi de Nema problema (Éd. Gallimard, 2000, prix Valery Larbaud) Un été autour du cou (Éd. Gallimard, 2001. Rééd. Folio, 2003, prix Félix Denayer de l’Académie de langue et de littérature françaises de Belgique) Auden ou l’Œil de la baleine (Éd. Gallimard, 2005) Une enfance lingère (Éd. Gallimard, 2006. Rééd. Folio, 2007, prix Victor Rossel) Journal de l’imitateur (Éd. Fata Morgana, 2007) L’Autre Verlaine (Éd. Gallimard, 2008)
] Livres d’artistes Traversée, photographies de Dun Hayon (Éd. D.H. 2006) L’Adieu aux lisières, gravures de Jean-Marie Queneau (Éd. de la Goulotte 2006) Lumière d’épicerie, illustrations de Wanda Mihuleac (Éd. Transignum 2006) Le Journal de l’imitateur, peintures de Joël Leick (Éd. Fata Morgana 2006) Épilepsie, force douze, illustrations de Joël Leick (Éd. Fata Morgana 2007) Ulysse ébloui, peintures et collages de Joël Leick (Éd. Rencontre 2007) La Chambre des nues, peintures de Julius Baltazar (Éd. H.C. 2007)
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Joël Bastard
Jacques Réda
Memorandum de porcelaine (Éd. J. Bremond, 1993)
Celle qui vient à pas légers (Éd. Fata Morgana, 1985)
Beule (Éd. Gallimard, 2000, prix Antonin Artaud)
Premier livre de reconnaissances (Éd. Fata Morgana, 1985)
Se dessine déjà (Éd. Gallimard, 2002, prix Henri Mondor de l’Académie française)
Recommandations aux promeneurs (Éd. Gallimard, 1988)
Le Sentiment du lièvre (Éd. Gallimard, 2005)
Sonnets dublinois (Éd. Fata Morgana, 1990)
Casaluna (Éd. Gallimard, 2007)
Aller aux mirabelles (Éd. Gallimard, 1991) Nouveau livre des reconnaissances (Éd. Fata Morgana, 1992)
Caroline Lamarche
Aller à Elisabethville (Éd. Gallimard, 1993) L’Incorrigible (Éd. Gallimard, 1995)
Le Jour du chien (Éd. de Minuit, 1996)
Moyens de transport (Éd. Fata Morgana, 2000)
La Nuit l’après midi (Éd. de Minuit, 1998)
Accidents de la circulation, (Éd. Gallimard (2001)
L’Ours (Éd. Gallimard, 2000)
Les Fins Fonds (Éd. Verdier, 2002)
Le Rêve de la secrétaire (Éd. Esperluète, 2001)
Treize chansons de l’amour noir (Éd. Fata Morgana, 2002)
Lettres du pays froid (Éd. Gallimard, 2003) Carnets d’une soumise de province (Éd. Gallimard, 2004. Rééd. Folio, 2005)
Le vingtième me fatigue/Supplément à un inventaire lacunaire des rues du XXe arrondissement de Paris (Éd Dogana, 2004)
Karl et Lola (Éd. Gallimard, 2007)
Europes (Éd. Fata Morgana, 2005)
La Barbière (Éd. Les Impressions nouvelles, 2007)
Ponts flottants (Éd. Gallimard, 2006) Toutes sortes de gens (Éd. Fata Morgana, 2007)
Gilles Ortlieb
Papier d’Arménie : les Hauts-de-Seine caucasiens (Éd.Théodore Balmoral, 2007)
Brouillard journalier (Éd. Obsidiane, 1984)
Jean-Michel Maulpoix
Petit-Duché de Luxembourg (Éd. Le temps qu’il fait, 1991) Soldats et autres récits (Éd. Le temps qu’il fait, 1991)
Émondes (Éd. Fata Morgana, 1986)
Gibraltar du Nord (Éd. Le temps qu’il fait, 1995)
Papiers froissés dans l’impatience (Éd. Champ Vallon, 1987)
Poste restante (Éd. La Dogana, 1997)
La voix d’Orphée : essai sur le lyrisme (Éd. Corti, 1989)
La nuit de Moyeuvre (Éd. Le temps qu’il fait, 2000)
Portraits d’un éphémère (Éd. Mercure de France, 1990)
Sept petites études (Éd. Le temps qu’il fait, 2002)
Histoire de bleu (Éd. Mercure de France, 1992. Rééd. Poésie/Gallimard, 2005)
Place au cirque (Éd. Gallimard, 2002)
L’Écrivain imaginaire (Éd. Mercure de France, 1994)
Les Tramways de Bruxelles (Éd. Théodore Balmoral, 2002)
Un dimanche après-midi dans la tête (Éd. Mercure de France, 1996)
Carnets de ronde (Éd. Le temps qu’il fait, 2004)
La Poésie comme l’amour : essai sur la relation lyrique (Éd. Mercure de France, 1998)
Meuse Métal, etc. (Éd. Le temps qu’il fait, 2005)
Du lyrisme (Éd. Corti, 2000)
Au grand miroir (Éd. Gallimard, 2005)
L’Instinct du ciel (Éd. Mercure de France, 2000)
À eux-mêmes inconnus, sur des photographies de Jean-François Bonhomme (Éd. Le temps qu’il fait, 2006)
Chutes de pluie fine (Éd. Mercure de France, 2002) Le Poète perplexe (Éd. Corti, 2002)
Noël à Ithaque (Éd. Le temps qu’il fait, 2006)
Pas sur la neige (Éd. Mercure de France, 2004)
Des orphelins (Éd. Gallimard, 2007)
Adieux au poème (Éd. Corti, 2005)
Sous le crible (Éd. Finitude, 2008)
Boulevard des Capucines (Éd. Mercure de France, 2006)
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OSSIERS INITIALES
Algérie L’écriture ou la vie (1997)
Les inédits :
Éclats de rire (1997)
Je suis fatigué de Dany Laferrière (2000)
Jørn Riel, maître conteur (1998)
Petit ours mon ami de Mario Rigoni Stern (2001)
Samuel Beckett (1998) Raymond Carver, un homme discret (1999) Julien Gracq (1999)
Carnets cubains de Philippe Claudel (2002)
René Fallet (2000)
Territoires de Elwood Reid (2002)
A comme amour (2000)
Sur la mer de Hubert Mangarelli (2003)
Nancy Huston (2001)
Deux fragments oubliés de Christian Garcin (2005)
Mario Rigoni Stern (2001)
Une photo à Montevideo
Sombre Afrique (2002)
de Patrick Deville (2004)
Annie Saumont (2002)
La Réserve de Russel Banks (2005)
Un Quenal des Queneau (2003)
Initiales a 10 ans et autres bonnes nouvelles (2007)
Littératures de l’imaginaire en France (2003)
GUY GOFFETTE
Pierre Michon, une autolégende (2003)
L’AUTRE VERLAINE
Dhôtel comme ça (2004) Nos Amériques (2004)
récits
Jacques Séréna (2005)
À paraître :
La littérature de voyage (2006)
Georges Perros
Americanada (2006)
La bande dessinée
Guy
Le Roman Noir (2007) GALLIMARD
Goffette
L’autre Verlaine
« Ce qu’il aura fallu de temps pour que je me convertisse à Verlaine, combien d’errances, d’errements, de ciels perdus, de pluies, de larmes avant que le vieil Ardennais d’exil me rende à ma terre d’enfance avec le fil du cœur et le sens de ma route, je n’en reviens toujours pas. » 34
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Photo Catherine Hélie © Gallimard.
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EMERCIEMENTS Je tiens à remercier de sa disponibilité Guy Goffette qui, tout au long de ce travail, a fait preuve d’une grande générosité. Que ce dossier puisse lui exprimer toute mon admiration. Un grand merci, bien sûr, aux auteurs qui se sont si amicalement adonnés à cet excercice de “dilecture” : Joël Bastard, Richard Blin, Caroline Lamarche, Jean-Michel Maulpoix, Gilles Ortlieb et Jacques Réda. Catherine, merci infiniment d’avoir vu, derrière les mots et audelà des maux, le rose, la mouette et les courbes qui font de ce dossier une réussite.
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URS Ce dossier a été réalisé pour le compte des librairies du groupement Initiales (www.initiales.org) et avec le soutien du CNL (Centre national du livre) • Coordination : Sébastien Le Benoist de la librairie Quai des Brumes (Strasbourg) et Sophie Gorayoa, permanente du groupement Initiales • Corrections : • Conception (ligne graphique, mise en page et illustrations) : Catherine Arlet-Delepaut (roginska@wanadoo.fr) • Impression : Imprimerie Stipa (Montreuil)
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] Les librairies du groupement Initiales [ Antipodes 8, rue Robert-Schuman • 95880 Enghien Tél. 01 34 12 05 00 • Fax 01 34 17 69 26 auxantipodes@free.fr Atout-livre 203 bis, avenue Daumesnil • 75012 Paris Tél. 01 43 43 82 27• Fax 01 43 43 82 73 info@atoutlivre.com www.atoutlivre.com Au poivre d’âne 9, place de l’Hôtel-de-Ville 04100 Manosque Tél. 04 92 72 45 08 • Fax 04 92 72 40 03 librairiepoivredane@wanadoo.fr Au poivre d’âne 12, rue des Frères-Blanchard 13600 La Ciotat Tél. 04 42 71 96 93 • Fax 04 42 73 19 68 poivredanesurmer@orange.fr Comme un roman 39, rue de Bretagne • 75003 Paris Tél. 01 42 77 56 20 • Fax 01 42 77 56 20 commeunroman@wanadoo.fr www.comme-un-roman.com Des Cordeliers 13, côte des Cordeliers 26100 Romans-sur-Isère Tél. 04 75 05 15 55 • Fax 04 75 72 50 56 libcordeliers@wanadoo.fr Gwalarn 15, rue des Chapeliers • 22300 Lannion Tél. 02 96 37 40 53 • Fax 02 96 46 56 76 librairie.gwalarn@wanadoo.fr L’Arbousier 1, avenue Abdon-Martin • 04700 Oraison Tél./Fax : 04 92 78 61 08 librairielarbousier@tiscali.fr L’Échappée belle 7, rue Gambetta • 34200 Sète Tél. 04 67 43 64 54 • Fax 04 67 74 74 18 libechappeebelle@aol.com www.lechappeebelle.fr L’Écritoire 30, place Notre-Dame 21140 Semur-en-Auxois Tél. 03 80 97 05 09 • Fax 03 80 97 19 89 librairie.ecritoire@wanadoo.fr www.ecritoire-semur.com La librairie... 12, rue Chaperonnière • 49000 Angers Tél. 02 41 87 48 43 • Fax 02 41 87 47 70 sarllibrairie@wanadoo.fr La Librairie Musée du Pilori, place du Pilori 79000 Niort Tél. 05 49 04 05 03 - Fax 05 49 17 18 80 contact@lalibrairieniort.com www.lalibrairieniort.com La librairie du rivage 82, boulevard Aristide-Briand 17200 Royan Tél./Fax 05 46 22 05 16 librairie.rivage@wanadoo.fr www.librairie-du-rivage.fr La Manœuvre 58, rue de la Roquette • 75011 Paris Tél. 01 47 00 79 70 • Fax 01 47 00 77 55 La_manoeuvre@yahoo.fr info@lamanoeuvre.com
La Réserve 81, avenue Jean-Jaurès 78711 Mantes-la-Ville Tél. 01 30 94 53 23 • Fax 01 30 94 18 08 librairie.lareserve@wanadoo.fr Le Bruit des mots 11, place du Marché • 77100 Meaux Tél. 01 60 32 07 33 • Fax 01 60 32 07 34 bruit.des.mots@wanadoo.fr Le Cadran lunaire 27, rue Franche • 71000 Mâcon Tél. 03 85 38 85 27 • Fax 03 85 40 92 16 cadran.lunaire@wanadoo.fr Le Cyprès 17, rue du Pont-Cizeau • 58000 Nevers Tél. 03 86 57 53 36 • Fax 03 86 59 59 24 Le Grain des mots 13, boulevard du Jeu-de-Paume 34000 Montpellier Tél. 04 67 60 82 38 • Fax 04 67 60 82 91 info@legraindesmots.com
Mots et Images 10, rue Saint-Yves • 22200 Guingamp Tél. 02 96 40 08 26 • Fax 02 96 40 08 27 mots-et-images@wanadoo.fr Nordest 34 bis, rue de Dunkerque • 75010 Paris Tél./Fax 01 48 74 45 59 lib.nordest@wanadoo.fr Obliques 68, rue Joubert • 89000 Auxerre Tél. 03 86 51 39 29 • Fax 03 86 52 11 83 librairie.oblique@wanadoo.fr Passages 11, rue de Brest • 69002 Lyon Tél. 04 72 56 34 84 • Fax 04 72 56 34 85 librairie.passages@orange.fr Point-Virgule 1, rue Lelièvre • 5000 Namur / Belgique Tél. +32 081 22 79 37 Fax +32 081 22 79 37 info@librairiepointvirgule.be
Le Livre Phare 8, rue Dumont-d’Urville 29900 Concarneau Tél. 02 98 50 68 11 livrephare@wanadoo.fr
Quai des Brumes 120, Grand’Rue • 67000 Strasbourg Tél. 03 88 35 32 84 • Fax 03 88 25 14 45 quaidesbrumes@wanadoo.fr
Le Merle Moqueur 51, rue de Bagnolet • 75020 Paris Tél. 01 40 09 08 80 • Fax 01 40 09 86 60 mailing@lemerlemoqueur.fr www.lemerlemoqueur.fr
Vent d’ouest 5, place du Bon-Pasteur BP 31626 • 44016 Nantes cedex Tél. 02 40 48 64 81 • Fax 02 40 47 62 18 librairie@ventdouest.org www.librairie-nantes.fr
Le Scribe 115, faubourg Lacapelle 82000 Montauban Tél. 05 63 63 01 83 • Fax 05 63 91 20 08 libscribe@aol.com www.lescribe.com Le square (L’université) 2, place du Docteur-Léon-Martin 38000 Grenoble Tél. 04 76 46 61 63 • Fax 04 76 46 14 59 libsquar@club-internet.fr www.librairielesquare.com
Vent d’ouest au Lieu unique 2, rue de la Biscuiterie • 44000 Nantes Tél. 02 40 47 64 83 • Fax 02 40 47 75 34 ventdouestalu@hotmail.com Voix au chapitre 67, rue Jean-Jaurès • 44600 Saint-Nazaire Tél. 02 40 01 95 70 glambert3@club-internet.fr librairievoixauchapitre.com
Les Saisons 2, rue Saint-Nicolas • 17000 La Rochelle Tél. 05 46 37 64 18 • Fax 05 46 34 05 58 librairie@lessaisons.fr www.lessaisons.fr Livre aux Trésors 4, rue Sébastien-Laruelle 4000 Liège / Belgique Tél. +32 04 250 38 46 Fax +32 04 250 38 46 livreauxtresors@skynet.be Lucioles 13-15, place du Palais • 38200 Vienne Tél. 04 74 85 53 08 • Fax 04 74 85 27 52 lucioles@free.fr www.librairielucioles.com Lune et l’Autre 19, rue Pierre-Bérard • 42000 Saint-Étienne Tél./Fax 04 77 32 58 49 Lune-et-l-autre@homail.fr Maupetit 142-144, La Canebière • 13001 Marseille Tél. 04 91 36 50 50 • Fax 04 91 36 50 79 maupetit@actes-sud.fr M’Lire 3, rue de la Paix • 53000 Laval Tél. 02 43 53 04 00 • Fax 02 43 53 23 52 mlire@wanadoo.fr
INITIALES BAGNOLET • 75020 PARIS TÉL. 01 40 09 08 75 FAX 01 40 09 08 76 info@initiales.org - ww.initiales.org
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