3 minute read

Les innovations susceptibles d’avoir un impact sur la bonne santé des individus

Frédéric Durand-Salmon - Fondateur et Président de Bepatient, senior partner de Alira Health

Comment mettre le numérique au service de la santé moderne ? Une première application du numérique réside dans ce qu’on appelle en anglais des companions, de petits compagnons numériques qui vont permettre d’informer le patient sur sa maladie, tout en lui donnant la possibilité d’échanger avec d’autres malades et de faire remonter ses symptômes. Le patient peut ainsi faire connaître, outre ses symptômes cliniques, les effets de sa maladie et de son traitement sur son environnement. Quant au médecin, il peut intervenir ou anticiper à distance et en temps réel. La famille et les aidants peuvent eux aussi être intégrés à la boucle, puisqu’ils jouent un rôle très important dans un certain nombre de maladies.

Advertisement

Ces compagnons digitaux peuvent être combinés à des objets comme des balances et des tensiomètres connectés, à des dispositifs médicaux comme les pacemakers et les défibrillateurs, voire à des lunettes ou des textiles connectés. Tous ces appareils remontent de l’information quantitative en parallèle du patient qui, avec son « application compagnon », remonte de l’information qualitative.

Le numérique permet en outre l’interopérabilité, la capacité d’aller chercher les informations à différents endroits pour avoir une vision beaucoup plus complète. Les informations proviennent en effet à la fois de l’imagerie, de la biologie, des électrocardiogrammes, de la génomique, du quotidien du malade. Cette grande richesse de données peut désormais être agrégée, structurée, standardisée, pour la rendre interopérable.

À partir de ces données, l’IA récupère toutes les informations qui permettent de proposer des thérapies ciblées, d’aider le praticien dans sa décision et de faire de la télémédecine. Les bienfaits sont nombreux pour le patient, le médecin et le système de santé en général, par exemple en matière de prévention.

L’OMS décrit trois phases de prévention. La prévention primaire consiste à éviter la survenue de la maladie ; la secondaire, à éviter son évolution ; la tertiaire, à éviter les complications.

En matière de prévention primaire, un bon exemple est la prévention en entreprise. Je crois que la santé en entreprise prendra une part de plus en plus importante, parce que le sujet entre quarante et soixante-cinq ans, qui commence à être un sujet à risques sur de nombreuses pathologies, travaille encore. Nous avons ainsi déployé dans différentes grandes entreprises, notamment en France, avec des partenaires assureurs, des campagnes de dépistage des risques cardiovasculaires. Plus de 30 000 personnes, en entreprise essentiellement, ont ainsi été dépistées, avec quelques campagnes également dans les grandes villes européennes, sur le lieu de travail, à Paris, Bruxelles et Zurich.

De quelle façon ? Une infirmière vient sur place proposer une consultation de prévention. Sur place et non à distance, car nous avons voulu alimenter le digital avec du présentiel. Elle recueille des informations en discutant avec la personne, en remplissant des formulaires et au moyen d’objets connectés (balance, tensiomètre, et également un petit boîtier grand comme un téléphone portable qui, avec une petite goutte de sang, fait tout le profil des cholestérols lipidiques et de la glycémie). Tout cela aboutit ensuite grâce à l’informatique à un score sur des échelles accréditées, référencées notamment par des sociétés savantes, en matière de risques cardiométaboliques. En quelques secondes, nous établissons une photographie de la personne afin de cartographier ses risques, ce qui permet à l’infirmier de la sensibiliser tout de suite ou, pour les très grands risques, de l’orienter vers un médecin. Nous pouvons par ailleurs revenir quelques mois plus tard dans l’entreprise pour refaire la cartographie et mesurer l’impact d’un éventuel changement de comportement. Les retours en entreprise, TPE, PME, grands groupes, sont très bons : les employés apprécient la démarche, sa simplicité et sa rapidité.

En matière de prévention secondaire, nous avons suivi depuis quatre ans, avec l’hôpital d’Eindhoven, dix mille personnes ayant subi une chirurgie bariatrique. Et ceci, toujours, grâce à un compagnon digital et une plateforme, qui permettent de recueillir en amont des informations pour avoir des critères d’éligibilité à différentes techniques, opératoires ou non, puis d’informer, de préparer et d’éduquer les patients à la sortie de l’hôpital, de manière à ce que les effets attendus de la chirurgie tiennent dans le temps. En effet, par exemple, 30 % de ces patients obèses ont un diabète qui disparaît après leurs opérations, mais le défi est de maintenir le changement de comportement, afin d’éviter qu’ils ne retombent dans leurs comportements d’avant.

Enfin, nous proposons beaucoup de programmes de prévention tertiaire, par exemple contre les insuffisances cardiaques. On suit des personnes avec une petite application où ils remontent des symptômes, une balance connectée qui transmet quotidiennement leur poids, éventuellement des textiles qui mesurent l’impédance. Des algorithmes détectent, le cas échéant, ce qu’on appelle des décompensations. Pour des patients insuffisants cardiaques plutôt âgés, 75 ans d’âge moyen, cela permet d’éviter des réhospitalisations qui auraient pour conséquence, en moyenne, un an de vie en moins. Nous proposons un dispositif analogue dans le cadre de la maladie de Crohn : on fait remonter les informations quotidiennes grâce à un home test lab, une petite cartouche dans laquelle les patients mettent leurs selles quand ils ont des inflammations et qui opère des tests biologiques que le patient peut faire remonter sur une application grâce à un QR Code, avec d’autres informations. Le médecin peut alors évaluer le traitement en cours et son suivi par le patient.

This article is from: