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Le Québec vieillit : une chance ou un problème ?

de l’institut du Nouveau Monde

Le bilan des Cafés des âges

Première phase des Rendez-vous des générations www.generations.inm.qc.ca Juin 2010

Vers un nouveau contrat social entre les générations

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Le bilan des Cafés des âges est une publication de l’Institut du Nouveau Monde. Les Cafés des âges constituent la première phase des Rendez-vous des générations de l’INM, un dialogue citoyen sur le vieillissement du Québec qui se déroule de l’été 2009 jusqu’au printemps 2011. Direction générale : Michel Venne Coordination du projet : Audrey McKinnon Rédaction du bilan : Annick Poitras, journaliste indépendante Direction artistique et montage : gaetanvenne.ca

Partenaires de la démarche Les Rendez-vous des générations de l’INM sont appuyés par le Conseil des aînés du Québec, le Conseil de la famille et de l’enfance, le Conseil permanent de la jeunesse, la Conférence des tables de concertation des aînés, la Fédération des organismes communautaires famille, la Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec, ESPACES 50+ et plus de 90 organisations et associations réparties dans les différentes régions du Québec. La démarche a reçu l’appui financier du Secrétariat aux aînés du Québec, du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, du Mouvement des caisses Desjardins (pour les Cafés des âges) et du Fonds québécois de recherche sur la société et la culture (FQRSC). Un merci particulier aux Tables régionales de concertation des aînés qui ont joué un rôle important de mobilisation des partenaires régionaux pour l’organisation des Cafés des âges.


Le Québec vieillit : une chance ou un problème? Le bilan des Cafés des âges Première phase des Rendez-vous des générations de l’Institut du Nouveau Monde

La synthèse des Cafés des âges a été réalisée par Annick Poitras, journaliste indépendante, à partir des comptes rendus produits par les correspondants régionaux des Rendez-vous des générations de l’Institut du Nouveau Monde. Juin 2010

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Vers un nouveau contrat social Depuis quelques années déjà, les groupes d’aînés mais aussi des experts, des groupes de travail et des mouvements sociaux recommandent d’engager une réflexion approfondie et collective sur les dimensions objectives et les impacts du vieillissement de la population du Québec. La démarche des Rendez-vous des générations de l’Institut du Nouveau Monde est faite pour répondre à cette demande.

Photo : Kiran Ambwani

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Comment ces cinq générations vontelles créer une solidarité nouvelle et, ensemble, trouver les moyens de composer avec les défis posés à un Québec vieillissant ?

’importance de ce débat ne se dément pas. Surtout que le Québec est l’une des sociétés où le vieillissement collectif sera le plus rapide au monde. Ce phénomène change beaucoup de choses. L’équilibre entre les générations est bousculé. La proportion de jeunes diminue. Les aînés pour leur part vivent plus longtemps et plus longtemps en bonne santé qu’avant. Des besoins nouveaux apparaissent. Le plus important est que l’allongement de la vie fait que, maintenant, cinq générations cohabitent au sein de la société québécoise. Il est révolu le temps où l’on parlait des trois âges de la vie : celui de l’apprentissage, celui du travail et celui de la retraite. Le parcours linéaire commun à tous jusqu’à un passé récent est en train d’éclater. On peut, à tout âge, retourner aux études, sortir du monde du travail, y revenir dans un autre métier, à temps partiel ou à temps plein, et rester très actif à l’âge que l’on dit de la retraite. La vraie question posée par le vieillissement collectif est celle-ci : comment ces cinq générations vont-elles créer une solidarité nouvelle et, ensemble, trouver les moyens de composer avec les défis posés à un Québec vieillissant qui entend demeurer une société pour tous les âges ? Nous comptons, au terme des Rendez-vous des générations, répondre à cette question en adoptant une Déclaration des générations. Cette déclaration comportera les principes d’un nouveau contrat social entre les générations et des pistes d’action pour le mettre en œuvre. Pour arriver à ce résultat, nous avons conçu une démarche en quatre étapes (voir page 9). Le présent document fait état de la synthèse des propos tenus lors de la première phase de la démarche qui a pris la forme d’une soixantaine de Cafés des âges organisés entre août 2009 et mai 2010 dans une quinzaine de régions du Québec grâce à la

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collaboration de nos nombreux partenaires régionaux. Quelque 3 000 personnes y ont participé.

Besoin d’une politique fondée sur le dialogue Je vous laisse prendre connaissance de la synthèse des propos des citoyens. J’en retiens personnellement trois choses : À l’égard du vieillissement, la population ressent une certaine inquiétude qui se voit dans l’émergence et la récurrence des thèmes liés à la santé, au financement des services publics et des retraites et à une éventuelle pénurie de main-d’œuvre. Les Québécois demandent aux décideurs publics de reconnaître l’importance du phénomène et d’adopter une ou des politiques à cet égard. Les principaux constats font consensus entre les générations. Les inquiétudes à l’égard du système de santé ou à l’égard des transformations du marché du travail sont partagées par les citoyens de tous les âges. Pas toujours pour les mêmes raisons, c’est vrai. Mais le fait que tous se préoccupent des mêmes problèmes indique qu’il sera possible d’animer un dialogue pour trouver, ensemble, les solutions. Enfin, l’expérience des Cafés des âges a montré que le besoin le plus important créé par le vieillissement de notre société concerne l’instauration et la multiplication des lieux et des occasions de dialogue entre les personnes de générations différentes. Parmi les préoccupations qui ressortent des discussions, plusieurs concernent la nécessité de démystifier les préjugés et de faire tomber les tabous à l’égard du vieillissement, de combattre l’âgisme et le jeunisme, d’aborder franchement le partage du pouvoir et des responsabilités entre les générations et de concevoir des pistes de collaboration, de partage et de transmission entre Québécois de tous les âges. Je vous souhaite une bonne lecture. Et je vous invite déjà à vous inscrire au Rendez-vous régional des générations dans votre région. u

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Michel Venne, directeur général de l’Institut du Nouveau Monde 5



Table des matières Les Cafés des âges – Phase I des Rendez-vous des générations de l’INM . ....................................................................... 8

Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions . .................................................................................................................................................11

1.1 Question brise-glace : perceptions sur les « jeunes » et les « vieux » ................................................................................................................12

1.2 La société québécoise vieillit : est-ce une chance ou un problème ? ............................................................................................................... 12

1.3 Comment les jeunes vont-ils tirer leur épingle du jeu dans une société vieillissante ? .......................................................................... 17

1.4 À quelles conditions les aînés pourront-ils demeurer actifs dans la société ? ............................................................................................ 20

1.5 D’autres questions et d’autres réponses .....................................................................................................................................................................................22

Partie 2 – Les constats transversaux ......................................................................................................................................................................................... 25

2.1 Ce qui fait consensus à travers les générations . ................................................................................................................................................................... 26

2.2 Ce qui suscite un consensus plus marqué chez les jeunes ........................................................................................................................................ 27

2.3 Ce qui suscite un consensus plus marqué chez les aînés ........................................................................................................................................... 29

2.4 Ce qui est particulier aux régions, aux milieux ruraux et aux villes ........................................................................................................................ 30

2.5 Ce qui suscite des divisions et l’expression de divergences .................................................................................................................................... 31

Partie 3 – Les préoccupations face au vieillissement de la population ................................................................................ 33

Partie 4 – D’autres questions à débattre . .......................................................................................................................................................................... 35

Affronter le vieillissement, c’est affronter nos démons ............................................................................................................................................................ 36

À qui les responsabilités ? .............................................................................................................................................................................................................................. 36

Peu de solutions et pas de sacrifices ..................................................................................................................................................................................................... 37

Qui sont les « jeunes » et qui sont les « vieux » ? ......................................................................................................................................................................... 37

Quelles sont les « autres » générations? .............................................................................................................................................................................................. 37

Annexe – Liste des Cafés des âges d’août 2009 à mai 2010........................................................................................................................................... 38

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Les Cafés des âges Phase I des Rendez-vous des générations de l’INM En août 2009, l’Institut du Nouveau Monde (INM) a lancé, avec ses partenaires, la démarche des Rendez-vous des générations. Cette démarche vise à faire participer le plus grand nombre de Québécois à une réflexion pour prendre conscience et comprendre le phénomène du vieillissement de la population. Elle a aussi pour but de proposer des pistes d’action pour prendre en compte cette évolution inévitable de notre société.

Photo : Kiran Ambwani

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Une soixantaine de Cafés des âges ont permis à près de 3 000 Québécois de réfléchir aux répercussions du vieillissement de notre société.

epuis le lancement de la démarche, les partenaires régionaux de l’INM ont tenu une soixantaine de Cafés des âges qui ont permis à près de 3 000 Québécois de réfléchir aux répercussions du vieillissement de notre société. Ces Cafés des âges ont constitué la phase I des Rendez-vous des générations. La phase II prend la forme d’une rencontre nationale, qui réunit les représentants des partenaires régionaux, des experts et des partenaires, le 28 mai 2010, à Québec. Le but de cette rencontre est de prendre connaissance de la synthèse des propos tenus par les citoyens pour déterminer les sujets prioritaires qui feront l’objet des débats lors des prochaines étapes.

Issues de 13 régions du Québec, des personnes de tous les âges – de 12 à 90 ans ! – se sont réunies dans des salles communautaires, des écoles et d’autres lieux pour des séances de réflexion d’une durée moyenne de deux heures. Divisés en petits groupes et guidés par des animateurs, les participants ont confronté leurs points de vue et partagé leurs préoccupations sur les enjeux du vieillissement de la population dans une atmosphère cordiale. Organisées par de multiples associations et organismes régionaux, ces rencontres intergénérationnelles visaient à dégager des paroles, voire une parole commune, qui déboucheront en 2011 sur un contrat renouvelé entre les générations. Cette future Déclaration des générations fera éventuellement l’objet de représentations auprès des décideurs politiques.

Quatre questions motrices au cœur des débats L’INM a fourni une grille de discussion et un guide d’animation aux organisateurs des Cafés des âges. Cette initiative visait à ce que les groupes réunis dans les diverses régions discutent des mêmes sujets. Ainsi, dans l’ensemble de la province, la majorité des participants ont débattu des quatre questions suivantes : Question brise-glace : mettez vos préjugés sur la table ! u Qu’est ce qui vous énerve chez les jeunes et chez les vieux ? u Qu’est ce qui vous plaît chez les jeunes et chez les vieux ?

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La société québécoise vieillit : est-ce une chance ou un problème et pourquoi ?

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Comment les jeunes vont-ils tirer leur épingle du jeu dans une société vieillissante ?

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À quelles conditions les aînés pourront-ils demeurer actifs dans la société ?

Les organisateurs régionaux des Cafés des âges avaient toutefois la possibilité de poser des questions différentes des questions suggérées, soit pour aborder un enjeu particulièrement important à leurs yeux, soit pour répondre à une sensibilité régionale. Le présent rapport rend compte des réponses à toutes ces questions.

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À propos de ce rapport

Une note importante

Après avoir présenté la démarche des Cafés des âges, nous résumons les réponses obtenues à chacune des questions posées aux participants.

Ce document se veut un miroir des propos émis lors des Cafés des âges qui ont eu lieu au Québec. Son contenu est basé sur les rapports synthèses et les rapports de table colligés par les organisateurs des Cafés, de même que sur les notes des participants sur les napperons utilisés comme outils d’animation. Les affirmations, les préoccupations, les impressions et les suggestions présentées dans les pages qui suivent sont celles de participants issus de générations et d’horizons professionnels différents. Cette synthèse reflète leurs idées, leurs croyances et leurs perceptions. Les affirmations contenues dans ce texte n’ont pas fait l’objet de vérifications sur le plan factuel. Bonne lecture !

Ensuite, nous faisons ressortir ce qui, parmi les commentaires colligés : fait consensus à travers les générations; fait particulièrement consensus chez les jeunes; fait particulièrement consensus chez les aînés; est propre à certaines régions, aux milieux ruraux ou aux villes; suscite des divisions et des divergences de vues. u u

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La troisième partie de cette synthèse résume les 10 préoccupations qui, à la lumière des discussions des Cafés des âges, devraient faire l’objet des débats lors des rendez-vous régionaux et du grand rendez-vous national des Rendez-vous des générations. Enfin, sous la forme d’autres questions à débattre, nous proposons quelques réflexions tirées de notre uveau entre Vers un no cial contrat so ions les générat lecture de la parole captée lors des Cafés des âges. Rendez

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Les Rendez-vous des générations : une démarche en 4 étapes

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Des Cafés des âges pour recueillir les préoccupations des citoyens à l’égard du vieillissement de la société.

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Un forum national constitué de nos partenaires régionaux et nationaux pour prendre connaissance de la synthèse des Cafés des âges et en tirer des conclusions.

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Des rendez-vous régionaux, à l’automne 2009 et à l’hiver 2010, pour reprendre les discussions sur les thèmes qui auront été identifiés comme prioritaires à travers les Cafés des âges.

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Et, enfin, un Rendez-vous national, au printemps 2011, pour adopter la Déclaration des générations. La déclaration comportera les principes d’un nouveau contrat social entre les générations et les pistes d’action pour sa mise en œuvre.

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Photo : Kiran Ambwani

Partie 1 Synthèse des réponses aux questions

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Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

1.1 Question brise-glace : perceptions sur les « jeunes » et les « vieux » Certaines perceptions sur les «  jeunes » et les « vieux » sont bien ancrées dans l’ADN collectif. Voici celles qui ont été nommées de façon récurrente aux quatre coins de la province par les participants aux Cafés des âges.

Qu’est ce qui vous énerve chez les jeunes et chez les vieux ? Les jeunes sont individualistes; les vieux ne pensent qu’à « leurs bobos ». Les jeunes sont impolis, ils manquent de respect et de savoir-vivre; les vieux manquent de tact, ils sont négatifs et « chialent » tout le temps. u Les jeunes pensent tout savoir; les vieux « ont tout vu ». u Les jeunes pensent que tout est acquis et « veulent tout, tout de suite »; les vieux « ont tout donné » et pensent qu’on leur doit tout. u Les jeunes sont des « têtes folles » qui ne songent pas à l’avenir; les vieux sont nostalgiques et radotent au sujet du « bon vieux temps ». u Les jeunes sont « mollasses », fainéants, ils manquent de discipline et de persévérance; les vieux sont méfiants, désengagés et réfractaires au changement. u Les jeunes font tout trop vite; les vieux font tout trop lentement. u Les jeunes « parlent mal »; les vieux sont arrogants. u Les jeunes sont toujours derrière leur écran d’ordinateur; les vieux sont déconnectés des réalités d’aujourd’hui. u Les jeunes portent des pantalons aux genoux et des casquettes croches; les vieux ne lâchent plus leurs calottes et leurs chapeaux ! u u

Qu’est ce qui vous plaît chez les jeunes et chez les vieux ? Les jeunes ont l’énergie; les vieux ont la sagesse. Les jeunes sont enthousiastes et spontanés; les vieux sont riches de savoirs et d’expériences de vie. u Les jeunes sont curieux, créatifs et audacieux; les vieux sont généreux et disponibles. u Les jeunes cultivent un esprit critique et l’ouverture sur le monde; les vieux développent l’entraide et l’engagement. u Au contact des jeunes, on rêve et on reste jeune; au contact des vieux, on apprend et on grandit. u u

1.2 La société québécoise vieillit : est-ce une chance ou un problème ? Les participants aux Cafés des âges ont eu de la difficulté à trancher la question de savoir si le vieillissement est une chance ou un problème. Tout en étant capables d’identifier les apports bénéfiques du vieillissement de la population pour notre société, la majorité des citoyens consultés perçoivent surtout les problèmes qui accompagnent ce changement démographique.

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ls sont inquiets devant les défis majeurs qui se posent, notamment dans le domaine de la santé et sur le marché du travail. Et face à l’inconnu et à l’incertitude, la majorité préfère voir le verre à moitié vide plutôt qu’à moitié plein ! Cependant, certains débats mènent à la conclusion que le vieillissement de la population

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n’est ni une chance ni un problème, mais plutôt « une question de perception » et « un grand défi d’adaptation ». Dans le Bas-Saint-Laurent, on dit à Matane qu’il ne s’agit pas d’un problème de vieillissement, « mais de dévitalisation ». Et pour les participants de Kamouraska, c’est aussi « un fait qui exigera une transformation du système à travers des ajustements d’individus et de société ».

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Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

1.2.1 C’est une chance ! Pourquoi ? Une occasion de se renouveler Pour beaucoup de participants aux Cafés des âges, le vieillissement de la population offre une belle occasion de se questionner sur le fonctionnement de la société et sur son avenir. Le renversement de la pyramide démographique force à une remise en question du statu quo, des automatismes et de ce qui d’ordinaire peut être tenu pour acquis par les Québécois.

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Le vieillissement créera un brassage et un renouvellement d’idées ! », se réjouit un résidant de Montréal. Cette situation pourrait mener à la reconfiguration de tous les rouages de la société. Du marché du travail au système de santé en passant par les politiques d’immigration, l’adaptation des aménagements urbains et le débat sur l’euthanasie, tout pourra être passé au crible pour accommoder l’ensemble des générations. Des citoyens entrevoient même l’adaptation de produits pour aînés comme un créneau d’affaires prometteur et l’amélioration des soins médicaux, une occasion à saisir pour l’entreprise privée !

Des richesses à exploiter « Que celui qui n’a pas d’aîné dans sa vie s’en achète un. » Ce proverbe arabe, cité par un participant de Saint-Laurent, sur l’île de Montréal, illustre le rôle crucial que jouent les aînés au sein d’une société. Partout au Québec, on chérit d’ailleurs leur inestimable sagesse. Les personnes âgées sont considérées comme une grande richesse, un patrimoine vivant, un « héritage socio-affectif ». En incarnant la « mémoire collective », elles peuvent offrir des modèles à ceux qui les écoutent.

Il fait consensus que la société québécoise sortira gagnante du vieillissement de la population si elle sait exploiter judicieusement le savoir des aînés. Ce défi démographique est une occasion en or d’instaurer de véritables mécanismes de mentorat. En plus de pouvoir transmettre du savoirfaire aux apprentis au travail, les plus âgés peuvent enseigner des valeurs et du savoir-être aux jeunes, « débrouillardise et « vaillantise» » incluses ! La contribution à la société d’un large bassin d’aînés ne s’arrête pas là. Selon plusieurs participants, plus de retraités signifie aussi plus d’énergies consacrées au bénévolat, « ce qui est une mine d’or pour les gouvernements qui épargnent ainsi des milliards de dollars par an », souligne-ton dans le Bas-Saint-Laurent. De nombreux aînés travaillent aussi de plus en plus longtemps. S’ils sont en santé et que les employeurs revoient les horaires et les conditions de travail pour les accommoder, les aînés seront de plus en plus nombreux à pouvoir œuvrer dans la sphère professionnelle à temps plein ou à temps partiel. Ils pourront aussi se charger de mandats ou de travaux ponctuels. Les participants aux Cafés des âges voient d’un bon œil la manne d’emplois à venir à la suite du départ à la retraite des baby-boomers. Celui-ci entraînera une baisse du chômage chez les jeunes et une intégration facilitée des novices. « L’expérience ne sera plus le premier critère d’embauche », estime-t-on à Matagami, dans le Nord-du-Québec.

Des valeurs à cultiver Finalement, le vieillissement de la société favorisera une meilleure perception de la vieillesse en général, de même qu’un retour aux valeurs familiales. « C’est une chance de retourner aux anciennes valeurs et à la cohabitation intergénérationnelle, qui permet l’échange de connaissances et une meilleure entraide familiale », note-t-on à Lebel-sur-Quévillon, dans le Nord-du Québec. À Rivière-du-Loup, on considère aussi que c’est une chance de vieillir « puisque nous avons plus de temps pour s’occuper de nos enfants et de nos petits-enfants ». Partout au Québec, des « papis et mamies » sont « sur appel » pour garder les petits-enfants, ce qui soulage les chefs de famille débordés et crée de précieux liens filiaux.

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Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

« Une société qui ne vieillit pas, c’est une société sans histoire, donc sans avenir. » – Saint-Laurent

« Chanceux d’avoir une bonne pension », les aînés possèdent des actifs financiers et conservent en général un bon pouvoir d’achat. Ce sont de grands consommateurs, notamment de biens immobiliers, de voyages et de produits culturels. « C’est un mythe de faire croire qu’on est un fardeau; les aînés font rouler l’économie ! », affirme un Montréalais. En outre, les aînés peuvent donner un coup de pouce financier à leurs enfants, voire être les bailleurs de fonds de leurs petits enfants qui s’engagent dans des études. Ils continueront aussi à verser leur part de taxes et d’impôts, notamment sur leur REER et leurs rentes de retraite.

Quelques bémols À noter que les participants jugent qu’il y a des conditions à remplir pour que le vieillissement de la population se révèle une chance. Un véritable dialogue intergénérationnel doit s’installer, basé sur l’écoute des besoins de chacun et la mise en commun de leurs différents acquis. Et cette « chance » est toujours conditionnelle au maintien optimal de la santé physique, mentale et financière des aînés. Si celle-ci est au rendez-vous, les Québécois s’enrichiront collectivement de cette situation démographique singulière.

1.2.2 C’est un problème! Pourquoi ? Seuls face à l’inconnu Le vieillissement de la société québécoise est perçu comme un monstre à plusieurs têtes devant lequel les participants aux Cafés des âges semblent se sentir impuissants : ils ne savent pas sur quel front l’attaquer et, surtout, au moyen de quel arsenal ! Ils craignent que le renversement de la pyramide démographique provoque de grands bouleversements sociaux, dont l’érosion probable des services universels actuels offerts en santé et en éducation. Mais ils ignorent quelle sera l’ampleur de l’onde de choc ressentie dans leur existence et dans celles de leurs proches.

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es citoyens consultés sont en quelque sorte face à l’inconnu. Et l’inconnu fait toujours peur. Une profonde inquiétude est donc perceptible dans la longue énumération des écueils liés au vieillissement de la population, un problème si profond qu’il va jusqu’à questionner « le maintien de la vitalité d’un peuple ». Le malaise est d’autant plus grand que ces Québécois se sentent seuls dans ce marasme. « La société actuelle est peu préparée », dit-on à Rimouski. Les gouvernements semblent pour l’heure inactifs en ce qui a trait à cette épineuse question. Ils donnent même l’impression d’être déjà dépassés par la croissance des besoins en santé, alors que le phénomène du vieillissement est à peine enclenché. « Les gouvernements d’hier n’ont pas prévu les problèmes actuels », déploret-on à Gatineau. 14

Comment traverser la crise du vieillissement de façon équitable pour toutes les générations, autant celles qui ont bâti le Québec que celles qui sont responsables de son avenir ? Doit-on « sauver les jeunes ou les vieux » ? Qui assumera la relève économique, professionnelle et sociale ? Assistonsnous au vieillissement des individus ou à celui des institutions ? Et la « question qui tue » : qui payera pour soigner les aînés ?

La santé et la qualité de vie, des points névralgiques La santé est au cœur des préoccupations : « On n’est pas équipé pour soigner les personnes âgées. » Ce constat, doublé d’un sentiment d’impuissance, est fort répandu chez les citoyens sondés, car les hôpitaux sont souvent bondés, et l’attente est longue. Les professionnels de la santé, dont les médecins de famille, ne sont pas assez nombreux, décrie-t-on. De plus, les aînés peuvent être forcés de quitter certaines régions pour bénéficier des traitements médicaux dont ils ont besoin. Par ailleurs, « les soins sont machinaux et déshumanisés », note-t-on entre autres à Matane, dans le Bas-Saint-Laurent. Et, finalement, le nombre de personnes atteintes par la maladie d’Alzheimer ne cesse d’augmenter.

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Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

Partout au Québec, on se demande si la vie doit être prolongée à tout prix… et à quel prix.

Le système de santé est déjà à bout de souffle, et les mécanismes qui devraient pallier ses manques ne répondent pas à la demande, jugent les participants. La mentalité québécoise est en effet de « placer les vieux » pour ne pas avoir à s’en occuper. Mais les services de transports adaptés et les résidences manquent à l’appel, de même que les soins à domicile, jugés déficients. Les proches aidants sont donc de plus en plus sollicités. Bien que certaines formes de soutien existent déjà pour eux, les citoyens sondés ont l’impression qu’aucune aide psychologique ou financière ne leur est présentement accordée par les gouvernements. La qualité de vie des aînés inquiète aussi la majorité des participants. « Quand les aînés sont isolés, ils vieillissent mal », rappelle-t-on à SaintLaurent. L’avenir n’est en effet pas rose pour les personnes vieillissantes. Toutes doivent ultimement faire le deuil de leur propre vie et apprivoiser l’idée de la mort, ce qui ne se fait pas sans peine pour l’être humain. Au cours de leur vieillesse, plusieurs aînés font face au deuil, à la solitude et à la pauvreté, et une majorité d’entre eux vit difficilement la perte d’autonomie et de contrôle sur leur propre vie. Des participants soulignent qu’ils peuvent être « forcés » par leurs enfants de déménager dans des résidences adaptées, alors qu’ils préfèreraient rester chez eux. Or, les sévices subis par certains aînés dans les centres d’hébergement sont « très inquiétants », soulignent quelques citoyens. En outre, les aînés sont aussi nombreux à souffrir de l’ennui, à avoir tendance à consommer beaucoup de médicaments et à être vulnérables aux abus de toutes sortes (physiques et financiers, notamment). C’est pour ces raisons que, partout au Québec, on se demande si la vie doit être prolongée à tout prix… et à quel prix. « Une voiture qui a 20 ans est rouillée et fait défaut. On ne peut pas la transformer en auto neuve; pourtant, on remplace des morceaux chez des humains qui ont 80 ans… », illustre-t-on à Maniwaki, dans l’Outaouais. La possible légalisation de l’euthanasie a fréquemment été soulevée lors des débats, non sans inquiétudes quant aux tenants et aboutissements d’une telle procédure. Reste que « mourir avec dignité est un problème dans le système actuel », affirme-t-on à Laval et un peu partout dans la province.

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Un manque d’argent et un surplus de travail Les participants aux Cafés des âges se préoccupent aussi de la santé financière de tous. « Alors que la vie coûte de plus en plus cher, nous serons de moins en moins nombreux à payer des impôts et il y aura de plus en plus de besoins », souligne-ton à Amqui, dans le Bas-Saint-Laurent. « Les vieilles générations sont nées dans l’austérité, puis ont connu la prospérité, alors que les jeunes générations sont nées dans la prospérité, mais connaîtront l’austérité si nous n’opérons pas un virage », remarque le Pont entre les générations, un groupe de réflexion formé de jeunes adultes et d’aînés dont le mandat est de favoriser le dialogue intergénérationnel. Mal rémunérés, plusieurs jeunes peinent à se tisser un coussin financier, et des aînés « manquent d’argent pour joindre les deux bouts ». Certains doivent rester en emploi plus longtemps en raison d’un manque de ressources financières, remarquent des citoyens de Shawville, dans l’Outaouais. « Les aînés qui travaillent chez Rona ne le font pas seulement pour se désennuyer, mais parce qu’ils ont besoin d’un revenu d’appoint », dit un participant de Montréal. Mais rien ne semble pouvoir freiner la pénurie de main-d’œuvre qui sera générée par le retrait massif des baby-boomers, une situation qui préoccupe les participants. Majeur, ce changement de garde sur le marché du travail « n’est pas préparé ». Des savoirs et des expertises pourraient se perdre. Des postes ne seront pas pourvus, ce qui pourrait mener à une diminution de l’offre de services, tant privés que publics. Si la majorité des participants pensent qu’il faut hausser l’âge de la retraite pour faciliter l’intégration des aînés – parfois jusqu’à 70 ans ! –, certains voient un problème économique à rémunérer les retraités qui, « les chanceux », empochent déjà une pension. De toute façon, pour l’heure, le marché du travail ne se soucie guère des échanges intergénérationnels. « On met les vieux à la retraite. Il n’y a pas de transition pour assurer la relève. On change un numéro pour un autre », se plaint-on à Maniwaki. « Les patrons pourraient annoncer avec trois mois d’avance l’arrivée d’un nouveau, et celui qui quitte pourrait le préparer », suggère-t-on. 15


Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

Beaucoup d’employeurs boudent encore « les vieux qui sont trop coûteux » et qui ont « de la difficulté à suivre l’esprit de performance » en vogue sur le marché de l’emploi. Maintenir les aînés en poste pourrait ultimement brimer l’intégration des jeunes en entreprise. On craint d’ailleurs une dégradation générale de leurs conditions de travail. « L’augmentation des heures de travail sera proportionnelle au manque flagrant de travailleurs », prévoit-on à Matagami, dans le Norddu-Québec.

Finalement, recourir massivement aux immigrants pour répondre aux besoins de maind’œuvre n’est pas considéré comme la solution miracle : le mécanisme de reconnaissance de leurs compétences est jugé inadéquat, et leur intégration pourrait ultimement menacer l’usage de la langue française et notre identité québécoise, selon certains.

Un avenir « hypothéqué » et inéquitable? Dans un contexte où il est probable que les coûts des services sociaux augmenteront alors que le nombre de contribuables ira décroissant, l’avenir économique des jeunes semble gravement « hypothéqué ». « Avons-nous encore les moyens de nous payer ce système de santé dans le contexte du vieillissement ? » demande le Pont entre les générations. Compte tenu de la baisse des revenus de l’État, de la hausse de la dette et de l’augmentation des cotisations aux différents régimes, le revenu disponible des jeunes pourrait fondre. Ce constat fait peur, d’autant plus que la plupart des jeunes ne bénéficient pas de l’aide de leurs employeurs pour se tricoter un fonds de retraite et que « les coffres de l’État seront probablement vides pour eux ». On souligne la possibilité que les jeunes se révoltent et refusent de payer s’ils devaient assumer seuls les coûts du vieillissement. Ce soulèvement pourrait causer des frictions intergénérationnelles dans la mesure où les jeunes n’auront pas le même poids politique que les aînés pour influencer leurs destinées. « Y aura-t-il une guerre de pouvoir entre les générations ? » se demande-t-on à La Sarre, en Abitibi-Témiscamingue.

Des échanges intergénérationnels cahoteux

« Un problème peut devenir une chance, dépendamment du chemin que l’on prend. » – Saint-AndréAvellin, Outaouais

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Développer une équité et un dialogue intergénérationnels s’annonce donc complexe. Les ponts entre générations sont d’emblée érodés par l’éclatement des familles et l’éloignement géographique. La « génération sandwich » ne sait déjà plus où donner de la tête entre la garderie et le CHSLD et pourrait se fatiguer. Et parce qu’ils ont des valeurs différentes, notamment sur le plan spirituel, « jeunes et vieux ne se comprennent pas ». C’est sans parler du fossé technologique qui les sépare. Que va-t-il arriver dans « une société individualiste » où les jeunes ont peu d’intérêt pour les

aînés? La vieillesse et l’enjeu du vieillissement sont dépeints de façon négative, entre autres par les médias. « Trop souvent, vieillir rime avec maladie, mort, fardeau social, obsolescence et nonperformance », affirme le Pont entre les générations. Les aînés se sentent donc « sous-utilisés », « dévalorisés », « infantilisés » et considérés comme « un fardeau qui coûte cher » à la société. « Il faut combattre les préjugés et le discours dominant qui désolidarise les générations », clame-t-on à Montréal. Ce souhait trouve un fort écho aux quatre coins du Québec.

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Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

1.3 Comment les jeunes vont-ils tirer leur épingle du jeu dans une société vieillissante? Se responsabiliser tout en étant guidés Perçus comme les moteurs du Québec, les jeunes incarnent l’énergie, la créativité, le changement et l’espoir de tous les possibles. Ces atouts leur permettront de relever les grands défis imposés par le vieillissement de la population dont celui, colossal, de réinventer notre société !

Cette « génération garderie », qui a grandi avec une clé autour le cou, a aussi développé une grande tolérance face à l’insécurité.

L

e fait est que le Québec aura besoin de renforts intelligents et d’« un idéal de société » pour faire face à son avenir. Une pénurie de main-d’œuvre sans précédent arrive à grands pas, et le financement des services publics s’annonce problématique en raison du nombre restreint de contribuables qui alimenteront les finances publiques. Comment se faire une place au soleil quand l’avenir paraît si sombre ? « D’abord en acceptant de s’intégrer à une société qui vieillit », affirme-t-on à Rimouski. Et aux quatre coins du Québec, on croit surtout que les petits doivent vite devenir grands : ils doivent « lâcher leurs ordis », « se responsabiliser », « comprendre qu’ils n’auront rien sans rien » et se montrer disciplinés et proactifs sur tous les plans : à l’école, au travail, de même que dans leur engagement envers leur famille et la société. Cependant, encore faut-il que les plus âgés assument leur rôle d’éclaireurs. « Les jeunes vont croire qu’ils savent où ils s’en vont, mais ils auront besoin de l’expérience des générations qui les précèdent. Le dialogue entre générations va devenir de plus en plus important », souligne-t-on aux Îlesde-la-Madeleine. En revanche, les jeunes devront écouter les conseils des « vieux », pour une fois ! Il est primordial que les aînés acceptent de « lâcher prise » et de faire une place aux jeunes sur le marché du travail et dans les instances décisionnelles, ajoute-t-on. Mais ces derniers doivent en premier lieu leur faire pleinement confiance ! Car malgré leurs airs nonchalants, les jeunes d’aujourd’hui ont des forces clés qui font défaut aux autres générations : ces férus de technologies apprennent vite, ils n’ont pas froid aux yeux, ils sont polyvalents, mobiles et ouverts sur le monde.

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Cette « génération garderie », qui a grandi avec une clé autour le cou, a aussi développé une grande tolérance face à l’insécurité, ce qui constitue un atout pour évoluer dans un monde où l’environnement est menacé, l’économie, globalisée, et qui tend à perdre ses repères spirituels et familiaux au profit du culte de l’argent.

Être bien formé et travailler dur L’éducation et la formation sont considérées comme les conditions sine qua non pour rosir l’avenir des jeunes Québécois. « Aujourd’hui, les diplômes sont indispensables, alors qu’avant l’expérience suffisait. Les jeunes devront s’adapter à cette réalité », rappelle-t-on à Laval. Ainsi, partout dans la province, on croit qu’il faut vite faire baisser le taux de décrochage scolaire, qu’on qualifie d’« effrayant » ! Mais on se questionne aussi sur la pertinence d’imposer des études aux jeunes « qui n’aiment pas l’école » et qui ont d’autres aptitudes. « Pourquoi imposer un 5e secondaire pour balayer les rues ? » se demande-t-on à Maniwaki. Plusieurs citoyens soulignent l’importance de valoriser l’apprentissage de métiers manuels, qui tendent à disparaître, notamment en région. C’est bien beau l’informatique et les « grandes carrières », mais le Québec aura toujours besoin de plombiers et d’électriciens ! Fait nouveau : on doit aussi mieux faire connaître les métiers en lien avec le soutien aux aînés, qui ne sont pas toujours « sexy », mais pour lesquels il y aura un grand besoin de travailleurs. Finalement, multiplier les stages en milieu de travail est vu comme le meilleur moyen pour jeter les bases du mentorat, un pont intergénérationnel que l’ensemble des participants souhaite voir s’ériger… et vite ! « Mentorat, parrainage, compagnonnage… Peu importe le vocable, l’accompagnement est une richesse aidante pour les jeunes et valorisante pour les aînés. Il ne doit pas se limiter au travail, mais à toute la vie en société », a-t-on conclu à l’unanimité dans les huit MRC du Bas-Saint-Laurent. 17


Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

Mentorat, parrainage, compagnonnage… Peu importe le vocable, l’accompagnement est une richesse aidante pour les jeunes et valorisante pour les aînés.

Paradoxalement, dans la course aux diplômes, les jeunes pourraient être tentés – ou même forcés ! – de réduire leur nombre d’années d’études pour intégrer plus rapidement le marché du travail, où ils seront attendus comme des sauveurs. Les employeurs manqueront effectivement de têtes et de bras, et personne ne croit que les immigrants pourront à eux seuls combler le vide créé par le départ à la retraite des baby-boomers. Les jeunes pourront donc facilement prendre les rênes des entreprises familiales ou combler les nombreux postes vacants. « Le Québec doit rester attrayant pour ces jeunes travailleurs, qui sont désormais plus mobiles », fait remarquer le Pont entre les générations. Bien qu’on s’attende à ce qu’ils aient « le gros bout du bâton » pour choisir leur domaine d’emploi et pour négocier leurs conditions de travail, les jeunes se demandent s’ils hériteront de bons jobs dans lesquels ils pourront s’épanouir.

Auront-ils accès aux postes de cadres si les aînés travaillent plus longtemps ? Les salaires baisseront-ils si les entreprises se retrouvent en difficulté financière ? Les jeunes seront-ils au final surchargés de travail ? « Avec les départs massifs à la retraite, les jeunes devront travailler plus fort et à un rythme très rapide; ils vivront beaucoup de pression », craint-on à Gentilly, dans le Centredu-Québec. Certains jeunes souhaitent que la formule des syndicats soit actualisée, car « elle complexifie l’accès à un emploi stable ». « On ne souhaite pas voir le mouvement syndical s’éteindre, mais il doit se réinventer ! », dit-on à New Carlisle, en Gaspésie. D’une manière ou d’une autre, le marché du travail devra être restructuré et « décloisonné » pour permettre aux jeunes d’y côtoyer plus d’aînés. Et pour satisfaire le dada de la génération montante : la qualité de vie.

La génération sandwich À Matagami, on avance que « les jeunes devront travailler plus fort que leurs prédécesseurs ». Mais, en général, les jeunes veulent plutôt passer moins de temps au boulot ! Ils recherchent une qualité de vie, souhaitent trouver un sens à leur travail et, surtout, cimenter un noyau familial fragile, trop souvent éclaté. Si « faire des enfants » apparaît comme une solution au vieillissement de la société, les jeunes souhaitent par contre le faire dans des conditions favorables et pouvoir s’engager dans l’éducation de leurs rejetons. Pour l’heure, les plus vieux, qui n’ont pas grandi dans la ouate, leur reprochent d’élever des « enfants-rois »… Les employeurs devront être conciliants pour permettre aux jeunes de jongler avec leurs obligations de chefs de famille, chefs de famille qui devront aussi soutenir des parents vieillissants. « Comme l’État ne pourra plus subvenir aux besoins des aînés, les jeunes devront trouver d’autres solutions pour prendre soin de leurs parents », affirme-t-on en Beauce. Pour la « génération sandwich », conjuguer ces deux réalités sera exigeant, mais pourrait être facilité par un retour aux valeurs familiales, ce qui est d’ailleurs souhaité par la grande majorité des citoyens consultés. On note que les congés parentaux et les garderies à prix modique favorisent la hausse des naissances – le Québec vit présentement un mini baby-boom – et renforce au passage les liens familiaux entre les poupons, les ados, les X, les Y, les boomers et les grands-parents, qui s’occupent beaucoup de leurs descendants. En Beauce, notamment, des citoyens remarquent qu’il y a de plus en plus de maisons intergénérationnelles dans les environs. « C’est signe d’une meilleure solidarité entre enfants et parents. »

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Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

Conserver un pouvoir financier et politique Quelles solutions ? « Adopter » des grands-parents si les nôtres sont décédés. Porter l’épicerie de la vieille voisine d’en haut ou déblayer son entrée pendant l’hiver. Envoyer un courriel à un centenaire à qui on a fait découvrir le Web !

De la solidarité intergénérationnelle, les jeunes en auront également besoin pour résoudre le casse-tête du financement de la dette nationale et des services publics. Cette épée de Damoclès leur sape le moral. « Ça va être dur et long », affirme-ton à Cabano, dans le Bas-Saint-Laurent. Les coûts croissants du système de santé et de services sociaux s’annoncent lourds pour la petite cohorte de « travailleurs-payeurs ». Ils s’inquiètent également de ne pas pouvoir plus tard bénéficier de rentes publiques de retraite. À Carleton-sur-Mer, on affirme que « toutes les générations devront s’unir pour développer de nouveaux programmes sociaux ». Mais la question de leur financement semble pour l’instant insoluble. Les jeunes ont aussi maille à partir avec leurs propres finances personnelles. Souvent perçus comme des accros à la consommation, comme des personnes qui « se créent des besoins », « veulent les derniers gadgets » et « ne voient pas la couleur de l’argent », les jeunes craignent pourtant l’escalade de l’endettement. Ils sont conscients qu’ils doivent épargner et consommer en respectant l’environnement. Plusieurs optent d’ailleurs déjà pour la simplicité volontaire, voire pour un séjour le plus long possible chez leurs parents afin d’économiser un loyer… ! Et bien qu’ils débutent leur vie active, les jeunes songent déjà à leur retraite, qu’ils envisagent austère. Seule une minorité pourra compter sur un généreux héritage ou un régime de pension d’entreprise pour assurer son avenir financier. La plupart se rabattent donc avec difficulté sur la seule issue possible : les REER. En plus de s’inquiéter de la baisse éventuelle de leur pouvoir financier, qu’ils craignent de voir s’étioler à cause des hausses de taxes et d’impôts, les jeunes sont préoccupés par leur pouvoir politique. Ils craignent les répercussions des choix « conservateurs » faits par une majorité d’électeurs âgés. « Les intérêts des élus, qui seront plus vieux, seront différents de ceux des jeunes », dit-on à Carleton-sur-Mer.

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Par nature cynique face aux « faux discours » des politiciens, la jeune génération devra pourtant faire partie des solutions mises de l’avant pour faire face au vieillissement. Ils devront « s’infiltrer dans les instances décisionnelles » et « devenir les leaders des lobbies ». Mais avant, s’ils veulent se faire entendre, les jeunes devront se mobiliser pour aller voter ! S’engager dans la société et auprès des aînés Finalement, pour vraiment tirer leur épingle du jeu au sein d’une société vieillissante, les jeunes doivent « passer d’une mentalité où tout leur est dû à une mentalité où il faut travailler pour avoir ce qu’on veut ! » Cette suggestion, entendue à Chibougamau, résume bien le ras-le-bol général de « l’individualisme » et de « l’égocentrisme » des jeunes qui ont été élevés au sein d’une société qui a survalorisé la consommation et la jeunesse. Exit le culte de l’image et « les heures passées à se regarder dans le miroir » ! Les jeunes doivent démontrer de l’ouverture et « retourner l’ascenseur ». Cultiver le respect des aînés, l’humilité et surtout la patience, « parce que dans la vie, on ne peut pas tout avoir tout de suite » ! Percevoir le monde autrement, notamment sortir des clichés concernant les « baby-boomers qui n’ont pensé qu’à eux » et « les vieux qui vont leur coûter cher ». Les jeunes doivent prendre conscience de « leur responsabilité » de veiller au bien-être des aînés. Pour ce faire, ils peuvent s’inspirer des communautés culturelles qu’ils sont appelés à côtoyer de plus en plus : elles semblent mieux intégrer les aînés à la famille et à la société. « Adopter » des grands-parents si les leurs sont décédés. Porter l’épicerie de la vieille voisine d’en haut ou déblayer son entrée pendant l’hiver. Envoyer un courriel à un centenaire à qui ils auront fait découvrir le Web ! Les jeunes doivent s’engager socialement au moyen de petits gestes et de projets collectifs pour favoriser les échanges entre les générations. Ils en bénéficieront aussi. Car, faut-il leur rappeler, leur jeunesse ne sera pas éternelle : les aînés de demain, c’est eux !

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Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

1.4 À quelles conditions les aînés pourront-ils demeurer actifs dans la société ? Rester en santé Sans elle, point de salut : la santé physique et mentale est la condition sine qua non pour que les aînés conservent leur dynamisme et le goût de bouger !

Les aînés doivent se maintenir en forme intellectuellement et socialement en continuant d’apprendre et en restant alertes.

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es participants aux Cafés des âges sont donc unanimes : les aînés doivent pouvoir compter sur un système de santé adapté à leurs besoins (suivis médicaux réguliers – notamment pour les personnes atteintes de maladies chroniques –, aide en cas de perte progressive d’autonomie, réadaptation, soins palliatifs, etc.). L’attente dans les centres hospitaliers doit être sensiblement réduite, car elle stresse les aînés, cultive leur négativisme et affecte leur santé mentale. Il faut aussi multiplier les soins de santé à domicile et faire en sorte que les aidants naturels soient mieux soutenus financièrement et psychologiquement par le gouvernement. Toutefois, sur le plan de la santé, tant physique que mentale, les aînés doivent faire leur part et « se prendre en charge », clament les participants. Ils ont « la responsabilité » de se garder en bonne forme physique en adoptant de saines habitudes de vie : bien se nourrir et faire du sport. À Gatineau, on se demande « comment motiver les aînés à faire de l’exercice ? » « En élaborant des stratégies pour leur donner le goût de bouger ! » répondent des citoyens de Rimouski.

Continuer d’apprendre et « rester dans le coup » Outre une machine corporelle bien huilée, la recette d’une vieillesse heureuse se complète par le fait de se sentir utile et valorisé, selon la population consultée. Pour ce faire, les aînés doivent se maintenir en forme intellectuellement et socialement en « continuant d’apprendre » et en « restant alertes » : lire les journaux, fréquenter l’Université du troisième âge, côtoyer des écoliers, « coacher » de jeunes adultes, voyager, assumer des responsabilités, maintenir des contacts sociaux et rester à l’affût des nouvelles technologies ! « L’évolution informatique devra être surpas20

sée », affirme-t-on à Villebois, dans la région de la Baie-James. Maîtriser les outils technologiques et l’Internet est considéré essentiel pour rester connecté à la vie d’aujourd’hui. Peu importe leur situation géographique, les aînés pourront ainsi « rester dans le coup » : ils pourront entre autres être mieux informés au moyen du Web et communiquer par courriel ou par téléphonie vidéo, une technologie gratuite qui permet déjà à certains de voir leurs petits-enfants grandir à distance ! Les aînés doivent cultiver l’ouverture, accueillir le changement et laisser tomber les « je ne suis pas capable, je suis trop vieux ». « Faire le deuil du bon vieux temps » et « faire attention à la force des ancrages et des habitudes », cela les aidera à maintenir une vie riche.

Travailler, transmettre leur savoir et « vendre leur chaise berçante » Le Québec doit lancer « une vaste campagne de lutte contre le décrochage des retraités ! » lance le Pont entre les générations. Les aînés pourront en effet s’activer en société de maintes façons, notamment en choisissant de travailler plus longtemps. L’idée de la semi-retraite ou de la retraite progressive sourit à plusieurs aînés consultés, de même qu’un éventuel report de l’âge de la retraite. Mais la décision de rester en emploi doit être volontaire et non devenir une obligation. Plusieurs aînés souhaitent pouvoir « profiter d’une retraite bien méritée ». Reste que plusieurs initiatives pourraient les inciter à demeurer en poste : adapter les horaires de travail, notamment pour ceux qui prennent soin d’un conjoint en perte d’autonomie; favoriser le travail à domicile, les mandats ponctuels, la formation continue et le recyclage en emploi; instaurer des incitatifs fiscaux pour ceux qui travaillent plus longtemps et des « désincitatifs fiscaux pour ceux qui décident malgré tout de prendre leur retraite », suggère le Pont entre les générations. Enfin, les « RH ne doivent pas pousser les aînés hors du marché de l’emploi », comme c’est la tendance actuellement.

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Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

L’idée de la semiretraite ou de la retraite progressive sourit à plusieurs aînés consultés, de même qu’un éventuel report de l’âge de la retraite.

« Il est important que les aînés reconnaissent leur responsabilité de modèles et qu’ils agissent en conséquence », affirme-t-on à Montréal. Tous les citoyens consultés sont favorables à la création de mécanismes de transferts de connaissance, tant sur le marché de l’emploi qu’ailleurs dans la société. « Les aînés peuvent devenir des mentors, et non des boss », dit-on à Matane, dans le Bas-SaintLaurent. Il faut former et encadrer les personnes âgées pour qu’elles puissent transmettre leurs passions aux jeunes. Les échanges entre générations pourraient être mieux intégrés au quotidien, avec la participation du milieu scolaire et d’associations privilégiant le mélange des âges. Montrer aux élèves du secondaire comment cuisiner un plat traditionnel dont ils raffolent ? Se joindre aux promenades quotidiennes des bouts de choux des garderies ? Enseigner aux jeunes quelques règles de bienséance et discuter avec eux d’une spiritualité aujourd’hui révolue ? Pourquoi pas ! « Les aînés doivent s’impliquer, vendre leur chaise berçante ! » affirment des résidants de Chandler, en Gaspésie. S’engager dans leur communauté au moyen du bénévolat leur permet d’être valorisés et d’entretenir de riches contacts sociaux. Des participants soulignent toutefois que ces activités doivent être pratiquées de façon volontaire, car les aînés peuvent être soumis à la pression sociale de s’engager bénévolement. Des organismes peuvent aussi abuser de leur générosité et de leur temps, dit-on.

Avoir des revenus suffisants et garder le moral Pour demeurer actifs en société, les aînés doivent aussi jouir d’une bonne santé financière. « Les aînés s’inquiètent de leurs revenus insuffisants », déclare-t-on un peu partout au Québec. On affirme qu’il manque de logements abordables pour eux et que plusieurs aînés vivent dans la pauvreté : ils n’ont pas tous « un bon fonds de retraite », et « la pension de vieillesse n’est pas indexée au coût de la vie ». Le supplément de revenu garanti offert par le gouvernement fédéral devrait aussi être automatique, car les aînés oublient souvent de le demander, souligne-t-on. Si le manque d’argent peut saboter leur qualité de vie, celle-ci est d’emblée toujours menacée par l’isolement, la solitude w w w. g e n e r a t i o n s .in m.q c.ca

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et la dépression. Trop occupés ou simplement indifférents, leurs enfants tardent à les visiter. Les petits-enfants peuvent grandir loin. Les conjoints et les amis luttent contre la maladie et, éventuellement, décèdent. Très vite, les aînés peuvent se retrouver abandonnés et esseulés. « Le suicide et l’isolement demeurent des problèmes cachés », relève-t-on à Québec. C’est pourquoi plusieurs souffrent du syndrome de la pilule. « On leur prescrit de plus en plus de drogues légales et en quantités toujours plus élevées. Cette toxicomanie endort-elle nos aînés ? » demande-t-on à Villebois, à la Baie-James. Par ailleurs, partout au Québec, se pose la question de l’euthanasie. Doit-on prolonger la vie à tout prix ? Car « quantité de vie n’égale pas toujours qualité de vie ». Qu’ils soient pauvres ou bien nantis, les aînés vivent tous avec la peur de perdre progressivement leur autonomie physique ou mentale. « Si je deviens « à charge », qui prendra soin de moi ? » est une question qui les taraude souvent. Devront-ils passer leur vieillesse dans un « ghetto » pour aînés ou, pire, dans une sorte de « mouroir » ? Partout au Québec, on dénonce le manque de maisons intergénérationnelles, le nombre limité de résidences adaptées aux différents niveaux d’autonomie et l’absence de certains soins médicaux en région. Plusieurs aînés doivent déménager pour recevoir des soins de santé. Or, ils veulent tous vieillir dans leur maison et, si possible, dans leur coin de pays ! Ainsi, il faut vite « un plan d’action gouvernemental en lien avec le vieillissement », affirme-t-on à Drummondville. Et toutes les municipalités doivent faciliter l’intégration des aînés. Par exemple, il leur faut renforcer l’offre de transports adaptés et collectifs (autobus, covoiturage, taxis), revoir l’aménagement des trottoirs et des parcs et développer des concepts intégraux, comme par exemple le modèle des « villes amies des aînés ». Il faut aussi diversifier l’offre d’activités pour les inciter à sortir de chez eux : « Pas juste des soirées dansantes ! » Les gouvernements pourraient aussi mieux prévenir certaines maladies, offrir des cours d’informatique 101, instaurer un mécanisme permettant aux personnes âgées de dénoncer des abus et bâtir une quantité d’habitations à prix modiques… avec des ascenseurs, s’il vous plaît ! 21


Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

« La société doit s’intéresser aux aînés pour qu’eux s’intéressent à la société. » – Nicolet, Centredu-Québec

Tuer le stéréotype du « vieux » Mais avant tout, un sérieux coup de balai s’impose dans les perceptions : « Il faut tuer le stéréotype du vieux ! » résume-t-on à Rimouski. Pour bien vieillir, les aînés doivent pouvoir se sentir fiers de leur âge et considérer les étapes franchies comme des réussites. Or, plusieurs se sentent plutôt « gênés de dire qu’ils ont 50 ans » et ont la mentalité « je ne veux pas déranger » ! « Une société accueillante pour les aînés aura revu son modèle économique, en cessant de tout calculer en terme de productivité », rappelle-t-on à Montréal. Parallèlement à une campagne nationale de valorisation des aînés, les aînés doivent eux-mêmes « s’organiser pour ne pas se faire organiser » : prendre la parole, faire connaître leurs besoins, aller voter et participer à la vie politique, tout en laissant une place aux jeunes. Le « pouvoir gris » devra partager son leadership, car les jeunes auront alors moins de poids politique, mais tout autant de besoins à combler. Il faut éviter une confrontation entre les générations ! Parce que tous s’entendent pour dire qu’un bon dialogue intergénérationnel n’est rien de moins que la fondation sur laquelle sera bâti le Québec de demain.

1.5 D’autres questions et d’autres réponses Les organisateurs des Cafés des âges avaient le choix d’animer les débats à partir de questions reflétant des préoccupations régionales ou sectorielles. Voici celles qui ont été soulevées dans différentes régions du Québec.

Des citoyens de cinq villes d’Abitibi-Témiscamingue se demandent : Quels défis intergénérationnels sont liés au vieillissement de la population ? Ils en ont identifié cinq. La famille : Le noyau familial est difficile à souder à cause de l’exode des jeunes de cette région. Une fois ces derniers dispersés dans les villes, les aînés se retrouvent souvent isolés et ils bénéficient de moins en moins de services dans leur communauté. Dans ce contexte, comment transmettre les valeurs familiales et les traditions ? « Savoir tricoter et faire des cannages, entre autres, il ne faut pas que ça perde ! » note-on à La Sarre. Le travail : Il faut assurer une relève en région et tirer partie de l’expertise des aînés. « Ils peuvent donner un répit aux jeunes professionnels en acceptant des contrats à temps partiel », suggère-t-on à Val-d’Or. Le pouvoir : « Il faut convaincre les jeunes que le pouvoir politique n’est pas sale… qu’il est ce qu’on en fait », affirme-t-on à Rouyn-Noranda. « Utilisons les technologies pour faciliter l’implication des jeunes en politique », suggère-t-on à Val-d’Or. Et « il faudrait commencer par atteindre l’équilibre jeunes-aînés dans les comités de bénévolat, les CA, les conseils municipaux… », note-t-on à Ville-Marie. La santé : « Il n’y a pas de solutions évidentes au problème des soins de santé à cause de la dispersion des gens sur un grand territoire. Il faut que la communauté s’implique dans la prise en charge, au lieu que tout repose sur le système de santé », disent des résidants de La Sarre.

À Saint-Laurent, sur l’île de Montréal, on se demande comment les générations peuvent contribuer au rapprochement des cultures. « Les jeunes de 0-6 ans sont d’excellents éducateurs : ils ne véhiculent aucun préjugé. » « Les jeunes sont les locomotives de l’ouverture culturelle sur l’autre et les aînés, les préservateurs des cultures particulières. C’est un bel équilibre à réaliser. »

L’école : Les défis sont la survie des écoles et la lutte au décrochage scolaire. « Reste que la clé de la réussite scolaire, c’est la famille ! » disent des habitants de Val-d’Or.

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Partie 1 – Synthèse des réponses aux questions

À Chapais, dans le Nord-du-Québec, on répond aux questions suivantes : Qu’est-ce qui fait que les générations vivent ensemble, mais ne se parlent pas? Et comment chaque génération peut-elle aider concrètement les autres? « Le manque d’ouverture, les préjugés, la peur du ridicule, des priorités et des objectifs différents (famille, travail, retraite), de même que des valeurs et des rythmes distincts. » « En misant sur les forces de chacun et sur un partage intelligent des tâches. Les jeunes peuvent notamment offrir de conduire les jeunes chez le médecin, car le malheur, c’est de se faire retirer sa voiture en vieillissant ! »

À Montréal, on discute de l’attitude la plus répandue chez les jeunes et les baby-boomers à l’égard du travail et on se demande comment résorber la pénurie de main-d’œuvre. « On doit se réaliser en travaillant, les entreprises ne payent pas décemment, c’est honteux! L’économie doit être au service des gens, pas le contraire. » « Faisons participer l’ensemble des employés aux changements dans les entreprises. » « La lutte au décrochage : avant de parler de transfert de compétences, il faut en acquérir une ! » « L’entreprise privée devrait investir dans l’éducation. Elle en est la principale bénéficiaire et il s’agit d’une responsabilité sociale. » « Il faut des entreprises citoyennes plutôt que des entreprises jetables !  » « Les enseignants en choix de carrière doivent être mieux formés. »

À Trois-Rivières, en Mauricie, on se questionne sur les façons de tirer partie du vieillissement, sur les contributions que les jeunes et les aînés peuvent s’apporter et sur les valeurs qui les distinguent et qui les rapprochent. « Il faut abolir l’âgisme et le silence autour de l’isolement, du suicide et de la toxicomanie chez les aînés. C’est tabou ! » « Il faut apprendre à ne pas cataloguer, à ne pas mettre en boîte les différentes étapes de la vie : on est toujours en adaptation, on est citoyen de la naissance à la mort ! » « Les jeunes et les aînés peuvent se donner beaucoup : ces deux groupes sont tous les deux en dehors du système de productivité. Ils doivent en prendre conscience. » « La curiosité et le désir de réaliser des défis rapprochent les jeunes et les aînés; la religion, l’usage des technologies et la sexualité les distinguent, entre autres. »

Aussi, la retraite est-elle un droit ou un devoir ? « C’est un choix. » « C’est une question d’urgence nationale ! » « C’est un concept désuet : nous vivons trop longtemps. » « Encore faut-il avoir les moyens de s’arrêter… » « On aura besoin de tout le monde! Il n’y aura pas de choix à faire. »

À Adstock, dans Chaudière-Appalaches, on se demande par quels moyens rapprocher les générations et revitaliser le milieu. « Il faut des événements rassembleurs de type pique-niques familiaux, tournois de balle et spectacles à l’église! Il faut aussi un lieu intergénérationnel et multifonctionnel : dépanneur, essence, poste, loisirs, bibliothèque, relais pour motoneiges et 4 roues ! »

À Maniwaki, dans l’Outaouais, on pose la question : Estce que ce sont les aînés qui doivent aller vers les jeunes ? « Ma mère disait : “C’est à mes enfants de m’appeler”… » « Si mes grands-parents m’invitaient, j’irais les voir, et s’ils m’invitaient souvent, j’irais souvent. »

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Photo : Kiran Ambwani

Partie 2 Les constats transversaux

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Partie 2 – Les constats transversaux

2.1 Ce qui fait consensus à travers les générations Une société à repenser Le déséquilibre démographique auquel le Québec fait face est causé par la combinaison de deux phénomènes : un faible taux de natalité allié au vieillissement naturel d’une grande cohorte de personnes, qui peuvent désormais compter sur une meilleure espérance de vie.

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ette conjoncture suscite une profonde réflexion tant chez les jeunes que chez les aînés, car tous en ressentiront potentiellement les effets. « Il y a un sentiment d’inquiétude assez répandu », note-t-on à Rimouski. Néanmoins, il est parfois souligné que les baby-boomers semblent un peu moins inquiets que les autres. Une société qui manque de relève vit une situation précaire. « Notre société devra apprendre à regrouper les forces de tous ses citoyens », affirment à l’unisson les participants de la Baie-James. En Gaspésie, on s’entend sur le fait que le fonctionnement de la société devra être repensé sur tous les plans : le travail (horaires, mentorat); l’habitation (ghettoïsation des jeunes et des aînés, soutien familial); la vie sociale (activités intergénérationnelles, bénévolat, conciliation travailfamille); et la transmission de la culture.

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En filigrane, le débat sur l’euthanasie est déjà latent. Jeunes et aînés sont prêts à se questionner sur les avenues possibles pour permettre à tous de jouir d’une bonne qualité de vie durant la vieillesse et de « mourir plus dignement » au moment venu.

La précarité des finances personnelles et publiques La situation financière de plusieurs générations est incertaine. D’un côté, un lourd fardeau fiscal pourra peser sur les jeunes, qui seront peu nombreux à assumer le coût des régimes sociaux au moyen de leurs cotisations d’impôts. En ce sens, l’équité entre les générations pourrait être compromise. De leur côté, tous les aînés ne roulent pas sur l’or. Plusieurs pourront être tentés de travailler plus longtemps pour combler leurs manques financiers. Mais il est à prévoir que la majorité des baby-boomers prendront leur retraite, laissant un vide vertigineux au sein des entreprises privées et des institutions publiques.

La santé, toujours la santé

Un marché du travail bouleversé

Le Québec doit assurer des renforts dans les entreprises, les institutions politiques, les organismes sociaux et le système de santé, qui constituera un point névralgique. Il est impératif de sensibiliser les jeunes et les aînés à la responsabilité qu’ils ont de prendre soin de leur santé. « La santé est un pré-requis pour être actif en société », rappelle-ton un peu partout. Tout le monde sent qu’on se dirige vers un gouffre financier en ce qui concerne les coûts, en augmentation, liés à la santé. « Peut-on exiger une plus grande prise en charge de la santé par les communautés et miser sur la prévention ? » se demandent les participants d’Abitibi-Témiscamingue. Pour l’instant, l’ensemble des citoyens consultés dénonce l’insuffisance des services de santé adaptés aux aînés – soins à domicile, hébergement, transports, maisons intergénérationnelles, soutien envers les aidants naturels.

Tout en multipliant les occasions d’emploi pour les jeunes, la pénurie de main-d’œuvre annoncée risque de générer des difficultés économiques. Et, à défaut de créer des mécanismes de transfert des connaissances, elle pourrait aussi faire disparaître de précieuses expertises dont le Québec aurait besoin pour demeurer compétitif sur le marché mondial. La retraite progressive, l’aménagement d’horaires flexibles et le mentorat pourraient alléger la crise sur le marché de l’emploi en encourageant les aînés à demeurer actifs plus longtemps. Néanmoins, les jeunes doivent aussi être mis à contribution dans le partage des connaissances; ils devraient être chargés de garder les aînés à jour sur le plan technologique. Face à l’enjeu du vieillissement, la jeunesse doit aussi « trouver des solutions constructives, quitte à réinventer la roue » et acquérir une solide

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Partie 2 – Les constats transversaux

éducation. Le décrochage scolaire occasionne un coût énorme pour la société, selon l’ensemble des participants. Valoriser de nouveau l’apprentissage des métiers manuels est également jugé important. De plus, plusieurs participants aux Cafés des âges croient que les aînés doivent participer davantage à l’éducation en s’intégrant dans les milieux scolaires; on pourrait par exemple créer « un Cercle des lumières dans les écoles primaires », image-t-on aux Îles-de-la-Madeleine.

Bâtir un pont entre les générations Le défi du vieillissement est complexifié par le fait que nous vivons dans une société individualiste, au sein de laquelle les valeurs familiales, spirituelles et communautaires s’étiolent. En outre, les nouveaux modèles familiaux (familles monoparentales, homosexualité, adoption, etc.) ne facilitent par la transmission des valeurs et les rapports intergénérationnels.

Bien qu’elle soit souhaitée par tous, la communication entre les générations reste donc difficile : « Entre des jeunes individualistes et des aînés « fermés », notre société compartimentée favorise plutôt la méfiance, les préjugés, voire la rupture », résume-t-on dans les huit MRC du Bas-Saint-Laurent. Ainsi, « il est urgent que les gens de toutes les générations se parlent ! » clame-t-on à Rimouski. Ce dialogue doit être soutenu par une valorisation des rôles clés de « deux solitudes » : les aînés doivent se tourner vers l’avenir, et les jeunes doivent aiguiser leur conscience sociale. « C’est par l’échange et l’abolition des préjugés qu’on arrivera à établir un réel projet de société par lequel on relèvera le défi du vieillissement », affirme-t-on à Montréal. Ce message clé circule aussi dans toutes les régions du Québec.

2.2 Ce qui suscite un consensus plus marqué chez les jeunes Hériter d’une potentielle catastrophe sociale Comme partout sur la planète, les jeunes Québécois travaillent à se construire un avenir. Ils étudient dans l’espoir de gagner décemment leur vie et ils multiplient les jobines pour acquérir de l’expérience. Ils rêvent aussi de fonder une famille et d’être heureux. Le défi de se tailler une place dans le monde marque toujours le début de la vie adulte, et ils l’assument pleinement.

La relève sera insuffisante pour porter l’avenir du Québec. Comment se préparer ?

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ais dans un Québec vieillissant, ce défi est doublé d’une responsabilité dont ils se passeraient bien : être les héritiers d’une potentielle catastrophe démographique, financière et sociale. « La relève sera insuffisante pour porter l’avenir du Québec. Comment se préparer ? » est l’une des nombreuses questions sans réponse qui noircissent leurs horizons. Ils entendent de plus en plus que tout ce qui peut être pris pour acquis aujourd’hui par les citoyens sera incertain demain. Tout indique que le renversement de la pyramide démographique remettra en question les rouages de la société et

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fragilisera ses fondements. Les jeunes se retrouvent donc orphelins de certitudes et « face à un mur » : ils sont d’accord pour reprendre le flambeau, mais comment le faire quand le sol semble déjà se dérober sous leurs pieds ?

Perdre la qualité de vie Un gouffre dans lequel ils craignent de s’enliser est celui des finances publiques et de la dette nationale. « Verront-ils leurs impôts doubler ou tripler pour financer les soins aux aînés et le maintien des régimes publics ? » demande-t-on dans la région de la Baie-James. Seront-ils seuls à faire les frais du choc démographique ? Tout en étant obligés d’assumer une facture salée, les jeunes ont aussi peur d’être abandonnés. « Aurai-je droit à une retraite me permettant de vivre adéquatement, moi qui suis de la génération X ? » 27


Partie 2 – Les constats transversaux

« Ce n’est pas le travail qui les inquiète, mais la société dans laquelle ils vont devoir vivre. » – Montréal

se demande un Madelinot. Partout dans la province, des jeunes soulignent aussi que les infrastructures qu’on bâtira pour les aînés deviendront rapidement caduques. « Dans 30 ans, qui payera pour l’entretien de ces infrastructures inutiles ? » La possibilité de voir leurs revenus nets diminuer n’enchante guère les jeunes, qui travaillent déjà souvent sans sécurité d’emploi et doivent commencer à épargner tôt en vue de leurs vieux jours. Ils appréhendent aussi une révision à la baisse des conditions de travail dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre. Les jeunes s’interrogent sur comment avoir accès à l’expertise des aînés, qui sont appelés à

rester plus longtemps sur le marché du travail. « Actuellement, les jeunes se font dire qu’ils manquent d’expérience, et les aînés se font dire qu’ils sont trop vieux… », souligne-t-on à Plessisville, dans le Centre-du-Québec. Concilier le travail et la famille est également au cœur de leurs préoccupations. Bien que plusieurs embrassent un retour aux valeurs familiales – l’actuelle hausse des naissances le prouve –, certains ne trouvent pas l’environnement favorable pour avoir des enfants. Ils se demandent si c’est une bonne idée de fonder une famille au sein d’une société vieillissante qui, paradoxalement, peut se montrer intolérante face aux enfants !

Les jeunes ont moins de pouvoir sur leurs destinées « Le dialogue est à la base de toute relation. Les aînés et les jeunes doivent se parler afin de connaître leurs réalités respectives et accepter l’autre », affirment des Montréalais. Le combat contre les préjugés doit être mis en parallèle avec un processus de valorisation de l’apport des aînés. En revanche, les jeunes comptent sur leurs prédécesseurs pour avoir la volonté de rester actifs dans la société. Car, pour leur part, entre les études, le boulot, le soin aux enfants et à leurs parents vieillissants, les jeunes auront peu de temps à consacrer au bénévolat. « Les jeunes sont débordés; leur vie ne semble plus leur appartenir ! » remarquent des résidants de Price, dans le Bas-SaintLaurent. Les jeunes anticipent d’ailleurs le fait qu’ils auront peu d’énergie à consacrer à la politique et que ce sont les nombreux retraités qui éliront les prochains gouvernements. À la Baie-James, des jeunes se posent la question suivante : Devrions-nous conscientiser la classe des baby-boomers à leur poids dans la balance politique et leur enseigner à l’utiliser pertinemment, pour le mieux de la société en général ? » Finalement, certains jeunes se préoccupent du sort de l’identité québécoise et de la langue française, potentiellement menacées par les bouleversements démographiques et le recours à l’immigration pour combler les déficits de main-d’œuvre.

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Partie 2 – Les constats transversaux

2.3 Ce qui suscite un consensus plus marqué chez les aînés Maintenir une autonomie et une qualité de vie Plus une personne vieillit, plus elle a tendance à se sentir fragile et vulnérable face aux aléas de la vie. C’est pourquoi les aînés sont particulièrement tracassés par le manque de professionnels de la santé qui pourrait s’accentuer. L’offre de soins de santé, de même que leur qualité, pourraient être affectées. Les aînés redoutent évidemment de perdre leur autonomie physique ou mentale et d’en vivre les conséquences malheureuses : perte de leur permis de conduire, déménagement involontaire en résidence adaptée, « devenir à charge », solitude, abandon social, etc.

« Les aînés devraient refuser de se retrouver uniquement avec des aînés » – Bas-Saint-Laurent

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a qualité de vie demeure une grande préoccupation pour les aînés. Tous réclament des soins « plus humains », plus de soins à domicile, du soutien aux aidants naturels… qui sont souvent euxmêmes des aînés ! Ils sont enclins à offrir leur temps aux jeunes générations et à la société, et certains travailleront plus longtemps « si les 50 ans et plus peuvent bénéficier de formations pertinentes », précise-t-on à Québec. Mais les plus âgés doivent faire attention à ne pas s’épuiser, à respecter leurs nouvelles limites physiques et mentales. « Le vieillissement entraîne des problèmes de santé qui font en sorte qu’il est plus difficile de demeurer actif », rappelle-t-on dans le Centre-du-Québec. Ils regrettent que certains de leurs compatriotes vivent dans la pauvreté et que, en général, on place les aînés dans des « ghettos » plutôt que de les intégrer réellement à la collectivité. « Il faut le moins possible les sortir de leur domicile ! » clame-t-on à Nicolet, dans le Centre-du-Québec. « Et les aînés devraient refuser de se retrouver uniquement avec des aînés », suggère-t-on dans le Bas-Saint-Laurent.

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Soutenir les jeunes et rester connecté Les générations vieillissantes se font du mauvais sang quant à la pression financière qui sera exercée sur les jeunes. Quelle empreinte laisseront-ils sur les autres générations ? « Il y a une gêne chez les plus vieux à transférer ces problèmes aux jeunes », dit-on à Cabano, dans le Bas-Saint-Laurent. En général, les aînés souhaitent un retour aux valeurs traditionnelles d’entraide, qui se sont perdues avec la montée de l’individualisme. Ils remarquent aussi une baisse des valeurs spirituelles chez les jeunes, qui auraient pourtant bien besoin de repères dans ce monde en mouvance perpétuelle. Les aînés sont nombreux à aider leurs enfants comme ils peuvent, surtout en assurant une présence auprès des petits-enfants. Mais ils ont souvent du mal à se reconnaître au sein de familles reconstituées. Comment transmettre leurs valeurs dans ces conditions ? Enfin, les personnes vieillissantes ont du mal à vivre sous le joug des technologies. Ces personnes, qui ont été fonctionnelles toute leur vie, doivent maintenant réapprendre à fonctionner. Ne serait-ce que pour communiquer avec leurs proches au moyen de l’Internet et de webcams ! Les aînés savent que s’adapter aux nouvelles technologies est un passage obligé, mais l’exercice reste laborieux. D’autant plus que la vie semble aller toujours de plus en plus vite, alors qu’ils apprécient vivre de plus en plus lentement…

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Partie 2 – Les constats transversaux

2.4 Ce qui est particulier aux régions, aux milieux ruraux et aux villes Exode des aînés et dévitalisation des communautés Dans les régions éloignées et les milieux ruraux, le vieillissement de la population est une nouvelle ombre au tableau. Privées de sang neuf, des villes pourraient cesser de se développer, et des villages risquent d’être carrément rayés de la carte.

Après l’exode des jeunes, qui contribue déjà à dévitaliser ces communautés, on commence à assister à un exode des aînés.

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ar après l’exode des jeunes, qui contribue déjà à dévitaliser ces communautés, on commence à assister à un exode des aînés. Certains doivent déménager pour bénéficier des soins de santé dont ils ont besoin, et plusieurs quittent leur coin de pays pour contrer l’isolement. Ils se rapprochent de leurs enfants depuis longtemps exilés pour obtenir leur soutien. S’ils vont vieillir ailleurs, certains reviennent tout de même mourir dans leur région, précise-t-on en AbitibiTémiscamingue. La disparation graduelle des aînés entraîne aussi l’appauvrissement de la culture en région, notamment chez les Autochtones, relève-t-on à Gaspé. De plus, dans les petits milieux peu populeux, il est ardu de financer de nouveaux services et infrastructures. « Tout est à développer sur le plan des services à domicile et des transports adaptés », remarque-t-on à Gentilly, dans le Centre-du-Québec.

La difficile rétention des jeunes Aux quatre coins du Québec, un défi des milieux ruraux est de garder les écoles ouvertes. « Que font les commissions scolaires quant à la gestion de la décroissance du nombre d’élèves ? » demandent des résidants d’Amos. La survie des établissements scolaires est vitale pour continuer d’offrir un milieu de vie intéressant aux jeunes familles, qui pourront éventuellement soutenir des aînés. « D’abord, l’école ferme. Ensuite, c’est le dépanneur, le poste d’essence, la caisse Desjardins… c’est un cercle vicieux », explique-t-on en Abitibi-Témiscamingue. En Gaspésie, on craint également que le cégep régional ferme ses portes. « La rétention et le retour des jeunes dans la région sont essentiels pour garder les communautés vivantes et tournées vers l’avenir. » Aux Îles-de-la-Madeleine, on dit avoir besoin de l’imagination des jeunes. « Ils maintiennent les vieux en vie. » On croit aussi que « c’est la place que les babyboomers laissent aux jeunes qui les fait revenir ». 30

Toutefois, les jeunes qui souhaitent faire leur vie en milieu rural font face à des obstacles. « Les petites municipalités ciblent leurs services vers la majorité de retraités; les jeunes risquent d’être de moins en moins attirés vers ces lieux », affirme-t-on à Gatineau. À Shawville, dans l’Outaouais, on souligne leur difficulté à trouver un emploi et, à Amqui, on relève qu’ils doivent souvent travailler au salaire minimum. À Val-d’Or et à Kamouraska, la relève agricole se fait rare à cause du coût très élevé des terres. « Il faut faire des efforts pour recruter tous les types d’expertises, pas seulement des médecins », noteon aussi à Chandler, en Gaspésie. Dans cette région, l’accès des jeunes à la propriété est également un problème. « Des retraités relativement fortunés achètent des propriétés, ce qui fait grimper les prix. Le marché immobilier est bouleversé », dit-on à New Carlisle. Néanmoins, ces retraités propriétaires enrichissent les municipalités. « Celles-ci profitent de leurs taxes foncières et scolaires et d’une une immigration qui assure leur survie », nuance-t-on entre autres dans le Bas-Saint-Laurent.

Vivre en région ou en ville ? En outre, dans le contexte du vieillissement de la population, vivre en région présente certains avantages. « Les jeunes des milieux ruraux ont plus de facilité à faire entendre leur point de vue que ceux vivant en ville », estime-t-on à Sainte-Anne-des-Monts, en Gaspésie. Et certains participants pensent que les aînés vivent moins isolés en campagne qu’en ville, où elles se perdent dans une masse d’étrangers. Au cours des Cafés des âges, peu de commentaires on été formulés concernant les villes dans le contexte du vieillissement de la population. On a toutefois fait remarquer que Montréal pourra être considérée comme un « laboratoire modèle » si le multiculturalisme et le phénomène des accommodements s’étendent aux régions, dans la foulée de l’essor de l’immigration.

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Partie 2 – Les constats transversaux

2.5 Ce qui suscite des divisions et l’expression de divergences Les personnes issues de différentes générations voient toutes les choses à leur façon. Dépendamment de leur âge et de leur chemin de vie, elles ont des priorités et des objectifs différents. Au cours des Cafés des âges, leurs vues se sont confrontées sur divers sujets. Voici quelques exemples remarqués par les animateurs des Cafés des âges.

« Les jeunes pourraient animer les aînés. Mais certains ne sont pas trop à l’aise avec l’idée de se “faire animer” ! » – Nicolet, Centredu-Québec

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n ce qui a trait au vieillissement de la société québécoise, les mêmes constats et préoccupations sont généralement partagés par les jeunes et les aînés. « C’est plutôt le fait d’appréhender l’avenir avec confiance ou avec inquiétude qui a fait divergence au sein de certains groupes », remarque-t-on à Kamouraska, dans le Bas-Saint-Laurent. Jeunes et moins jeunes entretiennent un rapport différent au travail. Par exemple, pour les aînés d’Abitibi-Témiscamingue, c’est un devoir de gagner sa vie et de le faire au même endroit toute sa vie, s’il le faut. Pour les jeunes, travailler est un plutôt accomplissement. « Ils ont rayé l’idée de sacrifice. » C’est pourquoi ils préfèrent généralement de bonnes conditions de travail à un salaire extravagant. À Montréal, on constate aussi que pour les jeunes, le travail est « un des moyens » de se réaliser. Mais pour les babyboomers, « c’est le moyen ». Grâce à l’Internet, on peut s’informer davantage et communiquer facilement. Mais Internet peut « inciter à la surconsommation », et vivre dans un monde virtuel n’encourage pas le développement de relations durables et l’activité physique.

En général, on remarque que le souci environnemental semble « moins urgent » chez les aînés que chez les jeunes, pour qui ce tracas est intégré. Mais Gaspésiens et Madelinots de tous les âges se demandent : « Quel monde laisseronsnous à nos enfants et petits-enfants ? » Et à SaintLaurent, sur l’île de Montréal, tous sont d’avis qu’ensemble, les générations peuvent contribuer à améliorer l’environnement. « Il faut allier la conscience écologique très développée des jeunes aux valeurs d’économie, de simplicité, de frugalité dont ont hérité les aînés. » On suggère aussi des activités intergénérationnelles de type corvées de nettoyage et d’embellissement des balcons ! À Chandler, en Gaspésie, de vives réactions se sont faites entendre après qu’un participant ait déclaré : « Je ne veux pas vivre jusqu’à 100 ans et j’espère qu’on légalisera l’euthanasie ! » S’il a lieu, le débat de société sur le suicide assisté sera épique ! Il faut savoir faire, mais aussi savoir vivre ! Parce qu’ils maîtrisent bien les technologies, les jeunes sont bien outillés pour faire face à l’avenir. Mais les aînés voudraient pouvoir les conseiller sur les façons de bien mener leur vie. « Ces deux visions ne sont pas incompatibles, mais donnent lieu à des frictions entre les générations », souligne-t-on à Chapais, dans le Nord-du-Québec.

Quelques contradictions glanées au fil du discours ambiant… Les jeunes reprochent souvent aux aînés de « vivre dans le passé » et de rester accrochés aux traditions… mais ils veulent que « ce riche savoir » soit davantage partagé avec eux. Les aînés trouvent les jeunes paresseux, immatures et inconséquents… mais ils souhaitent leur faire pleinement confiance pour assurer l’avenir du Québec. Les aînés disent que les jeunes n’ont plus de valeurs familiales… mais les jeunes affirment vouloir moins travailler afin de passer plus de temps en famille. Allez savoir !

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Photo : Kiran Ambwani

Partie 3 Les préoccupations face au vieillissement de la population

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Partie 3 – Les préoccupations face au vieillissement de la population

Les préoccupations face au vieillissement de la population L’analyse des contenus des Cafés des âges fait ressortir une liste de 10 enjeux que l’on peut identifier comme prioritaires. Nous les avons identifiés en tenant compte de leur récurrence dans les discours captés lors des Cafés des âges, d’une région à l’autre et entre les générations. 1 La santé : comment assurer la qualité et la diversité des soins de santé pour un grand nombre d’aînés, tout en maintenant de bons services pour l’ensemble de la population ? 2 La pénurie de main-d’œuvre : quelles seront les répercussions d’un manque de travailleurs sur la transmission des savoirs, les conditions de travail et la santé économique du Québec ? 3 Le financement des pensions de retraite et des services publics : qui alimentera les coffres de l’État et au prix de quels sacrifices individuels et sociaux ? 4 La qualité de vie des aînés : vieilliront-ils dans des « mouroirs », dans la pauvreté, dans la solitude et en se sentant « de trop » dans la société ? 5 L’équité entre les générations : les jeunes pourront-ils continuer à bénéficier des mêmes droits et avantages sociaux dont jouissent aujourd’hui leurs compatriotes ? 6 Le rôle des gouvernements, des communautés et des citoyens : qui doit assumer les responsabilités individuelles et collectives liées au vieillissement de la population ? 7 Le dialogue intergénérationnel : les « jeunes » et les « vieux » arriveront-ils à se parler, à s’entraider et à partager leurs forces respectives ? 8 Le partage du pouvoir entre générations : comment les générations regroupant moins d’électeurs pourront-elles faire pression sur les dirigeants politiques et influencer leurs destinées ? 9 La dévitalisation des milieux ruraux et des régions : comment les petites communautés survivront-elles au départ des jeunes, à l’exode des aînés et au décès de leurs habitants ? 10 Le maintien de la vitalité d’un peuple et de sa culture : en quoi la culture québécoise et la langue française sont-elles menacées par le revers démographique et l’essor de l’immigration ?

Lors du Forum national réunissant quelque 70 représentants de nos partenaires régionaux (16 régions étaient représentées) et de nos partenaires nationaux, tenu le 28 mai 2010 à Québec, les participants ont tenu à mettre un bémol à cette liste de préoccupations. Sans nier l’importance des quatre préoccupations énoncées en priorité dans cette liste, nos partenaires ont insisté sur trois choses : 1 Il sera important, lors des discussions des Rendez-vous régionaux, de faire ressortir, au-delà des préoccupations particulières sur la santé, les retraites, le marché du travail ou la qualité de vie des aînés, le projet de société, la vision globale, l’avenir collectif qui pourrait ressortir d’un dialogue constructif entre les générations.

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2 Sur les questions particulières, nous voulons aller au-delà du constat et proposer des actions à entreprendre, tant au niveau national qu’aux niveaux régional et local. 3 Il serait important de mettre l’accent sur les préoccupations 5 à 8 de la liste présentée ci-haut. Parmi les préoccupations qui ressortent des discussions, plusieurs concernent la nécessité de démystifier les préjugés et de faire tomber les tabous à l’égard du vieillissement, de combattre l’âgisme et le jeunisme, d’aborder franchement le partage du pouvoir et des responsabilités entre les générations et de concevoir des pistes de collaboration, de partage et de transmission entre Québécois de tous les âges.

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Photo : Kiran Ambwani

Partie 4 D’autres questions à débattre

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Partie 4 – D’autres questions à débattre

Affronter le vieillissement, c’est affronter nos démons Il est impossible d’envisager l’avenir d’une société sans d’abord examiner ce qu’elle incarne dans le présent. C’est pourquoi, pour faire face au vieillissement de sa population, le Québec doit aussi faire face à ses démons. À preuve, quelques malaises déjà ancrés dans la société n’ont pu être contournés dans les Cafés des âges.

L’héritage intergénérationnel, c’est aussi la qualité de l’environnement qu’on laissera à ceux qui suivront.

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n tête de liste, l’éclatement de la famille, tant sur les plans relationnel que géographique. De faibles liens familiaux constituent un obstacle à la création d’un dialogue intergénérationnel, nécessaire pour que tous puissent s’épanouir dans une société vieillissante. Ce dialogue doit avant tout prendre racine à la base, dans la cellule familiale. Or, actuellement, celle-ci est souvent éparpillée, reconstituée ou carrément dysfonctionnelle. Le rejet de la spiritualité, qui gagne en force au Québec depuis la Révolution tranquille, est également identifié comme un nœud social. Il complique la communication entre les jeunes et les aînés, qui trouvent du réconfort et des repères dans leurs croyances. La religion a même été qualifiée de source de « conflits » entre les générations. Le culte de la beauté, de la jeunesse et du « moment présent » serait un autre frein à l’intégration des aînés dans notre société. Pour bien vieillir collectivement, il faudra d’abord accepter de vieillir individuellement ! L’héritage intergénérationnel, c’est aussi la qualité de l’environnement qu’on laissera à ceux qui suivront. C’est pourquoi la volonté de consommer de façon responsable, signe d’une nouvelle conscience environnementale, a été abordée ça et là dans les débats. Enfin, les discussions des Cafés des âges ont relancé les débats sur l’inexorable dévitalisation des régions et la fragilité de « l’identité québécoise ». Dans le contexte du vieillissement de la population, ces deux chagrins sociaux pourraient être ravivés.

À qui les responsabilités ? Les citoyens qui ont participé aux Cafés des âges ont de grandes attentes à l’égard des gouverne36

ments, tant aux niveaux fédéral, provincial que municipal. Ils souhaitent voir les décideurs politiques prendre la direction du grand chantier qui s’annonce : ils doivent réduire les dépenses excessives, faciliter la natalité, sauvegarder les pensions de retraite publiques, multiplier les soins à domicile et soutenir les aidants naturels. De plus, ils doivent huiler le système de santé, construire des infrastructures, revaloriser les aînés, revoir les rouages du marché du travail, créer des incitatifs fiscaux pour ceci et pour cela… Bref, nos gouvernements ont tout un contrat sur les bras ! Mais dans ce discours dominant, qui tend à tout remettre entre les mains des gouvernements, on sent aussi une insatisfaction : « Peu importe les gouvernements en place, tous prennent des décisions en fonction des prochaines élections », diton par exemple à Chandler, en Gaspésie. C’est peut-être pour cette raison qu’ici et là, un courant émerge : l’idée que les citoyens devront aussi assumer des responsabilités dans le contexte du vieillissement. Par exemple, à Cabano, dans le Bas-Saint-Laurent, on dit qu’« attendre les grandes politiques et programmes gouvernementaux serait faire fausse route. La meilleure intégration est toujours celle qui se fait à la base, dans le milieu de vie ». Et en Abitibi-Témiscamingue, on soutient que « la communauté devrait s’impliquer dans la prise en charge de ses aînés, au lieu que tout repose sur le système de santé ». Le Pont entre les générations souhaite aussi qu’on instaure une culture de la responsabilité au Québec, tant individuelle que collective. Et l’idée d’« un pacte social entre générations » a été soulevée à Montréal par des participants de tous âges. Peu de solutions et pas de sacrifices Les participants aux Cafés des âges sont informés du fait que la province fera face à un « choc démographique » et que notre inexpérience face au phénomène complexifiera le casse-tête. Mais s’ils constatent tous qu’il y a de gros problèmes à l’horizon, ils sont peu nombreux à suggérer des moyens concrets pour les éviter ! Peu se demandent s’il existe pareille situation démographique au Canada ou ailleurs dans le

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Partie 4 – D’autres questions à débattre

monde et quelles solutions sont envisagées dans ces autres sociétés. De plus, ils souhaitent la création d’initiatives et de services pour mieux vivre le vieillissement, mais proposent peu d’avenues concrètes pour les mettre en place et les financer, ce qui permettrait de les transformer en réalité.

Peu de solutions et pas de sacrifices « On peut avoir 30 ans et être encore un ado ! » – Îles-de-laMadeleine

Parallèlement, la majorité des participants surfent sur l’espoir de traverser la crise démographique en ne sacrifiant rien sur les plans individuel et collectif. La crainte de perdre des acquis sociaux est pourtant bien ancrée, de même que la vague impression de foncer dans un mur. Mais pour éviter un crash, l’idée de renoncer à des privilèges et au confort est rarement explorée. Les participants clament que de grands changements sociaux s’imposent, mais sont-ils eux-mêmes prêts à laisser aller quelque chose, à toucher des vaches sacrées, à ouvrir des boîtes de Pandore ? Quelques commentaires vont dans ce sens. Par exemple, un Montréalais suggère de « faire porter aux vieux le poids qu’ils imposent » – donc de diminuer l’aide à l’égard des aînés. À Chibougamau, on affirme que « les jeunes devront être moins individualistes; ils devront accepter les conditions imposées et non imposer les leurs ». Et à Gatineau, on est d’avis que les jeunes bénéficiaires de l’aide sociale devraient participer au maintien des aînés à domicile. « Il faut les inciter à redonner à la société. » L’heure des sacrifices pourrait-elle bientôt sonner ?

Qui sont les « jeunes » et qui sont les « vieux » ? Les participants aux Cafés des âges ont majoritairement délibéré en parlant des « jeunes » et des « vieux ». Ils ont été peu nombreux à soulever le fait que puisque l’on vit plus longtemps, on reste aussi jeune plus longtemps. Et que, par ricochet, les frontières entre les âges et les étapes de la vie sont maintenant brouillées. Cependant, quelques personnes ont remarqué qu’il est de plus en en plus difficile de dire qui sont les « jeunes » et qui sont les « vieux ». « Pour les plus jeunes, ce sont leurs parents qui sont vieux. Mais pour les 40 et plus, ce ne sont pas w w w. g e n e r a t i o n s .in m.q c.ca

Bilan d es C afés des âges

eux, les vieux, mais bien leurs parents ! » imaget-on à Gentilly, dans le Centre-du-Québec. Et, à Gatineau, des participants ont conclu qu’« on est un aîné à plus de 50 ans ». Si le discours ambiant est largement ponctué par les termes « jeunes » et « vieux », les participants ont toutefois fréquemment mentionné les baby-boomers, une classe à part qu’ils ne placent d’ailleurs dans aucune catégorie. Pour l’heure, les baby-boomers ne semblent ni « jeunes » ni « vieux » dans les esprits : ils sont simplement les baby-boomers… qui vieilliront ! À Montréal, on formule aussi la remarque suivante : « Il ne pas faut penser en termes de jeunes et de vieux, ça crée des tensions entre les générations. L’âge n’est pas un des critères discriminants, qui sont plutôt les sexes, les richesses, les nationalités et les clivages politiques… »

Quelles sont les « autres » générations ? En général, les réalités respectives des générations X et Y ont été peu traitées. On a toutefois relevé que les jeunes issus de ces générations forment la « génération sandwich », qui est caractérisée par la double obligation de s’occuper des enfants et des parents vieillissants. L’avenir des générations plus jeunes n’a pas été réellement discuté. Quelques participants ont souligné qu’il y a maintenant plusieurs catégories d’aînés. « Il y a ceux qui ont l’autonomie financière et la santé, et les autres, qui sont malades et dépossédés », dit-on par exemple à Gatineau. Le Pont entre les générations soutient pour sa part qu’il existe aujourd’hui un quatrième et un cinquième âge. Cette organisation suggère donc d’aborder la société à partir de quatre groupes, sans égard pour l’âge : « les jeunes, les travailleurs, les retraités et les aînés, soit les personnes en perte d’autonomie ».

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Annexe

LISTE DES CAFÉS DES ÂGES D’AOÛT 2009 À MAI 2010 Au total, nous avons tenu 60 Cafés des âges dans 12 régions du Québec, réunissant entre 50 et 100 personnes à chaque fois. Quelque 3 000 personnes y ont participé. Abitibi-Témiscamingue u 20 janvier 2010 - Restaurant Beau Coq, Amos u 21 janvier 2010 - Restaurant La Bonne Franquette, Ville-Marie u 25 janvier 2010 - Villa Mon Repos, La Sarre u 28 janvier 2010 - Hôtel Forestel, Val-d’Or u 3 février 2010 - Salle Laval-Laflamme, Rouyn-Noranda Bas-Saint-Laurent 24 novembre 2009 - Colisée (expérimentation et formation des organisateurs dans les MRC), Rimouski u 6 décembre 2009 - Salle Bon-Pasteur de la Maison de la Culture, MRC Rivière-du-Loup u 16 décembre 2009 - Moisson de la Vallée, Amqui, MRC La Matapédia u 10 janvier 2010 - Auberge Quatre Saisons, Saint-Mathieu, MRC Les Basques u 17 janvier 2010 - Club des 50 ans et plus, Price, MRC La Mitis u 31 janvier 2010 - Club des 50 ans et plus, Cabano, MRC Témiscouata u Temps des fêtes - Lac des Aigles (mini cafés en résidence) u 7 février 2010 - Centre communautaire Terrasse Arthur-Buies, MRC Rimouski-Neigette u 17 février 2010 - Relais Santé Matan, MRC Matane u 20 mars 2010 - Centre Robert-Côté, MRC Kamouraska u

Centre-du-Québec 18 février 2010 - Club de golf de Gentilly, Bécancour u 23 février 2010 - Centre communautaire récréatif Saint-Jean-Baptiste, Drummondville u 16 mars 2010 - Nicolet u 16 mars 2010 - Saint-Léonard u 24 mars 2010 - Salle de l’âge d’or, Plessisville u

Chaudière-Appalaches 20 avril 2010 - AQDR Beauce-Etchemins, Saint-Georges

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Côte-Nord 22 avril - Fermont, MRC Caniapiscau u 26 avril - Sept-Iles , MRC Sept-Rivières u 27 avril - Havre St-Pierre, MRC Minganie u 7 mai - Les Escoumins, MRC Haute-Côte-Nord u 19 mai - Baie-Comeau, MRC Manicouagan u 25 mai - Chevery, MRC Basse-Côte-Nord u

Estrie 15 mai 2010 - Restaurant le Moulin, Sherbrooke u 15 mai 2010 - Parc historique de la Poudrière, Windsor u

Gaspésie 23 novembre 2009 - Hôtel de ville, Sainte-Anne-des-Monts u 25 novembre 2009 - Carleton-sur-Mer u 26 novembre 2009 - Centre d’études collégiales, Îles-de-la-Madeleine u 27 novembre 2009 - Cégep de la Gaspésie et des Îles, Gaspé u 30 novembre 2009 - Salle des Chevaliers de Colomb, Chandler u 1er décembre 2009 - Hôtel de ville, New Carlisle u

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Laval u

19 octobre 2009 - Association pour aînés résidant à Laval (APARL) u 21 octobre 2009 - Centre communautaire Petit espoir u 28 octobre 2009 - Résidence des Écores u 25 novembre 2009 - Relais communautaire de Laval u 22 janvier 2010 - Centre d’entraide du Marigot, Café de la Concorde u 13 mars 2010 - Centre communautaire le Rendez-vous des Ainé(e)s de Laval u 19 mars 2010 - Centre communautaire Montrougeau u 26 mars 2010 - Place des Aînés u 30 mars 2010 - Centre Sorbier Mauricie 14 janvier 2010 - Collège Laflèche, Trois Rivières

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Montréal 28 août 2009 – École d’été de l’INM (lancement) u 20 octobre 2009 – Au rendez-vous des cultures, Ahuntsic u 3 novembre 2009 - Pavillon Pierre-Dansereau de l’UQAM u 10 novembre 2009 – AREC Montréal u 19 novembre 2009 - Pavillon Pierre-Dansereau de l’UQAM u 25 novembre 2009 - Café TribuTerre u 27 janvier 2010 - Centre des loisirs de Saint-Laurent u 15 février 2010 - Collège Brébeuf u 1 mars 2010 - Collège Brébeuf u 22 avril 2010 - Collège de Maisonneuve u 22 mai 2010 – Au rendez-vous des cultures, Ahuntsic u

Nord-du-Québec 14 novembre 2009 - Matagami u 24 janvier 2010 - Club de l’âge d’or Les intrépides, Chibougamau u 26 février 2010 - Centre communautaire Lebel-sur-Quévillon u 27 février 2010 - Salle de l’âge d’or du club Les vaillants de Chapais u

Outaouais 5 février 2010 - Local du CR3A, Saint-André-Avellin u 17 mars 2010 - Salle Desjardins Cabane en bois rond, Gatineau u 23 mars 2010 - CAPVG, MRC Vallée-de-la-Gatineau u 24 mars 2010 - Centre d’accueil du Pontiac, MRC Pontiac u

Québec 17 février 2010 - Café Nagua u 5 mai 2010 - Loisirs Montcalm u

Saguenay–Lac-Saint-Jean 23 octobre 2009 - Rassemblement jeunesse régional 12-17 ans, Saguenay

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Bi l an des Cafés des âges

ww w.generations.inm.qc .c a



INSTITUT DU NOUVEAU MONDE L’Institut du Nouveau Monde (INM) est une organisation non partisane dont la mission est de développer la participation citoyenne et de renouveler les idées au Québec. L’INM œuvre dans une perspective de justice et d’inclusion sociales, dans le respect des valeurs démocratiques et dans un esprit d’ouverture et d’innovation. Par ses actions, l’INM encourage la participation des citoyens, contribue au développement des compétences civiques, au renforcement du lien social et à la valorisation des institutions démocratiques. Pour réaliser sa mission, l’INM met en œuvre divers programmes novateurs et de différentes portées rejoignant annuellement des milliers de citoyens des quatre coins du Québec. Pour les jeunes, l’INM organise annuellement l’École d’été et l’École d’hiver et soutient en continu des jeunes entrepreneurs sociaux par le programme À go, on change le monde ! L’INM tient également des activités destinées à tous les publics, dont les Rendez-vous stratégiques, la Caravane citoyenne, des ciné-débats et, de 2010 à 2012, les Assemblées mondiales de CIVICUS. L’INM s’associe également à de nombreux partenaires pour réaliser des événements ponctuels. L’approche de l’INM se décline en trois verbes : informer, débattre et proposer. Société à but non lucratif, l’INM a lancé ses activités le 22 avril 2004 à Montréal en présence de 300 citoyens. L’INM a reçu en 2005 le prix Claire-Bonenfant, remis par le gouvernement du Québec pour les valeurs démocratiques et l’éducation à la citoyenneté. Pour en savoir plus : www.inm.qc.ca

MONTRÉAL 630, rue Sherbrooke Ouest bureau 1030 Montréal (Québec) H3A 1E4 514 934-5999

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TROIS-RIVIÈRES 1687, Boulevard du Carmel Trois-Rivières (Québec) G8Z 3R8 819 375-1049, poste 444

Numéro sans frais : 1 877 934-5999

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