POLITIQUE: La loi sur l’université
Journal d'Etudiants en Science Politique et Relations internationales
INTERNATIONAL.INK
DOSSIER: Les oubliés médiatiques
Février est à peine là qu’on aperçoit déjà mars à l’horizon ! Cette période frileuse, empreinte d’un certain spleen post vacancial, déprime les étudiants égarés dans leurs notes de cours. Quelle situation catastrophique pour ces besogneux qui ne trouvent pas de consolation sinon le teint grisâtre de la cité de Calvin. Mais oublions cette monotonie et ce fatalisme qui hantent ces premières lignes et laissez-nous vous apporter un zeste de chaleur et de réconfort en vous présentant le nouveau journal d’Etudiants de Science Politique et de Relations Internationales : INTERNATIONAL.ink Le projet a été lancé par l’AESPRI voici quelques années. Auparavant nommé « Jet d’Encre », nous avons aujourd’hui renouvelé l’identité du journal tout en conservant l’esprit et les principaux objectifs poursuivis par nos prédécesseurs. Nous souhaitons offrir aux étudiants issus de ces deux formations l’opportunité de s’exprimer librement sur des sujets qui les touchent, et de développer leurs opinions hors du cadre parfois restrictif des cours universitaires. Grâce à une plate-forme d’expression indépendante et à un point de
EDITO / SOMMAIRE
vue estudiantin, nous voulons présenter à la plus large audience possible une alternative à l’information proposée par les grands quotidiens. Ces derniers sont parfois limités par des nécessités telles que le besoin de ventes, le maintien d’une certaine réputation ou l’obligation de s’aligner a une certaine idéologie. La structure d’un journal d’Etudiants nous offrant donc une certaine liberté rédactionnelle, nous avons choisi comme thème de ce premier numéro : « Les oubliés médiatiques ». L’équipe de rédacteurs a soumis le monde de l’information à une psychanalyse afin de dévoiler des évènements et des faits peu, voire pas du tout médiatisés. Bien que notre contribution dans la médiatisation de ces faits soit infime vu l’ampleur du travail, nous souhaitons aiguiser votre sens critique et vous sensibiliser aux origines et conséquences de la sous-médiatisation. Pour finir ces brèves lignes d’introduction, nous tenons à vous informer que INTERNATIONAL.ink est ouvert à tout étudiant qui souhaite concourir à sa réalisation, et ce dans n’importe quel domaine : composition
PORTRAIT:
DOSSIER:
BOUDA ETEMAD, professeur à l’université de Genève P.3
Introduction P.4
SOCIETE: DROIT A LA FETE P.18 POLITIQUE: SALVADOR ALLENDE Les rêves Brisés du chili P.19 HOLYWOOD Grosses bobines, quand le cinéma devient de l’intox P.20 LOI SUR L’UNIVERSITE P.21 PAGE TECHNIQUE P.22 ... P.23 Evènements de l’AESPRI P.24
d’articles, intégration du comité de rédaction ou création de photographies. Si l’expérience vous tente, n’hésitez pas à nous contacter via notre adresse e-mail : international.ink0@ gmail.com. Sachez également que nous publions des articles écrits dans la langue de Shakespeare. Ne ratez pas cette occasion et rejoignez nous ! Remerciements Toute l’équipe de International.ink tient à remercier l’AESPRI et la Commission de Gestion des Taxes Fixes pour leur soutien. Rédaction International.ink : Retrouvez-nous sur www.aespri.unige.ch ! Rédacteurs en chef: Clément Bürge et Cyril Granier Membres: Joëlle d’Andrès, Romain Aubry, Mélanie Escobar Vaudan, Danica Hanz, Matthieu Heiniger, Claire Monari, Lukas à Porta, Antoine Roth, Samia Swali, Lionel Thorens Graphiste: Léo Felder Rédacteurs externes: Adría Budry Carbó, Damian Clavel, Milène Hauri
Les enfants vidomégons P.5 L’internement des japonais durant la Seconde Guerre mondiale P.7 «The Cuban five», quand un procès en cache un autre P.8 Népal: Après la monarchie, une démocratie? P.9 Les blessures secrètes du Laos P.11 Somalie, le retour sur une tragique année P.13 10 sujets sous-médiatisés selon l’ONU P.15 Inde : Le combat de minorités pour la défense de leur identité P.15 Esprit critique et médias: inconciliables en temps de guerre ? P.16
Edité par l’AESPRI (Association des étudiants de Science Politique et Relations Internationales)
CLEMENT BURGE / CYRIL GRANIER
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PORTRAIT Portrait de Bouda Etemad. Professeur d’histoire économique et sociale de l’Université de Genève
Parcours de vie: Ce qu’il aime relever, avant tout, au sujet de son enfance, c’est la curiosité et l’intérêt que sa famille portait pour l’occident voisin. Un intérêt qui s’imprimera rapidement en lui. Né au tournant du siècle, en 1949, dans la ville de Sari au bord de la mer Caspienne, Bouda Etemad précise que la frontière russe non loin distante de son foyer natal le disposait déjà à faire un pas vers l’autre, cet autre qui, à son jeune âge, prend la forme de l’Europe. Une Europe dans laquelle on s’embarque pour acquérir un bagage supplémentaire qui ouvre la porte au reste du monde. Une Europe dans laquelle on deviendra plus tard professeur à l’Université de Genève, mais laissons l’histoire se dérouler sans trop la dévoiler. Déjà Bouda et sa sœur quitte l’Iran: ils suivent leur mère en Angleterre, encore enfant. Ainsi se dessine le premier grand pas vers une nouvelle culture: culture vestimentaire, par exemple, lorsque l’on enfile l’uniforme le matin avant d’aller à l’école. Mais cette scolarisation à Portsmouth n’est que de courte durée et la famille Etemad, sans le père,
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médecin de campagne resté au pays, quitte les îles britanniques en 1957 pour arriver à Genève, au milieu d’un hiver glacial selon les souvenirs de Bouda. Mais il fait, après tout, bon vivre dans la cité de Calvin, ou plutôt à Champel ou la famille Etemad habite. Et de cet hiver glacial à l’université, il y a, certes, seulement quelques kilomètres et quelques parties de football dans les rues encore dénudées de voiture, mais il y a surtout cet intérêt grandissant pour les intrigues historiques de notre planète. Cet intérêt amène Bouda à l’étude des sciences économiques et sociales, et particulièrement à l’histoire économique. Ensuite, une rencontre détermine l’orientation professionnelle de Bouda: le professeur Bairoch (19301999), figure emblématique, un des grands historiens économiques de l’après-guerre. De cette rencontre (Bairoch supervise Bouda lors de sa thèse universitaire) naît une véritable vocation et le professeur transmet à Bouda le goût des relations avec les étudiants, des institutions académiques, ou de la publication. Bouda marchera alors sur deux jambes, l’une considérée comme l’enseignement, l’autre comme la recherche, avec à l’esprit le sentiment de porter un héritage et d’incarner le rôle de relais entre les générations qui s’intéressent à l’histoire de celles qui les ont précédées, cela depuis maintenant 25 ans. Finalement des voyages: dans les pays du sud en particulier ou il aura l’occasion d’enseigner, et une thématique: les inégalités de développement, accompagnent ce parcours de vie. Les voyages sont pour Bouda Etemad une manière d’actualiser l’histoire, de la visiter à nouveau et d’en apercevoir les racines. Ils aident à comprendre les signes du passé et nourrissent la recherche: pourquoi les regards se tournent-ils vers l’ouest? Pourquoi, depuis une vingtaine d’année, s’intéresse-ton aux victimes, qui étaient auparavant
considérés par l’occident comme les vaincus? Comment les écarts se creusent et pourquoi ils tendent à s’élargir? Voilà un extrait des intrigues contemporaines qui ont poussé Bouda Etemad dans ses études, et ce sont celles-là mêmes qui le poussent encore dans l’enseignement et la recherche. Cette motivation serait-elle aussi un écho à son enfance, à cet intérêt pour l’autre, à son intégration en Suisse où il vit, marié, et père de deux enfants? Si vous l’interrogez, il vous laissera deviner la réponse en esquissant un sourire apaisé. Des goûts et des couleurs: -Une personnalité, décédée ou vivante, que vous rêveriez de rencontrer: Nelson Mandela -Un moment que vous pourriez revivre: Assister à la découverte de la route vers l’Amérique en compagnie de C.Colomb -Une œuvre d’art qui vous parle: Icare du peintre Matisse -Un film culte: Kill Bill I & II -De la musique: Granados -Un pays pour recommencer une vie: ...plutôt une maison au bord d’un océan -Un rituel avant les cours: Se recueillir, comme un matador se concentre avant de rentrer dans la Corrida. Enseignements: Histoire économique générale Histoire économique et sociale des TiersMondes Histoire économique des relations Nord-Sud Publications récentes: • Les relations économiques entre la Suisse et l’Afrique du Sud durant l’apartheid (19451990), en collaboration avec S. Bott et S. Guex, Antipodes, Lausanne 2005, 428 pages. • De l’utilité des empires. Colonisation et prospérité de l’Europe (XVIe-XXe siècles), Armand Colin, Paris 2005, 336 pages. • La Suisse et l’esclavage des Noirs, en collaboration avec Th. David et J. Schaufelbuehl, Antipodes, Lausanne 2005, 182 pages. • La possession du monde. Poids et mesures de la colonisation (XVIIIe-XXe siècles), Editions Complexe, Bruxelles 2000, 356 pages.
MATTHIEU HEINIGER
DOSSIER INTRODUCTION
10 cas dont le monde devrait entendre parler d'avantage selon l'ONU P. 15
Camp de concentrations aux USA P. 7
Situation au Népal P. 9 Révolution Les blessures tribale en du Laos p. 11 Inde P. 15
Cuba, les oubliés P. 8
Carrières de granit en Afrique P. 5
Somalie P. 13
Oubli du débat en temps de guerre P. 19
Première parution d’un journal remodelé, nouveau nom, nouveau graphisme et nouvelle rédaction. Bref, si la volonté de faire peau neuve est visible au premier coup d’œil, elle se retrouve également et naturellement dans le contenu. Désireux de se démarquer des journaux existants en se créant une identité propre, notre choix de dossier pour ce premier numéro s’est porté sur les oubliés médiatiques. Choix qui, compte tenu de notre relative innocence face à une telle entreprise paraissait logique, clair et univoque. Et pourtant la question se révèle bien plus ambiguë qu’elle n’y paraît. Ainsi enthousiasmés par l’idée de pouvoir transmettre des informations sur des conflits, réalités, situations politiques, géographiques voire sociales peu connues de notre public afin d’encourager une prise de conscience nous nous sommes lancés dans la rédaction de nos articles. Et pourtant, se faisant, nous avons passé involontairement sous silence certaines questions essentielles que soulève ce thème. Considérons dans un premier temps le terme même d’oublié médiatique. Car il
JOELLE D’ANDRES
n’est en effet pas banal d’utiliser cette expression pourtant devenue part intégrante du langage courant. Cela signifie au juste que nous déterminons les médias comme responsables des oublis. Pourtant en analysant de plus près les différentes situations nous distinguons plusieurs types de situations où des populations entières sont complètement laissées à l’abandon. Tout d’abord certains groupes sont marginalisés à l’image par exemple des Roms en Suisse. D’un autre côté un bon nombre de populations souffrent de la situation politique des états dans lesquels elles vivent comme c’est le cas en Tchétchénie, en Somalie et en RDC pour ne citer qu’eux. Et, finalement il y les populations qui n’ont peu ou pas d’accès aux soins et qui vivent dans une extrême précarité. Ces dernières sont généralement localisées dans les pays du Tiers-Monde où très souvent une zone restreinte bien intégrée internationalement grâce par exemple à des avantages ou intérêts économiques relègue au second plan la majeure partie du pays sous développée. Les différents facteurs peuvent bien sûr se cumuler ou être aggravés par la
situation climatique pour donner naissance à de véritables crises humanitaires (bien que la crise ne soit pas nécessaire pour parler d’oubliés). Avec cette constatation de pluralité des acteurs qui ont une carte à jouer dans l’oubli de certaines tragédies pourquoi continue-t-on à parler plus facilement d’oubliés médiatiques plutôt que d’oubliés sociaux ou politiques par exemple ? Ne s’agit-il pas au fond d’un moyen détourné de se défaire de nos responsabilités ? Le problème est plus complexe qu’il en à l’air. Si les médias sont facilement remis en cause c’est que l’on considère qu’ils représentent la source première de l’information, bien que cela soit discutable. L’ignorance face à certaines crises ou situations critiques de longue durée leur ait alors logiquement incombée. Certes, les médias ont incontestablement un rôle primordial dans la manière de gérer l’information et de représenter les différentes parties du monde. Ainsi, Esther Duflo, spécialiste en économie du développement, constate par exemple qu’«une catastrophe ayant eu lieu sur le continent africain a besoin
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DOSSIER de 48 fois plus de victimes pour être autant couverte par la télévision (…) qu’une catastrophe ayant eu lieu en Amérique ou en Europe ». Or la couverture médiatique est étroitement en lien avec la récolte de fonds qui viendront secourir les populations en péril. Se pose alors la question des relations entre les médias et les organisations humanitaires chargées de récolter et redistribuer ces fonds. Est-ce que ces organisations ne perdent pas une part de leur crédibilité en étant dépendantes des médias et en échange est-ce que les médias ne perdent pas peu à peu dans le contexte actuel où l’on observe un peu partout une diminution des moyens mis à disposition des journalistes internationaux le contrôle de l’information au profit des humanitaires souvent présents sur le terrain bien avant eux ? Comme le souligne Patrick Hirtz, responsable des programmes Afrique à Médecins du monde, « médias et humanitaires ont besoin les uns des autres ». Il entend par là que si les journalistes profitent de la manne d’informations que représentent les humanitaires sur place, il devrait y avoir un rapport de confiance entre les deux groupes afin d’éviter notamment que les humanitaires faussent l’information dans l’espoir d’obtenir une plus grande couverture médiatique et par là plus de fonds. En d’autres termes, les relations entre médias et humanitaires sont devenues si ambigües que l’on peut en venir à se demander si les oublis « médiatiques » ne sont pas aussi le résultat de situations où les ONG ne suscitent pas forcément l’attention des médias à temps ou le font moins instamment. Ainsi, si les médias définissent en quelque sorte les oubliés, il s’agit de pondérer leur pouvoir notamment par la place des humanitaires dans le processus. Rôle des médias, rôle des ONG, mais finalement et je crois encore plus primordial rôle des citoyens. En effet, les médias rejettent les critiques à leur encontre en attestant que leur produit est aussi économique et qu’ils créent donc logiquement ce que réclame le consommateur. Cet argument présente un côté réaliste mais n’est pas de grande valeur. Par contre un autre fait vient selon moi augmenter l’influence de tout un chacun sur les crises oubliées. Révolution médiatique oblige, internet et la presse électronique vont si ce n’est déjà fait prendre le dessus sur la presse écrite. L’information devient non seulement plus accessible mais aussi plus vaste et riche. Dans ce contexte on ne peut plus vraiment parler d’oublié médiatique puisque tous les sujets sont au fond abordés. Le problème qui se pose alors est de savoir si les gens vont vraiment chercher l’information judicieuse là où elle se trouve. Ce qui est fort douteux car
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le simple fait de devoir chercher l’information pousse l’utilisateur à se restreindre aux sujets qui l’intéressent plus particulièrement et à ne pas forcément prêter attention aux autres nouvelles. Dans ce cadre il est donc important de rappeler aux citoyens qu’il ne suffit pas de mettre la faute sur les médias mais que nous portons tous une petite part de responsabilité, au moins en ce qui concerne notre ignorance, dans la manière dont sont traitées les populations les plus démunies de notre planète. Je veux bien l’admettre, le fait de sensibiliser la population à sa responsabilité face au problème des oubliés paraît quelque peu utopiste. Mais il ne faudrait pas omettre non plus que malgré les nombreuses critiques apportées aux médias ils exercent tout de même un contre-pouvoir face aux politiques, qui eux sont bien souvent les premiers responsables de la mise à l’écart des populations en question. On peut donc s’attendre, malgré les défauts constatés, à ce que les médias parviennent à mobiliser l’opinion public contre ce fléau. Et, finalement cette réussite dépendra certainement de la collaboration avec les ONG mais aussi et surtout de la volonté et de l’engagement que ces médias décideront de mettre en œuvre pour tenter de réaliser au mieux leur travail : c’est-à-dire nous informer sur les réalités du monde dans leur complexité mais également dans leur exhaustivité.
Les enfants «vidomégons »
A partir des petites mains des carrières de gravier d’Abeokuta et la stupeur face à un soi-disant retour à l’esclavage, comment les médias transforment et simplifient un phénomène en vérité bien plus complexe. Retour sur les enfants travailleurs du Bénin, « oubliés médiatiques » trafiqués depuis leur pays jusqu’au Nigeria et exploités dans les carrières. L’affaire éclate au grand jour en septembre 2003 lorsque la police du Nigeria retire 261 enfants des mains des trafiquants. Les carrières de gravier d’Abeokuta sont investies, le gouvernement se saisit du cas, et selon des travailleurs humanitaires, sept trafiquants sont arrêtés... Les médias populaires occidentaux et africains, à juste titre, s’emparent du sujet avec toute une liste d’interrogations troublantes: ainsi sommes-nous témoin du « retour de l’esclavage »? Que faisaient ces enfants, loin de leur famille, dans ces carrières, travaillant comme des esclaves pour les promesses fumeuses de leur exploitant? Comment peuvent-ils en arriver là, sous un soleil brûlant,
à remuer la terre pour en retirer des cailloux et les réduire en gravier à coup de marteau? Dormant dans les trous de l’exploitation, à même le sol, et tout cela pour de modestes rémunérations annuelles (en général un vélo ou une radio)? Quoi qu’il en soit, les réponses à ces questions manquent et la police s’attache à la gestion du problème: les enfants, tous béninois, sont ra patriés dans leur pays. L’intérêt médiatique dure trois mois, le temps au gouvernement de revêtir à l’affaire le voile illusoire d’une résolution limpide: les enfants sont réintégrés, on leur offre un sac à dos et on les encourage à se rendre à l’école. Le gouvernement, dans des discours prometteurs, semble avec sérieux s’engager contre la traite d’enfants. La solution prise est manifeste: la traite est interdite. Les mesures d’urgence sont apparemment un succès. L’affaire est classée et les médias se désintéressent de la situation...Pourtant on apprendra plus tard que toutes ces actions se solderont par autant d’échecs. Le fléau de la traite s’avouera être bien plus complexe que prévu... C’est la pointe de l’iceberg que le navire médiatique venait de heurter! Si les carrières sont officiellement fermées, ce sont des milliers d’enfants qui officieusement continuent d’être exploités sur le vaste réseau que représentent les carrières d’Abeokuta. Si quelques trafiquants sont derrière les verrous, c’est tout un système de traite qui continue à organiser le recrutement des enfants au Bénin, le voyage jusqu’au Nigéria et l’exploitation sur les lieux. La réaction instinctive de fermer les carrières empêchent au final les ONG de réellement investir les lieux: le système ne sera de loin pas démantelé, on peut même avancer qu’au contraire il en sort renforcé. L’intérêt médiatique, tout comme les promesses du gouvernement, sont des malheureux symboles trop fréquents dans la gestion de problématiques africaines: les événements sortent au grand jour spontanément et sont à priori incompréhensibles, inhumains, et nécessitent des mesures d’urgences forcément superficielles. On s’attache alors à leur résolution sans même chercher à dévoiler le processus initial qui mène aux catastrophes. Il semble essentiel, face à des événements autant irrespectueux des droits fondamentaux de l’enfant, de comprendre la complexité du système. En 2004, une fois que des sources fiables signalent à nouveau la présence d’enfants dans les carrières, des ONG se lancent dans une enquête approfondie de la situation pour redéfinir le mécanisme de la traite. L’ONG suisse « Terre des Hommes » lance l’opération et fait partie de cette initiative essentielle à la guerre
JOELLE D’ANDRES / MATTHIEU HEINIGER
DOSSIER contre les trafiquants. Il est évident qu’une telle initiative est un travail de recherche et d’investigation régionale prenant en compte une multitude de facettes sociales ou culturelles et ceci avec la participation de nombreux acteurs locaux au Bénin et au Nigeria. La presse occidentale ne s’y intéresse pas. Pourtant, au final, l’enquête menée par les ONG permettra de saisir l’ampleur de la traite et surtout de mettre en perspective ses origines et son fonctionnement. Un fonctionnement qui étonnement n’est pas aussi inhumain que ce que laissaient entrevoir ses conséquences!
lageoises absolument pas considérés comme des malfrats, dans bien des cas ils ont l’accord des parents. Les enfants sont prisonniers du système et fréquemment volontaires, bien qu’un enfant n’ait pas la maturité de saisir les conséquences d’un tel choix. A partir de ce constat, le travail humanitaire a consisté à gérer les dérives du système des « vidomégons ». Le cas des enfants exploités dans les carrières d’Abeokuta en est un exemple flagrant! Seulement, cette fois, la cause et le fonctionnement étaient connus. L’ONG « Terre des Hommes » a mis en place tout
Expliquer dans le détail le résultat de l’enquête n’est pas l’objectif propre à cet article. Il faut simplement relever qu’à la suite de l’investigation, on découvre un système de traite clandestine très complexe et particulièrement ancré dans les moeurs des populations du Bénin. Il remonte à une vieille tradition appelée « vidomégon » (enfant placé). Initialement, ce principe soulage les familles défavorisées. Celles-ci vont placer leurs enfants dans des familles parentes moins démunies. En retour, l’enfant placé doit participer aux tâches ménagères et rendre des services non rémunérés à son hôte. Ce système, dans un pays qui se situe à la 159ème place des 174 pays de l’index de développement humain du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), est pour les familles un solide moyen de rééquilibre budgétaire (le Bénin possède un revenu annuel par habitant de 365 dollars, ce qui est légèrement en dessous de la moyenne pour l’Afrique sub-saharienne de 470 dollars/hab ). Les trafiquants sont donc souvent des membres des communautés vil-
une organisation de rapatriement et de réintégration pour les enfants victimes de la traite, des procédés de dialogue avec les trafiquants bien souvent eux-aussi anciens enfants trafiqués, et le partenariat laborieux avec les autorités du Bénin et du Nigéria... En démystifiant les imageries d’un esclavage moderne sans foi ni loi, le combat contre la traite a pris un tournant beaucoup plus réceptif aux réelles conditions sociales des individus concernés. Bien entendu, le but n’est pas d’interdire le placement des enfants, mais de le rationaliser et de le contrôler, ainsi que de faire de la prévention dans les villages et d’informer les communautés des risques encourus par les enfants placés. Le choix de procéder d’une manière endogène a apporté un résultat réjouissant, même s’il reste de nombreuses zones d’incertitudes. Mais plus que les résultats, c’est bien la méthode mise en place qui représente une réussite! Une fois que la méthode d’appréciation dessine les enjeux et les causes d’une problématique, il est beaucoup plus aisé de chercher
MATTHIEU HEINIGER
des résolutions efficaces à long terme. Le bilan du travail de « Terre des Hommes », de la Croix-Rouge, de l’UNESCO et d’autres ONG qui ont participé à l’opération est un contre-exemple de l’information empoisonnée que l’on pourrait retirer à priori d’un tel scoop médiatique: « Le retour de l’esclavage? » Non, il s’agissait d’un système bien plus élaboré qui ne peut pas se résumer en quelques lignes dans un quotidien. Malheureusement, l’intérêt des médias populaires n’est pas consistant dans l’explication des faits, il semble uniquement préoccupé par des rapports factuels trompeurs! Une telle façon d’analyser la situation porte à long terme des conséquences terribles: le visage de l’Afrique se dessine jour après jour avec les traits fatalistes d’un continent voué aux pires dérives humaines. Ce visage résume bien mal l’Afrique, entrave l’émancipation sociale et économique dont elle a besoin et surtout donne aux européens, par le biais des organisations internationales ou des ONG, le droit et la souveraineté d’agir à leur manière sur le territoire africain sans réelle légitimité. Cette souveraineté d’action place les africains dans un rôle de dépendance et empêche certaines solutions endogènes d’aboutir. La mission des médias face à l’Afrique n’est pas celle de peindre un sombre tableau de peuples à l’agonie, mais de comprendre les processus qui mènent certaines populations à des impasses. Pour reprendre la formule de l’écrivain nigérian Uzodinma Iweala: « il faut cesser de vouloir sauver l’Afrique », et avant tout chercher à la comprendre et la considérer comme un partenaire de longue mémoire avec qui l’Europe partage des intérêts communs dont le respect des droits de l’enfant.
Encadré relatif à l’article sur le laos La journaliste allemande Rebecca Sommer a réalisé un film documentaire, Hunted Like Animals, après avoir passé plusieurs mois dans la jungle et côtoyé les réfugiés dans les camps. Il est ainsi possible de mettre des images sur les terribles massacres d’un conflit très peu médiatisé, à travers des témoignages poignants de réfugiés et des prises de vue relatant la vie quotidienne des Hmong dans la jungle et dans les camps. Son film est consultable sur internet (http:// rebeccasommer.org/documentaries/Hmong/index. php). Le film Air America, réalisé par l’américain Roger Spottiswoode, relate quant à lui de façon humoristique les aventures de la tristement célèbre compagnie aérienne de la CIA Air America, qui s’occupait des vols de reconnaissance et du ravitaillement des troupes au Laos pendant la guerre d’Indochine. Toute personne intéressée par la question des UXO au Laos trouvera quelques informations supplémentaires sur la lutte contre ce grave problème sur le site de l’organisation COPE (www.copelaos.org) qui travaille à la rééducation et à la réinsertion des personnes mutilées par les UXO.
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DOSSIER L’internement des Japonais aux Etats-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale On a pourtant l’impression d’en avoir fait le tour des horreurs de la Seconde Guerre mondiale ; après une première approche au cycle, on approfondit au collège et bien souvent on peaufine à l’université. Mais au-delà de cette approche scolaire, nous en sommes viscéralement empreints de cette histoire-là, héritiers d’une vision et de ses valeurs. Durant la Seconde Guerre mondiale des personnes sont identifiées, ségrégées et déplacées dans des camps de concentrations sur le seul critère ethnique ou racial. Outre-Atlantique, 120 000 personnes d’origine japonaise, dont 62% étaient citoyens américains sont également forcés à quitter leur domicile et déplacés de la côte ouest des Etats-Unis dans des camps de concentrations. Voilà une histoire moins connue… Le prélude En ce début de 20e siècle les japonais héritent de tous les préjugés développés contre la population chinoise : différents, inassimilables, inférieurs. Nombre de mesures suivent afin de limiter leur immigration (Gentlemen’s Agreement, 1908), puis de l’interdire (Immigration Act, 1924) tout en compliquant les conditions de vie des résidants en interdisant la naturalisation et l’accès à la terre aux non américains. Le contexte est alors fortement nourri par une vision supérieure de la race blanche et plus précisément « anglo-saxonne ». Par ailleurs, le Japon devient en 1905 le premier pays asiatique à défaire un pays de l’ouest, la Russie, dans la Guerre russo-japonaise. Le péril jaune a changé d’image nourri par des fantasmes collectifs et alimenté par une presse alarmiste. Le vrai tournant se produit le 7 décembre 1941, l’attaque contre la flotte américaine à Pearl Harbour provoque une déclaration de guerre contre le Japon et plus généralement l’entrée en guerre des Etats-Unis aux côtés des alliés. Sur le sol américain des centaines de perquisitions, confiscations et arrestations sont perpétrées contre de potentiels ennemis étrangers : allemands, italiens et surtout japonais. La confusion est totale : les Japonais, simples résidents ou citoyens américains, sont assimilés à l’ennemi de guerre, faute aux déclarations de certains dirigeants et chefs militaires, ainsi que d’une propagande journalistique douteuse(1). On craint une attaque venant de l’intérieur et dirigée contre les infrastructures vitales : systèmes de communications, d’informations ou de distribution d’énergie, mais aussi ports et bases militaires tout particulièrement sur la côte ouest. L’ordre exécutif 9066(2), signé par Franklin D. Roosevelt dé
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lie les mains de l’armée en l’autorisant à déclarer des territoires, zones militaires sur lesquels toute personne ou communauté peut être exclue. Un tiers des terres américaines seront soumises à ces exigences. Rapidement une série de dispositions de plus en plus restrictives suivent: les personnes d’origine japonaise doivent rendre compte de leurs déplacements, sont soumises à un couvre feu, peuvent avoir leur propriété privée confisquée et doivent se rendre dans des centres spécialisés(3) qui s’occupent de leur relocalisation permanente. Ces mesures sont tout particulièrement populaires au sein des agriculteurs blancs, qui trouvent un intérêt économique dans la suppression de la concurrence japonaise.
Les camps de concentration La relocalisation s’opérait en deux temps. Tout d’abord, faute d’infrastructures capables d’accueillir les déplacés de manière durable, ils se retrouvent dans des centres temporaires appelés « centres de rassemblement ». Constructions de fortune ou réaménagement d’infrastructures existantes, stalles de bétail ou hippodromes, le séjour moyen est de 100 jours. Les centres sont entourés de fils barbelés et surveillés par des soldats armés. Le nombre moyen de personnes accueillies varie entre 3000 et 7000 détenus, à l’exception du centre de Sainte Anita, en Californie qui a accueilli jusqu’à 18 000(4) personnes. La plupart des personnes y afflue entre mars et mai 1942. Les dépenses journalières en nourriture et par interné se montent à 45 cents. Néanmoins, une vie communautaire s’organise autour des établissements d’écoles, hôpitaux, églises, équipes de sport et autres organisations de détenus. Les camps se subdivisent en trois catégories : « les camps d’internement » au nombre de dix, « les camps d’internement du département de justice » au nombre de quatre et deux « camps d’isolation » pour citoyens. Les camps d’internement du département de justice incarcèrent individuellement les personnes considérées comme potentiellement dangereuses par le gouvernement. Les camps
d’isolations contiennent des familles japonaises internées lors des premières arrestations après l’attaque de Pearl Harbour, ainsi que des japonais venant d’Amérique latine et des ressortissants italiens et allemands jugés subversifs. Les camps d’internement sont plus largement affectés à la politique de déportation des japonais de la côte ouest. A partir de mai 1942 les gens stationnés dans les centres de rassemblement sont relocalisés dans les camps d’internement. Les camps d’internement ou camps de concentration sont situés à l’intérieur des terres dans des zones isolées, inhospitalières et stériles. La sécurité est maximale, les camps sont entourés de barbelés, surveillés par des soldats armés et des patrouilles. On estime que 110’000 personnes y ont été incarcérées. Le camp est divisé en blocs de 12 à 14 baraques, elles-mêmes fractionnées en quatre chambres. Une chambre mesure entre 24 et 42m2 et accueille une à deux familles. Les internés travaillent le plus souvent à l’intérieur du camp dans des domaines divers tels que les services sanitaires, administration et activités liées à l’effort de guerre. A l’extérieur ils effectuent le plus souvent des travaux agricoles au sein de fermes locales. La proximité, le mode de vie communautaire et le manque de personnel médical provoquent malaria, dysenterie, tuberculoses et autres maladies. Mais tout comme dans les centres de rassemblement, une vie communautaire s’établit autour d’institutions éducatives ou religieuses et des activités récréatives. La fin des internements Au début de 1944, les troupes japonaises ne capitulent pas mais néanmoins leur faiblesse devient évidente. La crainte d’une attaque interne ou externe de la côte ouest devient obsolète. Au même moment la Cour Suprême délibère sur le cas Ex Parte Endo(5), qui attaque la politique d’exclusion des japonais sur la côte ouest. Le 17 décembre est publiée par les militaires la Proclamation Publique No.21 annulant les différents ordres d’exclusion et de déportation, tout en déclarant que les camps de concentration fermeront dans le délai d’un an. En janvier 1946 presque tous les camps ont fermé leurs portes. Les déportés se retrouvent le plus souvent mis à la porte avec le peu d’affaires qu’ils ont pu amener, un ticket de retour et une indemnité de 25$ en poche. Le retour à la réalité est dur : ils n’ont ni logement, ni emploi tandis que le sentiment anti-japonais est plus vif que jamais, l’opinion publique étant à l’encontre de la décision de fermeture des camps. Nombre
DANICA HANZ
DOSSIER d’entre eux ne se remettent pas de l’expérience vécue. Une série de mesures compensatoires sont prises par le gouvernement américain. En 1948, Harry S.Truman signe le « Japanese American Evacuation Claims Act » conférant $38 millions de compensation à la communauté japonaise. Selon une analyse indépendante de la Federal Reserve Bank de St. Francisco l’estimation des pertes subies se chiffrent de manière plus réaliste à $400 millions. L’ordre Exécutif 9066 est annulé par le président Ford. En 1988, le président Reagan signe le « Civil Liberties Act »(6) demandant pardon à la communauté japonaise et lui fournissant une aide supplémentaire. Finalement, le président George H.W. Bush s’assure que tous les ex-détenus puissent toucher $20’000 de compensation et réitère formellement des excuses(7). Les causes de la méconnaissance publique sont multiples : d’une part à l’issue de la guerre on s’est évertué à juger les perdants, le Tribunal de Nuremberg en étant un des éléments les plus significatifs ; le droit international est le reflet des forces en présence, ainsi en est-il de la sélection historique. La victoire justifie les mesures de guerre entreprises, aussi discutables soient-elles dans la lutte contre l’autre. D’autre part les mouvements de mémoire se font tardivement, à partir des années 70, guidés par les nouvelles générations, enfants ou petits-enfants dans une communication privilégiée avec l’Etat et ses dirigeants plutôt que le grand public. On peut se demander si une action initiée par d’autres que ceux qui l’ont vécu ne perd pas de sa vivacité ou de sa charge émotionnelle dans sa capacité à atteindre le grand nombre. De même, la rapidité de la réponse étatique à compenser les victimes peut s’analyser comme une intention de ne pas trop médiatiser les événements. L’intérêt public, justifié, pour le génocide perpétré en Europe, de part son approche rationnelle, systématique et inhumaine a peut-être relayé dans l’ombre la déportation japonaise. On peut se questionner sur la disponibilité de l’information et surtout l’intérêt de l’Europe sur la facette outre-mer de la Seconde Guerre mondiale, car comme a dit Catherine II : « On ne juge pas un vainqueur ».
« The Cuban Five », quand un procès en cache un autre Etats-Unis, septembre 1998 : cinq Cubains infiltrés dans des groupuscules anticastristes à Miami sont arrêtés et condamnés trois ans plus tard à de lourdes peines de prison suite à un procès pour le moins douteux. Accusés d’être des espions à la solde de la Havane complotant contre les Etats-Unis, ils se retrouvent enfermés dans des pénitenciers américains. Voilà le genre d’évènements propice à susciter l’engouement des médias, en général friands d’histoires rocambolesques et scandaleuses. Et pourtant, cette information n’a pas semblé les enthousiasmer outre mesure. Alors, simple désintérêt, choix légitime ou censure délibérée ? Certains, à l’image de Salim Lamrani, n’hésitent pas à accuser la presse de complicité ouverte au terrorisme contre Cuba. D’après ce journaliste, spécialiste des relations cubano-américaines, il y a de quoi s’indigner et se demander comment il est possible qu’ « une affaire qui dépasse toutes les limites du sensationnel, adaptée à n’importe quelle forme de couverture médiatique par son contenu politique et juridique ait été censurée par l’immense majorité des moyens d’information du monde occidental ? » (1) Le ton est donné. Il semblerait que nous soyons face à un cas délibérément sous-médiatisé, un des « plus grands scandales politiques et judiciaires du siècle ».(2) Lors d’une conférence organisée à Genève(3) par le comité « Libérez les Cinq », Lamrani a dénoncé le procès des « Cuban Five » comme une affaire politique destinée à dissimuler un terrorisme d’Etat soutenu par Washington dans le cadre de sa politique anticastriste. Selon lui, la presse joue un rôle non négligeable dans ce jeu : elle créerait une doctrine du bon et du mauvais terrorisme, entretenant ainsi la diabolisation de Cuba. Ce double standard l’amène à soulever la question des paradoxes de la presse. En effet, les médias, tout en étant prolixes, semblent bannir les nouvelles qu’ils jugent « idéologiquement irrecevables ».(4) Dès lors, les « ignominies de l’Empire [américain] »(5) ne sont jamais diffusées dans la presse internationale et encore moins remises en cause. Cuba, mars 2003. Plus de septante citoyens cubains sont arrêtés par les autorités de la Havane et condamnés à des peines allant de cinq à vingt années de prison. Le régime castriste justifia ces jugements sévères en invoquant une tentative de complot contre le pouvoir en place. Interrogé à propos de cet évènement, Lamrani expliqua que c’étaient 87 et non pas 75 personnes qui furent arrêtées. En effet, douze d’entre elles seraient en réalité des espions américains et non des prétendus dissidents. Quant au motif de l’arrestation de
masse, il le présenta comme suit : les Cubains étaient en réalité des agents « stipendiés », c’est-à-dire payés par les Etats-Unis et entretenant avec le continent honni un « contact continu ». Cette interprétation fait parfaitement écho à la déclaration du ministre des affaires étrangères cubain, Felipe Pérez Roque, qui affirma que ces individus avaient été « poursuivis en justice en vertu des lois cubaines sanctionnant ceux qui ont collaboré avec une puissance étrangère en vue de porter atteinte à leur patrie ».(6) Mais quelque chose ne joue pas : si l’on admet que les accusations que Lamrani et Roque portent à l’endroit des « stipendiés » sont vraies, en quoi diffèreraientelles de celles qui justifient l’emprisonnement des Cuban Five? De l’aveu de Lamrani, ces cinq agents antiterroristes ont été envoyés, par Cuba, pour enquêter sur des « groupes fascistes » œuvrant en « toute impunité à Miami ». En plus d’un soutien logistique, on peut raisonnablement penser qu’ils ont reçu un peu d’argent de poche pour mener à bien leur enquête. Il semble donc qu’ils aient été tout autant stipendiés que les « soi-disant » dissidents cubains que le journaliste s’évertue avec tant de zèle à condamner. Ce qu’il est intéressant de montrer ici, c’est la partialité manifeste de Lamrani qui, de manière opportune, change d’attitude selon le cas traité. D’un côté, en l’occurrence aux EtatsUnis, on aurait à faire à un procès inéquitable, entaché de vices de procédure et dont les inculpés sont innocents ; de l’autre, à Cuba, il s’agirait d’une condamnation tout à fait en règle puisque les coupables sont des … criminels. Autant la démonstration du journaliste apparaît probante quand il s’agit des Cuban Five, autant elle semble boiteuse quand il est question de légitimer à Cuba l’incarcération d’une septantaine de citoyens de la Havane. Mais là n’est pas le plus intéressant. Lamrani va en effet continuer à développer son point de vue, tentant de neutraliser toutes les critiques proférées à l’encontre de l’île révolutionnaire, ce qui, à la base, ne lui était pas demandé. Ainsi, il nous apprendra notamment que si les Etats-Unis levaient l’embargo, « principal responsable des problèmes à Cuba », c’est 100’000 logements qui apparaîtraient ! Puis, visiblement inspiré, il affirmera, en déclarant se fonder sur le dernier rapport de l’ONG Amnesty International, que Cuba serait le pays qui « viole le moins les droits de l’homme de tout le continent américain ». Et de conclure dans un élan lyrique, qu’il n’y aurait, toujours selon Amnesty, que deux pays au monde qui bafoueraient moins les droits de l’homme que Cuba, « le Luxembourg et un autre »,
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DOSSIER dont il avoue avoir oublié le nom. Cette ONG serait donc, manifestement à son insu, une fervente supportrice de l’administration cubaine !? L’exaltation dissipée, le doute finit par s’installer: et si Lamrani se payait notre tête ? Il serait tentant de répondre à cette question par l’affirmative. Pourtant, ce serait se fourvoyer naïvement. Le journaliste, en présentant ces deux affaires à travers un prisme déformant, ne fait que répondre à une attente collective. En effet, il apparaît clairement que les gens présents à cette conférence ne cherchaient qu’à consolider l’image idéalisée qu’ils se faisaient de Cuba. Finalement, peu semble leur importer qu’il y ait aujourd’hui à Cuba, selon le dernier rapport d’Amnesty International - le même que Lamrani utilisa - des « restrictions à la liberté d’expression, d’association et de mouvement (…) très importantes » ; qu’il subsiste « au moins 69 prisonniers d’opinion » ; que « cette année encore, des dissidents politiques, des journalistes indépendants et des militants des droits humains [aient] été la cible de manœuvres de harcèlement et d’intimidation » ; que « certains [aient] été placés en détention sans jugement ni inculpation ».(7) Afin de préserver leur jugement, ils font délibérément taire leur esprit critique, contribuant ainsi à propager cette amère réalité. En effet, en niant l’existence à Cuba d’entraves aux libertés fondamentales, ils se privent de la possibilité de les condamner, concourant indirectement à leur renouvellement. Que penser, finalement, de ces deux heures de conférence? Au sortir de la salle, seule l’impression d’avoir assisté à un prêche subsiste. Néanmoins, il est légitime de signaler en quoi l’argumentaire « lamranien », réduit au cas des Cinq, s’est révélé en substance crédible. On se joint volontiers au journaliste français pour appeler à la tenue d’un nouveau procès qui rejugerait, dans de meilleures conditions, les agents cubains incarcérés aux Etats-Unis. De ce côté, on peut espérer que le 2ème recours que les avocats des Cinq ont déposé en avril 2007 aboutisse à un allégement des peines, voire, le cas échéant, à des libérations. Pour revenir à nos deux procès, il semble important de souligner un dernier élément qui, à n’en pas douter, comblera toutes les sensibilités politiques : l’emploi abusif et ambivalent du terme « terrorisme ». Le tract du comité « Libérez les Cinq » nous en donne un exemple frappant à travers cette phrase : « Comment est-il possible qu’à l’heure de la lutte globale contre le terrorisme, cinq jeunes Cubains qui ont risqué leur vie pour empêcher la réalisation d’actes terroristes contre leur pays aient été (...) condamnés ? ».(8) Il est surprenant
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d’entendre énoncer, de la part de ceux-là mêmes qui critiquent les Etats-Unis, une rhétorique qui semble précisément en émaner. Mais cet emprunt n’a pas que des conséquences discursives. Si l’on se réfère à la liste de griefs qu’énonce Amnesty International à l’encontre de Cuba pour l’année 2007, on s’étonnera d’appendre que « le nombre d’arrestations pour « dangerosité prédélictuelle » a augmenté ».(9) La dangerosité prédélictuelle, qui consiste à placer en détention des personnes sans jugements ni inculpations, est invoquée par l’administration Bush, essentiellement depuis le lancement de sa croisade contre le terrorisme, pour « justifier » l’incarcération, à Guantanamo et ailleurs, de « combattants ennemis ». Sans toutefois faire référence de manière directe à l’argumentaire américain de lutte contre le terrorisme, Cuba semble tenter de l’utiliser à posteriori pour légitimer le parachutage « d’agents antiterroristes » à Miami et, plus problématique, pour lancer des vagues d’arrestations dans son propre pays. Cette concordance des expressions entre la Havane et Washington est tout sauf anodine venant de la part d’ennemis héréditaires. Pour finir, que doit-on penser des « Cuban Five » et de la couverture médiatique dans cette affaire ? Ce qui est certain c’est que nous n’étions pas face à l’un des « plus grands scandales politiques et judiciaires du siècle »(10) et encore moins en présence d’un oublié médiatique. L’affaire que nous avons en partie traitée dans cet article a été en réalité bien couverte, là où elle s’est produite, c’est-à-dire à Miami et aux Etats-Unis. Pour preuve, Lamrani utilisa allégrement des sources journalistiques – notamment américaines - pour appuyer son argumentaire. Le terme de sousmédiatisation semble toutefois très subjectif. Dès lors qu’il est utilisé par des adeptes de l’emphase et de l’exagération, son emploi apparaîtra sans doute comme justifié… Si l’on devait finir cet article sur une recommandation adressée aux lecteurs, ce serait celle-ci : « soyez vigilants, ne croyez pas tout ce que vous lisez », dixit M. Salim Lamrani.
Népal: Après la monarchie, une démocratie?
Plus de dix années de lutte pour une démocratie au Népal n’ont toujours pas eu le temps de faire leur bout de chemin jusque sous les projecteurs des médias occidentaux. Et pourtant, plus de 13’000 individus sont déjà morts lors d’affrontements opposant les différents protagonistes de ce passage d’une monarchie à une idée de démocratie, 900 autres sont toujours portés disparus, sans compter les centaines de milliers de réfugiés déplacés par
les conflits. Par ailleurs, il semblerait que sur ce chemin vers la reconnaissance de la voix populaire, le peuple soit un peu trop souvent oublié. De la révolution maoïste à l’alliance d’opposition Le parti communiste maoïste népalais (CPN/M), mené par son secrétaire-général Pushpa Kamal Dahal, alias Prachanda (le féroce), est l’instigateur d’une révolte par les armes débutée en 1996. Le 13 février, le CPN/M a déposé au gouvernement, à l’époque sous la houlette du roi Birendra, une proposition de réforme en 40 points, demandant notamment l’établissement d’une assemblée constituante élue démocratiquement. Signifiant la fin de la monarchie, une telle requête ne pouvait être acceptée par la famille royale. Les Maoïstes ont alors commencé une lutte armée, sévèrement réprimée par l’armée royale, qui était soutenue financièrement par les Etats-Unis d’Amérique (le CPN/M figure sur la liste américaine des organisations terroristes). Pendant les dix années qui ont suivi, cette guérilla a connu une succession de combats intensifs, de cessez-le-feu et de négociations infructueuses. L’armée de libération du peuple népalais, bras armé du CPN/M, a pu compter sur le soutien, volontaire ou forcé, des populations campagnardes du pays, plus particulièrement celles de l’ouest. Le pouvoir royal était, quant à lui, presque uniquement cantonné à Kathmandu, la capitale. Attaques sur des postes de police pour s’approvisionner en armes, enlèvements et confiscations de biens immobiliers ont été des stratégies de combat très prisées des Maoïstes, commandés par un Prachanda oeuvrant clandestinement. Le 11 juin 2001, le prince héritier massacrait la famille royale avant de retourner l’arme contre lui. Il existe différentes versions quant à la raison exacte qui le mena à agir de la sorte. Il y a tout d’abord celle du refus de Birendra, son père, de considérer ses voeux de mariage avec une aristocrate. Autre version: celle d’un complot orchestré par Gyanendra, frère du roi assassiné. Il n’empêche que quelques jours après les événements, Gyanendra a été couronné souverain du Népal. Les désirs de pouvoir du nouveau monarque impopulaire se sont concrétisés au début de l’année 2005, lorsqu’il a décidé de dissoudre le parlement et de s’octroyer les pleins pouvoirs. Les opposants à la monarchie, comprenant le CPN/M, se rendant compte qu’il ne parviendrait pas à changer le système seul, et la nouvelle alliance des sept partis principaux (le Congrès népalais et le parti communiste marxiste-léniniste unifié népalais entre autres), ont signé à Delhi (Inde) un accord les unissant contre le
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DOSSIER « système féodal de la monarchie et des militaires » . Par le biais de cette nouvelle collaboration, une grève générale a été organisée au printemps 2006, qui a forcé le roi Gyanendra à céder aux aspirations démocratiques du peuple. Après cette victoire des partisans de l’abolition de la monarchie, un accord de paix a été signé entre le CPN/M et le gouvernement, sous la surveillance de l’ONU. Depuis, le processus démocratique a véritablement pu commencer. Un gouvernement intérimaire composé de l’alliance des sept partis et du CPN/M avait comme missions de créer une constitution intérimaire, promulguée en janvier 2007, et d’organiser des élections pour la formation d’une assemblée constituante.
Des minorités écoutées? Cette dernière tâche, à première vue une simple étape de plus à franchir, est au sein de tous les débats depuis les accords de paix et la création du gouvernement intérimaire. Ces élections, à l’origine prévues pour juin 2007, puis repoussées à septembre de la même année, sont actuellement agendées pour le mois d’avril 2008. Chacun des partis impliqués dans le parlement intérimaire, plus particulièrement le CPN/M et le parti du Congrès népalais, semble faire de l’organisation de ces élections une véritable lutte pour le pouvoir. Ayant été obligée de collaborer en 2005 pour forcer le roi Gyanendra à céder face à la pression populaire, l’alliance des huit partis (sept partis et le CPN/M) est aujourd’hui des plus fragile. Entre les animosités du parti majoritaire, le parti du Congrès népalais de l’actuel premier ministre Koirala, envers la gauche, et la volonté de chacun des partis de retirer les bénéfices de cette lutte pour la démocratie, le gouvernement intérimaire a décidé de fermer la table des négociations au peuple, qu’il soit issu de l’élite intellectuelle ou des minorités
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populaires, tels que les Dalits (basses castes), les femmes ou les Madheshs. Ces derniers, membres d’une communauté vivant dans le Teraï (plaines du sud du pays), sont devenus depuis l’été 2007 une véritable force d’opposition. Ils revendiquent une meilleure représentativité au sein du gouvernement de leur communauté et des minorités en général, des élections proportionnelles, et même pour certains Madheshs, la reconnaissance du Teraï comme entité fédérale. Puisque l’alliance des huit partis fait la sourde oreille aux demandes populaires, une des armes employées par le mouvement Madhesh est le « Bandh », ou le blocage des voies de communications et la fermeture forcée des commerces, à l’image de la grève générale de 2006. Même si ces actions permettent au groupe de faire entendre leur voix au niveau national, elles ont des répercussions négatives sur l’ensemble de l’économie, déjà fragilisée par une situation géographique handicapante pour le pays. En effet, le Népal est totalement dépendant des importations indiennes, notamment pour le pétrole. Ce sont avant tout les petits revenus qui souffrent de ces blocus. Certains paysans ont dû laisser pourrir leurs récoltes sur place par manque de transports. Le mouvement Madhesh a également connu quelques taches sombres dans son combat pour la reconnaissance, du fait qu’il est parfois difficile à contrôler par ses dirigeants. Au printemps 2007, des affrontements entre militants du CPN/M et Madheshs dans les villes de Gaur ou de Lahan (Teraï) ont dégénéré en bain de sang. Mais les Madheshs ne sont pas les seuls acteurs de l’actuelle opposition. Les Dalits, par exemple, demandent une meilleure représentativité des basses castes dans un système dirigé avant tout par des individus de castes supérieures. Concernant l’élite intellectuelle du pays, elle exige, entre autres, une véritable liberté de presse. Il n’est pas rare qu’un journaliste se fasse menacer par certains groupes politiques suite à des déclarations critiques à l’encontre de la politique nationale.
Différentes Démocraties Il semble que la définition de la démocratie diverge d’un protagoniste à un autre. Pour la majorité de l’alliance des huit partis, le fait d’abolir la monarchie et de passer à un gouvernement élu est suffisant. Pour d’autres, notamment les groupes absents au gouvernement intérimaire, il s’agit de plus qu’une question d’élections. Selon le premier ministre Koirala, les émeutes dans le Teraï sont tout à fait normales, étant donné que le royaume d’antan connaissait déjà des problèmes de ce genre . Cette déclaration reflète la volonté du gouvernement de ne pas vouloir écouter les demandes du peuple. Et pourtant, le CPN/M a récemment quitté le cabinet des ministres intérimaire - sans pour autant sortit du parlement - en relançant un débat qui semblait être terminé pour l’alliance des huit partis. En mal de popularité, les Maoïstes, ainsi que le parti communiste marxiste-léniniste unifié népalais (CPN/UML), ont décidé de prendre en compte les revendications des minorités, et ont réussi à faire passer une motion demandant que l’élection de l’assemblée constituante se décide à la proportionnelle. Mais une partie du parlement demande toujours qu’une part des sièges se répartisse au suffrage proportionnel et l’autre par un scrutin uninominal à un tour (celui qui gagne emporte tous les sièges). « À quand les élections? » se demandent les membres des huit partis de l’alliance, qui ne manquent une occasion de s’accuser les uns les autres, dénonçant leurs intérêts ou actions « anti-démocratiques ». La communauté internationale a, à différentes reprises, tenté de faire entendre sa faible voix, en sommant le gouvernement intérimaire de fixer une date définitive pour les élections de l’assemblée constituante. Par le biais de l’ONU, elle a aussi supervisé le processus de paix, en enregistrant les armes et les hommes de l’armée de libération du peuple népalais dans le courant du printemps 2007. En ce qui concerne le peuple, il commence gentiment à perdre espoir de voir la monarchie et les hiérarchies sociales et de castes tomber et se rallie de plus en plus aux groupes d’opposition marginaux, qui prônent l’action de rue . Il ne croit plus aux promesses du nouveau gouvernement et se soucie de la lenteur du processus démocratique. Mais aux yeux de l’occident, le Népal reste avant tout le pays de l’Everest et de ses trekkings, que rien ne saurait troubler, pas même les appels d’une population locale qui ne sait pas vraiment où elle se dirige.
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DOSSIER Les blessures secrètes du Laos
Qui aujourd’hui en Occident se préoccupe du Laos pour des raisons autres que touristiques? Personne, et pourtant le pays connaît de nombreux problèmes socio-économiques liés à un passé de guerre, d’instabilité et d’ingérence étrangère. Il faut dire que le Laos paraît au premier abord de peu d’intérêt : isolé, peu développé, le pays reste à la traîne par rapport à ses puissants voisins (Thaïlande, Vietnam et Chine entre autres). Les raisons en sont multiples : D’abord une population peu nombreuse (6 millions d’habitants sur un territoire plus de quatre fois plus grand que la Suisse) et qui augmente lentement. Ensuite, une économie reposant encore très majoritairement sur l’agriculture, la pêche et la sylviculture (près de 80% de la population active) et n’ayant encore que peu mis en valeur ses ressources naturelles. Le tourisme, s’il est en nette augmentation, ne représente quant à lui pas encore un revenu suffisant pour faire la différence sur le plan de l’économie nationale qui reste peu dynamique malgré une croissance relativement élevée (7,3 % par an). De tout cela résulte que le Laos reste encore aujourd’hui l’un des pays les plus pauvres d’Asie, économiquement dépendant des investisseurs étrangers et de l’aide internationale. Après l’indépendance, la division Ce retard économique conséquent s’explique au moins en partie par les tragiques événements qui marquèrent l’histoire récente du pays. En effet, après 50 ans d’occupation coloniale française, synonyme de stagnation économique et politique voire même d’affaiblissement face à ses voisins, le Laos entra dès la fin de la Seconde Guerre mondiale dans une période de grande instabilité politique qui
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s’aggravera jusqu’à se transformer en véritable guerre civile, encore envenimée par l’ingérence de puissances étrangères. Car ce n’est qu’en 1975 et après 25 années de lutte que le Pathet Lao (Pays lao), parti aujourd’hui à la tête du pays, parvint à s’imposer avec l’aide et sous l’égide du Viet Minh nord-vietnamien. Les 15 premières années après l’indépendance (c’est-à-dire de 1950 à 1964 environ) virent la création de nombreuses factions politiques aux orientations et aux buts très différents. Le Pathet Lao, gouvernement de résistance d’obédience communiste fut quant à lui fondé avec le soutien du Viet Minh pour contrer l’influence d’un gouvernement pro-occidental de droite et libérer le pays de toute ingérence des grandes puissances capitalistes. Aucune faction ne parvint à s’imposer comme force dominante dans tout le pays, si bien qu’au début des années ‘60, le Laos se retrouva clairement divisé entre d’un côté le Pathet Lao – qui contrôlait alors avec l’aide du Viet Minh, une grande partie du nord-est montagneux – et de l’autre les factions de droite établies à Vientiane, l’actuelle capitale située au bord du Mékong sur la frontière thaïlandaise. On comprend naturellement que cette période d’instabilité empêcha tout développement ou croissance économique du pays, mais c’est surtout la décennie suivante qui marqua de façon très négative l’avenir des laos. Vers l’affrontement général Le Laos fut en effet le théâtre d’une guerre, totalement méconnue de l’Occident, qui vit s’affronter des peuples indigènes, mais également de nombreux soldats étrangers de tous bords. Pour mieux comprendre la situation, il faut savoir que le Laos est en grande partie situé dans la Cordillère annamitique qui marque la frontière naturelle historique entre les populations d’origine chinoise (ce qui inclut les multiples ethnies vietnamiennes) à l’est, et les peuples indianisés d’Asie du Sud-Est à l’ouest. Notons d’ailleurs que le Laos fait encore aujourd’hui office de zone tampon entre les deux grandes puissances économiques de la région, à savoir la Thaïlande et le Vietnam, et qu’il se retrouve désormais dans une étrange situation de dépendance économique face au premier (plus de 50% de ses importations) et politique face au second. Le Laos fut donc le théâtre d’une lutte d’influence renouvelée entre ces deux grands courants de population, lutte attisée par le contexte de Guerre froide et l’ingérence des grandes puissances des deux blocs. Ainsi, de même qu’au Vietnam avec le Viet Minh et la République du Sud-Vietnam, c’est bien dans le contexte de l’affrontement entre camps capitalistes et communistes qu’il faut replacer au Laos la guerre que se livrèrent le Pathet Lao et ses opposants de droite, et à
leurs côtés de nombreux soldats étrangers. Les Etats-Unis avaient dès 1960 envoyé une aide militaire au pouvoir de Vientiane pour former et armer les troupes gouvernementales. Suite à la montée en puissance du Pathet Lao et du Viet Minh, armés par l’URSS, le président Kennedy laissa planer la menace d’une intervention militaire américaine directe sur sol lao pour empêcher une prise de pouvoir totale des communistes. Une conférence multipartite se réunit alors à Genève pour tenter d’apaiser la situation et, après de longues négociations, des accords furent conclus en juillet 1962, garantissant l’indépendance et la neutralité du Laos et interdisant toute présence étrangère sur son sol. Mais ces accords ne furent respectés par aucune des parties, bien au contraire. Multiples ingérences étrangères La Guerre d’Indochine s’intensifia en effet considérablement dès 1963 et de multiples affrontements déchirèrent le Laos et ravagèrent de vastes régions du pays jusqu’en 1973. Etaient engagés dans le conflit bien entendu des soldats de l’armée gouvernementale et des résistants du Pathet Lao, mais également des agents américains et de grands contingents nord-vietnamiens et chinois, agissant tous en totale violation des accords de Genève. De nombreux soldats nord-vietnamiens opéraient au Laos déjà avant 1960 pour soutenir le Pathet Lao dans sa lutte, mais la taille des effectifs augmenta encore considérablement par la suite pour dépasser le chiffre impressionnant de 80 000 hommes en 1969. Ces soldats étaient chargés d’assiéger les forces gouvernementales et leurs alliés, mais également de protéger la fameuse piste Ho-Chi-Minh, qui, traversant une bonne partie du Laos et du Cambodge, deviendra le principal chemin de transit entre le Nord-Viet Nam communiste et la République du Viet Nam au Sud. 600 000 soldats et autant de milliers de tonnes de matériel empruntèrent cette route entre 1966 et 1971, faisant à nouveau fi des accords de Genève. Le camp communiste compta de plus dans ses rangs dès 1971 une force de défense aérienne chinoise de taille conséquente, accompagnée par des milliers de cantonniers chargés de maintenir en état les routes de l’extrême nord du Laos, proche de la frontière chinoise. Face à ce déploiement de force les Etats-Unis choisirent, pour contourner les accords de Genève, d’agir de façon plus subversive et secrète, ce qui n’empêcha pas leur intervention d’avoir des résultats désastreux pour tout le pays. Les premiers agents de la CIA furent envoyés au Laos pour contrer l’influence grandissante du Pathet Lao en formant l’armée gouvernementale et surtout en créant
ANTOINE ROTH - LIONEL THORENS
DOSSIER une unité spéciale entraînée pour combattre en zone montagneuse (rappelons que le Nord du pays est en majorité couvert par les montagnes de la Cordillère annamitique). Cette unité qui compta dès 1961 près de 10 000 hommes était en grande partie composée de membres de l’ethnie Hmong, largement minoritaires au Laos. Leur utilisation par les Etats-Unis dans la lutte contre le Pathet Lao leur valut, après la victoire de ce dernier, d’être considérés comme des traîtres et leur attira innombrables ennuis et persécutions sur lesquelles nous reviendrons par la suite. Suite aux accords de Genève et à l’interdiction de toute présence étrangère au Laos (et de fait, aucun soldat américain ne combattit jamais directement sur sol lao), les opérations de la CIA devinrent encore plus confidentielles, à tel point que le Laos ne fut jamais cité dans les rapports officiels sur l’évolution de la guerre et fut simplement désigné comme «l’Autre Théâtre». L’effort déployé par la CIA au Laos n’en reste pas moins l’opération paramilitaire la plus chère jamais réalisée par l’agence. La guerre de l’ombre C’est donc par le secret entourant toute l’opération et par l’ampleur des moyens déployés que se distingue d’abord l’action américaine au Laos. Malgré une avance technologique conséquente, l’armée gouvernementale chapeautée par les Etats-Unis ne parvint jamais à s’imposer sur le terrain face à des forces supérieures en nombre et endurcies par des années de lutte et de guérilla. Et de fait, les forces américano-hmong-lao ne remportèrent aucune bataille d’importance et perdirent petit à petit le contrôle de toute leurs bases sur territoire lao. Si les batailles terrestres laissèrent de nombreuses traces ce sont surtout les bombardements aériens qui ravagèrent le Laos. Dès 1964, les Américains installèrent des bases en Thaïlande, d’où des avions partaient pour le Nord-Vietnam ou la piste HoChi-Minh et, pour répondre aux directives du haut commandement consistant à larguer toutes les bombes embarquées avant de retourner à la base, déversaient le reste de leur chargement sur les zones civiles de l’est du Laos. Le pays fut lui-même la cible de bombardements intensifs durant toute la guerre d’Indochine, visant comme nous l’avons dit la piste Ho-Chi-Minh, mais également toute autre partie du pays susceptible d’abriter des retranchements du Viet Minh ou du Pathet Lao. On comprendra mieux l’importance de l’action américaine – et son coût énorme – en sachant que le nombre de vols effectués au Laos est une fois et demi supérieur à celui des vols au Vietnam. Ainsi, avec 580 944 sorties en 1973, la force aérienne américaine opéra
en moyenne un largage toutes les 8 minutes, 24h/24, et ce pendant 9 ans! Entre 1964 et 1969, environ 450 000 tonnes de bombes furent larguées sur le pays et dès 1968, lorsque les bombardements furent interrompus au Vietnam sur ordre présidentiel, le pilonnage redoubla au Laos – toujours à l’insu du monde entier –, si bien que 450 000 tonnes furent larguées non plus en 5 ans mais bien chaque année jusqu’en 1972. Résultat : à la fin de la guerre, le chiffre total de bombes déversées par les avions américains s’élevait à 1,9 millions de tonnes, soit plus d’une demi-tonne par homme, femme ou enfant vivant au Laos, ce qui fait du pays la nation la plus lourdement bombardée, sur une base par habitant, de toute l’histoire de la guerre… Cette pluie de bombe n’empêcha pas le Pathet Lao de contrôler, au sortir de la guerre et après le désengagement américain dans toute la région, la grande majorité du pays et de s’emparer définitivement du pouvoir le 23 août 1975. On constate donc l’inefficacité de la stratégie américaine qui non seulement ne parvint pas à freiner l’avancée communiste, mais dévasta de plus de grandes régions du Laos et causa des dommages énormes et durables à la population civile. En effet, de nombreuses bombes américaines n’explosèrent pas au largage et parsèment encore le pays sous la forme d’UXO (pour unexploded ordnance), des engins explosifs non désamorcés qui continuent de faire de nombreuses victimes 30 ans après la fin du conflit, notamment parmi les enfants (40% des accidents) et les jeunes qui, faute d’être sensibilisés aux risques liés à ces objets en métal d’apparence parfois tout à fait inoffensive, continuent de jouer avec ou tentent de les récupérer pour les vendre. La question Hmong Autre conséquence catastrophique de la guerre du Viet Nam au Laos : les mauvais traitements infligés à l’ethnie Hmong par le gouvernement central. Le Pathet Lao n’a jamais pardonné à ce groupe d’origine chinoise représentant quelque 8% de la population de s’être allié aux Américains lors de la guerre d’Indochine. En guise de représailles, l’armée lao a été envoyée dans le nord-ouest du pays pour persécuter les tribus Hmong dans leurs villages près de la frontière thaï. Ainsi, ils sont plusieurs milliers à s’être retrouvés à fuir dans la jungle pour s’abriter des massacres ou à tenter de traverser la frontière pour s’entasser dans des camps de réfugiés aux conditions de vie déplorables. Lors de la 24e session du groupe de travail sur les populations autochtones, qui s’est déroulé au Palais des Nations à Genève du 31 juillet au 4 août 2006, M Vaughn Vang, Hmong exilé au Etats-Unis, et représentant
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du Lao Human Rights Council, est venu plaider en faveur de son peuple. Dans sa déclaration, M Vang a décrit la situation par ces mots particulièrement terrifiants : « […] notre peuple est attrapé par les soldats, il est torturé sans pitié, mutilé; les femmes et les filles sont violées ; les enfants sont éventrés et on laisse pendre leurs intestins hors de leur ventre afin qu’ils subissent une mort lente et douloureuse […].» Selon lui, plusieurs milliers de Hmong ont été tués par l’armée lao jusqu’à présent. Il n’hésite pas à utiliser le terme de génocide pour qualifier ce massacre. Ceux qui ont réussi à fuir le pays pour rallier la Thaïlande voisine s’entassent dans des camps aux conditions très précaires. Ils seraient près de 8000 mille selon Amnesty International. Le gouvernement thaï a évoqué la possibilité durant l’été passé de refouler les nouveaux réfugiés qui franchissaient la frontière, mais est revenu sur sa décision suite à de virulentes réactions, notamment des grandes ONGs internationales. Brad Adams, directeur de la section asiatique de Human Rights Watch, en août 2007 à New York a déclaré « qu’il était choquant que la Thaïlande puisse même considérer le retour de réfugiés fuyant les persécutions, les violations de leurs droits, ainsi que les combats au Laos. », ajoutant même que « la menace du gouvernement thaï de renvoi des réfugiés Hmong démontre un honteux mépris des plus basiques principes du droit des réfugiés ». Actuellement, la situation semble s’être pour le moins stabilisée. L’armée aurait relâché sa pression sur les villages Hmong lorsque les derniers groupes armés de résistance ont accepté de déposer les armes. Cependant, le peu d’informations sur la région nous empêche d’avoir un aperçu objectif et à jour de l’état du conflit dans ce pays peu médiatisé. Il est à nouveau possible et sans danger pour les voyageurs de se rendre dans les régions où se rassemblent les villages Hmong. Cependant, ce peuple reste très marginalisé et isolé géographiquement dans un environnement essentiellement montagneux. Les stigmates d’un passé violent sont donc encore très visibles sous l’apparence de calme que connaît aujourd’hui le Laos : Les restes d’obus sont utilisés pour construire des maisons, d’immenses cratères de bombe parsèment encore la campagne, des carcasses de chars éventrés sont encore visibles ça et là le long des routes, livrées à la rouille et aux mauvaises herbes… Cependant, le Laos réussit à surmonter les blessures du passé et offre maintenant un visage souriant, accueillant et chaleureux. Il reste l’un des derniers havres de paix et de tranquillité sur une planète décidément fort agitée.
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Somalie, retour sur une tragique année Cet article sur la Somalie paraîtra en deux parties. Ici sera présenté le premier semestre 2007, de l’intervention éthiopienne à la trêve tacite (toute relative cependant), précédant la énième conférence de réconciliation de cet été. On montre ici quelles sont les causes qui ont poussé à une opposition militaire ouverte et comment l’échec d’une entente internationale pour l’envoi de troupes de maintien de la paix a aboutit à une présence prolongée de l’armée éthiopienne. Occupation qui était vouée à changer les composantes du conflit préparant ainsi un nouveau drame humanitaire dans la corne de l’Afrique. En décembre dernier, l’armée éthiopienne décide de lancer une intervention pour chasser de Somalie l’Union des tribunaux islamiques (UTI). Certains leaders radicaux avaient alors instauré la charia et décrété le djihad contre les forces du gouvernement fédéral transitoire (GFT) chargé par l’ONU en octobre 2004 de former un Etat central somalien.
territoire somalien dont Mogadiscio en juin 2006 (le Nord du pays restant des régions semi autonomes : le Somaliland, vestige de la colonie italienne, situé a la frontière de Djibouti et contrôlé par le clan des Isaas ; et le Puntland, pointe orientale du pays, sous contrôle du clan des Darods). Ils chassèrent de la capitale les « seigneurs de la guerre »
L’Union des tribunaux islamistes a été crée en 2002. Agrégat des différents tribunaux islamiques locaux, elle rassemble à la fois des chefs de clans et des leaders religieux plus ou moins radicaux. En effet, pour pallier la chute des juridictions civiles, de nombreux tribunaux islamiques se sont mis en place à partir de 1995 dans la foulée de l’initiative de Cheikh Ali Dhere. « Le but premier était d’enrayer la violence à Mogadiscio et de rétablir un peu de justice. A l’époque, il n’y avait déjà plus d’Etat et les tribunaux somaliens avaient disparu », rappelle Cheikh Akhmed, l’un des premiers fondateurs. La justice qui y est rendue tire ses sources du Coran et du droit traditionnel somalien, le Xeer. En 2004, ces tribunaux qui avaient pris de l’importance se sont dotés d’une organisation armée et ont peu à peu conquis le Sud puis le centre du
qui y avaient semé le chaos pendant plus de 15 ans et instaurèrent un ordre politique islamique. Ce retour à la sécurité dans la capitale leur assura une large sympathie auprès de la population locale malgré certaines mesures contestées, prises par les franges les plus radicales des tribunaux, telles que l’interdiction du qat (drogue nationale très appréciée des couches les plus défavorisées) ou encore les différentes formes de pression visant à l’obligation du port du voile, à la fermeture des vidéos club… Mais leur progression territoriale vers le Nord a peu à peu réduit le territoire du gouvernement fédéral de transition (GFT) à une peau de chagrin. Le GFT, pris en étau entre le Puntland et la remontée de l’UTI et ne dis posant plus que d’un contrôle territorial très relatif sur la ville Baidoa où il avait établi
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son siège, se trouva contraint d’appeler à l’aide les troupes éthiopiennes. Cette intervention, vue d’un bon œil de la part de la communauté internationale, devait restaurer la sécurité relative nécessaire pour que le GFT, seul gouvernement reconnu, puisse mener à bien la mission qui lui avait été confiée par l’ONU et l’UA (Union Africaine), c’est-à-dire préparer des élections pour 2009, une fois la réconciliation nationale achevée. Les Etats-Unis pêchent en eaux troub1es L’intervention éthiopienne a reçu un soutien indirect mais actif des Etats-Unis, d’une part parce qu’elle entre dans le cadre de la guerre contre le terrorisme mais aussi car cette région occupe une place stratégique pour le contrôle du transit maritime d’hydrocarbures en provenance de la péninsule arabique via le golfe d’Aden. L’UTI est en effet classée comme une organisation terroriste affiliée à Al-quaeda par le Pentagone et qualifiée de « talibans africains » par Washington. Dès 2006, les EU, via la CIA, ont apporté leur soutien aux seigneurs de guerre afin de repousser les offensives des forces de l’UTI, en vain. C’est donc tout naturellement que la Maison-Blanche accorda son feu vert lorsque son allié dans la région, l’Ethiopie, évoqua la possibilité d’aller « secourir » le GFP et de contrer la montée d’une UTI de plus en plus radicale. Le 19 décembre 2006, date de l’invasion éthiopienne en Somalie, la porteparole du département d’état américain Jannelle Hironimus apporta son soutien ouvert à cette action. Il s’agissait alors d’endiguer le flot d armes arrivant dans le pays pour soutenir l’UFI (ici l’Erythrée est clairement visée) malgré l’embargo décrété en 1992 par l’ONU (résolution 733). Cependant, Washington avait fait passer, deux semaines plus tôt, la résolution 1725, permettant ainsi d’armer les forces du GFT. Les intérêts de l’Ethiopie et de l’Erythrée : un conflit par clans interposés En effet, l’invasion éthiopienne s’inscrit aussi dans le cadre d’un conflit par procuration contre l’Erythrée. Selon l’ONU, « des allégations ont fait état de l’ingérence constante de pays voisins dans les affaires de la Somalie »
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DOSSIER (Rapport du Secrétaire général sur la situation en Somalie du 23 octobre 2006). L’Erythrée et la Somalie sont les plus vieux ennemis de la corne africaine. Après s’être battus pendant plus de trente ans (1961-1993), les hostilités concernant la démarcation frontalière de la région du Tigree ont repris en 1998. Un accord de paix, signé à Alger en 2000, devait conclure la fin de ce litige qui avait déjà fait 70 000 victimes. Une commission fut alors chargée d’établir les frontières. Le tracé situait la ville de Badmé, cause principale de la discorde, dans le territoire Erythréen. Par conséquent, l’Ethiopie ne reconnut pas le travail de cette commission et la zone frontalière demeure aujourd’hui encore une zone d’affrontements où chaque belligérant fait pression par d’importants mouvements de troupe provoquant à chaque fois la panique dans le camp adverse. Et ceci malgré la présence de 4300 casques bleus. D’où le soutien accordé par Asmara (Erythrée) aux membres de l’UTI farouchement antiéthiopiens. De nombreuses armes sont donc livrées aux membres des tribunaux islamistes, situation dénoncée à de nombreuses reprises à l’ONU, en vain. De plus, la diaspora somalienne, par nature hostile à l’Ethiopie, a trouvé refuge en Erythrée. Toutes les composantes du conflit par procuration sont donc présentes. Pour l’Ethiopie, il s’agit de se désenclaver en contournant la mainmise de l’Erythrée et de Djibouti sur les débouchés portuaires de la corne africaine. Pour cela, l’Ethiopie défend son champion, c’est-à-dire le chef du GFT, Abdullahi Youssouf. Quant à l’Erythrée, son but est avant tout de réduire l’hégémonie militaire et la pression éthiopienne à ses frontières en créant un nouveau front en Somalie. L’invasion de l’Ethiopie Les premiers combats opposants l’UTI aux forces éthiopiennes ont éclaté fin décembre 2006 dans la région de Baïdoa. L’Ethiopie avait été «contrainte d’entrer en guerre pour protéger la souveraineté de la nation et repousser les attaques répétées des terroristes des tribunaux islamiques et des éléments anti-éthiopiens qui les soutiennent» argua alors Meles Zenawi, premier ministre éthiopien. Les forces islamistes ont rapidement été mises en déroute par les tanks et l’aviation éthiopienne, celle-ci disposant d’images satellites « offertes » par Washington.En une dizaine de jours, les milices de l’UTI étaient « défaites » ou du moins toute résistance organisée avait disparue. Après la prise des bastions islamistes des villes de Beledweyne et de Bandiradley, la fermeture des frontières a été décrétée par le GFT et les avions éthiopiens ont alors bombardé les deux aéroports contrôlés
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par l’UTI, espérant ainsi couper court à l’arrivée de djihadistes étrangers. Le 28 décembre, les forces du GFT et de l’Ethiopie sont entrées dans un Mogadiscio vidé des islamistes. Le dernier fief de l’UTI, le port de Kismaayo, deuxième ville du pays, a été déserté le 1er janvier. L’Ethiopie, qui a reconnu tardivement sa responsabilité dans la lutte contre les tribunaux, aurait envoyé entre 15 000 et 20 000 soldats pour cette offensive éclaire. S’en suit alors une chasse aux islamistes dans le maquis somalien. Le premier ministre éthiopien ne manque pas d’entretenir le flou en déclarant partir «dans deux semaines, le temps d’atteindre la stabilité, comme nous l’a réclamé le gouvernement somalien. ». De son côté, le premier ministre du GFT, affirme que «les Ethiopiens partiront lorsqu’ils auront éliminé les terroristes et pacifié la Somalie. Cela prendra des semaines et des mois». Quant aux leaders de l’UTI, ils promettent une « irakisation » du conflit. Enfin, la communauté internationale, via le groupe de contact, appela à l’envoi d’une force de maintien de la paix comme le prévoyait la résolution 1725 votée début décembre 2006. En attendant, le statu quo prévalait. Réflexe clanique Cependant, dans la capitale somalienne, le départ de l’UTI a provoqué un réflexe clanique. Les anciens chefs de guerre se sont empressés de reprendre le contrôle de la ville, réinstaurant les péages et autres rackets des civils. Le GFT avait lancé un ultimatum, dès l’entrée à Mogadiscio, sommant les différents clans de déposer les armes. Au lieu de les rendre gratuitement, de nombreux miliciens les ont vendues sur le marché de Bakara. Or, les différents clans se sont jetés sur cette opportunité pour reconstituer un arsenal en leur faveur. Le prix de l’AK-47 est passé de 100$ à 350$ en quatre jours, ce qui montre l’ampleur du phénomène et la relativité de l’embargo sur les armes. Ainsi, un flot massif de soldats du sous-clan Majerteen venu du Puntland, celui du président du GFT Addulahi Yusuf, arriva dans la capitale provoquant la peur des autres clans d’un retour à une suprématie des Darods et donc un réarmement massif. L’échec de l’Union Africaine A la fin du mois de janvier s’est tenu un sommet de l’Union Africaine (UA) rassemblant 53 pays. Une force de maintien de la paix, l’AMISOM, devait être rapidement déployée. Or, l’UA avait estimé à 8000 le nombre de soldats minimum nécessaires. A la fin du sommet, seuls cinq pays s’était engagés à envoyer la moitié des effectifs: l’Ouganda, le Ghana, le Malawi, le Nigeria et le Burundi. Après 16 ans de chaos, la poudrière somalienne fait peur. De plus, l’UA avait stipulé
que ces contingents ne devaient pas inclure les pays frontaliers de la Somalie car ils seraient clairement perçus comme force d’occupation. Le président de l’UA, Alpha Oumar Konaré, avait alors mis en garde ses membres : «si les troupes africaines ne sont pas mises en place rapidement, ce sera le chaos». Une normalisation du conflit semblait donc envisageable. En effet, l’Ethiopie affichait sa volonté de se désengager rapidement tandis que les premiers convois ougandais arrivaient début mars (accueillis au mortier à Mogadiscio). Le gouvernement somalien était même retourné s’installer dans la capitale et une première conférence nationale de réconciliation se préparait pour le 16 avril. Le tournant du conflit : l’offensive du 29 mars 2007 Cependant, dès l’arrivée du gouvernement à Mogadiscio, la situation s’est peu à peu embrasée dans la capitale. Pour y remédier, l’Ethiopie a lancé une vaste offensive dans les quartiers sud de Mogadiscio le 29 mars. Appuyée de chars, d’avions et d’hélicoptères, l’armée éthiopienne, sans les forces de l’AMISOM non mandatés pour cela, affirmait avoir tué 200 rebelles au troisième jour de l’offensive. Plus de 10 000 personnes ont alors fuit la capitale somalienne tandis que les appels à la résistance contre l’occupation éthiopienne se multipliaient. «En quelques mois, un différend politique entre deux groupes qui luttaient pour le pouvoir s’est transformé en différend religieux, puis en cause nationale», avança alors Ahmed Abdisalam Adan, le directeur de Hornafrik, l’une des rares télévisions privées de Mogadiscio. Un premier hélicoptère fut abattu et les premiers soldats tués traînés dans les rues, rappelant étrangement le fiasco de l’opération « Restore Hope » décrit par Ridley Scott dans « la chute du faucon noir ». Si le harcèlement subit par le GFT tout le mois de mars a probablement été orchestré par les nombreux djihadistes étrangers et les chefs du clan Hawiye, cette offensive, parce qu’elle a abouti à la mort d’au moins 300 civils tués par des bombardements massifs des quartiers populaires avec des bombes au phosphore (notamment autour du stade de la ville), a déclenché un changement du conflit. D’une guerre clanique entre Hawiye (UTI) et Darods (GFT), la situation dans la capitale est passée à une résistance à une occupation étrangère avec en teinte de fond une lutte religieuse (les somalis sont musulmans à 99% et l’Ethiopie est un pays majoritairement chrétien). Ce que de nombreux observateurs étrangers redoutaient s’est donc produit : Mogadiscio a explosé. A la fin du mois d’avril, Le HCR estimait à 391 000 le nombre de civils ayant fuit la capitale.
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DOSSIER Les insurgés et les forces éthiopiennes se sont livrés pendant un mois à des combats à l’arme lourde au cœur de la capitale. La conférence de réconciliation avait été depuis longtemps enterrée tandis que les 1200 soldats ougandais restaient terrés dans leur base, sans les soldats promis par les autres pays de l’AMISOM. Fin avril, la situation semblait normalisée : « des combats intenses se sont poursuivis jusqu’au 27 avril, date à laquelle les forces gouvernementales et éthiopiennes se sont emparées des places fortes des insurgés dans Mogadiscio Nord » (rapport de l’ONU). Dans un contexte de préparation d’une conférence nationale de réconciliation, une trêve tacite s’est engagée. 90 000 civils sont rentrés à Mogadiscio en mai (chiffres du HCR) malgré les attentats quotidiens, l’absence d’eau et d’électricité ; constatant ainsi l’ampleur des pillages et des destructions. Dans la deuxième partie, il sera question de la conférence de réconciliation, qui n’a pu aboutir au règlement du conflit dans la mesure où elle n’a réconcilié qu’une partie du pays, manquant ainsi cruellement de légitimité, précipitant le pays dans un chaos inextricable et causant le drame humanitaire actuel sur lequel l’assourdissant silence de la communauté internationale stupéfie.
10 sujets dont le monde devrait entendre parler davantage selon l’ONU 1. Libéria : les défis du développement après des années de guerre civile 2. « Lost in Migration » : les défis des demandeurs d’asile dans un contexte de lutte contre l’immigration clandestine 3. République démocratique du Congo : La situation humanitaire à l’approche d’élections historiques 4. La tragédie cachée du Népal : des enfants pris dans le conflit 5. Somalie : l’insécurité exacerbe les conséquences de la sécheresse 6. Réfugiés en attente permanente : des milliers de réfugiés sans solution à l’horizon 7. Séisme en Asie du Sud : le défi de la reconstruction 8. Derrière les barreaux, hors d’atteinte : les enfants maintenus abusivement en détention 9. Des guerres de l’eau à la coopération : explorer les possibilités de consolidation de la paix à partir d’une ressource partagée 10. Côte d’Ivoire : les « médias de la haine » constituent une menace pour la paix et la réconciliation Tiré directement du site internet de l’ONU : http://www.un.org/french/events/tenstories
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Le combat de minorités pour la défense de leur identité
La première démocratie du monde Aujourd’hui, la Chine et l’Inde s’affichent de plus en plus clairement comme étant les prochaines superpuissances mondiales. Avec l’arrivée des Jeux Olympique à Pékin en mai, les médias européens dénoncent les inégalités du régime chinois, tout en laissant l’autre géant, l’Inde, plus ou moins à l’abri des critiques. Pourtant, la plus grande démocratie du monde n’a pas les mains aussi propres que l’on voudrait le croire. Retour sur quelques injustices qu’inflige l’Union indienne à une partie de sa population : les populations tribales. Si le pays traverse une période de croissance économique euphorique et que sa classe moyenne, toujours grandissante, compte environ 350 millions de personnes sur une population totale d’environ un milliard d’habitants, les fruits de la croissance ne profitent pas à tout le monde car encore 26% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté fixé à 49.09 roupies par jour (1CHF équivalant environ à 35 roupies). Dans ce quart, l’on retrouve 90% de la population tribale indienne, les Adivasis. Persécutés durant des millénaires par les habitants du sous-continent indien, il est aujourd’hui capital de trouver des solutions pour lutter contre les conditions de vie déplorables qui leur sont imposées depuis trop longtemps.
L’exclusion d’un peuple « Adivasis » est le nom donné aux habitants « originels » de l’Inde. Ils occupèrent la région jusqu’à l’arrivée des Aryens, une peuplade de guerriers nomades originaires de l’Asie centrale qui envahirent l’Inde du Nord et l’Iran entre les XVIIe et XVIe siècles av. J.-C. Ces derniers apportèrent avec eux leur religion et le système de castes, celui-là même qui, pendant 30 siècles, a engendré l’ordre moral sur lequel l’hindou a le devoir de régler sa vie. La société hindoue est divisée en quatre grandes castes, et en des milliers de sous castes, qui fixent irrémédiablement le statut de l’homme dès sa naissance. L’inégalité se retrouve sous une forme ou une autre dans toute société, mais c’est seulement en Inde qu’elle est fondée sur un principe métaphysique, de la pureté rituelle et son contraire, la souillure rituelle. La caste la plus haute est celle des Brahmanes qui remplissent la fonction de prêtres et représentent donc le degré suprême de la pureté, celle-ci décroissant à mesure que l’on descend l’échelle des castes. Les intouchables quant à eux sont hors du systèmes des castes, ils naissent souillés et de ce fait ne représentent rien. L’Adivasis fait partie de ce dernier groupe, ce qui constitue une des raisons de leur exclusion et des persécutions dont ils sont victimes. Le Nord-Est, ses mouvements sécessionnistes En Inde, c’est dans la région du Nord-Est que l’on trouve la majorité des Adivasis, une concentration qui correspond au 20% de la population indigène de la planète. Elle répond à des caractéristiques très différentes du reste de l’Inde et se distingue de l’image habituelle que l’Occidental a du pays et de ses habitants. Le territoire est réparti en sept Etats habités par une population à majorité tribale : L’Arunachal Pradesh, l’Assam, le Manipur, le Meghalaya, le Mizoram, le Tritura et le Nagaland. Toute cette zone a été sujette à un développement atypique si on la compare au reste du continent. Dans l’Union indienne, c’est aujourd’hui une des régions qui participe le moins à la croissance économique prodigieuse du pays et souffre même d’un sévère sous-développement. Par ailleurs, du fait de leur isolement géographique, ces ethnies se sont développées en quasi vase clos durant des siècles. Elles ont
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DOSSIER subi certaines influences religieuses de l’extérieur, notamment venant de l’hindouisme, l’islam et le bouddhisme.- Le type et le degré de l’influence variant suivant chaque tribu. Bien que l’on sache que les Aryens les opprimèrent de manière violente dès leur arrivée, l’histoire du Nord-Est reste approximative pour la plupart des scientifiques. Les seules informations réellement fiables nous proviennent des colons britanniques qui débarquèrent en 1832, date à laquelle les tribus rentrèrent en contact pour la première fois avec le reste du monde. A cette époque, les britanniques convertirent en masse les autochtones, qui intégrèrent le christianisme à leur propre culture. Ce geste fut salutaire pour les Adivasis qui obtinrent ainsi une meilleure situation que celle qu’ils vivaient aux côtés des hindous, qui les méprisaient et cherchaient à les exploiter. L’existence des tribus suivit son cours jusqu’à la partition de l’empire des Indes et la déclaration d’indépendance en 1947. Alors que les terres musulmanes comme le Pakistan et le Bangladesh, et bouddhistes, comme la Birmanie, obtiennent des Etats indépendants, le Nord-Est de l’Inde est intégré à l’Union indienne. Un scandale pour les habitants de contrées aussi différentes du reste du souscontinent asiatique. La population proteste et des mouvements révolutionnaires apparaissent. L’Etat indien, alors dirigé par Jawaharlal Nehru, réagit violemment et déclare le Nord-Est « zone de troubles ». Ce type de déclaration, créée en 1956 afin de contrer les divers projets sécessionnistes, autorise les 200’000 soldats présents dans la région du Nord-Est de l’Inde, à perquisitionner, arrêter et tuer sans mandat. Il précise qu’aucun militaire ne pourra être poursuivi pour un acte accompli dans le cadre de ces pouvoirs. Il n’est donc pas étonnant alors d’apprendre que la torture est quotidienne dans cette région, que des centaines, voire des milliers de personnes soient mortes des suites de mauvais traitements. Par ailleurs, cette loi introduit également une restriction de l’accès à la région. L’Etat empêche les médias d’y accéder et la situation sera plongée dans le silence. Puis, en 1951, l’Union envoie l’armée en « mission pacificatrice » pour calmer les revendications sécessionnistes des tribus. A partir de ce moment, un véritable conflit éclate. S’en suit alors un demi siècle de guerre civile, opposant les groupes sécessionnistes armés et l’Union indienne. Comble du désespoir, au lieu de s’unifier, les tribus se divisent et luttent impitoyablement entre elles. En 1990, le Nord-Est indien connaît une des activités terroristes la plus active de la planète. On y
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décompte environ 120 groupes insurgés et depuis 1947, le nombre de morts liés aux attentats atteint les 50’000. A la fin des années 90, l’Etat arrive à signer plusieurs traités de cessez-le-feu avec quelques groupes sécessionnistes. Dès lors, la région jouit d’une stabilité suffisante pour lui permettre d’amorcer un processus de développement. Mais, le problème n’est toujours pas résolu et les explosions de bombes et d’autres attentats font malheureusement encore partie du quotidien de ces populations. Un cas oublié… De par la restriction de l’accès à la région par l’Etat, très peu d’informations ont été transmises au reste du monde, et même au reste de l’Inde. Cette situation a empêché, et empêche encore les potentiels soutiens de fournir une aide conséquente car ils restent dans l’ignorance de ce qui se passe dans cette zone. Le gouvernement indien se trouve lui bien arrangé par cet « oubli » qui lui évite toute retombée internationale. Cependant, sur la scène internationale, la construction du barrage de la vallée du Narmada (Un projet de création de plusieurs milliers de barrages dans la vallée du Narmada a provoqué le déplacement de 33 millions de personnes dont 60% d’Adivasis) et les abus commis contre les autochtones ont fait l’objet d’un rapport spécial au Conseil économique et social de l’ONU. Selon ce rapport, paru en 2005, le Conseil « recommande » à l’Inde de dédommager au plus vite les populations autochtones et souhaite que les droits fondamentaux soient prioritaires dans la mise en œuvre de projets de développement et d’autres projets similaires. L’ONU a également amené le gouvernement à prendre conscience qu’il ne peut pas vis-à-vis de la communauté internationale et de sa population négliger la présence de ces populations. Amnesty International a, de son côté, également publié un rapport, intitulé : « Inde : violence, viols et morts en détention. » Les graves abus du droit humanitaire rapportés sont surtout dûs au fait que les policiers savent qu’ils ne risquent pas d’avoir à rendre compte de leurs actes devant la justice, même s’ils tuent les victimes et que la vérité est mise à jour. Le rapport indique que les violations les plus fréquentes ont lieu lors des « opérations anti-insurrectionnelles » en réponse aux actions, elles aussi très violentes, de groupes militant pour l’indépendance ou l’autonomie. Quelle solution pour les tribus ? Un changement de mentalité du gouvernement et des mouvements insurrectionnels serait certainement une des clés de l’évolution de la situation. Les deux parties doivent faire des concessions. L’avenir de cette région est in-
certain et le combat insurrectionnel continuera sûrement à faire des morts avant que les habitants du Nord Est de l’Inde ne jouissent d’une situation pacifique durable.
Esprit critique et médias : inconciliables en temps de guerre?
En 1991, George Bush père engage les EtatsUnis dans un conflit armé avec l’Irak qu’on intitulera « la guerre du Golfe ». Le motifprétexte invoqué est l’invasion du Koweït par les troupes de Saddam Hussein. Victoire partielle: les troupes irakiennes sont rapidement défaites mais le tyran est toujours en place. Après l’attentat du 11 septembre 2001, George W. Bush fils déclare la guerre au terrorisme. Il utlise la peur ambiante et la pseudo-existence d’armes de destruction massive détenues par l’Irak pour entraîner son pays dans la poursuite de la guerre que son père n’a pas pu achever. En 2003 débute donc « la guerre en Irak » (ou invasion en Irak) qui vise, entre autres, la destitution de Saddam Hussein, la restauration de la démocratie etc. Dans ce type de conflits, quel est le rôle des médias? Après avoir submergé le public de détails et d’événements chocs, n’oublient-ils pas la phase d’analyse et de critique si essentielle? Participant à la défense des valeurs démocratiques, le journalisme doit à la fois diffuser des informations pertinentes et une large palette d’opinions éclairées sur les questions d’actualité. Pourtant, en temps de guerre, les médias semblent ne plus être conscients de leur rôle crucial de contre-pouvoir. Plutôt que de s’attacher à l’élaboration d’une réflexion, ils se contentent pour la plupart de mettre des informations bout à bout. Depuis la guerre du Vietnam, le pouvoir américain a bien saisi l’importance des médias dans un conflit et l’impact que peuvent avoir des images de violence et de douleur sur la population ; les images de souffrance et de mort sont en effet incompatibles avec la sensibilité des sociétés occidentales et surtout avec un discours évoquant le droit international. C’est ainsi qu’avec la guerre du Golfe, le gouvernement américain élabore un système lui permettant de contrôler tout reportage provenant du terrain. Ce système, appelé « pool », prend la forme de différentes zones destinées aux médias et délimitées par les militaires. Par conséquent, elles se trouvent bien loin du front où tout se passe et impliquent que
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DOSSIER les journalistes se plient aux règles imposées par l’armée sous peine de perdre leur place, dite privilégiée. Pourtant, les journalistes des pools ne bénéficient pas d’une grande liberté, bien au contraire. N’étant jamais sur le théâtre des opérations, ils ont bien du mal à mesurer réellement ce qui se passe. Bien souvent en manque d’information, les journalistes attendent jour après jour les déclarations des militaires, distillées au compte-goutte, ou profitent parfois même de reportages tournés par des soldats. On comprend aisément qu’avec un tel système de contrôle, toute information doit être interprétée et analysée avec prudence. En effet, avec le concept imposé des pools, le citoyen se retrouve face à une seule et même information, bien évidemment en accord avec le pouvoir américain. Or, il est communément admis que débats et analyses sont propices à l’émergence d’une réflexion et à celle d’un regard critique. Pour réussir à se forger sa propre opinion sur un sujet, il faut effectivement d’abord pouvoir apprécier différents points de vues; nécessité presque irréalisable dans un tel contexte. D’ailleurs, il n’y a jamais eu autant de journalistes regroupés dans un même lieu lors d’un conflit que lors de la guerre du Golfe. Et pourtant, ce sont toujours les mêmes informations que l’on peut lire, entendre ou regarder. En 1991, Bush père gagne la guerre du Golfe, mais les médias livrent au monde une guerre sans image du front et surtout sans héros et sans l’arrestation de Saddam Hussein. En 2003, les gouvernements américains et britanniques créent alors un nouveau concept, bien plus sournois que les pools et, qui contrairement à ce dernier dispositif, permet la formation de « héros ». Ce nouveau système consiste à incorporer des journalistes à différents groupes de soldats. Ce sont les journalistes « embedded », « embarqués ». Avant d’être affectés à une certaine unité qu’ils ne pourront pas quitter, sous peine de perdre leur place, les journalistes doivent suivre un entraînement comparable à celui effectué par les soldats et signer un contrat avec l’armée. De plus, une fois sur le terrain, les journalistes se fondent encore plus dans l’armée puisqu’ils portent les mêmes uniformes que les soldats, roulent dans les mêmes véhicules et certains en arrivent à porter des armes! On comprend déjà que les journalistes dépendent totalement de l’équipe qui les accompagne. Ce système présente plusieurs avantages pour les administrations américaine et britannique. Grâce à lui, les deux gouvernements répondent à l’attente des médias, qui auraient refusé de couvrir à nouveau la guerre depuis les pools, tout en gardant les journalistes sous
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contrôle. Effectivement, les différents dirigeants de la coalition savent pertinemment qu’un journaliste qui partage toutes les souffrances et les peines de ses nouveaux collègues aura beaucoup de difficultés à prendre de la distance face aux événements, afin de commenter correctement ce qu’il vit. La cen sure laisse ainsi place à un formatage bien plus habile où les journalistes ont de la peine à rester objectifs. Parallèlement, chaque rédaction, soumise comme n’importe quelle entreprise aux lois de la concurrence, cherche à attirer et surout à maintenir l’attention et la tension du public. En 1991, les principales chaînes de télévision calquent la présentation de leurs émissions sur l’exemple donné par la CNN. Ainsi, on peut principalement regarder de l’information-spectacle où s’enchaînent les flashes spéciaux, jingles, logos et autres animations marketing. De même, le direct s’impose comme la forme de télévision la plus appropriée, et ce, encore aujourd’hui. Dès le début de son utilisation, ce type de transmission est considéré comme un progrès extrême en matière d’information. La plupart des gens croient en effet que le direct garantit la véracité d’une information en ne montrant que la réalité. Selon Dominique Wolton , le public associe effectivement l’image à la vérité. L’image est depuis longtemps considérée comme la forme d’information la plus réaliste et ainsi, dans la pensée de chacun, le direct permettrait la meilleure information, car, la plus proche de la réalité. De cette manière, on pense parvenir à éliminer tout mensonge en réduisant l’écart qui existait autrefois entre l’événement et sa diffusion. De plus, le direct laisse croire au téléspectateur que la censure n’existe plus : pensée tout à fait erronée. Auparavant, ce dernier recevait les informations les plus importantes en sachant pertinemment qu’elles avaient préalablement été triées et vérifiées. Cette démarche aidait le public à être conscient qu’un montage ou même une censure avaient préalablement été effectués, ce qui est complètement oublié avec le direct. Par ailleurs, le direct a sans cesse besoin de nouveauté, mais il est évident qu’il ne peut pas se produire un nouvel événement en permanence et que le reporter ne peut logiquement pas toujours « être là au bon moment ». D’un côté, les journalistes « meublent » donc l’antenne dans l’attente du prochain rebondissement et de l’autre se déroule une scène intéressante : le téléspectateur reste « scotché » devant son écran et n’ose pas s’en éloigner de peur de manquer un événement important. Il y a donc des conséquences inhérentes au direct et qui sont non négligeables sur la qua-
lité de l’information. Pour commencer, en voulant donner un maximum d’informations le plus vite possible, les journalistes n’ont et ne prennent souvent plus le temps d’aller aux sources et encore moins celui de les vérifier. De plus, le direct ne permet plus aucune consultation du passé. Durant ces conflits, on oublie souvent le contexte historique pour se contenter de regarder ce qui se déroule à l’instant même. En effet, les médias, et en particulier la télévision, ne laisse plus de place à l’expérience. Et chacun sait que connaître et comprendre l’Histoire permet de ne pas répéter les mêmes erreurs. Mais, au contraire d’une vision globale, nécessaire à l’étude du passé, le direct produit une multitude de détails souvent disproportionnés par rapport à leur contexte original. Et peu à peu, le direct annule toute distinction entre spectateur et journaliste, car tout deux reçoivent l’information en même temps. Ainsi, le public se charge du rôle du journaliste et tente de construire l’information à partir de la somme d’événements bruts dont il est inondé chaque jour. De cette manière, chacun d’entre-eux perd toute distance face aux événements. Sous cette profusion de détails, le public ne parvient plus à distinguer la globalité de la situation. Or, prendre du recul face aux événements, surtout lorsqu’il s’agit d’une guerre, est indispensable pour mieux en comprendre la complexité et entreprendre une réflexion correcte. De même, la distance permet d’atténuer l’émotion, sans cesse sollicitée, qui s’oppose elle aussi à une réflexion calme et rigoureuse. Les conséquences d’un tel traitement médiatique sont accablantes: les médias se bornent à transmettre et ne réfléchissent plus. En effet, en privilégiant le direct, les images à sensation et en étant sans cesse à l’affût du scoop, les médias délaissent le journalisme d’investigation sur lequel pourrait s’appuyer une réfléxion et une analyse plus profonde. L’esprit critique disparaît ainsi progressivement du paysage médiatique. Aujourd’hui, c’est à nous d’aller chercher la diversité de l’information: elle existe et n’est pas inaccessible. Nous n’avons plus le droit de nous contenter des informations consensuelles distillées par les médias dominants. Nous devons, au contraire, aller vers les sources plus indépendantes et alternatives, qui elles seules permettent de se forger une opinion complexifiée, donc mieux légitimée, sur tel ou tel événement. Il est en notre pouvoir et de notre responsabilité de ne pas nous soumettre passivement à la pensée dominante et à ses vérités prêtes-à-porter.
SAMIA SWALI
SOCIETE « Droit à la fête »…vraiment ??
Jeudi 1er novembre, une des premières soirées d’étudiants de l’année intitulée « Droit à la fête » et organisée par des étudiants de la Faculté de Droit de l’Université de Genève au « Bypass », boîte « branchée » de notre ville. Une foule est agglutinée devant l’entrée, tout le monde pousse et se demande s’il aura la chance de pouvoir entrer. On entend des « Putain, il s’est fait refoul’!» et autres « Le connard, il a pu entrer ! ». Nous sommes un groupe de quatre filles (blanches) et un garçon (blond blanc). L’une d’entre nous rejoint son copain (angolais) de l’autre côté de la masse de gens pour pouvoir entrer avec lui. Nous entrons (ouf !) et attendons le couple après avoir franchi le passage des videurs. Notre amie, arrivée devant les deux gorilles avec son copain, montre sa carte d’étudiante en Droit, elle peut entrer ; puis il montre la sienne (il est étudiant en HEC)
mais le videur refuse qu’il entre. « Pourquoi ? » demande-t-elle. « Parce qu’il n’est pas étudiant en Droit ». Parmi les autres de notre groupe (qui sommes entrés) :deux étudiantes en SES, un étudiant en Lettres et une étudiante à l’Ecole Hôtelière. Etonnant, donc, qu’il ne puisse pas entrer, non ? Après quelques minutes de discussion et de tentatives de persuasion diverses de notre part (petites blagues, décolleté tout d’un coup voyant, ton plus sévère…), elle redemande « pourquoi ? ». Et notre cher gorille répond « parce qu’il n’est pas étudian». Etonnant, aurait-il un trou ble de la mémoire courte? Bref, las de tout cela, certains d’entre nous décident de partir et nous appelons un taxi. Pendant que nous l’attendons, la masse qui était agglutinée est entrée au compte-goutte pour s’agglutiner en dansant et se réjouir d’être à l’intérieur.
SAMIA SWALI / MILENE HAURI
Parmi cette masse, un jeune homme blond a montré un passeport rouge à croix blanche pour entrer. Mais il reste quelques personnes dehors (à part nous qui attendons ce taxi apparemment pas pressé). Uniquement des Maghrebins et des Noirs. Mais revenons sur nos chers gorilles. L’un d’entre eux est noir. Etrange. En plus d’être raciste, c’est un « milky-way » : noir à l’extérieur et blanc à l’intérieur. Comment est-ce possible de vivre une telle situation, en 2007, à Genève, ville réputée internationale, à une soirée destinée à des étudiants qui avaient, reprenons le titre de la soirée, « droit à la fête » ? Parce que nous le savons tous, cela ne nous étonne pas du « Bypass » (hé oui, c’est devenu malheureusement ordinaire). Mais cela nous étonne tout de même d’une soirée d’étudiants s’intitulant « droit à la fête », répétons-le ! Quelle situation contradictoire ! « Etonnant » est en fin de compte un mot trop léger, nous devrions plutôt dire que c’est choquant , irrespecuteux , illégal, anticonstutitionnel et raciste ! Mais pourquoi ? Est-ce que cela « salit » l’image de la discothèque que des Noirs y dansent ? Les moutons noirs feraient-ils peur aux jeunes brebis blanches ? On dirait, puisqu’on les utilise pour être videur à l’entrée. Cette mentalité est donc encore bien ancrée à Genève, en 2007 et même à une soirée de Droit… Le pire c’est que tout le monde joue le jeu. On craint de ne pas entrer parce qu’on sait que tout le monde n’entre pas, on fait tout pour entrer et pour que ses amis entrent (on va jusqu’à montrer son décolleté au videur alors qu’avec du recul, on trouve cela d’une bêtise affreuse et soumise). Certains Noirs et Maghrébins retourneront au « Bypass » alors qu’ils savent pertinemment qu’ils se feront probablement voire sûrement « refoul’ ». Combien d’autres personnes ont vécu la même situation que notre ami angolais ? Pourquoi n’avons-nous jamais vu ces scandales dans la presse? Cache-t-on cela ou estce que personne n’agit ? Pourquoi est-ce que cela ne choque pas lorsqu’on raconte que cela s’est passé au « Bypass » ? Pourquoi est-ce si banal ? Rien qu’une situation de ce genre mérite d’être dénoncée à la LICRA (Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme) et même une plainte à la Police. Arrêtons de jouer à ce jeu ridicule, battonsnous pour pouvoir faire la fête sans crainte de ne pouvoir entrer, sans crainte d’être humilié, sans crainte d’être frustré de ne pas être considéré comme les autres! Battons-nous pour détruire cette mentalité à laquelle nous participons sans forcément nous en rendre toujours compte.
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POLITIQUE Salvador Allende : les rêves brisés du Chili « L’autre » 11 septembre Santiago du Chili, 11 septembre 1973: le palais présidentiel « La Moneda » est bombardé par l’aviation nationale. Entre ses murs ne reste plus qu’une poignée d’hommes restés fidèles au toujours président, Salvador Allende. Après quelques heures, ce dernier demande à la garde présidentielle et à ses proches de quitter le bâtiment, leur promettant qu’il les suivra aussitôt. C’est alors qu’Allende se donne la mort, préférant le souffle mortel de la bouche de son fusil plutôt qu’une défaite déshonorante. Avec lui s’éteignent toutes les espérances qu’avaient déposées les classes populaires sur sa personne. Ce 11 septembrelà, c’est le peuple chilien et la démocratie qui sont mis en échec. La junte militaire, appuyée par la CIA, aura eu raison du gouvernement élu au suffrage universel et de son programme social-démocrate. ¡Allende, Allende, el pueblo te defiende! Mais pour mieux comprendre le phénomène Allende, nous nous devons d’effectuer un petit retour en arrière. Le 4 novembre 1970, les élections présidentielles voient le triomphe de cet homme issu de la coalition de gauche « Unidad Popular ». La droite désunie ne pouvant freiner l’immense euphorie que provoque ce représentant du socialisme modéré dans les classes populaires, toute une série de réformes sont engagées. De nombreux terrains peu productifs aux mains des latifundistes sont redistribués aux paysans sans terres. Les industries comme l’acier, le cuivre (principale exportation du Chili) et le charbon sont nationalisées sans indemnisations. Les salaires des classes travailleuses augmentent de 40 à 60%, un nouvel impôt sur les bénéfices est instauré et les systèmes de santé et d’éducation sont réformés. Castro visite même le Chili en 1971, au comble de l’exaspération des classes moyennes et supérieures qui craignent que ne s’implante dans le pays une dictature sur le modèle cubain. Même s’il est évident que le « líder máximo » et le président partagent de nombreuses opinions, ils restent malgré tout irrémédiablement divisés sur les moyens d’accéder à la société idéale. Allende, fondamentalement démocrate, répugne à l’idée d’user d’une violence quelconque pour assurer ses volontés politiques. A la question de savoir si le socialisme peut être atteint sans passer par la dictature du prolétariat, il répond par l’affirmative: « C’est à cela que nous travaillons. L’avenir nous dira si nous avons tort ou raison ».
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Mais la classe bourgeoise n’entend pas continuer à regarder depuis le balcon ou à la télévision le prolétariat manifester son enthousiasme. Exaspérés par la limitation croissante de leurs anciens privilèges et par l’inflation (la hausse des salaires des travailleurs et la stagnation de la production fait monter les prix), les « momios » (ainsi que les appelaient les partisans du président) décident de « prendre » les rues. Multipliant les manifestations, appuyant des grèves stratégiques en les finançant ou en faisant parvenir des vivres aux grévistes, et allant jusqu’à agresser des travailleurs (plusieurs attentats sont commis), la classe aisée tente de déstabiliser au maximum le gouvernement. De plus, les pouvoirs économique et médiatique restent aux mains des élites. De véritables campagnes de discréditation sont organisées. L’Etat américain est bien évidemment l’un des alliés les plus fidèles en vue de la disparition du gouvernement progressiste, finançant d’abord les opposants politiques d’Allende lors des élections présidentielles, puis les dissidents du gouvernement. De plus, les Etats-Unis de Nixon ont, en 1970 déjà, une participation active dans l’assassinat du Commandant en chef des armées, René Schneider, puisque des armes et des munitions ont été passées par valise diplomatique. L’élimination du général est un acte purement stratégique dans la longue partie d’échecs qui se joue à distance entre les Etats-Unis et le gouvernement chilien: Schneider était le principal soutien d’Allende dans l’armée, alors que trois autres généraux chiliens avaient présenté leur aval aux EtatsUnis pour un putsch militaire. Les tensions vont atteindre leur paroxysme avec la grève des camioneurs d’octobre 1972, qui va paralyser l’ensemble du Chili. Le pays, déjà fortement affaibli, est plongé dans l’immobilité la plus complète par cette grève patronale. 70 000 camions et des milliers d’autobus cessent de rouler, les petits commerces et les professions libérales arrêtent le travail. On ne trouve plus d’essence, plus de matières premières, presque plus de nourriture. En grande partie financée par la CIA, la grève ne trouve pas d’appui dans les classes laborieuses. C’est la guerre des nerfs. Les ennemis d’Allende sont sur le point de gagner la bataille. Mais aucune usine ne suit la grève, les trains roulent, les ports restent ouverts et les services publics continuent à travailler. Le gouvernement de Nixon et son Secrétaire d’Etat Henry Kissinger n’ont de cesse d’alimenter un climat d’hostilité dans la perspective de « faire mûrir la poire
chilienne ». Entre le marteau et l’enclume, entre le peuple chilien et la puissance économique américaine, la marge de manoeuvre d’Allende se réduit irrémédiablement. C’est dans cette situation d’extrême tension qu’un premier coup d’Etat éclate en juin 1973. Mais il n’est opéré que par une infime partie de l’armée et rapidement mis en échec par le général Prats, qui rappelle aux militaires leur devoir d’allégeance à l’Etat et la tradition démocratique du pays. Cependant, ce soulèvement militaire servira d’essai avant la grande « représentation ». Le général est contraint de démissionner un peu plus tard et se voit remplacé à la tête de l’armée chilienne par un certain Pinochet... De la doctrine Monroe à Augusto César Pinochet L’avènement de la dictature au Chili et les sombres années de tortures, de déportations et d’exil ont contribué à occulter les années qui ont précédé. Une sorte de fatalisme semble s’être emparé de beaucoup de gens, l’implacabilité de la doctrine Monroe et de la « Manifest Destiny » (cf. encadré) anéantissant les rêves d’indépendance du sous-continent. L’expérience chilienne aura démontré qu’une démocratie latino-américaine, si légitime soit-elle, ne peut s’opposer à l’impérialisme américain. Au nom de ses exigences propres, l’on ne peut se défaire de la tutelle du « Colosse du Nord ». Car la politique externe des USA se définit par la protection des investisseurs américains à l’étranger, et même souvent par leur financement. Cette toute puissante « raison d’Etat » implique que le fascisme est préférable à la perte des capitaux investis, à la nationalisation, à l’expulsion des multinationales américaines... La lutte contre la nationalisation des matières premières est un enjeu géostratégique de taille pour les américains. C’est pour cette raison que ces derniers ont toujours vu d’un très mauvais oeil tous les régimes progressistes. Il était primordial pour les Etats-Unis de garder la mainmise sur toute l’Amérique latine; tout élément pouvant contribuer à une modification de la corrélation des forces en pleine Guerre froide méritait l’entière attention des différents gouvernements qui se sont succédés à la Maison-Blanche. Et même si l’interventionnisme militaire, la politique du « Big Stick », a été réservée à « l’arrière-cour » des USA, l’Amérique du Sud n’a pas été épargnée par les ingérences. Mais la politique internationale semble axée sur une étonnante contradiction, qui ne semble pas gêner grandement
ADRIA BUDRY CARBO
POLITIQUE les autorités: d’un côté, comme le dira Truman en 1947, « la sécurité des Etats-Unis est en jeu partout où le communisme menace de s’imposer à des pays libres », et, de l’autre, les intérêts économiques poussent les voisins du Nord à renverser des régimes démocratiques de pays libres. A moins que, ainsi que le prétendait Margareth Thatcher pendant la détention de Pinochet, ce ne soit ce dernier qui ait véritablement amené la démocratie au Chili. La doctrine Monroe et son Corollaire Roosevelt permet de justifier les vélléités interventionnistes au nom de la défense des intérêts états-uniens. La « Manifest Destiny » est la destinée des USA, octroyée par la Providence, de s’étendre et de conquérir l’ensemble du continent affirmant ainsi la supériorité de la race anglo-saxonne. Ces idéologies jouent un rôle fondamental dans la politique extérieure.
HOLLYWOOD GROSSES BOBINES quand le cinéma devient de l’intox
Ce film m’en a mis plein la vue ! J’en ai eu pour mon argent ! Voilà comment certains cinéastes font aujourd’hui du chiffre. Action, conflit, violence, émotion, réalisme, voici les composantes d’un succès cinématographique. Le cinéma est classé aux Etats-Unis dans le secteur industriel, et non dans le secteur artistique. L’art en tant que tel n’est pas une notion évidente, et l’Etat n’est pas très lié à la culture. Pourtant beaucoup de films ont besoin de l’appui du gouvernement. Particulièrement les films de guerre, qui sont des productions colossales faisant appel à de nombreux figurants, ainsi qu’à un arsenal de matériel de guerre… A moins d’avoir des ressources financières extraordinaires, le cinéaste se voit obligé de faire appel au pentagone, pour emprunter hélicoptères, tanks, avions, qui contribuent au réalisme du film. Le Pentagone peut –ou non – se montrer coopératif. La coopération entre l’armée et Hollywood n’est pas récente Chacun y trouve son intérêt : Hollywood a besoin de matériel militaire, et l’armée aussi y trouve son compte. Avant d’obtenir le soutien de l’armée, il faut lui soumettre le scénario, qui sera examiné à la loupe et rejeté s’il dénigre l’armée. Il s’agit pour l’armée de susciter des vocations parmi les enfants en montrant que les soldats sont toujours des types biens. Le Pentagone veut aussi montrer au public et au législateur qu’elle fait du bon boulot. Du côté des cinéastes, il faut ruser
CLAIRE MONARI
pour faire accepter son scénario, enlever les pages pouvant poser problème. Dans tous les cas, l’obtention de l’aide de l’armée ne se fait pas sans négociation. S’agit-il d’une censure ? Dans la mesure où le cinéaste n’est pas obligé d’avoir l’approbation de l’armée pour faire son film, ce n’est pas une censure. Néanmoins il est difficile de faire un film de guerre sans matériel de l’armée. Là où cela devient grave, c’est que dès qu’il écrit la première ligne de son scénario, le cinéaste s’autocensure. Rares sont ceux qui ont vécu la réalité des combats, c’est pourquoi le cinéma reste le seul moyen par lequel on peut se représenter la guerre, surtout à travers les films américains. Les Etats-Unis sont le seul pays où il existe un bureau qui coordonne les relations entre Hollywood et le Pentagone. Hollywood n’a jamais cessé de représenter la guerre, sous toutes ses formes, à toutes les époques. Parmis les films qui ont été soumis à l’examen du Pentagone on a : Full metal jackets, qui a été refusé car dans ce film on a des marins qui tuent d’autres marins. Mais également Thirteen days, refusé car il dénigrait l’armée pour mieux faire briller Kennedy, Rois du désert, refusé car des soldats volent de l’or à des irakiens. Par contre l’armée accorde son entière coopération à la réalisation de films comme Pearl Harbor, ou Top Gun, dans lesquels elle apparaît comme héroïque. L’inconvénient de ce genre de films, c’est qu’ils font croire au peuple américain qu’il est en sécurité absolue, et qu’il rend donc des épisodes de défaite comme Pearl Harbor, ou le Vietnam profondément traumatisantes. Après l’épisode du Vietnam, Hollywood n’a plus produit de films de guerre, mais renoue peu après avec le Pentagone pour donner une image technologique de l’armée. On voit des guerres propres, des images vues d’avion, des appareils de pointe. Pas de sang, ni de boue. L’armée américaine réplique plus puissante que jamais. Cela annonçait déjà l’ère du terrorisme. Il y a une dizaine d’années on savait que les prochains conflits opposeraient des groupes armés dissidents aux Etats-Unis. Le dernier film en date qui met en scène le terrorisme s’intitule The Kingdom. Encore un exemple parfait de coopération Hollywood Pentagone : 4 enquêteurs du FBI ont une semaine pour enquêter sur un attentat anti-américain qui vient de se produire en Arabie Saoudite. Course contre la montre, action, le tout filmé en « caméra à l’épaule », de quoi satisfaire les amateurs de films d’action à gros budget hollywoodiens. Jamie Foxx, Jenifer Garner, Jason Bateman, Chris Cooper, débordant d’humour en toutes
circonstances, luttent pour la paix, -avec fusils mitrailleurs entre les mains-. Le réalisateur Peter Berg tente de montrer dans son film que la collaboration entre Saoudiens et Américains est possible. Ils peuvent lutter avec les autorités locales contre ceux qui viennent troubler leur règne dans les puisements d’or noir. Cependant Peter Berg ne s’interroge pas sur la réalité des relations Saoudo-Américaines. Quels sont les réels termes de leurs échanges ? Derrière la caméra de Peter Berg, on s’imagine que ces deux pays entretiennent des relations d’égal à égal (comme peuvent l’être des échanges « pétrole contre sécurité »…..). Ce film ne montre pas l’Etat de dépendance réelle de l’Arabie Saoudite, et occulte ainsi tout une partie des enjeux de leurs relations. Le terrorisme y apparaît sans aucune dimension politique ni religieuse. On tait toute revendication d’idéaux (toute une séquence du film en arabe n’est malheureusement pas sous-titrée). Un véritable festival des clichés : les flics américains irréprochables, leur gentil collaborateur saoudien, ainsi que les méchants terroristes. Peter Berg affirme dans son interview qu’il voulait que ce film ne soit perçu que comme un film d’action, inspiré de « real facts » ! Il s’agirait d’un divertissement honnête. Presque un documentaire. The Kingdom, « it’s just entertainment » ! Dans le film, on ne prononce pas une seule fois par exemple le mot « pétrole ». De qui se moque-t-on ? Tout ce qu’on retient ici, c’est que les agents du FBI sont des « types bien » et qu’ils sont efficaces. Le conflit réel au fond le cinéaste s’en contrefiche, tant que le spectateur en a pour son argent. A travers cette forme ludique, The Kingdom n’en est que plus manipulateur. Quand le média le plus puissant s’associe à l’armée la plus puissante du monde, cela donne des ventes. C’est dommage pour un pays fier du premier amendement de sa constitution qui garantit la liberté d’expression, et qui s’en vante. Il est dangereux de faire croire au peuple qu’on va faire la guerre pour des motifs faux. Le peuple américain n’est pas dupe. Et si cette armée si forte laissait parler les opinions divergentes, au lieu d’exercer cette pression, elle ne serait que renforcée.
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POLITIQUE
Loi sur l’université Des tracts distribués aux abords des facultés jusqu’aux réunions dans les auditoires, les étudiants ont eu peu de chance de ne pas entendre parler du projet de loi sur l’université. Ce projet de loi est issu du rapport d’une commission présidée par Ruth Dreifuss visant à répondre aux « problèmes actuels de l’université », mis en exergue lors de la crise de l’université de 2006. Dénoncée par la CUAE, syndicat étudiant de l’Unige, et le Collectif pour la Démocratisation des Etudes, cette loi vise à une plus grande autonomie de l’université, autonomie où les prérogatives du rectorat sont renforcées et le contrôle du pouvoir politique diminué. Ce que déplore le syndicat étudiant ainsi que le collectif, voyant dans cette loi une « concentration du pouvoir décisionnel [...] dans les mains d’une oligarchie académico-managériale ». En réponse à ce projet de loi, la CUAE a déposé une initiative de « démocratisation des études » qui contient la gratuité des études et une meilleur représentation des différents corps au sein d’un organe décisionnel(1). Ancienne loi, nouvelle loi, quels changements ? Tout d’abord, avant d’aborder les changements institutionnels et politiques de cette loi, il est à noter que celle-ci, remplaçant l’ancienne, n’incluait plus le plafonnement des taxes. En effet l’article 63 de la loi de 1973 stipule que les taxes ne peuvent être supérieures à 500 francs par semestre. Au sein de la nouvelle loi, le montant des taxes était laissé à la discrétion de l’université sur proposition du rectorat. Suite aux nombreuses protestations et la crainte de voir le coût des études augmenter de manière exponentielle, de part l’absence d’un contrôle populaire, le montant des taxes sera fixé par une « loi spéciale ». Ainsi, au sein de la nouvelle loi sur l’université, le rectorat pourrait désormais adopter le budget, prérogative à la charge du conseil de l’université (assemblée de l’université dans le projet) dans la loi actuelle. Il en est de même pour les statuts, bien que ce serait l’assemblée de l’université qui les approuverait dans un dernier temps, et la nomination des professeurs à la charge du Conseil d’Etat actuellement. Le transfert de pouvoir se fait aussi bien au sein des facultés où le conseil de faculté (conseil participatif) et le collège des professeurs (supprimé dans la nouvelle loi) perdent leurs prérogatives de nomination du doyen et de formulation des règlements au profit respectivement du rectorat et du
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décanat. On peut donc observer dans ces changements principaux du fonctionnement de l’université un transfert du pouvoir, d’entités où sont représentés les quatre corps universitaires vers des entités fermées aux nombres de personne restreints(2). Pour comprendre cette évolution, il est nécessaire de replacer ce projet de loi dans son contexte. En effet, la commission chargée de son élaboration, avait été formée comme une réponse du pouvoir politique à la crise de 2006 où des notes de frais privées avaient été mis sur le compte de l’université et dont le rectorat n’avait pris garde. Notons que les conclusions de l’enquête ont blanchi le rectorat. Dès lors, cette affaire a mis en lumière le problème de la gouvernance actuelle de l’université mais ce type de réforme n’est en rien propre à l’institution, il dépasse le cadre de celle-ci pour s’inscrire dans un champ plus large qu’est la nouvelle gestion des administrations et des organes étatiques. La nouvelle gestion publique (NGP)(3) Suite aux critiques de l’administration traditionnelle, notamment de la part des adeptes de la théorie néolibérale du choix public, de nouvelles méthodes d’administration et de gestion des services de l’Etat ont été proposées. La NGP est issue de cet ensemble de proposition. De cet ensemble, on peut extraire quelques principes : Introduction de la concurrence, les services doivent être en compétition et « la clientèle » (les usagers) doit privilégier le plus performant, principe de quasi-marché. Critères d’évaluation basés essentiellement sur le rendement et la performance, dépassement du cadre légal par les fonctionnaires en lieu et place du cadre des objectifs chiffrés. Responsabilisation accrue des hauts fonctionnaires pour la réalisation du critère précédent, Partenariat privé-public dans l’objectif d’une meilleure efficience de l’action publique. Ces quelques principes de la NGP sont bien intéressants mais quels rapports avec la loi sur l’université ? Ils démontrent l’évolution de la gestion des services publics dont l’enseignement supérieur qui se doit de satisfaire, par des changements progressifs, à ces critères. En effet, le renforcement des structures exécutives de l’université (rectorat, décanats) va de pair avec la responsabilisation des hauts fonctionnaires, de même la réforme de Bologne vise à produire un socle commun (les crédits ECTS) permettant de faciliter la mobilité des étudiants et ainsi de développer la concurrence entre uni-
versité sur un type de prestation. De plus, le mandat octroyé à la commission chargé de la formulation de l’avant-projet de loi précise bien qu’elle doit travailler sur « l’intégration des sources extérieures de financement » ce qui ne signifie autre chose que l’appel au financement privé. Dès lors, que l’on ait un avis favorable ou défavorable à l’encontre de cette méthode de gouvernance, il est nécessaire d’en décrypter les conséquences sur le fonctionnement de l’université. Il est visible que la réforme de Bologne a facilité la mobilité et permis aux étudiants une possibilité d’accès plus large aux différentes formations et spécificités mais quelles en sont les conséquences de cette nouvelle gouvernance quant aux statuts du personnel enseignant et technique ? comment peut-on évaluer la performance d’une formation d’études supérieures autrement que par des critères fortement contestés telle que l’intégration professionnelle ? De plus il est légitime de s’interroger sur les conséquences d’un financement privé, car il ne peut se faire sans contrepartie, et notamment sur la rentabilité financière de filières telles que les Lettres et les Sciences Sociales. Loin d’avoir la prétention d’analyser l’ensemble des conséquences probables à cette nouvelle gestion de l’université, ces quelques interrogations tendent à ouvrir un débat sur le modèle d’université souhaité par ceux qui en sont les acteurs. Elargissement Autonomie, un de ces mots dont les sens sont nombreux et parfois contradictoires. Ainsi lorsque le mandat de la commission affirme que les travaux doivent porter vers une autonomie de l’université(4), les possibilités d’interprétation peuvent être multiples. Lors des événements de Mai 68, l’une des revendications des étudiants portaient sur l’autonomie de l’université, une autonomie synonyme d’autogestion où ce serait les acteurs qui en seraient les gérants et non un ministère ou un manager éloigné de la réalité estudiantine, revendication totalement absurde ? Cependant, les membres de la commission ont bien compris le sens d’autonomie que les politiques souhaitent lui donner car c’est un sens courant, à la mode que de gérer les services de l’Etat de la sorte. En France, la loi LRU (libertés et responsabilités des universités) n’est que la copie du projet de loi débattu à Genève, en effet, le pouvoir est concentré au sein d’un président qui s’entoure d’une équipe dirigeante, les universités prennent la pleine possession de leurs biens immobiliers et mobiliers tout comme dans ce projet de loi : un des objectifs est « le transfert de la propriété des actifs mobiliers et immobiliers »(5). De
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TECHNIQUE même les évolutions quant aux statuts du personnel sont de même ordre. L’un des points commun entre la France et la Suisse, est le faible degré de privatisation des services étatiques par rapport aux pays anglo-saxons, les causes en sont multiples et diverses mais on remarque que dans les pays anglo-saxons, l’évolution vers des universités privatisées s’est faite progressivement par des modifications de statuts et de propriété des actifs, dès lors peut-on craindre une année d’études à 60 000$ dans quelques années ou est-ce inconcevable ? L’internement des japonais aux Etats-Unis pendant la Seconde Guerre mondiale 1. h t t p : // w w w. d e n s h o . o r g / l e a r n i n g /s p i c e / lesson3/3reading3.asp 2. L’ordre exécutif 9066, http://bss.sfsu.edu/internment/ exectiorder9066.html, consulté le 18 décembre 2007 3. La notice d’internement, http://www.statesmanjournal.com/assets/pdf/J075201532.PDF, consulté le 18 décembre 2007 4. Statistiques sur les camps de concentration, http:// www.geocities.com/Athens/8420/camps.html, consulté le 18 décembre 2007 5. Décision Ex Parte Endo, http://caselaw.lp.findlaw. com/getcase.pl?navby=CASE&court=US&vol323&pag e=283, consulté le 10 décembre 2007 6. Civil Liberties Act, http://www.civics-online.org/library/formatted/texts/civilact1988.html, consulté le 18 décembre 7. Lettre d’excuse du Président Bush, http://www.statesmanjournal.com/assets/pdf/J075213531.PDF, consulté le 18 décembre 2007 http://wwwdensho.org/ http://wwwstatesmanjournal.com/japanese_internment/ intro.html http://www.internmentarchives.com « The Cuban Five », quand un procès en cache un autre 1. Tract de la conférence du 8 novembre 2007, Cinq Cubains prisonniers politiques aux Etats-Unis 2. Ibidem 3. Conférence du 3 novembre 2007 sur le thème « Cinq Cubains prisonniers politiques aux Etats-Unis », animée par M. Salim Lamrani, écrivain, enseignant et journaliste français, spécialisé dans la question des relations cubano-américaines. Il a écrit plusieurs ouvrages à ce sujet et publie également des articles, notamment sur le Réseau Voltaire (http://www.voltairenet.org/fr). Cette conférence s’est déroulée à la Maison des Associations (15 rue des Savoises, 1202 Genève. http://lafea.org/) où différents projets et activités sociopolitiques sont régulièrement organisés. 4. Lamrani, Salim. Cuba face à l’empire, Genève: EditionsTimeli, 2006, p.212. 5. Op. cit, p.59 6. Brève d’Amnesty International, http://www.amnesty.org/fr/alfresco_asset/50c28053-a3be-11dc-9d08f145a8145d2b/amr250082003fr.html, datée d’avril 2003, consulté le 8 décembre 2007 7. Rapport 2007 d’Amnesty International, http://www. thereport.amnesty.org/fra/Regions/Americas/Cuba, consulté le 16 décembre 2007. 8. Tract de la conférence, op.cit. 9. Rapport 2007 d’Amnesty International, op.cit. 10. Tract de la conférence, op.cit.
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Népal: Après la monarchie, une démocratie? THAPA, Manjushree. Nepal: peace is more than an election. 29 novembre 2007, http://www.opendemocracy.net/article/globalisation/nepapeaceelections, p.1,1. 28-29, consuté le 3 décembre 2007 THAPA, Manjushree. Nepal: peace is more than an election. 29 novembre 2007, http://www.opendemocracy.net/article/globalisation/nepapeaceelections, p.2,1. 11-12, consulté le 3 décembre 2007 JHA, Prashant. Chez les habitants des plaines, la révolte gronde. Le Courrier International, tiré du Nepali Times, 6 décembre 2007, n°892, p.25, 1. 14-18 JHA, Prashant. Chez les habitants des plaines, la révolte gronde. Le Courrier International, tiré du Nepali Times, 6 décembre 2007, n°892, p.25 SDC Office, Kathmandu, Népal. From the peace accord to the preparation of constituent assembly elections. SDC Nepal Annual Program 2008 . Novembre 2007. JHA, Prashant. Chez les habitants des plaines, la révolte gronde. Le Courrier International, tiré du Nepali Times. 6 Décembre 2007, n° 892, p. 25. NGUDUP, Tshewang. Correspondance par courrier électronique avec l’auteur. Kathmandu, 4 Décembre 2007. THAPA, Manjushree. Nepal: peace is more than an election. 29 Novembre 2007 « http://www.opendemocracy.net/article/globalisation/nepalpeaceelections », consulté le 3 décembre 2007 Les blessures secrètes du Laos Stateman’s Yearbook 2007 Guide Lonely Planet Laos, Les Presses-Solar-Belfond, Paris, 2005 Jean Deuve. La Guerre secrète au Laos contre les communistes (1955-1964), L’Harmattan, Paris, 1995 Chirstopher Robbins. Les Freux, Reader’s Digest, 1991 Rapport de l’ONU sur les UXO au Laos : http://www. un.org/unifeed/script.asp?scriptId=990 Intervention de M. Vaughn Vang devant le groupe de travail sur les populations autochtones de l’ONU : www. laohumrights.org Rapport d’Amnesty International sur les réfugiés laos en Thaïlande : http://www.amnesty.org/fr/news-and-updates/feature-stories/thai-authorities-endanger-asylumseekers-safety-20070620 Interview de M. Brad Adams, directeur de la section Asie de Human Rights Watch : http://hrw.org/english/ docs/2007/08/30/thaila16778.htm Les enfants « vidomégons » Portail de pauvreté rurale, http://www.ruralpovertyportal.org/french/regions/africa/ben/index.htm Uzodinma, Iweala. Cessez de vouloir «sauver» l’Afrique ! , Le Monde, 29.07.07 Travail de maturité de Caroline Heiniger, Gymnase de Nyon, octobre 2007 ht t p://w w w.es clavagemo d e r ne.org /a c t u mond e. php?id=25 h t t p: // w w w.u n i c ef.o r g / f r e n c h / i n fo byc o u n t r y/ nigeria_34868.html http://www.unicef.org/french/infobycountry/benin.html
Nord-Est de l’Inde; le combat des minorités pour la défense de leur identité Jaffrelot, Christophe. L’Inde Contemporaine, De 1950 à nos jours, Editions Fayard et Centre d’études et de recherches internationales, 2006 Assayag, Jackie. La Mondialisation vue d’ailleurs, l’Inde désorientée Paris : Editions du Seuil, 2005 Kumar, R. Insurgency in North-East India, New Delhi: Omsons Publications, 1997 ONU, « Rapport du rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones » M.Rodolfo Stavenhagen, 2005 http://www.amnesty.org/ Journal en ligne indien, http://www.indiatogether.org/ Esprit critique et médias: inconciliables en temps de guerre? Wolton, Dominique. War Game, l’information et la guerre. Paris: Flammarion, 1991 Colon, Michel. Attention médias!, les médiamensonges du Golfe: Manuel anti-manipulation. Bruxelles: EPO, 1992 Reporters Sans Frontières. La guerre en Irak, le livre noir. Paris: La découverte, 2004 Borjesson, Kristina. Black List:quinze grands journalistes américains brisent la loi du silence. Paris: Les Arènes, 2002 www.presserat.ch Hollywood grosses bobines, ou quand le cinéma devient de l’intox DVD: Emilio Pacull et John Huston. Hollywood pentagone, cinéma et propagande militaire : les liens secrets,éditions Montparnasse, 2007 Loi sur l’université 1. Le détail de l’initiative sur le site de la CUAE: www. asso-etud.unige.ch/cuae/ 2. Pour plus d’information sur la loi: www.loisurluni. com un organigramme est disponible pour mieux comprendre les évolutions de statut. 3. Pour approfondir: Osborne, David et Gaebler, Ted. Reinventing Government: Howw the Entrepreneurial Spirit Is Transforming the Public Sector. Plume Books, 1993 4. Site du Département de l’Instruction Publique: http://www.ge.ch/dip/GestionContenu/detail. asp?mod=actualite.html&id=389, consulté le 20 décembre 2007 5. Ibidem Salvador Allende: les rêves brisés du Chili Artaud, Denise. Les Etats-Unis et leur arrière-cour, Hachette, 1995 Supplément du Monde Diplomatique: Amérique latine rebelle, décembre-janvier 2006-2007 Films: La Batalla de Chile : parte 1,2 y 3 (1975, 1978 et 1979) et Salvador Allende (2004) de Patricio Gúzman
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Horoscope
Jeu des 7 différences
Bélier : Vous rencontrerez l’homme ou la femme de votre vie. Ou pas. Taureau : Période plutôt corrida. Dans les arènes, méfiez-vous des tarlouses avec des capes. Gémeaux : Ce n’est ni un coup de cœur ni un coup de foudre, mais bien un coup de poing dans la gueule qui vous attend. Cancer : Evitez tout contact avec de l’uranium ou de l’amiante. Pensez bien à porter votre écharpe et à boire votre jus d’orange chaque matin. Lion : Mardi prochain, une rencontre surprenante risque d’avoir un rôle extrêmement important dans votre vie future. Observez particulièrement bien tout estonien de deux mètres soixante, aux yeux bleus, qui joue de la cornemuse et qui a subi une vasectomie à l’âge de 5ans. Balance : Période calme et paisible. Rien d’anormal en vue mise à part une possible amputation de la verge suite à un cancer de la rate. Vierge : Plus pour longtemps. Scorpion : Signe placé sous l’influence de Vénus et de Mars. Lucide, une perception claire de la réalité envahira enfin votre esprit. Frustration, déception et colère en vue. Sagittaire : Bertrand et François vont promener leur chien sur la plage tous les mardi, suivez leur exemple. Capricorne : Sérieux troubles gastriques en vue, évitez les choux de bruxelles. Verseau : Le 28, entre 5h14 et 5h15, une chose exceptionnelle vous arrivera! Petit veinard ! Poisson : L’attraction magnétique de Jupiter vous protège des attaques terroristes, des bombes nucléaires, des explosions de fusées, des martiens et des nains moches et roux. AU CAS OU…vous souhaitez exercer une quelconque influence sur les horoscopes du prochain numéro. Faites un versement de 3’000CHF sur le compte : CP 09-438478-9 et indiquez votre signe. Vos problèmes seront sûrement résolus rapidement.
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Dossier « Les oubliés médiatiques » : Un autre type de scandale - Alors que la déchirure entre Flamands et Wallons a fait la une des journaux sur la scène internationale. Qui parle du conflit qui oppose le haut et le bas Valais ?!?! Effectivement, le canton est dans une situation de quasi guerre civile. Mélanie, habitante de la partie francophone témoigne : « Ya néant ! Ça c’est des gorilles ! Mais que va-t-on faire ? ». Hanz, un autochtone qui vit de l’autre côté
du rideau de paille lui répond par un énergique « Kopfeschtuzenomaul ! ». Affaire à suivre. - Le bretzel coincé dans la gorge du président Bush a défrayé les chroniques des journaux durant des semaines. Mais qui a parlé du morceau de schublig retrouvé dans la narine de madame Brunschwig Graf ?!
Evénements de l’AESPRI
Vendredi 22 février
« K »arnaval à la Datcha de 21h à 4h du matin
Vendredi 7 mars
Ambiance orientale à la Datcha de 21h à 4h du matin
Narguilés à disposition
Quelques surprises vous attendent…
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