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Quelles sont les réformes proposées ?
Les politiques conçues pour réformer les transports publics di èrent évidemment d’une ville à l’autre, selon les circonstances locales et les considérations politiques, mais on retrouve certaines grandes politiques communes, encouragées par les institutions de prêt.
NOUVELLES INSTITUTIONS DE TRANSPORT
Dans de nombreuses villes, la planification et la réglementation du transport de passagers se répartissent entre de multiples autorités et agences – comme les administrations locales, municipales et régionales, les di érents ministères nationaux (routes, transports, administrations locales), les mairies et les services de la présidence, les autorités chargées de délivrer les autorisations et les services de maintien de l’ordre.
De toute évidence, il s’impose de réformer et de coordonner la politique en matière de transports urbains de passagers en vue d’un service public intégré, e icace et durable.
Dans la plupart des cas, les prêteurs comme la Banque mondiale exigent la création d’une agence municipale unique chargée des transports urbains de passagers avant d’accepter de financer des programmes de développement.
Cette situation peut cependant engendrer de nouveaux problèmes, notamment l’absence de contrôle démocratique et des rivalités entre les agences nouvellement créées et les organismes élus.
Si les syndicats peuvent bénéficier d’accords de reconnaissance et de négociation avec le gouvernement, il n’y a aucune garantie qu’ils soient étendus aux nouvelles agences.
Les nouvelles institutions font également preuve, par nature, d’une propension à favoriser les politiques néolibérales, en élargissant le rôle du secteur privé. Pour répondre à la nécessité d’intégrer les politiques… il faut créer des institutions qui minimisent les conflits de compétence et les obstacles fonctionnels à l’intégration stratégique et permettent d’élargir le rôle du secteur privé dans une stratégie intégrée. »
Banque mondiale. 2002. Villes en mouvement : La stratégie de transport urbain de la Banque mondiale
RENOUVELLEMENT DES FLOTTES
Dans la plupart des villes des pays du Sud, les transports urbains de passagers se caractérisent essentiellement par de vastes flottes de véhicules vieillissants, énergivores et polluants, pour la plupart des véhicules de seconde main importés depuis des pays riches. Les villes sont exposées à des pressions en vue de les remplacer par des véhicules modernes et plus économes en carburant. La Banque mondiale a irme qu’au Caire, en Égypte, par exemple, le programme de renouvellement du parc de taxis municipaux vieillissant s’est traduit par des économies à hauteur de 317 515 tonnes de gaz à e et de serre entre 2012 et 2018. Mais nul ne conteste que, pour exercer un impact majeur dans de nombreuses villes :
La communauté mondiale doit soutenir l’application de normes d’émission raisonnables et la réduction des ventes aux pays en développement de véhicules usagés obsolètes, polluants et dangereux en provenance de pays développés. »
Banque mondiale. Journée mondiale de la Terre : y aura-t-il un avant et un après Covid-19 pour la pollution due aux transports ? 22 avril 2020.
Les gouvernements sont encouragés à remplacer les flottes de transport public par des véhicules électriques (e-mobilité).
Fondamentalement, la mobilité électrique marque une transition radicale. C’est une bonne chose. La part des transports dans les émissions mondiales continue d’augmenter ; en laissant les choses suivre leur cours, nous ne pourrons atteindre les résultats nécessaires pour répondre aux objectifs de l’Accord de Paris. »
Union Internationale des Transports Publics (UITP)/Banque mondiale. Electric Mobility & Development, décembre 2018
Paiement des titres de transport sans espèces à Nairobi Selon l’UITP et la Banque mondiale, l’introduction des véhicules électriques s’accompagne également de nouvelles possibilités de réforme globale des transports publics. Elle appelle les gouvernements à garantir « la place centrale des transports publics » dans la transition stratégique vers l’électrique et à « s’impliquer largement et de manière proactive et continue avec les di érentes parties prenantes ».
Peu de gens contesteront la nécessité de véhicules plus propres et plus e icaces, mais l’investissement de capitaux requis pour ce genre de renouvellement de flotte est hors de portée de la plupart des petits propriétaires – en particulier les propriétaires-conducteurs – du transport informel de passagers. En fait, des études ont montré qu’ils ont à peine de quoi entretenir ou renouveler leurs vieux véhicules d’occasion et encore moins de quoi acheter des véhicules neufs et coûteux.
Les niveaux élevés d’investissement requis dans les programmes non subventionnés de réforme des transports favorisent des acteurs puissants bien dotés en ressources, au détriment des petits propriétaires de véhicules, qu’il s’agisse de particuliers ou de coopératives de travailleurs. Ces acteurs bien pourvus en ressources peuvent ainsi être des compagnies d’autobus transnationales, ou encore des acteurs nationaux puissants. Mais quels qu’ils soient, le résultat est identique : l’impossibilité pour les petits propriétaires et les travailleurs de participer de manière constructive au système de transport réformé. Ainsi, dans une étude sur la mise en œuvre des systèmes de BRT dans trois villes d’Amérique latine, des universitaires ont constaté que la majorité des opérateurs historiques avaient cédé la place aux nouvelles sociétés de BRT, plutôt que d’être intégrés au sein de celles-ci11 .
Il est clair qu’en l’absence de systèmes d’indemnisation substantiels ou de prêts à faible taux pour l’achat de nouveaux véhicules, l’interdiction des importations de véhicules d’occasion ou la mise à la casse obligatoire des vieux véhicules entraînerait l’e ondrement de l’industrie du transport informel et la perte de plusieurs milliers d’emplois.
C’est la raison pour laquelle les gouvernements tentent de faire passer des programmes de modernisation de la flotte sans dûment tenir compte des conséquences pour la main-d’œuvre, et se heurtent inévitablement à une résistance.
Aux Philippines, par exemple, les syndicats des transports se sont mobilisés contre les projets du gouvernement visant à remplacer les minibus traditionnels à moteur diesel (jeepneys) par des véhicules électriques. Bien que les syndicats ne contestent pas la nécessité d’améliorer la flotte de jeepneys, ils mettent en avant l’incapacité des petits exploitants de jeepneys pour ce qui est d’acquérir de nouveaux véhicules. Ils ont demandé au gouvernement de protéger les moyens d’existence des conducteurs et de proposer des prêts à faible taux aux collectifs et aux coopératives de travailleurs afin de leur permettre d’investir dans la modernisation des véhicules.
TRANSITION VERS LE PAIEMENT SANS NUMÉRAIRE
La pandémie de Covid-19 a accéléré l’introduction du paiement sans numéraire dans le transport de passagers. Outre la nécessité de réduire le risque de propagation de la maladie à travers l’échange physique d’argent, le paiement sans numéraire o re également un potentiel de traçabilité des contacts parmi les passagers.
Il présente également des avantages et des risques potentiellement importants pour les travailleurs, en particulier les équipages des véhicules.
Le paiement sans numéraire o re des avantages significatifs en termes de sécurité personnelle. Les équipages des véhicules, les chau eurs de taxi et de motos-taxis transportant d’importantes sommes d’argent sont extrêmement vulnérables aux vols et aux agressions violentes.
Certains syndicats font déjà campagne pour l’introduction de systèmes sans numéraire.
Sous la pression du Transport Workers Union of Kenya (TAWU), l’autorité nationale des transports a accepté de mettre en place un système de paiement obligatoire sans numéraire. Le syndicat a forgé une alliance avec des fournisseurs de systèmes de paiement sans espèces dans le but de « garantir la prise en compte des revendications et des préoccupations des travailleurs dans la solution proposée ». Le système sans numéraire est encore en phase de démarrage mais le syndicat espère qu’il contribuera à concrétiser les demandes des travailleurs en faveur de la formalisation des emplois dans le secteur des matatus (minibus détenus par des particuliers). Le TAWU reconnaît également que le passage à un système sans numéraire doit aller de pair avec une formation à la culture numérique pour la main-d’œuvre des matatus, de sorte que « les travailleurs puissent acquérir les compétences et les connaissances nécessaires pour gérer le paiement sans numéraire et comprendre les avantages o erts par ce dispositif, comme l’inclusion financière et la hausse des salaires ».
Dans le cadre d’une vaste coalition incluant des organisations de la société civile ainsi que la communauté médicale, la Confédération syndicale nationale des travailleurs des transports (NCTU) aux Philippines exige que les normes de santé minimales incluent la transition vers un système de paiement sans numéraire, qui permettrait de « ramener à un minimum les risques pour les passagers et les employés, et d’assurer un paiement e icace pour les services sous contrat ». Dans l’intervalle, elle demande que le paiement des tickets soit encaissé avant la montée des passagers dans le véhicule.
Le paiement sans numéraire ouvre en outre de nouvelles perspectives en vue du remplacement du système d’objectifs par des contrats de travail plus formels et le paiement régulier des salaires. Parmi les raisons invoquées par les propriétaires de véhicules eu égard au maintien du système d’objectifs figure leur incapacité à surveiller ou croire à l’honnêteté des équipages pour ce qui est de restituer les recettes collectées, c’est pourquoi ils préfèrent se contenter de facturer une redevance cible et se déchargent ainsi de la responsabilité (et du risque), supportés ici par les travailleurs. La sécurité du paiement sans numéraire empêcherait encore davantage les équipages de frauder le système et les propriétaires de se soustraire à leurs responsabilités. Il serait également beaucoup plus aisé de sévir contre les pratiques courantes de potsde-vin et d’extorsion par la police.
En outre, le paiement sans numéraire ouvre la voie à un système de transport urbain qui intègre pleinement les services informels avec des services d’autobus réguliers, des systèmes de métro léger, des systèmes BRT et d’autres modes, sur la base d’un système de billetterie et de transferts coordonné permettant aux passagers de passer d’un mode à un autre sans aucune di iculté. Ceci est particulièrement important lorsque des véhicules informels desservent les lignes de rabattement vers le réseau primaire de services formels réguliers.
Conducteurs de boda-boda à Kampala
Dans le même temps, en supprimant complètement l’argent liquide et en permettant une source de revenus directe aux propriétaires de véhicules, le paiement sans numéraire pourrait encore accroître le pouvoir des propriétaires sur les conducteurs. Les recherches sur le potentiel de paiement sans numéraire en Afrique du Sud ont mis en évidence « l’impact fondamental [de ce type de paiement] sur la relation entre les conducteurs des services de transport parallèle et les propriétaires de véhicules », qui diminuerait la capacité des conducteurs « de déterminer leur niveau d’e ort et de revenu ».12
À Nairobi, les travailleurs déplorent également le risque accru de fraude des passagers associé au paiement sans numéraire, qui imposerait aux travailleurs de combler eux-mêmes toute perte de recettes tarifaires.
La suppression de tout échange d’argent physique entre les conducteurs et les passagers peut aussi se répercuter négativement sur les personnes qui dépendent de ces petits paiements e ectués par les conducteurs et les passagers. Les équipages des autobus et les chau eurs de taxi et motostaxis sont au centre d’une économie complexe, employant des milliers de personnes à des postes des plus divers : entretien des véhicules, prestation de services aux passagers et aux équipages, gestion des gares routières et des stations, et bien plus encore.
La plupart de ces travailleurs dépendent d’un réseau informel de transactions de très faible montant : les pourboires des conducteurs et des passagers, par exemple, des paiements multiples et peu élevés concernant divers biens et services et des pots-de-vin essentiels versés aux fonctionnaires.
Du fait de leur surreprésentation dans ces emplois, les femmes risquent d’être les plus durement touchées par une transition vers un système sans numéraire.
Même lorsque le paiement sans numéraire via les services bancaires mobiles constitue déjà une pratique courante, à l’instar du système M-Pesa en Afrique de l’Est, il est di icile d’imaginer l’économie informelle des transports fonctionner totalement sans argent liquide.
L’introduction de nouvelles technologies dans le secteur des transports doit donc s’opérer en consultation avec les travailleurs des transports et leurs syndicats. À Nairobi, par exemple, les travailleuses des transports informels membres du Public Transport Operators Union s’organisent pour négocier la protection de l’emploi des femmes parallèlement à l’introduction du paiement sans numéraire. Le rapport de l’ITF
sur l’impact de l’avenir du travail pour les femmes dans les transports publics formule des recommandations à l’intention des syndicats confrontés plus généralement à l’automatisation et à la transformation numérique dans les transports publics.
FORMALISATION DES OPÉRATIONS
La plupart des services informels de transport de passagers fonctionnent sur la base de modalités et de règles qui ont évolué de manière organique pendant de nombreuses années, souvent sans réglementation e icace de l’État (malgré de fréquentes tentatives).
En Afrique de l’Est, les opérations sont principalement organisées par les responsables des gares routières, des arrêts de bus, et des stations de taxis ou motos-taxis. Ces responsables peuvent être élus démocratiquement par les employés eux-mêmes, auto-nommés ou imposés par des organisations criminelles.
Les stations peuvent être a iliées (par voie démocratique ou autre) à des associations ou syndicats à l’échelon local, municipal ou national, qui assurent une certaine coordination et (si possible) une représentation auprès des autorités. Ces associations peuvent se livrer une concurrence âpre et parfois violente.
Les responsables des stations déterminent les itinéraires, définissent les tarifs, acceptent ou refusent les conducteurs et maintiennent l’ordre et la discipline au niveau de la station.
Ils collectent les cotisations et les contributions aux fonds de protection sociale, ce qui peut impliquer des sommes considérables. Dans certaines villes, cet argent s’est avéré essentiel à la survie des travailleurs lors des confinements liés au Covid-19.
Les autorités municipales ont saisi l’occasion pour tenter une réorganisation pendant la crise du Covid-19.
À Kampala, en Ouganda, par exemple, les autorités ont annoncé que les minibus-taxis ne seraient autorisés à reprendre du service une fois le confinement terminé qu’à condition de se conformer aux nouvelles règles d’enregistrement et conditions de paiement de redevances et d’accepter d’être a ectés à des itinéraires et des stations spécifiques par l’autorité chargée des transports. L’Amalgamated Transport & General Workers Union (ATGWU) et son association a iliée de travailleurs du secteur des taxis ne sont pas opposés à la réforme des transports publics à Kampala, mais refusent que les travailleurs et le syndicat ne soient pas consultés. Ils se sont également opposés aux redevances imposées avant la reprise des opérations post-confinement, alors que les travailleurs n’engrangeaient aucun revenu. Des protestations ont permis de reléguer les réformes aux oubliettes, ou tout du moins de les reporter jusqu’à la tenue de consultations.
Ailleurs, notamment en Afrique de l’Ouest, les gouvernements ont de fait confié le contrôle des opérations aux syndicats, qui sont chargés de l’enregistrement des conducteurs et des véhicules, de la perception des redevances et du maintien de l’ordre au sein de l’industrie. Dès lors, l’adhésion syndicale peut e ectivement constituer une obligation pour les conducteurs. Ce rôle confié aux syndicats peut également être synonyme d’activité très lucrative et donc de revenus particulièrement conséquents, et ainsi ouvrir la voie à la corruption et à des luttes acharnées pour le contrôle entre factions.
Dans tous les cas, les gouvernements sont confrontés à un défi de taille en tentant de réorganiser et de formaliser l’industrie des transports informels en services réguliers réglementés.
Comme précédemment décrit, la Banque mondiale fait valoir que les gouvernements devraient « consolider, formaliser et structurer le secteur informel… pour professionnaliser les opérations de transport »13 .
Ceci peut être interprété de diverses manières : Traditionnellement, la Banque mondiale conseille aux autorités un regroupement au sein du secteur privé, en transférant l’ensemble du système de transport urbain à de grandes sociétés de transport formelles (de préférence transnationales) et en éliminant les opérations informelles sur les routes. C’est évidemment impossible, sauf à provoquer un chômage de masse parmi les travailleurs des transports et créer des conflits majeurs.
Mais d’autres solutions existent, notamment la propriété d’État, les coopératives ou d’autres formes d’entreprise sociale, comme les organisations syndicales.
RÉGLEMENTATION DES MOTOS-TAXIS
Depuis une dizaine d’années, le transport de passagers non régulier connaît une expansion considérable – en particulier les motos-taxis. Dans certaines villes, des centaines de milliers de personnes gagnent leur vie en conduisant une moto-taxi (« boda-boda »).
Le secteur est non-réglementé dans sa quasitotalité, si ce n’est à travers l’auto-organisation des conducteurs eux-mêmes, dans les plus grandes stations de motos-taxis. Son image dans les médias, au sein de la sphère politique et auprès du grand public est très mauvaise (bien qu’il constitue l’option la plus commode aux yeux de millions de navetteurs pour éviter les embouteillages), critiqué pour les accidents, la criminalité et une aggravation de l’encombrement sur les routes. Dans de nombreuses villes, l’utilisation de motocyclettes pour transporter des passagers payants est techniquement illégale, mais la loi est partout ignorée ou inapplicable.
Ce constat fait naître un problème majeur pour les planificateurs et les régulateurs des transports, qui sont formés et équipés pour gérer les services réguliers, avec des itinéraires et des arrêts clairement définis, et auxquels peu de directives ont été communiquées en termes de réglementation d’un service de transport de masse point à point.
Certains gouvernements ont cherché à légaliser et à réglementer le secteur au travers de plateformes de transport à la demande telles que Uber, Taxify et SafeBoda. Ces entreprises ont reconnu l’énorme filon des services de motostaxis et ont proliféré dans les grandes villes, en particulier dans les pays du Sud.
La presse a indiqué qu’en mai 2020, les chau eurs de boda-boda à Kampala devaient s’inscrire en tant que sociétés de voitures de transport avec chau eur (VTC) une fois le confinement levé, obligeant le secteur à prendre le virage du numérique. La Kampala City Council Authority (KCCA) aurait demandé aux chau eurs de « formaliser dans les 21 jours leur adhésion auprès de sociétés du numérique enregistrées telles que SafeBoda, Uber et Bolt, entre autres ». 14
Le plan de la KCCA suppose qu’en obligeant les chau eurs à adopter ce type de technologie, le gouvernement sera en mesure de garder une trace de leurs déplacements ; il considère en outre qu’il est plus facile de travailler avec les entreprises qu’avec les chau eurs eux-mêmes. L’enregistrement et la formation des conducteurs peuvent être externalisés sans frais auprès du secteur privé.
Du point de vue des chau eurs, le fait de rejoindre une plateforme à la demande peut être plus attrayant que d’agir en tant qu’opérateur informel indépendant. Et pour celles et ceux qui se soucient de la sécurité de leur emploi ou qui s’inquiètent d’être « chassés » du secteur si la réglementation gouvernementale vient à évoluer, être ainsi rattachés à une entreprise reconnue par les autorités peut sembler plus sécurisant. Cette relation peut également permettre aux chau eurs de se libérer des structures des stations et des obligations et politiques a érentes ; certains ont même a irmé être mieux protégés face au harcèlement opéré par la police. Selon les chau eurs interrogés à Kampala, les perspectives de rémunération sont aussi supérieures à celles de leurs homologues indépendants15 .
Néanmoins, la concurrence est souvent rude et la politique tarifaire agressive entre les plateformes de transport à la demande, ce qui entraîne une baisse des tarifs et une chute des revenus pour les chau eurs, ces derniers étant en outre à la merci des algorithmes opaques de l’application. Des sociétés comme Uber a ichent par ailleurs un bilan médiocre en matière de défense des intérêts de leurs conducteurs (qu’elles catégorisent en tant qu’entrepreneurs indépendants et non en tant que salariés). Et dans de nombreuses villes, les taux de rémunération des conducteurs ont été abaissés si tôt que la société avait atteint une position dominante sur le marché.
Des recherches récentes sur les conditions de travail des conducteurs Uber menées dans les villes de Dar es-Salaam (Tanzanie), Johannesbourg (Afrique du Sud) et Nairobi (Kenya) ont également démontré que bon nombre de problèmes rencontrés dans l’économie informelle se retrouvaient dans l’économie des plateformes. Il s’agit notamment du fait que la majorité des conducteurs ne possèdent pas leur propre véhicule et doivent donc verser aux propriétaires des frais de location journaliers ou hebdomadaires fixes (les « objectifs »), du problème des revenus généralement faibles et précaires, des heures de travail interminables et du harcèlement de la part des forces de police.