Jacob Aue Sobol lauréat du LEPAP pour son livre Tokyo

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Jacob Aue Sobol lauréat du LEPAP pour son livre Tokyo par Christian Caujolle C’est devenu, pour le livre photographique, un événement d’importance : Le Leica European Publishers Award for Photography, qui désigne « le » livre de l’année, fait définitivement référence. Décerné par sept éditeurs européens (Peliti Associati pour l’Italie, Actes Sud pour la France, Apeiron pour la Grèce, Dewi Lewis Publishing pour la Grande-Bretagne, Editions Braus pour l’Allemagne, Lunwerg Editores pour l’Espagne, Mets & Schilt pour les Pays Bas) qui s’engagent tous à publier le projet qu’ils choisissent en commun, cette récompense assure une visibilité rare à des projets d’image. Et il est exigeant. Ajoutons que cette collaboration permet d’augmenter le tirage et, donc, de réduire les coûts de fabrication puis le prix de vente de ces livres. La cuvée 2008, qui est également celle de la quinzième édition du prix, a élu Jacob Aue Sobol, un photographe né en 1976 à Copenhague pour son travail sur Tokyo. Encore un travail sur Tokyo, me direz-vous. Certes, mais pas n’importe lequel. Un projet en profondeur, sans exotisme, qui dit clairement ce qu’il doit (certains diront trop…) à Daido Moriyama et à sa vision noire, incomprise pendant tant de temps avant qu’il ne devienne une référence culte. On pense évidemment aussi à Anders Petersen, aux travaux plus récents de Michael Ackerman ou d’Antoine d’Agata, mais il n’y a ni copie, ni tromperie sur la marchandise. Un Tokyo sombre et à fleur de peau, un Tokyo de lumières froissées et de corps hésitant entre chute et lévitation, une ville de sensualité et de déchets. Un univers que la mise en page brute, à fonds perdu, sans blanc, sert à merveille dans le rythme soutenu des doubles pages sur le papier mat, sensuel sous les doigts. Une forme de tendresse et de violence combinées. Rien à voir donc avec les clichés qui continuent à déferler, comme avec le récent et trop commercial « Les Lumières de Tokyo » des éditions Assouline, soi-disant hommage à l’architecture de la ville, totalement artificiel et glacé à force de retouches des ciels et de la lumière sur Photoshop.


Le jeune danois de Magnum affirme son style, revendique sa subjectivité, ses expériences mêlant la ville et le plaisir comme des découvertes parallèles puis combinées de soi-même, fuit la description pour nous entraîner, avec brio, dans sa prise de risque et ses nuits, vraies ou rêvées. Il y a peu de mots dans ce livre au déroulé strictement visuel, mais ils sont essentiels : « Il me semble que plus une photo est spontanée et irréfléchie, plus elle devient vivante, et plus elle passe de l’ordre du montrer à celui de l’exister ». Jacob Aue Sobol, Tokyo. Actes Sud 29,5 x 27 cm, 136 pages, 35


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