CONSOMMATION Consommer Autrement
1 jeunes-socialistes.fr
Boîte à outils pour un nouveau modèle de développement Aujourd’hui, en 2011, notre droit à l’avenir, à une vie décente, est en péril. La société du toutconsommation accroît les inégalités à toutes les échelles et menace notre planète dans ses équilibres climatiques et dans sa biodiversité : le point de nonretour environnemental est atteint et l’accumulation dans l’atmosphère de dioxyde de carbone CO2 engendrerait d’ores et déjà des conséquences irréversibles pour le prochain millénaire. En ef fet, nous consommons trop de viande, de blé, de poisson : un tiers de la production céréalière passe dans la nourriture des animaux pour nourrir les pays développés, alors que deux milliards de personnes sont mal ou pas assez nourries. Nos ressources halieutiques, la biodiversité s’épuisent tandis que l’agriculture productiviste pollue de manière durable l’eau et le sol. Nous? En fait, pas tout le monde, mais une par tie de la planète, et une par tie de la population, qui laisse de côté des « exclus » de la consommation frustrés par un système productif, et un marketing productiviste. Notre vie quotidienne est basée sur l’économie du jetable, sur un excès d’emballage, sur des produits bancaires et publicitaires qui poussent constamment à consommer plus et plus souvent. La question de la consommation, et donc de notre modèle de développement, devient donc centrale quand le mode de vie occidental ne devient accessible pour l’ensemble de la planète qu’au prix de sa dégradation irrémédiable. Il faut changer, diminuer l’empreinte écologique de nos modes de consommation, revoir les règles de l’économie, encadrer, amoindrir les mécanismes de la société du 2
« tout-consommation », c’est l’objet de cette boite à outils « consommer autrement ». Ce suppor t se veut outil de réflexion et d’action. Alors saisissez-vous de ces problématiques, répondez aux aspirations de nos concitoyens en suscitant un débat sur la publicité, sur les modes de consommation, en menant une action coup de poing avec des associations, collectifs, et ensemble lutter contre le gaspillage énergétique ou défendre les droits des consommateurs. Des fiches de lecture, des ar ticles sur l’emballage et le recyclage, sur l’éco-conception, sur la croissance, au ser vice d’un nouveau modèle de développement qui intègre Nords et Suds vous permettront d’alimenter le débat. Mais ce nouveau modèle passe aussi par une autre fiscalité de la consommation qui serait progressive et donc socialement juste, par un encadrement de la publicité et du crédit pour en finir avec le monde du jetable, de l’éphémère, de l’ostentatoire. C’est donc bien une révision globale de nos pratiques à laquelle nous appelons. Définir des critères pour une croissance qualitative, c’est l’enjeu d’une économie sociale : une entreprise ambitieuse, mais tellement enthousiasmante.
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Capitalisme, consommation, croissance, même combat ?
Le capitalisme mondialisé, à l’aube du XXIème siècle, est de plus en plus décrié : les inégalités mondiales se sont accrues, les flux financiers incontrôlés menacent la stabilité de l¹ é conomie, et la course au profit de cour t terme menace l¹ environnement. Le capitalisme est pleinement soutenu par une société du tout-consommation qui depuis la seconde guerre mondiale, est devenu une norme mondiale, par une cer taine uniformisation des compor tements. Depuis la chute du mur, plus de contre-modèle face aux produits standardisés, dont les mérites sont scandés par une publicité omniprésente, qui fait de l’homme un consommateur avant d’être un citoyen. Le nouveau modèle de développement que nous proposons passe par une croissance qualitative et le dépassement de la société du tout-consommation, c’est l’objet de cette première par tie. Ce nouveau modèle passe ensuite par de nouvelles normes de production et enfin par de nouveaux modes de consommation, transformations qui font l’objet des deux par ties suivantes.
Une croissance qualitative La croissance serait la recette absolue à tous les maux de la société. Pour créer de l’emploi, il faut de la croissance, pour relancer l¹ économie, il faut relancer la consommation. Ce modèle de développement fondé sur la production de richesses, sur un mode de vie dispendieux dans les pays développés, n’est pour tant plus viable. La consommation croissante de viande des pays développés, par exemple, a atteint un tel niveau qu’un tiers des céréales nourrissent des animaux tandis qu’un milliard de personnes sont sous-alimentés. Les réser ves halieutiques s’épuisent tout comme la biodiversité, qui n’a pas connu pareille crise depuis la disparition des dinosaures, et si tout le monde vivait comme les Américains, il faudrait 9 planètes pour produire les biens équivalents. Comme socialistes et favorables à une puissance publique for te nous ne pouvons partager toutes les positions de la « décroissance », mouvement qui remet en cause la 4
société de consommation, notamment sur l’autarcie. En revanche, nous pouvons utiliser leurs arguments pour por ter un projet de croissance qualitative, à travers de nouveaux modes de production et de consommation, de nouveaux indicateurs de développement qui intègrent la qualité de vie, la satisfaction des besoins essentiels. Nous remettons en cause le super flu, le jetable, l’obsolescence programmée de produits qu’il convient d’acheter à nouveau pour « relancer la consommation ». Au vu du désastre social et écologique, nous devons réfléchir à l’émergence d’une société post-croissance, en définissant de nouveaux critères quantitatifs et qualitatifs, en mettant en œuvre une planification écologique de l’économie et donc de nouveaux modes de production.
Définir de nouvelles normes de production Consommer « écolo » ne suf fit pas, la puissance publique a son rôle à jouer pour définir de nouvelles normes de production,
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encourager les produits durables en favorisant l’éco-fonctionnalité ou en définissant de nouveaux critères pour la TVA. Cette société du plein emploi passe aussi par une reconversion écologique de l’économie organisée par l’Etat (construction de logements, généralisation de l’isolation thermique, et de l’agriculture biologique). Le nouveau modèle de développement et de croissance que nous proposons passe par de nouvelles normes de production : des appareils électroménagers moins énergivores, la mise en œuvre de la responsabilité élargie du producteur, en matière de recyclage notamment.
Changer nos modes de consommation La protection de l’environnement passe par la réduction des inégalités et la remise en cause de compor tements « somptueux » de la par t des élites qui ne font qu’encourager la frustration et l’envie de consommer tou-
jours plus, qui créent les dif ficultés sociales (surendettement, frustration) et renforcent l’individualisme. Le « acheter plus et encore plus » a augmenté les inégalités sociales et seule une société qui en aura fini avec le culte de la croissance permettra de les réduire. Cette situation est largement due à une publicité omniprésente dans l’espace public et privé, véritable moteur de cette société, qui aiguise et guide les désirs vers un achat compulsif et super flu. Cette publicité por te dans l’inconscient un mode de vie uniforme qu’il faut adopter à tout prix, dès le plus jeune âge. Pour autant, ceux qui n’en ont pas les moyens aujourd’hui doivent pouvoir consommer, accéder aux besoins essentiels, tels que le chauf fage ou une alimentation de qualité, dans le cadre d’une augmentation globale des bas et des moyens salaires, et d’une autre fiscalité de la consommation. C’est la relance sociale et écologique que nous avons proposé dans le Pacte pour les jeunes en avril 2011.
permet l’épanouissement des relations humaines, remplacer l’hégémonie de la quantité par celle de la qualité. Dénoncer les désagréments sur l’’environnement dus au capitalisme ef fréné, continuer la conversion écologique de nos modes de production, revoir nos modes de consommation, privilégier la réduction des inégalités dans l’accès aux biens communs, voilà notre horizon. Notre projet de société revoit nombre de nos pratiques quotidiennes en terme d’’alimentation, d’énergie, de déplacement, de santé, de logement, mais aussi médiatiques et culturelles. Si de nombreuses initiatives locales ont déjà surgi, elles restent isolées, inconnues les unes des autres. Nous voulons réorienter les ef for ts de la puissance publique pour les généraliser, por ter un autre projet de croissance et de développement en consommant autrement.
Pour changer nos modes de consommation, nous voulons favoriser des circuits cour ts de commercialisation, amener les collectivités territoriales à mieux encadrer la publicité et à agir par ses commandes et marchés publics (2/3 des investissements publics) pour orienter les compor tements des entreprises. Selon l’enquête Trend Obser ver 2008 de l’institut Ipsos, six français sur dix sont d’accord avec l’idée que, pour améliorer la qualité de vie, il faut réduire la consommation. Le progrès social, c’est être capable de refouler progressivement l’aire économique consacrée à la réalisation du seul profit, c’est retrouver la par t de gratuité et de responsabilité qui 6
De nouveaux modes de production : L’économie de fonctionnalité
La redéfinition de nos modes de consommation est une des réponses à la nécessité d’assurer un modèle de développement
L’obsolescence programmée, une stratégie à décrier.
soutenable pour les générations futures. Mais elle ne se suf fit pas à elle-même. En tant que Jeunes Socialistes, nous récusons tout modèle de politique environnementale dont l’alpha et l’oméga serait la responsabilité de l’individu en tant que consommateur. Une telle conception, por tée par la droite, est basée sur la culpabilisation de l’individu de ses choix directs ou de sa situation personnelle (exemple de la taxe carbone telle que proposée par l’UMP). Nous voulons un modèle de production permettant de répondre au défi de découpler la croissance économique, de la consommation de ressources d’une par t et de la production exponentielle de déchets que ce modèle engendre, d’autre par t. Autrement dit, d’être en mesure d’assurer le plein emploi et la création de richesse en promouvant une économie de ser vice plus juste et plus durable.
Les logiques de productions actuelles sont basées sur un modèle économique régi par la consommation de biens produits et par la loi de l’of fre et de la demande. Il est par conséquent assez simple d’envisager que pour améliorer la demande, les entreprises cherchent à renouveler au plus vite leur parc de produits, et donc à baisser la durée de vie de ces derniers. Cette stratégie por te un nom : l’obsolescence programmée. On l’obser ve couramment dans tous les secteurs économiques : dans le secteur du textile, par exemple, ou lorsque cer taines firmes informatiques changent de formats par défaut pour contraindre les utilisateurs à procéder à une mise à jour onéreuse de leurs logiciels. Dans le cas des produits électroménagers, électroniques ou automobiles, cer tains producteurs vont jusqu’à programmer la détérioration d’une par tie des pièces après un temps donné (au-delà de la garantie) de sor te à pousser le consommateur à acheter un nouveau produit. Il va de soi que la
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plupar t de ces produits ont une très for te empreinte écologique, tant en amont, au niveau de leur production (consommation de métaux rares, production en série, non prise en compte en amont de la production
que d’une attitude ultra-consommatrice et productrice de déchets, escomptée de la par t du consommateur. Propriétaire du produit, il sera dans son intérêt économique de minimiser la quantité de déchets produite
de déchets), qu’en aval, c’est à dire en fin de vie, car ils sont complexes à traiter et produisent de nombreux déchets.
par le bien en fin de vie, contrairement aux logiques actuelles, ou le poids du traitement des déchets por te sur les par ticuliers et les collectivités territoriales. De même, il sera dans son intérêt d’aller aux antipodes de la logique d’obsolescence programmée en privilégiant le réparable et le réutilisable au tout-jetable.
L’économie de fonctionnalité : revoir ses modes de distribution et de production pour réconcilier l’économique et l’environnemental.
La réussite des diverses applications de ce mode de production D’autres modèles productifs en revanche peuvent induire une inversion de ces logiques, c’est notamment le cas de l’économie de fonctionnalité, qui consiste à substituer à la commercialisation d’un bien matériel, la fourniture du ser vice correspondant à la fonction exercée par ce bien. L’idée est de rendre le producteur propriétaire et responsable du bien produit pour l’inciter à tirer davantage ses bénéfices d’économies de matière et d’énergie qu’il réaliserait par anticipation,
Parmi les plus connus Xerox, qui fournit un ser vice de location de photocopieurs. Restant propriétaire de ses biens, l’entreprise a intégré la récupération de ses matériaux en fin de vie dans son processus de production si bien que ses photocopieurs contiennent actuellement 80 à 90% de pièces anciennes. Dans la même veine la société Michelin s’est spécialisée dans la gestion des pneumatiques pour les entre8
prises de transpor t routier professionnel. Il en résulte une meilleure gestion de la durée de vie des pneumatiques, dans la poursuite d’un double but : la réduction de consommation de carburant des véhicules de transpor t routier (réduction avérée de 5 à 10%) et le maintien opérationnel le plus longtemps possible des pneumatiques pour éviter des coûts trop élevés en terme de récupération et de traitement des pneus usagés. Par ailleurs ce modèle encourage le recyclage des pneus (de nombreuses techniques ont été développées en ce sens, parmi lesquelles le re-creusage de pneus...). Il y a encore le modèle « vélib’ » décliné par la plupar t des grandes villes de France, qui consiste en la location de vélos pour un temps donné. De même Electrolux a mené une expérience concluante de mise à disposition gratuite de machines à laver le linge, avec un paiement en fonction des cycles de lavages uniquement. Citons également le projet d’Inter face qui visait, en matière de vente de moquette, en la fourniture et l’entretien pour 20 ans de carrés de moquettes de bureau. Enfin, en ce
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qui concerne l’agriculture, les Associations pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne (AMAP) garantissent un prix moins cher pour les usagers-consommateurs du fait de l’absence d’intermédiaires entre l’acheteur et le producteur. Il limite également le gaspillage dans la mesure où les contrats d’achat sont élaborés conjointement entre le paysan et l’acheteur, en fonction des besoins de l’acheteur mais aussi en fonction de la production du producteur et des éventuelles per tes de la saison. Ce modèle, présent dans de nombreux et divers secteurs, semble par faitement transposable à d’autres domaines encore (téléphonie mobile, chauf fage…). Véritable modèle alternatif au modèle actuel, dans la mesure où il nous enseigne le renoncement accepté et consenti à la propriété privée, au profit de la propriété collective, ou encore parce qu’il nous invite à repenser la structuration des filières de production en vue d’en faire des filières durables, respectueuses des travailleurs et basées sur des rappor ts
duction, extraction des matières premières, utilisation…). L’éco-conception est en outre une approche multicritère, c’est-à-dire qu’elle s’intéresse à tous types d’impacts environnementaux, mais également une approche très normée et scientifiquement documentée.
L’approche territoriale : L’écologie industrielle, ou l’économie circulaire.
de réciprocité entre l’usager et le prestataire. En dehors des retombées environnementales, l’économie de fonctionnalité présente des avantages cer tains en termes d’emploi, comparativement au modèle de production actuel : elle crée en ef fet un gisement d’emplois non délocalisables, dans les domaines de la maintenance et de la réparation, et elle promeut par ticulièrement l’emploi dans les ser vices de suivi et de soutien à la clientèle, c’est-à-dire qu’elle tend à mettre en relation les deux bouts de la chaîne de production.
L’éco-conception, ou l’approche « produit » Depuis plus d’une décennie, les exploitants désireux de produire en respectant davantage l’environnement, développent une approche centrée autours du produit : l’écoconception. Cette démarche vise à intégrer les contraintes environnementales à chacune des étapes du cycle de vie du produit (pro-
En dehors de l’approche produit, une autre approche à l’état de développement, est basée sur l’aménagement du territoire au niveau des parcs d’activités et industriels. Elle par t du constat que le fonctionnement de notre société est basée sur une consommation infinie de ressources et une production infinie de déchets. Ce fonctionnement, bien évidement non soutenable, doit profondément changer pour tendre et s’approcher vers celui d’un écosystème. Très concrètement, il s’agit de créer des synergies de matière et d’énergie, entre les dif férents acteurs d’un parc industriel pour minimiser ses impacts : « les déchets des uns deviennent les ressources des autres ». De nombreuses expériences et cas pratiques ont montré que le succès d’une telle démarche implique une coopération, une transparence, et une solidarité entre les dif férents acteurs d’un même territoire. La mise en place d’une démarche d’écologie industrielle va à l’encontre des logiques entrepreneuriales établies actuellement. L’essor des stratégies marketing, la fragmen10
Emballages : stop au gaspillage !
tation des foyers, l’accélération et l’individualisation de nos modes de vie ont initié une évolution de l’of fre de produit, traduite par une augmentation impor tante du nombre d’emballages. Et pour cause, en moyenne 7% de la matière qui ser t à fabriquer un bien se retrouve dans le produit final. De même, 99% des ressources prélevées dans la nature deviennent des déchets dans moins de 42 jours. S’ils sont, dans la majorité des cas, jetables et éphémères, les emballages ne sont pas pour autant super flus : leur fonction est triple. Le premier rôle de l’emballage est d’assurer une conser vation du produit afin qu’il puisse être utilisé, transpor té et consommé de manière optimale. L’emballage ser t également à délivrer des informations essentielles sur le produit, sa composition, ses labels éventuels et les dispositions ou précautions d’utilisation. Enfin, l’emballage a une fonction markéting, son but est d’attirer l’attention du consommateur au moment de sa commercialisation. La fonction marketing, bien qu’étant la plus super flue est celle qui tend à primer. Dès lors, il serait per tinent de s’interroger sur l’évolution de nos modes de production et de consommation si les pro11
duits étaient emballés de manière uniforme et ne contenaient uniquement des informations objectives sur le produit, sa qualité, son empreinte écologique, les conditions sociales autour de sa production. Ces réflexions vont à l’inverse des objectifs de la directive du européenne du 5 septembre 2007 qui sont d’« optimiser la concurrence dans l’industrie » en assurant la « liber té de choix entre différents emballages », ouvrant ainsi la por te à une inflation impor tante du suremballage. Les indicateurs actuellement en place pour évaluer la situation des emballages sont largement discutables : si l’on obser ve depuis 5 ans une baisse en tonne des déchets issus des emballages chaque année, ce fait n’est absolument pas révélateur d’une baisse des impacts environnementaux liés à ceux-ci. Une bonne manière d’illustrer ce fait serait de considérer une bouteille en verre à côté d’un film plastique : la première est lourde mais totalement iner te chimiquement et recyclable à 100%, le deuxième est très léger, mais très impactant, et non recyclable. La disparition de la consigne des bouteilles
en verre pour les par ticuliers est le fruit d’un travail de lobbying des producteurs d’emballages, au motif que le lavage des bouteilles serait plus impactant que la production et le recyclage de bouteilles plastiques.
La responsabilité élargie du producteur, c’est quoi ? En France, la responsabilité élargie au producteur lui confère le devoir d’assurer l’élimination, ou la valorisation des déchets. Pour ce faire, ce dernier a la possibilité de traiter directement les déchets, ou d’adhérer à un organisme tel qu’éco-emballage : c’est le fameux point ver t don le logo est souvent pris à tor t pour celui du recyclage. Ainsi, le producteur verse par emballage une contribution à l’organisme qui subventionne les collectivités pour la mise en place de filières d’élimination et de valorisation. Cependant, les contributions versées à l’éco-organisme sont trop faibles pour être dissuasives et n’intègrent pas les impacts de l’emballage dans leur cout. D’autre par t, le statut privé de l’éco-organisme peut également nous interroger. En ef fet, ce dernier a tendance à défendre les intérêts de ses adhérents: les entreprises productrices d’emballages. C’est ainsi que cer taines collectivités se sont vu refuser a postériori la subvention de guide de tri des déchets, pour avoir promu la consommation d’eau du robinet plutôt qu’en bouteille. A la suite des scandales en 2008 autours d’éco-emballage impliquant le placement de fonds dans des paradis fiscaux, la loi Grenelle II préconise l’intégration d’un censeur d’État mais aucun décret n’a encore 12
défini ni ses missions, ni son mode de désignation.
par un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), à l’instar de l’ADEME.
Force est de constater par ailleurs, qu’en bout de chaine, des taux très impor tants de refus de tri demeurent, malgré les politiques volontaristes développées par cer taines collectivités territoriales pour sensibiliser les citoyens à la nécessité du tri, ainsi qu’aux bonnes consignes (guides de tri, af fichage, ambassadeurs…). On peut enfin souligner le caractère disparate du tri en France : la couleur des conteneurs et les filières de reprises varient considérablement d’un endroit à l’autre.
• Le remplacement de la contribution par une redevance versée pour chaque emballage, et dont les taux sont fondés sur l’éco-conception. Ces derniers devront revêtir un caractère incitatif et dissuasif.
Des propositions pour lutter contre l’économie du jetable • L’encadrement du marketing sur les emballages. • La substitution de l’éco-organisme privé 13
• Une étude indépendante sur la mise en place d’une consigne à bouteilles pour les par ticuliers à l’échelon national. • La mise en place d’un plan national d’uniformisation des filières de recyclage. • La mise en place d’un code de couleur standard pour les conteneur, ainsi que d’un af fichage correspondant sur chaque emballage afin de simplifier considérablement le tri pour les usagers (exemple : pastille jaune -> poubelle jaune, pastille bleue -> poubelle bleue… )
Peut-on faire de la TVA un impôt juste et écologique ?
La TVA (Taxe sur la Valeur Ajoutée) a été instaurée en 1954. Principale recette fiscale de l’État français, elle touche les biens de consommation de manière pratiquement uniforme.
TVA est un impôt profondément injuste.
Un impôt indirect, parce qu’il n’est pas directement prélevé sur les revenus des citoyens, mais ôté lors des achats de biens par les ménages. Les entreprises le collectent et le reversent à l’État. Si l’entreprise doit payer de la T.V.A à ses fournisseurs, elle peut la déduire directement de la somme à reverser à l’État. En cas d’excédent, l’État lui reversera la somme correspondante au surplus entre TVA collectée et TVA déductible.
La révision de la T VA, un terrain impraticable ? Dans les pays de l’Union Européenne, six directives sont venues encadrer la TVA, mais également les prérogatives des États en la matière. Il en résulte qu’un taux minimal a été fixé à 15%, mais aucun aucun taux maximal n’a été déterminé, alors que dans cer tains États membres, le taux peut atteindre jusqu’à 25%. Par ailleurs les prérogatives des États en matière d’assiette -c’est à dire la base sur laquelle l’impôt est levé - et de territorialité - à savoir l’endroit où la TVA est levée – manquent de clar té et de précisions. Cette limite tient par ticulièrement au fait que pour pouvoir modifier ces modalités, la condition d’unanimité de tous les États membres est requise. Or, cet impôt est par ticulièrement apprécié par des néo-
Un impôt jugé injuste, parce que proportionnel : chaque consommateur est soumis à un taux fixe, sans distinction de situation sociale ou encore quelque soit le bien acheté. En ef fet, le taux de base est de 19,6%, par opposition à l’impôt progressif dont le principe est que chacun paye un taux dif férent, puisqu’il est calculé en fonction du revenu perçu (les plus pauvres payent moins, les plus riches davantage). En cela, la
Peut-on modifier les taux de TVA ?
libéraux européens émanant de l’école du « Public Choice », ou encore par les idées de deux professeurs de Stanford, Rober t E 14
Hall et Alvin Rabushka qui prônent dans un ouvrage intitulé « The flat Tax » un impôt propor tionnel global et unique de 19% sur la consommation. Un impôt juste et écologique : une entreprise réalisable. La marge de manœuvre semble au premier abord donc bien limitée. Mais la révision de la TVA n’en semble pas moins impor tante, en ce qu’elle comprend un double volet inéquitable : Elle ne prend ni en compte la qualité sociale des produits qu’elle taxe, ni leur empreinte écologique. Mais comment faire évoluer cet impôt ? Sa révision implique d’en finir avec la propor tionnalité, combat essentiel comme l’explique la Loi d’Engel qui stipule que lorsque le revenu augmente, la par t des dépenses de première nécessité diminue. Il en résulte des conséquences assez simples du point de vue de la justice sociale : une même somme – ou un même taux – ne représente pas la
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même valeur par rappor t à leur revenu. En ef fet, pour les bas revenus, une variation de 10 euros représente des dépenses de première nécessité en plus ou en moins, alors que pour les hauts revenus, cela ne représentera que des dépenses de confor t ou de l’épargne en moins. Nous jeunes socialistes refusons cette atteinte à la justice sociale, et décrions l’aberration faite lorsque les consommateurs de revenus dif férents paient le même taux sur leurs achats.
Rétablir une forme de progressivité Il convient de rétablir une forme de progressivité dans le calcul du taux de TVA. Non pas qu’il s’agisse de se baser sur les revenus des citoyens (en pratique ce serait très complexe), mais il serait possible d’établir une progressivité selon les types de produits,
autrement dit faire de la TVA un impôt dif férencié à la dépense comme préconisé dans les années 1970 par Fernand Oulès, professeur d’économie et André Margairaz, fiscaliste praticien. Cela consisterait à pratiquer une exonération sur les achats de première nécessité ou à leur appliquer un taux réduit (2.1%), à retrancher un taux modéré aux dépenses de consommation courante (de 2.1% ou 5.5%), à prélever un taux plus impor tant aux dépenses de confor t (33%), et à défalquer un taux très élevé pour les dépenses de luxe ostentatoire (49%). D’ores et déjà, la TVA connaît un grand nombre de taux dérogatoires, accordés à quasiment l’ensemble
luantes, ou for tement génératrices de dégâts sociaux.
des pays européens. Ainsi en France, trois taux sont obser vables : 19.6%, 5.5% (restauration) et 2.1%. C’est-à-dire deux taux en-dessous du minimum fixé par les directives européennes. Par ailleurs, s’il existe une limite minimale (15% en théorie), aucun taux maximal d’imposition n’est prévu pour la TVA dans les directives européennes. Ces éléments nous confor tent donc dans la faisabilité de la réalisation d’un tel projet.
Un réflexe déjà pratiqué par de nombreux organismes financiers en matière d’investissement dit « socialement responsable ».
Prendre en compte les externalités négatives Pour faire de la TVA un impôt social et écologique, son calcul doit prendre en considération les externalités négatives issues de l’activité économique engendrée pour créer le produit. Opérationnellement il s’agirait de desser vir par une accentuation du taux, au nom des per tes sociales et environnementales engendrées, les produits provenant d’activités économiques for tement pol-
Sur le plan social, les ef for ts devraient se concentrer sur la provenance du produit et le respect des droits sociaux attenants. Il s’agit de prêter attention aux droits et protections octroyées aux salariés dans le pays d’origine du produit, mais aussi les pratiques de l’entreprise elle-même : nombre d’heures de travail, horaires des salariés, rémunération des salariés par rappor t aux dirigeants, respect de la dignité humaine et interdiction du travail des enfants…
Mais aussi tenir compte de l’empreinte écologique globale du produit afin d’éviter que la taxe soit basée sur le seul critère carbone, qui est purement et simplement inef ficace écologiquement, quand elle n’est pas directement génératrice de marchés d’émissions carbone. L’empreinte écologique est en partie héritière de propositions nées après la Seconde guerre mondiale du cer veau d’un industriel fondateur de l’entreprise de cosmétiques L’Oréal, Eugène Schueller. Ce dernier proposait un impôt sur l’énergie de base utilisée pour réaliser un produit. Il s’agirait concrètement de faire varier le taux de la TVA en fonction d’une empreinte écologique du produit calculée sur la base de l’énergie, des matières premières nécessaires ainsi que des déchets produits par le cycle de production et de consommation dudit produit.
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Protection des consommateurs : Agir à l’échelle européenne pour influer sur les modes de production du 21ème siècle
Depuis le dernier élargissement, l’Union Européenne compte plus de 500 millions de consommateurs. L’ambition, c’est de s’ef forcer de garantir un haut niveau de protection afin de viser une société à risque zéro. Il s’agit d’accroître la transparence sur les produits, de limiter les per versions de ce système productif qui, on l’a vu récemment avec l’af faire du Médiator, met gravement en danger la santé de l’ensemble des citoyens européens. L’objectif, c’est de garantir les mêmes droits par tout dans l’UE avec le même degré d’exigence. Comprenant que les commerçants et industriels sont déjà grandement débiteurs envers les consommateurs, rien n’empêche néanmoins de compléter leur devoir d’information aux qualités intrinsèques du produit ou ser vice, de les obliger à fournir l’empreinte carbone ou l’intensité de main d’œuvre fournit dans tel ou tel pays. Encadrer strictement les espaces horaires et géographiques est aussi concevable.
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Admettre en droit francais les « class action » Une proposition consisterait à admettre en droit français les « class action », ce que le MEDEF a toujours refusé. Il s’agirait de permettre à un ensemble de consommateurs victimes du même dommage causé par un industriel ou un professionnel d’engager de manière conjointe sa responsabilité. On verrait ainsi un fabriquant de médicament devoir répondre d’une même plainte soutenue par des centaines voire des milliers de consommateurs victimes. Le rappor t de force se verrait donc inversé. Par ailleurs, il existe encore des dif férences impor tantes dans les législations des États membres. Inscrire la protection des consommateurs dans les législations nationales n’a que peu de valeur pour le consommateur si la réglementation n’est pas correctement appliquée. En modifiant la réglementation et en la dif fusant plus largement on peut réellement insuf fler une nouvelle dynamique dans les modes de production. Nous devons de faire pression au parlement européen et à la commission
européenne qui ont compétence en la matière pour édicter directives et règlements à l’échelle communautaire.
Installer des permanences de consommateurs dans les supermarchés L’installation de permanences d’association de protections des consommateurs dans les supers marchés permettrait de briser la barrière consommateur/ association de protection serait souhaitable pour la défense des droits des consommateurs. L’obligation de faire figurer en grande taille sur le produit vendu, un numéro ver t qui fournira les coordonnées d’associations de consommateurs serait aussi un moyen de renforcer le droit des consommateurs. Notre objectif n’est pas la sur-réglementation mais la transparence et l’accompagnement pour sensibiliser les consommateurs. En ef fet, si la voix des consommateurs a davantage été entendue au Parlement et si nous avons obtenu un cer tain nombre d’avancées (en matière de téléphonie mobile, d’encadrement de la publicité alimentaire et de santé), le Parlement européen se montre encore frileux. Compte tenu des nombreux projets consuméristes à venir et du probable renforcement de leurs pouvoirs si le traité de Lisbonne est adopté dans les mois à venir, il est crucial que les futurs députés européens soient les por tevoix des consommateurs.
Un « pacte consumériste » pour améliorer l’information des consommateurs Le Beuc (Bureau européen des unions de consommateurs), dont l’UFC-Que Choisir est membre fondateur, a lancé un appel à signer un pacte consumériste avec huit priorités concrètes dans les domaines de l’énergie, de l’alimentation, de la santé et de la sécurité des consommateurs, des ser vices financiers, de l’univers numérique, des contrats de consommation. Parce que agir ef ficacement et durablement passe par une coopération étroite entre les Etats membres dans l’élaboration d’une législation européenne plus précise afin de responsabiliser les consommateurs individuels, en par ticulier les jeunes, par l’intermédiaire de projets pédagogiques fondés sur les réseaux éducatifs existants et de campagnes d’information ciblées. Mais aussi d’améliorer la sécurité des consommateurs par une meilleure coopération entre les autorités des États membres, ainsi qu’entre l’UE et ses par tenaires commerciaux intéressés. Parallèlement, réviser la législation pour renforcer l’homogénéité et permettre aux consommateurs d’évoluer dans un environnement juridique plus prévisible. Enfin, il est essentiel de collecter et analyser des données sur les questions de consommation à l’échelle européenne afin d’orienter les priorités de la politique des consommateurs et d’améliorer la qualité du processus décisionnel européen.
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Quelles actions pour construire une alternative à la société du tout-consommation?
Modes de production durables, société sobre et conviviale, réglementation du crédit, de la publicité, de la grande distribution, et réduction, en général, de la sphère marchande au profit des activités non-marchandes (activités citoyennes, systèmes d’échange mutuel...) ... Comment ensuite, en tant qu’organisation politique de jeunesse et d’éducation populaire, por ter ce projet, le défendre, et le dif fuser, face à la superstructure sociale qu’est la société du tout-consommation? Actions militantes innovantes, propositions novatrices à l’échelle nationale ou locale ou encore projets communs à mener avec les par tenaires évoqués, en matière d’économie sociale : le but ici est de présenter quelques formes d’action originales de collectifs ou d’organisations de jeunesse. • «faites l’amour, pas les magasins» (jeunes socialistes/jeunes ver ts de Genève): Ces organisations de jeunesse se sont mobilisées lors d’une votation cantonale sur l’ouver ture des magasins le dimanche et le soir de 19 à 21h. Cette campagne militante et festive, «Faites l’amour, par les magasins !» avec des af fiches, des tracts, 19
des distributions de préser vatifs, bien relayée par la presse, a permis de por ter un vrai projet pour le temps libéré. • «Le vrai prix des produits» (Jeunes Socialistes du Finistère) Les jeunes socialistes bretons contactent les producteurs locaux pour connaitre les prix en vente directe (fruits, légumes, viande, lait) et installent un étiquetage sauvage des produits dans les supermarchés pour dénoncer la marge que prélèvent la grande distribution sur les produits, au détriment des revenus des producteurs. • «le jeu de l’oie des jouets sexistes» (mixcité) Ce collectif dénonce à travers des jeux de société le caractère sexiste des jouets de noël pour enfants qui enferment les garçons et les filles dans des couleurs, des attitudes, des rôles dans la société. • les actions anti-pub (résistance à l’agression publicitaire, déboulonneurs, casseurs de pub) La publicité, aux mains de multinationales, représente non seulement des milliards d’euros, mais aussi un outil de la société du tout-consommation qui construit du désir, engendre des déchets,
oriente la société et les compor tements... et envahit l’espace privé et public sans contrôle. Les collectifs précités proposent de limiter la taille des af fiches, tandis que d’autres collectifs tels que RAP utilisent des sif flets au cinéma lors des publicités, recouvrent les panneaux lumineux énergivores et dangereux pour les liber tés publiques (connections bluetooth) avec des réalisations ar tistiques. Nous pouvons aussi inciter les nombreuses collectivités de gauche à limiter par des règlements l’emprise de la publicité dans les villes, ou empêcher l’installation d’écrans publicitaires à tout va. • Bâtiments énergivores/ nuits sans lumière: Tous les bâtiments qui restent allumés, tant au dehors qu’au dedans, doivent légalement être éteignables depuis l’extérieur. Ces lumières représentent un gaspillage d’énergie énorme. Alors pourquoi ne pas les dénoncer avec de larges opérations d’extinction?
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Interdisons le crédit revolving !
Le crédit revolving est une forme de prêt distribué par des banques, des établissements de crédits ou par des distributeurs tels que Finaref, Cofinoga (grâce à des accords avec de grandes enseignes commerciales telles qu’Auchan, La Fnac, Dar ty, Ikea...), permet de mettre à disposition d’un emprunteur une somme d’argent sur un compte par ticulier ouver t auprès de l’établissement prêteur de ce crédit, de façon permanente et dont il peut disposer à sa guise. Cette forme de crédit, représentant 21% du marché pousse les plus précaires vers le surendettement. En ef fet la facilité d’obtention de ce type de crédit, due à l’absence de vérification de solvabilité dans 87% des cas pousse ainsi de nombreux ménages, dans un contexte de société du tout-consommation, à en em-
constate que 96% des dossiers de surendettement contiennent des crédits revolving qui représentent 70% des crédits non remboursés. Le client se retrouve alors pris au piège, ne rembourse plus que les intérêts d’emprunts et jamais le capital dû. Ce n’est qu’en passant par la suppression du crédit revolving, et de la publicité sur les crédits qu’on luttera durablement contre le surendettement des ménages les plus modestes et de l’usure excessive. Cette interdiction du crédit revolving proposée à de nombreuses reprises par les socialistes a été rejetée par la ministre de l’économie Christine Lagarde fin 2008 : Elle souhaitait plutôt rendre les prêts raisonnables. La politique économique du gouvernement montre ici ses limites : on ne peut durablement relancer l’économie et
prunter toujours plus pour consommer plus.
la croissance quand on empêche toute progression du pouvoir d’achat et de la consommation (augmentation des salaires, du SMIC, des minimas sociaux) et lorsqu’on ne conçoit qu’une économie d’endettement qui favorise for tement les plus riches (les prêteurs) et soutient une fois de plus la rente et le capital au détriment du travail et de l’emploi. La récente crise des subprimes aux Etats-Unis condamne les crédits démentiels et illimités.
Les for t taux d’intérêts exigés (15 à 20%) et révisables en cours de contrat ainsi que le fait que le volume de crédit disponible se reconstitue au fur et à mesure des remboursements ef fectués (c’est à dire qu’il se recharge: revolving) entraîne un impor tant risque d’insolvabilité. C’est ainsi que, selon le rappor t de la commission Neier tz, on 21
Le résultat a été une crise mondiale dont les économies se relèvent à peine. La gauche, en 2012, devra aller plus loin que la timide loi du 1er juillet 2010. Interdire le décrit revolving ne doit pas nous dispenser d’interroger les causes de son utilisation, qui frappe les publics les plus fragiles et pour qui ce type de crédit constitue souvent un dernier recours. Au-delà de la limitation de durée des crédits et de l’indication sur les relevés bancaires du montant restant, le taux d’usure doit baisser et de véritables prêts à la consommation aux par ticuliers doivent être facilités ainsi que les projets par ticuliers, sur tous les territoires, notamment délaissés. Si nous pouvons nous satisfaire de l’obligation de continuité de ser vice faite aux banques, sur la sor tie plus rapide du fichier des incidents de paiements, obliger les banques à clore les crédits revolving pour les personnes surendettées ne suf fit pas. Audelà d’une interdiction des publicités sur le crédit, d’un plafonnement des taux de prêts à la consommation, c’est d’une interdiction totale du crédit revolving que les Français et notamment les plus modestes ont besoin. Résolution du conseil national du 27 novembre 2010
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Encadrer drastiquement la publicité, pour réduire une sur-consommation destructrice pour l’environnement !
Reflet de la société de l’ultra-consommation et du marché roi, la publicité commerciale
société du paraitre et de la super ficialité. La société du tout-consommation n’est pas
doit aujourd’hui être encadrée et davantage réglementée. Tout comme la finance, elle a été laissée libre de tout contrôle de l’autorité publique, au point d’être devenue aujourd’hui l’activité mondiale au plus gros chif fre d’af faire, devant l’armement. Profitant du «temps de cer veau disponible» des citoyens sur les medias, s’imposant dans les paysages et dans les rues sur des vastes panneaux, elle soumet l’esprit critique des personnes en favorisant des désirs, en les incitant à consommer, en organisant une
seulement un danger pour la démocratie quand elle pousse à plus d’individualisme et à la satisfaction immédiate des désirs, elle est aussi destructrice pour l’environnement. Alliée au crédit, notamment revolving, et à l’obsolescence programmée des produits, elle produit une quantité phénoménale de déchets, directement (papier publicitaire, dont Leclerc promet la disparition... en 2020 !) et indirectement (en favorisant le rachat d’objets toujours plus neufs).
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37% des produits achetés ne sont utilisés qu’une fois ! C’est pourquoi, afin de construire une nouvelle société juste, citoyenne, respectueuse des consciences et formatrice de l’esprit critique, il est impératif de réduire l’espace publicitaire commercial et de le remplacer par un espace citoyen et associatif, permettant aux syndicats, associations, par tis politiques et autres corps intermédiaires de par ticiper plus ef ficacement à la vie citoyenne. Un temps de formation civique et citoyenne doit suppléer un temps de propagande commerciale : l’école doit toujours plus développer l’esprit critique et armer au décr yptage de l’information. Nous souhaitons l’abrogation du code de bonne conduite des entreprises en milieu scolaire et nous refusons que le ser vice public soit financé par la publicité. Pour les jeunes socialistes, l’autre développement, la démocratie revivifiée, l’égalité d’autonomie que nous por tons dans nos propositions passe par l’encadrement drastique de la publicité : taxation importante de ses activités, limitation de la taille des panneaux (proposition du collectif des déboulonneurs d’un format maximum de 50*70), interdiction des panneaux lumineux énergivores et un moratoire des collectivités territoriales de gauche sur la publicité dans l’espace public pour mettre en place de nouveaux règlements locaux de publicité. En matière d’espace privé, la publicité doit être encadrée dans les médias par des cahiers des charges rigoureux : interdiction de la publicité dans les programmes dédiés aux enfants, interdiction des publicités sexistes,
interdiction des publicités à caractère discriminant, notamment. A cet ef fet, une autorité indépendante pour contrôler la publicité doit être créée. L’expression publicitaire, qu’elle soit culturelle, associative, à but social, syndicale, politique ou commerciale doit être remise sur un pied d’égalité. Plus globalement, es jeunes socialistes souhaitent axer le débat sur la nécessité de mettre en œuvre de nouveaux modes de consommation : réduction des emballages, responsabilité élargie des producteurs pour organiser le recyclage, fiscalité écologique tout en favorisant l’accès des plus démunis aux ressources essentielles, à travers des prix progressifs (par exemple, pour l’eau). Nous dénonçons des « faux besoins » portés par des agences publicitaires qui sont un maillon essentiel du capitalisme financier qui menace aujourd’hui la planète par sa course au profit de cour t-terme. Résolution du conseil national du 27 novembre 2010
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Quels partenaires pour construire une alternative à la société de consommation ?
Les jeunes socialistes veulent imaginer de nouveaux modes de production et de consommation, et les construire avec des par tenaires extérieurs : le diagnostic de la crise énergétique, écologique, climatique ne suf fit pas, il faut aller de l’avant pour réfléchir aux valeurs de la société : Comment construire une société qui valorise moins le profil, et plus l’épanouissement individuel et l’émancipation collective ? Cela passe par le dépassement de la société du tout-consommation. Nous ne sommes pas seuls pour ébaucher un nouveau modèle de développement : des associations, des universitaires se sont penchés sur la question de la publicité qui crée le désir, du crédit qui asser vit, notamment les classes les plus populaires, ou encore de l’obsolescence programmée des produits. Voilà les acteurs avec qui nous pensons que, localement comme nationalement, il faut travailler, voilà les initiatives que nous jugeons intéressantes (sans être exhaustifs).
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Désobéissance civile les casseurs de pub : C’est une association, un mouvement de pensée qui rejette l’emprise de la publicité sur l’espace public et privé et plus largement la société du toutconsommation : casseursdepub.org Sommes-nous des « casseurs », des gens « pas bien dans leur tête », comme s’emploient à le faire croire les publicitaires ? Non, bien sûr. Au contraire, nous menons un combat non-violent fondé sur l’argumentation. Si nous sommes des « Casseurs de pub », c’est parce que la pub est une machine à casser. Une machine à casser la nature, l’humain, la société, la démocratie, la liber té de la presse, la culture et les cultures, l’économie ou encore l’éducation. Les publicitaires utilisent nos symboles pour rendre nos contemporains dépendants de la consommation. Ils manipulent les valeurs qui nous permettent de nous humaniser afin de nous faire acheter. C’est ainsi qu’ils réduisent notre citoyenneté à n’être qu’une citoyen-
neté d’achat. C’est ainsi qu’ils font basculer la société entière dans la consommation. Une société où la consommation n’est plus un moyen mais une fin en soi. La pub réduit à l’état de consommateurs malades et toujours plus voraces. Vous savez de quoi ont le plus peur les publicitaires ? Des gens qui réfléchissent ! « Keep them simple and stupid » (« Maintenez-les simplets et stupides »), disait Bill Benbach, le patron de l’agence de publicité DDB. Revenons au début. Pourquoi la pub est-elle une machine à casser la nature ? Parce que la pub pousse les gens à consommer toujours plus. La publicité ser t à inventer de faux besoins pour écouler la production toujours croissante d’objets du système industriel. La planète ne peut plus soutenir la boulimie des pays riches. Les ressources naturelles sont surexploitées pour produire ces objets qui deviendront autant de déchets polluants. Des hommes et des femmes politiques, des associations, des intellectuels, des citoyens luttent depuis longtemps pour réduire l’emprise de la pub dans la société. Il ne faut pas hésiter à les
rejoindre. Nous pouvons aussi entrer en résistance contre la société du tout-consommation en pratiquant la simplicité volontaire, en cultivant notre personnalité, notre vie intérieure, en nous engageant en politique pour le Bien commun. » Le Collectif des déboulonneurs (deboulonneurs.org/ ) lance une action d’envergure nationale contre le système publicitaire. Il s’est crée en 2005, en région parisienne. Il souhaite l’ouver ture d’un débat national sur la place de la publicité dans l’espace public et la réforme de la loi de 1979 encadrant l’af fichage publicitaire. Il souhaite qu’un nouveau droit soit enfin reconnu : la liber té de réception, dont le droit pourrait prochainement avoir une por tée constitutionnelle. Corollaire de la liber té d’expression, chacun doit être libre de recevoir ou non les messages diffusés dans l’espace public. Il propose pour cela que la taille des af fiches soit ramenée à 50 x 70 cm. Devant l’iner tie des pouvoirs publics, après de nombreuses années de travail sur le terrain légal, les déboulonneurs
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ont choisi la désobéissance civile symbolique pour aler ter l’opinion et amener les élus à faire évoluer la loi dans le sens de l’intérêt collectif. Ils utilisent la désobéissance civile pour se retrouver face aux tribunaux et ainsi créer des jurisprudences qui prennent par t au débat sur la pub. Par exemple, suite à une action de barbouillage d’un panneau publicitaire, la justice a du trancher sur l’aspect “légitime” ou “illégitime” de leur combat. Fin heureuse, elle l’a jugé légitime, et le collectif voit son action juridiquement crédibilisée.
Les chercheurs Le CRÉDOC (credoc.fr), Centre de Recherche pour l’Étude et l’Obser vation des Conditions de Vie, est un organisme d’études et de recherche au ser vice des acteurs de la vie économique et sociale. Depuis sa création, il y a maintenant plus de 50 ans, le CRÉDOC analyse et anticipe le compor tement des individus dans leurs multiples dimensions : consommateurs, agents de l’entreprise, acteurs de la vie sociale. Il a mis en place depuis 1978 un dispositif permanent d’enquêtes sur les modes de vie, opinions et
Dans l’entretien qui introduit l’ouvrage, Gorz indique qu’il est «devenu écologiste avant la lettre» par la critique du modèle de consommation opulent qui caractérise nos sociétés contemporaines. Il rend hommage ici à la deuxième figure qui a marqué l’évolution de sa pensée, Ivan Illich, par sa volonté de réhabiliter la valeur d’usage au détriment de la valeur d’échange. Gorz pense d’ailleurs que la décroissance de l’économie est en marche, mais pour lui, la question est de savoir si elle prendra la forme d’une crise catastrophique ou celle d’un choix de société auto-organisée, au-delà du salariat et des rappor ts marchands. http://www.alternatives-economiques.fr/ecologica-par-andregorz_fr_ar t_699_36449.html L’écosociétalisme : L’ écosociétalisme propose une alternative économique post-libérale, implique le déclin des systèmes financiers, boursiers et bancaires actuels. Il répar tit équitablement le pouvoir d’achat individuel, libère la monnaie en fonction des biens et ser vices produits, récupère immédiatement la monnaie lors de son utilisation finale. http://www.letransmuteur.net/unealternative-de-societe-l-ecosocietalisme/
aspirations des Français Baudrillard, « la société de consommation » (1970) : Ce sociologue analyse la consommation comme une manière de se dif férencier qui structure les sociétés occidentales et tient lieu de véritable morale Gorz : Ecologica (2008) est d’abord le témoignage d’un pionnier de l’écologie politique.
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Les initiatives Les slow cities : « Slow city » n’est pas une ville. C’est un concept. Un espace non vir tuel où le terme « conscience du temps » a remplacé « vivre à toute allure ». Conscience du temps, conscience des autres, de soi-même, de ce que l’on mastique…L’initiative « Slow city » est née en 1999 au nord de l’Italie
lorsque les habitants d’une petite bourgade viennent à refuser l’installation d’un McDo. Le mouvement touche l’Europe entière, conquis (rapidement !) plus d’une vingtaine de ville qui s’engagent et se labellisent « Slow city » puis se structure en réseau international, administré aujourd’hui par Paolo Saturnini, maire de Grève. Un manifeste « Slow city » voit le jour avec 70 recommandations et obligations : Mise en valeur du patrimoine urbain historique en évitant la construction de nouveaux bâtiments, Réduction des consommations énergétiques, Promotion des technologies écologiques, Multiplication des espaces ver ts et des espaces de loisirs, Propreté de la ville, Priorité aux transpor ts en communs et autres transpor ts non polluants, Diminution des déchets et développement de programmes de recyclage, Multiplication des zones piétonnes, Développement des commerces de proximité, Développement d’infrastructures collectives et d’équipements adaptés aux
handicapés et aux divers âges de la vie, Développement d’une véritable démocratie par ticipative, Préser vation et développement des coutumes locales et produits régionaux, Exclusion des OGM. http://slowmouvement.wordpress.com/slow-city/ Les sociétés d’échanges mutuels : Un exemple de consommation collaborative avec http://www.consommationcollaborative.com/13-conso-collaboration.html La consommation collaborative décrit la récente explosion des formes traditionnelles de par tage, troc, échange, location ou de don rendue possible par les nouvelles technologies et le web collaboratif ou 2.0. Elle ouvre la voie à de nouvelles possibilités de consommation moins consuméristes… L es objecteurs de croissance (voir fiche de lecture « petit traité de la décroissance sereine » de Serge Latouche)
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Les éco-villages : Le réseau mondial des écovillages, «communautés rurales ou urbaines qui appliquent un fonctionnent social solidaire et un mode de vie ayant un impact écologique réduit.
Les organisations Un syndicat agricole : la confédération paysanne. Elle milite pour une agriculture paysanne, respectueuse de l’environnement, de l’emploi agricole et de la qualité des produits. Avec le réseau Via Campesina, elle se bat pour une reconnaissance du droit à la souveraineté alimentaire. Avec cette revendication et sa par ticipation aux forums sociaux, la conf est un acteur impor tant au sein du mouvement social. Le syndicat est solidaire avec les paysans du monde entier face aux multinationales de l’agro-alimentaire. Il œuvre ajorité aux «agri-managers», pour un plafonnement par actif et depuis des années pour une régulation publique des marchés, seule solution pour permettre une formation du revenu par les prix. Militant avant tout pour que l’ensemble des paysans
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et paysannes aient droit à un revenu décent dans des conditions de travail acceptables et ce pour des paysans nombreux, dans une campagne active. «Pas de pays sans paysans», disait leur slogan. En travaillant avec les consommateurs (AMAP) et avec les producteurs (agriculture paysanne biologique), elle contribue à l’émergence d’un nouveau modèle de développement. Les associations de consommateur : elles sont chargées de défendre les droits des citoyens dans leur dimension de consommateurs, c’est-à-dire d’achat de produits. Elles peuvent les assister dans leurs litiges avec une entreprise ou un organisme, mais elles inter viennent aussi auprès des États et organisations internationales pour définir des protections ou des normes protégeant les consommateurs. Cer taines sont plus investies que d’autres dans une réflexion sur les modes de production et les modes de consommation. En France, 18 associations sont considérées comme représentatives : http://fr.wikipedia.org/wiki/Association_de_consommateurs
Fiche de lecture : Petit traité de la décroissance sereine, Serge Latouche (2007)
Economiste français né en 1940, Serge Latouche, contributeur historique de la revue du MAUSS (Mouvement anti-utilitariste des années 1980) est le chantre du concept de décroissance, qui remet en cause la croissance économique, ses critères, ses objectifs, ses conséquences, et prône un post-développement qui chercherait une alternative au « libéral-productivisme ». Directeur du groupe de recherche en anthropologie, épistémologie et économie de la pauvreté à l’Université Paris 11 Sud, il s’est rendu célèbre par sa dénonciation du développement économique, même durable. Face à la crise économique, sociale, politique, environnementale, portée par le capitalisme, le développement durable suf fit-il pour sauver la planète? La définition de nouveaux critères pour définir la croissance suf fira t’elle à assurer l’essor d’un nouveau modèle de développement? Le choix que font les par tisans de la décroissance va plus loin: changer profondément les modes de production et de consommation, revoir de fond en comble les valeurs portées par la société! Vaste programme, disent cer tains, qui objecteront l’impossibilité de renoncer à la croissance, dénonceront cette
lubie moyenâgeuse qui nous ramènerait à la bougie et aux charrettes, ou, ce qui est plus per tinent, équivaudrait à expliquer aux pays du sud qu’ils n’ont pas le droit d’accéder au niveau de vie des pays du nord.
Une planète qui ne peut plus supporter l’ « american way of life » La Terre n’en est pas capable, puisqu’il faudrait 9 planètes et leurs ressources pour permettre aux 7 milliards de terriens d’accéder au niveau de vie des américains. Le but pour la gauche, c’est de décor tiquer ce concept de décroissance qui n’est pas le rêve irresponsable de la régression mais la définition d’un monde nouveau, de s’approprier ses arguments, et d’enrichir le débouché politique en précisant le nouveau modèle de développement, en donnant un contenu à la société solidaire qui se substituerait à la société du tout-consommation. Que dit Latouche, que fait-il retenir de ses arguments, et lesquels sont réfutables? On 30
peut d’abord retenir une excellente analyse qui s’appuie sur des sociologues, des philosophes et des économistes sur la «société de croissance»: Marris, Baudrillard, Kempf et Gorz sont cités pour préciser ses contours. Ses ressor ts d’abord: l’addiction à la croissance à travers «la publicité, qui crée le désir de consommer, le crédit qui en donne les moyens, et l’obsolescence qui en renouvelle la nécessité». Latouche profile l’ennemi numéro 1, la publicité, deuxième budget du monde (après l’armement) avec 500 milliards dépensés chaque année pour envahir l’espace privé et public.
Les 8 R de la société conviviale Latouche définit les 8 R qui permettront de passer de la société de consommation à la «société conviviale» qu’il appelle de ses voeux, une société citoyenne du temps libéré, libérée du travail aliénant et d’une société de consommation frustrante: • «réévaluer» pour que l’homme soit plus un jardinier de la nature que son prédateur. • «Reconceptualiser» pour donner la priorité à l’humain sur l’économique et le profit, pour réfléchir au temps de vie. • «restructurer», plus concret: quelle reconversion de l’appareil productif au ser vice des nouvelles valeurs de la société conviviale? Un exemple est proposé : transformer les moteurs de voiture en récupérateur d’énergie. • L’auteur propose de « redistribuer » les richesses entre les générations, entre les 31
classes, et sur tout entre les continents et aborde la problématique essentielle de la dette écologique: le sud fournit les aliments du bétail du nord, détruit ses forêts pour cultiver du soja...Il faut redistribuer les droits de tirage sur la biosphère ! • Latouche aborde la question de la «relocalisation», pour revenir aux produits locaux, relocaliser l’emploi, inclure dans les produits leur coût écologique, pour prôner une réduction globale de l’empreinte écologique. • Il parle de « réduction » en indiquant un nombre frappant : 80% des biens produits ne sont utilisés qu’une fois. • L’auteur évoque aussi la question du « recyclage », notamment à travers l’exemple ver tueux de l’entreprise Xerox qui recycle tous les composants usagers. Cer tains aspects du discours de Latouche sont plus discutables : doit-on limiter la taille des villes à 60 000 habitants comme le propose les slow cities ? Doit-on empêcher les gens de voyager alors que la majorité des français, par exemple, sont exclus du droit aux vacances ? Doit-on organiser les décisions et la relocalisation des activités autour de bio-régions de proximité qui semblent occulter le rôle nécessaire des états, des organisations continentales et internationales, pour organiser la société...au profit du projet des «communes» cher aux anarchistes! La définition de «besoins acceptables» ne va t’elle pas à l’encontre des liber tés individuelles? L’auteur en est conscient, puisqu’il dénonce le danger d’une solution «autoritaire» à la crise écologique.
Une reconversion rapide de l’économie est possible L’auteur propose les moyens de la mise en œuvre de l’ «utopie concrète» qu’est la décroissance. Il explique, à travers l’exemple des Etats-Unis en 1942 que la reconversion rapide d’une économie nationale est réalisable. De nouveaux secteurs d’emploi apparaitraient pour économiser l’énergie, isoler les logements, pour le recyclage ou la reforestation. Il propose de pénaliser les dépenses de publicité, taxer le travail des machines, tout en occultant comment un nouveau protectionnisme dans une économie mieux régulée pourrait favoriser la dif fusion de normes sociales et environnementales plus contraignantes. Il dessine une société du temps libéré où le loisir, libéré de la consommation, permettrait à tous de créer, d’échanger, d’agir comme citoyen, et serait tout aussi considéré qu’un travail qui dure aujourd’hui moins longtemps (moins d’un cinquième du temps éveillé contre un tiers au début du siècle) mais prend plus de place dans la vie. En conclusion, le chantre de la décroissance a le mérite de la clar té: il ne s’accommode ni du capitalisme...ni du développement, et notamment de son nouveau modèle por té par les socialistes. Ainsi, il renvoie dos à dos le socialisme productiviste et le capitalisme libéral (dont il dénonce non seulement les conséquences, mais aussi l’esprit) comme les deux visages d’une même «société de croissance». L’auteur, avec les systèmes d’échange mutuel, la monnaie de ser vice, l’autoproduction, remet en cause l’écono32
mie, et ses principes les plus fondamentaux. Comme socialistes, nous pouvons nous retrouver dans l’analyse d’un monde, d’une économie, d’une société qui marche sur la tête. Nous pouvons nous inspirer de propositions for tes pour restructurer l’économie et repenser la société à travers une nouvelle politique du temps. Mais en centrant tant notre analyse que nos propositions sur une puissance publique qui organise et régule ce monde, nous nous éloignons du chemin des décroissants qui ne placent pas cet acteur au centre de leur système, qui n’ont pas de proposition pour améliorer les conditions de travail pour rendre celui-ci plus épanouissant, réduire les inégalités nord-sud (à par t l’auto-
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nomie locale !) ou encore pour réguler les échanges internationaux (protectionnisme par exemple). Ils posent de bonnes questions, notamment en remettant en cause une société de consommation dans laquelle les socialistes ne prennent pas assez de recul (pour demander par exemple plus de pouvoir d’achat), mais nous ne sommes pas forcément d’accord sur les réponses données. Reste, avec eux, à développer des aspects encore trop flous de cet ouvrage: Au delà de la dette écologique, quel avenir pour les Suds? Si la croissance est néfaste, si le développement est discutable, alors quelle évolution pour la société du temps libéré?
Fiche de lecture : Adieu la croissance ! Bien vivre dans un monde solidaire, Jean Gadrey (2010)
La croissance a été présentée comme la solution à tous les maux. Au chômage, aux retraites, à la dette publique : un seul remède : la croissance ! A la crise écologique encore : la croissance ver te ! Jean Gadrey, économiste et professeur émérite à l’Université de Lille 1 défend dans son ouvrage la thèse opposée. En ef fet, il soutient que la croissance est un concept attaché à un monde en voie de dépérissement. Le culte de la croissance est fondé sur l’oubli des principaux enjeux sociétaux : toujours plus de quoi, pour qui et avec quelles conséquences? La croissance est désormais un facteur de crise, une menace pour la planète et un obstacle au progrès. Le capitalisme a réussi à ancrer dans les esprits l’idée d’une relation étroite entre croissance et progression universelle du bien-être. Or, il ne nous est pas interdit d’envisager d’autres hypothèses ! L’auteur formule une véritable invitation à se débarrasser de ce culte. Faut-il pour autant nous résoudre à une austérité punitive ? C’est le chemin d’une autre prospérité qui est ici proposé, plus juste, moins violente et donc réellement durable. Une « prospérité sans
croissance » serait-elle applicable en tous cas dans les pays riches au sens usuel de la richesse économique ? Peut-on aller vers un plein-emploi de qualité, garantir une bonne protection sociale et cela sans croissance ? Il dénonce par la fausse bonne idée qu’est la croissance ver te. Le phénomène d’engouement pour cette dernière soulève, d’après Gadrey, une problématique : Faut-il encourager la croissance infinie de leur production, ou faire d’autres choix pour une informatique accessible, produite et utilisée autrement, recyclable sans trop de ressources, à très longue durée de vie, ce qui est très mauvais pour les chif fres de croissance ? D’après l’auteur, si l’on passait d’une société de croissance à une société solidaire et soutenable, cette bifurcation serait bénéfique pour l’emploi et la qualité de vie globale.
Le mieux être déconnecté du plus avoir : revoir les indicateurs de bien-être. L’auteur dénonce la sacralisation du PIB en 34
tant qu’indicateur de richesse, et de bien-être qui se révèle d’après lui aujourd’hui obsolète. Il prend l’exemple de l’absence d’évolution de la satisfaction de vie moyenne tandis que l’abondance matérielle a, elle, progressé de 75% entre 1973 et 2005. Pour lui, l’indice de développement humain est plus adapté, mais montre aussi des failles. En ef fet, il réfère par exemple à l’espérance de vie qui évolue en fonction de la qualité du système de santé national. Mais l’on obser ve que pour cer tains secteurs comme la santé, ou encore l’éducation, le toujours plus n’est pas forcément le toujours mieux. L’accès au système de soin, et à la médecine est un facteur qui ne compte qu’à hauteur de 20 à 25%. La richesse matérielle du pays impor te bien sûr dans la constitution d’un bon système de soin, mais les modes de vie du modèle productiviste influent négativement sur la santé. La société de ser vices qui s’est par tout développée en s’appuyant sur un productivisme insoutenable est aujourd’hui, sans le vouloir, une société hypermatérielle. Parallèlement, on constate que les variables de développement humain, comme la cohé-
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sion sociale, la pauvreté, les inégalités économiques ou politiques entre hommes et femmes ne sont pas corrélées au PIB/heure. En France, on assiste à la disparition de toute corrélation au delà du seuil (entre un tiers et deux tiers du PIB/h). Cela signifie que l’on peut atteindre les mêmes résultats avec nettement moins de richesse économique ! Les variables de développement ou de progrès font abstraction de la durabilité du développement. Sur le climat, le PIB mondial a été multiplié par 3, tandis que les émissions de gaz à ef fet de serre ont presque doublé. Les scientifiques signalent qu’il ne faudrait pas dépasser le taux de disparition annuelle de 10 espèces pour 10 millions. On en est à plus de 100.
Le réveil Les économistes commencent à se saisir de ces questions même s’il s’agit encore d’une petite minorité. Nicholas Stern déclarait en 2009 au quotidien britannique The Guardian : « Les pays riches vont devoir oublier
la croissance s’ils veulent stopper le changement climatique. ». Mais les revendications atteignent aussi la société civile : chercheurs, intellectuels, chercheurs et écologistes l’avant-garde des « objecteurs de croissance » - dont les réflexions fournissent des bases alternatives. La commission Stieglitz quant à elle institutionnalise la séparation entre la croissance et la progression du bien-être.
Adieu la croissance ! Est ancré dans les esprits l’idée d’une relation étroite entre croissance et progression universelle du bien-être. Ses acteurs dominants savent que la foi en la croissance est la première condition de l’attachement au système productiviste. D’après Gadrey, la croissance ne serait pas la solution mais le problème (en tous cas, l’un des plus importants) et il faut lui dire adieu, au moins dans les pays économiquement riches. Mais sans regret : La fin de la croissance, ce n’est pas la fin du progrès social, ce n’est pas la fin de l’innovation ni celle du dynamisme économique ! Prospérité : faire en sor te que les choses aillent bien, ou mieux, au fil du temps,
sans connotation d’abondance matérielle nécessaire. Ce livre est consacré aux perspectives d’une autre trajectoire, aux contours d’une autre modernité, au bien-vivre dans un monde soutenable, et à ce qu’il faudrait entreprendre sans tarder pour enclencher ce changement. L’emploi est aujourd’hui beaucoup plus menacé par le productivisme « croissanciste » que par le chemin visant la soutenabilité écologique et sociale. Mais, pour ces scénarios alternatifs post-croissance, une condition est nécessaire. C’est la for te réduction des inégalités sociales, dans le monde et dans chaque pays. C’est la condition sinéquanone à la réalisation des objectifs de reconversion, en par ticulier concernant la crise écologique. Cette condition impérative n’est toutefois pas la seule : un « régime post-croissance » dans une société soutenable est incompatible avec le capitalisme financier et actionnarial encore dominant, qui nous a enfoncés dans une crise d’autant plus durable que rien n’a été fait pour réduire le pouvoir de nuisance de la finance libéralisée. La question de la capacité d’un capitalisme réformé à nous sor tir de la zone des séismes à répétitions pose même l’économiste chevronné.
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