Enoncé théorique - Une densité perméable à la biodiversité

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Enoncé théorique de Master 2014 Une densité perméable à la biodiversité - Que peut-faire l’architecte? Julia Magnin


Remerciements

Nathalie Baumann pour son soutien et ses visites guidées Séverine Evéquoz, Ewa Renaud et Claire Méjean pour leurs conseils Pierre Aysanoa, Pierre Lafontaine et Pascal Martin pour leur disponibilité Pierre-André Magnin pour son oeil de lynx


Sommaire

I. Introduction

Motivation: un besoin de nature............................................................... p. 5 Pas de grande biodiversité sans sol fertile ............................................... p. 5 Pourquoi s’intéresser à la ville? .................................................................. p. 5 Pourquoi s’intéresser à Genève? .............................................................. p. 6 Nature et ville sont-elles compatibles? .................................................... p. 6 Hypothèse .................................................................................................... p. 9

II. Cadre de référence

Définitions ..................................................................................................... p. 11 Nature ...................................................................................................... p. 11 Biodiversité............................................................................................... p. 11 Diversité.................................................................................................... p. 11 Verdure .................................................................................................... p. 11 L’eau ........................................................................................................ p. 11 Ecosystème urbain ................................................................................. p. 11 Services écosystémiques ....................................................................... p. 12 Biotope..................................................................................................... p. 12 Nature en ville ......................................................................................... p. 12 Densité ..................................................................................................... p. 13

III. Genève et la nature

Relation entre la ville calviniste et la nature ............................................ p. 15 XVIe et XVIIe siècle ................................................................................... p. 15 XVIIIe siècle ............................................................................................... p. 15 XIXe siècle ................................................................................................. p. 18 Première moitié du XXe siècle ............................................................... p. 18 Seconde moitié du XXe siècle ............................................................... p. 18 XXIe siècle ................................................................................................. p. 18

IV. Que peut-faire l’architecte?

L’importance de l’architecte .................................................................... p. 25 Etudes de cas .............................................................................................. p. 26 Eco-quartier de Viikki, Helsinki ............................................................... p. 26 Îlots sud de Vauban, Freiburg im Brisgau ............................................. p. 32 Supermarché de Basel Stücki, Bâle ..................................................... p. 36 Synthèse ....................................................................................................... p. 42 Six clefs de réflexion .................................................................................... p. 43

V. Application sur une zone villas de Thônex (GE)

Processus de choix de site ......................................................................... p. 45 Analyse ......................................................................................................... p. 49

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I. Introduction

lui doit notre nourriture, l’épuration de notre eau, et l’existence de tout ce qui vit à la surface des terres. Dans une poignée de sol fertile, il y a davantage d’organismes vivants qu’il y a d’êtres humains sur la planète (Leutert, 1995). Il a fallu des siècles pour que le sol se constitue, et il doit être reconnu comme un organisme vivant très complexe et fragile (Poffet, 2011). Or, on détruit le sol en l’imperméabilisant sous le béton et le bitume, en le compactant sous le poids des engins agricoles et de chantier, en y ajoutant trop d’engrais et de pesticides, ou encore en y déversant des polluants directement ou indirectement avec la pollution de l’air. La destruction du sol menace de nombreux habitats, avec leur faune et leur flore. En Suisse, plus d’un tiers des 50’000 espèces connues d’animaux, de plantes de champignons et de microorganismes ont déjà subit de fortes pertes. Leur rythme de disparition est 100 à 1000 fois plus élevé que la cadence d’extinction naturelle. (Brochure OFEV, 2010). Les derniers îlots de biodiversité épargnés par l’urbanisation voient leur qualité écologique se dégrader jour après jour, car l’expansion urbaine les isole. Pour renverser cette tendance, il faudrait considérer la faune et la flore au même titre que les humains dans les projets de planification, d’urbanisme et d’architecture. C’est-à-dire considérer qu’à part les êtres humains, d’autres espèces doivent pouvoir se déplacer à travers le territoire, y trouver de l’eau et de la nourriture, ainsi que des espaces pour se reposer, se reproduire et passer l’hiver.

Motivation: un besoin de nature

En Suisse, la plupart des citadins aiment passer leurs loisirs à la montagne, se balader en forêt, ou pique-niquer au bord d’un lac paisible. Parfois, ils prennent aussi l’avion en quête de beaux paysages lointains. En fait, il s’agit à chaque fois de faire le plein de nature: on s’échappe de la ville, dans le but de retrouver ce qui y a été écarté. Tout le monde est d’accord: notre qualité de vie serait bien meilleure, si la nature que nous allons chercher hors des villes pour nos loisirs faisait aussi partie de notre environnement quotidien. Il ne s’agit pas simplement d’avoir plus de verdure sur le chemin de l’école ou du travail, mais aussi davantage de vie sauvage: des oiseaux qui chantent à notre réveil, des papillons qui butinent les fleurs du balcon, des arbres qui colorent et parfument les rues au fil des saisons – avec des écureuils qui bondissent dans les branches! L’espace urbain à bâtir est déjà construit à 80%. Alors comment faire pour donner aux citadins la nature à laquelle ils aspirent? Comment lui faire davantage de place en ville dans les processus de planification, de conception, de construction, d’aménagements extérieurs et d’entretien? Et quel rôle peut jour l’architecte? C’est à ces questions que ce travail de Master essaie de répondre.

Pourquoi s’intéresser à la ville?

Pas de grande biodiversité sans sol fertile

Il y a une nécessité à s’intéresser à la ville, puisque 80% de la population européenne vit aujourd’hui en ville. De plus, alors qu’au XXe siècle la Suisse a connu une période d’exode urbain – on rêve de quitter la ville pour s’installer dans une villa individuelle – au XXIe, la tendance est au retour de l’habitat en ville. Cependant, comme la demande de logements est largement supérieure à l’offre, il n’y a pas d’autre choix que de densifier les villes, si on veut préserver le sol fertile. D’ailleurs, selon une enquête de Pro Natura, la population n’a rien contre des villes plus denses, à condition que les espaces verts se développent aussi (enquête de Pro Natura, 2013). Bien sûr, dans une ville qu’on densifie, la superficie des espaces verts ne peut pas être plus étendue, mais on peut leur donner un aspect plus naturel

Jamais la population humaine n’a été aussi élevée. Si la planète compte aujourd’hui plus de 7 milliards d’êtres humains, elle en attend 9 milliards en 2050. Les impacts de cette croissance démographique se mesurent aussi en Suisse. Chaque année, la population du pays s’agrandit de 70’000 personnes, ce qui équivaut à peu près à la ville de Saint-Gall (Lezzi, 2012). En 12 ans, les surfaces nouvellement bâties sont aussi grandes que les lacs de Morat et de Neuchâtel réunis (Pro Natura Magazine, nº4, 2012). Ainsi, les villes suisses ne cessent de s’étendre, transformant le territoire en une immense agglomération. Or, cette expansion fragmente et détruit le sol fertile. Ce sol est une ressource non renouvelable, et pourtant nécessaire à la vie: on

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et plus riche en biodiversité, et multiplier les petits coins sauvages: toitures végétalisées, ronds-points, pieds d’immeuble, pieds d’arbre, parkings etc. Il faut donc penser la ville comme une articulation entre nature et culture, et trouver un équilibre entre les deux, afin de pouvoir garantir les services écosystémiques qui la font vivre (voir page 12).

Pourquoi s’intéresser à Genève?

Avec 470’000 habitants pour 282,5 km2, Genève est le canton aux densités de population et de constructions les plus grandes du pays. Toutes deux exercent une grande pression sur la biodiversité locale. Sa zone bâtie, qui tend à s’étendre, représente 30% du territoire (Programme Nature en ville, DGNP). Pourtant, le canton est parvenu à conserver beaucoup d’espèces souvent rares et menacées au niveau régional et national. Cette biodiversité, méconnue de la plupart des citoyens, contribue pourtant directement à leur qualité de vie (Stalder, 2013). Genève tient à sa biodiversité et le prouve en étant le premier canton à se doter d’une loi sur la biodiversité (Lois genevoises sur la biodiversité M515 Lbio, 2012) qui comporte un article intitulé « Encourager la nature en ville ».

Nature et ville sont-elles compatibles?

Avant l’ère industrielle et son explosion démographique, les villes et les villages étaient des enclaves sur un territoire composé de champs, de forêts, de bosquets et de cours d’eau libres. Depuis lors, les agglomérations se sont tellement étendues, que ce sont elles qui enclavent désormais la nature. Il est finit le temps où on opposait ville et nature: on a pris conscience que la ville survit grâce aux écosystèmes qu’elle grignote. C’est en favorisant la nature au coeur même de la ville qu’on peut répondre à la plupart des défis de la vie en milieu urbain. Améliorer la qualité de l’air Les arbres en ville ont un effet positif sur la qualité de l’air. Ils permettent de diminuer une partie des oxydes d’azote (NOX), du monoxyde de carbone (CO) et de l’ozone (O3) qui est un un polluant important en saison estivale. Ils facilitent aussi la fixation des particules fines dans leur feuillage, telles que les poussières des pots d’échap-

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Géographie de la Suisse par Joël Chételat et Pierre Dessemontet

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Améliorer l’efficience énergétique La végétation permet de refroidir les villes et donc de diminuer les besoins en climatisation durant l’été. Ces derniers consomment énormément d’énergie électrique, et participent directement au réchauffement des villes (au total, ils produisent davantage de chaleur que de froid). Ce point permet aussi d’être en accord avec la Stratégie énergétique 2050 de la Confédération, dont la réflexion a débuté en 2011, après l’accident de Fukushima.

pement, des pneus et des freins de voiture, ainsi que les fumées. Les grands arbres sont les plus efficaces pour rendre ces services, mais en hiver, leur efficacité baisse au moment où ils perdent leur feuillage. Améliorer le bien-être, malgré la densification Vivre dans un grand et beau jardin avec des animaux paisibles est un rêve collectif, encré dans nos religions. Ainsi, les oiseaux, les papillons ou les hérissons font partie de la cité idéale. Or, qui dit « petits animaux », dit « végétation indigène sauvage et sol naturel ». En plus de ménager les poumons des citadins, les espaces naturels facilitent les rencontres et les jeux d’enfants. Des petits plaisirs non quantifiables, tels que faire son jogging dans un parc, se prélasser au bord du lac, ou écouter siffler un merle ont des effets positifs sur l’humeur des habitants; ils participent au bien-être général malgré la densification. Les grands arbres assurent aussi l’ambiance sonore: ils étouffent les bruits urbains, et offrent des bruissement de feuilles, des chants d’oiseaux et des stridulations de sauterelles.

Adopter la sobriété comme mode de vie La sobriété – c’est-à-dire éviter de dépenser de l’énergie, et pas seulement l’utiliser avec efficience – fait partie de cette stratégie. Implanter davantage de nature en ville permet de créer de nouveaux paysages de proximité: une voie verte à emprunter en sortant de chez soi, une plage où se baigner au coeur de la ville, un mur de pierre sèche où observer des lézards... Ce sont autant de nouvelles qualités spatiales que l’on devait auparavant chercher hors de l’agglomération, en créant des nuisances dues aux déplacements.

Favoriser les contacts sociaux entre les habitants Les citoyens peuvent même participer au développement et à l’entretien des espaces verts plus ou moins naturels, à l’exemple des potagers urbains, organisés selon une charte écologique. Ils peuvent aussi favoriser la petite faune par leurs pratiques d’entretien des pieds d’immeuble et des jardins (par exemple en suivant les bonnes pratiques de la Charte des Jardins). Ces activités favorisent les contacts sociaux entre habitants. En multipliant les lieux où ces activités sont possibles, on donne autant de chance à la vie sociale.

Mieux gérer les eaux de pluies Plus de 75% de la surface des villes est imperméable, contre moins de 10% à la campagne (Baumann, 2011). Sur le béton et le bitume, les eaux de pluie ruissellent au lieu d’être infiltrées, et elles entraînent les polluants urbains (micropolluants, poussières fines, petits déchets) vers les canalisations. Végétaliser une partie des surfaces de la ville permet non seulement de ralentir le ruissellement des précipitations, mais aussi d’infiltrer davantage d’eaux dans le sol, ce qui limite la pollution des cours d’eau et du lac.

Limiter la surchauffe estivale des villes Comme on a pu le voir durant la canicule de 2003, les villes sont menacées par la surchauffe estivale. Ceci est dû au réchauffement climatique et à la quantité de surfaces minérales qui stockent la chaleur du soleil et qui la rayonne durant la soirée, empêchant la ville de se refroidir naturellement. Laisser plus de place à la végétation en milieu urbain, c’est permettre l’évapo-transpiration et l’ombrage, qui contribuent à rafraîchir l’atmosphère des villes (toits végétalisés, façades végétalisées, parkings à la surface perméable).

Protéger la fertilité du sol Même si trop peu de gens s’en soucient, la fertilité du sol est une vraie richesse. C’est d’elle que dépend notre survie. On peut la protéger non seulement en évitant l’expansion des villes et le mitage du territoire, mais aussi en intervenant judicieusement en milieu urbain: ne pas imperméabiliser ce qui n’a pas absolument besoin de l’être; protéger la terre lors des chantiers; bien choisir les plantes et les méthodes d’entretien; éviter d’y déverser des toxiques (pesticides, hydrocarbures, excès d’engrais, suintement des canalisations en cuivre

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Hypothèse

etc.) Un sol sain et vivant est nécessaire pour assurer une grande biodiversité et la productivité des potagers urbains. Il faut se rappeler que, même en ville, il faudra peut-être un jour cultiver à nouveau les espaces verts pour se nourrir.

L’architecte est capable de transformer le milieu urbain en un habitat plus dense, plus naturel, plus riche en biodiversité et plus agréable à vivre.

Maintenir la biodiversité pour davantage de résilience Implanter des espèces végétales indigènes et sauvages au sein de la ville est nécessaire au développement de la petite faune. Plus la flore est diversifiée, et plus la faune le sera aussi. Il est aussi important de maintenir et de créer des habitats naturels variés. Plus la biodiversité est grande, et plus les espèces sont capables de réguler les épidémies, les attaques de parasites ou la prolifération de certaines d’entre-elles. Par exemple, l’attaque de pucerons sur des rosiers décoratifs peut être contenue par des mésanges qui s’en nourrissent. Si, dans une haie paysagère, un arbuste est victime d’une maladie, d’autres espèces peuvent le remplacer. Ce qui n’est pas le cas dans une haie composée d’un seul type végétal. Les espèces sauvages et indigènes ne nécessitent généralement pas de traitements, contrairement aux espèces cultvées ou exotiques.

L’hypothèse repose sur le principe que la nature en ville constitue un potentiel d’amélioration du développement urbain, selon les enjeux décrits plus haut. La première partie de ce travail est consacrée à la définition de la nature en ville et des différents termes qui l’accompagnent. La deuxième partie traite de l’évolution à travers l’Histoire de la nature dans la ville de Genève. La troisième aborde les moyens dont dispose l’architecte pour intégrer la nature à son art. Elle analyse trois exemples d’intégration de la nature, à trois échelles, dans le but d’en tirer une stratégie spatiale et architecturale pour l’élaboration d’un nouveau projet. Dans la quatrième et dernière partie, une zone villas à densifier, située à Thônex (Genève), est analysée en tenant compte des aspects naturels et de la biodiversité.

Réapprendre les sciences naturelles On ne protège bien que ce qu’on connaît bien. Il est donc important qu’on revalorise les sciences naturelles. Heureusement, dans le nouveau programme d’études romand (PER) destiné aux écoles obligatoires, on demande aux enseignants d’observer les plantes et les animaux directement dans la nature. En prévoyant des aménagements extérieurs plus naturels autour des écoles, on peut placer les objets d’études directement dans l’environnement des élèves (voir la renaturation des extérieurs du collège de Perrosalle, à Ollon, débutée en 2013). Il faut avouer qu’il y a peu d’architectes capables de reconnaître les espèces d’oiseaux et d’arbres!

« L’être humain est un être de sol. Il partage sa naturalité avec le sol. Il est inimaginable sans le sol. Mais le sol peut exister sans nous. » Marcel Liner, responsable de la politique agricole chez Pro Natura

« Nos bâtiments ne sont pas abiotiques. Il n’est qu’à observer leur colonisation par des mousses et lichens, puis des cortèges d’espèces végétales pionnières – ou par certains oiseaux rupestres. » Emmanuel Lierdeman, professeur de gestion de la nature à l’Hepia

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II. Cadre de référence

Contrairement à la diversité (voir plus bas), la biodiversité est difficile à estimer pour un lieu donné. Il est par contre possible d’estimer son état grâce à des indicateurs qualitatifs ou quantitatifs, par exemple par la présence ou l’absence de certains papillons (qualitatif), ou par le nombre d’individus (quantitatif).

Définitions

Diversité La diversité caractérise la multiplicité d’espèces différentes présentes dans un milieu. On peut avoir une grande diversité dans un milieu pourtant peu naturel, comme par exemple dans un jardin botanique: il y a de nombreuses plantes issues du monde entier, mais peu d’espèces sauvages indigènes. De plus ces plantes figurent à peu d’exemplaires, ce qui réduit la résilience du système. Dans un jardin botanique, il y a donc beaucoup de diversité, mais peu de nature et peu de biodiversité.

On ne peut pas parler de nature en ville sans utiliser quelques termes spécifiques. Le concept de nature lui-même varie selon les milieux professionnels qui l’utilisent. Ci-dessous figurent les définitions de certains d’entre-eux, au sens où il faut les entendre dans ce travail. Nature La nature est l’ensemble des choses, qui, dans l’univers, se produisent spontanément, sans intervention humaine. Autant dire qu’en Suisse, il n’existe plus de lieux naturels – c’est-à-dire sauvages – à proprement parler, puisque même les forêts et les prairies alpines sont le résultat d’une gestion humaine. A l’état naturel, le Plateau suisse et la moyenne montagne seraient recouverts d’une immense forêt, offrant bien moins de biodiversité que les paysages ouverts et variés créés par l’agriculture et l’élevage. Ainsi, l’intervention humaine sur le paysage peut favoriser la diversité des espèces. Si la nature dans son état primaire n’existe plus en Suisse, ce mot est utilisé pour désigner un ensemble d’espèces sauvages et indigènes qui existe indépendamment de l’Homme: plantes, animaux, champignons et microorganismes.

Verdure La plupart des citadins confondent verdure, nature et biodiversité. La verdure est la couleur verte de la végétation, extrapolée pour désigner tous les composants d’un « espace vert »: arbres, pelouse, massifs. On peut avoir beaucoup de verdure sans avoir de nature et de biodiversité, comme c’est le cas d’un gazon entouré d’une haie de laurelles. L’eau L’eau est essentielle au développement de la nature en ville. Les points d’eau, grands ou petits, permettent aux animaux de boire, de trouver des proies et de se reproduire (batraciens, libellules, etc.) Même les arbres peuvent offrir des réserves d’eau, dans les creux de leurs branches et de leur tronc. A l’échelle d’un insecte, une goutte de rosée sur une feuille constitue aussi une réserve d’eau. Une bonne gestion de l’eau et des écoulements est essentielle à tout projet architectural qui veut favoriser la nature en ville.

Biodiversité La biodiversité désigne une réalité complexe, qu’il faut entendre comme « richesse de la vie ». Elle a trois composantes: la diversité des écosystèmes, la diversité des espèces, la diversité génétique. Selon la Stratégie Biodiversité Suisse, cette dernière détermine la capacité d’adaptation des espèces aux changements de leur environnement (résilience). Le risque d’extinction est plus élevé pour les espèces qui ont une faible diversité génétique. Aujourd’hui, elle est donc déterminante pour la survie des espèces qui doivent faire face à la destruction de leur habitat, à la pollution et aux changements climatiques.

Ecosystème urbain Un écosystème est formé d’une communauté d’êtres vivants d’espèces différentes, qui interagissent entre eux et avec leur environnement. Pour se maintenir, il a besoin d’énergie, et c’est généralement

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la lumière du soleil. L’écosystème urbain se caractérise par la densité humaine et ses sources énergétiques sont principalement le pétrole, le gaz naturel, le charbon et l’électricité. L’Homme en est l’espèce ingénieur et structurante, c’est-à-dire que sa disparition entraînerait l’effondrement du système. La ville est majoritairement minérale, rendant la vie d’autres espèces difficile. En cela, elle se rapproche de l’écosystème d’un désert ou d’une grotte (Liederman, 2010).

le soleil et arrosée par la pluie, peut servir de lieu de vie à certaines espèces d’oiseaux – et en toute sécurité puisque les êtres humains, les chats et les chiens n’y ont pas accès. L’ensemble des biotopes d’une cité peut former un réseau naturel que les espèces sauvages empruntent pour se déplacer à travers le territoire. Plus ce réseau est dense, et plus elles auront de la facilité à se mouvoir – et on ne parle pas que des animaux, mais aussi des plantes qui se propagent de proche en proche. Souvent, l’urbanisation isole les biotopes, rendant les échanges entre espèces difficiles; elle conduit aussi à l’appauvrissement de leur biodiversité. Pour bien fonctionner, un réseau naturel n’a pas forcément besoin que ses biotopes soient tous connectés directement, mais qu’ils soient nombreux, bien répartis et non cloisonnés, afin de pouvoir servir de relais de déplacement: une araignée voyage au-dessus de la route avec le vent portée par son fil, un hérisson passe par de petites ouvertures prévues dans les barrières, une grenouille traverse la circulation grâce à un petit tunnel installé sous la route. Une ville bien pensée peut offrir des avantages à la nature, car on peut y organiser des biotopes par étagements, et créer un réseau en trois dimensions (Braaker, 2012).

Services écosystémiques Ce sont les services fournis par les écosystèmes que nous utilisons tous les jours, et qui contribuent à notre qualité de vie. Comme par exemple: • L’épuration naturelle de l’eau lors de son infiltration dans le sol. • La nitrification et le recyclage de la matière organique par les êtres vivants du sol, qui permet de faire pousser des plantes décoratives et nourricières. • L’épuration de l’air et la production d’oxygène par les végétaux. • L’ombrage estival et le rafraîchissement de l’air ambiant par l’évapo-transpiration des arbres. • La rétention des eaux de précipitations par la végétation et le sol – ce qui diminue les risques de crue. • Les couleurs des fleurs et des feuillages, les parfums des fleurs, les chants des oiseaux, les stridulations des insectes chanteurs qui ont tous une action positive sur notre humeur. • Des espaces de ressourcement ou des beaux paysages naturels et culturels que l’on peut visiter. Ces services dépendent de la richesse de la biodiversité présente sur un lieu. Ils sont également perçus par la communauté comme biens collectifs et sont donc gratuits. Mais si l’on devait les remplacer par des infrastructures artificielles, ils seraient hors de prix.

Nature en ville Toute ville a une part de nature, même non souhaitée, car des animaux, des plantes, des champignons et des microorganismes parviennent toujours à trouver des niches pour s’installer. Quand on parle de « nature en ville », on parle d’une volonté de faciliter leur installation. C’est un concept de planification, de construction, d’aménagement, d’entretien et d’organisation sociale qui vise à permettre la cohabitation des espèces sauvages et des êtres humains en milieu urbain: planter des espèces sauvages indigènes au lieu de cultivars exotiques, créer des potagers urbains entretenus sans pesticides, faciliter les déplacements de la petite faune en créant des ouvertures dans les barrières et les murs, installer des nichoirs pour les oiseaux et les chauves-souris dans les arbres et sur les bâtiments, laisser des tas de bois et de branches qui restent intouchés toute l’année, monter des murs en pierres sèches, renaturer les espaces fortement minéralisés, végétaliser les façades et les toits, etc. (Programme Nature en ville, DGNP)

Biotope Un biotope est un espace de dimensions variables, capable d’offrir à l’ensemble des êtres vivants qui l’occupent, en permanence ou temporairement, des conditions de vie durable. Ainsi, un plant de tomates en pot sur un balcon, arrosé chaque semaine, peut constituer un biotope pour des insectes: une aire de repos, de ravitaillement et de reproduction. Une toiture végétalisée, illuminée par

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Prolonger les corridors biologiques régionaux et les connecter à la ville est capital pour amener la nature en ville et lui permettre de se régénérer. La nature en ville doit ainsi être pensée à toutes les échelles: la région, les quartiers, le bâtiment et ses extérieurs, et jusqu’aux détails de construction. Densité Dans ce travail, la densité se définit dans l’esprit de Vincent Fouchier. Pour un quartier, elle est à voir sous l’angle de la mixité des activités qui s’y déroulent et de l’intensité des liens qui existent entre ceux qui y habitent et y travaillent. Une grande densité – où se mélangent activités professionnelles, relations sociales, sports et loisirs – rend possible la vie de proximité, tout en réduisant la nécessité de se déplacer. Cependant, la densification seule ne suffit pas pour réduire l’étalement urbain. Il faut encore que la localisation des équipements publics – tels que les commerces, les écoles, les équipements sportifs et culturels – soient judicieusement placés dans le territoire, par rapport aux transports en commun et aux voies de mobilité douce.

«  Le  concept  d’écosystème  urbain  permet  d’affirmer  que  la  ville est bien un écosystème, mais un écosystème très ouvert, entièrement tributaire de l’extérieur pour toutes ses consommations d’énergie et de matière, et donc à la fois très fragile et fragilisateur de la biosphère dans son ensemble. » Caroline Rondel

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III. Genève et la nature

des réalités autonomes (Lavignotte et Schaefer, 2010). La science porte un regard nouveau sur la Création, et mène des recherches empiriques inédites. La Réforme permet ainsi de développer la théologie en parallèle avec les sciences naturelles. C’est à cette époque que commence à apparaître timidement le réseau de promenades genevoises, qui se développera à la fin du XVIIe siècle sous l’influence de la France. Selon les recherches historiques de Christine Amsler, c’est en 1558 que les premiers arbres apparaissent en ville. Des saules et des noyers sont plantés sur la Treille et les fortifications, pour célébrer la fin de la construction de la première enceinte de « type bas ». Un siècle plus tard, la Treille, dont le nom évoque une plantation en espalier ou en tonnelle, devient la première promenade publique genevoise intra-muros. Sa situation exceptionnelle lui confère vue et ensoleillement, et participe à son succès auprès des citoyens. Une simple rangée d’arbres est plantée afin d’ombrager le secteur. Dans la cour St-Pierre, devant la cathédrale, des arbres sont plantés dans des bacs de terre octogonaux. Les plateformes de défense sur le lac, ainsi que la promenade qui longe la muraille, sont également agrémentées d’arbres. Sur les faubourgs de la rive droite, des bandes de terre libres se tiennent à l’arrière des maisons. Les propriétaires y cultivent des jardins potagers ou des jardins d’agréments.

Relation entre la ville calviniste et la nature

La ville prend toujours plus de place sur le territoire et une proportion toujours plus grande de la population vit en milieu urbain, déconnectée de la nature. Le mode de vie urbain laisse même croire – à tort – qu’on peut se passer de la nature. Pourtant, les citadins ont besoin de cette nature, ne serait-ce que pour leur bien-être: ils la recherchent pour leurs loisirs, et la reproduisent artificiellement chez eux. Comment en est-on arrivé à un tel paradoxe? Pour en comprendre l’origine, on peut regarder par exemple comment, au cours de l’Histoire, les rapports entre la ville de Genève et la nature ont évolué. Jusqu’au XVe siècle, Genève, fut une petite ville fortifiée, et dense, siégeant uniquement sur la colline de la rive gauche du Rhône. Malgré ses imposantes murailles, Genève contenait des espaces réservés aux agréments et à la promenade, dont la plupart ont disparu lors des réaffectations successives qui ont modifié la ville (Amsler, 1993). Au XVe siècle, Genève étend ses faubourgs sur la rive droite, et devient une ville lacustre à cheval sur un fleuve. A cette époque, le « sauvage » n’a que très peu de place au sein de la cité et le « besoin de nature » que nous connaissons aujourd’hui aurait paru absurde. En effet, au vu de sa taille, les habitants peuvent la traverser à pied, et il est bien plus rapide pour eux d’en sortir pour se retrouver au milieu des champs. De plus, l’implantation de Genève sur une colline ainsi que la faible hauteur de son bâti laissait entrevoir le décor majestueux des montagnes, de la campagne et du lac.

XVIIIe siècle L’intérêt pour les sciences naturelles est plus fort que jamais, et en particulier pour la botanique: Rousseau, Saussure et de Candolle figurent parmi les scientifiques les plus connus. Genève n’est pas seulement appelée « cité de Calvin » mais aussi « cité des botanistes ». On fait entrer en ville l’air, la lumière et le végétal, dans le but d’améliorer la qualité de vie dans un centre très dense. A partir de 1718, de grands travaux militaires adaptent les fortifications aux nouvelles techniques et stratégies défensives (Amsler, 1993). Comme la nouvelle enceinte devient plus étendue que la ville qu’elle protège, on en profite pour y installer des promenades: la Grande Glacière, les Parapets et la Treille, qui reçoit les premiers marronniers plantés à Genève (originaires d’Asie mineure). On plante aussi de la verdure à l’intérieur des cours, comme par exemple dans la Cour du Collège. (suite page 18)

XVIe et XVIIe siècles Au XVIe siècle, la Réforme protestante bouleverse le mode de pensée par une rupture culturelle: l’abandon de la scolastique médiévale qui abordait la nature sous diverses significations symboliques. Au contraire, le protestantisme est alimenté par des pensées naturalistes, capables de considérer toutes les créatures de Dieu comme

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Ville de Genève Genève au XVIIe siècle D’après les gravures de la Ville de Genève par Matthäus Merian l’Ainé (1593-1650) et des gravures pour Pierre Chouet de 1655

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Ville de Genève au XVIIIe siècle D’après le plan C. Glot, 1777 source: Archives de Genève

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c’est le grand retour de l’urbanisme, qui rassemble les idées des ingénieurs, des sociologues, des architectes et des archéologues (Cogato Lanza, 2003). Cette discipline permet de réfléchir à la « ville idéale » et d’élaborer les outils nécessaires à anticiper le développement du territoire. Après la Seconde guerre mondiale, au moment où beaucoup de villes européennes subissent une grande pression due à l’exode rural, la ville de Genève s’agrandit et la campagne s’éloigne. On se préoccupe à nouveau de la qualité de vie en milieu urbain: comment garantir les réserves d’espaces naturels en ville? A cette question, les villes américaines répondent par le système de « Park way » (maillage vert, en français), dont s’inspire Genève pour son plan « Zone et liaisons de verdure » de 1948. Ce principe dégage des surfaces inconstructibles à l’échelle du territoire, tout en donnant une alternative aux parcs urbains. Le concept de maillage vert est un outil visionnaire pour l’époque, puisqu’il permet d’articuler les échelles de la proximité, de la ville et du canton, tout en répondant aux enjeux de qualité de vie, de paysage et de sauvegarde du patrimoine (Mokrani, 2009).

La ceinture fortifiée à la Vauban devient alors un lieu de plaisance. Les citoyens déambulent dans des jardins en contemplant la campagne environnante. En 1720, la peste réapparaît en Europe. Genève se barricade et contrôle sévèrement ses portes. Les citoyens sont privés de balade au grand air pendant presqu’une année. A l’arrivée de la belle saison, une promenade de fortune est installée sur l’espace compris entre les bastions Yvois et Bourgeois. Des bancs sont placés à l’ombre des ormes, formant ainsi la promenade des Bastions. XIXe siècle Le regard naturaliste persiste, et a une certaine influence sur le nouvel intérêt pour les Alpes et la protection de la nature. Cet intérêt se voit également dans la peinture romantique (1820-1850) qui remet en question la place de l’Homme par rapport à la nature. Cette fascination pour le grandiose coïncide avec une seconde grande transformation de la ville sous la direction de Guillaume Henri Dufour, ingénieur en charge de l’urbanisme de la ville. Grâce à son plan d’embellissement, il décide d’ouvrir Genève au lac. Il fait construire les quais, un front bâti ainsi que plusieurs ponts reliant les deux parties de la ville. Jusqu’alors, cette dernière était repliée sur elle-même, tournant le dos au lac. Dufour lui offre une nouvelle centralité: un grand plan d’eau, espace libre permettant au regard d’échapper aux constructions pour se poser sur le décor des montagnes – un véritable bol d’air, à l’heure où les villes européennes saturent sous la pression industrielle. La démolition des fortifications est votée en 1849. Elle permet enfin à Genève de s’étendre, pour mieux accueillir l’arrivée massive des populations rurales. L’espace gagné par la disparition des murailles conduit à « l’établissement de nouveaux quartiers et promenades et à la construction de bâtiments publics. » (loi du 15 septembre 1849). On organise le « Ring », c’est-à-dire la ceinture verte qui entoure la vieille-ville, composée de l’actuel parc des Bastions, de la promenade de l’Observatoire, de la place des Alpes, et de la promenade du Lac (aujourd’hui le Jardin Anglais).

Seconde moitié du XXe siècle De 1950 au début des années 2000, la population du canton a plus que doublé (Office fédéral de la statistique). Malgré cette explosion démographique et l’expansion rapide de la ville, Genève parvient à garder une ceinture de campagne autour d’un centre très dense. Le canton est planifié à l’échelle territoriale, à l’aide d’un réseau d’espaces verts, qui connecte les campagnes aux parcs, aux jardins, aux promenades et aux cordons boisés. Parallèlement, un vaste programme de renaturation des cours d’eau débute en 1997. Le canton de Genève montre une réelle volonté de tenir compte de la nature et du paysage. XXIe siècle Alors que le bassin genevois est promis à un grand développement – c’est le Projet d’agglomération – on se rend compte que la biodiversité est menacée partout sur la planète, et que la Suisse n’est pas épargnée. Il est urgent de donner plus de place à la nature, et en milieu urbain également, étant donné la surface que la ville promet d’occuper. (suite page 20)

Première moitié du XXe siècle Au cours de ce siècle, la vision de la nature en ville change d’échelle pour plusieurs raisons. Tout d’abord, entre 1910 et 1930,

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Ville de Genève Genève au XIXe siècle D’après le plan Grange, 1901 Source: SITG

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En 2012, Genève est le premier canton à se doter d’une loi sur la biodiversité dont un volet concerne la nature en ville. Le canton se donne les moyens légaux d’intégrer la nature à toutes les échelles – de la planification territoriale, jusqu’aux actions privées des citoyens. Le Programme « Nature en ville », lancé en 2013 par la Direction générale de la nature et du paysage, vise justement à sensibiliser tous les acteurs: propriétaires de terrain, professionnels de l’immobilier, milieux éducatifs, services communaux etc. Le but est de sensibiliser chacun à l’importance de la nature, comme de motiver et d’encourager des projets et des initiatives citoyennes qui facilitent la vie des espèces sauvages dans le décor urbain. On l’aura compris, l’architecte se doit de faire sa part, puisqu’il est un acteur important de l’évolution de la ville.

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Source: TETU, Hepia Genève

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Source: Etat de Genève

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IV. Que peut faire l’architecte? L’importance de l’architecte

Généralement, lors de l’élaboration d’un projet, l’architecte se préoccupe principalement du bâti. A la fin du développement, la composition des espaces naturels est confiée à des paysagistes, avec un simple concept de végétalisation. Tant que ce fonctionnement perdure, les constructions auront du mal à favoriser la nature. Pour que les choses évoluent, la nature ne doit plus être un simple paramètre ajouté au projet, mais elle doit être à la base du projet, et l’influencer comme le fait le contexte ou la forme de la parcelle. Un projet qui favoriserait la cohabitation avec les espèces sauvages devrait respecter le milieu naturel dans lequel il se situe, et intégrer les différents composants tels que: les points d’eau, les grands arbres, les passages naturels des animaux, le vent ou l’ensoleillement. L’architecte est l’un des rares professionnels à pouvoir influencer toutes les phases de développement d’un projet de construction: l’étude initiale, le concours, le projet, l’exécution et l’entretien. Or, dans un système de concours, l’architecte est bien souvent déconnecté de la phase d’étude, puisqu’il doit simplement matérialiser un programme déjà établi par les organisateurs. De plus, ses faibles connaissances en botanique et en faunistique lors du choix de la végétation du projet peuvent avoir de lourdes conséquences sur l’équilibre naturel du site et ses besoins d’entretien. Plus l’architecte pourra se préoccuper tôt de la question de la nature dans son projet, et mieux ce sera (Leutert, 1995), surtout s’il s’entoure d’experts! La nature finit toujours par coloniser tout ce que l’Homme a construit. Cependant, certains choix architecturaux lui faciliteront la tâche. S’ils sont bien prévus, les espaces extérieurs bâtis que les habitants peuvent s’approprier – comme les balcons, les terrasses, les escaliers ou les loggias – peuvent favoriser l’implantation de la nature. La matérialité peut aussi faciliter l’accroche de plantes grimpantes, d’algues et de lichens, qui auront bien plus de chance de s’établir sur une façade en brique ou en crépis rugueux, plutôt que sur un

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revêtement métallique ou de verre. Un détail de toiture bien pensé peut servir de nichoir aux martinets – ces oiseaux qui pouvaient nicher facilement sous les toits des anciens bâtiments. Accepter que la nature recouvre une partie de la construction, c’est peut-être se libérer des contraintes imposées par l’entretien?

à expérimenter les principes écologiques sur un nouveau quartier. En 1994, un concours est lancé pour définir le masterplan du futur éco-quartier de Viikki. Le projet doit intégrer 60’000 à 70’000 m2 d’habitation et de services, et répondre aux principes écologiques suivants: respecter le paysage environnant, et gérer de manière exemplaire l’énergie, l’eau et les déchets. Les organisateurs conseillent aux architectes de collaborer avec des ingénieurs en génie civil et en hydraulique, ainsi qu’avec des experts en écologie. Le concours est finalement gagné par le projet 60º15 Latitude northern, dirigé par l’architecte Petri Laaksonen. Le déroulement du concours est digne d’intérêt, car il impose aux participants l’élaboration d’une stratégie de gestion des paramètres naturels à l’échelle territoriale, avant la définition de la forme urbaine. L’équipe de Laaksonen a pris en compte quatre paramètres: l’eau, le vent, l’ensoleillement et le paysage environnant (la réserve naturelle). C’est la gestion de l’eau qui a le plus façonné le projet, puisqu’en Finlande il neige beaucoup et que le débit des rivières est très variable selon les saisons: dans la plaine de Viikki, il oscille entre 5 et 500 litres par seconde (Köhlni et Griffiths, 2005). En été, la plaine est sèche; en hiver, elle est gelée; et au printemps, elle est gorgée d’eau par la fonte des neiges.

Etudes de cas

Cette partie est dédiée à l’étude de trois cas réels d’architecture et d’urbanisme, dans lesquels une densification s’est accompagnée d’une intégration de la nature. Ces exemples ont été choisis parce qu’ils représentent bien les différentes échelles auxquelles on peut travailler: l’échelle territoriale, l’échelle d’un quartier et celle d’un bâtiment. L’éco-quartier de Viikki, à Helsinki en Finlande, est un exemple de densification de zone agricole sur laquelle on a installé des potagers et planté des variétés indigènes et comestibles: arbres et arbustes fruitiers, plantes aromatiques. Dans le quartier de Vauban, à Freiburg en Allemagne, on a réaffecté et densifié une friche militaire, tout en permettant à la petite faune sauvage de se déplacer. Et, dans le cas du supermarché de Basel Stücki, à Bâle en Suisse, on a densifié une friche industrielle, tout en favorisant la diversité et la qualité des milieux naturels. Dans l’étude de ces trois sites, le but est d’identifier les enjeux naturels préalables à la densification, de savoir comment on peut les préserver et en profiter, et enfin d’élaborer une stratégie de sélection et d’analyse de site.

Gestion de l’eau Le premier geste de l’équipe de Laaksonen est de détourner le ruisseau qui traverse le site pour le conduire à l’Est de la parcelle. Ceci permet de réunifier les deux parties du sites et d’éviter des inondations au sein du quartier. Par sa nouvelle trajectoire, le ruisseau délimite mieux la parcelle, et sépare le nouveau quartier des champs alentours. Son lit est renaturé, avec des bassins et des zones inondables, permettant de contenir les grands afflux d’eau. Avec cette nouvelle physionomie, la rivière et ses berges jouent le rôle de biotope, riche en plantes de zones humides, indigènes et capables d’absorber les excès d’eau. Dans le projet de Laaksonen, l’eau est gérée par tout un système de pentes, de gouttières et de micro-drainages, lui permettant de s’écouler du nord de la parcelle jusqu’à la partie sud du ruisseau. Ce système est formé de deux «mains» imbriquées l’une dans l’autre. Au Nord, la main «grise», carrossable, est constituée d’un revêtement

Eco-quartier de Viikki, Helsinki, Finlande

Viikki était une vaste zone agricole de 700 hectares, située à 8 kilomètres au nord d’Helsinki, à proximité d’une réserve naturelle protégée et traversée par un petit ruisseau. Aujourd’hui, 300 hectares ont été construits, incluant des quartiers résidentiels, le campus d’une université de biologie et de biotechnologie, ainsi que l’éco-quartier de Viikki. Le reste du terrain est couvert de champs et de forêts. Tout commence en 1989, lorsque la zone agricole change d’affectation pour du logement. Un an plus tard, le gouvernement finnois lance sa nouvelle politique de construction aux objectifs environnementaux. Cette décision pousse le Ministère de l’Environnement et l’Organisation professionnelle des architectes de Finlande (la SAFA)

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Eco-quartier de Viikki, Helsinki, Finlande Construction: 1998-2004 Densité: 16,6 ha, 1700 habitants (60’000-70’000 m2d’habitations, 102 hab/ha) Mixité: immeubles locatifs, maisons en ligne, maisons jumelées, 2 hôpitaux de jour, un centre médico-social, un centre des loisirs, une école et un commerce de premières nécessité. Quelles sont les possibilités de synergie avec l’eau?

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Ensoleillement Comme l’eau, le soleil varie beaucoup au cours de l’année. L’orientation des bâtiments se doit de prendre en compte ce paramètre. L’orientation nord-sud permet à la façade vitrée et aux panneaux solaires thermiques et photovoltaïques de profiter pleinement des apports solaires. Selon les modélisations d’irradiation solaire, les bâtiments ont généralement été bien orientés par rapport à l’utilisation de l’énergie solaire. Par contre, au Sud, la première ligne de bâtiments prive de soleil direct la ligne située juste derrière. En laissant plus d’espace entre les deux alignements, comme sur le reste de la parcelle, ce problème aurait pu être évité (voir les schémas d’irradiation solaire). On voit également que les « green fingers » profitent d’un très bon ensoleillement de par leur position: ils s’étendent sur un axe nord-sud, libre de toute ombre produite par une construction. C’est une situation idéale pour les potagers qui, en plus du soleil, bénéficient aussi d’un système d’arrosage naturel.

de sol imperméable, le « clay street » (Köhlni et Griffiths, 2005), un mélange de ciment, de limon et d’argile – on utilise notamment le trop plein de terre excavée pendant le chantier. Au Sud, la main verte est une zone piétonne, formée de revêtements perméables: chemins en terre desservant les maisons, et pelouses. Cette main verte permet de récupérer les eaux ruisselant depuis la surface grise, et de les ralentir avant de les diriger dans trois « green fingers » (Köhli et Griffiths, 2005). Placés le long de la main verte, ces « green fingers » sont recouverts de terre fertile, pour servir de potagers aux habitants. Ils absorbent une partie des eaux – ce qui leur assure un arrosage régulier – et le trop plein est dirigé vers le ruisseau qui les évacue dans la mer. Le terrain naturel argileux de Viikki ne permet pas d’absorber l’eau facilement, et présente donc un danger de pollution du ruisseau avant que ce dernier traverse la réserve naturelle. Combinée à une épuration mécanique, la main verte permet de limiter la pollution par ralentissement: sa végétation absorbe une partie des polluants, rendant l’eau à la sortie du quartier aussi claire que possible. L’implantation des bâtiments contribue aussi au ralentissement et à l’absorption des eaux. Ils sont orientés nord-sud, perpendiculairement au sens de ruissellement. Une barrière plus dense de bâti au nord permet de stopper le ruissellement sur la surface grise, et d’en diriger une partie directement dans les green fingers. A Viikki, les toits plats ne sont pas une bonne solution: une pente est vraiment nécessaire pour évacuer l’eau et la neige.

Intégration paysagère De nombreux espaces cultivables sont prévus dans le masterplan, puisqu’en plus des « green fingers », chaque appartement possède aussi un petit potager et une serre. Il y a là une volonté de donner aux habitants l’opportunité de produire leur propre nourriture. La gestion complexe des eaux prend ici tout son sens, et rappelle le contexte agricole originel du quartier. De plus, comme le masterplan a prévu de planter uniquement des variétés indigènes et comestibles pour nourrir les habitants et la petite faune, on évite que des plantes exotiques envahissantes se répandent dans la réserve. Ces vergers attirent des insectes pollinisateurs devenus rares dans les zones agricoles à cause des pesticides. Le fait que Viikki soit verdoyant durant toute la belle saison témoigne d’une gestion de l’eau réussie: le terrain reste humide, même pendant les périodes de sécheresse.

Vent Un vent dominant venant de la mer souffle sur Viikki. Pour diminuer son effet sur le quartier, une ligne d’arbres est plantée sur la limite sud de la parcelle. Grâce au système d’écoulement de la main verte, les arbres sont arrosés régulièrement, puisqu’ils se tiennent sur l’axe qui redirige les eaux dans le ruisseau. La forme générale des bâtiments est elle aussi déterminée en fonction du vent. En partant du Sud, les gabarits sont de R+1 dans les deux premières rangées, puis de R+2 dans les trois rangées suivantes, et enfin de R+3 dans les deux dernières. Cette disposition assure au quartier une silhouette aérodynamique face au vent.

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Main grise et main verte avec le système d’écoulement des eaux

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pente 2-3%

Les eaux de précipitations ruissellent sur les toits et sont dirigées au sol dans une rigole.

Cette rigole conduit les eaux vers les «green fingers» qui servent de potagers. Une partie des eaux est absorbée dans le sol, le reste file en direction du ruisseau.

Le surplus d’eau est déversé dans le ruisseau, qui lui-même se jette dans la mer. pente 2-3%

infiltration déblai avec haie 2m 2m

hautes eaux en période de fonte des neiges niveau normal 1m 1m

Le lit naturel du ruisseau lui permet d’absorber le surplus d’eau sous forme de piscine, ce qui régule son débit lors des grandes fontes de neige.

Le niveau du ruisseau varie au cours des saisons.

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Coupe-schéma nord-sud

Irradiation solaire, source: Retour d’expérience, quartier Viikki, Ville de Lausanne

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Vauban, Freiburg im Brisgau, Allemagne

Strasse et de Harriet Straub Strasse sont de bons exemples de prise en compte du déplacement de la petite faune dans l’architecture, grâce à une continuité naturelle gérée à la fois par le plan et la coupe – ce qui est plutôt rare dans un projet d’architecture.

Vauban est une ancienne friche militaire de 38 hectares, située à 3 kilomètres au sud du centre-ville de Freiburg. Un ruisseau la sépare d’une zone résidentielle et d’un terrain de jardins familiaux. En 1993, le Conseil municipal décide de transformer la friche en un nouveau quartier, et confie la tache à l’association Forum Vauban, constituée dans ce but. Pendant quatre ans, et avec la participation des futurs habitants, l’association élabore les principes et les plans du nouveau quartier. La construction se déroule en plusieurs phases, et commence en 2000 pour s’achever 8 ans plus tard. L’étude de cas se focalise sur deux îlots résidentiels situés dans la bande sud de Vauban – Gerda Weiler Strasse et Harriet Straub Strasse – qui illustrent la continuité naturelle entre la rue, la façade et le toit. En 2012, Sonja Braaker, de l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage WSL (Birmensdorf, Suisse), se penche sur la question des réseaux d’habitats à travers le domaine construit. Bien que cette problématique soit relativement nouvelle dans le monde de la recherche, Braaker tire des conclusions qui pourraient bien influencer l’architecture à l’avenir. Ses recherches montrent qu’en augmentant la fréquence des toitures végétalisées en ville, on améliore la qualité du réseaux naturel en milieu urbain: cela permet de développer la connectivité des habitats, et donc de faciliter les mouvements des espèces à travers la ville. Il ne faut pas oublier que ces déplacements s’effectuent dans l’espace, c’est-à-dire en trois dimensions. Les espèces animales ailées se meuvent dans toutes les directions très rapidement; elles n’ont donc besoin que d’une bonne fréquence du réseau naturel. Au contraire, les arthropodes (insectes, araignées, mille-pattes, etc.) se déplacent lentement et sur pattes; leurs mouvements sont facilités par des structures qui connectent deux habitats de hauteur différentes, telle une façade végétalisée. Les toitures végétalisées offrent un potentiel de prolifération de la biodiversité urbaine, à la fois comme habitat et comme support de déplacement. Leur hauteur les isole de tout dérangement humain, ce qui en fait de petits paradis pour les lézards et les oiseaux. Mais attention, les toits ne doivent pas être considérés comme des substituts pour les espaces rudéraux de sol, mais plutôt comme une valeur ajoutée pour la diversité des espèces et pour l’amélioration des zones urbaines naturelles (Braaker, 2012). Les îlots de Gerda Weiler

Continuité en plan Vauban est un quartier porteur d’un idéal participatif et communautaire, c’est pourquoi il y est interdit de cloisonner son jardin privé. Ce système permet d’unifier les jardins privatifs et les parcs publics. Situé au sud – et représentant environ 4 hectares – l’espace naturel est d’un seul tenant, et les surfaces perméables sont plus fréquentes que les imperméables (voir plans plus bas). Les routes « 20 km/heure » y sont peu présentes et n’affectent quasiment pas la continuité spatiale. Même l’implantation des bâtiments respecte cette continuité: des interstices entrecoupent les deux îlots de bâtiments. Il est alors facile pour les animaux qui viennent du ruisseau, au sud, de visiter les potagers. Les déplacements de la petite faune d’est en ouest sont, eux, moins directs, mais restent toujours possibles en zig-zagant autour des bâtiments – et toujours à l’abri des voitures. Malheureusement, ce vaste espace naturel est limité au Nord par la route et le tram, et au Sud par le ruisseau, ce qui l’isole des autres parties de Vauban. Toutefois, cet espace reste assez vaste, et vivable pour plusieurs hérissons, sachant que le territoire d’un hérisson mesure environ un hectare (pour manger, dormir et se reproduire). A Vauban, le territoire des hérissons n’est pas fragmenté par des routes dangereuses, contrairement à ce qui est généralement le cas en milieu urbain. La continuité des espaces naturels est aussi assurée en hauteur. Elle profite de toitures végétalisées situées à 13 mètres de haut, ainsi que d’arbres variants de 4 à 15 mètres de hauteur. Chaque arbre ou toiture devient ainsi un relais-biotope, dont l’ensemble forme un réseau dense. La connectivité entre ces éléments n’est pas linéaire (ils ne se touchent pas), mais leur haute fréquence permet de parler de continuité lorsqu’on se place à l’échelle des espèces animales: un écureuil franchit 3 ou 4 mètres de vide, un oiseau volète en restant à l’abri des feuillages, une abeille butine de proche en proche, une araignée se déplace en lançant un fil dans le vent... Les relais-biotope sont aux animaux ce que les stations sur l’auto-

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Eco-quartier Vauban, Freiburg im Brisgau, Allemagne Construction: 1993-2008 Densité: 38 ha, 5000 habitants (131 hab/ha) Mixité: immeubles d’habitation collectifs, maisons en bande, maisons jumelées équipement scolaire et commerces. Où sont les poches de biodiversité, et à quelle échelle? Peut-on améliorer les liaisons entre les poches?

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route sont pour les âtres humains: des aires de repos et de restauration en milieu hostile. L’architecte qui veut favoriser la nature dans ses projets doit tenir compte de cette réalité. Continuité en coupe Dans le quartier de Vauban, la connectivité des biotopes se remarque aussi en coupe. La continuité végétale entre la rue, la façade et la toiture est assurée par des pieds d’immeubles végétalisés de toutes parts, ce qui facilite l’implantation des plantes grimpantes. La rue est composée de quatre tranches successives: une chaussée de bitume, un caniveau en pavés pour évacuer l’eau, une bande de terrain de deux mètres de large – appartenant à la municipalité mais que les habitants peuvent cultiver – et enfin, un petit jardin privé avant l’habitation. Une cage d’escalier extérieure ainsi qu’une structure de balcons métallique sont fixées sur chaque immeuble. Elles servent de support aux plantes grimpantes, qui forment une connexion « linéaire »: un écureuil peut la suivre depuis le sol jusqu’au toit. Quant à eux, les balcons fleuris forment une connexion « fragmentée », dont la fréquence le long de la façade agit comme un relais-biotope. Les arbres servent aussi de connexion linéaire; et lorsqu’ils sont placés tout proche d’une façade, ils favorisent les liens avec les balcons. Par ces deux systèmes de connexion, des animaux de toute taille peuvent rejoindre les toitures et redescendre de l’autre côté de l’immeuble. En conclusion, la continuité de l’espace naturel dans les trois dimensions transforme le quartier en un réseau riche en lieux de vie et en possibilités de déplacements pour la petite faune – y compris de nombreux accès vers le ruisseau.

Plan des surfaces imperméables

Plan des surfaces perméables

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Perméabilité des déplacements de la petite faune

Réseau naturel entre 4 et 13 mètres de hauteur

Toitures végétalisées Bâtiments Jardins publics Jardins privés Routes et rues Places minérales

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Coupe longitudinale 1:1000

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Supermarché Basel Stücki, Kleinhüningen, Bâle

métrie rigoureuse regarde le site industriel, donnant un caractère urbain au parvis de déchargement. Du côté ouest, un voile de lierre et de vigne vierge assure un filtre visuel pour les logements voisins, dissimulant les escaliers de secours et la baie vitrée du café du supermarché (DETAIL, 2011). Au sud, la façade d’entrée est recouverte de bacs fleuris; elle accueille les clients avec ses couleurs qui rappellent les étalages d’un supermarché.

Au début des années 2000, Basel Stücki est une ancienne parcelle industrielle située au nord de la vieille-ville de Bâle, en friche depuis une vingtaine d’années. Elle est la frontière entre les silos de la zone portuaire et le quartier ouvrier bucolique de Kleinhüningen. On y accède en traversant le petit ruisseau de Wiesen qui se jette plus loin dans le Rhin. A l’époque, la société immobilière Tivona rachète le terrain et mandate les architectes Diener & Diener pour la construction d’un centre commercial. Le projet, en tension entre la ville et le quartier industriel, est complexe. C’est pourquoi Tivona fait appel à des architectes locaux qui connaissent bien les enjeux de la ville de Bâle. Ce projet est exemplaire pour deux raisons. Il montre à la fois comment les architectes peuvent réagir de façon cohérente et créative face à des contraintes écologiques légales, et comment la nature peut ouvrir une nouvelle dimension à l’architecture.

La nature comme vecteur de créativité La végétalisation du bâtiment est confiée aux paysagistes bâlois du bureau Beat Breitenfeld, dont le travail s’efforce de garantir la diversification des milieux naturels recréés. La dimension monumentale de la toiture végétale permet de mettre en place un milieu naturel pour compenser celui de la friche. Mais pas n’importe lequel. Les paysagistes choisissent de recréer sur le toit – à 25 mètres de hauteur – le milieu qui existait avant la ville: une plaine alluviale du Rhin. Reconstituer un écosystème local a trois avantages: assurer son autonomie (ce qui le rend plus durable), réduire ses besoins d’entretien (il n’a besoin que du soleil et de la pluie), et favoriser la petite faune locale. Les paysagistes installent cinq types de sol sur la toiture, avec différents substrats de différentes épaisseurs, sur lesquels ils sèment des essences végétales indigènes et sauvages (voir plan de toiture). Une partie de la toiture est plutôt caillouteuse, hébergeant des tas de bois, comme on pourrait en trouver au bord d’une rivière. D’autres, humides et couvertes de mousses, sont colonisées par des champignons. La variété des espèces végétales qui poussent sur un toit dépend de la composition du substrat. Si la toiture avait été recouverte d’un seul type de substrat, la biodiversité du toit aurait été bien moins riche. Deux systèmes de végétalisation des façades sont mis en place: à l’ouest, un rideau de plantes grimpantes; au nord, des plantes en pot qui répondent au contexte urbain de l’entrée. Ces deux systèmes sont très simples et ne nécessitent que de simples câbles tendus entre l’acrotère et le socle du bâtiment. Toutefois, les bacs de la façade nord demandent un entretien régulier pour l’arrosage, qui est assuré par un système de contrôle centralisé. Dans chaque bac, les arroseurs réagissent aux niveaux d’humidité (DETAIL, 2011). Les plantes de la façade ouest ne requièrent aucun arrosage parti-

L’influence des contraintes sur la forme urbaine La législation bâloise impose deux contraintes aux architectes: le supermarché doit connecter du mieux possible le centre ville et la zone industrielle, et doit compenser écologiquement la friche sur laquelle il se tient. Bâle est la première ville suisse à imposer la végétalisation de chaque toiture plate nouvellement construite sur son territoire. Le centre commercial n’échappe donc pas à la règle. Et puisqu’il recouvre une superficie d’un hectare de friche – où s’étaient développées des espèces sauvages depuis 20 ans – la ville demande aux architectes de libérer l’entièreté de l’espace de toiture pour la consacrer à une gigantesque surface végétalisée. Cette ordonnance influence complètement la forme du bâtiment. Les installations techniques, ne pouvant être placées sur le toit, sont contenues dans quatre tours de 38 mètres de haut, placées autour du bâtiment et prévues à cet effet. Leur forme fait échos aux silos de la zone portuaire. Les contraintes du cadre légal ont donc forcé les architectes à trouver une solution originale, rendant la silhouette du centre commercial nette et très épurée. La connexion entre la ville et la zone industrielle se lit également dans les façades, qui répondent aussi au devoir de compensation écologique. Chaque façade est conçue pour dialoguer avec le contexte qui lui fait face. A l’est, une façade rythmée par une géo-

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Supermarché Basel Stücki, Kleinhüningen, Bâle Densité: 1,4 ha desuperficie au sol, 34’000 m2 bâti Mixité: activités commerciales, restaurants, hôtellerie

Plan de situation 1:30’000, et coupes 1:2000 revue DETAIL 2011 nº3

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culier, puisqu’elles profitent de la pleine terre. Un pied de bâtiment végétalisé est une solution légère et peu coûteuse, contrairement à d’autres types de végétalisation de façade, tels les systèmes de plaques modulaires. Comme on peut le voir sur les plans de façades et de toiture, les espèces végétales sont choisies pour assurer la diversité. Elles ne fleurissent pas toutes à la même saison, certaines perdent leurs feuilles en hiver alors que d’autre persistent durant la saison froide. Cette diversification assure une longue période de floraison, et offre aux insectes et aux oiseaux de quoi se nourrir toute l’année. La richesse de la végétation est une clef pour promouvoir la diversité des oiseaux sur un bâtiment (Baumann, 2011). Plus grande est la variété végétale, et plus grande est la variété de vers, de mollusques et d’arthropodes qui y vivent. Plus longue est la période de floraison, et plus longue sera aussi la présence des insectes butineurs dont les oiseaux se nourrissent. La cohabitation d’essences indigènes sur la toiture et d’ornement sur la façade assure à la fois une réponse aux besoins des animaux et à l’esthétique du bâtiment – et les façades évoluent en forme et en couleurs tout au long de l’année (voir les schémas des paysagistes). En hiver, quelques plantes vivaces restent vertes à côtés de branchages dénués de feuilles; au printemps et en été, les phases de floraisons enveloppent le bâtiment de taches colorées qui laissent place ensuite aux fruits de l’automne. Le centre commercial se distingue des autres constructions à l’architecture permanente: il évolue avec un rythme saisonnier. La faune et la flore sont une palette dans laquelle l’architecte peut puiser, afin d’ajouter d’autres dimensions à sa création: bruits (chants des oiseaux, stridulations des criquets, bruissement de la végétation dans le vent), couleurs et senteurs (fleurs, feuillage et fruits), mouvements (vent dans les branchage et les prairies). Autant d’éléments qui enrichissent la perception vécue d’une architecture.

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Plan de toiture végétalisée 1:1’000, Fahrni und Breitenfeld Landschaftsarchiteckten BSLA

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Façade ouest

Concept de végétalisation et évolution saisonnière de la façade sud, revue DETAIL 2011 nº3

Façades est et sud, revue DETAIL 2011 nº3

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Détail de la façade sud 1:25, revue DETAIL 2011 nº3

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Synthèse

friches sont souvent occupées en priorité par des des plantes exotiques envahissantes qui se développent au détriment des espèces indigènes. A Vauban, la végétation est principalement constituée de plantes ornementales, plantées et gérées par les habitants, alors qu’à Basel Stücki, la toiture du supermarché offre une reconstitution d’un milieu naturel indigène. Si les habitants de Vauban se désinvestissent de la gestion des jardins et des potagers, le quartier assistera à une mutation du milieu naturel. Tandis que celui de la toiture de Bâle est capable de survivre sans aide – c’est ça la vraie nature.

De la densité attractive Ces trois exemples créent ou renforcent des pôles urbains, à la fois humainement denses et fonctionnellement mixtes. Chacun d’entre eux proposent un programme diversifié, mélangeant activités, commerces, logements et services, qui permettent de re-dynamiser une zone autrefois en transition. Leur emplacement est stratégique vis-àvis de la mobilité douce. Viikki est situé à proximité d’une ligne de bus principale, à 20 minutes du centre ville. Le quartier de Vauban rallonge une ligne de tram (qui traverse tout le quartier) et dispose d’un excellent réseau de pistes cyclables (13 minutes de vélo jusqu’au centre ville). Le centre commercial de Basel Stücki s’est installé à côté d’une ligne de bus existante, à laquelle on a ajouté un arrêt; une passerelle piétonne et cyclable au-dessus du ruisseau de Wiesen améliore le réseau de mobilité douce entre le quartier et le centre.

De l’architecture Dans les trois cas, l’architecture a dû s’adapter à des contraintes écologiques et environnementales. Toutefois, les résultats n’atteignent pas la même qualité architecturale. Les quartiers de Viikki et de Vauban sont peut-être de bons exemples du point de vue de la participation des habitants dans la gestion de l’eau et des espaces extérieurs, mais ils sont moins exemplaires au niveau de leur architecture. Leurs bâtiments ne possèdent pas vraiment d’unité, et leur mixité perd l’oeil de l’observateur, faute de ligne directrice à laquelle s’accrocher. A Vauban, ce phénomène est tel que c’est finalement la nature englobant le quartier qui en fait, seule, la cohésion. Au contraire, le centre commercial de Bâle est un bel exemple architectural: sa silhouette blanche s’impose sur son site et lui donne du sens et du lien. L’architecture et la nature qui la recouvre semblent dialoguer, ce que l’on ne retrouve pas dans les deux premiers exemples. Il est possible que cette différence soit due au déroulement des opérations dans l’élaboration des projets. Pour Viikki et Vauban, les quartiers se sont développés en plusieurs phases, espacées parfois de plusieurs années. Le projet de Viikki s’est déterminé avec un masterplan répondant aux contraintes naturelles du site, auxquelles l’architecture a dû se plier: la position, l’orientation, la forme, la hauteur et la typologie nord-sud des bâtiments ont été imposées aux architectes. A Vauban, après 4 ans de discussions intenses, c’est un forum participatif qui a instauré les buts de l’éco-quartier. Dans les deux cas, la gestion environnementale et la volonté de créer un éco-quartier ont précédé l’intention architecturale. A Bâle, au contraire, l’intention architecturale est à la base du

De la biodiversité Ces trois exemples prouvent que la densification urbaine n’est pas une barrière à l’intégration de la biodiversité dans un projet. Mieux, elle peut devenir un argument pour enrichir le milieu naturel existant. Malheureusement, il n’existe pas d’études comparatives sur la richesse de la biodiversité avant et après les travaux. Mais il faut savoir qu’une zone agricole moderne, contrairement à une campagne traditionnelle, est relativement pauvre en biodiversité. En effet, elle n’abrite que certaines espèces végétales sélectionnées pour la production de masse. De plus, les engrais, les pesticides et le tassement du sol par les engins agricoles nuisent à la biodiversité. Dans le cas de Viikki, l’implantation du nouveau quartier a permis de recréer une nouvelle biodiversité. Il est probable que le nouveau quartier attire plus d’espèces animales et végétales que la zone agricole qu’il remplace. Avant la construction de Vauban et de Basel Stücki, il y avait des friches qui sont des zones naturelles protégées en ville, puisque ce sont les derniers endroits sauvages dénués d’activité humaine. Mais du point de vue de la biodiversité, elles sont moins intéressantes qu’un parc conçu et entretenu pour favoriser la nature en ville. En effet, les

42


3. Peut-on améliorer les liaisons entre les poches? Un projet peut reconnecter des poches de biodiversité par le biais de l’architecture: une implantation judicieuse des bâtiments évite de fractionner le terrain; des installations extérieures peuvent servir de relais-biotopes, tels que des terrasses, des loggias, des balcons fleuris ou des toitures végétalisées. On se rappellera que le bâtiment peut être un support pour le déplacement des animaux.

projet, puisque Tivona mandate les architectes Diener & Diener pour élaborer le centre. L’architecture se plie aux contraintes écologiques de la ville, puis profite de l’intégration de la nature comme nouvelle dimension pour le bâtiment. La nature sert aussi l’architecture, puisqu’elle répond aux différentes facettes du site, rendant le bâtiment contextuel. L’architecture et la gestion des contraintes naturelles se font en parallèle; un aller-retour s’établit entre elles, sans que l’une ne subisse l’autre. A Basel Stücki, les architectes ont trouvé une combinaison idéale entre les deux; ils ont réussi à prendre les contraintes a parti pour embellir l’architecture, qui, en retour, sert aussi la nature. C’est peut-être ce que l’architecte devrait faire chaque fois qu’il veut intégrer la nature à un projet?

4. Peut-on préserver ou recréer un écosystème particulier? Il est important de se renseigner sur les conditions du milieu sur lequel le projet va s’implanter, afin d’y définir l’écosystème à favoriser. Un écosystème local, contenant des espèces sauvages indigènes, est bien mieux adapté aux conditions du site, et pourra survivre seul par auto-gestion. Un écosystème composé de plantes d’ornements sera certes plus coloré, mais demandera un entretien régulier. En choisissant un écosystème, on favorise certaines espèces animales ou végétales. Ce choix peut être orienté pour assurer la survie d’une espèce qui se raréfie.

Six clefs de réflexion

Les exemples de Viikki, Vauban et Basel Stücki permettent de tirer six clefs de réflexion pour aider l’architecte à identifier les enjeux naturels lors d’une analyse de site – et ceci dans le but d’intégrer la nature à toute les échelles pendant les différentes phases de construction.

5. Comment créer une variété de milieux? Le projet peut être une opportunité de diversifier les qualités naturelles du milieu existant. L’ombrage, l’ensoleillement ou les zones protégées de la pluie et du vent peuvent créer des biotopes qui varient en humidité et en température. De même, la composition du sol et les aménagements extérieurs peuvent favoriser certaines espèces sauvages qui avaient disparu du terrain. Pour avoir une grande biodiversité, il faut à la fois de la variété et de la qualité (Braaker 2012).

1. Quels grands arbres préserver? Les grands arbres sont particulièrement précieux, et il faut chercher à les conserver, surtout les espèces indigènes. Ils sont des lieux de vie pour de nombreuses espèces sauvages. Ils procurent un ombrage salutaire en été. Ils refroidissent l’atmosphère par leur transpiration, et réduisent la pollution de l’air. Il faut se rappeler que des dizaines d’années sont nécessaires pour obtenir un grand arbre, et que, lorsqu’on le coupe, c’est un îlot de biodiversité qui disparaît.

6. Quelles sont les possibilités de synergie avec l’eau? L’eau est un paramètre essentiel au bon développement de la biodiversité sur un site. Une rivière joue le rôle de couloir biologique pour le déplacement de la faune et de la flore à travers une ville. Un étang est un point de chasse, de désaltération et de reproduction. Un site peut être dénué de point d’eau, mais il sera toujours alimenté par des précipitations, dont on peut gérer l’eau au profit de la nature. A Genève, la hauteur moyenne annuelle des précipitations varie entre 800 et 1000 litres par mètre carré!

2. Où sont les poches de biodiversité, et à quelle échelle? Les poches de biodiversité peuvent être de différentes tailles: un arbre, un étang, un jardin, un parc, un champ ou une portion de rivière. En ville, elles sont souvent isolées par l’urbanisation. Ces poches s’appauvrissent lorsque les espèces qu’elles abritent ne peuvent plus se rencontrer. C’est pourquoi il est important de les identifier avant de commencer un projet, afin de proposer des solutions architecturales qui améliorent leurs connexions.

43


44


V. Application sur une zone villas de Thônex

Processus de choix de site Le choix d’un site adapté à la thématique de la densification qui favorise la nature en ville s’est fait en 4 étapes. 1ère étape: le site doit être placé stratégiquement par rapport au réseau de mobilité douce. Ici le tracé du CEVA et de ses gares.

45


2e étape: le site doit être situé dans un périmètre de 300 ou 500 mètres autour d’une gare du CEVA.

46


3e étape: le site doit être en relation avec la Voie verte de liaison ferroviaire CEVA (en traitillé vert foncé) et situé dans le périmètre de l’ensemble des sites stratégiques amenés à dialoguer avec la voie verte du CEVA (en vert clair).

47


4e étape: le site doit être de faible densité.

48


Analyse

Chemin de la Mousse, Thônex, Genève Superficie: 3 ha Mixité: Activités économiques, Département de l’intérieur, de la mobilité et de l’environnement, voirie cantonale, villas

Voie verte d’agglomération Rivière La Seymaz Projet pour la nouvelle gare de Chênes-Bourg Bâtiments de la parcelle retenue

49


Plan représentant les différentes densités (d’après les données des SITG)

Forte densité (indicative), îlots urbains et ensembles modernes

Zone péricentrale à forte densité

Moyenne densité (indicative), ensembles modernes

Zone de centre de village

Faible densité (indicative), zone de villas anciennes et/ou de création récente

Zone périurbaine à faible densité

Espace vert de limite ou de transition

Zone d’activités économiques Zone centrale à très forte densité

Plan des zones d’affectation (d’après les données des SITG)

50


Relevé des équipements du quartier (d’après les données des SITG)

Equipements scolaires Activités économiques et commerces Equipements sportifs Centres des loisirs Centres médico-sociaux

Coupe transversale

Coupe longitudinale, en rouge: les grands arbres présents sur le site 50 m

51


La Voie verte d’agglomération

dont la nidification est très rare en Suisse. On y trouve également des tritons alpestres et des tritons palmés, des grenouilles rousses et de nombreuses espèces de libellules – indices de grande biodiversité. Si les abords de la Seymaz sont riches en biodiversité, la qualité de ses eaux est encore insatisfaisante. On y voit notamment très peu de truites. Un réseau de promenades s’étend le long de la rivière et s’agrandira avec la connexion de la voie verte.

Cette voie verte est un itinéraire de 22 km, dédié à la mobilité douce, traversant le canton de Genève pour relier le centre d’Annemasse (Haute Savoie) avec celui de Saint-Genis (Ain). Elle relie les espaces verts importants de la ville, et permet de préserver le paysage. De plus, elle est elle-même un couloir biologique qui en relie plusieurs autres (Projet d’agglo franco-valdo-genevoise, 2009).

La Voie verte de la liaison ferroviaire CEVA

Le Foron (rivière)

C’est le tronçon de la Voie verte d’agglomération situé entre la gare des Eaux-Vives et la rivière Foron (Frontière franco-suisse). Elle fait partie des mesures de compensation de la construction du CEVA. Ce tronçon recouvre le tunnel du train; elle est à la fois une voie de mobilité douce et un corridor écologique. Son aménagement a déjà été élaboré (voir schéma d’aménagement de la voie verte). La Voie verte de liaison ferroviaire CEVA est connectée à deux couloirs biologiques proche du site analysé: ceux des rivières Seymaz et Foron. Cette connexion permettra à la faune et à la flore de se déplacer plus facilement à travers le territoire genevois.

Le Foron prend sa source sur le côté ouest des Voirons, en France, et se jette dans l’Arve, à Genève. Il est également un couloir biologique pour la faune terrestre et aquatique, qui se déplace de Jussy vers l’Arve. Parfois, de grands animaux, tels des sangliers, des chevreuils ou des cerfs l’utilisent depuis les Voirons pour rejoindre les forêts genevoises. Son cordon boisé varie fortement, entre paysage urbanisé et forêt riveraine, hébergeant de nombreuses espèces sauvages: putois, martins-pêcheurs, poules d’eau, chouettes chevêches, couleuvres et salamandres. Le Foron est connecté au lac de Machilly, ce qui lui permet d’être peuplé par bien plus d’espèces de poissons que la Seymaz. La voie verte permettra de refermer la boucle de la balade entre la Seymaz, le chemin Sous-Ville et le Foron.

La Seymaz (rivière)

La Seymaz naît au canal de la Touvière (Meinier) dans une zone marécageuse drainée à la fin du XIXe siècle pour laisser place à l’agriculture. Aujourd’hui, la zone est renaturée et a retrouvé sa qualité de marais: c’est un biotope très prisé des oiseaux migrateurs. Les prairies humides de la Touvière sont le troisième site genevois le plus important pour les oiseaux migrateurs, après le lac et le Rhône. Les marais de la Haute Seymaz sont également reconnus d’importance nationale pour la reproduction des batraciens. En aval, un cordon boisé pénètre dans la ville et sert de couloir biologique pour la faune et la flore. Il peut être emprunté par un blaireau, un lièvre ou une hermine, qui apprécient ses fourrés. Le renard et la fouine l’utilisent aussi pour pénétrer dans la ville afin d’y fouiller les poubelles. Les chauve-souris chassent les insectes au-dessus du cours d’eau que les castors empruntent aussi. La plaine de la Seymaz est appréciée par les oiseaux nicheurs ou de passage, tels que la cigogne blanche ou le vanneau huppé

La Seymaz Le Foron

Voie verte d’agglomération

52


Plan des surfaces perméables

Voie verte d’agglomération Cordon boisé et parcs Surfaces perméables Rivière La Seymaz Fractionnement du territoire par les haies et les barrières

53


La voie verte CEVA représente le tronçon de la voie verte d’agglomération situé entre la gare des Eaux-Vives et la rivière du Foron (Frontière Franco-Suisse). Elle est liée à la réalisation de la liaison ferroviaire CEVA et fait partie des mesures de compensation du projet. Il est donc impératif de mettre à niveau l’étude d’aménagement du tronçon situé entre la rivière du Foron et la gare d’Annemasse avec celle de la voie verte CEVA afin d’en assurer continuité et praticabilité de manière simultanée.

Figure 6: Principe d’aménagement de la voie verte in « Concept des aménagements subsidiaires et annexes à la création d’une voie verte » (CEVA, 2007)

Projet d’aménagement de la La Voievoie verteverte d’agglomération, Document du Projet d’agglodouce franco-valdo-genevoise CEVA consiste en uncadre réseau de mobilité couplé à un corridor écologique

implanté sur la couverture de la tranchée couverte de la future liaison ferroviaire CEVA.

54 des aménagements subsidiaires et annexes L'étude CEVA a conduit à l’élaboration du « Concept à la création d’une voie verte ». Cette étude définit la voie verte, propose des scénarii


1-52 1-45

2006 4252

COUPE schématique AA

40-6

1-31

27-3

e

1-2-

3565

.-A

3707 3541

416-

Ru e

2622

Lo uis

35-

4353

eP Ru

3563

N LO EIL

X NE

3886 3-33

3-35

Ma rtin

3084 3086

2560

4032

4112

Arbres à planter / à abattre 3345 3134

A

Chemin de la Mousse

Av en ue de Be l-A ir

Rez

4065

A1: Rez+7+A

3704

3702

H max.= 25m

Vélos

r-G 2478 eo rg es -A

206-

1-84

4252

I

2071

40-8

4176

COUPE schématique BB

e Ru

3565

35-4

.-G RI SO N

35-5

.-A

1630

307-

RD EA RR PE

1-16 1717

3-54

ée entr ing park

3080

4223

3707 3541

416-

Ru e

3-55 2622 356

AV RE

358 4226

4353

353563

e Ru

NE ON ILL PE

X

3886 3-33

Timbres :

3-32 3-35

3885

Plan de la gare de Chêne-Bourg, 1:4’000, République et canton de Genève

Vues du projet pour la gare de Chênes-Bourg, EMA Architectes

55

Adopté par le Grand Conseil le :

10e étage

Echelle

5e étage

Rez

421,50

1 / 1000

Date

04.02.2008

Dessin

MR

Chemin de la Mousse

Code GIREC Secteur / Sous-secteur statistique

Code alphabétique

13- 00 - 030 et 13- 00 - 040

Modifications Indice

2-85

3887

Pla ce

30-7

4222

4170

35-6

357

Lo uis -

15e étage

4173

ois nç ra

2115

en èv4216 e

Visa :

4171

3331

4210

4213

Adopté par le Conseil d'État le : 26 juin 2013

19e étage

40-6

27-1

4072

3--6

5726 3214

4113

4208

4464

4025

3668 1-33

1-31

1-2-

eG

m

H max.= 21 m

4114

2703

4214 1-52 1-45

27-3

1-86

Ru ed

H max.= 22

1-42 2088

4462

C1:Rez+6+A

3-53

1-44 2006

PA TT

3-52

3-56

B

Din u-LI

4281

3-51

3-50

1713

Rue rançois-JACQUIER

Par c

ÉO 1-51 UD

5600

A

3428

C2: Rez+5+A

1-50

UD

2005

Le plan localisé de quartier comporte un Concept énergétique territorial N°2012-07 (cf. art.11 al. 3 de la LEn, du 18 décembre 1986 - RSG L 2 30), validé par le service de l'énergie le 27 juin 2012.

2880

Vélos

LIMITE DE PARCELLE

Ru eD

Vélos

2004 1-83

4110

H max.= 61 m

Vélos

Ch em in d e la

3210

4253

Ce PLQ a fait l'objet d'une étude d'impact sur l'environnement (EIE) première étape, au sens de l'article 10 LPE daté d'octobre 2008 mis à jour en septembre 2011.

entrée parking sortie parking 3317

Vélos

420-

4045

Ce PLQ remplace et abroge le PLQ 28358 adopté par le Conseil d'Etat le 16 mars 1992

2238

4310

GARE de CHENE-BOURG Avenue de Bel-Air, Chemin de la Gravière.

2-78

2-80

roues

B: Rez+19

3705

3424

Plan localisé de quartier

284-

2847

4174

Vélos

3703

Parking deux

Accés gare CEVA

A2: Rez+7+A

H max.= 25m

4175 320-

430-

2-02

36--

Gra viè re

4311

I

Che

Secours gare

2703, 3080, 3668, 4025 part.,4065, 4073, 4074, 4075, 4098, 4113, 4114, Dp 4172, Dp 4174, Dp 4175.

2-76

2850

Accés gare CEVA

4172

Parcelles N° :

38-2

3-6-

2-7-

Secours gare

IPA TT

2845

3177

Secours gare

Din u-L

2844

Secours gare

4312

Pa rc

2838

N° 182

Rez

Feuille Cadastrale: 18

2-77

2-64070

D

roues

2-74

3818

342-

4368

Avenue Édo uard-BAU D

4313

3685

4178

4071 3485

38-3

de

2-71

3-06

Parking deux

la M ouss e

3124

3238

3463

3486

Direction des plans d'affectation et requêtes

CHÊNE-BOURG

Chemin de la Mousse

3301

4063

4073

4308

DÉPARTEMENT DE L'URBANISME Office de l'urbanisme POST TENEBRAS LUX

min

3804

4305

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE 573- 27-4180

4075

4306

Emplacement indicatif pour deux roues CEVA

4458

4177

3844074

Parking deux roues

4456 4457

14-2

3087

Bâtiment à démolir

445-

3200

3101

3-40

4182

Chemin Cavussin

3088

Eléments figurant à titre indicatif (selon art.3, al.3, LGZD)

B

2302

3314

tique

lling es

4357

4205

1767

Ave nue Hel vé

4206

sA

PLAN D'AMENAGEMENT (article 3, alinéa 1 LGZD et LEXT). 3-45

Cession gratuite au domaine public communal.

4360 4030

Le concept énergétique de quartier d'avril 2007 a mis en évidence le potentiel géothermique du sous-sol; l'emprise au sol pour l'éventuelle mise en place d'un réseau de chaleur et/ou froid entre les différents bâtiments du projet devra être réservé. Un emplacement pour un poste de transformation devra être réservé d'entente avec les services industriels de Genève. Liaison piétonne

Servitude d'usage public, la réalisation est à la charge des constructeurs et l'entretien courant de la surface extérieure est à la charge de la commune.

Chemin de la Mousse

421,50

Rez

3885

Ave nue de

Av en ue de la

3652

3651

3e 2e 1er

2-85

3887

ière

Pla c

1843

3478

3002

27-5

Emprise maximale des bassins et fossés de rétention. Ce périmètre fait l'objet d'un concept de gestion quantitative des eaux pluviales, défini dans le schéma directeur des eaux pluviales. Servitude de distance et vues droites au profit des parcelles 3429, 3463, 3485, 3486, 3906.

3-32

e

30-7

3004

2473

Bât A1 A 7e 6e 5e 4e

4170

35-6

356 358 4226

4222

LIMITE DE PARCELLE

3080

357

en èv4216 e

3--6

4464

3073-54

3-55

AV RE

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4462

35-5

1630

LIMITE DE PARCELLE

ON .-G RIS

1717

RD

4213

35-4

1-16

EA RR PE

4208

is ço

3331

4210

4173

n ra

2115 27-1

4072

4113

Ru

1-86

-Les canalisations d'eaux claires et d'eaux usées seront exécutées en système séparatif et raccordées aux futurs collecteurs, à mettre en place conformément au plan directeur de gestion et d'évacuation des eaux polluées et non polluées de l'ensemble du secteur. Les volumes de rétention devront être respectés par l'aménagement des bassins et du fossé central afin de respecter les contraintes de rejet dans la Seymaz qui est actuellement de 10l/s/ha pour un temps de retour de 30 ans.

Eaux claires projetées Eaux usées projetées Eaux mélangées exist. Eaux claires existantes Eaux usées existantes

1-33

1-42 2088

LIMITE DE PARCELLE

TI

Rue rançois-JACQUIER

inuLIP AT

4281

Ave nue des Gra ndsMon ts

Par cD

3428

Objets

Date

Dessin

Synthèse enquête technique Corr. légende cessions et titre lext. Corr. légende + périm. implant. A Corr. DAB Corr. Gare CEVA PAP compl. CEVA + Périmètre Stationnement + places gares Adaptation suite au concours Préavis CM

17.09.2008 04.11.2008 02.06.20030.06.2009 19.02.2010 12.05.2011 17.10.2011 22.05.2012 21.11.2012

MR MR MR MR MR MR MR AP AP

Code Aménagement (Commune / Quartier)

512

CBG Plan N°

Archives Internes

CDU

711.5

29683

Indice


Bibliographie

nature and society?, S. Braaker, M. Obrist, F. Bontadina, M. Moretti, Swiss Federal Research Institute WSL, 2012

Surélévations Philosophie et histoire de la nature

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La Pensée Paysagère, Augustin Berque, 2008, Archibooks

Informations de l’Etat et de la Ville de Genève

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Les promenades publiques à Genève de 1680 à 1850, Christine Amsler, 1993, Maison Tavel Genève

Place à la nature en ville, M.Ritter, 2000, OFEFP

Une spécificité protestante?, Stéphane Lavignotte et Otto Schaefer, 2010

M 5 15 LBio, loi sur la biodiversité

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Stratégie Biodiversité Suisse, Confédération Suisse, 25 avril 2012 http://www.grand-geneve.org/enjeux-strategie/nature-paysage, corridors biologiques

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Green Roofs in Switzerland, Nathalie Baumann, journal City Green nº 2, 2011 Toitures végétalisées: Plus-values et état des lieux, Nathalie Baumann, Journée de formation «intégrer la nature dans la construction des bâtiments», Hepia, 2011

Le Foron, Fiche rivière nº8 - 2e édition, République et Canton de Genève

Réseaux d’habitats

http://www.cbobook.org/?r=1&width=1920, annuaire international de la biodiversité

Ville et nature

Enhancing ecosystem connectivity through intervention - benefits for

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www.vauban.de

Ville et biodiversité, Philippe Clergeau, Presses universitaires de Rennes, 2011 Naturopolis : New York, la révolution verte, Bernard Guerrini, film documentaire, 2012

Guidebook of Sustainable Neighbourhoods in Europe, ADEME, 2008 www.urbangreenbluegrids.com

Urbanization, Biodiversity and Ecosystem Services : Challenges and Opportunities, T. Elmqvist, M. Fragkias, J. Goodness, B. Güneralp, P. J. Marcotullio, R. I. McDonald, Springer Open, 2013

Potagers urbains, collective garden, Guerilla gardening Jardiniers clandestins, Mélanie Pitteloud, film documentaire, Canada, 2008

Cities and Biodiversity Outlook, Action and Policy, A Global Assessment of the Links between Urbanization, Biodiversity and Ecosystem Services, Secretariat of the Convention on Biological Diversity, 2012

L’avenir reste serein pour les légumes urbains, Claire-Lise Genoud, Magazine Droit au logement, nº210, Mai 2013

Enquête représentative - Les Suisses veulent une urbanisation plus dense et plus verte, ProNatura, 24.09.2013

Préservation du sol et richesse du vivant

Vivre en ville, Office fédéral de l’environnement OFEV, Magazine environnement: les ressources naturelles en Suisse nº4, 2012

Irremplaçable sol, Office fédéral de l’environnement OFEV, Magazine environnement: les ressources naturelles en Suisse, G. Poffet, C. Wenger, M. Lezzi, nº4, 2011

Que cache le succès de la nature en ville?, Emmanuel Liederman, Les Urbanités (rts.ch), 8.02.2010

L’urbanisation grignote les terres agricoles, Pro Natura, Pro Natura magazine, nº4, juillet 2009

Conférence Nature en ville, Romain Kilchherr (EDMS ingénieurs), Laboratoire d’Architecture et Technologies durables, 2013

Richesses du vivant, Office fédéral de l’environnement OFEV, Magazine environnement: les ressources naturelles en Suisse, F.V. Schwarz, A. Stalder, C. Wenger, M. Lezzi, nº2, 2013

Etudes de cas

La Charte des jardins : http://www.charte-des-jardins.ch

Retour d’expérience quartier Viikki, Ville de Lausanne, http://www. lausanne.ch/lausanne-en-bref/lausanne-demain/projet-metamorphose/ domaines/ecoquartier/

Densité et nature Peu de surface, beaucoup de qualité: des visions d’habitat pour la Suisse, Pro Natura, Pro Natura magazine nº3, mai 2011

Eco-Viikki, Aims, implementation and results, Kristina Köhlni et Gareth Griffiths, Ministère de l’Environnement de Finlande, 2005

Concentration plutôt qu’étalement: le début d’une nouvelle ère en Suisse?, Pro Natura, Pro Natura magazine nº4, juillet 2012

Urban guide of Helsinki, Helsinki City Planning Department Finland, Gummerus Printig, 2006

Green Density, Emmanuel Rey, Architecture Album, Presses polytechniques et universitaires romandes, 2013

Retour d’expérience quartier Vauban, Ville de Lausanne, http://www. lausanne.ch/lausanne-en-bref/lausanne-demain/projet-metamorphose/ domaines/ecoquartier/

Les densités urbaines et le développement durable : le cas de l’Ile de France et des villes nouvelles, Vincent Fouchier, Secrétariat général du groupe central des villes nouvelles, 1998

Association du quartier Vauban, Quartier Freiburg Vauban, 2007 Stücki-Einkaufszentrum in Basel, DETAIL, nº3, 2011

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Projets futurs pour Genève Urbanisme végétal et agriurbanisme, A. Da Cunha, E. Boutefeu, N. Blanc, C. Philippe, A.-M. Mokrani, N. Niwa, R. Vidal, A. Fleury, Urbia les cahiers du développement urbain durable, Observatoire universitaire de la Ville et du Développement durable, nº8, juin 2009 Voie verte d’agglomération, document cadre, Projet d’agglo franco-valdo-genevois, Cahier nº15-1, Avril 2009 Plan directeur cantonal Genève 2030, adopté par le Grand Conseil le 20 septembre 2013 Plan directeur de commune de Chêne-Bourg, Etat de Genève Plan directeur de commune de Thônex, Etat de Genève www.ge.ch/sitg, Système d’information du territoire à Genève http://www.ge.ch/themes/themes_amenagement.asp#01

Crédits photographiques Page 4: exposition «Photos, Architecture et Biodiversité: Patrimoine d’Île de France, 2011. D.R. Page 10: IIya Boyandin Page 14: BGE, Centre d’iconographie genevoise Page 44: Ray eye Pages 24,38,40: Julia Magnin

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« More density, more nature » – Que peut faire l’architecte?

Enoncé théorique de Master d’Architecture sous la direction d’Emmanuel Rey. Professeure: Monique Ruzicka-Rossier Maître EPFL: Sophie Lufkin Expert: Laurent Daune

Julia Magnin, Janvier 2014, EPFL



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