L'uranium océanique : future corne d'abondance énergétique Par Michel Gay Le 17 janvier 2015 N°95 Grâce à notre superbe stock stratégique d’uranium déjà disponible en France, les Français ne manqueront pas de matière première énergétique pour produire de la chaleur et de l’électricité pendant des milliers d’années dans les réacteurs nucléaires surgénérateurs en développement dans le monde. Cependant, quand ils auront des difficultés d'approvisionnement en uranium "terrestre", des pays bordés par une côte maritime pourront aussi retirer de l'uranium de l’eau de mer s'ils n’ont pas la chance de posséder un tel trésor... En effet, bien que cette possibilité d'extraction de l'uranium de l'eau de mer soit difficile et couteuse, elle offre l’avantage de n’avoir rien à demander à des pays étrangers. De plus, elle laisse entrevoir des ressources quasiment infinies de "combustibles", à l’échelle humaine, pour les réacteurs nucléaires surgénérateurs. La mer contient 3 mg d’uranium par tonnes, soit mille fois moins que la croûte terrestre en moyenne (3 g par tonne1). Mais la mer est grande. La réserve potentielle est évaluée à 4,5 milliards de tonnes, soit mille fois plus que les réserves connues sur terre (environ 4,5 millions de tonnes2). Il existe aujourd’hui au moins deux procédés pour l’en extraire avec des adsorbants3. L’un utilise les courants de marées, l’autre les courants marins océaniques). Le coût de ces méthodes de « ramassage » est de cinq à dix fois plus élevés (500€ à 1000€/kg) que l’extraction classique des mines terrestres (100€/kg en 2014). Les rendements restent faibles (environ 1g par kg d’adsorbant et par mois) et d’immenses filtres sont nécessaires (plusieurs km de long) pour extraire de faibles quantités (quelques centaines de tonnes par an), mais… ça n’a pas d’importance ! En effet, cet uranium « océanique » sera destiné à alimenter des réacteurs nucléaires surgénérateurs qui ne consomment qu’un kg d’uranium pour produire 7 millions de kWh4. Même à 1000€/kg, le coût de l’uranium dans le prix du kWh d’électricité (vendu 13 c€ aujourd’hui en France, et près de… 30 c€ en Allemagne), sera de 0,02c€, c’est-à-dire… rien. Le coût d’extraction pourrait être multiplié par dix encore que ce serait toujours rentable. Cependant, tant que l’uranium terrestre sera abondant, disponible et beaucoup moins cher à extraire que l’uranium océanique, ce dernier ne sera pas exploité. Il peut s’écouler plusieurs millénaires avant que les réserves d’uranium terrestre, ainsi que celles issues de l’activité nucléaire passée, commencent à se tarir pour les surgénérateurs.
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Cette concentration varie selon la nature du sol, mais l'extraction de terre d'un trou de 10 m de côté dans un jardin en France contient 3 kg d'uranium, plus dans le Massif-central, en Bretagne et dans les Alpes (sol granitique), moins en Picardie. 2 http://www.connaissancedesenergies.org/fiche-pedagogique/reserves-d-uranium-naturel-dans-lemonde 3 Hydroxyde de titane, ou amidoxyme, ou des composés organiques. 4 Un réacteur surgénérateur de 1 Gigawatt fissionne une tonne d'uranium par an pour produire environ 7 TWh (térawatt-heure = milliard de kWh).
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